Avis n° 103 (2005-2006) de M. Louis SOUVET , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 24 novembre 2005

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N° 103

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2005-2006

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 novembre 2005

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de finances pour 2006 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME VII

TRAVAIL ET EMPLOI

Par M. Louis SOUVET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente, Patricia Schillinger, M. Jacques Siffre, Mme Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 2540 , 2568 à 2573 et T.A. 499

Sénat : 98 et 99 (annexe n° 33 ) (2005-2006)

Lois de finances .

Les crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2006

Programmes

Crédits de paiement (en euros)

Variation 2006/2005 (en %)

Développement de l'emploi

880.534.000

- 95,2

Allégement de cotisations sociales

569.090.000

- 96,9

Promotion de l'emploi

311.444.000

+ 60,2

Accès et retour à l'emploi

7.102.404.500

- 0,65

Indemnisation des demandeurs d'emploi et rapprochement de l'offre et de la demande d'emploi

2.865.905.078

+ 3,57

Mise en situation d'emploi des publics fragiles

4.236.499.422

- 3,32

Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques

4.385.527.921

- 9,8

Anticipation des mutations et développement de la mobilité professionnelle

529.583.857

- 15,6

Amélioration de l'accès des actifs
à la qualification

3.855.944.064

- 8,9

Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail

81.973.000

+ 28,0

Santé et sécurité au travail

26.900.000

+ 13,5

Qualité et effectivité du droit

24.853.000

+ 153,7

Dialogue social et démocratie sociale

30.220.000

- 1,1

Lutte contre le travail illégal

0

-

Conception, gestion et évaluation
des politiques de l'emploi

723.897.662

+ 12,9

Gestion du programme « développement de l'emploi »

26.015.000

- 2,0

Gestion du programme « accès et retour à l'emploi »

78.045.000

+ 11,5

Gestion du programme « accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques »

78.045.000

+ 3,2

Gestion du programme « amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail »

161.293.000

+ 24,6

Soutien

338.110.419

+ 9,2

Études, statistiques, évaluation et recherche

42.389.243

+ 41,0

Total mission « Travail et emploi »

13.174.337.083

- 57,2

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Les crédits affectés à la mission « Travail et emploi » dans le projet de loi de finances pour 2006 s'élèvent à un peu plus de 13,1 milliards d'euros, alors que le budget de la section travail, voté en 2005, représentait 32,2 milliards d'euros. Cet écart très marqué s'explique par un important changement du périmètre de ce budget.

L'an dernier, les crédits destinés à la compensation des allégements généraux de charges sociales (allégement « Fillon ») étaient en effet inscrits dans le budget, à hauteur de 17,1 milliards d'euros. Or, il est proposé cette année que la compensation soit dorénavant assurée par l'affectation à la sécurité sociale d'un panier de ressources fiscales.

A périmètre constant, le projet de budget pour la mission « Travail et emploi » est en progression de 6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2005. Cette progression résulte, pour l'essentiel, du dynamisme des dépenses de compensation des allégements de charges ; si l'on neutralise l'effet de ces dépenses, la progression des crédits n'est plus que de 0,35 % (108 millions d'euros).

Les crédits correspondent pour les trois quarts à des dépenses d'intervention, le solde étant constitué de dépenses de fonctionnement, d'investissement et de personnel.

Aux crédits budgétaires s'ajoutent d'importantes dépenses fiscales, dont le montant devrait représenter 7,3 milliards d'euros l'année prochaine, concentrées sur deux mesures principales : la prime pour l'emploi, pour un tiers, et la réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'emploi par les particuliers d'un salarié à domicile, pour un quart.

Au total, les moyens affectés à la mission s'élèvent donc à près de 40 milliards d'euros, en progression de 5 % par rapport à 2005, ce qui témoigne de l'importance accordée par le Gouvernement à la politique en faveur du travail et de l'emploi.

La priorité accordée à la politique de l'emploi a d'ailleurs commencé à produire ses premiers effets en 2005, puisque le chômage diminue régulièrement depuis maintenant six mois. Le projet de budget pour 2006 est construit sur une hypothèse de reprise modérée de la croissance, comprise entre 2 et 2,5 %, après 1,8 % en 2005, qui devrait permettre, si elle se réalise, de consolider et d'amplifier ces premiers résultats.

L'année 2006 est par ailleurs la première année de mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). La présentation des crédits s'en trouve modifiée : les crédits de la mission « Travail et emploi » sont répartis en cinq programmes , de taille très inégale, puisque deux d'entre eux, « Accès et retour à l'emploi » et « Accompagnement des mutations économiques sociales et démographiques », regroupent près de 90 % des crédits. Les programmes sont ensuite déclinés en actions.

Présentation des crédits de la mission « Travail et emploi »
répartis par programmes

(en millions d'euros)

Crédits
de paiement pour 2006

Part du total des crédits
de la mission

Programme 133 « Développement de l'emploi »

880,5

6,7 %

Programme 102 « Accès et retour à l'emploi »

7.102

53,9 %

Programme 103 « Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques »

4.385,5

33,3 %

Programme 111 « Amélioration de la qualité
de l'emploi et des relations du travail »

82,0

0,6 %

Programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail »

724,0

5,5 %

Total

13.174,0

100 %

Source : projet de loi de finances pour 2006

Le découpage en programmes et actions s'accompagne de la définition d'indicateurs de performances, au nombre de quatre-vingt-quinze pour la présente mission, qui doivent permettre de passer d'une simple logique de moyens à une logique d'efficacité, axée sur la bonne utilisation des crédits.

Les crédits relatifs à la formation professionnelle, de l'ordre de 4,4 milliards d'euros en 2006, faisaient traditionnellement l'objet d'un avis séparé, confié l'an dernier à notre collègue Janine Rozier. Ils seront, à partir de cette année, traités dans le cadre de cette mission, dont ils font partie intégrante ; plus précisément, les crédits relatifs à la formation professionnelle sont répartis dans les actions 1 et 2 du programme 102 « Accès et retour à l'emploi » et dans l'action 2 du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques ».

Le projet de budget pour 2006 permet de poursuivre la mise en oeuvre des grandes politiques engagées par le Gouvernement au cours de ces deux exercices écoulés : plan de cohésion sociale, plan pour le développement des services à la personne et plan d'urgence pour l'emploi, notamment. Il prévoit de nouvelles mesures d'incitation à la reprise d'emploi et reconduit l'aide à l'emploi mise en place l'an dernier au profit des hôteliers et restaurateurs dans l'attente d'une éventuelle baisse du taux de TVA dans ces secteurs.

I. UNE ÉVOLUTION FAVORABLE DU MARCHÉ DE L'EMPLOI À CONFIRMER

L'examen du budget de la mission « Travail et emploi » ne peut être effectué sans une analyse préalable du contexte dans lequel il s'inscrit.

Après une année 2003 particulièrement difficile, qui s'est soldée par des destructions nettes d'emplois, l'année 2004 a vu le marché du travail connaître une lente amélioration, sans que cela suffise, toutefois, à enrayer la hausse du taux de chômage ou la dégradation des comptes de l'Unedic. En 2005, pour la première fois depuis quatre ans et conformément à ce que les prévisions de l'an dernier laissaient entrevoir, le taux de chômage a commencé à diminuer. Ce résultat positif demeure cependant fragile dans la mesure où il repose, pour moitié, sur une augmentation du nombre de contrats aidés. Il importe maintenant qu'une reprise économique plus franche vienne soutenir la création d'emplois salariés dans le secteur marchand.

Les prévisions pour 2006 permettent d'anticiper une progression plus marquée de l'emploi accompagnée d'une nouvelle décrue du chômage.

A. LES PREMIERS SIGNES D'UNE AMÉLIORATION DU MARCHÉ DE L'EMPLOI

L'année 2005 est marquée par un retournement de tendance attendu sur le front du chômage : pour la première fois depuis 2001, le nombre de demandeurs d'emplois a diminué pendant six mois consécutifs pour s'établir aux alentours de 2.380.000 à la fin du mois de septembre, en baisse de 100.000 unités par rapport au niveau observé en début d'année.

1. Une baisse du chômage qui devrait se poursuivre en 2006

Après une stagnation en 2004, l'emploi total devrait progresser de 0,5 % en 2005, ce qui correspond à 116.000 créations nettes d'emplois. Cette embellie a d'ores et déjà permis de ramener le taux de chômage à 9,8 % contre 10 % au début de l'année.

Elle s'explique pour moitié par la croissance de l'emploi salarié dans le secteur marchand et pour moitié par la croissance de l'emploi non marchand, qui résulte surtout de la montée en charge des nouveaux contrats introduits par le plan de cohésion sociale. Selon le ministre délégué au travail, à l'emploi et à l'insertion professionnelle des jeunes, Gérard Larcher 1 ( * ) , si le nombre de contrats d'avenir demeure encore limité, les contrats d'accompagnement dans l'emploi ont connu un plus grand succès, puisqu'on en dénombre 80.000, dont 70.000 ont été conclus à partir du second semestre de l'année.

Les prévisions pour 2006 laissent espérer une progression de l'emploi salarié plus forte l'année prochaine, de l'ordre de 1 %, ce qui correspond à 250.000 emplois supplémentaires environ. Le nombre de salariés dans le secteur non marchand progresserait de 120.000 unités, concourant à nouveau pour moitié à l'augmentation de l'emploi total. Les évaluations de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) suggèrent que l'augmentation du nombre de contrats aidés conduirait à une baisse supplémentaire du taux de chômage de 0,2 point.

En 2005 comme en 2006, la mise en oeuvre des dispositions de la loi portant réforme des retraites relatives aux carrières longues devrait également favoriser la baisse du chômage en encourageant les retraits d'activité. Selon l'OFCE, cette mesure serait à l'origine d'une réduction du taux de chômage de 0,15 point cette année, ainsi que l'année prochaine.

Au total, l'ensemble de ces mesures, combiné aux effets d'une croissance économique plus porteuse, pourrait entraîner, selon l'OFCE, une diminution du taux de chômage de 0,6 point au cours de l'année 2006.

2. Un taux de chômage comparativement élevé

Les tendances qui viennent d'être décrites, pour encourageantes qu'elles soient, ne doivent pas occulter l'ampleur du chemin qui reste à parcourir pour renouer avec le plein emploi.

Le taux de chômage des jeunes de moins de vingt-cinq ans demeure encore de 23 % et ce taux est parfois largement dépassé dans les banlieues les plus déshéritées de nos grandes villes.

Les comparaisons internationales montrent que la France demeure mal placée en matière d'emploi. Elles révèlent aussi qu'il n'y a pas de fatalité au maintien d'un niveau élevé de chômage puisque des Etats qui ont fait des choix très différents en termes de solidarité connaissent des niveaux de chômage inférieurs ou égaux à 5 % : il en est ainsi par exemple du Royaume-Uni, des Pays-Bas, du Danemark et de l'Autriche.

Une étude approfondie des stratégies mises en oeuvre pour atteindre ces résultats s'impose de toute évidence - et il est à souhaiter que le nouveau Conseil d'orientation sur l'emploi récemment créé pose rapidement un diagnostic. Le débat suscité par les performances britanniques ou danoises laisse cependant penser que leurs résultats s'expliquent, au moins pour partie, par une réduction des rigidités affectant leurs marchés du travail, la plus grande fluidité de la main-d'oeuvre favorisant l'émergence de nouveaux emplois, notamment dans le secteur des services. Au lieu de s'attacher à protéger les emplois existants, ces Etats se préoccupent davantage de protéger les personnes contre les accidents qui affectent leur carrière professionnelle, grâce à un meilleur accompagnement des demandeurs d'emploi et/ou un meilleur accès à la formation tout au long de la vie.

Taux de chômage standardisés

Moyennes annuelles en % de la population active

Taux de chômage BIT

2000

2001

2002

2003

2005

2005 (juin)

Irlande

4,3

3,9

4,3

4,6

4,5

4,3

Royaume-Uni**

5,4

5,0

5,1

4,9

4,7

4,7

Danemark

4,4

4,3

4,6

5,6

5,4

4,8

Pays Bas

2,8

2,2

2,8

3,7

4,6

4,8

Autriche

3,7

3,6

4,2

4,3

4,8

5,1

Luxembourg

2,3

2,1

2,8

3,7

4,8

5,4

Suède*

5,6

4,9

4,9

5,6

6,3

6,3

Allemagne

7,2

7,4

8,2

9,0

9,5

9,5

France Eurostat harmonisé

9,1

8,4

8,9

9,5

9,7

9,7

France Insee-Dares

9,5

8,7

9,1

9,8

10,0

10,1

Espagne

11,4

10,8

11,5

11,5

11,0

9,8

Grèce*

11,3

10,8

10,3

9,7

10,5

9,9

Zone euro (12 pays)

8,1

7,9

8,3

8,7

8,9

8,7

Union européenne (25 pays)

8,6

8,4

8,7

9,0

9,0

8,8

Etats-Unis

4,0

4,8

5,8

6,0

5,5

5,0

Japon

4,7

5,0

5,4

5,3

4,7

4,2

OCDE

6,2

6,4

6,9

7,1

6,9

6,5

* : Les données pour juin 2005 n'étant pas encore disponibles, ce sont les chiffres de mars 2005 qui sont ici repris.
** : Les données pour juin 2005 n'étant pas encore disponibles, ce sont les chiffres d'avril 2005 qui sont ici repris.

Source : Eurostat sauf OCDE pour le total des pays membres de l'OCDE. Les données retenues sont en moyennes annuelles
et sont harmonisées par Eurostat de sorte que des différences sensibles peuvent apparaître avec les sources nationales.

Pour amplifier les premiers résultats obtenus en matière d'emploi, le Gouvernement a entrepris de mobiliser les services de l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE), qui s'est notamment vu assigner pour objectif de proposer un entretien mensuel à tous les demandeurs d'emploi. La renégociation, qui s'annonce difficile, de la convention Unedic va également donner l'occasion aux partenaires sociaux de repenser les modalités d'indemnisation et d'accompagnement des chômeurs.

B. LA MOBILISATION DU SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI DEVRAIT AMPLIFIER CETTE ÉVOLUTION FAVORABLE

Les moyens de l'ANPE ont augmenté ces dernières années pour lui permettre de faire face à une charge de travail croissante. L'Unedic a également été de plus en plus sollicitée et n'a pu éviter, de ce fait, une forte dégradation de sa situation financière. Le plan de cohésion sociale entend favoriser le travail en commun de l'ensemble des acteurs du service public de l'emploi, notamment en mettant en place des maisons de l'emploi.

