Avis n° 93 (2007-2008) de Mme Odette TERRADE , fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 22 novembre 2007

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N° 93

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 22 novembre 2007

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2008 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

TOME IX

PILOTAGE DE L'ÉCONOMIE FRANÇAISE

Par Mme Odette TERRADE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Paul Emorine, président ; MM. Jean-Marc Pastor, Gérard César, Bernard Piras, Gérard Cornu, Marcel Deneux, Pierre Herisson, vice-présidents ; MM. Gérard Le Cam, François Fortassin, Dominique Braye, Bernard Dussaut, Jean Pépin, Bruno Sido, Daniel Soulage, secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Pierre André, Gérard Bailly, René Beaumont, Michel Bécot, Jean-Pierre Bel, Joël Billard, Michel Billout, Claude Biwer, Jean Bizet, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Jean-Pierre Caffet, Raymond Couderc, Roland Courteau, Jean-Claude Danglot, Philippe Darniche, Gérard Delfau, Jean Desessard, Mme Evelyne Didier, MM. Philippe Dominati, Michel Doublet, Daniel Dubois, Alain Fouché, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Adrien Giraud, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Odette Herviaux, MM. Michel Houel, Benoît Huré, Charles Josselin, Mme Bariza Khiari, M. Yves Krattinger, Mme Elisabeth Lamure, MM. Gérard Larcher, Jean-François Le Grand, André Lejeune, Philippe Leroy, Claude Lise, Daniel Marsin, Jean-Claude Merceron, Dominique Mortemousque, Jacques Muller, Mme Jacqueline Panis, MM. Jackie Pierre, Rémy Pointereau, Ladislas Poniatowski, Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Thierry Repentin, Bruno Retailleau, Charles Revet, Henri Revol, Roland Ries, Claude Saunier, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Yannick Texier.

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Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 189 , 276 à 281 et T.A. 49

Sénat : 90 et 91 (annexe n° 19 ) (2007-2008)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Dotée de 841 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 844 en crédits de paiement (CP) pour 2008, la mission « Pilotage de l'économie française », anciennement baptisée « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », connaît cette année des changements importants de périmètre du fait des récents redécoupages ministériels . Ceux-ci ont en effet entraîné, d'une part, la scission de Bercy en deux ministères et, d'autre part, le regroupement des services en charge de l'économie et de l'emploi. Autre modification de périmètre de la mission, les crédits de fonctionnement du réseau extérieur de la direction du Trésor (missions économiques et directions régionales du commerce) ont été regroupés avec ceux de l'administration centrale au sein du programme nouvellement intitulé « Politique économique et de l'emploi ».

Avec plus de 70 % de dépenses de personnel , la mission comporte essentiellement les crédits des directions chargées d'aider l'exécutif à concevoir sa politique économique, fiscale et de l'emploi 1 ( * ) et ceux de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Conformément aux objectifs de réduction du nombre d'emplois fixés au ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, une grande part de ces effectifs -ceux du réseau extérieur du Trésor et ceux de l'INSEE- fait l'objet d'un contrat pluriannuel de performances prévoyant une baisse régulière chaque année.

Votre commission pour avis estime que la mesure de la performance des programmes de la mission peut encore être améliorée , d'autant plus que les nouvelles actions relatives à l'emploi et au développement international de l'économie n'ont été dotées d'aucun objectif ni indicateur. Elle souhaite donc que les indicateurs de performances prennent en compte les changements de périmètre de la mission l'an prochain.

S'agissant des outils de pilotage de l'économie française, l'année 2007 a été marquée par de vifs débats relatifs à l'indice des prix et à la mesure du taux de chômage . C'est pourquoi votre rapporteur pour avis a jugé utile de faire un point sur les travaux et les débats en cours à l'INSEE concernant ces sujets. Enfin, la question de l'indépendance de cet institut fait également l'objet d'interrogations et de projets, sur lesquels le présent rapport reviendra.

I. LE PROGRAMME « POLITIQUE ÉCONOMIQUE ET DE L'EMPLOI »

Les crédits demandés pour 2008 pour le programme « Politique économique et de l'emploi » s'élèvent à 392,7 millions d'euros en autorisations d'engagement et 392,6 millions d'euros en crédits de paiement.

