Avis n° 140 (2020-2021) de M. Olivier CIGOLOTTI et Mme Michelle GRÉAUME , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 19 novembre 2020

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N° 140

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 novembre 2020

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021 ,

TOME VI

DÉFENSE :

Préparation et emploi des forces (Programme 178)

Par M. Olivier CIGOLOTTI et Mme Michelle GRÉAUME,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon, président ; MM. Pascal Allizard, Olivier Cadic, Olivier Cigolotti, Robert del Picchia, André Gattolin, Guillaume Gontard, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean-Marc Todeschini, vice-présidents ; Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Philippe Paul, Hugues Saury, secrétaires ; MM. François Bonneau, Gilbert Bouchet, Mme Marie-Arlette Carlotti, MM. Alain Cazabonne, Pierre Charon, Édouard Courtial, Yves Détraigne, Mme Nicole Duranton, MM. Philippe Folliot, Bernard Fournier, Mme Sylvie Goy-Chavent, M. Jean-Pierre Grand, Mme Michelle Gréaume, MM. André Guiol, Ludovic Haye, Alain Houpert, Mme Gisèle Jourda, MM. Alain Joyandet, Jean-Louis Lagourgue, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Panunzi, Gérard Poadja, Mme Isabelle Raimond-Pavero, MM. Stéphane Ravier, Bruno Sido, Rachid Temal, Mickaël Vallet, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Richard Yung.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 3360 , 3398 , 3399 , 3400 , 3403 , 3404 , 3459 , 3465 , 3488 et T.A. 500

Sénat : 137 et 138 à 144 (2020-2021)

ACTIVITÉ OPÉRATIONNELLE, ENTRAÎNEMENT ET SOUTIEN : LES ENJEUX DE L'ACTUALISATION DE LA LOI DE PROGRAMMATION MILITAIRE

Les crédits de paiement du programme augmentent de 333,4 millions d'euros, soit 3,3 %. La progression des autorisations d'engagement (AE) est bien supérieure, soit 17,1 % par rapport à 2020.

Ces efforts budgétaires produisent-ils les effets attendus pour permettre aux armées de remplir pleinement leurs contrats opérationnels ? Observe-t-on la remontée de la préparation et de l'activité opérationnelles ? Les crédits alloués à l'entretien programmé du matériel (EPM) sont-ils à la hauteur des ambitions affichées ? Les services de soutien, durement éprouvés par les attritions budgétaires des précédentes périodes de programmation sont-ils en mesure de maintenir le haut niveau d'engagement attendu dans un contexte où le durcissement des conflits est envisagé ?

C'est à ces questions que répond le rapport pour avis de la commission des affaires étrangères et de la défense.

I. LA SITUATION PRÉOCCUPANTE DE L'ACTIVITÉ OPÉRATIONNELLE

L'activité opérationnelle des forces est évaluée en fonction des normes partagées par les armées occidentales de même standard (soit les normes OTAN). Ces normes sont une référence en termes de savoir-faire , une exigence pour l'intégration de nos moyens nationaux en coalition, c'est-à-dire leur interopérabilité (tant dans le cadre des exercices internationaux, que dans le cadre de déploiements sur les terrains d'opération) et une référence pour la sécurité de nos forces en opération, ce qui explique l'attention que leur porte la commission .

Alors que les crédits du programme 178 augmentent, l'activité opérationnelle reste inférieure aux objectifs fixés, de près de 10 %, et la situation se détériore pour 4 indicateurs d'activité opérationnelle comme l'illustre le tableau suivant.

Progression des crédits en 2021

Ecart entre normes OTAN et l'activité opérationnelle

Indicateurs d'activité en baisse

L'amélioration de l'activité opérationnelle n'apparaît pas comme une priorité du budget du programme 178. Les crédits de paiement augmentent de 333,4 millions d'euros pour s'établir à 10,33 Md€ en 2021. Il ne s'agit pas là d'un effet de périmètre puisqu'en 2021, pour la première fois depuis 2017, aucune augmentation de la budgétisation initiale des opérations extérieures (OPEX) n'est prévue (Ce sont donc 820 millions d'euros qui seront consacrés en 2021 aux OPEX, auxquels s'ajoutent 30 millions d'euros liés aux surcoûts des opérations intérieures, distinction souhaitée par la CAED afin d'améliorer la lisibilité des efforts budgétaires). La progression des autorisations d'engagement (AE) est bien supérieure, soit 2,8 Md€ supplémentaires en 2021. Elle s'inscrit dans une tendance de moyen terme qui a vu les AE passer de 8,8 Md€ en 2018 à 19 Md€ en 2021 dans le cadre de la mise en oeuvre de la nouvelle politique contractuelle de l'entretien programmé du matériel (EPM), dite de « verticalisation » des contrats d'EPM.

La priorité est ainsi donnée à l'EPM , qui bénéficie de 39 %, soit 4,12 Md€. Un lien financier existe entre l'EPM et l'activité opérationnelle. L'EPM doit produire un taux de disponibilité des équipements majeurs des forces permettant un niveau d'entraînement , d'activité opérationnelle, satisfaisant.