1. L'ANPE

a) Une activité en progression

L'agence fournit un nombre croissant de prestations, ce qui répond à la volonté des pouvoirs publics d'améliorer le conseil et l'orientation des demandeurs d'emploi, afin de bien gérer les « ressources humaines » que compte notre pays.

Depuis l'entrée en vigueur de la convention relative à l'aide au retour à l'emploi et à l'indemnisation du chômage du 1 er janvier 2001, la première prestation délivrée par l'ANPE consiste à élaborer avec chaque demandeur d'emploi un projet d'action personnalisé pour un nouveau départ (PAP-ND), suivi d'entretiens réguliers, au moins une fois tous les six mois, jusqu'à son retour effectif à l'emploi. Le nombre de PAP élaborés a fortement augmenté dans la phase de montée en charge du dispositif et est aujourd'hui stabilisé : ainsi, 2,3 millions de PAP ont été établis au cours du second semestre 2001, 3,8 millions en 2002, 2,8 millions en 2003 et seulement 2,5 millions en 2004. Si l'on prend en compte les entretiens de suivi, ce sont toutefois 7.219.906 entretiens PAP qui ont été réalisés au cours de l'année 2004 (+ 2,5 % par rapport à 2003).

Nombre d'entretiens réalisés au cours de l'année 2005

PAP 01
Entretien
d'élaboration

PAP 02
Entretien
à 6 mois

PAP 03
Entretien
à 12 mois

PAP 04
Entretien
à 18 mois

PAP 05 et plus
Entretien à
à 24 mois et plus

2.511.357

1.600.349

1.209.295

960.912

937.993

Les autres prestations délivrées par l'ANPE s'inscrivent aussi en nette augmentation : on recense, en 2004, un total de 2.719.500 prestations d'appui ou d'accompagnement à la recherche d'emploi (ateliers de recherche d'emploi, bilans de compétences, évaluation professionnelle, accompagnement renforcé...), en hausse de 12,2 % par rapport à 2003. Plus de 153.000 personnes ont bénéficié d'un bilan de compétences approfondi et 965.000 d'un accompagnement renforcé. Ces prestations permettent aux demandeurs d'emploi de mieux définir leur projet personnel, d'améliorer leur technique de recherche d'emploi ou d'évaluer leurs compétences professionnelles face aux besoins des employeurs.

En partenariat avec l'Association pour la formation professionnelle des adultes (Afpa), l'ANPE offre également un service d'appui à la construction du parcours de formation du demandeur d'emploi, qui a concerné, en 2004, 201.547 bénéficiaires (+ 8 % par rapport à 2003).

Le premier service attendu par les personnes inscrites à l'ANPE est cependant la proposition d'offres d'emplois. En 2004, 12.794.633 mises en relation sur offres d'emploi ont été réalisées directement par les conseillers de l'ANPE à l'occasion d'entretiens PAP. De plus, l'ANPE est en passe d'atteindre l'objectif qu'elle s'était fixé l'an passé d'abaisser le nombre d'offres d'emplois non satisfaites de 300.000 à 180.000 fin 2005, puisqu'il a d'ores et déjà été ramené aux alentours de 200.000.

Conformément à l'engagement pris par le Premier ministre, Dominique de Villepin, dans sa déclaration de politique générale le 8 juin dernier, l'ANPE a reçu individuellement, avant la fin du mois de septembre, les quelque 57.000 jeunes inscrits au chômage depuis plus d'un an. De sa propre initiative, l'agence a décidé de recevoir aussi ceux dont la durée d'inscription au chômage a dépassé un an entre juin et septembre, ce qui l'a amenée à organiser des entretiens avec 71.000 jeunes au total. Plus de 58.000 offres d'emplois leur ont été proposées, dont la moitié portait sur des contrats à durée déterminée (CDD) d'une durée supérieure à six mois ou sur des contrats à durée indéterminée.

L'ANPE envisage désormais, en réponse à la crise dans les banlieues, de recevoir dans un délai de trois mois, les chômeurs de moins de vingt-cinq ans issus des 750 zones urbaines sensibles (Zus) que compte le pays. Environ 70.000 personnes seraient concernées et un accent particulier serait mis sur l'aide à apporter aux jeunes diplômés issus de ces quartiers qui ne parviennent pas à trouver un emploi.

La progression de l'activité de l'ANPE devrait se poursuivre dans les années à venir puisque le Premier ministre a également demandé à l'ANPE d'organiser un entretien mensuel pour tous les chômeurs, à compter de leur quatrième mois d'inscription au chômage. A l'heure actuelle, les demandeurs d'emploi ne bénéficient d'un entretien qu'en moyenne une fois tous les six mois. Le changement proposé permettrait donc d'offrir aux demandeurs d'emploi un suivi beaucoup plus personnalisé et approfondi, garant d'un retour plus rapide vers l'emploi. Les chômeurs qui apparaissent les plus facilement employables, par exemple parce qu'ils disposent d'une qualification dans un métier confronté à une pénurie de recrutement, se verraient, en outre, proposer sans délai des offres d'emploi. La mise en oeuvre de ces mesures suppose l'embauche de 3.000 personnes et 150 millions d'euros de crédits supplémentaires. Elles devraient commencer à être appliquées, dès 2006, par le redéploiement de moyens budgétaires.

b) L'augmentation des moyens et des effectifs de l'ANPE

L'ANPE est parvenue à gérer cette montée en charge grâce à une augmentation de ses moyens financiers et de ses effectifs.

Entre 2001 et 2003, la subvention de l'Etat a progressé de 12,8 %, conformément aux engagements pris dans le cadre du troisième contrat de progrès le liant à l'agence. Après une année de stagnation en 2004, la subvention est de nouveau orientée à la hausse : le projet de loi de finances pour 2006 prévoit une progression de 3,95 % de la subvention de l'ANPE par rapport à l'année précédente. Il s'agit désormais de permettre la mise en oeuvre des nouvelles politiques nationales pour l'emploi, notamment les « plates-formes de la vocation », prévues dans le cadre du plan de cohésion sociale, qui visent à évaluer les aptitudes des jeunes à occuper des emplois dans les métiers « en tension », et le plan de mobilisation pour les bénéficiaires de l'allocation spécifique de solidarité (ASS).

En 2005, l'effectif budgétaire de l'agence a augmenté de 5,7 % et un recrutement de 140 nouveaux agents doit venir compléter, en 2006, les équipes chargées des plates-formes de la vocation.

Evolution des effectifs de l'ANPE

Effectif budgétaire
ETP 2002

Effectif budgétaire
ETP 2003

Effectif budgétaire
ETP 2004

Effectif budgétaire
ETP 2005

21.306

21.342

21.342

22.457

ETP : Equivalent temps plein

Note : Les effectifs visés sont ceux dont le financement est assuré soit par la subvention de l'Etat, soit par des dispositifs nationaux (RMI, conventions partenariales).

Source : ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

Ces moyens renforcés ont permis l'ouverture de vingt-trois nouvelles agences au cours de l'année 2004 et la poursuite de la modernisation du réseau et de l'amélioration des conditions d'accueil des usagers.

L'Unedic contribue par ailleurs à hauteur de 26 % au financement de l'ANPE : 3.650 emplois sont financés au titre de la convention qui les lie pour la mise en oeuvre du PAP-ND, pour un coût total de 215 millions en 2005. 600 millions supplémentaires sont versés pour le paiement des diverses prestations délivrées par l'agence aux chômeurs indemnisés.

La renégociation de la convention Unedic qui doit s'achever, en principe, d'ici la fin de l'année pose la question du maintien ou non du financement apporté par l'Unedic au titre du Pare. Sa remise en cause pourrait en effet figurer parmi les mesures d'économies envisagées par les partenaires sociaux pour accélérer le retour à l'équilibre de l'assurance chômage. Une telle décision remettrait en cause les prévisions actuelles en matière de financement de l'agence.

Le directeur général de l'ANPE travaille à l'élaboration du nouveau contrat de progrès devant lier l'Etat et l'agence, le précédent étant arrivé à expiration en 2003. Il a indiqué à votre rapporteur les grandes orientations qu'il souhaitait poursuivre :

- l'ANPE devrait offrir un suivi personnalisé à chaque demandeur d'emploi, assuré par un conseiller « référent » ;

- l'ANPE devrait s'inscrire dans une démarche de résultats plus que de moyens : plutôt que de s'intéresser au nombre d'entretiens ou de prestations délivrées, il conviendrait de se fixer des objectifs de retour des chômeurs à l'emploi ;

- il souhaiterait enfin développer le rôle de l'échelon régional dans l'organisation interne de l'agence et promouvoir la déconcentration.

2. L'Unedic

Le niveau élevé du chômage a maintenu « dans le rouge » les comptes de l'Unedic en 2005.

Après avoir enregistré un déficit de plus de 4,4 milliards d'euros en 2004, l'assurance chômage devrait connaître une situation à nouveau déficitaire en 2005 (3,4 milliards d'euros).

Résultats financiers de l'assurance chômage

(en millions d'euros)

Situation financière

2001 (R)

2002 (R)

2003 (R)

2004 (R)

2005 (P)

2006 (H)

Recettes

22.723

22.559

25.785

26.732

27.670

28.859

Dépenses

22.476

26.279

30.067

31.152

31.009

29.005

Résultat de l'année (R - D)

247

- 3.720

- 4.282

- 4.420

- 3.339

-156

Situation financière au 31 décembre

+ 2.144

- 1.554

- 5.836

- 10.260

- 13.599

-13.745

(R) : réalisé Source : Unedic

(P) : prévision

(H) : hypothèse

Le déficit cumulé sur la période 2002-2005 devrait ainsi atteindre 13,6 milliards d'euros. Ce chiffre est sans précédent : il représente plus du double du déficit cumulé lors du précédent épisode récessif du début des années 1990.

Les prévisions de l'Unedic font état d'un résultat proche de l'équilibre l'année prochaine. La décrue du nombre de demandeurs d'emploi et la hausse du nombre de cotisants suffiraient à résorber le déficit sans hausse des cotisations. A règles inchangées, les services de l'Unedic considèrent qu'un retour de la croissance aux alentours de 2 % par an permettrait de résorber la moitié de la dette cumulée, qui serait ainsi ramenée à 7 milliards d'euros, d'ici la fin de l'année 2008.

La question de la réforme des règles d'indemnisation et de cotisation va être au coeur des discussions entre les partenaires sociaux. Les représentants patronaux souhaiteraient résorber entièrement le déficit cumulé avant la fin de 2008, grâce à une diminution de la durée d'indemnisation des demandeurs d'emploi. Plusieurs organisations syndicales demandent une hausse des cotisations acquittées au titre des salariés employés en contrat à durée déterminée ou en intérim, considérant que le développement des emplois précaires est pour beaucoup dans la dégradation des comptes de l'assurance chômage.

3. La recherche d'une meilleure coordination des différents acteurs du service public de l'emploi

La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 a prévu que l'Etat, l'ANPE et l'Unedic signent une convention pluriannuelle pour définir :

- les principaux objectifs de l'activité du service public de l'emploi pour la période considérée ;

- les conditions dans lesquelles ces objectifs sont précisés et adaptés au niveau local par des conventions territoriales de développement de l'emploi ;

- les modalités de coordination des actions respectives des services du ministère chargé de l'emploi, de l'ANPE et des organismes de l'assurance chômage et de transmission mutuelle des informations qui leur sont nécessaires pour réaliser ces actions ;

- les critères permettant d'évaluer l'efficacité de ces actions ainsi que les modalités de publication de cette évaluation et de diffusion des bonnes pratiques ;

- les modalités de recueil et de transmission des données relatives aux besoins prévisionnels en ressources humaines ;

- les modalités de constitution et d'accès au dossier unique du demandeur d'emploi.

Cette convention est encore en cours de négociation, mais devrait contenir plusieurs projets concrets parmi lesquels on peut signaler :

- le rapprochement, ou la mise en commun, des locaux ANPE et Assedic d'ici 2010, avec l'établissement, avant la fin de l'année 2005, d'un programme d'implantations immobilières communes ou contiguës ;

- la création d'une filiale commune ANPE-Unedic dédiée à l'informatique, devant mettre au point une architecture informatique commune d'ici 2008.

A cet égard, la décision récente du directeur général de l'ANPE de renoncer à l'application informatique « maison » Géode pour se rallier à celle de l'Unedic, Gide, constitue un geste de bonne volonté qui atteste d'une volonté partagée de rationalisation des moyens ;

- une répartition des tâches claire et des engagements sur les délais en ce qui concerne l'accueil des demandeurs d'emploi : ils devraient, par exemple, bénéficier d'un diagnostic initial sur leur distance à l'emploi dès leur inscription à l'Assedic ; puis leur premier entretien à l'ANPE devrait avoir lieu, à compter de 2006, dans un délai de huit jours ouvrés après leur inscription, délai ramené à cinq jours à partir de 2007 ;

- une coordination de l'offre de services entre l'ANPE et l'Afpa pour l'accompagnement des titulaires de contrats aidés non marchands.

Le projet de convention précise également ce que pourraient être les « conventions territoriales de développement de l'emploi » voulues par le législateur : également tripartites et passées à l'échelon départemental, elles seraient centrées sur le diagnostic du marché de l'emploi et le suivi de la recherche d'emploi.

La convention doit enfin déterminer les modalités de constitution et d'accès au dossier unique du demandeur d'emploi (Dude). L'objectif de ce nouveau dispositif est de faciliter l'échange d'informations entre organismes et l'accès des agents des services de l'emploi aux données utiles à leur activité ; il doit permettre aussi d'identifier plus aisément les bénéficiaires potentiels de certaines mesures ou plans d'action.

Une autre mesure-phare issue du plan de cohésion sociale consiste en la création de maisons de l'emploi, destinées à associer tous les acteurs de la politique de l'emploi et de l'insertion au niveau local : ANPE, Assedic, missions locales, PAIO 2 ( * ) , collectivités territoriales, etc. Le Gouvernement envisage de doter le territoire d'un réseau de trois cents maisons de l'emploi, soit environ une pour trois agences ANPE.

Début juillet, le ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement avait attribué le label « maison de l'emploi » à quarante et un projets. La prévision, d'ici la fin de l'année 2005, est de quatre-vingts projets labellisés, et de deux cents d'ici la fin 2006. La montée en puissance des maisons de l'emploi se déroule donc à un rythme satisfaisant et l'objectif de trois cents maisons au terme de la mise en oeuvre du plan de cohésion sociale, en 2009, apparaît tout à fait réaliste.