A. DES ENVELOPPES DE CRÉDITS RELATIVEMENT CONTRAINTES

Les nombreux changements de périmètre qui affectent le programme rendent difficiles les comparaisons d'un budget à l'autre. En outre, les crédits du programme sont constitués d'enveloppes financières relativement contraintes :

- les dépenses de personnel, à hauteur de 220,4 millions d'euros, représentent 56 % des crédits, le plafond d'emplois étant fixé à 3.294 emplois équivalents temps plein ;

- la rémunération des prestations de la Banque de France, qui est discutée entre l'Etat et la Banque, représente 31 % des AE du programme.

1. Des changements de périmètre importants

La nouvelle architecture ministérielle a entraîné deux modifications de périmètre liées à la scission des services de Bercy entre deux ministères et au regroupement des services compétents en matière d'économie et d'emploi. Par ailleurs, les services extérieurs de la direction du Trésor ont été regroupés dans le présent programme, dont l'intitulé a changé.

En premier lieu, les crédits de la direction générale de la modernisation de l'Etat, de la direction du budget et de l'Agence pour l'information financière de l'Etat, ne figurent plus dans cette mission. En effet, le décret du 31 mai 2007 ayant placé ces services sous l'autorité du ministre du budget , des comptes publics et de la fonction publique, le respect de la LOLF imposait de ne plus rattacher leurs crédits à un programme qui regroupe des services dépendant du ministère de l'économie et des finances . Son article 7 prévoit en effet qu'un programme « regroupe les crédits destinés à mettre en oeuvre une action ou un ensemble cohérent d'actions relevant d'un même ministèr e ».

En second lieu, les crédits de fonctionnement de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), que le décret du 31 mai 2007 a placée sous l'autorité du ministre de l'économie, des finances et de l'emploi , ont été rattachés au programme. Les crédits d'intervention gérés par la DGEFP, continuent, eux de relever respectivement des programmes « Accès et retour à l'emploi » (6,2 milliards d'euros en AE pour 2008) et « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » (5 milliards d'euros en AE) de la mission « Travail et emploi ».

Votre rapporteur pour avis relève que ce dernier choix n'était pas imposé par la LOLF, dans la mesure où il aurait été possible d'affecter les crédits en question dans les programmes précités, dont le gestionnaire est le Délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle. Elle s'interroge en conséquence sur son opportunité et juge qu'il faudra observer s'il permet, en pratique, une meilleure mobilité des personnels entre les administrations. En tout état de cause seule une volonté politique forte permettra une meilleure coordination des politiques économiques et de l'emploi, et non le simple rattachement des 20 millions d'euros de crédits de personnel de la DGEFP au présent programme.

En troisième lieu, le programme réunit les moyens de l'administration centrale de la direction générale du Trésor et de la politique économique avec ceux des directions régionales du commerce extérieur et des missions économiques . En effet, les crédits et effectifs de l'action « Développement international de l'économie française » de la mission « Développement et régulation économique » ont été transférés sur le présent programme. Votre commission pour avis estime ce regroupement opportun , dans la mesure où il permettra davantage de souplesse de gestion entre les effectifs de l'administration centrale et ceux des services extérieurs.

2. Des crédits de personnels soumis à un contrat pluriannuel de baisse des effectifs

Il convient de relever que l'essentiel des efforts de réduction des effectifs du programme porte sur le réseau international du Trésor , l'action « Développement international de l'économie française » représentant à elle seule 64 % des emplois du programme. Celui-ci a passé un contrat pluriannuel pour la période 2006-2008 dans lequel il s'est engagé à diminuer son plafond d'emplois de 4,2 % et à maintenir son budget de fonctionnement en euros constants.

Cette réduction doit être permise, notamment, par les gains de productivité et par le redéploiement des personnels des secteurs où le marché est le moins porteur vers ceux où les besoins sont plus importants. Il a été indiqué à votre rapporteur que le redéploiement devrait notamment s'opérer vers des régions comme la Russie, le Kazakhstan et le Proche-Orient, dans lesquelles la France est traditionnellement peu présente alors que les marchés sont extrêmement porteurs .