Or, le tableau suivant montre que 4 des indicateurs d'activité opérationnelle devraient diminuer entre 2020 et 2021, et que sur les 14 indicateurs retenus pour les trois armées, un seul d'entre eux devrait être conforme, en 2021, à la norme OTAN. Il s'agit du nombre d'heure de vols des pilotes de chasse de la marine. Ce bon résultat soit toutefois être nuancé, puisque ces mêmes pilotes n'obtiendraient pas le nombre d'heure de vols qualifiés d'appontage de nuit.

Niveau de réalisation des activités et de l'entraînement

Source : CAED, à partir des réponses au questionnaire budgétaire et du PAP

Pour l'armée de terre, depuis le déploiement de Sentinelle, la cible de 90 jours de préparation opérationnelle par militaire n'a plus été atteinte. Réduite à 72 en 2016, elle est remontée à 81 jours en 2017 mais aucun progrès n'a été constaté en 2018, 2019 et 2020. Cette stagnation perdurera encore en 2021. L'indisponibilité des équipements, la remontée en puissance de la force opérationnelle terrestre (FOT), l'opération Sentinelle et les renoncements qu'elle a impliqués, ainsi que le nombre élevé d'OPEX expliquent en grande partie les difficultés des armées à atteindre le niveau de réalisation des activités et d'entraînement prévu.

Les résultats obtenus dépendent également des taux de disponibilité des équipements, présentés dans le tableau suivant.

Pour les cinq parcs majeurs de l'armée de terre (chars Leclerc et AMX 10 RC, VBCI, VAB, CAESAR), le taux d'entraînement des équipages s'élève à 54 % en 2019. Il est inférieur aux 57 % initialement prévus, du fait d'une disponibilité globale réduite.

Dédiés à l'EPM

Indicateurs de disponibilité inférieurs à la cible

Indicateurs de disponibilité en baisse

Disponibilité technique opérationnelle des équipements
(en pourcentage des contrats opérationnels)

Source : CAED, à partir des réponses au questionnaire budgétaire et du PAP

Soumis à de nombreuses obsolescences et à une rénovation, la disponibilité technique des chars Leclerc est revue à la baisse en 2020 et 2021. Selon les informations communiquées, une feuille de route identifie les actions à mener pour pérenniser le parc et améliorer la disponibilité à compter de 2023-2024. Pour les VBCI, la chute de la DTO observée à partir de 2018, est due à un emploi intensif du parc en OPEX dans l'environnement particulièrement abrasif de la bande sahélo-saharienne, et à des tensions persistantes sur l'approvisionnement. L'anticipation de commandes de rechanges fin 2019 et début 2020 produit une remontée de la disponibilité technique.

Au cours des auditions menées par Olivier Cigolotti et Michèle Gréaume, co-rapporteurs, les cas de disponibilité insuffisante des équipements de l'armée de terre ont montré qu' une grande vigilance doit être portée sur les capacités industrielles des acteurs en charge de la maintenance, la résilience et la persistance des chaînes d'entretien des équipements ainsi que la capacité de montée en puissance de ces chaînes et des sous-traitants pour faire face aux besoins des armées.

Le niveau d'activité aéroterrestre pose la même question des capacités des industriels en charge de l'EPM. En effet, en progression par rapport à 2018, il reste inférieur à l'objectif fixé en raison d'une performance insuffisante du niveau de soutien industriel (NSI), grevant de 10% les HdV sur Puma et Tigre. L'activité aérienne a connu une hausse en 2020, mais le seuil d'activité financé en métropole pour 2021 a été abaissé à un niveau plancher de 140h pour notamment permettre de répondre aux hausses des coûts de maintien en condition opérationnelle (MCO) des flottes Tigre, Cougar et Caracal suite à la mise en place des marchés de verticalisation .

Pour la marine, la disponibilité des flottes de patrouilleurs de haute mer et des chasseurs de mines tripartite tend à diminuer , essentiellement en raison de leur vétusté, et réduit l'activité opérationnelle malgré les bons résultats des bâtiments de soutien et d'assistance métropolitain et outre-mer (BSAM, BSAOM). Pour l'aéronautique navale, certains niveaux de qualification progressent (chasse, hélicoptères notamment), en partie grâce aux détachements en mission et aux exercices particulièrement qualifiants (tels que la période d'entraînement aéronaval- PEAN). En revanche, le maintien des savoir-faire dans le domaine anti sous-marin notamment nécessite une attention particulière .

Pour l'armée de l'air et de l'espace , on note un déficit de formation des plus jeunes équipages , non projetés faute d'être qualifiés, alors que 25 % de l'activité aérienne des unités est réalisée en opérations. L'activité moyenne des équipages de transport est inférieure de 16 points aux prévisions actualisées. La disponibilité réduite des flottes vieillissantes (C130 H) n'étant pas encore compensée par la montée en puissance des nouveaux appareils, notamment de l'A400M. L'activité moyenne des pilotes d'hélicoptères est en deçà des prévisions du fait de la vétusté de la flotte Puma et des difficultés rencontrées par le soutien industriel pour le Caracal . Pour le Caracal, la sortie de la période des chantiers de rénovation et la mise en place d'un marché, notifié en novembre 2019 (marché « CHeLEM »), avec engagement forfaitaire de durée des opérations de maintenance programmée ont permis une remontée progressive de la disponibilité à compter de 2020.

