Avis n° 93 (2007-2008) de M. Michel BÉCOT , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 22 novembre 2007

Disponible au format Acrobat (367 Koctets)

Tableau comparatif au format Acrobat (693 Koctets)

N° 93

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2007

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2008 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME XI

PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L'ÉTAT

Par M. Michel BÉCOT,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Jean Pépin, Bruno Sido, Daniel Soulage, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Raymond Couderc, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Charles Josselin, Mme Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Gérard Larcher, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jacques Muller, Mme Jacqueline Panis, MM. Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Yannick Texier.

.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 189 , 276 à 281 et T.A. 49

Sénat : 90 et 91 (annexe n° 12 ) (2007-2008)

INTRODUCTION

La loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF) a consacré une exigence de performance de la gestion publique qui s'applique aussi à la façon dont l'Etat gère son patrimoine industriel

C'est ainsi que le projet de loi de finances présente une mission consacrée aux « participations financières de l'Etat », qui retrace les opérations de gestion des parts que l'Etat détient dans le capital des entreprises publiques et privées.

Pour son troisième examen depuis la mise en place de la réforme budgétaire, cette mission a vu cette année son périmètre s'étendre :

- d'une part, aux nouvelles sociétés aéroportuaires de Lyon, Toulouse Blagnac, Bordeaux Mérignac 1 ( * ) ;

- et d'autre part à l'Imprimerie nationale qui est désormais un établissement public et non plus une direction du ministère de l'économie des finances et de l'emploi.

La mission a aussi vu sa présentation budgétaire améliorée dans le sens d'une plus grande transparence.

Il apparaît toutefois que le niveau d'information du Parlement concernant les recettes tirées des participations financières de l'Etat est très loin d'être satisfaisant, alors que les dépenses attestent, quant à elles, des indéniables succès enregistrés par l'Etat actionnaire .

A ces considérations générales s'ajoutent aussi cette année les difficultés et les questions soulevées par « l'affaire EADS » qui sont traitées dans la troisième partie du présent rapport.

I. LES RECETTES AFFICHÉES POUR 2008 NE PERMETTENT PAS UNE RÉELLE INFORMATION DU PARLEMENT

A. UNE INSUFFISANCE DE SINCÉRITÉ BUDGÉTAIRE QUI TRADUIT UN PROBLÈME DE FOND

1. Les 5 milliards d'euros prévus en recettes sont purement formels

Comme pour l'exercice 2007, un montant forfaitaire de recettes de 5 milliards d'euros 2 ( * ) est prévu. Or, il ne s'agit pas d'une réelle prévision de recettes mais d'une simple moyenne des cessions réalisées depuis la création du compte des participations en 1986, à la faveur des premières privatisations.

En milliards d'euros (€)

Recette annuelle

1986

0,6

1987

10,2

1988

2,0

1989

0,2

1990

0,1

1991

0,3

1992

1,3

1993

7,1

1994

9,3

1995

3,1

1996

2,0

1997

8,4

1998

7,4

1999

3,0

2000

1,5

2001

1,0

2002

6,1

2003

2,5

2004

5,6

2005

5,6

Cession ERAP 2004-2005

5,4

2006

17,8

2007

3,8

Total

104,3

Moyenne annuelle

4,98

S'agissant de la nature de ces recettes, il est indiqué que la quasi-totalité devrait provenir de cession de titres, parts ou droits de sociétés que l'Etat détient directement, ce qui signifie qu'aucune recette n'est attendue de la cession de participations indirectes.

Les prévisions de recettes de la mission pour 2008

Produits de cessions directes

4 970

Produits de cessions indirectes

0

Reversement de dotations

10

Remboursement d'avances d'actionnaire

10

Remboursement d'autres créances

10

Recettes totales

5 000

Il n'est en revanche pas possible de savoir plus précisément quelles sont les participations qui devraient être cédées en 2008. En effet, ni les documents budgétaires remis par le Gouvernement, ni les réponses au questionnaire de votre rapporteur pour avis ne donnent d'indication sur ce point.

La raison de cette absence d'information est d'ailleurs exposée dans le programme annuel de performance aux termes duquel « pour des raisons de confidentialité, inhérentes notamment à la réalisation de cessions de titres de sociétés cotées, il n'est pas possible, au stade de l'élaboration du projet de loi finances, de détailler la nature des cessions envisagées. La stratégie de cession dépend très largement des projets stratégiques des entreprises intéressées, de l'évolution de leurs alliances ainsi que des opérations industrielles retenues par le Gouvernement. Il serait par ailleurs désavantageux d'afficher par avance une stratégie trop précise en indiquant, par exemple, la part d'une société que l'Etat est susceptible de céder ainsi que de son prix de cession. Dans ce contexte, le responsable du programme évalue les opportunités de la meilleure revalorisation patrimoniale possible pour l'Etat, au vu notamment des évolutions de marché et peut proposer au ministre et au Gouvernement de réaliser une opération. »

2. Un manque d'information particulièrement problématique en 2008

a) Une information minimale doublement problématique

Le faible niveau d'information sur la nature des recettes constitue, aux yeux de votre rapporteur pour avis, une double carence.

D'une part, elle limite l'information des parlementaires aux seules données communiquées par la presse ou obtenues de façon informelle. Par exemple, le projet de loi de finances (PLF) pour 2008 et ses annexes ne fournissent aucun élément sur les projets d'évolution de la structure du capital d'Areva alors que, de notoriété publique, plusieurs scenarii font actuellement l'objet d'études relativement avancées.