3. La rémunération des prestations de la Banque de France

Outre les crédits de personnel, le programme regroupe les crédits permettant la rémunération des prestations réalisées par la Banque de France et l'Institut d'émission des départements d'outre-mer pour le compte de l'Etat. La tenue de la balance des paiements n'apparaît plus, cette année, parmi les missions effectuées pour le compte de l'Etat, dans la mesure où la loi du 20 février 2007 2 ( * ) en a fait une mission fondamentale de la Banque, ce qui se traduit par une baisse corrélative des prestations facturées à l'Etat, expliquant la diminution des autorisations d'engagement de 146 millions d'euros en 2007 à 123,5 millions pour 2008.

En outre, le contrat de service public entre l'Etat et la Banque de France pour 2007-2009 a été signé en octobre 2007 et est entré rétroactivement en vigueur le 1 er janvier 2007, afin d'assurer la continuité avec le contrat pour 2003-2006.

Il convient de relever, s'agissant du remboursement des prestations accomplies par la Banque de France pour le compte de l'Etat, qu'un désaccord persiste sur la répartition des charges et sur le niveau de coût de référence à retenir en facturation . De nouveaux échanges techniques sont en cours, dans le cadre de l'adoption par la Banque de France d'une nouvelle comptabilité analytique liée à l'harmonisation au sein de l'Eurosystème. Votre commission pour avis relève à ce sujet, à la suite de la Cour des comptes, qu'il est urgent que ces discussions aboutissent.

B. UNE PERFORMANCE ENCORE PERFECTIBLE

1. La prévision de croissance est-elle un indicateur pertinent ?

Le premier indicateur du programme, relatif à la fiabilité comparée des prévisions du Gouvernement présentées dans le rapport économique, social et financier et de celles des instituts de conjoncture, présente une triple faiblesse.

Sur la forme , tout d'abord, il est extrêmement peu lisible . En effet, pour les années précédant celles du projet de loi de finances, le PAP n'indique pas « l'écart » entre prévision et réalisation (comme le laisserait supposer la légende), mais ne fournit que les chiffres de croissance effective, ce qui oblige donc à se reporter à tous les PAP antérieurs pour juger de l'amélioration de la performance (c'est-à-dire de la réduction de l'écart entre prévision et réalisation). Votre rapporteur pour avis souhaite donc que soit adoptée dès l'année prochaine une présentation identique à celle de l'indicateur relatif à la fiabilité des prévisions de recettes fiscales 3 ( * ) . Cette présentation aurait l'avantage d'afficher l'écart de la prévision à la réalisation ainsi que son évolution sur plusieurs années. Elle permettrait également de comparer directement le résultat des prévisions du gouvernement à celui du groupe technique.

Cette modification s'impose d'autant plus que les chiffres de croissance pour une année donnée font l'objet de trois estimations successives par l'INSEE 4 ( * ) . Ainsi, le PAP 2007 indiquait, pour 2005, une croissance de 1,2 % pour 2005, ce qui correspondait à l'estimation provisoire faite par l'INSEE en mai 2006 . Or en mai 2007 , l'INSEE a affiné cette estimation et a publié un chiffre de 1,7 % pour le compte semi définitif de 2005, soit une variation conséquente, puisqu'elle s'élève à 0,5 point . Toujours d'après les informations communiquées à votre rapporteur, « Il n'est pas à exclure que ce chiffre soit à nouveau révisé en mai 2008 avec la publication des chiffres des comptes définitifs pour 2005 . » Autrement dit, ce n'est que dans le PAP 2009 que l'on pourra, véritablement, comparer les prévisions que le Gouvernement avait faites dans les PAP 2005 et 2006 et la croissance effective de l'année 2005.

Sur le fond ensuite , tout en reconnaissant que la prévision de croissance du Gouvernement pour 2006 s'est avérée meilleure que celle du groupe technique (2 % et non 1,8 %), votre rapporteur pour avis s'interroge toutefois à nouveau sur les prévisions. En effet, pour 2007, l'OCDE a révisé à la baisse, de 2,2 à 1,8 % sa prévision de croissance, alors que le Gouvernement la maintient à 2-2,5 %. Votre rapporteur pour avis souligne, à titre personnel, qu'il s'agit de la plus forte correction parmi les pays du G7 et, avec l'Italie, la plus modeste performance attendue, celle-ci résultant notamment de la hausse moitié moins rapide que prévu du PIB au deuxième trimestre (à + 0,3 %) .

