C. L'IMPÉRIEUSE NÉCESSITÉ DE RENFORCER LE RÔLE DES ÉLUS DANS L'ATTRIBUTION DES SUBVENTIONS D'INVESTISSEMENT

Votre rapporteur observe que le projet de loi de finances pour 2018, joint au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, poursuit un mouvement de recentralisation des décisions relatives à l'investissement local .

L'investissement public local a considérablement pâti, au cours des dernières années, de la baisse des concours financiers de l'État et des recettes fiscales des collectivités territoriales. Leur capacité d'autofinancement , constituée de leur épargne brute 23 ( * ) , a connu une forte baisse, comme le montre le graphique ci-dessous. Pour continuer à investir, les collectivités ont dû recourir - modérément - à l'emprunt. Or le projet de loi de programmation des finances publiques ne leur laisse aucune marge pour rétablir leurs recettes d'investissement à un niveau plus satisfaisant , puisque l'intégralité des économies exigées des collectivités sur leurs dépenses de fonctionnement (entre 13 milliards et 21 milliards d'euros, selon les estimations) devrait être affectée à la réduction de leur recours à l'emprunt. Leur faculté d'emprunter serait d'ailleurs strictement limitée par la nouvelle « règle d'or renforcée » 24 ( * ) . En d'autres termes, si la capacité d'autofinancement des collectivités territoriales devait se rétablir grâce à des efforts considérables de maîtrise de leurs dépenses de fonctionnement, cela n'augmenterait pas le montant total
- déjà faible - des ressources dont elles disposent pour investir.

Par ailleurs, les dotations d'investissement de l'État - qui, comme on l'a vu, se contractent malgré une augmentation apparente - constituent une ressource qui échappe en grande partie aux élus , puisque ces dotations sont librement réparties par les préfets sous forme de subventions aux projets locaux. Les associations d'élus que votre rapporteur a entendues se sont plaintes, en particulier, de l'opacité qui entoure les décisions de subventionnement au titre de la DSIL , et du caractère arbitraire de ces décisions. De surcroît, à compter de l'an prochain, une part importante de la DSIL - pas moins de 200 millions d'euros - serait consacrée au financement d'un grand plan d'investissement dont les priorités, certes intéressantes, ont été définies sans que les collectivités territoriales aient eu leur mot à dire.

Enfin, la disparition de la « réserve parlementaire » prive les élus nationaux d'un moyen de soutenir de petits projets locaux qui n'auraient pas bénéficié, par ailleurs, de subventions suffisantes de l'État.

Source : commission des lois du Sénat, sur le fondement des données publiées par la DGCL et l'Observatoire des finances locales

Votre rapporteur estime donc nécessaire de créer, sur le modèle de l'actuelle commission d'élus compétente au sujet de la DETR, une commission départementale des investissements locaux compétente à la fois au sujet de la DETR et de la DSIL, et composée de représentants des maires et des présidents d'EPCI, du président du conseil départemental ou de son représentant, ainsi que de deux députés et deux sénateurs élus dans le département. L'ensemble des parlementaires du département pourraient assister à ses réunions. Cette commission des investissements locaux serait chargée de fixer chaque année les catégories d'opérations prioritaires et les taux minimaux et maximaux de subvention applicables à chacune d'elles. La liste arrêtée par le préfet des opérations à subventionner devrait être adressée à ses membres, et la commission serait saisie pour avis des projets excédant 100 000 euros.

En outre, dans un souci de transparence, la liste des opérations subventionnées et les avis de la commission devraient être rendus publics sur le site internet de la préfecture.

Votre commission des lois a adopté en ce sens l'amendement n° II-85 de son rapporteur, mentionné ci-dessus. Il s'agit là d' une réponse partielle, mais indispensable au sentiment de dépossession exprimé par nombre d'élus locaux .


* 23 Pour mémoire, l'épargne brute des collectivités territoriales correspond à l'excédent de leurs recettes réelles de fonctionnement sur leurs dépenses réelles de fonctionnement, reversé à la section d'investissement de leur budget.

* 24 Pour de plus amples développements sur les mesures relatives aux finances locales prévues par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, voir ci-dessous, p. 31 sqq .

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