D'autre part, le fait que les recettes inscrites soient purement théoriques signifie qu'elles ne constituent aucunement un engagement même simplement politique vis-à-vis de la représentation nationale.

Si une chose est de ne présenter que des chiffres évaluatifs lorsqu'il est impossible d'être plus précis plusieurs mois à l'avance, une autre est d'afficher un chiffre auquel on n'accorde en fait aucune importance et dont le Gouvernement n'estime même pas qu'il convient d'essayer de s'en approcher au cours de l'exercice budgétaire . Or, tel est malheureusement le cas pour les recettes de la mission des participations financières de l'Etat.

C'est ainsi que le projet de loi de finances pour 2007 prévoyait lui aussi le même montant théorique de recettes de 5 milliards d'euros alors que le résultat de cet exercice devrait tout juste atteindre les 4 milliards d'euros, soit un différentiel défavorable de 20 % par rapport aux prévisions de la loi de finances 3 ( * ) .

Recettes enregistrées au 20 novembre 2007

(en euros)

Versement ADF

Solde de la cession titres autoroutes

46 107 398

ADP

Règlement d'offres réservées aux salariés

12 594 449

AF KLM

Règlement d'offres réservées aux salariés 2005

27 576 3045

Air France KLM

Cession de droits de souscription d'actions

114 631 037

ATMB

Reversement par ADF

480 000

CDC entreprises

Fonds de câblage Internet

1 602 274

CDC Entreprises

FPCR 2000 - remboursements suite à distribution

3 177 232

CNP Assurance

Cession de droits

2 064 543

DCN/THALES

Cession de titres

569 100 000

EDF

Règlement d'offres réservées aux salariés

85 811 359

EDF

indemnisation des rompus

97 142

FCJE (Fonds de Co-investissement pour les Jeunes Entreprises Innovantes)

Remboursement

5 000 000

France Telecom

Cession de 130 millions de titres

2 652 000 000

France Telecom

Règlement d'offres réservées aux salariés

57 528 543

France Telecom

Vente forcée

134 870

Gaz de France

Règlement d'offres réservées aux salariés

74 034 982

GDF

Soultes sur indemnisation des rompus

108 516

LOCASIC (Société foncière des régions)

Réduction de capital

671 636

RENAULT

Soulte indemnisation des rompus

56 237

SEMAH (Société d'Economie Mixte pour. l'Aménagement, la Restauration et la Rénovation du Quartier des Halles)

Acompte de boni de liquidation

375 000

SEMMARIS

Remboursement avance d'actionnaires

2 854 852

Semmaris

17 281 924

SFTM (Société financière de transports et manutentions)

Acompte de boni de liquidation

1 500 000

SGGP (Société de Gestion de Garanties et de Participations)

Reprises sur disponibilités

40 000 000

SNECMA/SAFRAN

Règlement d'offres réservées aux salariés

46 792 045

Total

3 809 985 467

Source : Agence des participations de l'Etat et votre rapporteur spécial

Recettes prévues d'ici au 31 décembre 2007

(en euros)

Gaz de France

Règlement d'offres réservées aux salariés

170.000.000

France Télécom

Règlement d'offres réservées aux salariés

(estimation globale)

Semmaris

Ouverture du capital

45.000.000

TOTAL

215.000.000

Source : Agence des participations de l'Etat et votre rapporteur spécial

Recettes estimées pour l'ensemble de l'exercice 2007

(en euros)

ESTIMATONS DES RECETTES TOTALES AU 31/12/2007

4.024.985.467

b) L'exercice 2008 donne une occasion particulière de souligner l'insuffisance d'information

Les faiblesses dénoncées dans la présentation du compte des participations financières de l'Etat ne sont pas propres au PLF 2008, puisque celle-ci est effectuée selon les mêmes règles depuis la mise en place de la LOLF le 1 er janvier 2006.

Toutefois, votre rapporteur pour avis n'avait pas eu l'occasion d'exprimer ses critiques au cours des deux précédents projets de loi de finances et ce pour des raisons propres à chacun d'eux

- S'agissant du PLF 2006 , la question ne s'était pas posée puisque le hasard du calendrier avait voulu que la préparation de l'examen du budget coïncide avec la mise en oeuvre du projet de privatisation des sociétés d'autoroutes. Ainsi, les documents budgétaires présentés et discutés à l'automne 2005 ne pouvaient pas ne pas faire figurer les prévisions de recettes attendues de cette cession.

L'absence de mention de cette opération aurait été d'autant plus incompréhensible que ce projet de privatisation faisait l'objet d'une vive polémique et que le montant des recettes attendues était tout à fait exceptionnel (puisqu'il a atteint 17,8 milliards d'euros soit plus de trois fois et demie la moyenne des recettes enregistrées depuis 1986. Le débat budgétaire sur les participations financières de l'Etat intervenu à l'automne 2005 était donc digne de ce nom.

- Quant au PLF 2007 , s'il se contentait, comme le PLF 2008, d'afficher un montant qui n'était que la simple moyenne des recettes des années antérieures, cette démarche avait semblé justifiée à votre rapporteur pour avis 4 ( * ) .

En effet, à quelques mois des élections du printemps 2007, le Gouvernement de M. Dominique de Villepin s'abstenait, en affichant un chiffre « neutre » de préjuger de la réalisation de grandes opérations de privatisation et se montrait ainsi particulièrement respectueux du choix des Français.