Enfin, troisième critique à l'encontre de cet indicateur : permet-il réellement de mesurer la performance de la direction du Trésor ? La prévision de croissance relève en réalité davantage d'un choix politique et stratégique du Gouvernement que de la performance de la DGTPE, dont on ignore, en réalité, le chiffre qu'elle a élaboré en amont. En conséquence, il convient de s'interroger sur la pertinence même de cet indicateur, cette observation ne remettant évidemment nullement en cause la légitimité du Parlement à contrôler, chaque année, la sincérité de la loi de finances .

2. Une performance à améliorer : la prévision de recettes fiscales

Le deuxième indicateur, relatif à la prévision de recettes fiscales, montre que la performance sur ce point peut être améliorée. En effet, ces dernières années, les écarts entre prévision et réalisation ont été récurrents et importants (supérieurs à 8 milliards d'euros lors de cinq des huit derniers exercices). Pour 2006, l'écart est de 10 milliards d'euros. Or cette prévision doit permettre au Parlement de disposer d'informations fiables au moment où il vote le montant des dépenses pour l'exercice suivant.

Comme l'a souligné la Cour des comptes dans un récent rapport, il conviendrait d'améliorer les modèles de prévision propres à chaque impôt et le suivi des évolutions économiques sectorielles. Un effort particulier devrait notamment être accompli en matière d'impôt sur les sociétés, qui a pesé en 2006 pour plus de 60 % dans l'écart de prévision . La volatilité accrue de cet impôt renforce en effet les difficultés de prévision. Une analyse plus fine des résultats (y compris trimestriels) des entreprises et des secteurs qui ont le plus fortement contribué à la croissance de l'IS sur la période récente pourrait permettre de l'améliorer.

3. Un indicateur à modifier ou à supprimer : le délai de transposition des directives européennes

Le programme comporte deux indicateurs relatifs à la transposition des directives européennes : le premier porte sur le pourcentage de directives dont la date limite de transposition a été dépassée en cours d'année, le second sur le nombre de directives restant à transposer dont la date de transposition est dépassée.

Votre commission pour avis , au demeurant très attachée au respect des délais de transposition, s'interroge fortement sur la pertinence de cet indicateur. D'une part, la notion de pourcentage apparaît problématique au regard du très faible nombre de directives concernées (moins de 10). D'autre part, comme pour la prévision de croissance, cet indicateur est fortement dépendant de facteurs extérieurs à la DGTPE dont certains très politique : délais de concertation interministérielle et surtout inscription à l'ordre du jour parlementaire .

4. Des indicateurs à créer

La performance de la direction de la législation fiscale n'est mesurée qu'à travers un seul indicateur, relatif au pourcentage de textes d'application publiés dans le délai de 6 mois à compter de l'entrée en vigueur du texte appliqué. Etant donnée la faible performance enregistrée en 2006 (33 %), il pourrait utilement être amélioré par la création d'un sous-indicateur sur le délai dans lequel les textes non publiés dans ce délai sont pris, autrement dit sur la gestion du « stock ».

En outre, il pourrait être pertinent de créer un indicateur relatif aux délais de réponse de la direction de la législation fiscale aux questions parlementaires . Une fonction essentielle de cette direction est en effet d'assurer l'information des élus, des contribuables et des services des impôts sur l'évolution de la réglementation fiscale et les problèmes d'application qui en découlent. En 2001, la DLF avait élaboré 838 réponses aux questions écrites de parlementaires. Interrogé sur l'évolution de ce chiffre en 2006, le ministère de l'économie et des finances n'a pas été en mesure de répondre à votre rapporteur pour avis, ce qu'elle ne peut que regretter.

Par ailleurs, la rapidité des changements de périmètre du programme, décidés à la suite des modifications ministérielles entraîne, dans le PAP 2008, une absence totale de mesure de la performance pour l'action n° 3. Baptisée a minima « moyens des programmes « accès et retour à l'emploi » et « accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi », elle n'est dotée d'aucun objectif ni indicateur , ce qui est regrettable.

