Accéder au dossier législatif

Avis n° 104 (2008-2009) de M. Bernard SAUGEY , fait au nom de la commission des lois, déposé le 20 novembre 2008

Disponible au format Acrobat (296 Koctets)

N° 104

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 20 novembre 2008

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi de finances pour 2009 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME IX

RELATIONS AVEC LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Par M. Bernard SAUGEY,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest , président ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, M. François Zocchetto , vice-présidents ; MM. Laurent Béteille, Christian Cointat, Charles Gautier, Jacques Mahéas , secrétaires ; M. Alain Anziani, Mmes Éliane Assassi, Nicole Bonnefoy, Alima Boumediene-Thiery, MM. Elie Brun, François-Noël Buffet, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Yves Détraigne, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Pierre Fauchon, Louis-Constant Fleming, Gaston Flosse, Christophe-André Frassa, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Mmes Jacqueline Gourault, Virginie Klès, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Mézard, Jean-Pierre Michel, François Pillet, Hugues Portelli, Roland Povinelli, Bernard Saugey, Simon Sutour, Richard Tuheiava, Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 1127 , 1198 à 1203 et T.A. 204

Sénat : 98 et 99 (annexe n° 24 ) (2008-2009)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Après avoir entendu Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales le mardi 18 novembre 2008, la commission des lois, réunie le mercredi 19 novembre 2008 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président, a procédé, sur le rapport pour avis de M. Bernard Saugey, à l'examen des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » du projet de loi de finances pour 2009.

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis, a tout d'abord souligné le fait que, pour la première fois, le projet de loi de finances pour 2009 s'inscrivait dans une perspective pluriannuelle axée sur l'objectif de retour à l'équilibre des finances publiques en 2012. Dans ce contexte, il a insisté sur la légitimité de l'association des collectivités locales à l'effort de maîtrise des dépenses publiques, précisant que, désormais, l'ensemble des concours financiers de l'Etat étaient intégrés au sein d'une « enveloppe normée » au périmètre élargi et dont la progression serait limitée à l'inflation prévisionnelle hors tabac.

M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis, a ensuite regretté que les règles édictées par la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 ne permettent pas de rendre compte de façon lisible de l'effort financier global de l'Etat en faveur des collectivités territoriales, composé de concours financiers stricto sensu , eux-mêmes partagés entre prélèvements sur recettes et crédits budgétaires, de transferts de fiscalité destinés à financer les transferts de compétences aux collectivités territoriales et de la compensation des dégrèvements législatifs et des exonérations d'impôts locaux.

Soulignant la nécessité d'une refonte d'ensemble de la fiscalité locale, à l'heure actuelle excessivement complexe, M. Bernard Saugey, rapporteur pour avis, s'est félicité de l'annonce, par le gouvernement, d'un certain nombre de réformes d'envergure destinées à clarifier les compétences des collectivités et à rationaliser l'architecture du territoire national, tout en insistant sur le fait que ces réformes devraient être menées en toute transparence et dans le respect de l'autonomie des collectivités territoriales.

Enfin, il a estimé que l'association des collectivités locales à l'effort de maîtrise des finances publiques se devait d'être accompagné d'un renforcement des enceintes de dialogue entre l'Etat et les collectivités : de ce point de vue, il a salué la création de la nouvelle commission consultative d'évaluation des normes et s'est félicité des progrès accomplis, dans le cadre des négociations européennes, en faveur d'une meilleure prise en compte des intérêts et des positions des collectivités territoriales.

La commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « Avances aux collectivités territoriales » du projet de loi de finances pour 2009.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi de finances pour 2009 se caractérise par un renouvellement des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales.

Pour la première fois, en effet, le budget de l'Etat s'inscrit dans une perspective pluriannuelle axée sur l'objectif de retour à l'équilibre des finances publiques pour 2012. Dans ce contexte, le projet de loi de finances pour 2009 prévoit d'associer pleinement les collectivités territoriales à cet effort de maîtrise des dépenses publiques, par la stricte limitation de la progression de l'ensemble des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales au rythme de l'inflation hors tabac.

En contrepartie de cette responsabilisation accrue, l'Etat entend renforcer les enceintes de dialogue avec les collectivités territoriales, dans une triple démarche de transparence, de participation et de responsabilité. Ces enceintes de dialogue seront appelées à jouer un rôle essentiel lors de l'examen des nombreuses réformes qui ont été annoncées par le gouvernement au cours des derniers mois.

A cet égard, si certaines de ces annonces ont pu susciter, à des degrés divers, des inquiétudes de la part des élus locaux, elles n'en demeurent pas moins fondamentalement nécessaires au regard de la situation de nos finances publiques et du contexte économique passablement difficile que traverse actuellement notre pays. De ce point de vue, la légitimité de la pleine association des collectivités territoriales à la maîtrise des dépenses publiques ne peut guère être contestée.

Néanmoins, il conviendra de veiller, dans les semaines et les mois à venir, à ce que ces réformes soient engagées dans une totale transparence et dans le respect des prérogatives des collectivités locales. En outre, la capacité financière des collectivités les plus défavorisées devra être préservée, sauf à remettre en cause le principe de péréquation qui figure désormais dans notre Constitution. Le projet de loi de finances pour 2009 ne constitue donc qu'une première étape dans ce processus.

Comme par les années passées, l'ensemble des dispositions du projet de loi de finances relatives aux relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales demeure difficile à appréhender dans sa globalité, du fait du cadre mal adapté que continuent de constituer à ce sujet les règles de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF). Néanmoins, une réelle cohérence unit ces dispositions éparses à travers l'objectif de maîtrise de la progression des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales. En contrepartie, un certain nombre de réformes institutionnelles, tant au niveau de l'Etat qu'au niveau de l'Union européenne, entendent associer davantage les collectivités territoriales à la production normative et à la gouvernance globale.

I. UN MANQUE DE LISIBILITÉ PERSISTANT

Comme votre rapporteur n'a cessé de le répéter, les règles édictées par la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) ne permettent pas de rendre compte de façon lisible et exhaustive de l'ensemble des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales :

- Ainsi, aux concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales stricto sensu , partagés entre prélèvements sur recettes et crédits budgétaires (56,478 milliards d'euros au total, auxquels s'ajoute 1,8 milliard d'euros de subventions diverses de fonctionnement et d'équipement provenant de divers ministères), il convient d'ajouter les transferts de fiscalité destinés à financer les transferts de compétences aux collectivités (21,4 milliards d'euros) ainsi que la compensation des dégrèvements législatifs et des exonérations d'impôts locaux (17,2 milliards d'euros).

- Parallèlement, la mission (hors budget général) correspondant au compte de concours financiers « avances aux collectivités territoriales », dont les crédits atteignent 86,822 milliards d'euros, constitue une avance sur les recettes fiscales des collectivités territoriales et non directement une contribution financière de l'Etat au financement de ces dernières.

Source : PLF

A. LES CONCOURS FINANCIERS DE L'ETAT SONT PARTAGÉS ENTRE PRÉLÈVEMENTS SUR RECETTES ET CRÉDITS BUDGÉTAIRES

Au sein des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales, il y a lieu de distinguer, d'une part, les crédits budgétaires relevant de la mission « relations avec les collectivités territoriales », auxquels s'ajoutent les subventions diverses accordées par différents ministères, et, d'autre part, les prélèvements sur recettes en faveur des collectivités.

1. La mission « relations avec les collectivités territoriales » ne représente qu'une partie des crédits budgétaires destinés aux collectivités

a) La mission « relations avec les collectivités territoriales » regroupe les dotations budgétaires inscrites au budget du ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Son montant est fixé à environ 2,4 milliards d'euros pour 2009.

Cette mission se compose de quatre programmes qui portent respectivement les crédits des concours financiers aux communes et groupements de communes (programme 119), aux départements (programme 120), aux régions (programme 121) et certains concours spécifiques (programme 122) :

- Les crédits du programme 119 « concours financiers aux communes et groupements de communes » (802,2 millions d'euros en autorisations d'engagement et 739,6 millions d'euros en crédits de paiement) correspondent traditionnellement à trois dotations : la dotation générale de décentralisation (DGD), la dotation globale d'équipement (DGE) et la dotation de développement rural (DDR), auxquelles s'ajoutent en 2009 une « dotation forfaitaire titres sécurisés » et une « dotation de développement urbain ». Les crédits affectés à ces quatre dernières dotations ont vocation à financer l'action n°1 du programme, consacrée au soutien aux projets des communes et groupements de communes, par l'allocation de subventions à des communes ou à des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) sur la base de projets qu'ils présentent. De son coté, l'action n°2 « dotation générale de décentralisation » reprend une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des communes et de leurs groupements résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences.

- Les crédits du programme 120 « concours financiers aux départements » (488,3 millions d'euros en autorisations d'engagement et 484,9 millions d'euros en crédits de paiement) ne correspondent plus qu'à deux dotations : la DGE des départements contribue à l'action n°1 du programme, « aides à l'équipement des départements », tandis que la DGD contribue à l'action n°2 (« dotation générale de décentralisation »), qui reprend une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des départements résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences. Pour mémoire en effet, depuis 2008, la dotation départementale d'équipement des collèges (DDEC), qui figurait jusqu'alors au sein de ce programme, est inscrite en prélèvement sur les recettes de l'Etat.

- Les crédits du programme 121 « concours financiers aux régions » (800 millions d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement) ne comprennent plus, depuis la transformation en 2008 de la dotation régionale d'équipement scolaire (DRES) en prélèvement sur recettes, que l'action n°2 « dotation générale de décentralisation », qui regroupe une partie des dotations destinées à compenser les charges globales de fonctionnement des régions résultant d'un transfert, d'une création ou d'une extension de compétences.

- Enfin, le programme 122 « concours spécifiques et administration » (321 millions d'euros en autorisations d'engagement et 312 millions d'euros en crédits de paiement) comporte quatre actions aux objectifs divers. L'action n°1 « aides exceptionnelles aux collectivités territoriales » reprend les subventions destinées à soutenir les collectivités déstabilisées par des circonstances exceptionnelles, auxquelles s'ajoutent à partir de 2009 les aides versées aux communes concernées par les restructurations du ministère de la défense. L'action n°2 « administration des relations avec les collectivités territoriales » regroupe les crédits de fonctionnement et d'investissement de la direction générale des collectivités locales (DGCL) du ministère de l'intérieur. L'action n°3 « dotation générale de décentralisation » regroupe un certain nombre de concours spécifiques versés dans le cadre de la DGD (crédits du concours particulier relatif aux autorités organisatrices des transports urbains, crédits du concours « bibliothèques », crédits du concours « ports maritimes décentralisés » et crédits du concours « aérodromes »). Enfin, l'action n°4 « dotations outre-mer » regroupe quatre dotations destinées à la Nouvelle-Calédonie et à Mayotte.

MISSION « Relations avec les collectivités territoriales »

Programme
« Concours financiers aux communes et
aux groupements
de communes »

Programme
« Concours financiers aux départements »

Programme
« Concours financiers aux régions »

Programme
« Concours
spécifiques
et administration »

Actions :

Actions :

Action :

Actions :

- Soutien aux projets des communes et des groupements de communes

- Aides à l'équipement des départements

- Dotation générale de décentralisation

- Aides exceptionnelles aux collectivités territoriales

- Dotation générale de décentralisation

- Dotation générale de décentralisation

- Administration des relations avec les collectivités territoriales

- Dotation générale de décentralisation

- Dotation outre-mer

Par rapport à 2008, la mission « relations avec les collectivités territoriales » est affectée par des mesures de transfert et des mesures de changement de périmètre à hauteur de +61,8 millions d'euros, résultant des opérations suivantes :

- création de trois nouvelles dotations budgétaires : une dotation de développement urbain (DDU) destinées aux villes défavorisées (50 millions d'euros), une dotation forfaitaire destinées aux communes concernées par la délivrance des titres sécurisés (6,34 millions d'euros) et une aide exceptionnelle aux collectivités concernées par la restructuration territoriale des implantations du ministère de la défense (5 millions d'euros) ;

- recentrage du secrétariat d'Etat à l'outre-mer sur une administration de mission, conduisant au transfert de plusieurs dotations du programme 123 « conditions de vie outre-mer » de la mission « outre-mer » vers l'action n°4 du programme 122 « concours spécifiques et administration » pour un montant de 102,3 millions d'euros ;

- abondement de la DGD des régions d'outre-mer inscrite sur le programme 121 de 40,5 millions d'euros au titre des transferts de compétences intervenant en application de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ;

- réduction de la DGD de droit commun des régions de 82,8 millions d'euros, justifiée par l'évolution de la jurisprudence communautaire relative aux subventions d'exploitation versées par les régions à la SNCF (lesquelles ne sont désormais plus assujetties à la TVA).

Envisagée de façon transversale, la mission « relations avec les collectivités territoriales » comprend les dotations suivantes :

- dotation générale de décentralisation (1,4 milliard d'euros) ;

- dotation globale d'équipement (709 millions d'euros) ;

- dotation de développement rural (131 millions d'euros) ;

- nouvelle dotation de développement urbain (50 millions d'euros) ;

- subventions et crédits divers (178 millions d'euros).

Toutefois, deux remarques importantes doivent être faites au sujet de cette mission :

- ses crédits ne représentent qu'environ 40% des crédits budgétaires et 4% seulement des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales ;

- l'Etat ne dispose d'aucune marge de manoeuvre pour 70% des crédits de cette mission , dans la mesure où les critères d'attribution et de répartition de la plupart de ses dotations sont définis par la loi.

Ce double constat avait conduit, l'an passé, notre collègue Michel Mercier, alors rapporteur spécial de la commission des finances, à proposer la suppression de la mission « relations avec les collectivités territoriales » , par, d'une part, la transformation des concours financiers sur lesquels l'Etat n'a pas de marge de manoeuvre en prélèvements sur recettes, et, d'autre part, le redéploiement des crédits restants au sein d'un nouveau programme de la mission « administration territoriale et générale de l'Etat ». Cette proposition conserve en 2009 toute sa pertinence.

b) La dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle correspond à la compensation des transferts de compétences en matière de formation professionnelle intervenus successivement depuis 1983 en faveur des régions. Pour 2009, les crédits de cette dotation sont inscrits, pour un montant de 1,686 milliard d'euros , au budget du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, au sein du programme 103-02 « accès des actifs à la qualification » de la mission « travail et emploi » .

c) Avec l'entrée en vigueur de la LOLF, les subventions budgétaires des autres ministères aux collectivités territoriales sont, depuis 2006, présentées par mission et programme et identifiées (à l'exception des crédits versés aux établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricole) par les crédits relevant de la catégorie 63 (transferts aux collectivités territoriales). Les crédits inscrits au titre de la catégorie 63 représentent, en 2009, 1,77 milliard d'euros (en autorisations d'engagement) et sont principalement répartis entre sept missions (« ville et logement », « outre-mer », « politique des territoires », « écologie, développement et aménagement durables », « culture », « agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales », « sécurité civile »). En 2008, 1,575 milliard d'euros de crédits avaient été ouverts au titre de la catégorie 63.