Cet argument de prudence budgétaire qui valait pour l'exercice précédent ne saurait toutefois être reconduit en 2008 comme au cours des années suivantes.

Or, tel est pourtant le cas puisque les services de l'Agence des participations financières de l'Etat, rencontrés par votre rapporteur pour avis, se contentent d'indiquer que le montant de 5 milliards d'euros a pour unique objectif de ne donner aucune indication sur l'orientation qui sera suivie en 2008, soit dans le sens d'un ralentissement soit dans le sens d'une accélération des cessions de participation.

Le montant affiché ne présente donc pas seulement un problème d'insuffisance d'information mais il se veut être une anti-information, visant à empêcher à quiconque d'anticiper les projets du Gouvernement à l'avenir.

Il n'est pas acceptable qu'une telle situation demeure permanente, c'est pourquoi des pistes de réforme doivent être recherchées.

B. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION POUR OBTENIR UN NIVEAU RAISONNABLE DE TRANSPARENCE

1. Une meilleure information sur les opérations envisagées

Sur proposition de son rapporteur, votre commission pour avis  envisage de demander que le rapport sur l'Etat actionnaire annexé au projet de loi de finances donne des indications sur les projets de cessions qui pourraient être envisagées.

Pleinement conscient des risques nés de la diffusion trop en amont d'informations concernant souvent des entreprises cotées, il est suggéré de procéder aux aménagements suivants :

- la liste d'opérations affichée pourrait ne pas avoir de caractère exhaustif et elle pourrait ne pas mentionner des noms d'entreprises en particulier, mais se contenter de faire état de stratégies sur des participations publiques dans un secteur donné (aéronautique, technologies de l'information, énergie...etc.) ;

- il pourrait être clairement indiqué que le programme de cession ou de prise de participation s'inscrivent dans un calendrier pluriannuel glissant, ce qui ne donnerait pas d'indications précises sur le terme des projets ;

- enfin, même lorsque le nom d'une entreprise serait clairement évoqué, plusieurs options pourraient être présentées sans qu'un choix ne soit nécessairement opéré entre elles dans le rapport.

Pourraient être ainsi présentés dans le PLF 2008 les projets d'évolution du capital d'Areva ou les modalités financières et industrielles de la fusion Gaz de France/Suez.

Telles sont les propositions que formule votre commission pour avis, en espérant qu'elles seront complétées par d'autres pistes d'amélioration de l'information parlementaire qui pourraient être avancées par le Gouvernement.

2. Une meilleure information sur le montant des recettes attendues

Indépendamment de l'affichage plus ou moins précis des opérations envisagées, il conviendrait d'améliorer la qualité de l'information relative au montant des recettes attendues.

S'agissant du montant global des recettes, ce dernier devrait correspondre à une réelle prévision sans qu'il soit nécessaire d'en donner une décomposition complète.

En complément du montant, par définition unique, devant figurer dans le corps de la loi de finances, le rapport sur l'Etat actionnaire pourrait indiquer plusieurs hypothèses de recettes exposant les principaux paramètres qui pourraient participer au choix de l'une ou de l'autre.

S'agissant du montant des recettes attendues de chaque opération, il devrait être possible de donner des indications, au moins pour certaines des opérations affichées dans la liste des projets, elle-même non exhaustives. Selon les cas, le plus opportun pourrait être de fixer des fourchettes de la part du capital qui pourrait être cédé ou simplement du montant de recettes attendu de l'opération.

Si votre rapporteur spécial concentre, dans un premier temps, sa demande d'amélioration de l'information sur les recettes tirées de cessions de participations, il souligne toutefois qu'elle pourrait aussi s'appliquer aux autres ressources de la mission que sont les remboursements ou les reversements à l'Etat des sommes qu'il a injectées dans le capital de ces entreprises 5 ( * ) .

Ces ressources pourraient d'ailleurs fortement augmenter à l'avenir du fait de l'amélioration de la situation financière des entreprises à participation publique, même si comme pour les recettes tirées de cessions, le budget 2008 n'indique rien d'autre que la reconduction formelle des montants affichés pour 2007.

Dans tous les cas, une amélioration de la transparence est nécessaire et votre rapporteur pour avis est optimiste, au vu des progrès déjà accomplis par le projet de loi de finances pour 2007 quant à la présentation des dépenses de la mission. En passant d'un à deux programmes, l'amélioration intervenue dans le PLF 2007 avait en effet permis de mettre en évidence la distinction entre les deux utilisations des recettes du compte.

II. LES DÉPENSES DU COMPTE CONSACRENT L'ENTRÉE DANS UNE ÈRE NOUVELLE

A. LES FAIBLES BESOINS EN INTERVENTIONS DE L'ÉTAT PERMETTENT DE DONNER LA PRIORITÉ AU DÉSENDETTEMENT

1. Une architecture et une priorité inchangées par rapport à 2007

a) Une mission, deux programmes

Conformément à la nouvelle architecture budgétaire adoptée en 2007, la mission correspondant au compte « Participations financières de l'Etat » se compose de deux programmes :

- le programme 731, « Opérations en capital intéressant les participations financières de l'Etat » , héritier du programme de même numéro tel qu'il figurait dans la LFI pour 2006, mais auquel a été soustrait son action n° 2 relative au désendettement public. Ce programme est lui-même constitué de quatre actions , reprises de la nomenclature préexistante ;

- le programme 732, « Désendettement de l'Etat ou d'établissements publics de l'Etat » , qui correspond à l'action n° 2, précitée, du programme 731 dans sa configuration de la LFI pour 2006. De façon logique, le nouveau programme, comme son action unique , reprend l'intitulé même de l'ancienne action.

