B. LES DÉFIS DE FRANCE TÉLÉVISIONS

Aux yeux de votre rapporteur, deux défis d'ampleur attendent aujourd'hui les équipes de France Télévisions :

- sa réorganisation interne avec la constitution d'une entreprise unique (France 2, France 3, France 4, France 5, RFO étant désormais des services de France Télévisions). Cette réorganisation implique la négociation avec les représentants du personnel d'un nouvel accord social, la convention collective des personnels techniques et administratifs et l'avenant à la convention collective des journalistes prenant fin respectivement le 8 octobre 2012 et au 8 février 2011. Parallèlement le groupe doit renforcer la caractérisation des chaînes aux identités floues (voir à cet égard la deuxième partie du rapport précité sur les comptes de France Télévisions) ;

- et le déploiement de la stratégie de « média global » de France Télévisions, qui passe par la réussite de la mise en ligne des programmes du groupe, plate-forme d'information, « web TV » régionales, télévision de rattrapage (la plate-forme « Pluzz »), vidéo à la demande et stratégie multimédias.

S'agissant de la télévision de rattrapage, votre rapporteur considère que le groupe public accuse un retard certain . L'audition de M. Bruno Patino, le nouveau général délégué au développement numérique et à la stratégie de France Télévisions, n'a fait que confirmer ce sentiment : la politique menée en matière de numérique est à la fois floue et archaïque .

Parallèlement à la mise en place d'une plate-forme de vidéodiffusion à la demande, qui permettait d'accéder de manière payante aux programmes diffusés sur les chaînes du groupe et qui renvoyait aux sites des différentes antennes pour visionner les programmes consultables gratuitement, France Télévisions avait ainsi initié en 2007 la télévision de rattrapage par le biais d'un accord exclusif avec Orange. Ce service permettait aux clients d'Orange de voir et revoir les principaux programmes des chaînes du bouquet numérique gratuit de France Télévisions, sur tous les supports de distribution (Internet, télévision par ADSL et mobile), sur une durée de sept à trente jours à compter du lendemain de leur diffusion en mode linéaire.

Le partenariat exclusif avec Orange présentait un intérêt financier à court terme pour France Télévisions, sans que cette logique d'externalisation n'aide véritablement l'entreprise à mûrir en interne une culture et un projet industriel de télévision de rattrapage . C'est le législateur, à l'initiative de votre rapporteur, qui l'a conduite à infléchir sa stratégie de développement de services médias audiovisuels à la demande (SMAD) à l'expiration du partenariat avec Orange, qui, s'il respectait le droit de la concurrence, ne remplissait pas pleinement la vocation du service public audiovisuel. Il est à noter, au demeurant, que France Télévisions était le seul grand groupe audiovisuel à avoir fait ce choix de l'externalisation, alors même que les gains commerciaux liés à la stratégie numérique apparaissent lointains et a priori peu motivants pour les chaînes privées.

Votre rapporteur se félicite à cet égard que, dans le respect de son cahier des charges, France Télévisions ait lancé la plateforme Pluzz, qui concurrencera dans ce domaine les services de « catch-up » déjà offerts par TF1 Replay, M6 Replay, Canal+ à la demande et Arte + 7. Les programmes de l'ensemble du bouquet y sont désormais accessibles au plus grand nombre, gratuitement pendant sept jours à compter de leur diffusion. France Télévisions s'est fixé un objectif pour la fin 2010 de plus de 80 % de programmes disponibles calculés à partir des grilles des cinq chaînes premium, entre 18 h et minuit, hors sport et cinéma.

Toutefois, comme l'a souligné M. Bruno Patino, le défi numérique, enjeu d'avenir pour les groupes audiovisuels, est loin d'être relevé. À cet égard il a insisté sur le fait que l'ambition que l'on pouvait avoir en la matière passait par de lourds investissements financiers à la rentabilité incertaine, des restructurations fortes via une politique de formation intensive et la systématisation d'achats des droits spécifiques .

Il a considéré que la stratégie numérique passait par une hiérarchisation des efforts et des investissements , qui devait s'articuler autour des piliers suivants :

- une offre numérique satisfaisante en matière d'information et de sport , ce qui n'était pas le cas pour l'instant, avec une capacité à intervenir en temps réel ;

- une philosophie de partage des programmes , à travers une plateforme adaptée, une présence sur les réseaux sociaux, et une consolidation du club « France Télévisions » ;

- une présence sur tous les écrans (ordinateurs, téléphones, tablettes) ;

- et un positionnement sur les téléviseurs connectés , qui doit constituer une obsession pour le groupe.

Il a indiqué qu'un bilan serait fait sur la réussite du projet et de la marque « Pluzz », qui doit être de nature à renforcer à la fois l'identité de groupe et les programmes de chaque chaîne. La direction de France Télévisions s'est engagée devant votre rapporteur à ce que l'offre de Pluzz soit distribuée largement sur tous les supports, aussi bien sur les plateformes ADSL et câble au travers d'accords non-exclusifs avec les fournisseurs d'accès, que directement sur les téléviseurs connectés à la faveur d'accords avec les fabricants ou sur les « smartphones ». L'offre est effectivement présente sur Free et Alice depuis le mois d'octobre. Il apparaît donc urgent à votre rapporteur qu'elle le soit sur l'ensemble des plateformes afin que tous les téléspectateurs puissent en bénéficier.

S'agissant du projet des « Web TV », M. Bruno Patino a indiqué qu'en dépit de systèmes informatiques en partie obsolètes, le défi pouvait être relevé et qu'un test « fidèle et sincère » allait être mené au début de l'année 2011 à Limoges.

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