De même, aucun objectif ni indicateur n'est associé à la nouvelle action « Développement international des entreprises », alors même que des objectifs figurent dans le contrat pluriannuel conclu par le réseau extérieur du Trésor. Il conviendrait, en conséquence, d'intégrer ceux-ci dans le prochain PAP.

II. LE PROGRAMME « STATISTIQUES ET ÉTUDES ÉCONOMIQUES »

Le programme « Statistiques et études économiques » est marqué, comme en 2007, par une réduction de ses effectifs liée à l'application, à l'INSEE, du contrat pluriannuel de performance conclu pour 2007-2009. En outre, celui-ci a fait l'objet, en 2008, de débats relatifs à l'indice des prix -sur lequel votre commission pour avis s'était déjà penchée l'an dernier-, à la mesure du chômage et à l'indépendance de l'institut, sur lesquels le présent rapport revient.

A. L'APPLICATION DU CONTRAT PLURIANNUEL DE PERFORMANCE DE L'INSEE

La dotation demandée au titre de 2008 pour le programme est globalement stable, puisqu'elle passe de 446,3 à 448,6 millions d'euros. Elle comprend les crédits relatifs aux personnels de l'INSEE (5.884 ETPT) et du service des études et statistiques industrielles (247 EPTP). Avec 6.131 ETP, le plafond d'emplois est réduit de 111 ETP par rapport à 2007 .

(en millions d'euros)

Actions

Autorisations d'engagement 2007

Autorisations d'engagement
2008

Crédits de paiement 2007

Crédits de paiement 2008

Variation des crédits de paiement 2007/2006

Infrastructure statistique

156,6

150,6

156,4

151

-3,4 %

Information sur les entreprises et synthèse économique

73,5

78,2

73,4

78

+6,2 %

Information démographique et sociale

62,9

65,4

63

65,5

+3,9%

Formation

22,6

24,5

22,6

24,5

+8,4 %

Soutien

130

129,7

129,8

132,2

+1,8 %

Total

446,3

448,6

445,5

451,5

+ 1,2 %

Source : Projet de loi de finances pour 2008

L'INSEE a conclu un contrat pluriannuel de performance sur la période 2007-2009 au terme duquel il s'est engagé à diminuer son plafond d'emploi de 3,8 % selon la programmation illustrée dans le tableau ci-après.

2006

2007

2008

2009

Diminutions d'effectifs sur la période

-

5 992

5 887

5 767

-3,8 %

Données exprimées en ETPT

Votre rapporteur pour avis relève que la demande de statistique ne cesse de croître, tant au niveau européen qu'au niveau régional et s'interroge en conséquence sur l'opportunité d'une réduction mécanique d'effectifs d'année en année .

B. LA NÉCESSITÉ DE RÉNOVER LES OUTILS STATISTIQUES DE MESURE DU COÛT DE LA VIE ET DU CHÔMAGE

1. Vers la création d'un « indice du coût de la vie » ?

Votre commission pour avis avait consacré, en 2007, une partie de son avis budgétaire à la question de l'indice des prix à la consommation, notamment au décalage entre celui-ci et la réalité perçue par les ménages. Cette préoccupation a été exprimée, cet été, par le Président de la République qui a évoqué des « indices qui ne veulent rien dire, qui ne mesurent pas le coût de la vie, qui n'ont aucun rapport avec la réalité vécue par les ménages ». A la suite de ce discours, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, a annoncé la constitution d'un groupe d'économistes et de représentants des consommateurs chargé de créer de nouveaux instruments de mesure dans lesquels les Français pourraient « se reconnaître ».