Néanmoins, si ces crédits participent bien de l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales, ils sont en revanche exclus du champ des concours de l'Etat entrant dans l' « enveloppe normée » (voir infra ).

2. L'essentiel des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales figure désormais en prélèvements sur les recettes de l'Etat

Le PLF pour 2009 prévoit que 52,4 milliards d'euros , soit 93 % des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales , sont prélevés sur les recettes de l'Etat. Ces 52,4 milliards d'euros se décomposent en 12 dotations principales, comprenant elles-mêmes parfois plusieurs composantes :

Intitulé du prélèvement

Montant prévu par le PLF
(art. 19)
(en milliers d'euros)

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation globale de fonctionnement

40.855.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat du produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

700.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs

38.000

Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

164.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle

583.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

5.855.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

1.998.000

Dotation élu local

65.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse

44.000

Compensation de la suppression de la part salarie de la taxe professionnelle

100.000

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

500.000

Dotation départementale d'équipement des collèges

329.000

Dotation régionale d'équipement scolaire

662.000

Compensation d'exonération au titre de la réduction de la fraction des recettes prises en compte dans les bases de taxe professionnelle des titulaires de bénéfices non commerciaux

279.000

Compensation d'exonération de la taxe foncière relative au non-bâti agricole (hors la Corse)

201.000

Fonds de compensation des baisses de DCTP

0

Fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

20.000

TOTAL

52.393.000

Ce dispositif a toutefois été aménagé lors de son examen par l'Assemblée nationale (voir infra ).

L'existence de ces prélèvements sur recettes (PSR) a été consacrée par l' article 6 de la LOLF , lequel dispose qu'« un montant déterminé de recettes de l'Etat peut être rétrocédé directement au profit des collectivités territoriales ou des Communautés européennes en vue de couvrir des charges incombant à ces bénéficiaires ou de compenser des exonérations, des réductions ou des plafonnements d'impôts établis au profit des collectivités territoriales . Ces prélèvements sur les recettes de l'Etat sont, dans leur destination et leur montant, définis et évalués de façon précise et distincte ». Les PSR constituent ainsi une exception aux principes d'unité (en permettant une contraction entre les recettes et les dépenses) et d'universalité (en permettant l'affectation de recettes à des dépenses) et se traduisent par des versements qui, une fois calculés, ont un caractère global et automatique .

Deux dotations concentrent 89% de ces prélèvements sur recettes :

- La DGF (plus de 40 milliards d'euros) constitue depuis 2004 la principale dotation de fonctionnement attribuée aux collectivités locales. Sa structure interne est particulièrement complexe, puisqu'elle comprend douze dotations et, pour chaque niveau de collectivités, une part forfaitaire ainsi qu'une ou plusieurs parts de péréquation. De 1996 à 2008, la DGF a évolué en fonction de l'indice de hausse des prix pour l'année à venir, auquel était ajoutée la moitié du taux de croissance du PIB en volume de l'année en cours .

- Le Fonds de compensation de la TVA (près de 5,9 milliards d'euros) a pour objet la compensation par l'Etat de la TVA acquittée par les collectivités territoriales sur leurs investissements. Son rythme rapide de progression (environ 10% par an depuis 2004) reflète à la fois la dynamique de l'investissement local et les élargissements successifs de son assiette.

Décomposition de la DGF

- La DGF des communes (16,4 milliards d'euros en 2008) comprend principalement une dotation forfaitaire (85% de la DGF des communes), ainsi que trois dotations de péréquation : la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU), la dotation de solidarité rurale (DSR) et la dotation nationale de péréquation (DNP).

- La DGF des EPCI à fiscalité propre (6,4 milliards d'euros en 2008) comprend une dotation de compensation et une dotation d'intercommunalité.

- La DGF des départements (12 milliards d'euros en 2008) regroupe une dotation forfaitaire, une dotation de compensation, une dotation de péréquation urbaine et une dotation de fonctionnement minimal.

- La DGF des régions (5,3 milliards d'euros en 2008), comprend une dotation forfaitaire et une dotation de péréquation.

Les prélèvements sur recettes intègrent également un certain nombre de dotations de compensations d'exonérations , lesquelles ont pour but de compenser les pertes de recettes fiscales entraînées par les exonérations et allègements de bases décidés par le législateur. Leur montant est calculé en fonction des ressources fiscales que percevait la collectivité avant l'exonération.

En 2004, une part importante des compensations d'exonération ont été intégrées dans la DGF. Depuis 2008, dans un objectif de maîtrise des dépenses publiques, un certain nombre de ces dotations jouent le rôle de variables d'ajustement et se voient appliquer un taux de minoration qui modère leur évolution spontanée.

Les crédits prévus par le PLF pour 2009 au titre des compensations d'exonérations représentent 3 ,32 milliards d'euros .

B. LES TRANSFERTS DE COMPÉTENCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES SONT DÉSORMAIS PRINCIPALEMENT FINANCÉS PAR DES TRANSFERTS DE FISCALITÉ

Dès « l'acte I » de la décentralisation, les collectivités territoriales ont bénéficié de transferts de ressources fiscales destinés à leur permettre de financer les compétences qui leur étaient transférées. En application de la loi du 7 janvier 1983, ces ressources fiscales devaient représenter « la moitié au moins des ressources attribuées par l'Etat à l'ensemble des collectivités locales ». C'est ainsi que :

- les droits d'enregistrement sur les mutations immobilières à titre onéreux (DMTO) et la taxe de publicité foncière ont été transférés aux départements à partir du 1er janvier 1984 ;

- la taxe sur les certificats d'immatriculation des automobiles (« taxe sur les cartes grises ») a été transférée aux régions à compter du 1 er janvier 1984 ;

- la suppression en 2006 de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur (« vignette »), transférée aux départements à compter du 1er janvier 1984, a été compensée par un transfert de produit de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA).

1. Les principes issus de la révision constitutionnelle de mars 2003

La révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a inscrit dans la Constitution le principe selon lequel « tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales s'accompagne de l'attribution de ressources équivalentes à celles qui étaient consacrées à leur exercice » (article 72-2).

Cinq cas ouvrent droit à une compensation financière :

- les transferts de compétences stricto sensu : la ressource est alors équivalente aux dépenses consacrées, à la date du transfert, par l'Etat, au titre des compétences transférées. Le montant de la compensation définitive est fixé par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intérieur et du ministre en charge du budget, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) ;

- la modification, par voie réglementaire, des règles relatives à l'exercice des compétences transférées, entraînant une charge nouvelle incombant aux collectivités territoriales : les modalités de mise en oeuvre de la compensation sont identiques à celles prévues dans le premier cas ;

- les créations de compétences au sens de l'article 72-2 de la Constitution : la nature et le montant de la ressource sont alors déterminés par la loi ;

- les extensions de compétences au sens de l'article 72-2 de la Constitution : la nature et le montant de la ressource sont également déterminés par la loi ;

- les pertes de produit fiscal résultant, le cas échéant, de la modification, postérieurement à la date de transfert des impôts aux collectivités territoriales concernées et du fait de l'Etat, de l'assiette ou des taux de ces impôts.

En outre, désormais, en application de l'article 72-2 de la Constitution, « les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources ». Ce dispositif a été précisé par la loi organique du 29 juillet 2004 relative à l'autonomie financière des collectivités territoriales.

Dans sa décision n° 2004-500 DC du 29 juillet 2004, le Conseil constitutionnel a estimé que les recettes fiscales qui entrent dans la catégorie des « ressources propres » des collectivités territoriales s'entendent, au sens de l'article 72-2 de la Constitution, du produit des impositions de toutes natures, non seulement lorsque la loi autorise ces collectivités à en fixer l'assiette, le taux ou le tarif, mais encore lorsqu'elle en détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette.

C'est ainsi que l'article 119 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales dispose que « la compensation financière des transferts de compétences s'opère, à titre principal, par l'attribution d'impositions de toute nature, dans des conditions fixées par la loi de finances » .

2. La compensation des transferts de compétences intervenus depuis 2004

Les transferts de compétences organisés par la loi du 13 août 2004 ont ainsi été principalement compensés par l'attribution de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance (TSCA) aux départements et par une fraction de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) aux régions. Depuis 2006, l'assiette de la TIPP est régionalisée : les régions sont désormais bénéficiaires d'un produit calculé sur la base des consommations de carburant enregistrées sur leur territoire, et non plus sur la base des consommations nationales de carburant. Depuis 2008, les départements perçoivent également une part de TIPP, l'assiette de la TSCA transférée ne permettant pas, bien qu'elle ait été élargie, de couvrir entièrement leur droit à compensation.

Le PLF pour 2009 ne modifie qu'à la marge le dispositif retenu dans les années précédentes :

- l'article 16 vise à ajuster la compensation dont bénéficient les départements . En 2009, l'évolution du droit à compensation des départements résulte essentiellement de la poursuite des processus de transfert des personnels des ministères de l'éducation nationale (TOS, GTOS), de l'équipement (DDE) ainsi que de l'agriculture (aménagement foncier). Le projet de loi intègre également les conséquences financières du décret du 20 avril 2006 relatif à la formation initiale des assistants maternels (passage d'une formation de 60 à 120 heures et renouvellement obligatoire annuel de la formation de secouriste). L'article 16 du PLF ne modifie toutefois pas le dispositif de compensation tel qu'il résulte de l'article 38 de la loi de finances initiale pour 2008 , et qui repose sur le transfert à chaque département d'une fraction d'un total formé par l'intégralité du produit de la TSCA et par des parts des tarifs de la TIPP afin de produire une recette équivalente au droit à compensation arrêté ;

- l'article 17 ajuste la compensation dont bénéficient les régions au titre des transferts de compétences résultant de la loi du 13 août 2004. En 2009, l'évolution du droit à compensation des régions résulte de la poursuite des processus de transferts des personnels des ministères de l'éducation nationale (TOS, GTOS), de l'agriculture (TOS des lycées agricoles ou maritimes) et de la culture (services de l'inventaire culturel), ainsi que de l'achèvement du transfert des formations professionnelles pour adultes de l'association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA). Le montant de ce droit inclut également le transfert du fonctionnement et de l'équipement des écoles et instituts des formations paramédicales et de sages-femmes. L'article 17 du PLF ne modifie toutefois pas le dispositif de compensation des transferts aux régions tel qu'il résulte de l'article 40 de la loi du finances initiale pour 2006 et qui repose sur le transfert à chaque région métropolitaine d'une fraction de la TIPP calculée sur une assiette régionale afin de produire une recette équivalente au droit à compensation constaté.

Au total, les transferts d'effectifs prévus dans le cadre de « l'acte II » de la décentralisation représentent environ 128.600 équivalents temps plein travaillé (ETPT) : 92% de ces EPTP auront été transférés à la fin de l'année 2009. 73 % d'entre eux relevaient auparavant du ministère de l'éducation nationale.

Transferts d'effectifs liés à l'« acte II » de la décentralisation

Milliers ETPT transférés par an

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Total

Personnels techniciens, ouvrier et de service (TOS) de l'éducation nationale

+ 3,5

+ 47,0

+ 32,1

+ 11,8

+ 0

+ 0

94,5

Personnels des directions départementales de l'équipement

+ 19,3

+ 2,5

+ 6,1

+ 2,8

30,7

Personnels TOS des lycées agricoles

+ 0,2

+ 1,3

+ 0,3

+ 0,5

2,3

Autres transferts
(culture, etc.)

+ 0,04

+ 0,1

+ 0,009

+ 0,9

+0,025

1,1

Total par année

+ 3,5

+ 47,2

+ 53,0

+ 14,6

+ 7,4

+ 2,8

128,6

Total en cumulé

3,5

50,7

103,7

118,3

125,8

128,6

128,6

Source : documents budgétaires

Un fait mérite toutefois d'être souligné : la poursuite de ces transferts de personnels , financée à titre principal par des transferts de fiscalité, n'est responsable que pour une partie seulement de l'augmentation dynamique de la masse salariale des collectivités locales (+ 6% en 2008, + 6% prévus pour 2009). Les transferts de personnels issus de la mise en oeuvre de la loi du 13 août 2004 ne contribueraient en effet qu'à hauteur de 2,8 % en 2008 et de 0,8 % en 2009 à la progression de la masse salariale locale. En outre, les communes et EPCI, qui ne sont pas concernés par les transferts de compétence liés à « l'acte II » de la décentralisation, voient leur masse salariale évoluer de l'ordre de + 4,5 % par an en moyenne.

Plus généralement, comme le souligne le rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques publié au mois de juin 2008, la croissance des dépenses locales n'est qu' « en partie imputable aux conséquences financières des transferts de compétence initiés en 2004 ». Ainsi, « hors transferts de compétences opérés en 2007, les dépenses des collectivités locales ont augmenté de 5,3 % en 2007. Cette évolution s'inscrit dans un mouvement de long terme. Depuis le début des années 2000, elles augmentent, en moyenne annuelle et en volume, de 4% avec les transferts et de 3 % hors transferts ».

3. La prise en compte de l'entrée en vigueur du revenu de solidarité active à compter du 1er juin 2009

La décentralisation du revenu minimum d'insertion (RMI) et la création du revenu minimum d'activité (RMA) à compter du 1er janvier 2004, organisées par la loi du 18 décembre 2003, ont été compensées par l'attribution aux départements d'une part de la TIPP . Toutefois, l'assiette de cette taxe s'étant révélée insuffisamment dynamique au regard de la progression rapide des dépenses, l'article 37 de la loi de finances initiale pour 2006 a créé le Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion (FMDI) , doté au départ de 100 millions d'euros. En portant à 500 millions d'euros le total des aides versées par le FMDI, la loi de finances rectificative pour 2006 a permis de couvrir près de la moitié du déficit enregistré par les départements entre la recette transférée et la dépense exécutée.

Le PLF pour 2009 complète ce dispositif de la manière suivante :

- d'une part, les crédits du FMDI sont reconduits à hauteur de 500 millions d'euros pour 2009 ;

- d'autre part, l'article 18 organise les modalités de compensation aux départements des charges résultant de la généralisation du revenu de solidarité active (RSA), qui devrait être effective à compter du 1er juin 2009 . A compter de cette date, le RMI et l'allocation de parent isolé (aujourd'hui à la charge de l'Etat) seront supprimés, de même que les mécanismes d'intéressement au retour à l'emploi ; ils seront remplacés par une nouvelle prestation fonctionnant comme un complément de revenu pour les personnes ayant un emploi et comme un revenu minimum pour les personnes sans emploi. Cette nouvelle prestation sera financée par les départements et par un nouveau fonds national de financement (le fonds national des solidarités actives). Les charges nouvelles pour les départements résultant de cette extension de compétence seront compensées par l'attribution d'une nouvelle fraction de TIPP . Le complément du droit à compensation des départements résultant de la mise en oeuvre du RSA est estimé provisoirement à 322 millions d'euros en 2009 , mais sera ajusté en loi de finances rectificative pour 2009 au regard des dépenses réellement constatées.