Les dépenses à la charge de l'Etat se révèlent inférieures aux prévisions initiales inscrites dans la loi de programmation, qui sont rappelées dans le tableau ci-dessous : peu de projets se traduisent, en effet, par l'acquisition d'un site immobilier regroupant tous les acteurs et les dépenses d'investissement demeurent de ce fait limitées.

Programmation financière en faveur des maisons de l'emploi
figurant dans la loi de cohésion sociale

(en millions d'euros)

2005

2006

2007

2008

2009

Autorisations de programme

300

330

50

0

0

Dépenses ordinaires et crédits de paiement

120

405

530

375

300

Source : article 38 du projet de loi de programmation pour la cohésion sociale

Il est ainsi prévu d'ouvrir 128 millions d'euros en crédits de paiement au titre des maisons de l'emploi en 2006, après 120 millions en 2005.

Crédits affectés aux maisons de l'emploi (en millions d'euros)

CP

LFI 2005

PLF 2006

Fonctionnement

75

100

Investissement

45

28,5

Total Maisons de l'emploi

120

128,5

II. LES GRANDES ORIENTATIONS DU PROJET DE BUDGET POUR 2006

Le projet de loi de finances pour 2006 propose de réformer les modalités de compensation par l'Etat des allégements de cotisations sociales : l'affectation d'un panier de taxes et impôts devrait se substituer à la dotation budgétaire auparavant inscrite en loi de finances.

Il permet, par ailleurs, de poursuivre la mise en oeuvre des programmes lancés par le Gouvernement : plan de cohésion sociale, plan pour le développement des emplois de service à la personne et plan d'urgence pour l'emploi, notamment.

Plusieurs mesures fiscales sont également inscrites en loi de finances pour inciter à la reprise d'emploi.

A. LA RÉFORME DE LA COMPENSATION DES ALLÉGEMENTS DE COTISATIONS SOCIALES MODIFIE LE PÉRIMÈTRE DU BUDGET DU TRAVAIL

Le périmètre de la mission « Travail et emploi » est fortement réduit par rapport au budget du travail examiné l'an passé. Ce changement résulte, pour l'essentiel, de la réforme de la compensation des allégements de cotisations proposée par le présent projet de loi de finances. D'autres modifications plus accessoires doivent également être signalées.

1. La réforme de la compensation des allégements de cotisations sociales

Cette réforme concerne la compensation de l'allégement général de cotisations sociales, dit allégement « Fillon », introduit par la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et à l'emploi.

En 2004 et en 2005, la compensation de cet allégement de charges a été financée par des crédits inscrits au budget du travail.

Il était assuré, auparavant, par le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (Forec), créé par l'article 5 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, qui était abondé par quatre impositions affectées (tabacs, droits sur les alcools, contribution sociale sur les bénéfices, taxe générale sur les activités polluantes), que sont venus compléter, en 2001, deux prélèvements supplémentaires (une fraction de la taxe sur les conventions d'assurance et la taxe sur les véhicules de sociétés). Votre commission s'était montrée critique vis-à-vis de ce dispositif complexe et difficilement lisible, alimenté par des recettes peu dynamiques, dont le rythme d'évolution ne garantissait pas que le principe de compensation intégrale des allégements de charges puisse être effectivement respecté.

Les dépenses de compensation des allégements de charges se caractérisent en effet par un rythme de progression soutenu, comme le rappelle le tableau suivant.

Les dépenses de compensation des exonérations générales de cotisations sociales

(en millions d'euros)

2000

(réalisé)

2001

(réalisé)

2002

(réalisé)

2003

(réalisé)

2004

(réalisé)

2005

(LFI)

2006

(PLF)

10.382

11.549

12.215

16.194

16.275

17.140

18.900

Source : rapport pour avis de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales
de l'Assemblée nationale sur la mission « Travail et emploi », p.9.

L'article 41 de la loi de finances pour 2006 propose de remplacer la dotation inscrite au budget ces deux dernières années par un panier de recettes fiscales. Seraient ainsi désormais affectés à la sécurité sociale :

- 95 % du produit de la taxe sur les salaires ;

- divers droits d'accises sur les boissons ;

- la taxe sur les contributions patronales au financement de la prévoyance complémentaire ;

- la taxe sur les primes d'assurance automobile ;

- la TVA collectée par les commerçants de gros en produits pharmaceutiques et par les fournisseurs de tabac.

Il est probable que cette mesure réponde, au moins pour partie, à des considérations conjoncturelles : elle permet en effet d'atteindre plus aisément l'objectif de croissance nulle en volume du budget de l'Etat en 2006. A défaut, l'Etat aurait dû dégager 1,8 milliard d'euros d'économies pour faire face à l'augmentation spontanée des dépenses de compensation.

Elle présente l'inconvénient d'exclure des futures discussions budgétaires l'examen des sommes consacrées à la compensation, au moment même où l'entrée en vigueur de la loi organique sur les lois de finances aurait pu favoriser un meilleur suivi de l'efficacité de ces dépenses, par le biais des indicateurs de performance.

La question essentielle pour votre commission est cependant celle du respect du principe de la compensation intégrale des allégements de cotisations , posé par la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale et codifié à l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.

Sur ce point, le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale note que « le « panier » de recettes a été déterminé afin d'obtenir un produit qui, en tendance, reflète correctement les évolutions de la masse salariale et réponde ainsi, au moins de façon indirecte, aux objectifs de principe fixés par l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale » 3 ( * ) .

Ce panier de recettes devrait rapporter 18,9 milliards d'euros en 2006 et couvrir intégralement la perte de recettes supportée par les caisses de sécurité sociale du fait des allégements de cotisations. Le IV de l'article 41 du projet de loi de finances précise, de surcroît, que dans l'hypothèse où les recettes ne seraient pas conformes aux prévisions, une mesure de régularisation interviendrait dans la plus prochaine loi de finances.

Il n'existe pas de garantie analogue pour les années postérieures. Il est cependant prévu que le Gouvernement remette au Parlement, en 2008 et 2009, un rapport retraçant d'une part, l'évolution des recettes des impôts et taxes affectés, d'autre part, la perte de recettes résultant des allégements de cotisations sociales. En cas d'écart supérieur à 2 % entre ces deux montants, il est prévu qu'un rapport soit transmis par le Gouvernement à une commission présidée par un magistrat de la Cour des comptes, pour qu'elle donne un avis sur d'éventuelles mesures d'ajustement.

A ce stade du débat, la commission des Finances du Sénat envisage de substituer au panier de recettes une fraction du produit de la TVA . Cette mesure faciliterait l'ajustement des recettes à l'évolution future du montant de la compensation, alors que le maintien du panier de recettes conduirait à rechercher, dans les années à venir, de nouveaux impôts et taxes à affecter, ce qui ne manquera pas de susciter des débats difficiles à trancher.

Votre commission réaffirme, en tous les cas, son attachement au principe de la compensation intégrale et se montrera vigilante, après 2006, sur son respect à l'occasion de l'examen des futures lois de finances.

2. Les autres modifications affectant le périmètre de la mission

Le périmètre de la mission « Travail et emploi » est affecté par d'autres mesures de portée plus limitée.

Une dépense est transférée à la mission « Ville et logement » : il s'agit de la compensation de l'exonération spécifique de cotisations patronales applicable dans les zones franches urbaines (ZFU).

Le financement de « l'allocation temporaire d'attente » instituée par l'article 88 du projet de loi de finances, qui remplace l'allocation d'insertion pour la part de cette allocation versée aux demandeurs d'asile et d'autres catégories d'étrangers, est transféré sur le programme « Accueil des étrangers et intégration » de la mission « Solidarité et intégration ». Le financement de la garantie de ressources des travailleurs handicapés (GRTH) en centre d'aide par le travail (CAT) est quant à lui imputé sur le programme « Handicap et dépendance » de la même mission.

Le financement des emplois-jeunes encore existants aux ministères de l'éducation nationale et de la justice est transféré vers les missions correspondantes.

Enfin, le financement du réseau des centres et points d'information sur la validation des acquis de l'expérience (VAE) est désormais assuré par les régions, en application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux responsabilités et libertés locales.

B. LE FINANCEMENT DES ACTIONS PRIORITAIRES DU GOUVERNEMENT

Le Gouvernement a lancé plusieurs programmes en 2004 et 2005 : plan de cohésion sociale, plan de développement des services à la personne, plan d'urgence pour l'emploi. Leur mise en oeuvre nécessite des financements qui figurent effectivement dans le projet de loi de finances pour 2006.

1. La mise en oeuvre du plan de cohésion sociale

La mise en oeuvre du plan de cohésion sociale se poursuit conformément aux engagements pris, tout en prenant en compte la montée en charge progressive des dispositifs.

a) L'augmentation du nombre de contrats aidés

Le projet de budget confirme la montée en charge des nouveaux contrats aidés prévus par la loi de cohésion sociale.

On peut rappeler que deux contrats de travail permettent, désormais, d'activer les minima sociaux : le contrat d'avenir dans le secteur non marchand et le contrat d'insertion-revenu minimum d'activité (CI-RMA) dans le secteur marchand. Par ailleurs, pour tous les autres publics en difficulté, le contrat d'accompagnement dans l'emploi (CAE) a été créé dans le secteur non marchand et le contrat initiative-emploi (CIE), dans le secteur marchand, a été rénové.

Une enveloppe budgétaire de 3,4 milliards d'euros est prévue pour financer les contrats aidés , dont 2 milliards d'euros au titre des contrats créés par le plan de cohésion sociale. Ces crédits sont suffisants pour financer jusqu'à 200.000 contrats d'avenir et 120.000 CAE en 2006. Cette enveloppe intègre la majoration du taux de subvention de ces contrats décidée dans le cadre du plan d'urgence pour l'emploi.

La progression des nouveaux contrats aidés

Dispositifs

LFI 2005*

Flux 2005

Flux 2006

PLF 2006*

CIE

219,30

70.000

50.000

274,85

CAE

219,30

130.000

120.000

690,46

Contrats d'avenir

383

80.000

200.000

792,00

SEJE

429,65

60.000

50.000

272,98

Total

1.251,25

340.000

420.000

2.030,29

*en millions d'euros.
Source : ministère du travail, de la cohésion sociale et du logement

b) L'insertion professionnelle des jeunes

Face à l'importance du chômage des jeunes, le Gouvernement s'est donné pour objectif de développer des parcours d'insertion professionnelle. Un accent particulier est mis sur l'apprentissage, élément essentiel du plan de cohésion sociale, qui apporte une formation propice à une bonne insertion professionnelle : le plan de cohésion sociale prévoit ainsi d'augmenter les effectifs d'apprentis de 350.000 en 2004 à 500.000 en 2009. En conséquence, les prévisions d'entrées en apprentissage pour 2006 sont en augmentation de 6 %. Le soutien de l'Etat aux contrats de professionnalisation est également amplifié, avec 160.000 entrées prévues. Les crédits associés s'élèvent à 1,3 milliard d'euros, dont 846 millions d'euros pour l'apprentissage.

Entrées annuelles dans les différents dispositifs de formation en alternance

(en milliers)

Dispositifs

2004
(réalisation)

2005
(prévision)

2006
(PLF)

Contrats d'apprentissage

245.560

250.000

265.000

Contrat de professionnalisation jeune

1.433

120.000

160.000

Contrat de professionnalisation adulte

0

8.500

15.000

Total

246.993

378.504

439.502

Source : ministère du travail, de la cohésion sociale et du logement

Pour les jeunes les plus en difficulté, le budget prévoit une montée en charge du contrat d'insertion dans la vie sociale (Civis), qui pourrait concerner 100.000 jeunes l'année prochaine, ainsi que des dispositifs qui y sont associés, tels que les bourses intermédiaires ou le fonds pour l'insertion professionnelle des jeunes, auquel 70 millions d'euros sont affectés. Le nombre de Civis signés à la fin du mois d'octobre 2005 est estimé à 60.000.

c) L'insertion par l'économique

L'insertion par l'économique a constitué l'un des leviers privilégiés des politiques d'insertion et de lutte contre les exclusions conduites ces dernières années. Cette priorité s'est traduite par une augmentation importante des crédits alloués par l'Etat aux structures d'insertion, afin de dynamiser la création d'activités et l'offre d'insertion. Les structures d'insertion par l'activité économique ont permis l'embauche d'environ 300.000 personnes à la fin de l'année 2004.

On dénombrait la même année 2.135 structures d'insertion par l'activité économique conventionnées : 964 entreprises d'insertion (EI), 241 entreprises de travail temporaire d'insertion (ETTI) et 930 associations intermédiaires (AI). On estime par ailleurs autour de 1.600 le nombre de chantiers et d'ateliers d'insertion, qui emploient environ 60.000 personnes.

Le fonds de garantie pour les structures d'insertion par l'activité économique (FGIE) facilite l'accès au crédit en garantissant les prêts consentis par les guichets bancaires à vocation sociale à des personnes physiques (chômeurs, titulaires du RMI, travailleurs en reconversion) ou morales (associations, très petites entreprises, structures d'insertion). Après avoir été doté de 4 millions d'euros en 2005, le projet de loi de finances prévoit d'y consacrer 12 millions d'euros en 2006, conformément aux engagements pris en loi de programmation pour la cohésion sociale.

Les crédits affectés à l'insertion par l'économique
dans le projet de loi de finances pour 2006

(en millions d'euros)

Dispositifs

Crédits

Entreprises d'insertion (postes subventionnés par l'Etat

14.000

Fonds départemental d'insertion

18

Associations intermédiaires

13

Ateliers et chantiers d'insertion

24

Fonds de garantie pour les structures d'insertion par l'activité économique

12

Source : ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement

d) La convention de reclassement personnalisé

L'article 74 de la loi de programmation pour la cohésion sociale a posé le principe de la création d'une convention de reclassement personnalisé (CRP) pour les salariés d'entreprises employant moins de 1.000 salariés qui se retrouvent au chômage après un licenciement économique.

Les partenaires sociaux ont conclu, le 5 avril 2005, un accord pour la mise en oeuvre de la CRP. L'Etat participe au financement du dispositif par le doublement du droit individuel à la formation (DIF) reconnu au salarié.

Le projet de loi de finances pour 2006 propose d'affecter près de 28 millions d'euros à cette dépense, en faisant l'hypothèse que 75 % des quelque 300.000 personnes licenciées pour motif économique chaque année demanderont à bénéficier de la CRP.

2. Le développement des emplois de service

Le Gouvernement a pris récemment des initiatives en faveur du développement des services à la personne et propose de reconduire, en 2006, l'aide à l'emploi instaurée l'an dernier au profit des hôtels, cafés et restaurants.