Le responsable de chacun de ces programmes est M. Bruno Bezard, directeur général de l'Agence des participations de l'Etat (APE).

b) Une très grande majorité des crédits devrait bénéficier au désendettement public

Bien que le niveau global des crédits prévus pour le compte « Participations financières de l'Etat » ne constitue pas une information réellement opérationnelle 6 ( * ) , les intentions affichées quant à l'affectation des recettes de ce compte sont, en revanche, significatives d'une orientation politique très nette au profit du désendettement public.

En effet, le programme n° 732 intitulé « Désendettement de l'Etat ou d'établissements publics de l'Etat » se voit affecter 4,2 milliards d'euros des crédits de la mission, soit 84 % de ces derniers , contre 72 % prévus en 2007. Sur ce total :

- 3,7 milliards d'euros doivent être affectés au désendettement de l'Etat, stricto sensu , entraînant une diminution de sa charge d'intérêts estimée à 140 millions d'euros ;

- 500 millions d'euros doivent bénéficier « aux établissements publics », à savoir essentiellement l'EPFR 7 ( * ) amortissant la dette liée au Crédit Lyonnais, entraînant une diminution de sa charge d'intérêts estimée à 7 millions d'euros.

Il convient de rappeler que cette priorité donnée au désendettement public s'inscrit dans la continuité de la politique fixée depuis 2006. Elle se démarque de la politique menée au cours des vingt années précédentes. En effet, entre 1986 et 2005 seuls 14 % des 81,7 milliards de recettes de cessions avaient été affectés au désendettement public.

Votre rapporteur pour avis se félicite de cette orientation qui répond à la nécessité impérieuse de stabiliser la dette publique.

Il rappelle toutefois que bien que très majoritaires, les crédits du programme 731 ne constituent en fait que le solde des dépenses de la mission.

Les ressources affectées in fine au désendettement pourraient donc être sensiblement inférieures au montant prévu 8 ( * ) , puisqu'elles ne sont que le reliquat subsistant après financement des interventions de l'Etat en faveur des entreprises prévues.

2. La fin d'une période marquée par des interventions massives de l'Etat en recapitalisation des entreprises

L'affectation majoritaire des crédits au désendettement traduit la part modeste des dépenses consacrées aux interventions de l'Etat au programme 732.

Le PLF y consacre ainsi 800 millions d'euros, ventilés comme suit entre les quatre actions du programme :

- La première action du programme 732 est consacrée à l'augmentation du capital et dotations en fonds propres, avances d'actionnaires et prêts assimilés . Elle concentre l'essentiel des moyens, soit 660 millions d'euros.

Mis à part une réserve de 85 millions non constituée pour faire face à un besoin d'intervention imprévu, l'action devrait consister en trois opérations :

- la recapitalisation de GIAT industries , évaluée à ce jour à 300 millions d'euros au maximum , via la souscription de l'Etat à l'augmentation du capital de la société en application du plan décidé en 2004 ;

- la contribution éventuelle à la RATP , consacrée au financement des soultes d'adossement des régimes de retraite de l'entreprise au régime de droit commun, budgétée pour un montant de 250 millions d'euros ;

- l'augmentation de capital d'ADOMA (l'ex SONACOTRA), pour 250 millions d'euros au plus , solde de l'augmentation de capital, à hauteur de 50 millions d'euros, décidée en 2006 9 ( * ) .

- La deuxième action du programme, intitulée « Achats ou souscriptions de titres, parts ou droits de société » permettant par exemple d'entrer dans le capital de sociétés entièrement privées, comme ce fut le cas pour Alstom en 2005, n'est dotée d'aucun crédit . Votre rapporteur spécial estime que ceci est logique, la tendance d'ensemble étant davantage à une cession de participations plutôt qu'à l'entrée au capital de nouvelles entités.

- La troisième action porte sur les « autres investissements financiers de nature patrimoniale » et retrace les crédits qui devraient être consacrés en 2008 au fonds commun de placement à risques. Ceux-ci sont confiés à une société de gestion elle-même gérée par la Caisse des dépôts et consignations, et ayant vocation à investir dans des fonds de capital risque participant au financement de la création et du développement de PME innovantes. Votre rapporteur pour avis se félicite vivement de cette inscription puisqu'il avait insisté l'an dernier pour demander au Gouvernement de permettre le suivi des interventions de type « France Investissement » au profit des PME innovantes, ce qui est chose faite cette année.

- Enfin, la quatrième et dernière action du programme 731 comprend 100 millions d'euros finançant les prestations de services : commissions bancaires, frais juridiques et frais liés aux opérations de gestion des participations financières de l'Etat, qui, comme en LFI 2007, représentent 2 % du produit des cessions prévues.

L'ensemble du projet de finance de programme 731 appelle un double satisfecit de votre rapporteur pour avis :

D'une part, il salue la meilleure information de la justification des dépenses des premiers euros donnée dans les documents budgétaires.

D'autre part et surtout, il retire des échanges avec les services de l'Etat compétents que les interventions de l'Etat au profit des entreprises devraient entrer après 2008 dans une période de forte décroissance .

Il est particulièrement emblématique de cette évolution que les deux principales opérations inscrites en dépenses d'intervention ne soient pas de nature pérenne : la cinquième tranche de la recapitalisation de GIAT industries est aussi la dernière, et la dotation de la RATP ne devrait pas être reconduite compte tenu de la réforme des régimes spéciaux de retraite.