Au total, le PLF pour 2009 prévoit donc un transfert de fiscalité équivalent à 21,4 milliards d'euros .

Source : PLF 2009

C. LE CAS PARTICULIER DU COMPTE D'AVANCES AUX COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

Le compte d'avances aux collectivités territoriales n'entre pas à proprement parler dans la catégorie des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales mais constitue la traduction de la fonction de « fermier général » assurée par l'Etat au profit de ces dernières :

- d'un côté, l'Etat verse par douzième le montant des impositions votées pour l'année par les collectivités territoriales, tandis qu'il perçoit, avec un décalage, le produit effectif de ces impôts ;

- de l'autre, l'Etat est rémunéré par un prélèvement sur les recettes du compte d'avances, et les collectivités territoriales sont tenues de déposer leurs disponibilités au Trésor sans intérêt, sauf dérogations limitativement encadrées par une circulaire « Chautemps » datant de 1926.

1. Présentation du compte d'avances aux collectivités territoriales

Le fonctionnement de ce compte est régi par l'article 34 de la loi du 7 juillet 1977 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier :

- en dépenses, il enregistre les avances accordées mensuellement aux collectivités territoriales, dont le montant correspond à celui des émissions de rôles de l'année en taxe d'habitation, taxes foncières et taxe professionnelle ainsi que de la fraction de TIPP accordée aux départements au titre de la compensation financière de la décentralisation du RMI (RSA à compter du 1er juillet 2009) ;

- ses recettes sont constituées par le produit des impôts directs effectivement acquittés par les contribuables locaux , auxquels s'ajoutent les dégrèvements et admissions en non-valeur pris en charge par l'Etat.

86,22 milliards d'euros sont prévus pour 2009 au sein de la mission correspondant au compte de concours financiers « avances aux collectivités territoriales » 1 ( * ) , qui figure en-dehors du budget général. Ses crédits sont répartis en deux programmes.

Ainsi, le programme 832 « avances aux collectivités et établissements publics, et à la Nouvelle-Calédonie » , doté de 6,8 milliards d'euros pour 2009, vise à favoriser l'octroi d'avances aux collectivités et établissements publics, ainsi qu'à la Nouvelle-Calédonie, qui connaissent des difficultés momentanées de trésorerie ou ont besoin rapidement d'emprunter.

Le programme 833 « avances sur le montant des impositions revenant aux régions, départements, communes, établissements et divers organismes » retrace le recouvrement et le reversement aux collectivités territoriales des taxes énumérées par l'article 1641 du code général des impôts (principalement la taxe d'habitation, les taxes foncières et la taxe professionnelle) ainsi que la part de TIPP affectée à chaque département au titre de la compensation du RMI (RSA à partir du 1er juin 2009), pour un montant de 85,788 milliards d'euros . Ce programme est mis en oeuvre à l'échelon départemental, les avances distribuées étant mises à disposition des bénéficiaires par le trésorier-payeur général du département.

2. Un phénomène paradoxal : la persistance de l'excédent du compte d'avances depuis 1996

Par nature, le compte d'avances aux collectivités territoriales est structurellement déficitaire sur le long terme. En effet, le taux de recouvrement des impôts au titre d'une année n est toujours inférieur à 100% (c'est-à-dire que 100 % des contribuables n'acquittent pas leur impôt à l'année n), alors que 100 % du produit voté de ces mêmes impôts sont bien versés aux collectivités locales. Le solde du compte constaté en fin d'année dépend donc par construction uniquement de cet écart en exécution entre le montant des versements et celui des recouvrements effectifs.

Or ce compte affiche un excédent permanent, de l'ordre de 500millions d'euros par an , depuis 1996. Ce constat paradoxal a donné lieu, en novembre 2007, à l'élaboration par notre collègue Michel Mercier, au nom de la commission des finances, d'un rapport d'information sur ce sujet. Ses principales conclusions sont les suivantes :

- tout d'abord, il convient de rappeler que le compte d'avances n'est pas financé uniquement par les impôts recouvrés par l'administration fiscale, mais également par le programme 201 « remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » , qui correspond aux dégrèvements législatifs (une dizaine de milliards d'euros par an), aux dégrèvements techniques (environ 2 milliards d'euros par an) et aux admissions en non-valeur (environ 500 millions d'euros par an), c'est-à-dire à des situations où l'Etat se substitue au contribuable local. M. Mercier estimait alors que la distinction, au sein des recettes du programme 833, des sommes provenant de ce programme 201 « remboursements et dégrèvements d'impôts locaux », apporterait une clarification utile ;

- en outre, l'excédent permanent du compte depuis 1996 s'explique par le recouvrement progressif d'un stock de « vieilles créances » , concernant des exercices anciens et correspondant chaque année à des recettes de l'ordre de 2 milliards d'euros : avec la réduction tendancielle de ce stock de « vieilles créances » (aujourd'hui, sur deux ans, le taux de recouvrement des impôts d'une année donnée est de 98%), l'excédent du compte devrait disparaître à court terme ;

- enfin, la sous-estimation quasi-systématique en prévision du solde du compte d'avances provient d'une sous-estimation récurrente des taux de recouvrement pour les exercices anciens par les services de l'Etat.

Toutefois, M. Mercier relevait que le solde global des relations de trésorerie de l'Etat et des collectivités territoriales se traduisait par un bénéfice net, pour l'Etat, de l'ordre d'un milliard d'euros par an :

- certes, l'excédent du compte d'avances, de l'ordre de 500 millions d'euros par an en moyenne, est plus que compensé par le montant des admissions en non valeur et des dégrèvements ordinaires, de sorte qu'une fois corrigé de ces montants, il est déficitaire de plus de 2 milliards d'euros en moyenne depuis 2000 2 ( * ) ;

- cependant, en sens inverse, les prélèvements de l'Etat pour frais d'assiette et de recouvrement et pour dégrèvement et non valeur, de l'ordre respectivement de 2,5 milliards d'euros et de 2 milliards d'euros en moyenne, permettent à l'Etat, alors que le coût réel de ces opérations est de seulement 1 milliard d'euros en moyenne, de réaliser un bénéfice net de l'ordre de 3,5 milliards d'euros.

Notre collègue Michel Mercier avait alors souhaité que ce phénomène soit pris en considération lors de la prochaine redéfinition des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales.

3. L'importance des dégrèvements

Les crédits prévus par le PLF pour 2009 au titre des dégrèvements et admissions en non-valeur représentent 17,2 milliards d'euros .

Les dégrèvements et admissions en non-valeur correspondent à des prises en charge par l'Etat de tout ou partie de la contribution due par les contribuables aux collectivités locales : l'Etat prend intégralement à sa charge le coût des dégrèvements et le montant des impayés, et verse aux collectivités l'intégralité du produit émis en application des taux des impôts locaux qu'elles ont votés. L'Etat finance donc de fait l'écart entre le produit émis et le produit perçu, qui peut résulter des dégrèvements ou des admissions en non valeur.

Ces crédits sont regroupés au sein du programme 201 « remboursements et dégrèvements d'impôts locaux » de la mission « remboursements et dégrèvements » , lequel alimente le compte d'avances aux collectivités territoriales. Il s'agit essentiellement de crédits évaluatifs. Les différentes natures de dépenses intégrées à ce programme sont :

- les dégrèvements ou crédits d'impôts octroyés en raison de dispositions fiscales particulières (plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée, dégrèvement pour investissements nouveaux, crédit de taxe en faveur des entreprises implantées dans des zones d'emploi en grande difficulté en matière de taxe professionnelle, plafonnement de la taxe d'habitation par rapport au revenu, dégrèvement d'office pour les bénéficiaires du RMI en matière de taxe d'habitation, etc.) ;

- les autres dégrèvements, calculés après l'émission initiale de l'impôt pour rectifier des erreurs ou à la suite de procédures contentieuses ;

- les admissions en non-valeur résultant de la constatation du caractère irrécouvrable des créances fiscales lié à la disparition du débiteur ou à l'absence de biens saisissables.

Présentation du programme 201 et de ses actions

Intitulé de l'action

Dégrèvements concernés

Action n°1 :
Taxe professionnelle
(73,9 % du programme)

Les dégrèvements et crédits d'impôts effectués sur la taxe professionnelle comprennent en particulier :

- le plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée (art. 1647B sexies du CGI) ;

- le dégrèvement en faveur des entreprises utilisant des véhicules routiers (art. 1647 C du CGI) ;

- le dégrèvement en faveur des entreprises de transport sanitaire (art. 1647 C bis du CGI) ;

- le dégrèvement en faveur des armateurs (art. 1647 C ter du CGI) ;

- le dégrèvement au titre des immobilisations affectées à la recherche (art. 1647 C quater du CGI) ;

- le dégrèvement « pour réduction d'activité » (art. 1647 bis du CGI) ;

- le dégrèvement pour investissements nouveaux (art. 1647 C quinquies du CGI) ;

- le crédit de taxe en faveur des entreprises implantées dans des zones d'emploi en grande difficulté (art. 1647 C sexies du CGI).

Action n°2 :
Taxes foncières
(3,8 % du programme)

Pour le foncier bâti, les dégrèvements visent les situations suivantes :

- vacance d'une maison normalement destinée à la location ou inexploitation d'un immeuble qui était utilisé par le contribuable lui-même à l'usage commercial ou industriel ;

- dégrèvement d'office (100 euros) pour les contribuables âgés de plus de 65 ans et de moins de 75 ans et non exonérés de la taxe sur le foncier bâti (art. 1391 B du CGI).

Pour le foncier non bâti, les dégrèvements visent les situations suivantes :

- dégrèvements pour les jeunes agriculteurs (art. 1647-00 du CGI)

- dégrèvements de taxe foncière sur les propriétés non bâties pour pertes de récoltes liées aux situations exceptionnelles affectant le foncier (art. 1397 et 1398 du CGI) ;

- dégrèvement en cas de disparition d'un immeuble non bâti suite à un évènement extraordinaire (art. 1397 du CGI).

Action n°3
Taxe d'habitation
(19,3 % du programme)

Les dégrèvements effectués sur la taxe d'habitation concernent en particulier :

- le dégrèvement d'office total prononcé en application de l'art. 1414 du CGI (bénéficiaires du RMI, personnes de condition modeste, gestionnaires de foyers) ;

- le plafonnement de la taxe d'habitation en fonction du revenu (art. 1414 A du CGI).

Action n° 4
Admission en non valeur d'impôts locaux
(3% du programme)

L'action retrace les dépenses consécutives aux constats d'irrecouvrabilité des impôts locaux liés à :

- la disparition des redevables ;

- l'absence de gage du Trésor réalisable.

Les dégrèvements d'impôts directs locaux ont représenté un montant exécuté de 13,49 milliards d'euros en 2007, ce qui correspond à une progression de 15% depuis 2005 et d'environ 65% depuis 1995. Pour 2009, le PLF prévoit une augmentation du montant des dégrèvements de 7,2%, due en particulier au plafonnement en fonction de la valeur ajoutée de la taxe professionnelle et du dégrèvement pour investissements nouveaux mis en oeuvre dans le cadre de la réforme de cette taxe décidée en 2007.

II. UNE SUBORDINATION GÉNÉRALE À L'OBJECTIF DE MAÎTRISE DES FINANCES PUBLIQUES

Les concours financiers de l'Etat stricto sensu (c'est-à-dire hors fiscalité transférée, hors dégrèvements, hors réserve parlementaire et hors subventions diverses des ministères) s'élèvent en 2009 à près de 56,478 milliards d'euros .

Le projet de loi de finances, axé prioritairement sur la maîtrise des dépenses de l'Etat, prévoit d'en encadrer strictement la progression .

A. LA QUASI-TOTALITÉ DES CONCOURS FINANCIERS DE L'ETAT AUX COLLECTIVITÉS LOCALES EST INTÉGRÉE EN 2009 DANS L'« ENVELOPPE NORMÉE », LAQUELLE PROGRESSE DÉSORMAIS COMME L'INFLATION PRÉVISIONNELLE HORS TABAC

1. L'encadrement de la progression des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales

a) La programmation pluriannuelle des finances publiques

Le PLF pour 2009 s'inscrit pour la première fois dans le cadre d'un projet de programmation pluriannuelle (2009-2012) fixant un objectif de retour à l'équilibre des finances publiques en 2012. Dans ce cadre, il prévoit d'associer les collectivités territoriales à l'effort de maîtrise des dépenses publiques.

L'article 6 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 , adopté le 6 novembre 2008 par le Sénat, dispose à cet effet qu'au cours de la période 2009-2012, « l'évolution de l'ensemble constitué par les prélèvements sur recettes de l'Etat au profit des collectivités territoriales, par la dotation générale de décentralisation de la formation professionnelle inscrite sur la mission « Travail et emploi » et par les dépenses du budget général relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » est égale, chaque année et à périmètre constant, à l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation ».

Le rapport annexé au projet de loi de finances prévoit par conséquent qu'avec une prévision d'inflation à 2% en 2009 , l'ensemble des concours de l'Etat, soit 55 milliards d'euros hors dégrèvements, augmentera de + 1,1 milliard d'euros en 2009 puis de + 1 milliard d'euros chaque année sur la période 2009-2011 .

Le gouvernement a récemment révisé sa prévision d'inflation, estimant que celle-ci n'atteindrait qu'1,5 % en 2009, contre les 2% initialement retenus. Il a toutefois souhaité que cette révision du taux d'inflation n'affecte pas les éléments du PLF relatifs aux relations financières avec les collectivités territoriales : comme prévu, « l'enveloppe normée » augmentera donc bien de 2 % en 2009. L'article 6 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 a été amendé en conséquence et précise désormais que « toutefois, pour 2009, cette évolution est supérieure de 0,5 % à celle prévue pour les prix à la consommation ».

b) L'élargissement progressif de l'« enveloppe normée »

Le principe de l'encadrement de la progression des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales n'est pas nouveau : depuis 1996, les principaux concours alloués par l'Etat aux collectivités et à leurs groupements (ceux dont les montants peuvent être prévus en loi de finances initiale du fait de leur règle d'évolution) sont regroupés au sein d'une « enveloppe normée » , dont la progression est contrainte par une indexation fixée à l'avance.

Au sein de cette enveloppe, chaque dotation évoluait selon ses propres règles d'indexation, le respect de la norme globale d'évolution étant assuré par un ajustement de la dotation de compensation de la taxe professionnelle .

Dans le « pacte de stabilité » , institué par l'article 32 de la loi de finances pour 1996 pour la période 1996-1998, cette indexation reposait sur l'évolution prévisionnelle des prix à la consommation hors tabac.

Puis, le « contrat de croissance et de solidarité » , institué pour les années 1999 à 2001 par l'article 57 de la loi de finances pour 1999, a prévu une évolution du montant de l'enveloppe normée en fonction d'un indice composé de l'évolution des prix de l'année à venir majoré d'une fraction du taux de croissance du PIB de l'année en cours : 20 % en 1999, 25 % en 2000, 33 % en 2001.