Un rapport du Conseil d'analyse économique de juin 2004 4 ( * ) a mis en évidence l'ampleur des gisements d'emplois dans le secteur des services. Ses auteurs montrent que si la France avait le même taux d'emploi que les Etats-Unis dans le commerce, l'hôtellerie et la restauration, notre pays compterait 3,4 millions d'emplois supplémentaires. Ils soulignent également que si les ménages consommaient trois heures de services aux particuliers par semaine, correspondant à une dépense de 20 ou 30 euros, deux millions de postes de travail seraient créés.

a) Le plan de développement des services à la personne

Avec l'adoption de la loi n° 2005-841 du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, le Gouvernement a l'ambition de porter de 70.000 à 140.000 le nombre d'emplois de services à la personne créés chaque année.

A cette fin, la loi a instauré une nouvelle exonération de quinze points de cotisations patronales pour les particuliers employeurs qui rémunèrent leurs salariés au réel 5 ( * ) et a intégralement exonéré de cotisations patronales les associations et entreprises agréées actives dans ce secteur.

Le coût de la compensation à la sécurité sociale de ces exonérations, évalué à 180 millions d'euros en 2006, est pris en charge sur les crédits de la mission. Par ailleurs, 20,3 millions d'euros sont prévus pour le lancement de la nouvelle Agence nationale des services à la personne, créée par un décret en date du 14 octobre 2005, et dont le conseil d'administration, présidé par l'ancien secrétaire d'Etat, Laurent Hénart, vient d'être installé par le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

b) L'aide à l'emploi dans le secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration

Dans l'attente de la diminution du taux de la TVA à 5,5 % dans ce secteur, la loi n° 2004-804 du 9 août 2004 relative au soutien à la consommation et à l'investissement a instauré une aide à l'emploi dans les hôtels, cafés et restaurants, en contrepartie d'engagements pris par la profession : un avenant à la convention collective nationale de la branche, ratifié le 22 juillet 2004 par deux organisations patronales et par trois organisations syndicales, a prévu, notamment, la suppression du système dérogatoire du « SMIC hôtelier », qui autorisait le versement d'une rémunération inférieure de 5 % au Smic légal en échange d'avantages en nature, et institué une sixième semaine de congés payés et deux jours fériés supplémentaires.

L'aide publique accordée vise à favoriser les créations d'emplois dans ces secteurs qui rencontrent des difficultés de recrutement. Elle s'élève à 114,40 euros par mois et par salarié pour ceux dont le salaire horaire, hors avantages en nature, est égal au Smic puis est décroissante pour ceux dont le salaire horaire est supérieur.

Par ailleurs, la loi prévoit une aide spécifique pour les chefs d'entreprise du secteur dont le conjoint est inscrit au registre du commerce comme conjoint collaborateur, afin d'inciter au développement de ce statut, qui permet aux intéressés d'acquérir des droits à la retraite.

Le dispositif initial a été établi à titre expérimental, du 1 er juillet 2004 au 31 décembre 2005. L'article 91 du projet de loi de finances propose de le proroger pour l'année 2006. Dans la mesure où l'enveloppe budgétaire inscrite en 2005 couvrait dix-huit mois d'aides, l'enveloppe prévue pour l'année 2006 est naturellement en recul. L'évaluation prévisionnelle des dépenses pour 2006 est de 410 millions d'euros, alors que la loi de finances initiale pour 2005 prévoyait une dotation de 549,5 millions d'euros.

Le Gouvernement n'a pas renoncé à obtenir de ses partenaires européens la baisse du taux de TVA, demandée depuis 2002 : le prochain conseil ECOFIN du mois de décembre devrait aborder à nouveau cette question 6 ( * ) . Une aide ciblée sur l'emploi est cependant sans doute plus efficace pour stimuler l'embauche qu'une baisse du taux de TVA, qui peut être utilisée par les entreprises pour augmenter leurs marges.

3. Le plan d'urgence pour l'emploi

Lors de sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a annoncé le lancement d'un « plan d'urgence pour l'emploi » . Le Gouvernement a souhaité le vote d'une loi d'habilitation pour accélérer sa mise en oeuvre et a publié six ordonnances en date du 2 août 2005. Plusieurs mesures prises par ordonnance ont un impact budgétaire, auquel le projet de budget répond de manière satisfaisante.

a) Le contrat « nouvelles embauches »

Destiné à favoriser l'embauche dans les entreprises de moins de vingt salariés, il comporte une « période de consolidation de l'emploi », pendant laquelle la rupture du contrat peut intervenir selon des modalités simplifiées.

Ce nouveau contrat connaît un certain succès, puisque, selon les estimations établies par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) en fonction des déclarations uniques d'embauche des employeurs sur Internet, 74.000 contrats « nouvelles embauches » auraient été signés à la mi-octobre

Le salarié dont le contrat est rompu avant qu'il n'ait pu acquérir des droits à l'assurance chômage bénéficie d'une allocation interstitielle de 16,40 euros par jour, versée par l'Etat durant un mois. Le coût du versement de cette prestation est chiffré à 25 millions d'euros en 2006, pris en charge par le fonds de solidarité, qui réunit les moyens de financement du régime de solidarité d'indemnisation du chômage.

b) Les conséquences financières du franchissement du seuil de dix salariés

L'objectif de l'ordonnance n° 2005-895 du 2 août 2005, relevant certains seuils de prélèvements obligatoires et tendant à favoriser l'exercice d'une activité salariée dans des secteurs professionnels connaissant des difficultés de recrutement, est d'encourager les employeurs à embaucher plus de dix salariés.

Elle réduit la hausse des prélèvements obligatoires que l'employeur doit verser en matière de formation professionnelle, de construction et de logement lorsque son entreprise dépasse l'effectif de dix salariés.

La compensation s'effectuera au vu d'une évaluation de l'impact du dispositif mais ses modalités ne sont pas encore précisément arrêtées ; le Gouvernement s'est engagé à compenser à l'euro près le manque à gagner pour les organismes de formation.

Pour l'instant, les évaluations relatives au manque à gagner résultant du relèvement des seuils de prélèvement portent sur 192 millions d'euros environ. Ce montant ne sera connu qu'à l'issue de la collecte 2005 des contributions des employeurs au titre de la formation professionnelle continue.

Afin d'aider les secteurs manquant de main-d'oeuvre, l'ordonnance propose également un crédit d'impôt pour les salariés de moins de vingt-six ans qui exercent une activité dans un métier connaissant des difficultés de recrutement ainsi qu'une incitation à accepter des emplois dans des secteurs où l'offre peine à être pourvue.

Il s'agit d'une mesure fiscale qui se traduit donc par de moindres recettes au titre de l'impôt sur le revenu.

c) La suppression des limites d'âge et la création du Pacte

L'ordonnance n° 2005-901 du 2 août 2005 relative aux conditions d'âge dans la fonction publique et instituant un nouveau parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique de l'Etat, prévoit de supprimer les limites d'âge qui existent actuellement pour certains concours externes d'accès à la fonction publique de l'Etat.

Cette ordonnance prévoit également la mise en oeuvre d'un « Parcours d'accès aux carrières territoriales, hospitalières et de l'Etat » (Pacte), accessible aux jeunes de seize à vingt-cinq ans sortis du système éducatif sans diplôme ou qualification professionnelle. Ce parcours se déroulera sur une période de deux ans et alternera formation professionnelle et stage dans le service concerné, avant une titularisation dans la fonction publique.

Une dotation de 15 millions d'euros est prévue en 2006 pour une estimation de 13.500 bénéficiaires du Pacte.

d) Le contrat de volontariat pour l'insertion

L'ordonnance n° 2005-883 du 2 août 2005, relative à la mise en place au sein des institutions de la défense d'un dispositif d'accompagnement à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes en difficulté, a institué un « contrat de volontariat pour l'insertion », inspiré du service militaire adapté existant outre-mer, mis en oeuvre par l'établissement public d'insertion de la défense (EPID).

Il s'adresse aux jeunes de dix-huit à vingt et un ans qui connaissent des problèmes d'insertion et leur propose une formation générale et professionnelle au sein de l'armée. Ce contrat est souscrit pour une durée de six mois à un an et peut être prolongé jusqu'à vingt-quatre mois. Il pourra comporter une période probatoire, ainsi qu'une ou plusieurs périodes de stage en entreprise ou en administration.

Le titulaire du contrat perçoit une allocation mensuelle, ainsi qu'une prime, fonction du nombre de mois accomplis, et bénéficie, de même que ses ayants droit, d'une couverture sociale, en contrepartie du versement d'une cotisation forfaitaire à la charge de l'établissement public d'insertion de la défense.

La mission « Travail et emploi » prend en charge la subvention de fonctionnement de l'EPID, à hauteur de 37 millions d'euros.

C. L'INCITATION À LA REPRISE D'EMPLOI

Le projet de loi de finances comporte plusieurs mesures destinées à encourager la reprise d'emploi.

1. La réforme de la prime pour l'emploi

La loi n° 2001-458 du 30 mai 2001 a instauré une prime pour l'emploi (PPE), versée aux salariés les plus modestes afin d'augmenter leur revenu. Cette mesure vise à rendre la reprise d'emploi plus intéressante financièrement que l'inactivité. L'article 3 du présent projet de loi de finances propose de réformer ce dispositif.

La prime pour l'emploi serait, en premier lieu, mensualisée dès le mois de janvier prochain, afin que son paiement soit plus régulier et son lien avec la feuille de paie plus visible. Aujourd'hui, le versement de la PPE est lié au paiement de l'impôt sur le revenu : la prime vient en diminution de l'impôt sur le revenu ou prend la forme d'une restitution si elle excède le montant de l'impôt dont doit s'acquitter le contribuable.

Elle serait ensuite revalorisée de 50 % en deux ans : le montant maximal de la part individuelle 7 ( * ) devrait être porté de 538 à 714 euros en 2006, puis à 809 euros en 2007. Cette majoration serait plus importante pour les salariés à temps partiel.

Selon les calculs établis par le Gouvernement, le gain net mensuel lié à la reprise d'emploi, par rapport à la situation d'un titulaire du revenu minimum d'insertion (RMI), serait de :

- 369 euros pour un célibataire (23 euros de plus qu'aujourd'hui) ;

- 370 ou 455 euros pour un parent isolé, selon que l'enfant a plus ou moins de trois ans (gain de 20 euros) ;

- 249 euros pour un couple avec deux enfants lorsqu'un seul parent retrouve un emploi et 819 euros lorsque les deux retrouvent un emploi (respectivement 22 et 44 euros de plus qu'aujourd'hui).

Le coût de cette réforme est évalué à 500 millions d'euros en 2006, qui viennent s'ajouter aux 2,5 milliards d'euros de dépenses aujourd'hui consacrés à la PPE.

2. Les incitations à la mobilité géographique

Pour accroître la fluidité du marché du travail, il est nécessaire de faciliter la mobilité géographique des salariés français, qui est fort inférieure à ce qui est observé dans certains pays étrangers, les Etats-Unis notamment. Les articles 7 et 8 du projet de loi de finances proposent deux nouvelles mesures en ce sens.

Un crédit d'impôt de 1.500 euros serait alloué aux demandeurs d'emploi de plus de douze mois et aux salariés bénéficiaires d'un plan de sauvegarde pour l'emploi qui accepteraient de déménager à plus de deux cents kilomètres de leur domicile pour retrouver un emploi.

Ensuite, le revenu foncier retiré de la mise en location de la résidence principale à la suite d'une mutation géographique bénéficierait d'un abattement de 10 % sur les loyers perçus pendant les trois premières années.

3. La conciliation entre vie professionnelle et vie familiale

La difficulté pour certaines familles de faire face aux frais de garde des enfants peut constituer un obstacle à la reprise d'emploi.

C'est pourquoi l'article 62 du projet de loi de finances propose que le crédit d'impôt pour frais de garde des jeunes enfants en dehors du domicile familial soit augmenté pour faciliter le retour au travail des parents. Ce crédit d'impôt est actuellement égal à 25 % des frais engagés dans la limite de 2.300 euros par an et par enfant. Il est prévu de porter ce taux à 50 %. Cette mesure, qui concernerait environ 1 million de foyers, devrait coûter 300 millions d'euros.

III. LES PROGRAMMES ET INDICATEURS DE PERFORMANCE DE LA MISSION

Le projet de budget pour 2006 est le premier régi par les dispositions de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF). Les crédits de la mission sont répartis en cinq programmes , eux-mêmes subdivisés en seize actions, accompagnées d'indicateurs de performance.

Au cours de ses débats, l'Assemblée nationale a légèrement retouché les crédits de la mission, en raison de la suppression d'une disposition relative au financement de l'apprentissage.

L'article 37 de la loi de finances pour 2005 avait institué, au profit des régions, une contribution au développement de l'apprentissage (CDA) destinée à remplacer progressivement, sur trois ans, la dotation budgétaire qui leur est versée au titre de l'apprentissage. Or, dans sa version d'origine, l'article 18 du projet de loi de finances pour 2006 prévoyait d'accélérer ce processus et de porter, dès l'an prochain, le taux de cette contribution au niveau qu'il devait initialement atteindre en 2007.

L'Assemblée nationale s'est opposée à cette mesure, qui aurait accru les charges des entreprises et serait allée à l'encontre de leurs prévisions financières. Elle a donc supprimé l'article 18 et, ce faisant, privé les régions de 203 millions d'euros de recettes. A l'initiative du Gouvernement, cette perte sera compensée par l'Etat au moyen de redéploiements budgétaires.

En conséquence, les crédits attribués à la mission « Travail et emploi » ont été abondés à hauteur de 63 millions d'euros, le solde étant financé par des mesures d'économies prélevées sur deux de ses programmes. De ce fait, les documents budgétaires ne retracent plus exactement la situation présente.

A. LE PROGRAMME « DÉVELOPPEMENT DE L'EMPLOI »

Ce programme rassemble 881 millions d'euros de crédits, en baisse apparente de 95 % par rapport aux crédits inscrits en loi de finances pour 2005, en raison de la fiscalisation de la compensation des allégements de charges. Le programme est décliné en deux actions, l'une consacrée aux allégements de cotisations sociales, l'autre à la promotion de l'emploi. La décision d'affecter des ressources fiscales à la sécurité sociale pourrait inciter le Gouvernement à revoir le découpage de la mission puisque le premier programme, qui aurait dû recueillir les 19 milliards d'euros de crédits précédemment destinés à la compensation, est désormais réduit à la portion congrue.

1. Les allégements de cotisations sociales

Figurent dans cette action les crédits destinés au financement de l'aide à l'emploi dans le secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration, à hauteur de 561 millions d'euros, et les crédits destinés à la compensation des exonérations de cotisations sociales zonées ou ciblées.