Lors des auditions de la commission et des rapporteurs, il est apparu que chacun se réfère à des trajectoires d'évolution de l'activité opérationnelle des forces et de la disponibilité technique opérationnelle des équipements qui ne se dévoilent au Parlement qu'année après année, sous forme de « cible » des indicateurs de performance du projet de loi de finances examiné . Il est donc très difficile d'apprécier si les moyens mis à disposition et notamment l'évolution des crédits dédiés à l'EPM et au MCO sont adaptés aux efforts à produire pour atteindre les objectifs d'amélioration des indicateurs d'activité et de disponibilité.

Lors de l'examen de la LPM en cours d'exécution, deux dispositions ont été votées, à l'initiative de la commission, qui devraient améliorer la lisibilité de l'efficacité des efforts budgétaires consentis en faveur de l'EPM.

Des objectifs annuels de progression de l'activité

opérationnelle et de la DTO doivent être fixés

Mesures prévues en LPM pour la fin de la période de programmation

par la commission

Un bilan de la remontée de la préparation

opérationnelle doit être présenté lors

de l'actualisation de la LPM

En l'état, la situation de l'activité opérationnelle et de la disponibilité technique opérationnelle n'est pas satisfaisante , et le choix de repousser en 2025 la remontée de l'activité opérationnelle, en qualité et en quantité, à 100 % des normes d'activité de l'OTAN n'est plus compatible avec le constat partagé de multiplications des tensions et des affrontements et de durcissement rapide des conflits. La LPM consacre un effort en hausse de 17 % au soutien de la préparation et de l'activité opérationnelles , effort sans doute insuffisant qui devra être renforcé dans le cadre du projet de loi d'actualisation de la LPM en 2021. Aucun autre mode de révision de la LPM ne peut être envisagé au regard des enjeux.

II. DES EFFORTS SUPPLÉMENTAIRES À PRÉVOIR EN MATIÈRE D'ENTRETIEN PROGRAMMÉ DU MATÉRIEL

L'effort significatif consacré à l'EPM sur la durée de la LPM, doit permettre la remontée des niveaux d'entraînement, il doit également permettre de faire face à un haut niveau d'engagement opérationnel tant quantitatif que qualitatif , au vieillissement des matériels suite aux décalages successifs des programmes d'armement (malgré le rattrapage entamé depuis la période de programmation en cours, cette situation est appelé à durer au-delà de 2030), à la plus grande modernité et technicité des nouveaux équipements , plus complexes, plus efficaces et parfois plus chers à entretenir (les coûts de maintenance des matériels neufs sont élevés en début d'utilisation, avant de baisser lorsque le rythme de maintenance est éprouvé puis de remontée lorsque les matériels approchent de leur seuil d'obsolescence), et enfin à une plus forte exigence de disponibilité , appelant des stratégies de soutien rénovées.

Le graphique suivant montre que l'EPM doit permettre à court terme d'atteindre un niveau suffisant d'activité opérationnelle, mais aussi de préserver la capacité opérationnelle de long terme , en permettant la constitution de stocks, le financement du MCO, marchés verticalisés compris afin que les contrats opérationnels puissent être exécutés.

Préservation de la capacité opérationnelle dans le temps, Résilience, Autonomie stratégique

Stocks, contrat opérationnel, plafonds contractuels, marchés verticalisés, outillage

Activité opérationnelle

L'effort financier pour atteindre ces objectifs s'élève à 22 Md€ sur la période 2019-23 et 35 Md€ sur la période de la LPM 2019-25. Ceci représente un effort financier supplémentaire d'un milliard en moyenne annuelle par rapport à la précédente LPM.

Pour respecter les objectifs définis, en supposant un effort identique pendant chaque annuité de la LPM, les crédits consacrés à l'EPM devraient s'établir à 4,4 Md€ par an . Les montants inscrits en LFI en 2019, 2020 et 2021 sont inférieurs à l'objectif défini en LPM : soit 4,2 Mds en 2019 et 4 Mds en 2020 et 4,1 Mds en 2021. Les 900 millions d'euros qui n'ont pas été consacrés aux cours des trois premières années d'exécution de la LPM à l'EPM devront s'ajouter aux annuités suivantes de la LPM.

D'autres facteurs s'ajoutent encore pour grever les crédits d'EPM. Certains sont conjoncturels, tels que le coût de réparation de la Perle pour 70 millions d'euros (couvrant d'une part le coût du chantier consistant à remplacer la proue de La Perle par celle du Saphir, désarmé en 2019 et en attente d'être démantelé, et d'autre part la prolongation du Rubis) et le surcoût lié à l'utilisation d'aéronefs vieillissants du fait de la livraison des 12 Rafale destinés à la Grèce . D'autres facteurs sont structurels, tels la multiplication des OPEX, la surutilisation des équipements dans des conditions météorologiques très abrasives, ou découlent de la mise en oeuvre de la politique de verticalisation des contrats d'EPM, notamment dans le domaine aéronautique.

La Direction de la maintenance aéronautique poursuit la mise en oeuvre de la politique de verticalisation de l'entretien des aéronefs.

