CHAPITRE DEUX - LE DERNIER PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA LÉGISLATURE
I. LE CADRAGE GÉNÉRAL DU PRÉSENT PROJET DE LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
A. DES DISPOSITIONS ÉTRANGÈRES AU CHAMP DES LOIS DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Votre rapporteur pour avis a pu constater que le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale comporte plusieurs dispositions manifestement étrangères au champ des lois de financement de la sécurité sociale, constituant, dès lors, au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, des « cavaliers sociaux ».
1. La notion de « cavalier social » définie par la jurisprudence du Conseil constitutionnel
A cet égard, il est utile de rappeler que les dispositions censurées par le Conseil constitutionnel comme étrangères au champ des lois de financement de la sécurité sociale ont toujours présenté la triple caractéristique :
- de ne relever d'aucune des catégories définies par l'article LO. 111-3 du code de la sécurité sociale ;
- de ne pas contribuer à l'amélioration de l'information et du contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ;
- d'avoir un impact financier nul ou inférieur à 15 millions d'euros sur les recettes ou sur les dépenses des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale.
Ainsi, dans sa décision n° 2005-528 DC du 15 décembre 2005 sur la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006, le Conseil constitutionnel avait censuré de nombreuses dispositions ne trouvant pas leur place dans la loi de financement au regard du contenu des lois de financement de la sécurité sociale limitativement défini par la loi organique du 2 août 2005 relative aux lois de financement de la sécurité sociale (LOLFSS).
La liste des « cavaliers sociaux » de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 censurés par le Conseil constitutionnel A) Dispositions relatives à des organismes ou établissements extérieurs au périmètre tracé par l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale Le I de l'article 15 prévoyait la signature par les organisations les plus représentatives des organismes d'assurance maladie complémentaire d'une convention définissant les modalités de mise en oeuvre par les assureurs de la procédure du recours contre tiers. Les articles 93 et 94 disposaient que les organismes d'assurance maladie complémentaire seraient informés par les caisses d'assurance maladie de la mise en oeuvre des procédures définies aux articles L. 133-4 et L. 314-1 du code de la sécurité sociale. Aucune de ces dispositions ne concernait les règles de fonctionnement, de financement ou de gestion d'entités comprises dans le champ (pourtant élargi par la loi organique du 2 août 2005) des organismes régis par les LFSS. B ) Dispositions n'ayant pas d'effet suffisamment direct sur les recettes (1° et 2° du B du V de l'article L.O. 111-3 CSS) L'article 25, un des plus longs de la loi, figurait dans le projet. Il intéresse la lutte contre le travail illégal. Son paragraphe VI avait pour but de lutter contre l'emploi d'étrangers ne disposant pas d'un titre les autorisant à exercer une activité salariée en France en renforçant les obligations des entreprises clientes à l'égard de leurs co-contractants susceptibles d'employer des étrangers en situation irrégulière. De plus, il soumettait les particuliers à la même obligation de contrôle que les autres employeurs. Contrairement aux autres dispositions de l'article 25 (destinées à prévenir l'évasion de cotisations sociales), dont on peut admettre qu'elles ont un impact suffisamment direct sur les recettes des caisses, le VI avait un effet trop indirect sur les recettes de la sécurité sociale pour pouvoir se rattacher aux dispositions qui, aux termes des 1° et 2° du B du V de l'article L.O. 111-3 CSS, « ont un effet sur les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ». C) Dispositions n'ayant pas d'effet suffisamment direct sur les dépenses des régimes obligatoires de base (1° et 2° du C du V de l'article L.O. 111-3 CSS) L'article 36 précisait les compétences des conciliateurs exerçant dans les caisses locales d'assurance maladie. L'article 39 complétait les compétences de la Haute Autorité de santé en matière de certification des logiciels d'aide à la prescription médicale. L'article 49 avait pour objet de favoriser les recherches biomédicales pratiquées à partir des soins courants. Le III de l'article 73 complétait les statuts généraux des fonctions publiques de l'Etat, des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière en vue d'augmenter, dans certains cas, la durée du congé de maternité avec traitement. Aucune de ces dispositions ne relevait de celles ayant, aux termes des 1° et 2° du C du V de l'article L.O. 111-3 CSS, « un effet sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou sur les dépenses de l'année des organismes concourant à leur financement qui affectent directement l'équilibre financier de ces régimes ». Leur incidence sur les dépenses était en effet soit nulle, soit trop indirecte. D) Dispositions n'ayant pas pour objet d'améliorer l'information et le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale (4° du C du V de l'article L.O. 111-3 CSS) L'article 58 prévoyait un rapport sur les différents instruments fiscaux « permettant de diminuer le prix relatif des fruits et des légumes et sur leur efficacité comparée ». L'article 59 imposait le dépôt d'un rapport sur l'influence des laits maternels de substitution dans le développement de l'obésité infantile. Le caractère de « cavalier social » de ces dispositions était patent. Il était en particulier fallacieux de les prétendre destinées à l'information du Parlement sur l'application des LFSS. Source : Conseil constitutionnel |