Les points principaux qui expliquent le décalage entre l'indice des prix et la perception des Français sont aujourd'hui identifiés :

- la prise en compte du logement : l'indice des prix ne tient pas compte des dépenses d'achats immobiliers des propriétaires (environ 60 % des ménages français) car elles sont considérées comme de l'investissement. Pourtant, elles pèsent durant de longues années sur le budget des ménages. En outre, dans la mesure où seuls 40 % environ des ménages sont locataires, les loyers ne sont pris en compte qu'à hauteur de 6 % dans l'indice des prix général alors que les loyers représentent au moins 20 % du revenu des ménages locataires ;

- les « dépenses contraintes » , qui ont fortement augmenté puisque leur part dans le revenu courant, de 45 % en moyenne en 2006, a augmenté de 4 points depuis 2001 : elles sont dominées par le poste « logement » (loyers, charges, chauffage), qui représente, en 2006, 20,2 % du revenu courant et gagne 2,7 points de revenu en cinq ans. En outre, leur poids est particulièrement élevé dans les plus basses tranches de revenu. L'INSEE relève ainsi : « Il est très probable qu'avec une part « discrétionnaire » du revenu aussi réduite, ces ménages éprouvent un fort sentiment de dégradation de leur situation économique » ;

- l'hétérogénéité des structures de consommation suivant les ménages : comme l'avait relevé le Centre d'analyse stratégique en 2006 5 ( * ) , l'indice des prix à la consommation calculé par l'INSEE est un indice macroéconomique qui, par définition, ne peut rend rendre compte de l'hétérogénéité des structures de consommation des ménages , d'où la nécessité de disposer d'indices catégoriels ; ces derniers, publiés par l'INSEE pour la période 1996-2006, montrent que l'inflation a été plus forte pour les ménages pauvres et les ménages ruraux ;

- « l'effet qualité » : quand le prix d'un produit augmente du fait de son amélioration, cette hausse n'est pas prise en compte, alors même que pour les ménages, qui n'ont plus le choix d'acheter un produit moins cher, il s'agit bien d'une amputation supplémentaire de leur budget.

Ces points ayant été identifiés, la ministre de l'économie et de l'emploi, Mme Christine Lagarde a annoncé la constitution d'une commission dédiée à la mesure du pouvoir d'achat. Celle-ci élaborera de nouveaux indicateurs qui pourraient être publiés dans le courant de l'année 2008. Elle devrait notamment proposer une définition consensuelle des dépenses contraintes et mettre au point des indicateurs distinguant l'évolution du coût de la vie pour les locataires et pour les propriétaires.

Votre rapporteur pour avis se félicite de cette annonce mais émet toutefois une réserve . En effet, d'après les informations qui lui ont été communiquées, il ne serait pas envisagé de modifier l'indice des prix lui-même. Or cet indice sert aujourd'hui, par exemple, à calculer l'augmentation du SMIC, alors même que, pour les raisons évoquées plus haut, il ne reflète pas l'évolution réelle de l'inflation pour les ménages les plus pauvres. Votre rapporteur pour avis souhaite donc, à titre personnel, que l'inflation subie soit davantage prise en compte dans le pilotage des politiques économiques et sociales . Elle souligne enfin que le débat sur l'indice des prix ne doit pas occulter la question cruciale du pouvoir d'achat des Français et des moyens de l'améliorer, question qui constitue aujourd'hui leur première préoccupation .

2. Une mesure du taux de chômage à améliorer

Pour la première fois dans son histoire, en mars 2007, l'INSEE a reporté de plusieurs mois la publication définitive du taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) pour l'année 2006.

L'estimation du taux de chômage repose sur une double méthodologie. L'ANPE , pour sa part, donne chaque mois des informations sur les évolutions du nombre de demandeurs d'emplois en fin de mois (DEFM) de catégorie 1, 2 et 3 hors activité réduite. Ces données sont recueillies par la Direction de l'animation, des recherches, des études et des statistiques (DARES) et envoyées à l'INSEE, qui utilise ces données pour publier le taux de chômage mensuel.

Ces données sont provisoires et généralement revues en mars chaque année, cette révision prenant en compte les données de l'enquête Emploi effectuée par l'INSEE , qui mesure les niveaux de chômage au sens du BIT. C'est cette révision, ce « calage » de la série mensuelle, dont l'INSEE a annoncé le report dans l'attente d'investigations méthodologiques complémentaires devant aboutir à l'automne 2007.

D'après les informations fournies à votre rapporteur, deux raisons principales expliquent ce report . D'une part, les données de l'ANPE et celles de l'enquête Emploi divergeaient fortement, comme l'illustre le graphique ci-après.