Il est important de préciser que la diminution prévisible des dépenses d'intervention au profit des entreprises ne traduit pas une quelconque volonté de l'Etat actionnaire de ne pas assumer ses obligations. Au contraire, cette évolution témoigne d'une réussite dans la politique de redressement des entreprises à participation publique .

B. L'AMÉLIORATION DE LA SITUATION DES ENTREPRISES TRADUITE PAR LES INDICATEURS DE PROGRAMME N° 731

1. L'amélioration continue des entreprises à participations publiques

L'analyse des comptes combinés de l'Etat 10 ( * ) présentés au cours de ces dernières années met en évidence une nette amélioration de la situation des entités concernées au cours de la précédente législature.

Cette évolution devrait se poursuivre en 2008 avec des objectifs de performances plus ambitieux encore que ceux du PLF 2007.

Cette amélioration s'est traduite de trois façons :

- par les performances des entreprises : leur rentabilité opérationnelle étant passée de 10,8 % en 2004 à 11,5 % en 2006 11 ( * ) et leur rentabilité financière ayant crû de 19,7 % à 24,1 % au cours de la même période ;

- par l'état de l'endettement : puisque la soutenabilité de la dette entreprise s'est fortement améliorée, le ratio résultat opérationnel/dette nette est passé de 25,6 à 35,4 entre 2004 et 2006 ;

- par le niveau des dividendes perçus par l'Etat actionnaire qui sont passés de 0,5 à 3,7 millions d'euros entre 2004 et 2006 tout en restant relativement constants par rapport au résultat net des entreprises (dont ils représentent 25 % en 2006 contre 20 % en 2004).

L'exercice 2008 devrait poursuivre cette évolution si l'on en juge par le programme de performance du programme n° 731 qui nous est soumis.

2. Les objectifs de performance assignés aux entreprises à participations publiques pour 2008

Le premier objectif poursuivi par l'Etat actionnaire est l'augmentation de la valeur de ses participations financières , mesurée par cinq indicateurs :

- l'indicateur de la rentabilité opérationnelle des capitaux employés , qui permet de mesurer la capacité effective des entreprises à créer de la valeur par rapport aux moyens qu'elles engagent et ce, quelles que soient les modalités de financement retenues (capitaux propres ou endettement). Pour ce faire, il mesure le rapport entre le résultat opérationnel, qui résulte de l'activité économique des participations et les actifs 12 ( * ) qui ont permis de développer cette activité.

Le taux de 11,5 % prévu pour 2007 devrait être atteint et le PLF 2008 présente une rentabilité encore supérieure. Ce taux situe les participations publiques à un niveau de rentabilité opérationnelle très comparable à celle du secteur privé ;

- l'indicateur de la rentabilité financière des participations de l'Etat qui constitue sans doute l'indicateur du programme le plus stratégique pour l'Etat puisqu'elle rapporte le résultat net aux capitaux investis par les actionnaires. L'objectif pour 2008 est de dépasser le taux de rentabilité financière de 24,4 % fixé pour 2007. Il est ainsi proposé de poursuivre la nette amélioration observée depuis le début des années 2000 qui fut très difficile du fait des déboires de France Telecom et d'EDF 13 ( * ) ;

- l'indicateur de marge opérationnelle , défini par le rapport entre le résultat d'exploitation et le chiffre d'affaires des entreprises, qui devrait lui aussi augmenter en 2008 après avoir connu une amélioration continue pour atteindre probablement 11,5 % au cours de l'exercice 2007 ;

- l'indicateur de soutenabilité de l'endettement qui est principalement traduit par le rapport de la dette nette des entreprises sur le résultat opérationnel ou EBITDA 14 ( * ) . Il mesure ainsi le nombre d'années de résultat opérationnel nécessaire pour atteindre une dette nulle. Là encore, l'objectif pour 2008 est d'améliorer le ratio de 2,8 attendu pour 2007 ;

- l'indicateur, introduit cette année, relatif à la distribution des dividendes , qui rapporte le montant des dividendes perçus par l'Etat au résultat net combiné des 50 entités qu'il détient 15 ( * ) . Il définit un taux global de distribution de dividendes à l'Etat actionnaire par les entreprises publiques. Contrairement à ce qui prévaut pour les autres indicateurs du programme, l'objectif pour 2008 est identique aux prévisions pour 2007.

Votre rapporteur pour avis estime que le traitement réservé à ce dernier indicateur est particulièrement prudent compte tenu de l'évolution des entreprises dont témoigne par exemple, le fait que La Poste pourrait, pour la première fois de son histoire, verser un dividende à l'Etat au cours de l'exercice 2008.

Concernant le second objectif visant à assurer le succès des opérations de cession des participations financières , il n'appelle pas d'observations particulières cette année. En effet, il s'accompagne d'une reconduction à l'identique des indicateurs de performance du PLF 2007, à l'exception de celui relatif au taux moyen des commissions aux intermédiaires financiers versées lors des placements de titre. Ce dernier passe en effet de 0,07 % à 0,1 %, ce qui correspond malheureusement à un alignement de l'objectif sur la réalité des tarifs constatés sur le marché.

L'objectif « Assurer le succès des opérations de cessions
des participations financières »

Ce second objectif du programme, qui consiste à « assurer le succès des opérations de cessions des participations financières », fait l'objet de deux séries d'indicateurs.