Cette deuxième catégorie de crédits permet de financer les mesures suivantes :

- les entreprises installées dans une zone de revitalisation urbaine ou rurale (ZRU) ou (ZRR) qui emploient moins de cinquante salariés ont droit à une exonération pour chaque salarié embauché en CDI ou en CDD pour une durée supérieure à douze mois. L'exonération porte sur les salaires inférieurs à 1,5 Smic et s'applique pendant une durée de douze mois. Les crédits affectés à cette mesure sont modestes : 33 millions d'euros, après 27 millions d'euros en 2005 ;

- la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse a institué, pour les entreprises commerciales et artisanales de moins de cinquante salariés, des exonérations s'appliquant aux salaires d'un niveau inférieur au double du Smic, dans la limite de 228,7 euros par mois. Les crédits pour 2006 sont en baisse (6 millions d'euros contre 7 en 2005), en raison du basculement programmé d'un nombre croissant d'entreprises bénéficiaires vers le régime d'allégement de droit commun ;

- la loi de finances pour 1998 a créé une exonération spécifique au profit des hôtels, cafés et restaurants . Elle porte sur la part de rémunération versée sous forme d'avantage en nature au titre de la nourriture des salariés. Près de 500.000 salariés sont concernés par cette mesure. Les crédits pour 2006 sont en nette augmentation par rapport à 2005 (+ 27%) et s'élèvent à 140 millions d'euros. Il faut noter que cette mesure constitue une aide distincte de l'aide à l'emploi accordée aux entreprises du même secteur.

Un indicateur de performance doit permettre de mesurer l'évolution de l'emploi dans le secteur de la restauration, comparé à celui de l'ensemble des secteurs marchands. Il serait utile que cet indicateur soit élargi aux hôtels et cafés qui font l'objet des mêmes mesures spécifiques, et qu'il soit accompagné d'indicateurs relatifs aux mesures d'exonération territorialement ciblées.

2. La promotion de l'emploi

Deux types de dépenses sont regroupés dans cette action :

- les crédits destinés à accompagner le développement des emplois de services à la personne ; un indicateur se propose de suivre l'évolution des créations d'emplois dans le secteur des services à la personne, rapporté à l'évolution de l'emploi total ;

- les crédits d'aide à la création ou à la reprise d'entreprise.

Il existe trois principaux dispositifs d'aide à la création ou à la reprise d'entreprise : Eden, les chèques conseils et l'Accre.

• L'encouragement au développement d'entreprises nouvelles (Eden) a été créé par la loi du 16 octobre 1997 et aménagé par la loi du 29 juillet 1998.

Eden vise, d'une part, à faciliter l'accès des créateurs ou repreneurs d'entreprise au crédit bancaire par le biais d'une aide financière de l'Etat susceptible de faire « effet de levier », d'autre part, à pallier leur inexpérience grâce à un accompagnement post-création, et favoriser ainsi les chances de pérennité des entreprises créées ou reprises.

Les publics éligibles sont les jeunes âgés de moins de vingt-six ans et, sous certaines conditions, de moins de trente ans, les personnes salariées ou licenciées d'une entreprise en redressement ou en liquidation judiciaire, et les chômeurs de plus de cinquante ans.

L'aide de l'Etat prend la forme d'une avance remboursable, d'un accompagnement du créateur d'entreprise et, si nécessaire, du maintien de prestations sociales (ASS, allocation d'insertion, API, RMI et allocation veuvage) si l'examen du dossier en fait apparaître le besoin.

Le dispositif Eden a souffert, depuis 2004, de mesures de régulation budgétaire (gel de crédits) et de la parution tardive du décret d'application de la réforme du dispositif introduite par la loi n° 2003-721 du 1 er août 2003 pour l'initiative économique. Le nombre de personnes bénéficiaires et d'entreprises créées grâce à ce dispositif a, en conséquence, connu une chute brutale, qui n'a pas été corrigée depuis. Le fait que les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2006 soient au même niveau que ceux inscrits dans la loi de finances pour 2005 suggère que le nombre de bénéficiaires d'Eden ne devrait pas connaître d'augmentation l'année prochaine.

Il est regrettable qu'un dispositif dédié à l'aide à la création d'entreprise, ait ainsi fait l'objet de sévères mesures de restrictions budgétaires , alors que la création d'entreprise est une question prioritaire pour la majorité depuis 2002.

Le dispositif Eden

(en million d'euros)

2002

2003

2004

2005

2006

Nombre de bénéficiaires

9.630

9.519

3.926

1.246*

nd

Nombre d'entreprises créées

8.774

8.274

3.476

2.514*

nd

Crédits budgétaires inscrits en loi de finances initiale (en millions d'euros)

52,12

52,12

68,12

44,7

45

*Premier semestre 2005

nd : non disponible Source : ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement

• Les chèques conseil permettent d'obtenir une aide, avant ou après la création de l'entreprise, sous forme de conseils de nature financière, technique, juridique, comptable ou commerciale. Les organismes habilités s'engagent à respecter des principes déontologiques propres à leur profession, à facturer leurs interventions selon le prix fixé et à offrir des prestations individualisées.

Le chéquier conseil comporte six chèques d'une valeur nominale de 45,74 euros correspondant chacun à une heure de conseil. Le coût de l'heure de conseil est fixé à 60,98 euros, le créateur d'entreprise versant donc 15,24 euros par heure. Pour les bénéficiaires du RMI et de l'ASS, l'Etat prend en charge la totalité des 60,98 euros de l'heure pour le premier chéquier.

Après une année 2003 marquée par une forte contraction du nombre de chèques conseils délivrés (- 33,56 %), pour cause de restrictions budgétaires, 2004 a vu un nouvel essor du dispositif (hausse de 20 % du nombre de chèques délivrés). Pour 2005, les chiffres du premier semestre, seuls aujourd'hui connus, laissent présager une nouvelle progression. Les crédits demandés dans le projet de loi de finances sont au même niveau que ceux alloués en 2005.

Les chèques conseils

2002

2003

2004

2005

2006

Nombre de chèques conseils distribués

276.144

190.825

229.374

149.372
(1 er semestre)

nd

Crédits inscrits en loi de finances initiale (en millions d'euros)

6,05

6,05

6,05

16,13

16

nd : non disponible Source : ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement

Eden et les chèques conseils peuvent faire l'objet d'expérimentations au sens de l'article premier de la loi relative aux responsabilités locales : l'Etat peut, par convention, déléguer leur gestion aux régions et transférer les moyens correspondants. Aucune convention n'a cependant encore été signée, de sorte que la gestion de ces dispositifs demeure confiée aux directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP).

• L'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprises (Accre) leur permet de disposer d'une exonération de cotisations sociales pendant douze mois, trente-six mois s'ils optent pour le statut de la micro-entreprise.

Le nombre de bénéficiaires de l'Accre a fortement augmenté en 2004 (+ 44 % par rapport à 2003) et le dispositif a contribué à la création de 60.000 entreprises. Cette progression peut s'expliquer par les encouragements donnés par le Gouvernement à la création d'entreprise et par la situation dégradée du marché du travail, beaucoup de chômeurs trouvant dans la création d'entreprise une solution à leur problème d'emploi.

L'Accre n'occasionne pas de dépense budgétaire car la mesure d'exonération est intervenue avant la loi du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale et ne fait pas l'objet d'une compensation.

Plusieurs indicateurs de performance devraient permettre de suivre l'évolution du nombre d'entreprises et d'emplois créés grâce à ces dispositifs, ainsi que leur pérennité.

A la suite de la suppression de l'article 18 du projet de loi de finances, l'Assemblée nationale a réduit de 40 millions d'euros les crédits de ce programme. Le Gouvernement a estimé, après avoir affiné ses prévisions, que les montants alloués à l'aide à l'emploi dans les secteurs de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration et à l'exonération de cotisations patronales pour les services à la personne, pouvaient être réduits chacun de 20 millions d'euros, sans nuire à l'efficacité de ces mesures.

B. LE PROGRAMME « ACCÈS ET RETOUR À L'EMPLOI »

Le projet de loi de finances prévoit d'affecter 7,1 milliards d'euros à ce programme, soit un budget quasiment identique à celui voté en 2005. Ce programme, de loin le plus important en termes budgétaires, est subdivisé en deux actions.

1. L'indemnisation des demandeurs d'emploi et le rapprochement de l'offre et de la demande d'emploi

Cette première action devrait mobiliser 2,8 milliards d'euros de crédits en 2006.

Elle vise, en premier lieu, à assurer le financement du régime de solidarité d'indemnisation du chômage, dont la principale prestation est l'ASS, qui occasionne, à elle seule, un peu plus de 2 milliards d'euros de dépenses. D'autres prestations sont également versées, telles que l'allocation équivalent retraite (AER), la nouvelle allocation contrats « nouvelles embauches » ou encore l'allocation temporaire d'attente (ATA) pour les demandeurs d'asile.

Elle vise, en second lieu, à financer le service public de l'emploi : dotation à l'ANPE, à l'Afpa, financement des maisons de l'emploi.

Un indicateur vise à mesurer le degré de coordination entre les différents acteurs du service public de l'emploi en dénombrant les institutions présentes dans les maisons de l'emploi.

2. La mise en situation d'emploi des publics fragiles

4,2 milliards d'euros sont affectés à cette deuxième action, qui rassemble :

- les crédits destinés aux contrats aidés (contrats d'avenir, CIE, CAE, Civis, SEJE, CI-RMA), y compris les dispositifs en extinction (contrats emploi solidarité, contrats emploi consolidé, emplois-jeunes) ;

- les crédits destinés aux dispositifs d'insertion par l'économique ;

- la partie des crédits destinés à l'emploi des personnes handicapées qui figurent dans la mission « Travail et emploi ».

De nombreux indicateurs ont été conçus pour évaluer le bon usage et l'efficacité de ces crédits. Il est ainsi proposé de suivre le nombre de bénéficiaires de l'ASS concernés par des mesures d'activation des minima sociaux ou qui ont réussi à renouer avec l'emploi durable ; de suivre le taux de contrôle des demandeurs d'emploi indemnisés ; de mesurer le nombre d'emplois vacants ou le taux de sorties durables de la liste des demandeurs d'emplois pour différentes catégories de chômeurs ou pour les bénéficiaires des différents contrats aidés. Des indicateurs concernent plus spécialement les jeunes et les travailleurs handicapés.

Tirant les conséquences de la suppression de l'article 18, l'Assemblée nationale a réduit de 100 millions d'euros les crédits alloués à ce programme. Cette économie est autorisée par la baisse du chômage, qui permet de réduire de 50 millions d'euros les crédits consacrés à l'ASS. Pour le solde, le Gouvernement a indiqué que le nombre de contrats aidés signés en 2005 s'annonce moins important que prévu et qu'il entend recentrer les contrats jeunes en entreprise sur les personnes non diplômées et résidant dans les zones urbaines sensibles.

C. LE PROGRAMME « ACCOMPAGNEMENT DES MUTATIONS SOCIALES, ÉCONOMIQUES ET DÉMOGRAPHIQUES »

Ce programme réunit 4,38 milliards d'euros de crédits, en baisse de près de 10 % par rapport à 2005. Il est composé de deux actions de taille très inégale.

1. L'anticipation des mutations et le développement de la mobilité professionnelle

Cette action regroupe une part très faible des crédits du programme (12,3 %). Les dépenses de préretraite en représentent la composante principale.

Votre commission a souvent insisté sur les effets pervers des « mesures d'âge » : particulièrement coûteuses pour l'Etat, elles conduisent à écarter prématurément du marché du travail les salariés les plus expérimentés alors même que les évolutions démographiques à venir impliqueront nécessairement une augmentation du taux d'emploi des salariés les plus âgés. L'augmentation du taux d'emploi des seniors fait d'ailleurs partie aujourd'hui des priorités du Gouvernement, comme des partenaires sociaux, qui ont récemment conclu sur ce point un accord national interprofessionnel prévoyant notamment la création d'un « CDD senior » d'une durée de trois ans pour les chômeurs de plus de cinquante-sept ans.

Depuis plusieurs années, le Gouvernement a rendu progressivement plus restrictif le recours aux préretraites, grâce notamment à une responsabilisation financière accrue des entreprises. La loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu l'assujettissement de certaines préretraites d'entreprise à une contribution spécifique, la suppression, effective à compter de 2005, des préretraites progressives (PRP) et le recentrage progressif du dispositif de cessation anticipée d'activité de certains travailleurs salariés (CATS) vers les seuls salariés ayant exercé des activités pénibles.

Les dispositifs de retrait total ou partiel d'activité dans le secteur privé

• La préretraite ASFNE

Les conventions d'allocations spéciales licenciement du FNE permettent, dans le cadre d'une procédure de licenciement économique, et sur la base d'une convention entre l'Etat et l'entreprise, d'assurer, jusqu'à ce qu'ils aient pu faire valoir leurs droits à la retraite, un revenu de remplacement à des salariés âgés dont l'emploi est supprimé et dont les perspectives de reclassement sont réduites.

Pour en bénéficier, le salarié doit adhérer volontairement à la convention, s'il remplit des conditions d'âge (57 ans en principe), d'ancienneté dans l'entreprise (au moins un an), de durée de cotisation (au moins 10 ans d'appartenance à un ou plusieurs régimes de sécurité sociale) et ne plus exercer d'activité professionnelle.

L'allocation spéciale versée aux préretraités est égale à 65 % du salaire brut de référence, dans la limite du plafond retenu pour le calcul des cotisations de sécurité sociale et à 50 % du salaire brut de référence pour la part du salaire comprise entre une et deux fois ce plafond. Le versement de cette allocation est assuré jusqu'à 60 ans ou au-delà, jusqu'à l'obtention du nombre de trimestres de cotisations nécessaires à la liquidation de la retraite à taux plein, sans que cette allocation puisse être versée au-delà de 65 ans.

• La cessation d'activité de certains travailleurs salariés (CATS)

Défini à l'article R. 322-7-2 du code du travail, le dispositif de cessation anticipée d'activité de certains travailleurs salariés (CATS) repose largement sur la négociation collective.

Le départ de salariés en cessation d'activité n'est possible que s'il existe un accord professionnel national conclu en application de l'article L. 352-3 du code du travail. Cet accord doit préciser son champ d'application, les conditions d'ouverture du droit à la cessation d'activité, le montant de l'allocation versée aux salariés et ses modalités de versement, les conditions de la reprise d'activité dans l'entreprise et la durée de la période d'adhésion au dispositif.

