III. LES ARTICLES RATTACHÉS À LA MISSION « TRAVAIL ET EMPLOI »

1. L'article 62 prévoit deux contributions spécifiques au profit des contrats aidés en faveur des personnes handicapées

• L'article 62 de la seconde partie du PLF pour 2015 prévoit une contribution de l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) au financement des contrats aidés.

Instituée uniquement jusqu'en 2017, cette contribution annuelle de 29 millions d'euros sera versée à l'Agence de services et de paiement (ASP), établissement public administratif en charge de verser les aides financières aux employeurs au titre des contrats uniques d'insertion et des emplois d'avenir. L'exposé des motifs précise que seuls sont concernés les contrats aidés à destination des travailleurs handicapés.

Cette contribution sera versée en deux échéances semestrielles, la première avant le 1 er juin, la seconde avant le 1 er décembre.

Le recouvrement, le contentieux, les garanties et les sanctions relatifs à cette contribution seront régis par les règles applicables en matière de taxe sur les salaires.

Le Gouvernement rappelle que l'Agefiph dispose d'un fonds de roulement important (319 millions d'euros fin 2013) et que 9,2 % des contrats aidés bénéficient aux travailleurs handicapés.

• Un amendement du Gouvernement a également prévu une contribution du fonds d'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) dans les mêmes conditions que pour l'Agefiph.

Cette contribution du FIPHFP s'élèvera donc à 29 millions d'euros chaque année jusqu'en 2017.

Ce fonds dispose également de fonds de roulement non négligeables (environ 394 millions d'euros fin 2013).

Le ministre du travail, lors de l'examen budgétaire à l'Assemblée nationale, a indiqué que les contributions de l'Agefiph et du FIPHFP seront « intégralement utilisées pour financer une partie des aides à destination des travailleurs handicapés dans le secteur non marchand ».

Compte tenu des craintes exprimées sur le principe même de ces contributions, et de l'absence de fléchage dans le dispositif même de l'article, votre commission a émis un avis défavorable à l'adoption de cet article, suivant la proposition de votre rapporteur pour avis. Celui-ci souhaite, à titre personnel, que ces subventions servent uniquement au financement des contrats aidés à destination exclusive des personnes handicapées.

2. L'article 63 institue une prime pour le recrutement d'apprentis de 1 000 euros, tirant ainsi en partie les conséquences des méfaits de la réforme des indemnités compensatrices forfaitaires (ICF) issue de la loi de finances pour 2014
a) La loi de finances pour 2014 a supprimé les indemnités compensatrices forfaitaires (ICF) au bénéfice d'une compensation pour les primes à l'apprentissage ciblées sur les entreprises de moins de 11 salariés

Avant janvier 2014, l'aide à l'embauche des jeunes en apprentissage versée par la région faisait l'objet d'une compensation financière de l'Etat à travers l'indemnité compensatoire forfaitaire (ICF).

A travers l'article 140 de la loi de finances pour 2014, le Gouvernement a souhaité restreindre l'ICF aux entreprises de moins de 11 salariés pour les contrats conclus à partir du 1 er janvier 2014, en arguant du fait que l'aide jouait un effet de levier plus important dans ces entités.

Un régime transitoire de compensation , fort complexe, a été mis en place pour les primes d'apprentissage versées par les régions relatives aux contrats d'apprentissage conclus avant le 1 er janvier 2014, pour permettre une réduction progressive des primes versées aux employeurs de plus de 11 salariés (500 euros la deuxième année et 200 euros la troisième année du contrat).

En dépit de la réforme issue de la loi de finances pour 2014, les conseils régionaux demeurent libres de verser des primes qui vont au-delà des montants compensés par l'Etat, mais ils ne peuvent pas verser des primes en deçà des compensations.

Cette réforme des indemnités compensatrices forfaitaires devait permettre à l'Etat d'économiser environ 200 millions d'euros par an dès 2016.

b) Le plan de relance de l'apprentissage : une prise de conscience salutaire quoique tardive du Gouvernement lors de la troisième grande conférence sociale

La feuille de route de la troisième grande conférence sociale, qui s'est tenue les 7 et 8 juillet 2014, comprend un plan de relance de l'apprentissage, afin de répondre à la chute du nombre d'apprentis depuis 2013.

La troisième grande conférence sociale et l'apprentissage

Le plan de relance de l'apprentissage comprend un volet d'actions structurels, et un volet de mesures d'urgence.

Les leviers structurels pour réformer l'apprentissage s'articulent autour de cinq axes :

- le développement de l'apprentissage au sein du système de formation initiale ;

- le changement de l'image de l'apprentissage auprès des jeunes et des acteurs de l'orientation ;

- le développement de l'apprentissage dans le secteur public ;

- la simplification du cadre réglementaire applicable aux embauches et amélioration du statut des apprentis ;

- et l'indentification des domaines de développement de l'apprentissage.