Principaux marchés de maintien en condition opérationnelle verticalisés

Fennec de l'armée de terre (18 appareils, janvier 2019, HeliDax). En 2019, 1 000 heures de vol supplémentaires ont été mises en oeuvre. En 2020, l'activité devrait doubler par rapport à 2018. À volume financier comparable, l'activité est supérieure de 40%. Les 30 ETP armée de Terre qui travaillaient sur l'entretien de la flotte FENNEC ont été réaffectés au soutien des Puma, permettant une hausse de la disponibilité de cette flotte de 7%.

Rafale, le contrat RAVEL (avril 2019, DASSAULT AVIATION) verticalise le soutien des cellules et des équipements (hors moteurs) et a pour objectif d'offrir la capacité d'activité aérienne (380 000 HdV sur la période 2019-2028) à l'armée de l'air et à la marine nationale. Les premiers résultats sont encourageants avec la baisse du nombre d'appareils en attente de décision (passant de 10 à 2 pour les Rafale de l'armée de l'Air, entre avril et décembre 2019, et de 6 à 1 pour les Rafale Marine, entre avril 2019 et juin 2020).

COUGAR, CARACAL et EC225, le contrat CHELEM (novembre 2019, AIRBUS HELICOPTERS et HELI-UNION) réduit le nombre de contrats de soutien de 20 à 5. Le rythme d'activité des Cougar a doublé par rapport à la situation antérieure, atteignant désormais 300 heures de vol par an. Pour les questions techniques dites de routine, le délai d'attente est passé de deux mois à jusqu'à moins de dix jours.

A400M, le contrat Global Support : guichet pour la fourniture de pièces à l'AIA de Clermont-Ferrand et plateau permanent à Orléans ont accru la disponibilité des A400M passant de 3 appareils en 2017 à une moyenne de 6 appareils aujourd'hui, avec des pics ponctuels à 11 (participation à Résilience).

Dauphin et de Panther de la marine nationale, le contrat HéliOSS (Hélicoptère Optimisation du soutien avec le SIAé, mai 2020) augmentera la disponibilité de plus de 20 %

Marchés verticalisés prévus en 2021 : sont notamment prévues la verticalisation de l'entretien des ATL2 et C160 (moteur Tyne), Fennec AA, Falcon 50 Ph2, Falcon 200, Casa, Système de Commandement et de Conduite des Opérations Aérospatiales, Matériels d'environnement et M2000.

Des auditions menées et documents communiqués, il ressort que le coût horaire de maintenance des aéronefs bénéficiant d'un contrat verticalisé n'augmente pas sur la durée du contrat .

La verticalisation et la globalisation des contrats de MCO engendrent un transfert de risques vers l'industriel et une diminution des interfaces étatiques, une plus grande responsabilité du maître d'oeuvre industriel sur un périmètre élargi permettant de fixer des exigences de haut niveau. Dans le même temps, ce type de contrat permet aux industriels de disposer d'une visibilité sur le long terme leur donnant la possibilité d'optimiser leur logique industrielle (dont découlent optimisation et réduction de coûts dans l'absolu) et in fine d'améliorer durablement sa performance technique et financière.

Toutefois, cette performance attendue à l'échelle du contrat verticalisé, dont la durée est rarement inférieure à 10 ans, semble se traduire dans un premier temps par des surcoûts : mise en oeuvre de nouvelles chaînes industrielles d'EPM, remise à niveau des stocks de pièces de rechange étatiques, transférés lors de la mise en oeuvre du contrat verticalisé à l'industriel, etc.

2 Mds supplémentaires pour l'EPM en actualisation ?

Aux causes qui avaient conduit à l'inscription de 500 M€ supplémentaires pour les deux dernières annuités de la précédente LPM, se sont ajoutées le durcissement prévisible des engagements, la nécessaire reconstitution des stocks de pièces de rechange et de munitions, la réparation du Perle, le surcoût d'exploitation d'aéronefs vieillissants quand le Rafale connait de récents succès à l'export. L'EPM pour répondre à ces défis devra bénéficier d'au moins 2 Mds supplémentaires lors de l'actualisation de la LPM !

III. LES SERVICES DE SOUTIEN : UN NÉCESSAIRE RENFORCEMENT

Le modèle de soutien , réformé pour accentuer son caractère interarmées il y a une dizaine d'années, a souffert du double effet de la révision générale des politiques publiques et de la LPM 2014-2019, portant forte attritions des ressources humaines des services de soutien . Or la pandémie a rappelé que la Résilience (nom donné à l'opération associant les forces armées à l'effort de lutte contre la pandémie) de la nation passait par l'engagement de ses forces armées , lequel dépend largement de la capacité de ses services de soutien à faire face, dans l'urgence, aux objectifs assignés 1 ( * ) .

Il ne s'agit pas de remettre en cause le modèle de soutien déployé mais de veiller à l'adéquation des moyens aux impératifs d'efficacité pesant sur les services de soutien dans un contexte de plus en plus exigeant, comprenant l'accroissement de la population soutenue avec la remontée de la force opérationnelle terrestre (FOT), le réinvestissement du territoire national avec Sentinelle et Résilience, et la multiplicité des théâtres extérieurs.

Entre 2008 et 2018, les effectifs du service du commissariat des armées (SCA) sont passés de 34 000 à 25 000 personnes, soit une réduction de 8 500 postes . Ces « effectifs soutenants » ont diminué plus vite que les effectifs soutenus, la remontée en puissance de la force opérationnelle terrestre a d'ailleurs marqué un tournant, les effectifs soutenus augmentant de nouveau alors que les effectifs soutenants continuaient de diminuer.