La première série d'indicateurs regroupe quatre mesures d'« écarts entre les recettes de cessions et les valeurs intrinsèque et boursière des participations cédées » :

- l'écart entre les recettes de cessions et leur valeur fixée par la commission des participations et des transferts (CPT) ;

- l'écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière moyenne sur les 30 jours de bourse précédant chaque opération ;

- l'écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière moyenne sur les 30 jours de bourse suivant chaque opération ;

- l'écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière moyenne sur les 30 jours de bourse précédant et suivant chaque opération ;

Tous ces écarts devraient être nuls, en valeur, en 2008, avec une variation possible entre - 3 % et + 1 % pour les ratios « écart/recettes de cessions » correspondant aux trois derniers indicateurs mentionnés. Toutefois, alors que les mêmes prévisions étaient inscrites en LFI pour 2007, la prévision actualisée figurant dans le PAP annexé au présent PLF révèle des résultats sensiblement éloignés . Seul l'écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière moyenne sur les 30 jours de bourse suivant chaque opération serait conforme aux prévisions initiales, avec un taux de - 1,3 % (représentant 33,7 millions d'euros). Pour le reste, cette année :

- l'écart entre les recettes de cessions et leur valeur fixée par la CPT serait de + 4,4 %, correspondant à un décalage de 117 millions d'euros ;

- l'écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière moyenne sur les 30 jours de bourse précédant chaque opération serait de - 7,9 %, soit un décalage de 210 millions d'euros ;

- l'écart entre les recettes de cessions et la valeur boursière moyenne sur les 30 jours de bourse précédant et suivant chaque opération serait de - 9,2 %, soit un décalage de 244 millions d'euros ;

La seconde série d'indicateurs associée au second objectif du programme rassemble trois « taux des commissions versées par l'Etat à ses conseils » :

- le taux moyen des commissions versées lors des opérations conduites sous la forme de placements privés par construction accélérée de livres d'ordre, qui est attendu à hauteur de 0,07 % en 2007 de moins en 1 % en 2008 ;

- le taux moyen des commissions versées lors des opérations de placement traditionnelles auprès d'investisseurs institutionnels, qui est prévu de 1,8 % ou moins en 2007 comme en 2008 ;

- le taux moyen des commissions versées lors des opérations de placement auprès des particuliers, estimé à 3,5 % ou moins en 2007 comme en 2008.

Il convient cependant de relever que les prévisions relatives aux deux derniers des taux précités n'ont pas fait l'objet d'une actualisation, par rapport à la LFI pour 2007, dans le PAP annexé au présent PLF.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner que ces résultats globalement très favorables ont été obtenus grâce à l'action de l'APE menée depuis sa création il y a trois ans.

Celle-ci a permis une action à la fois plus professionnelle et plus transparente de l'Etat actionnaire, même si les événements récents relatifs à EADS indiquent que l'organisation actuelle n'est pas exempte de carences.

III. L'« AFFAIRE EADS » A RAPPELÉ CERTAINES LACUNES DANS LA GESTION DES PARTICIPATIONS PUBLIQUES

A. LE RÔLE DE LA CAISSE DES DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS (CDC), UNE AFFAIRE DANS L'AFFAIRE

1. Le contexte lié aux difficultés d'EADS

Les difficultés du groupe EADS ont été concentrées sur l'année 2006, au cours de laquelle sa principale filiale Airbus s'est trouvée confrontée à d'importants retards de livraison de l'A380 liés à des difficultés d'industrialisation, notamment dans le domaine de l'ingénierie électrique. Ces retards se sont traduits par des charges de 2,5 milliards d'euros, du fait de surcoûts directs, de pénalités contractuelles et du financement de compensation à verser aux clients. Une des conséquences directes en a été la chute du résultat de 1.676 millions d'euros en 2005 à 94 millions d'euros pour l'exercice 2006.

La même année a aussi été marquée par une évolution de l'actionnariat de l'avionneur européen, les groupes Lagardère et DaimlerChrysler ayant chacun réduit leur participation à 7,5 % du capital contre respectivement 15 % et 22,5 % auparavant 16 ( * ) .

Il apparaît aujourd'hui que ces évènements découlaient largement de problèmes de gouvernance d'Airbus et d'EADS qui ont été analysés en détail par le rapport réalisé dans le cadre de votre commission des affaires économiques 17 ( * ) .

Or, ces problèmes de gouvernance impliquent l'Etat français, de façon à la fois directe et indirecte.

2. La mise en cause directe et indirecte du rôle de l'Etat

a) Une impossibilité structurelle pour l'Etat français à jouer son rôle au sein d'EADS

La relative inaction de l'Etat face à la détérioration de la situation d'EADS ne peut a priori qu'interroger votre rapporteur pour avis d'autant plus qu'elle est en contradiction totale avec la nouvelle politique de l'Etat actionnaire impulsée avec succès par l'APE depuis trois ans.

En fait, l'analyse fait apparaître que l'Etat est dans l'impossibilité de jouer pleinement son rôle, du fait du pacte d'autonomie conclu en 2000 dont un des objectifs était précisément de prévenir, à la demande insistante de DaimlerChrysler, toute intervention de l'Etat dans la gestion du groupe.

Tout en saluant les progrès introduits dans la gouvernance de l'entreprise par l'accord du 17 juillet dernier 18 ( * ) , votre rapporteur pour avis ne peut que regretter que les participations financières détenues par l'Etat dans EADS ne lui confèrent toujours pas le droit de regard qui devrait théoriquement lui revenir.