Le second volet du plan de relance comprend des mesures immédiates comme :

- une campagne de communication sur l'apprentissage lancée depuis la rentrée 2014 ;

- la mobilisation de 100 millions d'euros issus des fonds européens pendant deux ans pour renforcer l'insertion des jeunes et en particulier l'alternance dans 16 régions ;

- l'utilisation d'une enveloppe de 80 millions d'euros pour financer de nouvelles formations et augmenter les capacités d'hébergement ;

- l'affectation de 200 millions d'euros supplémentaires, issus du projet de loi de finances rectificatives pour 2014, pour financer une aide de 1000 euros par apprenti et stabiliser le répartition de la taxe d'apprentissage.

La feuille de route prévoyait explicitement que la nouvelle aide de 1 000 euros par apprenti serait mise en place dans les secteurs professionnels où « un accord de branche a été conclu pour fixer des objectifs de développement de l'apprentissage ».

Votre rapporteur pour avis constate donc que moins de sept mois après l'entrée en vigueur de la réforme des indemnités compensatrices forfaitaires, qui ont porté préjudice aux primes d'apprentissage versées par les régions, le Gouvernement doute de sa pertinence et réintroduit une nouvelle forme de prime à l'apprentissage.

c) Les conséquences des Assises de l'apprentissage

Lors de l'examen du projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises le 22 juillet dernier, un amendement du Gouvernement a été adopté en séance publique à l'Assemblée nationale pour instaurer une aide au recrutement des apprentis d'au moins 1 000 euros pour les entreprises de moins de 50 salariés.

Deux conditions étaient posées :

- l'entreprise ne doit pas avoir accueilli d'apprenti dans l'établissement concerné depuis le 1 er juillet de l'année précédant la date de signature du contrat ;

- elle doit être couverte par un accord de branche étendu visant à favoriser le développement de l'alternance grâce à des engagements quantitatifs et qualitatifs.

Or, à l'issue des Assises de l'apprentissage du 19 septembre dernier, le Gouvernement a de nouveau souhaité modifier les conditions d'application de cette prime :

- elle concernera les entreprises employant moins de 250 salariés ;

- elle sera versée aux entreprises qui n'avaient pas d'apprentis l'année précédente ou qui prennent des apprentis supplémentaires ;

- la prorogation de cette prime pour les années suivantes sera liée à la conclusion d'un accord de branche d'ici juin 2015 ;

- enfin, cette prime s'ajoute à celle qui existe déjà pour les entreprises de moins de 11 salariés.

Lors de la discussion du texte au Sénat en séance publique les 4 et 5 novembre dernier, le Sénat a adopté un amendement de suppression présenté par le Gouvernement, pour déplacer le dispositif de la nouvelle prime dans le PLF pour 2015, compte tenu de sa nature financière 28 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis déplore les perpétuelles hésitations du Gouvernement sur le contour de cette nouvelle prime à l'apprentissage qui ne sont pas de nature à gagner la confiance des entrepreneurs.

d) Le dispositif proposé à l'article 63 du PLF pour 2015 est plus souple que celui prévu dans le projet de loi de simplification de la vie des entreprises

L'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement le 3 novembre dernier, introduisant un article 63 dans la seconde partie du PLF pour 2015, afin d'instituer une prime au recrutement d'apprentis conforme aux engagements du Gouvernement suite aux Assises de l'apprentissage du 19 septembre dernier.

L'aide est accordée immédiatement si l'une des deux conditions est remplie :

- soit l'entreprise justifie, à la date de conclusion de ce contrat, ne pas avoir employé d'apprentis en contrat d'apprentissage ou en période d'apprentissage depuis le 1 er janvier de l'année précédente dans l'établissement du lieu de travail de l'apprenti ;

- soit elle justifie, à la date de conclusion d'un nouveau contrat, employer dans le même établissement au moins un apprenti dont le contrat est en cours à l'issue des deux premiers mois de « période d'essai ». Le nombre de contrats en cours dans cet établissement après le recrutement de ce nouvel apprenti doit être supérieur au nombre de contrats en cours dans ce même établissement le 1 er janvier de l'année de conclusion du nouveau contrat.

La pérennité de l'aide est conditionnée à la signature, avant le 1 er juillet 2015, d'un accord de branche comportant des engagements qualitatifs et quantitatifs en matière de développement de l'apprentissage.

Si certains assouplissements ont été heureusement apportés à la première mouture du Gouvernement, certaines rigidités demeurent présentes dans le dispositif proposé par l'article 63 du projet de loi de finances pour 2015.

Compte tenu des règles posées par l'article 40 de la Constitution, concernant l'aggravation des charges publiques, il n'a pas été possible pour votre rapporteur d'assouplir les conditions d'octroi de l'aide.

C'est pourquoi votre commission, sur proposition de votre rapporteur, a donné un avis défavorable à l'adoption de l'article 63.


* 28 A l'initiative de la rapporteure pour avis de notre commission, Catherine Procaccia, l'article 2 bis du projet de loi précise toutefois que la transmission à Pôle emploi de la liste annuelle nominative des entreprises qui ont versé la contribution supplémentaire à l'apprentissage devient une obligation et non plus une simple faculté.

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