Alors que ses effectifs ont diminué de 30 % , dont 100 personnels ces 6 dernières années, l'arrêt de la déflation des personnels a finalement été décidé pour la fin de la période de programmation précédente. Pour autant le schéma d'emploi de 2019 à 2023 prévoit encore 150 suppressions de postes . Un suivi attentif de l'adéquation entre les ressources humaines et les objectifs du SCA devra donc être mené tout au long de la LPM afin de s'assurer que la direction centrale n'est pas de nouveau confrontée à une pénurie de moyens humains.

Source : site internet du Minarm

Le projet « SCA 22 » repose sur deux objectifs : d'une part renforcer d'une part le soutien de proximité des unités (principe de « bascule vers l'avant » des ressources), et d'autre part moderniser et améliorer la qualité du soutien, notamment par une digitalisation accrue et le recours maitrisé à des prestataires extérieurs. L'ambition de « SCA 22 » est de rapprocher le soutenu du soutenant. Le Commissariat met ainsi en place des guichets uniques nouvelle génération et des espaces ATLAS (Accès en Tout temps et en tout Lieu Au Soutien). Ils rassemblent dans une pièce un maximum de prestation du commissariat, de l'institution de gestion sociale des armées (IGESA), mais aussi les prestations des services municipaux et de la CAF. Placés près de lieux de restauration, regroupant 10 à 15 personnes, ces espaces traitent 90 % des demandes adressées en premier contact qu'il s'agisse d'habillement, de carte SNCF, de loisirs ou de problématiques sociales. Ils désengorgent les groupes de soutien des bases. Ce sont 200 espaces ATLAS qui devraient être déployés à terme (2021).

Durant la pandémie , le SCA a renforcé ses actions en faveur de la digitalisation des procédures pour participer à la diminution de la circulation du virus. Pendant le déploiement de l'élément militaire de réanimation (EMR) à Mulhouse, les groupements de soutien des bases de défense (GSBdD) de Colmar et Strasbourg ainsi que la plate-forme commissariat (PFC) de Metz ont assuré le soutien des personnels du service de santé des armées (SSA) et du régiment médical (RMED).

Les efforts de rationalisation des effectifs et des crédits se poursuivent, notamment dans la fonction « restauration-loisirs ». Un premier programme expérimental d'externalisation, sur la période 2009 - 2015, a permis une économie estimée à 11% du coût du fonctionnement annuel en régie (la mise en oeuvre de ce programme a été confiée à l'économat des armées (Edda)). En 2016, une nouvelle phase d'externalisation a été lancée amenant en 2020, le taux d'externalisation de la fonction « restauration » à près de 20 % et à une forte diminution des effectifs de la filière (environ 1 254 ETP entre 2014 et 2019). Compte tenu des difficultés structurelles de la filière « restauration » (taux de départ à la retraite élevé, parc de matériels et infrastructures vétustes) l'économat des armées (EdA) a reçu concession de 73 sites de restauration sur la période 2020-2025, à raison de 9 à 13 sites par an, parmi ceux qui ne sont pas strictement nécessaires au socle capacitaire et à la résilience des armées . Le contrat de concession a été signé en décembre 2019. Neuf sites ont été concédés entre avril et juillet 2020, treize le seront en 2021. Le volume des effectifs concernés par l'externalisation est de 1 800 ETP environ, dont 47 % de personnels civils (leur sont proposé des départs à la retraite, le reclassement sur la base du volontariat dans les sites maintenus en régie).

L'enjeu RH du SCA : l'adéquation des compétences aux besoins

Un levier d'action important d'amélioration de l'efficience du SCA concerne la gestion des ressources humaines. Il conviendrait de chercher à bâtir des parcours et des carrières permettant la professionnalisation des filières. À ce jour, le directeur du SCA doit faire face à un défi majeur : le niveau de qualification des personnels affectés, souvent d'un grade inférieur aux profils de poste.

Durant la précédente LPM, le SSA a perdu 8 % de ses effectifs, soit 1 600 personnels . La remontée de la FOT et le niveau élevé de l'engagement de la France sur les théâtres extérieurs, supérieur aux objectifs de construction de la LPM et du modèle SSA 2020, ont mécaniquement induit un besoin supplémentaire de soutien par le SSA. La LPM 2019-2025 s'est concrétisée par l'arrêt de la déflation des effectifs du SSA dès 2019 et prévoit leur stabilisation jusqu'en 2023, puis leur remontée modérée au-delà .

Source : site internet du Minarm

La mise en oeuvre du nouveau modèle hospitalier militaire sera l'un des axes de la stratégie SSA 2030 en cours de définition . L'un de ses enjeux essentiels est la redéfinition des perspectives d'insertion du parc hospitalier militaire à l'offre publique de soins à l'aune les leçons tirées de la pandémie . Les huit hôpitaux d'instruction des armées (HIA) (HIA Bégin à Saint-Mandé, HIA Clermont-Tonnerre à Brest, HIA Desgenettes à Lyon, HIA Laveran à Marseille, HIA Legouest à Metz, HIA Percy à Clamart, HIA Robert Picqué à Bordeaux et HIA Sainte-Anne à Toulon), ouverts à tous les assurés sociaux sont assimilés par le ministère de la Santé à des centres hospitaliers et universitaires . Ces hôpitaux, établissements polyvalents de soins pour adultes, sont soumis aux procédures de certification de la santé publique et participent à l'offre de soins à l'échelle d'un territoire. Les élus locaux doivent donc être étroitement associés à la définition cette offre de soins .