En outre, le recours à la CATS suppose que l'entreprise ait signé un accord de gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences, portant en particulier sur les mesures destinées à assurer l'adaptation des compétences des salariés âgés dans l'entreprise.

Le financement de la CATS est pris en charge partiellement par l'Etat si les salariés ont connu des conditions de travail particulièrement pénibles : travail en équipes successives ou à la chaîne pendant 15 ans, travail de nuit (200 nuits par an pendant 15 ans), travailleurs handicapés. Les conventions avec l'Etat sont conclues sur une période de 5 ans au maximum et les entreprises en bénéficiant ne peuvent prétendre, en même temps, à des conventions d'allocations spéciales de licenciement (ASFNE).

• La préretraite progressive (PRP)

Les conventions de préretraites progressives, conclues entre l'Etat et un employeur, permettaient à des salariés âgés de plus de 55 ans de transformer leur emploi à temps plein en emploi à temps partiel. La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites a prévu la suppression de ce dispositif à compter du 1 er janvier 2005. Depuis cette date, il n'est plus possible de signer de nouvelles conventions de préretraite progressive.

En complément de leur rémunération au titre du temps partiel, les salariés en préretraite progressive reçoivent une allocation égale à 30 % de leur salaire brut de temps plein dans la limite du plafond de la sécurité sociale et 25 % pour la part de ce salaire excédant ce plafond dans la limite de deux fois ce dernier.

Le taux de participation de l'entreprise est modulé en fonction de deux critères : l'effectif de l'entreprise et l'engagement de recrutement de demandeurs d'emploi rencontrant des difficultés particulières sur le marché du travail.

• La prévision de dépenses pour 2006 au titre du dispositif ASFNE est d'un montant équivalent à celle de 2005, compte tenu d'une stabilisation du nombre de bénéficiaires. Depuis 2003, le taux effectif de participation des entreprises au financement de ces préretraites a doublé, ce qui explique la chute du nombre de bénéficiaires.

Evolution des allocations spéciales du fonds national pour l'emploi (ASFNE)
depuis 2002

Années

Effectifs

Crédits ouverts en LFI (en millions d'euros)

Flux

Stocks moyens

LFI

Prévision fonds de concours

Total

2002

6.803

39.524

144,83

214,19

359,02

2003

7.071

33.313

79,95

141,88

221,83

2004

4.855

27.472

15,00

155,25

170,25

2005 (au 30 juin*)

2.041*

22.917

13,00

159,91

172,91

Prévisions 2006

7.000

23.023

9,00

163,85

172,85

Source : Bulletin mensuel statistique de la Dares sur les restructurations, LFI, ACCT

• Les crédits prévus pour le financement des préretraites progressives sont en forte baisse par rapport à 2005. L'arrêt des entrées dans le dispositif entraîne, mécaniquement, une diminution importante du nombre de bénéficiaires.

Evolution des préretraites progressives (PRP)
depuis 2002

Années

Effectifs

Crédits ouverts en LFI (en millions d'euros)

Flux

Stocks moyens

LFI

Prévision fonds de concours

Total

2002

15.102

43.987

192,09

80,80

272,89

2003

15.940

48.657

190,71

113,40

304,11

2004

7.725

44.742

118,83

173,90

292,73

2005 (au 30 juin*)

3.333*

38.545*

254,73

35,09

289,82

Prévisions 2006

0

23.681

131,43

0

131,43

Source : Bulletin mensuel statistique de la Dares sur les restructurations, LFI, ACCT

• La dotation budgétaire pour la CATS s'est élevée en 2005 à 197,6 millions d'euros pour une prévision de 5.500 entrées. Le recours au dispositif devrait être encore plus limité en 2006, puisque le Gouvernement table sur seulement 3.000 nouvelles entrées, et les crédits demandés sont également en diminution pour s'établir à 176 millions d'euros. La CATS est, en effet, devenue plus coûteuse pour les entreprises depuis la parution du décret du 27 janvier 2005, pris pour l'application de la loi portant réforme des retraites.

Outre les préretraites, les dépenses inscrites dans cette action permettent notamment le financement :

- d'aides au conseil et à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences à destination des petites et moyennes entreprises (22,3 millions d'euros) ;

- de l'allocation temporaire dégressive, qui permet à un salarié qui accepte un emploi moins bien rémunéré que son emploi précédent de bénéficier d'un complément de rémunération pendant deux ans (13,4 millions) ;

- de l'allocation spécifique pour chômage partiel (26,5 millions) ;

- de la dotation globale de restructuration, qui est gérée au niveau déconcentré, et permet de mettre en place des cellules de reclassement, des conventions de formation et d'adaptation, des conventions de conversion, etc., destinées à éviter les licenciements ou à favoriser le retour vers l'emploi des salariés licenciés.

Les crédits relatifs à la convention de reclassement personnalisé figurent également au sein de cette action.

Plusieurs indicateurs de performance doivent permettre de suivre le nombre de salariés bénéficiaires de ces actions de formation et de reclassement, ainsi que leurs perspectives de retour à l'emploi. Aucun indicateur ne permet en revanche de mesurer l'efficacité des dépenses de préretraite, alors qu'elles représentent la plus grande part des dépenses de cette action. Il est vrai que leur finalité devient difficile à définir, à l'heure où les politiques publiques accordent la priorité à l'allongement de la durée d'activité.

2. L'amélioration de l'accès des actifs à la qualification

Les crédits de cette deuxième action, d'un montant de 3,8 milliards d'euros, sont consacrés à la formation professionnelle. Ils se décomposent en trois sous-actions et intègrent la subvention versée à l'Afpa au titre de ses charges de service public, qui s'élève à 551 millions d'euros en 2006.

• La première sous-action est dédiée au développement de l'alternance à tous les âges. L'Etat soutient l'alternance par la compensation d'exonération de cotisations sociales attachées au contrat d'apprentissage et aux contrats de professionnalisation concernant les jeunes de moins de vingt-six ans et les demandeurs d'emploi de quarante-cinq ans et plus. Le parcours d'accès aux fonctions publiques territoriale, hospitalière et de l'Etat (Pacte) obéit aussi au principe de l'alternance. Le projet de loi de finances prévoit de consacrer un peu plus de 2 milliards d'euros au financement de ces mesures.

• La deuxième sous-action est consacrée à la réduction des inégalités dans l'accès à la formation et à la qualification. Ainsi, l'Etat assure la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle lorsqu'il s'agit de chômeurs non indemnisés poursuivant une formation agréée et subventionne différentes associations intervenant dans le champ de la formation professionnelle ainsi que certaines structures et actions destinées à favoriser l'accès aux savoirs de base (lutte contre l'illettrisme notamment). Près de 1,7 milliard d'euros sont affectés à ces politiques publiques, dont 452 millions de subvention à l'Afpa au titre des formations qualifiantes qu'elle délivre.

• La troisième sous-action finance la validation des compétences . L'Afpa est également subventionnée à ce titre, puisqu'elle met en oeuvre la politique de certification du ministère, sous l'autorité des services déconcentrés (55 millions d'euros). Par ailleurs, l'Etat prend en charge les moyens nécessaires à la validation des acquis de l'expérience (VAE) pour la part de ces actions non transférée aux régions (19 millions d'euros).

L'Afpa perçoit également une subvention d'investissement de l'ordre de 41 millions d'euros.

De nombreux indicateurs permettent d'évaluer l'impact des dépenses de formation. Quatre indicateurs sont consacrés spécifiquement à l'apprentissage, afin d'apprécier notamment la qualité de l'insertion professionnelle des anciens apprentis ou le développement de l'apprentissage dans les entreprises de plus de cent salariés, alors que l'apprentissage est surtout présent dans de petites entreprises artisanales. Il manque en revanche un indicateur permettant de mesurer simplement le nombre d'apprentis , alors que le plan de cohésion sociale a fixé un objectif chiffré de 500.000 apprentis à l'horizon 2009.

D'autres indicateurs permettent d'apprécier le taux d'insertion dans l'emploi à l'issue d'un contrat de professionnalisation ou d'une formation délivrée par l'Afpa ou le développement de la VAE. Un indicateur particulièrement pertinent permet de mesurer le nombre de titres professionnels délivrés par le ministère, à la suite d'une formation ou d'une VAE, correspondant à des métiers connaissant des difficultés de recrutement.

La suppression de l'article 18 du projet de loi de finances prive les régions de 203 millions d'euros de recettes fiscales. A titre de compensation, l'Assemblée nationale a accru, à due concurrence, les crédits de ce programme, afin que les régions perçoivent bien les fonds qui leur étaient initialement alloués par le projet de loi de finances pour faire face aux charges qui leur incombent en matière d'apprentissage.

D. LE PROGRAMME « AMÉLIORATION DE LA QUALITÉ DE L'EMPLOI ET DES RELATIONS DU TRAVAIL »

Ce programme est de dimension plus modeste que les deux précédents, puisque la dotation demandée pour 2006 est de seulement 82 millions d'euros. Il concerne l'amélioration des conditions de travail des salariés en s'appuyant sur les trois leviers dont dispose l'Etat : le droit, l'incitation et l'encouragement au dialogue social.

Les crédits sont en nette augmentation par rapport à 2005 (+ 28 %), en raison de l'affectation de 9 millions d'euros à la nouvelle Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) et de la dotation de 15 millions d'euros prévue pour préparer les élections prud'homales de 2008 (passation de marchés publics, notamment, pour disposer de systèmes informatiques).

Le programme se décompose en quatre actions.

• La première, qui absorbe 23 % des crédits du programme, concerne la santé et la sécurité au travail . Y figurent les dotations à l'Afsset, à l'Agence nationale d'amélioration des conditions de travail (Anact) et au fonds d'amélioration des conditions de travail.

• La deuxième, qui regroupe près de 34 % des crédits, vise à améliorer la qualité et l'effectivité du droit . Les crédits prévus pour l'organisation des élections prud'homales, ainsi que pour la formation des conseillers prud'hommes et des conseillers du salarié, y sont inscrits.

• La troisième action rassemble 43 % des crédits et est dévolue au renforcement du dialogue social et de la démocratie sociale . L'Etat participe au financement de la formation syndicale en subventionnant, à cette fin, les grandes centrales syndicales (CGT, CGT-FO, CFDT, CFTC, CFE-CGC, UNSA) et encourage la négociation collective en finançant études et conseils.

• La dernière action du programme concerne la lutte contre le travail illégal . Elle constitue une priorité de l'action gouvernementale, comme en attestent le lancement, en 2004, d'un plan national contre le travail illégal et les outils nouveaux mis en place dans le cadre du plan santé au travail pour rendre plus efficaces les contrôles de l'inspection du travail (cellules d'appui pluridisciplinaires, plans d'action territoriaux). Les dépenses afférentes à cette action sont constituées de dépenses de personnel et ne figurent pas au sein du programme 111, mais au sein du programme suivant « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » qui est un programme support. Le rattachement de cette action à ce programme clarifierait sans doute la présentation de la mission.

Ce programme se caractérise par une abondance d'indicateurs de performance (21), qui peut paraître un peu disproportionnée vu la modestie des crédits en jeu. Ils visent à suivre l'activité de l'inspection du travail, l'efficacité des politiques menées en matière de prévention des risques professionnels, le dynamisme de la négociation collective et l'efficacité du travail administratif (délai de parution des décrets notamment).

E. LE PROGRAMME « CONCEPTION, GESTION ET ÉVALUATION DES POLITIQUES DE L'EMPLOI ET DU TRAVAIL »

Il s'agit d'un programme « support », qui réunit des moyens nécessaires à la mise en oeuvre de l'ensemble des politiques du ministère.

Il rassemble 724 millions d'euros de crédits, essentiellement consacrés à la rémunération des 11.000 agents du ministère, qui travaillent dans quatre directions d'administration centrale, vingt-six directions régionales et quatre-vingt-dix-neuf directions départementales, sans oublier les cabinets ministériels.

Les crédits sont en hausse de 12,8 % par rapport à 2005, en raison de la prise en charge par la mission de la nouvelle cotisation employeur retraite qui alimente le compte d'affectation spéciale « Pensions civiles et militaires de retraite et allocation temporaire d'invalidité ».

Le programme se décompose en six actions .

• Les quatre premières rassemblent les crédits nécessaires à la gestion des quatre précédents programmes. Elles correspondent à des moyens en personnel, tant au niveau central que déconcentré. On peut d'ailleurs se demander s'il ne serait pas préférable à l'avenir de rattacher ces dépenses aux programmes correspondants.

• Les deux dernières actions rassemblent des crédits qu'il s'avère impossible de distribuer entre les différents programmes :

- la cinquième action finance ainsi des dépenses de « soutien » : fonctions d'état-major, dépenses de fonctionnement et d'investissement de l'ensemble de la mission ;

- la dernière action rassemble des crédits d'études, de statistiques, de recherche et d'évaluation. Elle finance plus précisément la direction de l'animation de la recherche, des études et de la statistique (Dares), les services régionaux « Etudes, prospectives, évaluations, statistiques » (les Sepes), ainsi que le centre d'études pour l'emploi (CEE) et le centre d'études et de recherche sur les qualifications (Cereq).

Evolution des crédits dévolus à la conception, la gestion et
l'évaluation des politiques de l'emploi et du travail

(en millions d'euros)

Crédits de paiement pour 2006

Part du budget de la mission
(en %)

Action 1 Gestion du programme « Développement de l'emploi »

26,02

3,6

Action 2 Gestion du programme « Accès et retour à l'emploi »

78,05

10,8

Action 3 Gestion du programme « Accompagnement  des mutations économiques, sociales et démographiques »

78,05

10,8

Action 4 Gestion du programme « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail»

161,29

22,3

Action 5 « Soutien »

338,11

46,7

Action 6 « Etudes, statistiques, évaluation et recherche »

42,39

5,9

Total du programme « Développement de l'emploi »

723,90

47,4

Source : ministère de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement

Les indicateurs de performance attachés à ce programme sont variés. Ils visent à évaluer notamment : le degré de déconcentration des crédits et la qualité de la contractualisation avec les opérateurs dépendant du ministère ; le taux de satisfaction des agents, leur mobilité entre services et leur répartition géographique ; la satisfaction des usagers (qualité de l'accueil et de l'information dispensés) ; l'impact des travaux d'études réalisés par le ministère ; l'optimisation des dépenses de fonctionnement.

*

* *

Au total, votre commission approuve les grandes orientations de ce projet de budget, qui permet de mettre en oeuvre, dans de bonnes conditions, les politiques engagées ces dernières années.

Elle a donc émis un avis favorable à l'adoption des crédits du travail pour 2006, ainsi qu'à l'adoption des articles rattachés 91 et 92 .