Dans sa note de juin 2007, l'INSEE explique une partie de ce décalage ainsi : « Une source importante d'écart est constituée par les chômeurs non inscrits , qui représentent environ 20 % de l'ensemble des chômeurs au sens du BIT. Les données de l'enquête Emploi permettent de savoir si un chômeur est inscrit à l'ANPE ou non : le taux d'inscription des chômeurs à l'Agence a diminué régulièrement, d'environ 0,75 point par trimestre, depuis la mi-2005 . »

D'autre part, les résultats de l'enquête Emploi 2006 ont été difficiles à interpréter du fait, notamment, du taux de non-réponses , une forte diminution de celui-ci ayant été observée en 2006 dans certaines régions comme l'Ile-de-France.

A la suite de ces difficultés, un groupe de travail du Conseil national de l'information statistique (CNIS), présidé par M. de Foucauld, a commencé à travailler sur les statistiques de l'emploi, du chômage, de la précarité et du sous-emploi. Parallèlement, Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, a chargé l'Inspection générale des Finances et l'Inspection générale des Affaires sociales, le 19 juin 2007, d'évaluer les principaux outils de mesure du chômage utilisés en France. Le rapport a été remis le 24 septembre.

Les points suivants ressortent de ce rapport :

- la variation du nombre de DEFM inscrits à l'ANPE en fin de mois donne en général une indication fiable des tendances du marché du travail, mais cet indicateur a également en partie reflété, en 2005 et 2006, les évolutions des pratiques de suivi et d'accompagnement des demandeurs d'emploi par l'Agence ;

- l'Enquête emploi manque de fiabilité pour mesurer les évolutions conjoncturelles précises du taux de chômage en raison notamment de la taille réduite de l'échantillon qui limite la précision des résultats trimestriels ;

- il est recommandé d'arrêter la publication mensuelle d'estimations de chômage au sens du BIT, telles qu'elles sont calculées à l'heure actuelle à partir d'un "calage" sur les données ANPE, et de ne fournir qu'une publication trimestrielle à partir des seules données de l'Enquête emplo i ;

- la taille de l'échantillon de l'Enquête emploi de l'INSEE devrait être augmentée afin d'améliorer la fiabilité de ses résultats ;

- une réflexion devrait être engagée pour simplifier et refondre la typologie des catégories de DEFM inscrits à l'ANPE.

Constatant que la méthode habituelle d'estimation mensuelle du chômage BIT n'était plus adaptée, compte tenu des fortes divergences d'évolution entre les deux sources d'information 6 ( * ) , l'INSEE, en accord avec la DARES, a décidé d'arrêter la publication de la série mensuelle de chômage au sens du BIT. En revanche, la DARES et l'ANPE continueront à publier les statistiques mensuelles de demandeurs d'emploi inscrits en fin de mois à l'ANPE.

En outre, le 12 novembre dernier , l'INSEE a publié le taux de chômage pour 2006, en adoptant les mêmes critères qu'Eurostat : alignement sur l'interprétation communautaire de la définition du chômage BIT (ainsi, l'inscription à l'ANPE était considérée jusqu'à présent comme une « démarche active de recherche d'emploi » par l'INSEE alors qu'elle ne l'est pas par Eurostat) et élargissement aux départements d'outre-mer.

Votre commission pour avis se félicite tout d'abord que les difficultés de mesure exacte du chômage fassent l'objet d'un débat public, par-delà les accusations de manipulation de chiffres. En outre, elle juge nécessaire de réaffirmer l'importance de l'Enquête emploi dans la connaissance du chômage et, pour cela, de suivre les préconisations du rapport précité s'agissant notamment du doublement de l'échantillon interrogé . Ce doublement doit toutefois être accompagné de moyens financiers, dans la mesure où l'augmentation de la taille de l'échantillon ne doit pas s'effectuer au détriment des autres missions de l'INSEE. Une telle réforme devrait donc donner lieu à une hausse des crédits dans le prochain budget .