La difficulté centrale tient à la trop lente remontée en puissance de la médecine des forces . Le service dispose de 700 médecins des forces, il lui en manque une centaine , ce qui conduit à concentrer sur les mêmes personnels la charge de projection du service . Le taux de projection des équipes médicales est supérieur à 100 %, malgré l'apport des réservistes, et il atteint 200 % pour les équipes chirurgicales.

Source : site internet du Minarm

Cette sur-sollicitation du personnel a des conséquences néfastes sur la fidélisation des professionnels de santé militaires. Elle a également un impact notable sur le parcours professionnel du personnel de santé, notamment à travers la difficulté de satisfaire à l'obligation de développement professionnel continu. Elle pèse sur les perspectives d'évolution des effectifs du SSA.

Celles-ci restent préoccupantes . L'écart entre le plafond ministériel d'emplois autorisés et l'effectif moyen réalisés pour le Service de santé des armées montre qu'il manque en 2019, selon le périmètre retenu entre 246 et 241 personnes.

État des effectifs du personnel géré par le SSA en 2019

Plafond ministériel des emplois autorisés

Effectif moyen réalisé

ECART

Militaires

7 721

7 589

- 132

Civils

2 545

2 431

- 114

Total

10 266

10 020

- 246

État des postes et de leur réalisation concernant le personnel employé par le SSA et comprenant les personnels fourni au SSA par les armées, les services et la gendarmerie pour les missions de soutien du périmètre de l'état-major des armées en 2019

Plafond ministériel des emplois autorisés

Effectif terminal

ECART

Militaires

10 260

9 894

- 366

Civils

4 515

4 640

+ 125

Total

14 775

14 534

- 241

Le chiffre de « 100 médecins manquants » correspond à un effectif lissé qui évolue en cours de gestion au gré des départs, des mutations et des indisponibilités. Les priorisations sont revues régulièrement pour satisfaire aussi bien que possible les besoins des forces armées , en fonction des activités effectives et des possibilités de renforcement ponctuelles. En parallèle, le fonctionnement quotidien des centres médicaux des armées est marqué par un accroissement des besoins en expertise médicale d'aptitude et une intensification des activités de soutien des activités à risque, du fait de l'augmentation des effectifs de la FOT et du plan Réserve 2019.

Ces tensions concernent également la composante hospitalière, où certaines spécialités font l'objet d'une attention toute particulière : chirurgie (orthopédique, viscérale, vasculaire, thoracique, urologique, tête et cou), médecine d'urgence en exercice hospitalier, psychiatrie et radiologie. Plusieurs spécialités paramédicales, essentielles à la prise en charge des militaires blessés, se révèlent également sous tension, à l'instar des infirmiers de bloc opératoire, ou encore des masseurs-kinésithérapeutes.

Malgré l'intérêt qu'il suscite auprès de nombreux candidats potentiels, le SSA rencontre des difficultés pour attirer des professionnels de santé sous contrat. Le contexte concurrentiel important vis-à-vis de la santé publique et un déficit chronique dans la santé publique des spécialités d'intérêt pour le SSA, en particulier de médecins généralistes, freinent le recrutement. Fort de ce constat, le SSA exploite tous les leviers à sa portée pour accélérer la dynamique de recrutement. Dans ce cadre, de nombreuses actions sont mises en oeuvre : communication ciblée pour le recrutement, mesures financières (PLS « attractivité » puis « fidélisation », allocation financière spécifique de formation), ouverture de la possibilité de recrutement en cours de 3ème cycle des études médicales.

Il est ainsi prévu d'ouvrir 15 postes d'élèves médecins et 10 postes d'élèves infirmiers supplémentaires chaque année à compter de 2019 au titre de la formation ab initio . De même, la possibilité de recruter dans le corps des internes des hôpitaux des armées des étudiants inscrits en 3 e cycle des études médicales, a été ouverte en 2020. Ce sont 36 postes supplémentaires d'élèves médecins destinés à des étudiants civils déjà inscrits en cursus universitaire qui ont été ouverts par concours à compter de l'année 2019.

Le SSA s'attache à équilibrer ses recrutements initiaux et à maîtriser ses flux de sortie sur les métiers et spécialités sensibles afin de remplir son contrat opérationnel, dans un contexte où la concurrence avec le secteur privé s'est encore accentuée en cette période de « haute intensité sanitaire ». Le recrutement complémentaire de praticiens contractuels est tout de même en nette amélioration. Un bureau de coordination du recrutement a d'ailleurs été créé en 2020.

La crise sanitaire a eu un effet positif inattendu en orientant vers le SSA des réservistes beaucoup plus jeunes qu'habituellement (les réservistes du SSA étaient traditionnellement des personnels retraités, libérés de leurs obligations de service).