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 91
Reconduction, pour 2006, des aides à l'emploi
dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants

Objet : Cet article propose de reconduire en 2006 les aides à l'emploi mises en place au profit du secteur des hôtels, cafés et restaurants.

I - Le dispositif proposé

La loi n° 2004-804 du 9 août 2004 relative au soutien à la consommation et à l'investissement a mis en place un dispositif d'aide au secteur des hôtels, cafés et restaurants, qui devait, en principe, s'appliquer jusqu'au 31 décembre 2005. Ce dispositif se décline en deux volets :

• Une aide à l'emploi prenant la forme d'une prime :

- de 114,40 euros par mois et par salarié à temps plein percevant une rémunération égale au Smic ;

- d'un montant maximal de 114,40 euros par mois et par salarié à temps plein, dont la rémunération est supérieure au Smic ;

• Une aide au conjoint collaborateur consistant en une prise en charge de la moitié des cotisations d'assurances vieillesse et invalidité-décès des professions artisanales, industrielles et commerciales dues par les conjoints collaborateurs adhérant volontairement à ce régime.

L'objet du présent article est de prolonger l'application de ces dispositions jusqu'au 31 décembre 2006.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

L'aide à l'emploi, dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants, dont le montant moyen est de 72,50 euros par mois, concerne un nombre important de salariés, de l'ordre de 460.000 en équivalents temps plein, selon les données communiquées par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Son coût brut prévu en 2006 est supérieur à 400 millions d'euros.

Il n'existe pas encore d'évaluation de l'impact de ces mesures sur les créations d'emplois dans les secteurs concernés. Votre commission est cependant convaincue, au vu notamment des comparaisons internationales qui existent sur le sujet, que ces secteurs comportent d'importants gisements d'emplois, pourvu que l'Etat sache créer l'environnement favorable à leur émergence.

En conséquence, votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 92
Extension du champ des allocations
prises en charge par le fonds de solidarité

Objet : Cet article propose d'élargir le champ d'intervention du fonds de solidarité pour tenir compte de la création du contrat d'avenir, du contrat d'insertion-revenu minimum d'activité (CI-RMA) et du contrat « nouvelles embauches » (CNE).

I - Le dispositif proposé

Institué par la loi n° 82-939 du 4 novembre 1982 relative à la contribution exceptionnelle de solidarité en faveur des travailleurs privés d'emploi, le fonds de solidarité a pour mission de financer les allocations de solidarité versées aux demandeurs d'emploi qui ont épuisé leurs droits à l'assurance chômage : allocation spécifique de solidarité (ASS), allocation équivalent retraite (AER) et aide aux chômeurs créateurs d'entreprises bénéficiant de l'ASS (ASS - ACCRE).

Le fonds est alimenté par la cotisation de solidarité versée par les fonctionnaires (1 % de leur traitement brut) et par une subvention d'équilibre de l'Etat.

Cet article propose de réécrire le deuxième alinéa de l'article premier de la loi qui a instauré le fonds de solidarité afin d'élargir le champ de ses interventions. Plus précisément, ce fonds aurait vocation :

- à financer l'allocation forfaitaire prévue à l'article 3 de l'ordonnance n° 2005-893 du 2 août 2005 : elle bénéficie aux titulaires d'un contrat « nouvelles embauches », dont le contrat est rompu avant qu'ils n'aient pu acquérir des droits à l'assurance chômage ;

- à verser les aides auxquelles ont droit les employeurs qui ont conclu un contrat d'avenir ou un CI-RMA, lorsqu'elles prennen la forme d'une activation de l'ASS perçue par les titulaires de ces contrats.

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II - La position de votre commission

Votre commission constate que les modifications proposées visent à mettre en oeuvre les engagements pris au moment de la création des contrats d'avenir, CI-RMA et CNE. Ayant approuvé la création de ces contrats, votre commission ne peut aujourd'hui que soutenir les modifications proposées.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Réunie le mardi 25 octobre 2005 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , sur le projet de budget de son ministère pour 2006 (mission « Travail et emploi »).

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, a présenté les crédits de la mission « Travail et emploi ». Il a fait état d'une progression globale des moyens de 5 % par rapport à 2004, dépenses fiscales comprises. En ce qui concerne la répartition par programme, l'accès et le retour à l'emploi mobilisent 55 % des crédits de paiement ; l'accompagnement des mutations économiques sociales et démographiques en représente 35 % ; le développement de l'emploi, 7 %. Viennent ensuite les actions concernant la conception, la gestion et l'évaluation des politiques de l'emploi et du travail, ainsi que l'amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail.

Il a évoqué l'évolution des dispositifs en faveur de l'accès et du retour à l'emploi dans les secteurs marchand et non marchand. C'est ainsi que le projet de budget prévoit pour 2006, hors revenu minimum d'activité (RMA), 420.000 contrats, chiffre à comparer avec les 340.000 contrats prévus en flux pour 2005. Rappelant la fongibilité des crédits destinés à ces actions, il a précisé que le nombre des contrats d'accompagnement vers l'emploi (CAE) est plus important que prévu (il se situe au-dessus de 1.200 par jour), a souligné l'importance du dispositif du contrat jeune en entreprise (CJE) et a noté que le dispositif des contrats d'initiative emploi (CIE) est en phase de montée en charge, le CIE nouveau comptant actuellement 800 entrées par jour dans le secteur marchand. Ce succès n'est pas dû à un effet d'aubaine : il s'agit en effet d'un dispositif de reclassement et d'accompagnement des salariés touchés par des difficultés économiques. Le ministre a cité à cet égard le « plan Vosges », élaboré en partenariat avec le département des Vosges et la région Lorraine, dans le cadre duquel des CIE ont été inscrits parmi un ensemble de mesures de formation, de reclassement et de réinsertion professionnelle dans le secteur marchand.

Le dispositif des contrats de professionnalisation, fruit d'un accord des partenaires sociaux, prend son essor, mais lentement, d'autant que se pose un problème de « contrats orphelins » résultant du fait que les branches, en définissant dans les secteurs qu'elles couvrent les priorités des contrats, ne retiennent pas nécessairement certaines formations interprofessionnelles telles que celles d'aide comptable ou de secrétaire. C'est ainsi que certains projets de contrats de professionnalisation ne disposent pas du support financier nécessaire. Le problème est en cours de règlement et les quelque 5.000 à 8.000 contrats orphelins en attente devraient être menés à bonne fin, ce qui permettra de rattraper le léger retard enregistré sur ce dispositif par rapport à 2004 : 53.860 contrats de professionnalisation ont été conclus fin août, contre 56.386 enregistrés à la fin août 2004.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a indiqué qu'en revanche, le nombre de contrats d'apprentissage a augmenté de 2 %, ce qui devrait permettre de parvenir à l'objectif de 500.000 apprentis en 2009. Des contrats d'objectifs et de moyens ont été signés à cet égard dans dix-neuf départements. Une difficulté a été levée avec la région Ile-de-France, ce qui permettra de signer des contrats d'objectifs et de moyens comportant, outre l'amélioration du statut de l'apprenti, une ouverture à la formation linguistique et culturelle, une ouverture européenne et des dispositions relatives à l'accès au logement. Ce dernier volet est essentiel pour résoudre des situations très difficiles dans certaines zones. On a enregistré 35.000 entrées en apprentissage en septembre, contre 32.000 en septembre 2004. Les contrats d'objectifs et de moyens prévoient l'augmentation du nombre de places en centres de formation des apprentis et dans les lycées professionnels, entre 20 % et 40 %, en fonction des besoins des régions. Le projet de budget traduit ce programme. Il prévoit en particulier la conclusion de 160.000 contrats de professionnalisation jeunes contre 120.000 l'an passé, ainsi que celle de 15.000 contrats adultes.

Par ailleurs, le plan national d'action seniors a prévu de doubler le nombre de contrats de professionnalisation en faveur des plus de cinquante ans.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a ensuite noté que la situation de l'emploi s'améliore globalement depuis cinq mois, mais que l'emploi des jeunes reste préoccupant. Si l'apprentissage progresse, il existe en effet une frange de jeunes en grande difficulté. A la fin octobre, 60.000 contrats d'insertion dans la vie sociale (Civis) auront sans doute été conclus, mais il faudrait engager un Civis renforcé, bénéficiant d'un accompagnement social et financier - il s'agit des 900 euros mis à la disposition de l'accompagnant ou du référent - car un certain nombre de jeunes ont des préoccupations immédiates de logement et de subsistance, qui sont autant de facteurs d'exclusion les tenant éloignés de l'emploi malgré le Civis. Pour répondre à ce problème, le budget comporte un crédit de 327 millions d'euros pour l'accueil renforcé des jeunes. Pour les 100.000 Civis prévus pour l'an prochain, presque tous les référents sont embauchés.

A la fin de l'année, 65 à 70 maisons de l'emploi seront ouvertes. L'objectif est d'atteindre 200 maisons à la fin 2006. Un montant de 128 millions d'euros a été prévu à cette fin en investissement et en fonctionnement.

Les postes subventionnés par l'Etat dans les associations d'insertion bénéficieront de 14 millions d'euros, avec une dotation de 15.000 euros par projet, chaque association pouvant bénéficier de deux projets.

Les allégements de charges sont un élément du coût du travail. Tout allégement supplémentaire devra être ciblé sur un objectif particulier, afin de jouer effectivement le rôle de levier. Ainsi les 1.000 euros de prime ou de bonification prévus pour inciter les jeunes à travailler dans les secteurs qui connaissant des difficultés de recrutement ne seront attribués que dans les entreprises ayant conclu des négociations salariales au cours de l'année. Dans le secteur de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration, le dispositif en place sera reconduit dans l'attente d'une éventuelle baisse du taux de TVA, mais la question de la négociation salariale et de la qualité de l'emploi dans le secteur est posée.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a ensuite évoqué le contrat nouvelles embauches (CNE), les moyens budgétaires consacrés à l'assurance perte d'emploi et le suivi personnalisé par le service public de l'emploi. L'objectif est, à cet égard, de renforcer l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) afin de parvenir à un suivi mensuel du demandeur d'emploi. Un récent voyage en Suède en compagnie des partenaires sociaux a montré que le suivi régulier accompagné de formations et de bilans constitue l'élément essentiel de la réduction du temps de retour vers l'emploi. Tel est l'un des sujets en discussion avec les partenaires sociaux à l'occasion de la négociation sur la révision de l'assurance chômage. Le guichet unique offert par les maisons de l'emploi permettra une rationalisation à cet égard.

Enfin, il a indiqué qu'une réflexion est engagée sur l'adaptation de l'inspection du travail aux besoins actuels dans le domaine de la santé au travail. Le projet de budget prévoit un renforcement des cellules pluridisciplinaires sur ce thème. De telles cellules ont été mises en place en 2005 dans sept régions ; en 2007, huit régions seront dotées de cellules, avec trente postes supplémentaires. Par ailleurs, 130 postes seront ouverts par redéploiement à l'intérieur du ministère, aux concours d'inspecteurs et de contrôleur du travail, au lieu de quarante et un l'année précédente. Depuis trente ans, le pilier travail avait été un peu sacrifié dans l'action du ministère au profit du pilier emploi ; or le développement de certaines pathologies implique des politiques plus actives dans ce domaine. Aujourd'hui, moins du tiers des inspecteurs et contrôleurs sont affectés à des missions d'inspection : il faut envisager de réexaminer la logique de déroulement des carrières afin de régler ce problème. Par ailleurs, l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) bénéficiera d'une dotation de 8,6 millions d'euros et pourra recruter dix ingénieurs supplémentaires afin de bénéficier d'une équipe de cinquante spécialistes de haut niveau en 2009.

M. Louis Souvet, rapporteur pour avis de la mission « Travail et emploi » , a constaté que le projet de budget pour 2006 ne consacre plus de crédits à la compensation des allégements de cotisations sociales, mais affecte des taxes et impôts à la sécurité sociale. Il a donc voulu connaître les raisons qui ont présidé à ce choix et à la sélection des recettes transférées. Il a souhaité savoir si le produit de ces charges et impôts augmentera au même rythme que les allégements de charges.

Concernant la reconduction annoncée de l'aide à l'emploi dans le secteur de l'hôtellerie-café-restauration, il a demandé des précisions sur l'effet de cette mesure sur l'emploi et les salaires et son éventuelle pérennité, si une baisse de la TVA dans ce secteur n'est pas obtenue.

Il s'est également interrogé sur l'état de mise en oeuvre des nouveaux contrats aidés et des maisons de l'emploi prévus par le plan de cohésion sociale, notamment pour le contrat d'avenir qui a fait l'objet de modifications législatives récentes, ainsi que sur le nombre de créations nettes d'emplois permises par le contrat « nouvelles embauches » créé par le plan d'urgence pour l'emploi.

Il a ensuite demandé si la convention tripartite Etat-ANPE-Unedic prévue par la loi de programmation pour la cohésion sociale pour améliorer la coopération entre les services sera signée prochainement et quelles avancées elle permettra.

Enfin, il a interrogé le ministre sur les suites qu'il compte donner aux conclusions de la négociation relative à l'emploi des seniors, notamment la proposition relative à la création d'un contrat à durée déterminée (CDD) adapté et la possibilité de supprimer ou de réformer la contribution Delalande.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a indiqué que les recettes transférées à la sécurité sociale en contrepartie des allégements de cotisations ont vocation à être pérennes et ont été choisies en raison de leur lien avec les problématiques de santé publique, à l'instar d'une partie des droits sur les tabacs et alcools. Il a estimé que ce panier de recettes doit augmenter comme la masse salariale, et donc comme les cotisations dont elles compensent l'allégement, et a souligné que cette réforme répond aux préconisations du Sénat en matière de clarification des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

Concernant l'aide à l'emploi dans les entreprises de l'hôtellerie-café-restauration, la mesure prévue par le projet de budget ne vise pas à pérenniser, mais à annualiser, l'aide, en attendant la diminution du taux de TVA. Il a annoncé que le prochain conseil ECOFIN traitera de la TVA dans le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) et que celui du mois de décembre abordera cette question pour l'hôtellerie-café-restauration. Il a estimé que cette aide doit, en contrepartie, permettre une amélioration substantielle des grilles de salaires et des conditions de travail des salariés dans ce secteur.