Le périmètre et le mode de calcul de l'évolution de l'enveloppe normée retenus en 2001 (une évolution indexée sur l'indice des prix majoré de 33 % du PIB) ont été reconduits jusqu'en 2007 . Toutefois, dans la mesure où les règles d'indexation des différentes composantes de l'enveloppe normée étaient plus favorables que la norme de progression globale (la plupart était alignée sur celle de la DGF, laquelle progressait comme l'évolution des prix majorée de 50 % du taux de croissance du PIB), le cantonnement des concours financiers de l'Etat au sein de l'enveloppe normée a conduit à une diminution régulière de la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), « variable d'ajustement » de l'enveloppe .

L'application du contrat de croissance et de solidarité a, de fait, conduit à une augmentation continue de la part de l'enveloppe normée dans le budget de l'Etat , lequel était soumis à une norme de progression plus faible : une telle progression est donc peu à peu apparue incompatible avec l'effort de maîtrise des dépenses publiques engagé par l'Etat afin de respecter ses engagements européens. C'est pourquoi la loi de finances pour 2008 a institué un contrat de stabilité , visant à rendre l'indexation des dotations aux collectivités territoriales compatible avec les objectifs de maîtrise des dépenses que s'impose l'Etat. Ce contrat de stabilité reposait sur :

- la fixation d'une norme de progression globale de l'enveloppe normée indexée sur la seule inflation hors tabac ;

- l'élargissement du périmètre de l'enveloppe normée à de nouvelles dotations (dotation de compensation de la réduction de la fraction imposable des recettes de la taxe professionnelle, les dotations de compensation des exonérations de taxe foncière sur la propriétés non bâties afférentes aux terrains agricoles hors Corse, part relative à la réduction pour création d'établissements de la dotation de compensation de la taxe professionnelle) ;

- à l'intérieur de cette enveloppe, le maintien de l'indexation de la DGF sur un indice composé de l'inflation majorée de 50 % du taux de croissance du PIB ;

- afin que le poids de l'ajustement ne pèse pas uniquement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle, la transformation de nouvelles dotations de compensations d'exonérations fiscales (dotation de compensation de la réduction de la fraction imposable des recettes de la taxe professionnelle, exonération des parts départementale et régionale de taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles et part liée à la réduction pour création d'établissement de la dotation de compensation de la taxe professionnelle) en « variables d'ajustement » .

Toutefois, la loi de finances pour 2008 reposait encore sur une distinction entre dotations intégrées à l'enveloppe normée et dotations hors enveloppe , lesquelles continuaient de progresser selon des règles propres. Parmi ces dernières figuraient en particulier le FCTVA, le produit des amendes de police de la circulation et le fonds de mobilisation départementale pour l'insertion. En 2008, les dotations sous enveloppe ont augmenté de 3 %, passant de 45,2 milliards d'euros à 46,5 milliards d'euros. Les dotations hors enveloppe ont quant à elles augmenté de 5,25 %, passant de 24,8 milliards d'euros à 26,1 milliards d'euros.

c) Les dispositions du PLF pour 2009

Le PLF pour 2009 prolonge et systématise les orientations décidées par la loi de finances pour 2008 :

- l'« enveloppe normée » des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales inclut désormais l'ensemble de ces concours (crédits budgétaires et prélèvements sur recettes), y compris le FCTVA , à la seule exception des subventions accordées par les différents ministères ;

- cette enveloppe normée au périmètre élargi évolue comme l'an passé en fonction de la seule inflation prévisionnelle hors tabac (+ 2 %) ;

- à l'intérieur de l'enveloppe, la progression de la DGF , jusqu'alors indexée sur l'inflation prévisionnelle majorée de la moitié du taux de croissance effectif du PIB, est désormais indexée sur le seul taux prévisionnel d'évolution des prix à la consommation des ménages (hors tabac) ;

- dans le cadre ainsi défini, le FCTVA ne fait pas l'objet d'un plafonnement . Son montant prévisionnel pour 2009 est évalué à 5,855 milliards d'euros, soit une augmentation de 12,8 % par rapport à 2008. Il en va de même de la dotation au titre des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques , évaluée pour 2009 à 700 millions d'euros (ce qui correspond à une augmentation de 7,7 %) ;

- dans ces conditions, afin de permettre aux concours de l'Etat de demeurer dans le cadre d'une augmentation maximale de 2 %, le PLF prévoit la mise en oeuvre de deux types de mesures :

* tout d'abord, les articles 11 et 12 du PLF 2009 prévoient de « geler » un certain nombre de dotations , c'est-à-dire de les reconduire en 2009 à leur niveau de 2008 :

- au titre des dotations de fonctionnement, il s'agit de la DGD, de la DGD relative à la formation professionnelle et à l'apprentissage, du Fonds d'aide aux collectivités victimes des catastrophes naturelles, de la compensation de la suppression de la part « salaires » de la taxe professionnelle bénéficiant aux FDPTP et de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs, lesquelles évoluaient jusqu'alors comme la DGF ;

- au titre des dotations d'investissement, il s'agit de la DGE des communes, de la DGE des départements, de la DDEC, de la DRES et de la DDR, lesquelles évoluaient jusqu'alors comme la formation brute de capital fixe des administrations publiques ;

* en outre, désormais, l'ensemble des dotations de compensation d'exonérations de fiscalité locale serviront de variables d'ajustement . Le PLF pour 2009 prévoit par conséquent de les minorer de 22,81 % afin de permettre le respect du plafond global des crédits budgétaires alloués aux collectivités. Toutefois, l'article 15 prévoit d'exempter de ce rôle de variable d'ajustement quatre séries de compensation (la dotation de compensation de la taxe d'habitation, les exonérations applicables à la Corse, les activités équestres et la part communale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties agricoles). En outre, le projet de loi prévoit un dispositif de péréquation, qui limite la baisse de la DCTP supportée par les communes les plus défavorisées.

Lors de sa réunion du 30 septembre 2008, la Commission des finances et de la fiscalité de l'Association de maires de France (AMF) a exprimé le souhait , sans remettre en cause le principe même de l'association des collectivités territoriales à l'effort de maîtrise des dépenses publiques, que l'enveloppe des concours financiers évolue comme l'inflation réellement constatée, et non comme l'inflation prévisionnelle, estimée pour 2009 à 2 %. Dans sa note de conjoncture de novembre 2008, l'INSEE estimait en effet que l'inflation devrait s'établir à 2,7 % en moyenne annuelle en 2008 (alors que le projet de loi de finances initiale pour 2008 estimait que celle-ci s'élèverait à 1,6 %).

2. Le PLF pour 2009 maintient un rythme de progression des dotations d'investissement supérieur à celui des dotations de fonctionnement, mais à l'intérieur de l'enveloppe normée

Les dotations de fonctionnement représentent 84 % des dotations versées par l'Etat aux collectivités territoriales. Le rythme élevé de progression des dotations d'investissement (+ 4% par an en moyenne sur la période 2003-2008, contre + 2,2 % par an en moyenne pour les dotations de fonctionnement) est essentiellement lié à la dynamique du FCTVA. Depuis 2003, les crédits du FCTVA inscrits au budget ont en effet augmenté en moyenne de + 7 % par an. Cette évolution s'est accélérée à compter de 2006, du fait de l'augmentation des investissements réalisés par les collectivités territoriales en fin de période de fin de cycle électoral communal (2001-2007).

Le FCTVA est un prélèvement sur recettes de l'Etat dont la finalité est de compenser une partie de la charge de TVA supportée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur leurs dépenses réelles d'investissement. Sa croissance tendancielle est donc le reflet de la progression de la formation brute de capital fixe des administrations publiques locales. En outre, sa dynamique encore plus rapide depuis 2004 (environ +10 % par an) traduit les élargissements successifs de son assiette, c'est-à-dire l'assouplissement des règles d'éligibilité. Pour 2009, le PLF prévoit notamment dans son article 13 une prorogation du bénéfice du FCTVA pour les infrastructures passives de téléphonie mobile des collectivités territoriales, mécanisme mis en place en 2003 dans le cadre du plan national de couverture des zones blanches en téléphonie mobile. Les attributions du Fonds ne sont versées que deux ans après la réalisation de l'investissement, sauf pour les communautés d'agglomération et les communautés de communes (lesquelles perçoivent dans l'année le FCTVA lié aux dépenses réelles d'investissement afférentes à l'exercice en cours).

Le montant prévisionnel du FCTVA pour 2009 est évalué à 5,855 milliards d'euros, ce qui correspond à une hausse de 12,8 % par rapport à 2008. Toutefois, dans la mesure où, à compter de 2009, le FCTVA fait partie intégrante de l'enveloppe normée, sa croissance annuelle pèsera désormais sur la marge de progression disponible pour l'ensemble du périmètre . Ainsi, comme le prévoit l'article 15 du PLF, le surcroît de dynamique du FCTVA par rapport à la norme globale en 2009 « coûtera » plus de 17 points de baisse des compensations d'exonérations fiscales versées aux collectivités locales (les « variables d'ajustement »).

De même, le produit des amendes forfaitaires de la circulation correspond à la rétrocession par l'Etat, en faveur des communes ou de leurs groupements, du produit effectivement recouvré des amendes de police relatives à la circulation routière dressées sur leur territoire. La répartition est proportionnelle au nombre de contraventions dressées l'année précédente sur le territoire de chaque commune ou groupement. L'article 40 de la loi de finances pour 2008 a également prévu de compléter ce prélèvement sur recettes d'une ponction annuelle de 100 millions d'euros sur le produit des amendes établies par les radars automatiques. Ce prélèvement est réparti annuellement par le Comité des finances locales. Le code général des collectivités territoriales prévoit que les sommes ainsi distribuées doivent financer des investissements concernant les transports en commun ou la circulation routière. En 2008, le montant global de ce prélèvement sur recettes s'élevait à 650 millions d'euros. Le PLF évalue son abondement à 700 millions d'euros en 2009, ce qui représente une augmentation de 7,7 % .

La progression dynamique du FCTVA et du produit des amendes forfaitaires de la circulation (qui sont, rappelons le, des crédits évaluatifs) n'est que très partiellement compensée par le « gel » en 2009 de plusieurs dotations d'investissement (DGE des communes, DGE des départements, DDEC, DRES et DDR). Au total, les dotations d'investissement augmenteraient de 9,9 %, suscitant de fait un fort « besoin de financement » (évalué à 559,5 millions d'euros) au sein du périmètre pour que la norme de progression globale soit respectée - besoin de financement qui serait donc financé par la minoration des variables d'ajustement.

Le dispositif ainsi conçu a suscité des inquiétudes chez la plupart des élus locaux : un grand nombre d'entre eux estime en effet que le FCTVA constitue un remboursement, et non une dotation, et qu'il doit de ce fait, demeurer exclu de l'enveloppe normée des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales (cf. infra ).

3. L'aménagement de ce dispositif par l'Assemblée nationale

A l'issue de sa séance du vendredi 24 octobre 2008, l'Assemblée nationale, suivant en cela les propositions de sa commission des finances et de son rapporteur général Gilles Carrez, a, sans remettre en cause le principe d'association des collectivités territoriales à l'objectif de maîtrise des finances publiques, amendé le projet de loi de finances pour 2009 :

- tout d'abord, constatant l'excessive complexité des mécanismes de régularisation de la DGF et leur neutralité à moyen terme, l'Assemblée nationale a voté la suppression de ces mécanismes et amendé en conséquence l'article 10 du PLF ;

- relevant par ailleurs que, sur l'exercice 2008, le Fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles présenterait très vraisemblablement un excédent de 10 à 15 millions d'euros, elle a décidé de n'abonder ce Fonds que d'un montant de 10 millions d'euros (au lieu des 20 millions prévus par le PLF), afin de dégager une marge de manoeuvre et « desserrer » quelque peu les contraintes pesant sur les variables d'ajustement ;

- dans la même logique de « desserrement » des contraintes pesant sur les variables d'ajustement, l'Assemblée nationale a également décidé de neutraliser la progression du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre du produit des amendes forfaitaires et de n'abonder le produit prévisionnel de ce concours financier que d'un montant de 600 millions d'euros, contre les 700 millions d'euros prévus par le projet de loi ;

- constatant enfin que le dispositif permettant l'éligibilité au FCTVA des dépenses d'équipement des collectivités locales en matière de téléphonie mobile avait déjà fait l'objet de deux prorogations en 2006 et 2007 et estimant qu'il était temps de cesser d'élargir l'assiette du Fonds, elle a supprimé l'article 13 du PLF qui organisait cette prorogation.

Les marges de manoeuvre ainsi dégagées par ces modifications ont permis en conséquence de ramener le taux de minoration des variables d'ajustement de 22,81 % à 17,709 %.

L'article 19 du PLF tel qu'adopté par l'Assemblée nationale est désormais rédigé ainsi :

« Pour 2009, les prélèvements opérés sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités territoriales sont évalués à 52.257.889.000 euros qui se répartissent comme suit :

Intitulé du prélèvement

Montant voté par l'Assemblée nationale
(en milliers d'euros)

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation globale de fonctionnement

40.854.887

Prélèvement sur les recettes de l'Etat du produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation et des radars automatiques

600.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation spéciale pour le logement des instituteurs

37.500

Dotation de compensation des pertes de bases de la taxe professionnelle et de redevance des mines des communes et de leurs groupements

164.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle

633.355

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

5.855.000

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale

1.892.024

Dotation élu local

64.615

Prélèvement sur les recettes de l'Etat au profit de la collectivité territoriale de Corse et des départements de Corse

43.697

Compensation de la suppression de la part salarie de la taxe professionnelle

100.195

Fonds de mobilisation départementale pour l'insertion

500.000

Dotation départementale d'équipement des collèges

328.666

Dotation régionale d'équipement scolaire

661.841

Compensation d'exonération au titre de la réduction de la fraction des recettes prises en compte dans les bases de taxe professionnelle des titulaires de bénéfices non commerciaux

297.667

Compensation d'exonération de la taxe foncière relative au non-bâti agricole (hors la Corse)

214.442

Fonds de compensation des baisses de DCTP

0

Fonds de solidarité des collectivités territoriales touchées par des catastrophes naturelles

10.000

TOTAL

52.257.889

B. DANS LE CADRE AINSI DÉFINI, LE PLF POUR 2009 S'EFFORCE DE DÉGAGER DES MARGES DE MANOEUVRE EN FAVEUR DES COLLECTIVITÉS LES PLUS DÉFAVORISÉES

1. La recherche de marges de manoeuvre en faveur de la péréquation

a) Une exigence constitutionnelle

Comme le rappelle l'Observatoire des finances locales dans son état des lieux des finances locales en 2008, la péréquation apparaît comme un prolongement indispensable de l'autonomie accordée aux collectivités locales. En effet, les inégalités de répartition des bases de la fiscalité locale (à titre d'exemple, 5% des collectivités locales collectent près de 80 % de la taxe professionnelle) sont telles que, sauf à laisser certaines collectivités en-dehors de toute possibilité de développement local, la péréquation doit impérativement accompagner l'accroissement des compétences locales. C'est pourquoi la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, qui a consacré le principe d'autonomie financière des collectivités territoriales, a accompagné cette nouvelle étape de la décentralisation en faisant de la péréquation une exigence constitutionnelle. Le dernier alinéa de l'article 72-2 de la Constitution dispose ainsi que « la loi prévoit les dispositifs de péréquation destinés à favoriser l'égalité entre les collectivités territoriales ».