Ainsi, il n'est nullement impossible que se reproduise la situation décrite par le rapport de M. Bernard Schneider, inspecteur général des finances, dans laquelle l'Agence des participations financières de l'Etat a pu établir, début 2006, des projets de cession de parts d'EADS sans être aucunement informée de la détérioration des perspectives de l'entreprise.

La question de l'information de l'Etat ne se limite d'ailleurs pas à l'évolution du groupe aéronautique, mais elle s'étend aussi à certaines entités publiques concernées par le dossier.

b) Une implication indirecte des participations françaises publiques

Les difficultés rencontrées par EADS ont aussi concerné le rôle joué par les participations financières publiques au travers de l'affaire du rachat par la Caisse des Dépôts et Consignations de 2,25 % du capital cédés par le groupe Lagardère le 28 mars 2006, soit deux mois et demi avant l'annonce des retards de livraison de l'A380 qui s'est traduite par une forte baisse de plus d'un quart du cours de l'action.

En marge de l'enquête ouverte par l'Autorité des marchés financiers et de ses éventuels développements judiciaires, votre rapporteur pour avis estime que cette affaire met une nouvelle fois en évidence les difficultés de gouvernance de la Caisse des Dépôts et Consignations.

B. LA NÉCESSITÉ D'UNE RÉFORME RAPIDE DE LA CDC

1. Contrairement aux apparences, le problème principal de la CDC n'est pas l'emprise de l'Etat

Bien que ne relevant pas du périmètre de la mission des participations financières de l'Etat 19 ( * ) , la Caisse des dépôts et consignations est pourtant souvent considérée comme le bras financier du Gouvernement. Or, tel n'est pas le fait pour deux raisons essentielles :

- d'une part, la CDC exerce une grande partie de ses activités comme un investisseur privé et sans lien avec la conduite de politique publique comme par exemple lors du rachat de la chaîne de restauration Quick en 2006. Quant aux situations dans lesquelles la CDC assure des missions d'intérêt général ou à la demande de l'Etat ou des collectivités territoriales, elle le fait soit dans le cadre prévu par la loi (par exemple en matière de logement social), soit après mise en concurrence avec d'autres organismes financiers, et toujours moyennant une rémunération ou une garantie de l'Etat, autorisée par la loi de finances 20 ( * ) ;

- d'autre part, et surtout, du fait de son statut sui generis d'autonomie, la CDC ne dispose pas d'un conseil d'administration où seraient représentés des « actionnaires » parmi lesquels figurerait en première place le ministère chargé de l'économie et des finances. L'Etat n'est d'ailleurs pas davantage représenté par un commissaire du Gouvernement. En effet, la CDC est placée sous le contrôle d'une commission de surveillance qui comprend des représentants du Parlement, du Conseil d'Etat, de la Cour des Comptes, de la Banque de France, de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris et du directeur général du Trésor et de la politique économique.

Or, l'affaire du rachat des actions EADS a mis en évidence les fortes limites du contrôle exercé par le Conseil de surveillance. Car la première mention -d'ailleurs très évasive- de l'opération EADS dans les procès-verbaux de cette instance ne datent que du 26 avril, soit plusieurs semaines après l'accord passé avec le groupe Lagardère. Le plus vraisemblable aujourd'hui est que le directeur général de la CDC 21 ( * ) ait agi sans référer préalablement au Conseil de surveillance.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner qu'en dépit de la grande qualité des auditions conduites en octobre à l'Assemblée nationale et au Sénat, ces faits méritent d'être confirmés.

Toutefois, le simple fait que de tels agissements aient éventuellement pu se produire rappelle que les règles de gouvernance de la CDC ne sont pas satisfaisantes.

2. Le besoin d'un nouvel encadrement législatif dès 2008

Votre rapporteur pour avis estime qu'indépendamment des développements particuliers qu'elle pourrait avoir au plan judiciaire, l'affaire EADS constitue une réelle occasion de remettre à plat les modalités par lesquelles s'exerce le contrôle de la Nation sur le directeur de la CDC.

A ce stade, il estime possible de se prononcer sur le contour des modifications qui pourraient intervenir.

S'agissant des principes directeurs de la réforme , il est essentiel de ne pas banaliser le statut de la CDC, car une forme de société classique dotée d'un conseil d'administration aurait toutes les chances de mettre à mal le principe d'autonomie de l'organisme vis-à-vis du pouvoir exécutif à laquelle votre rapporteur pour avis est attaché.

En revanche, il estime que la mise en place d'un simple comité interne des investissements tel que proposé depuis quelques semaines par M. Augustin de Romanet, directeur général de la CDC, ne constitue pas une réponse à la hauteur des enjeux. En effet, ce comité qui serait chargé d'examiner les opérations les plus « importantes » et les plus « confidentielles » 22 ( * ) ne disposerait d'aucun droit de veto sur les investissements envisagés par le directeur général.

Or, il apparaît aujourd'hui nécessaire de renforcer le pouvoir des structures de décisions collégiales afin d'assurer un réel contrôle en amont des principales opérations envisagées par la direction de la Caisse. Cette réforme pourrait emprunter plusieurs voies : la création d'une structure ad hoc dotée de pouvoir contraignant ou le renforcement du rôle du conseil de surveillance.

Dans tous les cas, votre commission des affaires économiques estime que ce débat doit être mené devant le Parlement.

S'agissant du calendrier de la réforme , les évolutions législatives éventuellement nécessaires devraient idéalement être prévues par le projet de loi de finances sur la modernisation de l'économie annoncée pour le printemps 2008.