Il a ensuite indiqué que 7.000 contrats d'avenir sont signés à ce jour contre 655 au 1 er juillet dernier. Les contrats d'accompagnement dans l'emploi sont au nombre de 80.000 ; ils n'étaient que 10.000 à la même date. Au total, on compte aujourd'hui 249.684 contrats aidés, soit une augmentation de plus de 16.000 contrats au cours des quatre derniers mois. Par ailleurs, selon les estimations établies par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) en fonction des déclarations uniques d'embauche des employeurs sur Internet, 74.000 contrats « nouvelles embauches » sont signés au 17 octobre. Ce nombre doit être comparé aux 377.000 contrats à durée indéterminée (CDI) et aux 1.120.500 CDD signés au mois de septembre.

Concernant la convention tripartite Etat-ANPE-Unedic, il a précisé que les parties se sont entendues, le 6 octobre, sur un consensus : un système informatique commun sera mis en place au mois de juillet 2006, le rapprochement physique des implantations sera recherché et des actions de formations communes seront organisées. La signature de la convention est prévue pour le début de l'année 2006.

Puis M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a rappelé que le taux d'emploi des seniors, qui ne s'élève qu'à 37 % aujourd'hui, devrait être supérieur à 50 % d'ici 2010. Il a fait valoir que la Finlande a réussi une telle progression grâce à l'action de l'ensemble des partenaires sociaux et à la mise en oeuvre d'un plan national. Pour s'inspirer de cet exemple, la France doit s'appuyer sur trois priorités : le maintien dans l'emploi grâce à la formation et à la validation des acquis de l'expérience (VAE), le retour à l'emploi et les aménagements de fin de carrière, comme la possibilité de cumuler un salaire et une pension de retraite. Conformément à la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, les partenaires sociaux ont négocié sur ces questions : leurs propositions seront connues mi-novembre et un plan national d'action pourra ensuite être mis en oeuvre, comprenant notamment une mesure sur le CDD adapté.

Il a enfin reconnu que la contribution Delalande, qui apporte chaque année 500 millions d'euros de recettes au Fonds national de l'emploi (FNE) et à l'Unedic, avait perdu de son efficacité au fil des dérogations - une dizaine aujourd'hui - progressivement accordées. Ainsi, sur 230.000 salariés âgés de plus de cinquante ans pris en charge par l'Unedic en 2004, seuls 30.000 ont fait l'objet du paiement de la contribution lors de leur licenciement. En outre, la mission menée récemment par l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et l'Inspection générale des finances (IGF) a conclu que le dispositif n'a pas permis d'éviter le licenciement des seniors mais a, au contraire, contribué à leur stigmatisation au sein des entreprises. Pour ces motifs, les dérogations au paiement de la contribution doivent être supprimées et il convient d'appliquer la mesure prévue par la loi portant réforme des retraites, consistant à exonérer les entreprises qui embauchent des salariés de plus de quarante-cinq ans.

En conclusion, M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a considéré que l'Etat, les entreprises et les partenaires sociaux doivent prendre acte de l'échec de la politique consistant à développer l'emploi des jeunes au détriment de celui des salariés âgés, et rendre à ces derniers toute leur place dans l'économie.

M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission « Solidarité et intégration » , a fait valoir que le manque de places dans les centres de formation d'apprentis (CFA) limite le nombre de contrats d'apprentissage. Il a souhaité le développement de liens entre les CFA et les lycées professionnels pour remédier à ce problème.

Il s'est interrogé sur la possibilité de réserver la prime de 1.000 euros, versée aux bénéficiaires de minima sociaux qui retrouvent un emploi, à certaines dépenses, comme l'affiliation à une mutuelle par exemple.

Enfin, il s'est inquiété du montant de l'aide au poste prévue pour les entreprises adaptées qui emploient des personnes handicapées, qui ne semble pas correspondre au coût réel pour ces entreprises.

M. Alain Milon a interrogé le ministre sur la pérennité des maisons de l'emploi et sur l'engagement financier de l'Etat en leur faveur, indiquant à cet égard que la création d'une maison de l'emploi dans son département avait nécessité l'emploi de trente personnes supplémentaires, dont les collectivités ne pourront supporter seules le coût à l'avenir.

M. Guy Fischer a évoqué le souhait des associations professionnelles représentatives des inspections pour que l'on procède à un rapprochement entre inspections du travail, de l'agriculture et des transports.

Mme Bernadette Dupont a estimé que l'insuffisance de la formation de base de nombreux jeunes, notamment issus de l'immigration, et de certaines personnes handicapées constitue un frein important pour leur intégration sur le marché du travail.

Mme Isabelle Debré a regretté que le dispositif de la VAE ne soit pas plus efficace, à cause notamment du manque de personnes chargées de l'évaluation, ce qui pose un réel problème dans certaines structures d'accueil des jeunes enfants.

M. Alain Gournac a souhaité que la diminution du taux de TVA dans le secteur de l'hôtellerie-café-restauration ait, comme contrepartie, l'amélioration de la situation des salariés. Concernant les inspections du travail, il a estimé qu'il convient de changer les mentalités de certains de ces professionnels, en rappelant que leurs missions s'inscrivent dans le respect de l'ordre public et du droit du travail.

En réponse à M Paul Blanc, rapporteur pour avis de la mission «  Solidarité et intégration », M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a rappelé que, dans le cadre de leurs contrats d'objectifs et de moyens, les régions peuvent déjà développer les liens entre les CFA et les lycées professionnels. Les efforts fournis par certains secteurs en matière d'apprentissage, comme le BTP, permettent d'augmenter le nombre de places en CFA, à condition que les besoins du bassin d'emploi soient pris en compte. Il a souhaité qu'un accompagnement personnalisé des bénéficiaires de la prime de 1.000 euros par le réseau associatif soit développé pour permettre une utilisation efficace de cette mesure. Ce type d'accompagnement a déjà fait la preuve de son efficacité dans le cadre du revenu minimum d'activité (RMA). Il a annoncé que le montant de l'aide au poste pour les entreprises adaptées fait actuellement l'objet d'une évaluation du ministère des finances et de celui de la santé. Des correctifs seront apportés au projet de budget s'ils s'avèrent nécessaires.

Il a ensuite rappelé à M. Alain Milon que les maisons de l'emploi ne doivent pas obligatoirement être des structures nouvelles nécessitant des embauches coûteuses mais surtout constituer le lieu unique du service public de l'emploi.

En réponse à M. Guy Fischer, il s'est déclaré favorable à un rapprochement expérimental entre l'inspection du travail et celle de l'agriculture dans quelques territoires pour répondre aux critiques de l'organisation internationale sur travail (OIT) sur l'absence d'un service central de l'inspection. Il s'est en revanche montré plus réservé sur la possibilité d'un rapprochement avec l'inspection des transports, compte tenu des spécificités de ces métiers.

Il a indiqué à Mme Bernadette Dupont que les équipes de réussite éducatives et le dispositif « défense deuxième chance » ont justement pour objet d'améliorer la formation de base des jeunes les plus défavorisés. Concernant les personnes handicapées, il a souhaité que les comportements changent à leur égard, dans l'éducation nationale comme dans le monde du travail.

Il a considéré, en réponse à Mme Isabelle Debré, que la VAE doit entraîner une révolution culturelle dans l'éducation nationale pour permettre sa reconnaissance effective.

M. Bernard Seillier a estimé, à cet égard, que, pour être efficaces, les jurys de VAE doivent sortir d'une évaluation scolaire pour juger des compétences professionnelles.

M. Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes , a enfin indiqué à M. Alain Gournac que l'évolution de la formation des inspecteurs du travail, plus interdisciplinaire et tournée vers l'Europe, contribuera au changement d'état d'esprit de la profession.

II. EXAMEN DE L'AVIS

Réunie le mardi 22 novembre 2005 sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Louis Souvet sur le projet de loi de finances pour 2006 (mission « Travail et emploi) ».

M. Louis Souvet, rapporteur pour avis , a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général du présent avis).

M. Roland Muzeau a regretté que les modifications fréquentes du périmètre de ce budget rendent difficiles les comparaisons d'une année sur l'autre, même s'il a déclaré prendre acte des déclarations rassurantes du rapporteur. Il a indiqué que le montant des dépenses fiscales décidées dans le cadre de la politique de l'emploi s'élève, selon lui, à 22 milliards d'euros, pour un volume de création d'emplois vraisemblablement très modeste. Il a souligné que la France continue à perdre des emplois industriels et s'est indigné du montant de la rémunération des patrons du CAC 40 qui, bien qu'elle s'inscrive en baisse par rapport à 2005, est encore en moyenne de 5,6 millions d'euros par an et dénuée de lien avec la performance de l'entreprise qu'ils dirigent.

Il a souhaité savoir combien d'emplois ont été créés dans le secteur des hôtels, cafés et restaurants, et à quel coût, depuis la mise en place de l'aide à l'emploi.

Il a ensuite considéré que la politique suivie par l'ancien ministre du travail, François Fillon, consistant à supprimer des emplois aidés dans le secteur non marchand, s'était soldée par un échec, contraignant le Gouvernement à revenir sur cette orientation.

Il a enfin regretté que le temps de parole alloué aux groupes pendant le débat en séance publique soit trop réduit pour leur permettre de développer complètement leurs analyses.

M. Alain Gournac a lui aussi souhaité disposer d'une évaluation des effets de l'aide à l'emploi dans les secteurs de l'hôtellerie, des cafés et de la restauration. Il s'est réjoui de la mobilisation des services de l'ANPE, estimant notamment que l'organisation d'un entretien mensuel avec les demandeurs d'emploi améliorera leurs chances de retour à l'emploi. Il a rappelé les difficultés que connaissent les jeunes, même diplômés, pour s'insérer sur le marché du travail et a soutenu la priorité, confirmée par ce projet de budget, que le Gouvernement accorde à la lutte contre le chômage.

M. Guy Fischer a regretté à son tour que la modification du périmètre du budget rende difficile l'appréciation de l'évolution exacte des crédits. Il s'est dit étonné par l'insistance du rapporteur sur la nécessité de concentrer, à l'avenir, la discussion budgétaire sur l'analyse des indicateurs de performance. Concernant l'Unedic, il a déploré qu'il soit envisagé de diminuer la durée et le montant de l'indemnisation des chômeurs. Il a enfin rappelé que les femmes connaissent des difficultés particulières d'insertion sur le marché du travail, de même que les jeunes, dont le taux de chômage est le double de la moyenne nationale et peut atteindre 50 % dans les quartiers les plus déshérités.

Mme Gélita Hoarau a apporté un éclairage sur la situation économique et sociale difficile de la Réunion. Elle a indiqué que le conseil des ministres en charge de l'agriculture doit décider prochainement, à Bruxelles, d'une baisse de 35 % du prix du sucre, qui fera l'objet d'une compensation partielle, prélude à une diminution qui devrait atteindre 60 % au total. Or, 15.000 familles vivent de l'agriculture dans ce département et cette décision va durement toucher la filière canne, alors même que la filière banane est déjà menacée. A son sens, une véritable catastrophe économique, sociale et écologique est à redouter.

La Réunion connaît le plus fort taux de chômage et la plus forte proportion de titulaires du revenu minimum d'insertion (RMI) de tous les départements français et elle est également confrontée à une grave crise du logement, qui pourrait justifier l'adoption d'une loi spécifique sur le logement outre-mer.

Elle a, en conséquence, souhaité que s'engage un débat sans concession sur le bilan des politiques d'emploi et a fait part de la perplexité des élus de la Réunion sur les moyens à mettre en oeuvre pour surmonter ces graves problèmes économiques et sociaux, auxquels le présent projet de budget n'apporte pas de réponse satisfaisante.

M. Louis Souvet, rapporteur pour avis , a indiqué à Mme Gélita Hoarau que les problèmes sectoriels qu'elle évoque excèdent le cadre de son rapport et l'a invitée à interroger également sur ce thème le rapporteur pour avis de la mission « Outre-mer », Mme Anne-Marie Payet. Soulignant le dynamisme de la création d'entreprises à la Réunion, il a rappelé que le fort taux de natalité de cette île entraîne une augmentation rapide de la population active qui rend plus difficile la baisse du taux de chômage.

En réponse à MM. Roland Muzeau et Alain Gournac, il a cité les données figurant dans les documents budgétaires, qui indiquent que le nombre de salariés dans le secteur de la restauration, évalué à 803.000 en 2004, devrait atteindre 850.000 en 2006, selon les prévisions du Gouvernement. Il a également rappelé que les partenaires sociaux avaient décidé, par voie conventionnelle, la suppression du « SMIC hôtelier » et l'attribution de jours de congés supplémentaires aux salariés de ces secteurs, ce qui montre que l'aide à l'emploi s'est accompagnée d'une amélioration des conditions offertes aux salariés.

En réponse à M. Guy Fischer, il s'est dit effectivement très attaché au suivi des indicateurs de performance et a estimé que le Parlement devrait avoir le courage de supprimer les dépenses pour l'emploi dont l'efficacité se révèlerait insuffisante.

M. Nicolas About, président , est revenu sur la fiscalisation de la compensation des allégements de charges. Il a approuvé l'initiative de la commission des finances consistant à remplacer le panier de recettes par une fraction de la TVA, jugeant qu'elle permettrait de mieux respecter le principe de la compensation intégrale des allégements de cotisations, et a jugé possible que cette proposition soit finalement adoptée.

La commission a enfin émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2006 ainsi qu'aux articles 91 et 92 rattachés.

Au cours de sa réunion du 22 novembre 2005, la commission des Affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » pour 2006.

Elle a également émis un avis favorable à l'adoption des articles n os 91 et 92 rattachés à ces crédits.

* 1 Cf. Audition du 25 octobre 2005 devant la commission, p. 53.

* 2 Permanences accueil information orientation.

* 3 Cf. rapport général n° 2568, tome 2, « Conditions générales de l'équilibre financier », p.587, par M. Gilles Carrez.

* 4 Rapport du Conseil d'analyse économique, « Productivité et emploi dans le tertiaire », la Documentation française, juin 2004.

* 5 L'article 2 de la loi dispose que les cotisations et contributions patronales sont calculées soit sur une base forfaitaire (égale, par heure de travail, à une fois la valeur horaire du SMIC applicable au premier jour du trimestre civil considéré), soit sur les rémunérations réellement versées au salarié. Le choix entre ces deux options se fait d'un commun accord entre l'employeur et le salarié ; en l'absence d'accord, ou à défaut de choix mentionné par l'employeur, la base réelle est retenue.

* 6 Cf. Audition du 25 octobre 2005 devant la commission de Gérard Larcher, ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, ,p. 52.

* 7 La prime se compose d'une part individuelle, proportionnelle aux revenus professionnels, et d'une part forfaitaire accordée au titre des charges de famille supportées par le foyer fiscal. Il n'est pas prévu que cette deuxième part fasse l'objet d'une revalorisation.

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