La péréquation consiste à atténuer les disparités de situations entre les collectivités locales. On distingue habituellement la péréquation verticale , qui consiste, pour l'Etat, à répartir équitablement les dotations entre collectivités, de la péréquation horizontale , qui s'opère directement entre collectivités.

Les formes de péréquation

Régions

Départements

EPCI

Communes

Péréquation verticale

- Dotation de péréquation des régions

- Dotation de fonctionnement minimal (DFM)

- Dotation de péréquation urbaine (DPU)

- Dotation d'intercommunalité

Dotation de solidarité urbaine (DSU)

- Dotation de solidarité rurale (DSR)

- Dotation nationale de péréquation (DNP)

Péréquation horizontale

- Dotation de solidarité communautaire (DSC)

facultative

- Fonds de solidarité de la région Île-de-France (FSRIF)

- Fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP)

Source : annexe au PLF 2009 « effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales »

b) Les dispositions du PLF pour 2009

Le PLF pour 2009 s'efforce de protéger, dans le cadre du contrat de stabilité, les concours financiers de l'Etat qui contribuent à l'objectif de péréquation. Un certain nombre de mesures techniques sont ainsi prévues afin de dégager des marges de manoeuvre en faveur des dotations de péréquation :

- en premier lieu, le PLF pour 2009 prévoit de diminuer de 2 % le complément de garantie des communes. Celui-ci constitue, au sein de la dotation forfaitaire des communes, un reliquat historique qui a contribué à pérenniser les écarts de dotations qui existaient auparavant entre communes de taille comparable. Cette mesure permettra de dégager environ 105 millions d'euros en faveur des dotations de péréquation ;

- en outre, le projet de loi de finances prévoit d'accroître la solidarité entre départements les plus défavorisés en alignant les modalités d'évolution de la dotation de compensation et de la dotation de base des départements sur les fourchettes d'indexation de la dotation forfaitaire des communes ;

- s'inscrivant dans la suite de la loi de finances pour 2008, la part de la DGF des régions consacrée à la péréquation est aménagée par l'introduction d'un système de garantie de sortie, permettant d'assurer aux régions cessant d'y être éligibles une attribution égale à la moitié de leur attribution au titre de l'exercice précédent. La disposition prévue pour 2009 vise à neutraliser le poids des garanties de sortie, consacrées aux régions de métropole, sur la part péréquation versée aux régions d'outre-mer ;

- par ailleurs, un certain nombre de mesures concernent les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre : les modalités d'évolution de la dotation d'intercommunalité par habitant des différentes catégories d'établissement sont alignées sur les fourchettes d'indexation de la dotation forfaitaire des communes et le montant de la dotation d'intercommunalité liée à la création de nouvelles communautés urbaines est ramené de 85 à 60 euros par habitant, dans le but d'atténuer le coût pour la péréquation communale de l'éventuelle création d'une nouvelle communauté urbaine à partir de 2009 3 ( * ) ;

- enfin, le seuil d'éligibilité des départements à la dotation de péréquation urbaine est ramené à 1,5 fois le potentiel financier moyen par habitant des départements urbains (au lieu du double aujourd'hui), ce qui permettra de redistribuer plus de 16,504 millions d'euros aux autres départements urbains éligibles.

Ce dégagement de marges de manoeuvre en faveur des dotations de péréquation apparaît d'autant plus nécessaire qu'il s'inscrit dans le contexte de l'entrée en vigueur, en 2009, des données démographiques issues de la procédure de recensement rénové , prévue par la loi « démocratie de proximité » du 27 février 2002. L'INSEE estime ainsi que la population municipale de métropole, prise en compte pour la répartition des dotations de l'Etat, devrait atteindre en 2009 65,25 millions d'habitants, ce qui représente près de 3 millions d'habitants supplémentaires par rapport au recensement général de 1999 (+ 1,29 million par rapport à la répartition de la DGF pour 2008). Compte-tenu de la composition actuelle de la DGF, cet accroissement démographique devrait peser fortement sur la DGF, en alourdissant mécaniquement le montant de la dotation forfaitaire. Le « surcoût » lié au recensement pourrait s'élever à 286 millions d'euros en 2009 , correspondant à 138 millions d'euros au titre de la dotation de base des communes (y compris les recensements ultramarins), 108 millions d'euros au titre de la dotation de base des départements (y compris les recensements ultramarins) et 41 millions d'euros au titre de la dotation d'intercommunalité. Le solde du recensement rénové ne laissera ainsi qu'un solde d'augmentation de 286 millions d'euros par rapport à la DGF des communes de 2008, soit + 1,25 %.

Préoccupée par les conséquences de cette nouvelle procédure pour les collectivités territoriales en perte de population, l'Assemblée nationale a adopté le 13 novembre 2008 deux amendements visant à atténuer l'effet de son entrée en vigueur pour, d'une part, les communes dont la population aurait diminué de plus de 10% depuis le précédent recensement de 1999 et, d'autre part, les syndicats d'agglomération nouvelle 4 ( * ) .

c) La création de trois nouvelles dotations

Parallèlement à cet effort, le PLF pour 2009 prévoit la création de trois nouvelles dotations destinées aux collectivités territoriales en difficulté ou confrontées à un accroissement important de leurs charges :

- une dotation de développement urbain (DDU) , dotée de 50 millions d'euros, est créée par l'article 71 du PLF afin de financer, sur la base d'un partenariat entre l'Etat et les collectivités territoriales, des projets d'aménagement et de développement urbains répondant à des politiques prioritaires fixées par le Comité interministériel des villes. Cette dotation est attribuée par le représentant de l'Etat dans le département aux communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale et « qui figurent parmi les cent premières d'un classement de ces communes établi chaque année en fonction de critères tirés notamment de la proportion de population résidant dans des quartiers inclus dans les zones prioritaires de la politique de la ville, du revenu fiscal moyen des habitants de ces quartiers et du potentiel financier » ;

- l'article 72 du PLF crée par ailleurs un Fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées et le dote de 5 millions d'euros ;

- enfin, une dotation forfaitaire de 6 millions d'euros est mise en place au bénéfice des 2.000 communes sélectionnées pour assurer la mission d'accueil des personnes sollicitant un titre d'identité sécurisé (passeport biométrique et carte d'identité électronique) mais ne résidant pas sur leur territoire.

Il convient toutefois de relever que ces trois nouvelles dotations budgétaires, inscrites au sein de la mission « relations avec les collectivités territoriales », font partie intégrante de l'enveloppe normée, et seront donc de facto financées par la réduction ou le gel des autres dotations.

2. Le report de la réforme de la dotation de solidarité urbaine

Créée en 1991, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) est une dotation de péréquation qui a pour objet de « contribuer à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines confrontées à une insuffisance de leurs ressources et supportant des charges élevées ». Elle concerne à l'heure actuelle les trois quarts des communes de plus de 10.000 habitants (715) et 109 communes de moins de 10.000 habitants. En progression depuis l'adoption de la loi de programmation pour la cohésion sociale (dite « loi Borloo ») du 18 janvier 2005, ses crédits se sont élevés en 2008 à 1,1 milliard d'euros. Au cours de l'année 2008, le Président de la République a souhaité qu'une réforme de cette dotation soit engagée à l'occasion de l'examen de la loi de finances pour 2009, afin de mieux « cibler » la dotation en faveur des « communes pauvres ayant une population pauvre ».

C'est ainsi que l'article 70 du PLF pour 2009 proposait de réformer en profondeur la répartition de la DSU . Selon les dispositions initialement retenues par le gouvernement, cette dotation devait augmenter de 70 millions d'euros, mais, à compter de 2009, seule une ville de plus de 10.000 habitants sur deux aurait été éligible, contre trois sur quatre à l'heure actuelle, l'objectif affiché étant de mieux cibler les villes pauvres accueillant une population défavorisée et de mettre un terme au « saupoudrage » des crédits. A cet effet, les critères d'éligibilité auraient été modifiés, par la suppression du critère de logement social dans le classement des communes. Il s'agissait de ne plus prendre en compte que trois critères : le potentiel financier pour 50 %, le nombre de bénéficiaires d'aides au logement pour 35% et le revenu moyen des habitants pour 15%. Enfin, le projet supprimait la majoration de dotation accordée au titre des populations en zone franche urbaine et réduisait substantiellement le poids de la majoration de DSU relative aux populations en zone urbaine sensible. Les communes sortantes auraient toutefois bénéficié d'une garantie de sortie pendant deux ans. A terme, 238 villes auraient cessé d'être éligibles.

Ce projet de réforme a suscité l'émotion d'un grand nombre d'élus locaux. Le 8 octobre 2008, le Bureau de l'Association des maires de France (AMF) a officiellement demandé un réexamen des dispositions du PLF relatives à la DSU, afin d'appréhender l'ensemble de ses conséquences. Il est en effet apparu qu'avec l'application des nouveaux critères de répartition, des communes emblématiques de la politique de la ville telles que Clichy-sous-Bois, Villiers-le-Bel, Bobigny, Sarcelles, Vénissieux ou encore Creil, par exemple, pourraient sortir du dispositif.

Après avoir reçu les associations d'élus locaux le 23 octobre 2008, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a proposé un certain nombre d'aménagements au projet initial , lesquels ont reçu l'accord des associations d'élus locaux. Les termes de cet accord sont les suivants :

- toutes les villes éligibles sont assurées de percevoir en 2009 un montant au moins équivalent à celui perçu en 2008 ;

- l'essentiel de l'augmentation de la DSU (70 millions d'euros) sera concentré sur les 150 villes les plus défavorisées ;

- les 327 autres villes qui avaient été ciblées pour bénéficier elles aussi de l'augmentation de la DSU dès 2009 se verront garantir une progression minimale de 2% ;

- un travail de concertation sera mis en oeuvre au sein du Comité des finances locales en 2009 afin de définir les critères d'une réforme de la DSU qui n'entrerait en vigueur qu'à partir de 2010.

3. Un certain recul de l'efficacité des mécanismes de péréquation ?

S'agissant de l'évaluation de l'efficacité péréquatrice des dotations, une méthode, développée par les professeurs Guy Gilbert et Alain Guengant, permet de mesurer le taux de correction, grâce aux dotations de l'Etat, des inégalités de ressources des collectivités territoriales corrigées en fonction de leurs charges. La performance de la péréquation est mesurée par le taux de correction des inégalités de « pouvoir d'achat » imputable aux dotations nationales et fonds de péréquation.

Ces travaux ont mis en évidence l'efficacité d'un certain nombre de dispositifs de péréquation , en particulier des dotations de péréquation communales et intercommunales telles que la dotation nationale de péréquation (DNP), la DSU, la DSR et la dotation d'intercommunalité, la DNP ayant été la plus efficace en termes de correction des inégalités.

Au niveau global, cependant, il est possible de constater un certain recul du pouvoir péréquateur de l'ensemble des dotations .

Pour les communes, le recul de la performance péréquatrice des dotations provient de l'augmentation, ces dernières années, du nombre et du poids des dotations de compensation dans l'ensemble des dotations , sous l'effet notamment de la création en 2003 de la compensation de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle et de son intégration dans la dotation forfaitaire en 2004. En revanche, la performance des dotations expressément péréquatrices progresse, en particulier celles des composantes de la DGF (dotation d'intercommunalité, DSU, etc.).

Le même constat s'applique aux départements. Ainsi, l'intégration d'une part substantielle de la DGD dans la DGF en 2004 et l'augmentation du volume des compensations fiscales ont réduit l'effet péréquateur des dotations qui leur sont destinées. A l'inverse, la dotation de péréquation urbaine et la dotation de fonctionnement minimale ont conforté leur capacité à réduire conjointement les inégalités entre départements.

Enfin, depuis 2001, on relève une amélioration sensible de la performance de la péréquation de l'ensemble des dotations destinées aux régions.

Lors de la présentation de la mise à jour de leur étude au cours de la réunion du Comité des finances locales du 28 octobre 2008, MM. Guengant et Gilbert ont confirmé le recul de l'effet péréquateur des dotations de l'Etat aux communes et aux départements entre 2001 et 2006 . Selon eux, la performance péréquatrice des dotations de l'Etat aux communes a reculé de 2,3 % entre 2001 et 2006. La cause principale de ce recul réside dans l'impact négatif de la compensation de la suppression de la part salaires des bases de la taxe professionnelle : sa présence au sein des « dotations compensatrices » fait baisser de 4,1 points la performance péréquatrice de celles-ci . En revanche, l'efficacité des dotations expressément péréquatrices (DSU, DSR, etc.) progresse sur la période de 1,8 point. L'efficacité péréquatrice des dotations de l'Etat aux départements recule quant à elle de 2,9 points sur la période. En revanche, l'effet péréquateur des dotations de l'Etat aux régions progresse de 7 points en cinq ans.

C. UN BUDGET A MINIMA AU REGARD DES RÉFORMES ANNONCÉES ET DE LA CRISE FINANCIÈRE ACTUELLE

A de nombreux égards, le PLF pour 2009, qui se concentre essentiellement sur la question de la maîtrise des concours financiers de l'Etat aux collectivités territoriales, se présente comme un projet a minima au regard des nombreuses réformes que le gouvernement a déclaré souhaiter engager dans les mois à venir. Des réflexions ont été lancées en vue de procéder, dans de brefs délais, à la réforme du FCTVA, de la fiscalité locale et des structures territoriales de notre pays. Ses dispositions se situent également en marge des débats suscités par les répercussions de la crise financière sur la situation des collectivités locales.

1. La question de la réforme du FCTVA

Le projet de loi de finances pour 2009 ne contient pas de réforme des modalités de fonctionnement du FCTVA, bien que le gouvernement souhaite engager des négociations sur cette question. Le Premier ministre s'est en effet exprimé en faveur d'une réforme globale du Fonds lors de la conférence nationale des exécutifs du 10 juillet 2008.

Pour le gouvernement, le FCTVA apparaît en effet comme un prélèvement sur recettes dont la progression est peu maîtrisée, en raison de son fonctionnement « à guichet ouvert » : les bénéficiaires ont droit à l'attribution du FCTVA correspondant à l'ensemble de leurs dépenses d'investissements éligibles. Le montant de ce prélèvement sur recettes est évaluatif et, de ce fait, difficilement prévisible . Entre 2000 et 2007, le montant des crédits consommés a ainsi augmenté de 56 %, reflétant le dynamisme de l'investissement des collectivités locales, la progression du champ des dépenses éligibles et la hausse des coûts des investissements.

En outre, sa gestion serait lourde et complexe. L'éligibilité au FCTVA repose sur une stratification de nombreuses exceptions qui fragilise le dispositif, jugé peu transparent et laissant une part grandissante à l'interprétation du juge. Il en résulte, pour les collectivités territoriales, de nombreuses incertitudes sur l'éligibilité au FCTVA et un risque contentieux important. Ces éléments rendent la gestion du Fonds coûteuse, que ce soit pour l'Etat ou pour les collectivités territoriales.