Les conclusions du Ségur de la santé vont probablement conduire en 2020 et 2021 à des évolutions statutaires et financières, et donc incidemment exercer un effet sur l'attractivité et la fidélisation du personnel dont il faudra impérativement tenir compte pour maintenir le niveau d'excellence et d'engagement qui caractérise le SSA et dont les forces armées ont besoin, au quotidien, mais aussi pour maintenir leur compétence à « entrer en premier » sur les théâtres d'opération.

Enfin, les recommandations relatives à la vaccination contre la Covid en France ne visent pas les militaires. Pourtant, les militaires embarqués, notamment dans les sous-marins, ou déployés en OPEX, devraient bénéficier de mesures de protection adéquate face à la pandémie. Lors de la préparation de cet avis, aucune décision n'était encore prise sur l'intégration ou non de cette vaccination dans les recommandations vaccinales adressées aux militaires.

Ce sujet fera l'objet d'un suivi très attentif. La commission avait recommandé et obtenu que les militaires déployés fassent l'objet d'un dépistage systématique. Si la vaccination ne devait pas être rendue obligatoire, les mesures sanitaires adéquates pour continuer de faire face à la pandémie devront être définies.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 2 décembre 2020, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, a procédé à l'examen des crédits du programme 178 « Préparation et emploi des forces » de la mission «  Défense ».

M. Olivier Cigolotti, co-rapporteur. - Monsieur le Président, chers collègues, la LPM consacre un effort en hausse de 17 % à la préparation des forces et à l'activité opérationnelles.

Si les crédits d'entretien programmé du matériel, l'EPM, bénéficient de 39 % des crédits du programme, soit 4,12 Md€, l'amélioration de l'activité opérationnelle n'apparaît pas comme une réelle priorité du budget 2021.

Les niveaux d'activité et de disponibilité technique opérationnelle sont en dessous des normes. Leur remontée est trop faible. Les contrats verticalités donnent quant à eux des résultats plutôt satisfaisants. Les détails figurent dans le rapport écrit qui vous a été envoyé hier. J'insisterai donc sur quelques constats qui me semblent devoir attirer notre attention et qui seront l'enjeu de l'actualisation de la LPM.

La situation de l'activité opérationnelle et de la disponibilité technique opérationnelle-DTO n'est pas satisfaisante.

La remontée de l'activité opérationnelle aux normes d'activité de l'OTAN a été repoussée à 2025. En clair cela veut dire que nos soldats ne sont pas assez entrainés par rapport aux standards internationaux, et qu'ils ne le seront pas avant au mieux 2025.

Cela n'est plus compatible avec le constat que nous faisons de la multiplication des tensions et des affrontements et du durcissement rapide des conflits.

Les capacités industrielles des acteurs en charge de la maintenance, la résilience et la persistance des chaînes d'entretien des équipements ainsi que la capacité de montée en puissance de ces chaînes et des sous-traitants associés doivent faire l'objet d'une grande vigilance.

Pour respecter les objectifs définis, et en supposant un effort identique pendant chaque annuité de la LPM, les crédits consacrés à l'entretien programmé du matériel, l'EPM devraient s'établir à 4,4 Md€ par an. Nous n'y sommes pas : ce sont 900 millions d'euros qui manquent aux cours des trois premières années d'exécution de la LPM ; il ne sera de même pour les annuités suivantes. D'autres facteurs s'ajoutent encore pour accroître les besoins en EPM. Certains sont conjoncturels, tels que le coût de réparation de la Perle pour 70 millions d'euros et le surcoût lié à l'utilisation d'aéronefs vieillissants du fait de la livraison des 12 Rafale destinés à la Grèce. D'autres facteurs sont structurels et découlent de la mise en oeuvre de la politique de verticalisation des contrats d'EPM, notamment dans le domaine aéronautique. Ces contrats verticalisés se traduisent paradoxalement dans un premier temps par des surcoûts : mise en oeuvre de nouvelles chaînes industrielles d'EPM, remise à niveau des stocks de pièces de rechange étatiques, transférés lors de la mise en oeuvre du contrat verticalisé à l'industriel.

Tous ces facteurs s'ajoutent aux causes qui avaient conduit à l'inscription de 500 M€ supplémentaires pour les deux dernières annuités de la précédente LPM, notamment la projection de nos troupes sur de multiples théâtres d'OPEX et la sur-exécution des contrats opérationnels. L'EPM pour répondre à ces défis devra bénéficier d'au moins 2 Mds supplémentaires lors de l'actualisation de la LPM !

Mes chers collègues, sous réserve de ces observations et en recommandant une grande vigilance en vue de l'actualisation de la LPM, je vous propose d'adopter les crédits du programme 178.

Mme Michelle Gréaume, co-rapporteure. - Monsieur le Président, chers collègues, le modèle de soutien des forces armées, réformé pour accentuer son caractère interarmées il y a une dizaine d'années, a souffert du double effet de la révision générale des politiques publiques et de la précédente LPM 2014-2019, porteuses de fortes attritions des ressources humaines des services de soutien. Les rapports de la commission ont d'ailleurs estimé qu'il y avait un décalage entre les moyens alloués et l'impératif d'efficacité pesant de façon renouvelée sur les services de soutien dans un contexte de plus en plus exigeant, marqué par l'accroissement de la population soutenue avec la remontée de la force opérationnelle terrestre (FOT), le réinvestissement du territoire national avec Sentinelle et Résilience, la multiplicité des théâtres extérieurs et désormais une haute intensité sanitaire.