Votre rapporteur pour avis estime, à titre personnel, regrettable que des solutions aient d'ores et déjà été adoptées alors même que le groupe de travail présidé par M. de Foucauld au sein du CNIS n'a pas achevé ses propres investigations et qu'une réunion de la formation Emploi-Revenus du CNIS était programmée le 30 novembre. Le groupe créé au sein du CNIS, auquel participent des experts et des représentants des partenaires sociaux et des associations, doit pouvoir mener le débat à son terme. Votre rapporteur pour avis regrette notamment que d'importantes modifications du mode de calcul du taux de chômage aient été adoptées pour la publication, le 12 novembre, du chiffre du chômage 2006, minorant d'autant, pour des observateurs non avertis, l'ampleur du décalage entre les données ANPE et celles de l'INSEE pour cette année-là .

Enfin, les améliorations concrètes qui seront apportées à l'Enquête emploi doivent être complétées par la création d'indicateurs du marché du travail, reflétant non seulement le chômage total mais aussi les différentes dimensions du sous-emploi et de la précarité, ce qu'on appelle le « halo » de chômage .

C. L'INDÉPENDANCE DE L'INSEE

La question de l'indépendance de l'INSEE s'est posée récemment avec acuité du fait du report de la publication du chiffre du chômage pendant la campagne présidentielle et du changement de directeur général à la tête de l'institut.

Alors que le code de bonnes pratiques de la statistique européenne, promulgué en 2005, prévoit que l'indépendance de l'autorité statistique est inscrite dans le droit, la France est l'un des rares pays européens où ce n'est pas le cas. Certes, un rapport d'évaluation remis en 2007 a jugé qu'en pratique, l'indépendance professionnelle est un point fort de la culture de l'INSEE. Toutefois, formellement, rien ne garantit l'indépendance de l'INSEE, qui dépend du ministère de l'économie et des finances et dont le directeur général est nommé en conseil des ministres.

Une réflexion est donc en cours sur ce sujet. Votre rapporteur pour avis juge essentiel que l'indépendance de l'institut soit pleinement reconnue et souhaite pour cela qu'au delà de l'inscription, formelle, de son indépendance dans une loi, celle-ci soit garantie, en pratique, par la création d'un Haut conseil composé de personnalités qualifiées et indépendantes .

En tout état de cause, elle souligne qu'il serait très préjudiciable de transformer l'INSEE en établissement public ou en Agence. Le statut public des administrateurs de l'INSEE garantit en effet à la fois leur indépendance, leur très grande compétence, leur polyvalence -l'INSEE est un vivier pour d'autres administrations de Bercy- et leur rôle de coordination de l'ensemble des statistiques produites par les différents ministères.

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* *

Réunie mercredi 14 novembre 2007 sous la présidence de M. Jean-Paul Emorine, président , la commission des affaires économiques a, malgré la proposition d'avis d'abstention présentée par son rapporteur, adopté les crédits de la mission « Pilotage de l'économie française », les groupes socialiste et communiste s'abstenant .

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR VOTRE RAPPORTEUR

- M. Jean-Philippe COTIS , directeur général de l'INSEE ;

- Mme Julie HERVIANT , secrétaire général de la CGT-INSEE ;

- M. Gilles LAZAROU , secrétaire général de l'UGA-INSEE ;

- M. Freddy LIENARD , secrétaire général de FO-INSEE ;

- M. Erik LINQUIER , secrétaire général de la direction du Trésor et de la politique économique.

* 1 Elle regroupe en effet les crédits de la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE), de la direction générale de la législation fiscale et de la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle.

* 2 Loi n° 2007 212 du 20 février 2007 portant diverses dispositions intéressant la Banque de France.

* 3 C'est-à-dire avec cinq lignes : réalisation de la variable, telle qu'elle est connue sur la base des dernières données de l'INSEE, prévision du gouvernement inscrite dans le PLF, écart entre la prévision du gouvernement et la réalisation, prévision du groupe technique de la Commission économique de la nation au moment du PLF et écart entre la prévision du groupe technique et la réalisation.

* 4 Compte provisoire, compte semi définitif et compte définitif.

* 5 Note externe n° 32, 30 octobre 2006, Comment évolue le pouvoir d'achat en fonction de l'hétérogénéité des structures de consommation en France ?

* 6 INSEE, Note de conjoncture de juin et DARES, Premières synthèses n° 34.1 d'août 2007.

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