Enfin, il s'agit d'une forme de dotation forfaitaire d'investissement, qui ne suit aucun principe péréquateur, et n'assure qu'une compensation proportionnelle aux investissements éligibles réalisés, sans considération de l'utilité socio-économique de l'opération.

Fort de ce constat, le gouvernement a proposé de mettre en place une réforme qui assurerait :

- une simplification du dispositif, facilitant la politique locale d'investissement,

- une plus grande prévisibilité pour les collectivités territoriales,

- une prévisibilité budgétaire plus fiable du FCTVA,

- tout en préservant la capacité d'investissement des collectivités territoriales.

Dans ce cadre, trois hypothèses de réforme du FCTVA ont été envisagées. Les deux premières options consisteraient à moduler le taux de concours (aujourd'hui fixé à 15,482 %) par l'élargissement de l'assiette des dépenses éligibles à laquelle serait appliqué un taux de compensation plus faible qu'aujourd'hui. Celui-ci pourrait éventuellement être fixé de manière différente, soit en fonction de la nature des bénéficiaires, soit en fonction de la nature des investissements. La troisième option, qui dépasserait le seul cadre du FCTVA, s'inscrirait dans une logique de globalisation, à l'image de l'architecture adoptée pour les dotations de fonctionnement. Une telle réforme pourrait ainsi consister en la création d'une dotation globale d'investissement qui fusionnerait les concours financiers affectés en section d'investissement des collectivités (FCTVA, DGE et DDR, voire la DRES et la DDEC), permettant ainsi de mettre fin à la dispersion et à la répartition différenciée des différentes dotations d'équipement versées aux collectivités locales.

Toutefois, lors de sa réunion du 25 septembre 2008, le Comité des finances locales a souhaité que le FCTVA, compte-tenu de son caractère de remboursement, ne soit pas intégré dans l'enveloppe normée des dotations de l'Etat aux collectivités locales . Parce que le FCTVA ne constitue pas selon lui, à proprement parler, une dotation de l'Etat aux collectivités territoriales, le CFL a refusé de créer un groupe de travail sur son fonctionnement, comme l'y invitait pourtant le gouvernement. Lors de sa réunion du 8 octobre 2008, le Bureau de l'Association des maires de France (AMF) a repris à son compte cette position.

Votre rapporteur estime que ces arguments devraient être pris en compte à l'occasion de la redéfinition annoncée des relations financières entre l'Etat et les collectivités territoriales .

2. La question d'une réforme globale de la fiscalité locale

Le PLF 2009 ne comporte que deux dispositions relatives à la fiscalité locale :

- exonération facultative de la taxe foncière sur les propriétés non bâties en faveur des terrains agricoles exploités selon le mode de production biologique ;

- exonération facultative de la taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur des logements neufs présentant une performance énergétique élevée.

a) Une excessive complexité

Pourtant, la nécessité de réformer la fiscalité locale fait l'objet d'un consensus général : archaïsme des bases d'imposition, injustice et inégalités territoriales mais aussi entre contribuables, manque de lisibilité de la gestion locale, coût de gestion jugé excessif pour l'Etat, etc. Néanmoins, faute d'accord sur les modalités d'une telle réforme, seuls des aménagements ponctuels (exonérations, dégrèvements, etc.) ont jusqu'à présent été mis en oeuvre, ce qui n'a fait qu'accroître la complexité des mécanismes.

De fait, les mécanismes correcteurs ajoutés au fil du temps ont rendu l'organisation de la fiscalité locale extrêmement compliquée et très difficilement lisible. A cet égard, le rapport établi en décembre 2006 par M. Philippe Valletoux au nom du Conseil économique et social évoque le cas emblématique de la taxe professionnelle, marquée par une « fébrilité » législative depuis 1975, avec « 68 textes législatifs en moins de 30 ans, sans compter les textes adoptés au sujet des mesures relatives aux fonds de péréquation, à la détermination de la valeur locative foncière ou encore aux règles de lien entre les taux des taxes directes locales » .

Ainsi, la dernière réforme de la taxe professionnelle mise en oeuvre par la loi de finances initiale pour 2006 limite le poids de la taxe professionnelle en privilégiant l'allègement des entreprises les plus taxées et des entreprises qui investissent. Elle comprend deux dispositifs, l'un prenant la forme d'un dégrèvement de taxe professionnelle, l'autre rénovant le plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée (seuil à 3,5 %) afin de lui rendre son efficacité. Les redevables de la taxe professionnelle peuvent dès lors bénéficier d'un plafonnement de leur cotisation par rapport à la valeur ajoutée qu'ils produisent. Ainsi, l'Etat prend à sa charge le montant de l'impôt excédant, pour les entreprises, le plafond de 3,5 % de la valeur ajoutée, alors que les taux de cet impôt sont fixés par les collectivités territoriales .

L'Etat a ainsi progressivement pris à sa charge une part croissante de la fiscalité locale afin d'alléger la pression pesant sur le contribuable local, sous la forme soit de dégrèvements, soit d'exonérations compensées . Dans le cas du dégrèvement, l'Etat, qui assure le recouvrement des impôts locaux, se substitue en totalité ou partiellement au contribuable local dégrevé ; la perte de recettes est nulle pour les collectivités territoriales. L'exonération s'en distingue dans la mesure où l'Etat ne se substitue pas au contribuable. Les bases exonérées par le législateur sont déduites des bases imposables notifiées à la collectivité. En contrepartie, cette dernière perçoit une compensation, dont les modalités de calcul sont fixées par la loi.

L'État est ainsi devenu le premier contribuable local au titre de la taxe professionnelle du fait de la prise en charge des dégrèvements. La taxe d'habitation présente une situation similaire en raison des dispositifs d'exonération ou de dégrèvements mis en place 5 ( * ) , si bien que « l'impôt local n'est plus acquitté par une part grandissante des contribuables potentiels que constituent pour les collectivités territoriales tous les citoyens vivant sur leur territoire et toutes les entreprises qui y exercent une activité professionnelle » 6 ( * ) .

La fiscalité locale perd ainsi progressivement les caractéristiques d'une ressource propre dont les collectivités garderaient la maîtrise. En effet, le lien entre cette compensation et le produit fiscal sous-jacent se distend peu à peu et, lorsque le régime des compensations devient trop lourd à gérer, il est intégré dans une enveloppe financière plus globale dont on pense mieux maîtriser l'évolution. La loi de finances initiale pour 2004 a ainsi inséré dans la DGF le montant des compensations liées aux réformes fiscales intervenues depuis 1999.

Ainsi, globalement, la fiscalité locale prise en charge par l'Etat a légèrement cru ces dernières années, notamment du fait de l'accroissement du nombre des dispositifs nouveaux. Aujourd'hui, l'Etat prend en charge près du tiers de la fiscalité directe locale (taxe d'habitation, taxes foncières et taxe professionnelle) dont bénéficient les communes et les EPCI et près du quart de celle des départements et régions .

Cette situation ne pourra que s'accroître avec la décision annoncée récemment par le Président de la République d'exonérer de taxe professionnelle les nouveaux investissements des entreprises jusqu'au 31 décembre 2009.

La réforme des concours de 2004

La structure de l'effort financier de l'Etat en faveur des collectivités locales a été modifiée par la loi de finances pour 2004, avec l'intégration dans la DGF d'une part importante des compensations d'exonérations pour un montant de plus de 12 milliards d'euros. Cette intégration a inclus notamment la compensation de la perte de produit due à la suppression de la part salaires des bases de la taxe professionnelle, la compensation de la perte de produit due à la suppression de la part régionale des droits de mutation à titre onéreux et la compensation de la perte de produit due à la réforme de la taxe d'habitation.

Les compensations d'exonérations concernant les droits de mutation à titre onéreux ont ainsi quasiment toutes été intégrées à la DGF (2.236 millions d'euros sur un total de 2.244 millions d'euros). Pour les autres impôts locaux, la part des compensations d'exonérations ayant été intégrées dans la DGF est plus limitée (47 % pour la taxe d'habitation et 82 % pour la taxe professionnelle).

Au total, cette réforme a entraîné une réduction du montant des compensations d'exonérations inscrites au budget de près de 77 %, et, en conséquence, de la part de la fiscalité locale prise en charge par l'Etat de près de 100% pour les DMTO et de 76 % pour les autres impôts. Avant réforme, la prise en charge par l'Etat de la fiscalité locale était de 42 %, et après réforme, elle était de 25 % .

Quant à la DGF, elle a vu son montant quasiment doubler, passant de 19 milliards d'euros à 36,1 milliards d'euros, notamment du fait de ces intégrations.

Depuis cette réforme, la prise en charge par l'Etat de la fiscalité locale a légèrement progressé, pour arriver à 25,9 % en 2008 (loi de finances initiale).

Source : Annexe au PLF « effort financier de l'Etat en faveur des collectivités territoriales »

b) Les pistes de réforme envisagées

(1) Dans l'absolu, trois pistes de réforme peuvent être envisagées :

* La suppression de la fiscalité locale, pour ne conserver que les dotations de l'Etat ou répartir les impôts nationaux entre l'Etat et les collectivités. Une telle solution s'avèrerait toutefois contraire au principe d'autonomie financière des collectivités territoriales qu'a consacré la loi constitutionnelle du 28 mars 2003.

* Le maintien de l'architecture d'ensemble de la fiscalité locale, mais en opérant des adaptations et des modernisations. Une telle réflexion avait nourri les propositions de la commission pour l'avenir de la décentralisation présidée par notre collègue Pierre Mauroy en 2000 : chaque collectivité pourrait avoir le choix de réviser ou non les bases d'imposition, ce qui serait une réponse à la critique d'obsolescence des bases d'imposition. De plus, le revenu pourrait être pris en compte dans l'assiette de la taxe d'habitation et celle de la taxe professionnelle étendue à l'ensemble de la valeur ajoutée, afin de tenir compte davantage de la capacité contributive des contribuables.

* La refonte de l'architecture d'ensemble de la fiscalité locale :

- soit en adoptant le principe de spécialisation des impôts locaux par niveau de collectivité (proposition formulée dès 1976 dans le rapport « Vivre ensemble » puis reprise par le rapport de la commission pour l'avenir de la décentralisation en 2000 et le rapport Valletoux du Conseil économique et social de 2006),

- soit en substituant de nouveaux impôts aux impôts locaux actuels, sous la forme de taxes additionnelles aux impôts nationaux, ou avec la création de nouveaux impôts locaux.

(2) Le Conseil économique et social, dans son avis de décembre 2006 7 ( * ) , propose ainsi de travailler à l'élaboration d'une « nouvelle donne », visant notamment à supprimer tout « financement fiscal » en provenance de l'État, à faire en sorte qu'un seul pouvoir fiscal s'exerce sur chacun des impôts constituant la fiscalité locale, à doter chaque niveau territorial d'une recette fiscale globale composée de plusieurs impôts dont il a la pleine maîtrise, et in fine à permettre aux contribuables d'identifier clairement le niveau territorial qui exerce le pouvoir fiscal sur chaque impôt.

Il en résulterait une nouvelle répartition des taxes et impôts entre chaque catégorie de collectivités et la création de nouveaux impôts.

Rappelant que le calcul des impositions locales se fonde actuellement sur des revalorisations forfaitaires et globales réalisées à partir des valeurs établies en 1961 pour les propriétés non bâties et en 1970 pour les propriétés bâties, le Conseil économique et social souligne que la mise en oeuvre de cette « nouvelle donne » devrait être précédée d'une modernisation des bases , aujourd'hui obsolètes et inégalitaires.

Jugeant la valeur locative inadaptée et difficile à actualiser, il suggère de faire plutôt référence à la « valeur vénale déclarée et contrôlée » ou à la « valeur locative déclarative et contrôlée ».

Nouvelle répartition de la fiscalité locale
proposée par le Conseil économique et social

Communes et groupements de communes

Départements

Régions

- taxe professionnelle ;

- taxe d'habitation ;

- taxe sur le foncier bâti des ménages ;

- taxe sur le foncier non bâti ;

- taxe sur l'électricité ;

- taxe sur l'enlèvement des ordures ménagères ;

- versement transport.

- taxe sur le foncier bâti des entreprises ;

- droits de mutation ;

- taxe spéciale sur les conventions d'assurance ;

Nouveaux impôts :

- imposition de type CSG ;

- imposition sur le parc des véhicules automobiles.

- taxe sur les cartes grises ;

- taxe d'apprentissage ;

- taxe intérieure sur les produits pétroliers ;

Nouveaux impôts :

- impôt additionnel à l'impôt sur le revenu ;

- impôts sur les entreprises
(lié à la valeur ajoutée).

Ces propositions tendent à la mise en place d'une fiscalité locale lisible , évitant le recours à des régimes mixtes qui ne favorisent pas l'identification des responsabilités. Le Conseil économique et social suggère néanmoins le partage de deux nouveaux impôts entre l'État, les départements et les régions. Il s'agirait pour les départements, en raison des nombreuses compétences qu'ils exercent en matière sociale, de la nouvelle taxe établie sur le modèle de la CSG, et pour les régions de l'impôt additionnel à l'impôt sur le revenu et d'un impôt sur la valeur ajoutée acquitté par les entreprises.

Par ailleurs, afin de rendre plus efficaces les mécanismes de péréquation , le rapport de M. Philippe Valletoux propose de remplacer les dispositifs existants par un Fonds national de péréquation , alimenté par l'agrégation des régimes actuels et par une fraction des dotations de l'État.

La présentation de ces conclusions s'accompagne de recommandations relatives au mode de fixation de l'impôt, afin d'éviter, le cas échéant, la surimposition des contribuables en raison d'une évaluation imparfaite des dépenses par les collectivités.

(3) A l'heure actuelle, le gouvernement a retenu deux chantiers prioritaires pour la réforme de la fiscalité locale :

- Le premier chantier est celui de l'actualisation des valeurs locatives . Une première option consisterait en un basculement à la valeur vénale au fur et à mesure des mutations, méthode qui présenterait l'avantage de la lisibilité et de l'équité. Une seconde option consisterait à maintenir la valeur locative cadastrale comme base de la fiscalité locale, mais en améliorant les règles qui gouvernent son évolution et en laissant davantage de marges de manoeuvre aux élus locaux.

- Le second chantier est celui de la taxe professionnelle . Assise à 80 % sur les investissements, cette taxe est considérée comme néfaste à l'attractivité du territoire national. Sa réforme devra permettre de renforcer la compétitivité des entreprises tout en préservant l'autonomie financière des collectivités territoriales. Toutefois, si elle a été annoncée par le Président de la République en septembre 2008, elle sera subordonnée à l'aboutissement des réflexions en cours sur l'organisation territoriale.