Toutefois, il est important de rappeler que la modification de la loi n'épuise pas le débat qui devra avoir lieu devant la représentation nationale. En effet, ce dernier devra porter sur l'ensemble des aspects de la gouvernance de la CDC, dont l'activité n'est -rappelons le- pas examinée à l'occasion du vote annuel sur le budget des participations financières de l'Etat.

Lors de la réunion du 14 novembre 2007, la commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Participations financières de l'Etat » du projet de loi de finances pour 2008, suivant ainsi les conclusions de son rapporteur pour avis.

ANNEXE - LES ENTITÉS APPARTENANT AU PÉRIMETRE DES COMPTES CONSOLIDÉS23 ( * )

SECTEUR DES TRANSPORTS

SNCF

RATP

AIR France-KLM

SECTEUR DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT

ADP

PORT AUTONOME DE ROUEN

ATMB

PORT AUTONOME DE BORDEAUX

SANEF

PORT AUTONOME DE NANTES

SAPRR

PORT AUTONOME DE DUNKERQUE

SFTRF

PORT AUTONOME DE MARSEILLE

PORT AUTONOME DU HAVRE

RESEAU FERRÉ DE FRANCE

SOCIÉTÉS AÉROPORTUAIRES

SECTEUR DE L'ÉNERGIE

AREVA

GAZ DE FRANCE

EDF

CHARBONNAGES DE FRANCE

SECTEUR DE L'ARMEMENT ET DE L'AÉRONAUTIQUE

DCN

SOGEPA

GIAT

THALES

SNPE

EADS (15,20 %)

SOGEADE

SAFRAN, issue de la fusion SNECMA/SAGEM (38,96 %)

SECTEUR DES MÉDIAS

ARTE

RFI

FRANCE TÉLÉVISIONS

RADIO FRANCE

SECTEUR DES POSTES ET TÉLÉCOMMUNICATIONS

LA POSTE

ERAP

FRANCE TÉLÉCOM

AUTRES SECTEURS

BRGM

SGGP

DAGRIS

SIG

EMC

SIMAR

EPFR

SIDR

FRANÇAISE DES JEUX

TSA

IMPRIMERIE NATIONALE

RENAULT (15,86 %)

SEMMARIS

* 1 Dans le cadre de la loi n° 2005-357 du 20 avril 2005 relative aux aéroports.

* 2 Soit 2,7 % des participations financières de l'Etat valorisées à environ 198 milliards d'euros au 15 novembre 2007.

* 3 Comme l'indique le tableau de la page suivante, l'essentiel de ces recettes provenait de la cession de 5 % du capital de France Telecom (2,6 milliards d'euros) et de la cession à Thales de 25 % du capital de CDN.

* 4 Avis n° 80 tome 12 (2006-2007) de M. Michel BECOT, fait au nom de la Commission des affaires économiques, déposé le 23 novembre 2006, page 9 à 11.

* 5 Plus précisément, il s'agit des reversements des dotations versées par l'Etat, des remboursements d'avances d'actionnaires ou du remboursement d'autres créances. En revanche, les dividendes ne figurent pas au compte des participations financières de l'Etat qui, en vertu de l'article 21 de la LOLF concerne les seules opérations patrimoniales.

* 6 Cf : le I du présent rapport.

* 7 Etablissement public de financement et de restructuration.

* 8 Comme ce sera le cas pour l'exercice 2007.

* 9 Pour mémoire : un versement de 12,5 millions d'euros a été effectué en 2006 et 12,5 millions d'euros supplémentaires doivent être versés en 2007.

* 10 La liste des entités concernées figure en annexe au présent rapport.

* 11 Dernier exercice complet dont les comptes sont disponibles.

* 12 Immobilisations et besoin de fonds de roulement.

* 13 La conduite d'opérations hasardeuses de ces entreprises financées par l'emprunt avait même aboutit à une rentabilité financière négative en 2001 et 2002.

* 14 Earning before interest tax depreciation and amortization.

* 15 En fait, les entités les plus importantes du périmètre des entités relevant de l'APE.

* 16 Conformément au principe de parité franco-allemand, la « part » française était de 23,5 % répartie entre l'Etat (15 %) et Lagardère (15 %) alors que la part allemande était entièrement détenue par DaimlerChrysler. Aujourd'hui, chacune de ces parts s'établit à 22,5 %, la part française se répartissant toujours entre l'Etat (15 %) et Lagardère (7,5 %), tandis que la part allemande est portée par Daimler (7,5 %) et un consortium d'intérêts allemands mis en place pour l'occasion (15 %).

* 17 Rapport d'information n° 351 (2006-2007) rendu le 27 juin 2007 par MM. Jean-François Le Grand et Roland Ries.

* 18 Cet accord simplifie la direction du groupe qui ne dispose plus désormais d'un seul président du conseil d'administration et d'un seul président exécutif.

* 19 Ce qui explique qu'elle n'entre pas dans le champ des entreprises concernées par le présent rapport.

* 20 Comme ce fut le cas par exemple lors du rachat d'une partie du capital d'Alstom par l'Etat en 2005.

* 21 M. Francis Mayer, aujourd'hui décédé.

* 22 Selon les termes de M. Augustin de Romanet lors de son audition devant la commission des finances du Sénat le 10 octobre 2007.

* 23 Les entreprises sont prises en compte à due proportion de la part de l'Etat dans leur capital.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page