En effet, à la suite de l'annonce, le 25 septembre 2008, par le Président de la République, d'une réflexion sur l'organisation des collectivités territoriales, de nombreuses hypothèses de réforme ont été annoncées et un certain nombre de structures ont été créées afin d'y réfléchir. Parallèlement à l'adoption, par la commission des lois de l'Assemblée nationale le 8 octobre 2008 d'un rapport d'information consacré à la clarification de l'organisation territoriale française et la mise en place le 22 octobre 2008 d'un « Comité pour la réforme des collectivités locales » présidé par M. Edouard Balladur, le Sénat a créé en son sein, le 23 octobre 2008, une mission temporaire sur l'organisation et l'évolution des collectivités territoriales, présidée par notre collègue Claude Belot et dont les rapporteurs sont Yves Krattinger et Jacqueline Gourault . Ces travaux devront permettre de mieux identifier et de clarifier les compétences entre collectivités territoriales, et de mettre fin aux financements croisés , source d'inefficience de l'action locale. Ils constitueront également le socle de la réforme annoncée de l'intercommunalité , destinée notamment à rationaliser la carte intercommunale.

3. L'impact de la crise financière sur les collectivités territoriales

Depuis la loi du 2 mars 1982, les collectivités territoriales peuvent librement recourir à l'emprunt. Toutefois, à la différence des règles s'appliquant à l'Etat, l'emprunt des collectivités territoriales doit être exclusivement destiné à financer des investissements , qu'il s'agisse d'un équipement spécifique, d'un ensemble de travaux relatifs à cet équipement ou encore d'acquisitions de biens durables considérés comme des immobilisations. En aucun cas il ne peut combler un déficit de la section de fonctionnement ou une insuffisance des ressources propres pour assurer l'amortissement de la dette (art. L. 1614-4 du CGCT). Les emprunts peuvent être globalisés et correspondre à l'ensemble du besoin de financement de la section d'investissement.

Cet encadrement des possibilités de recours à l'emprunt explique que la dette des administrations publiques locales ne représente qu'une faible part de l'ensemble de la dette publique française : 131,7 milliards d'euros au 30 septembre 2008 sur une dette publique totale de 1.269,3 milliards d'euros, ce qui correspond à un peu plus de 10 % de la dette publique française et environ 7 % du PIB . Toutefois, cette dette publique locale s'inscrit dans une tendance à la hausse : inexistante de 1996 à 2003, la dette locale croît depuis 2004 façon régulière.

Capacité (+) ou besoin (-) de financement des administrations publiques

en milliards d'euros

2004

2005

2006

2007

Capacité ou besoin de financement

État

- 52,8

- 52,2

- 47,4

- 39,2

Organismes divers d'administration centrale

9,5

7,1

10,5

- 2,6

Administrations publiques locales

- 2,4

- 3,3

- 3,2

- 7,2

Administrations de sécurité sociale

- 14,6

- 2,8

- 3,3

- 1,6

Administrations publiques

- 60,2

- 51,1

- 43,4

- 50,6

Déficit public notifié

- 59,6

- 50,4

- 42,6

- 50,3

Source : Insee, Comptes nationaux - base 2000.

Dette publique*

au 31/12/2005

au 31/12/2006

au 31/12/2007

milliards d'euros

% du PIB

milliards d'euros

% du PIB

milliards d'euros

% du PIB

État

894,5

51,8

892,5

49,4

930,0

49,2

Organismes divers d'administration centrale

94,5

5,5

90,7

5,0

97,4

5,2

Administrations locales

120,1

7,0

127,3

7,0

135,7

7,2

Administrations de sécurité sociale

36,3

2,1

39,4

2,2

46,4

2,5

Total administrations publiques

1 145,4

66,4

1 149,9

63,6

1 209,5

63,9

* au sens du traité de Maastricht (définitions)

Source : Insee, Comptes nationaux - base 2000 .

Les articles L. 2336-3, L. 3335-1 et L. 4333-1 du code général des collectivités territoriales autorisent ces dernières à recourir à l'emprunt. La loi du 2 mars 1982 ayant mis fin aux restrictions qui existaient jusqu'alors, la liberté porte sur les montants empruntés autant que sur les taux . La compétence est celle de l'assemblée délibérante, qui peut toutefois la déléguer à l'exécutif. En outre, à l'heure actuelle, les emprunts n'entrent pas dans le champ d'application du code des marchés publics du 1er août 2006, bien que cette exclusion soit contestée par la Commission européenne.

La Cour des comptes estimait ainsi, au mois de juin 2008 , dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, que la situation financière des collectivités locales n'était pas inquiétante. Toutefois, elle relevait que « la croissance des dépenses locales est très forte [...]. Or, la croissance des ressources des collectivités locales ralentit. Si leur situation financière demeure saine, avec notamment un autofinancement qui couvre 70% de leurs dépenses d'équipement, elle devient donc progressivement plus tendue ». Depuis, l'aggravation brutale de la crise financière a accentué ces tensions.

En effet, si la diversification des produits financiers auxquels les collectivités territoriales peuvent désormais avoir recours leur offre des marges de manoeuvre plus larges, elle implique en contrepartie une plus grande maîtrise du suivi de leur endettement. La crise financière actuelle a ainsi mis en lumière l'exposition de 10 à 20 % en moyenne de la dette des collectivités territoriales aux « emprunts toxiques » (emprunts à taux variables indexés sur les devises ou le prix des matières premières), lesquels risquent, dans la conjoncture actuelle, de peser lourdement sur les budgets locaux.

Dans ces conditions, afin de faciliter le financement des collectivités locales d'ici à la fin de l'année, le gouvernement a décidé le 6 novembre 2008 de consacrer une enveloppe exceptionnelle de cinq milliards d'euros de prêts sur fonds d'épargne à destination des collectivités locales , dont une moitié sera distribuée directement par la Caisse des dépôts et consignation et l'autre moitié sous forme de prêts de refinancement octroyés aux établissements de crédit afin qu'ils puissent continuer à financer les collectivités territoriales. Cette aide permettra de réduire les inquiétudes liées à l'endettement des collectivités territoriales, dont la principale banque, Dexia, a été directement frappée par la crise financière.

A plus long terme, Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales a annoncé à l'Assemblée nationale le 5 novembre 2008 qu'une « charte de bonnes pratiques » destinée aux banquiers et aux collectivités territoriales serait rapidement élaborée et qu'une réflexion serait engagée afin d'améliorer l'information des assemblées délibérantes appelées à se prononcer sur une décision d'emprunt. Enfin, le gouvernement fera désormais réaliser chaque année une analyse de la situation globale des emprunts à risque souscrits par les collectivités.

III. LE RENFORCEMENT DE L'ASSOCIATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES À LA PRODUCTION NORMATIVE

En 1976, le rapport de la commission de développement des responsabilités locales présidées par Olivier Guichard soulignait que « l'Etat, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale ont tous trois pour mission de rendre aux Français des services. Les trois familles de fonctions collectives ont pour trait commun d'être financées par l'argent public, par des prélèvements obligatoires, impôts, cotisations, opérés sur la richesse nationale. Or, on ne peut répartir et redistribuer que ce qui a été produit. La situation financière de chacune des trois fonctions collectives est donc obligatoirement liée à celle des deux autres et au prélèvement total demandé à la nation - contribuable » .

Dans le cadre de son effort de maîtrise des dépenses publiques et de rationalisation des politiques publiques, le gouvernement a souhaité que les collectivités territoriales soient pleinement associées à la conduite des réformes engagées, conformément aux préconisations formulées par le rapport élaboré par M. Michel Pébereau en décembre 2005 8 ( * ) . De nouvelles structures de dialogue ont été mises en place afin d'encourager et d'encadrer la participation des collectivités territoriales aux réformes mises en oeuvre.

A. LE RENFORCEMENT DU DIALOGUE ENTRE L'ETAT ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

De la simple association à l'évaluation des charges transférées dans le cadre de la décentralisation, le dialogue entre l'Etat et les collectivités territoriales a évolué afin d'accroître la participation de ces dernières au pilotage des réformes engagées.

1. De l'association des collectivités locales à l'évaluation des charges...

a) Le Comité des finances locales

Créé par la loi du 3 janvier 1979, le Comité des finances locales (CFL) a pour mission la défense des intérêts des collectivités locales sur le plan financier et l'harmonisation des points de vue entre collectivités territoriales et Etat. Il est composé de représentants des deux assemblées parlementaires, des collectivités territoriales et de l'Etat.

Le CFL exerce ainsi un triple rôle :

- pouvoir de décision et de contrôle pour la répartition des principaux concours financiers de l'Etat aux collectivités locales ;

- consultation obligatoire pour tous les décrets à caractère financier intéressant les collectivités locales ; en outre, le gouvernement peut recueillir son avis sur tout projet de loi ou d'amendement concernant les finances locales ;

- rôle de concertation et de proposition : le CFL a débattu des grandes réformes en cours en matière d'intercommunalité, de comptabilité ou encore de révision des bases cadastrales.

b) La commission consultative sur l'évaluation des charges

La commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC) a été créée par l'article 94 de la loi du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat. L'article 118 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a modifié sa composition et son rôle. Celle-ci est aujourd'hui une formation restreinte du CFL.

Désormais, pour chaque transfert de compétences, la CCEC réunit de façon paritaire des représentants de l'Etat et de la catégorie de collectivités territoriales concernée par le transfert. Pour l'examen de questions intéressant l'ensemble des catégories de collectivités, notamment celles relatives aux modalités d'évaluation des accroissements ou diminutions de charges, la commission siège en formation plénière.

La mission principale de la CCEC consiste à contrôler la compensation financière allouée en contrepartie des transferts de compétences . En donnant son avis sur les projets d'arrêtés interministériels fixant le montant de cette compensation pour chacune des collectivités territoriales concernées, la CCEC veille ainsi à l'exacte adéquation entre les charges et les ressources transférées.

En outre, la CCEC participe à la définition des modalités d'évaluation des accroissements et diminutions de charges résultant des transferts de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales. Elle peut également être consultée par le ministre de l'intérieur ou le ministre du budget en cas de contestation des collectivités.

Dans son rapport d'activité 2005-2007, consacré essentiellement à l'évaluation des transferts de compétences opérés dans le cadre de la loi du 13 août 2004, la CCEC, présidée par M. Philippe Auberger, a pu constater le respect par l'Etat de ses obligations légales et l'exact transfert des moyens consacrés par l'Etat, avant la décentralisation, à la compétence transférée . La commission a également constaté qu'à la demande des élus, le gouvernement avait à plusieurs reprises accepté de déroger à la loi du 13 août 2004 dont l'article 119 dispose que « le droit à compensation des charges de fonctionnement transférées par la présente loi est égal à la moyenne des dépenses actualisées constatées sur une période de trois ans précédant le transfert de compétences » : le gouvernement a ainsi, dans certains cas, accepté une solution plus favorable adossant le droit à compensation à la dépense de l'Etat au cours de la dernière année précédant le transfert. Au total, par rapport au droit à compensation théorique calculé sur la base de l'article 119 de la loi du 13 août 2004, la commission évalue l'effort supplémentaire réalisé par le gouvernement à 157,727 millions d'euros.

2. ... à la rénovation du dialogue entre l'Etat et les collectivités territoriales

Le constat réalisé par la CCEC du respect par l'Etat de ses obligations légales en matière de compensations de charges contraste avec la persistance des contestations émanant de certains élus locaux.

Pour notre collègue Alain Lambert 9 ( * ) , « il faut en finir avec un débat récurrent qui confine au dialogue de sourds. Il est vérifié que les collectivités ont amélioré le service sur les compétences transférées (remise à niveau des bâtiments scolaires, routes, TER, etc.) et que l'Etat leur a confié des dépenses structurellement en hausse (vieillissement, handicap), sans capacité suffisante de contrôle par les payeurs (allocations de solidarité, formation professionnelle, etc.). Mais il demeure également que, dans la plupart des politiques locales, l'absence de coûts standard, de comparaison systématique entre les modes de gestion (régie ou délégation), des choix techniques parfois onéreux s'ajoutent à des effets d'offre de qualité supplémentaire pour accroître la dépense » .

Dès lors, la nécessité d'améliorer la concertation entre l'Etat et les collectivités territoriales a motivé la création, le 4 octobre 2007, d'une Conférence nationale des exécutifs (CNE).

Cette nouvelle instance, qui réunit le Premier ministre, les ministres principalement concernés par les collectivités territoriales, les présidents des trois grandes associations d'élus locaux (AMF, ADF et ARF) 10 ( * ) , le président du comité des finances locales et le président du conseil supérieur de la fonction publique territoriale, se veut le lieu de concertation au plus haut niveau entre le gouvernement et les exécutifs des collectivités territoriales, dans la perspective des réformes à venir , notamment, dans les domaines des finances publiques, de la fonction publique ou de l'environnement. Dans un contexte de réforme en profondeur des politiques publiques, la CNE répond à la nécessité d'un partenariat étroit entre le gouvernement et les responsables des collectivités locales, dans un esprit de responsabilité partagée.

Ainsi, lors de la réunion de la CNE du 10 juillet 2008, de nombreux points de convergence ont été trouvés entre le gouvernement et les élus locaux sur la question de la réforme de la fiscalité locale :

- accord sur le constat : le système fiscal local est complexe, obsolète et inadapté aux besoins locaux ;

- accord également sur la nécessité de mener une réflexion d'ensemble, en abordant la modernisation des valeurs locatives, la question de la taxe professionnelle et la spécialisation des impôts locaux ;

- accord enfin sur les conditions de la réforme et les objectifs poursuivis : garantir les ressources des collectivités territoriales et leur autonomie financière, sans pour autant augmenter les prélèvements obligatoires, aller vers un système fiscal local plus moderne, plus juste pour les contribuables et moins pénalisant pour l'économie nationale.

B. LA PRISE EN COMPTE DE L'IMPACT DES NORMES SUR LES BUDGETS DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Une prise en compte récente

La question de l'impact des contraintes normatives sur les dépenses des collectivités territoriales , déjà abordée par le rapport rendu par M. Pierre Richard en décembre 2006 11 ( * ) , a constitué l'un des thèmes principaux explorés par le groupe de travail présidé par notre collègue Alain Lambert , lequel a rendu son rapport en décembre 2007.

Ce dernier distingue deux types de normes : les normes techniques et les normes issues de l'activité législative et réglementaire de l'Etat.

Ainsi, l'activité législative et réglementaire de l'Etat au sens large , « excessive et parfois incohérente, notamment dans le domaine des compétences transférées, induit souvent des conséquences sur l'action des collectivités locales en termes de coûts, de procédures et d'organisation » .

En ce qui concerne les normes techniques, selon la typologie adoptée par le rapport de M. Pierre Richard, il y a lieu de distinguer :

- les règles techniques de portée obligatoire. D'origine nationale ou communautaire, elles sont prévues par des textes législatifs ou réglementaires ;

- les normes professionnelles, qui n'ont qu'une valeur indicative. Elles sont adoptées au sein des instances de normalisation (pour l'essentiel, l'AFNOR) et sont issues en grande partie de travaux supra nationaux (au sein du comité européen de normalisation ou de l' International Standard Organisation ) ;

- les règlements techniques discrétionnaires, émanant par exemple des fédérations sportives ou des organismes publics et parapublics financeurs, notamment dans le domaine de l'environnement.

La plupart des domaines d'action des collectivités locales sont touchés par la normalisation : eau, déchets, environnement, voirie, bâtiments, sécurité incendie, équipement scolaires, etc.

Pour le groupe de travail présidé par notre collègue Alain Lambert , « les conséquences [de l'« inflation normative » subie par les collectivités territoriales] en sont une multiplication des contraintes sans évaluation de leur bilan coût / avantage et un surcoût accentué par le fait que les financeurs n'ont pas ou peu de prise sur les décisions . Par exemple :

- en matière d'environnement, les contraintes et coûts associés se succèdent aussi bien sur le traitement des déchets (doublement des coûts de traitement entre 1992 et 2002 liés à la restriction des mises en décharge puis aux mises aux normes des incinérateurs pour fin 2005) que sur l'eau et l'assainissement ;

- en matière sociale, les lourdes interrogations - qui se font jour sur la capacité collective à faire face aux coûts induits par de nouveaux droits opposables ou de nouvelles obligations d'accessibilité (cf. loi handicap), dont une grande partie pèsent sur les collectivités locales - illustrent les failles des processus de décisions actuels ;

- en matière sanitaire et de sécurité alimentaire, les obligations normatives récentes induisent des surcoûts considérables, notamment pour les petites communes ».

Ce constat a conduit le groupe de travail à formuler une série de recommandations destinées à la fois à améliorer l'association des collectivités locales à la production réglementaire de l'Etat (dans une logique de régulation du « flux ») et à réexaminer le « stock » des règles techniques.

2. La mise en place de la commission consultative d'évaluation des normes (CCEN)

Comme le souligne le rapport d'Alain Lambert, « il est indispensable d'instaurer une discipline dans l'activité réglementaire de l'Etat dans le domaine des compétences des collectivités locales, y compris quand l'Etat choisit par voie réglementaire de rendre obligatoires des normes professionnelles. A l'heure actuelle, seuls les projets de décret à caractère financier sont soumis obligatoirement pour avis au CFL. La consultation des collectivités locales, systématique ou par pouvoir d'évocation, au sein du CFL ou d'un organe ad hoc pourrait être mise en place : c'est l'idée de la création d'une commission consultative d'évaluation des normes (CCEN) avancée par le ministère de l'intérieur » .

Cette commission consultative d'évaluation des normes a été créée par l'article 97 de la loi n° 2007-1824 du 25 décembre 2007 de finances rectificative pour 2007 , au sein du comité des finances locales. Sa composition et son mode de fonctionnement ont été précisés par le décret n° 2008-994 du 22 septembre 2008. Ses membres ont été désignés le 25 septembre 2008 et elle a tenu sa première réunion le 9 octobre 2008 .

En vertu de l'article L. 1211-4-2 du code général des collectivités territoriales, la CCEN est composée de 22 représentants des administrations compétentes de l'Etat, du Parlement et des collectivités territoriales issus des membres titulaires du comité des finances locales. Parmi les représentants des collectivités locales figurent des représentants des communes, des départements, des régions et des établissements publics de coopération intercommunale.

La CCEN recevra communication de tous les projets ou propositions de réglementation nationale ou communautaire créant ou modifiant des normes imposées aux collectivités et à leurs établissements publics. Ses textes seront accompagnés d'un rapport de présentation et d'une fiche d'impact financier faisant apparaître les incidences financières directes et indirectes des mesures proposées pour les collectivités territoriales. La CCEN disposera d'un délai de cinq semaines (exceptionnellement ramené à 72 heures sur demande du Premier ministre), éventuellement reconductible, pour rendre, au vu de cette évaluation financière, son avis sur le texte dont elle sera saisie. Enfin, le président de la CCEN présentera chaque année au Comité des finances locales un bilan des travaux de cette instance, lequel sera communiqué aux membres de la commission consultative sur l'évaluation des charges (CCEC). En outre, la CCEN pourra être consultée sur tout projet de loi ou tout projet d'amendement du gouvernement concernant les collectivités territoriales, mais cette consultation est laissée à la discrétion du pouvoir exécutif.

La CCEN constitue ainsi désormais un acteur essentiel des relations entre l'Etat et les collectivités territoriales. Sa création va modifier sensiblement les pratiques des services administratifs qui doivent dorénavant intégrer l'impact sur les collectivités territoriales des normes produites, et ce dès leur adoption. En imposant des études d'impact financier systématiques, cette commission doit contribuer à limiter l'inflation normative et, ainsi, à mieux maîtriser les dépenses publiques.

Votre rapporteur ne peut que saluer la création de cette nouvelle instance de concertation, qui constitue la contrepartie indispensable de l'association plus étroite des collectivités territoriales à la maîtrise des finances publiques et à la responsabilisation accrue des acteurs locaux . Il souligne également que le rôle de cette nouvelle commission ne pourra que s'accroître avec l'entrée en vigueur des dispositions issues de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 : à partir du 1er mars 2009, l'article 39 de la Constitution disposera en effet que « la présentation des projets de loi déposés devant l'Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique » , laquelle pourrait rendre obligatoire la réalisation d'études d'impact préalablement à tout dépôt d'un projet de loi 12 ( * ) .

C. VERS UNE MEILLEURE ASSOCIATION DES COLLECTIVITES TERRITORIALES AU PROCESSUS DE DECISION COMMUNAUTAIRE

1. La reconnaissance du rôle des collectivités territoriales au sein de l'Union européenne est longtemps demeurée insuffisante

Depuis la création du Comité des régions par le traité de Maastricht en 1992, le processus européen accorde une place croissante aux collectivités territoriales au sein de l'Union européenne.

Instauré en 1992 et mis en place en 1994, le Comité des régions est aujourd'hui composé de 344 représentants des collectivités locales et régionales (24 pour la France, dont 12 représentent les régions, 6 les départements et 6 les villes), nommés pour quatre ans par le Conseil. Il est consulté par le Conseil, le Parlement et la Commission dans des domaines touchant aux intérêts régionaux et locaux. Depuis l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam en mai 1999, le Comité des régions doit être consulté sur un champ assez large de questions (cohésion économique et sociale, emploi, politique sociale, réseaux transeuropéens, formation professionnelle, etc.).

Toutefois, si les collectivités territoriales en Europe se voient attribuer près de 37,5 % des fonds communautaires au titre de la politique de cohésion et mettent en oeuvre près de trois quarts des décisions prises à Bruxelles, leur rôle dans le processus de décision communautaire est longtemps demeuré limité , notamment en France où seul l'Etat représente la France auprès de l'Union européenne.

En effet, les collectivités territoriales demeurent à l'heure actuelle largement exclues du « triangle décisionnel » de l'Union européenne , formé par le Conseil, le Parlement européen et la Commission européenne. En particulier, si la Commission et le Conseil doivent consulter le Comité des régions pour toute proposition formulée dans un domaine ayant des répercussions au niveau local ou régional, celui-ci ne dispose que d'un rôle consultatif et, dans les faits, ses avis ont relativement peu d'impact.

Dans son rapport public pour l'année 2007, le Conseil d'Etat estimait ainsi qu'il était nécessaire de permettre une meilleure prise en compte des intérêts et des positions des collectivités territoriales dans le cadre des négociations européennes.

2. L'association des collectivités territoriales au processus de décision communautaire a été renforcée

a) Une meilleure association aux positions adoptées par la France

En application de l'article 88-4 de la Constitution, l'Assemblée nationale et le Sénat disposent de la faculté d'adopter des résolutions sur les projets ou propositions d'actes des Communautés européennes et de l'Union européenne . Le Sénat, dont l'article 24 de la Constitution fait le représentant des collectivités territoriales de la République, est ainsi appelé à jouer un rôle en faveur d'une meilleure prise en compte des intérêts des collectivités dans l'élaboration des textes communautaires .

En outre, plusieurs initiatives prises par le gouvernement ont eu pour objet d'améliorer l'information des collectivités territoriales sur les propositions de textes communautaires susceptibles de les intéresser.

Une circulaire du Premier ministre en date du 19 décembre 2005 prévoit ainsi « une réorganisation de la fonction de veille du Secrétariat général des affaires européennes et de la représentation permanente pour que l'interface entre les autorités européennes et les collectivités territoriales sur les questions européennes soit mieux assurée ». Selon les indications fournies l'an passé à votre rapporteur, la présence au sein du Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) d'un chargé de mission mis à disposition par le ministère de l'intérieur a ainsi permis de davantage prendre en compte, dans les éléments d'analyse, les compétences exercées par les collectivités territoriales.

En outre, le comité interministériel sur l'Europe a décidé qu'à compter du 1er janvier 2007, les propositions de la Commission européenne intéressant les collectivités territoriales seraient transmises aux associations d'élus locaux. En France, des rencontres semestrielles avec ces mêmes associations sur les questions européennes sont mises en place par le ministre délégué aux collectivités territoriales et par le ministre délégué aux affaires européennes. Enfin, des séminaires d'information sur les principaux dossiers de l'actualité européenne sont proposés dans chaque département, sous l'autorité des préfets.

Enfin, la commission consultative d'évaluation des normes, mise en place le 25 septembre 2008, sera chargée d'émettre un avis sur les propositions de textes communautaires ayant un impact technique et financier sur les collectivités territoriales et leurs établissements publics , répondant ainsi au souhait formulé par le Conseil d'Etat en 2007 de voir les collectivités territoriales davantage associées aux études d'impact et à la définition des positions françaises pour les projets de texte communautaire les concernant.

b) Les avancées contenues dans le traité de Lisbonne

Si le processus de ratification parvient à son terme, le traité de Lisbonne renforcera significativement le rôle des collectivités territoriales dans le processus de décision communautaire .

En effet, l'article 8 du protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité du traité de Lisbonne octroie la possibilité au Comité des régions d'invoquer la violation du principe de subsidiarité par un acte législatif devant la Cour de justice de l'Union européenne, dans la limite des actes sur lesquels sa consultation est obligatoire. Le traité reconnaît par ailleurs explicitement le principe d'autonomie locale et régionale, et fait de la cohésion territoriale un objectif de l'Union européenne. Enfin, à la demande de la France et des Pays-Bas, un protocole sur les services publics souligne l'importance des services d'intérêt général et mentionne « le rôle essentiel et la grande marge de manoeuvre des autorités nationales, régionales et locales » pour l'organisation et la fourniture des services d'intérêt économique général.

A compter de l'entrée en vigueur de ce traité, en application du nouvel article 88-6 de la Constitution, l'Assemblée nationale et le Sénat pourront également émettre un avis motivé sur la conformité d'un projet d'acte législatif européen au principe de subsidiarité . Cet avis sera adressé par le président de l'assemblée concernée aux présidents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission européenne, le gouvernement en étant informé. Chaque assemblée disposera également de la faculté de former un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne contre un acte législatif européen pour violation du principe de subsidiarité .

Le principe de subsidiarité

Le principe de subsidiarité est défini à l'article 5 du traité instituant la Communauté européenne. Il vise à assurer une prise de décision la plus proche possible du citoyen en vérifiant que l'action à entreprendre au niveau communautaire est justifiée par rapport aux possibilités qu'offre l'échelon national, régional ou local. Concrètement, c'est un principe selon lequel l'Union n'agit - sauf pour les domaines de sa compétence exclusive - que lorsque son action est plus efficace qu'une action entreprise au niveau national, régional ou local. Il est étroitement lié aux principes de proportionnalité et de nécessité qui supposent que l'action de l'Union ne doit pas excéder ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs du traité.

Le Conseil européen d'Edimbourg de décembre 1992 a approuvé une déclaration concernant le principe de subsidiarité, qui en fixe les règles d'application. L'approche découlant de cette déclaration est reprise par le traité d'Amsterdam dans un protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, annexé au traité instituant la Communauté européenne. Ce protocole introduit, entre autres, l'analyse systématique de l'impact des propositions législatives sur le principe de subsidiarité, et l'utilisation, dans la mesure du possible, des mesures communautaires moins contraignantes.

Source : site internet Europa

c) L'organisation des collectivités territoriales françaises au niveau européen

Enfin, les collectivités territoriales se sont dotées de plusieurs moyens pour défendre leurs intérêts au niveau de l'Union, par le biais, notamment, de la Maison européenne des pouvoirs locaux français . En vertu d'une convention de coopération commune sur les questions européennes signées par les présidents des principales associations nationales d'élus locaux (AMF, ADF, AMGVF, FMVM, APVF) en décembre 2005, ses activités principales consistent, d'une part, à informer les collectivités locales sur l'Europe (suivi de réunions et de conférences, accueil de délégations d'élus locaux, suivi des activités du Comité des régions, etc.) et, d'autre part, à participer au débat européen par l'adoption de positions communes et l'entretien de contacts avec la représentation permanente de la France et les institutions européennes.

* *

*

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « relations avec les collectivités territoriales » et du compte de concours financiers « avances aux collectivités territoriales » figurant dans le projet de loi de finances pour 2009.

* 1 En application de la LOLF, l'article 46 de la loi du 30 décembre 2005 de finances initiale pour 2006 a supprimé tous les comptes de prêts et comptes d'avances existant alors, et les a remplacés par divers comptes de concours financiers.

* 2 Ce à quoi s'ajoute le coût pour l'Etat de l' « effet profil », de quelques centaines de millions d'euros par an.

* 3 A la suite d'un amendement adopté par l'Assemblée nationale le 13 novembre 2008, cette disposition concernera également les communautés urbaines créées au cours de l'année 2008.

* 4 Les communes membres d'un syndicat d'agglomération nouvelle ont bénéficié de règles de dénombrement avantageuses pendant plusieurs années, qui ont conduit à majorer leur population réelle. L'amendement adopté par l'Assemblée nationale a pour objet de lisser sur plusieurs années les effets de l'entrée en vigueur de la nouvelle procédure de recensement.

* 5 L'État acquitte ainsi 30 % du produit de la taxe d'habitation.

* 6 Rapport de M. Philippe Valletoux, Fiscalité et finances publiques locales : la recherche d'une nouvelle donne, Conseil économique et social, décembre 2006, p. 118-119.

* 7 Rapport de M. Philippe Valletoux, Fiscalité et finances publiques locales : la recherche d'une nouvelle donne, Conseil économique et social, décembre 2006, p. 118-119.

* 8 Des finances publiques au service de notre avenir. Rompre avec la facilité de la dette publique pour renforcer notre croissance économique et notre cohésion sociale, 14 décembre 2005.

* 9 « Les relations entre l'Etat et les collectivités locales », rapport du groupe de travail présidé par Alain Lambert, décembre 2007.

* 10 Qui en sont les vice-présidents.

* 11 Solidarité et performance. Les enjeux de la maîtrise des dépenses publiques locales, Pierre Richard, décembre 2006.

* 12 Voir en ce sens les conclusions du rapport n°387 présenté le 11 juin 2008 par le président Jean-Jacques Hyest au nom de la commission des lois du Sénat.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page