S'agissant du commissariat des armées (SCA) dont les effectifs ont diminué de 30 % ces 6 dernières années, l'adéquation entre les ressources humaines et les objectifs poursuivis devra faire l'objet d'un suivi attentif tout au long de la LPM afin de s'assurer que la direction centrale n'est pas de nouveau confrontée à une pénurie de moyens humains, comme ce fut le cas lors de la précédente période de programmation. De même, il conviendrait de bâtir des parcours et des carrières permettant la professionnalisation des filières du SCA. À ce jour, le directeur du SCA doit faire face à un défi majeur : le niveau de qualification des personnels affectés, souvent d'un grade inférieur aux profils de poste.

S'agissant du service de santé des armées, durant la précédente LPM, le SSA a perdu 8 % de ses effectifs, soit 1 600 personnels. La LPM 2019-2025 prévoit la stabilisation des effectifs jusqu'en 2023, puis leur remontée modérée au-delà.

La mise en oeuvre du nouveau modèle hospitalier militaire sera l'un des axes de la stratégie SSA 2030 en cours de définition. Les cartes ont été rebattues par la pandémie. Les 8 hôpitaux d'instruction des armées participent à l'offre de soins à l'échelle d'un territoire. Les élus locaux doivent donc être étroitement associés à la définition cette offre de soins.

La difficulté centrale du SSA tient à la trop lente remontée en puissance de la médecine des forces. Faute d'effectifs suffisants, les mêmes personnels supportent la charge de projection du service. Le taux de projection des équipes médicales est supérieur à 100 %, malgré l'apport des réservistes, et il atteint 200 % pour les équipes chirurgicales. Cette sur-sollicitation a des conséquences néfastes sur la fidélisation des professionnels de santé militaires. Pour faire face aux besoins de recrutement, notamment de praticiens contractuels des mesures sont mises en oeuvre : communication ciblée, mesures financières, recrutement en cours de 3e cycle des études médicales pour 36 postes, ouverture de 15 postes d'élèves médecins et 10 postes d'élèves infirmiers supplémentaires chaque année à compter de 2019 au titre de la formation ab initio. Les conclusions du Ségur de la santé vont peser sur l'attractivité du SSA et devront sans doute être compensées dans le cadre de l'actualisation de la LPM.

Enfin, les recommandations relatives à la vaccination contre la Covid en France ne visent pas les militaires. On ne sait pas si cette vaccination sera intégrée aux recommandations vaccinales adressées aux militaires Pourtant, les militaires embarqués ou déployés en OPEX doivent absolument bénéficier de mesures de protection adéquate face à la pandémie. Ce sujet fera l'objet d'un suivi très attentif. Notre commission avait obtenu le dépistage systématique des militaires déployés, si la vaccination ne devait pas être rendue obligatoire, les mesures sanitaires adéquates pour continuer de faire face à la pandémie devront être définies par le SSA. Je me propose d'interroger le gouvernement en séance à ce sujet.

M. Cédric Perrin. - Serait-il possible de donner des précisions sur la diminution prévue de la disponibilité technique du Charles de Gaulle, à l'horizon 2023 ?

M. Olivier Cigolotti, co-rapporteur. - Une adaptation des hangars de munitions sera à prévoir, à cette échéance, notamment.

À l'issue de sa réunion du 2 décembre 2020, la commission des affaires étrangères de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission Défense.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

En commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Mardi 13 octobre 2020

Mme Florence PARLY , ministre des armées.

Mercredi 14 octobre 2020

Général François LECOINTRE , chef d'état-major des armées.

Mercredi 21 octobre 2020

Général Philippe LAVIGNE , chef d'état-major de l'armée de l'air.

Mercredi 28 octobre 2020

Général Thierry BURKHARD , chef d'état-major de l'armée de terre.

Amiral Pierre VANDIER , chef d'état-major de la marine.

Auditions des rapporteurs :

Mardi 27 octobre 2020

- Etat-major de l'armée de terre : Colonel Jobic LE GOUVELLO DE LA PORTE , Chargé des relations avec le parlement et Colonel Jean-Bruno DESPOUYS , Chef du bureau emploi.

Mardi 10 novembre 2020

- ministère des armées : M. Stéphane PIAT , Directeur central du service du commissariat des armées.

- Etat-major des armées, division « soutien de l'activité » : Contre-amiral Lionel MATHIEU , Chef de la division, Colonel Loïc BOUÉ , Officier, Colonel Alexis-Emmanuel LAPACHERIE , Officier.

Mardi 17 novembre 2020

Général de corps d'armée Hervé GOMART , major général de l'armée de terre

Mme  Monique  LEGRAND-LARROCHE , directrice de la maintenance aéronautique au ministère des armées

Vendredi 27 novembre 2020

- Service de santé des armées : Directeur central et Médecin général des armées Philippe ROUANET de BERCHOUX , directeur, Médecin chef des services Eric VALADE , chef du bureau « Réseaux et Expertises », Pharmacien général Gilles GRELAUD , chef du département de gestion des ressources humaines et M. Franck CAPINI , sous-directeur achats-finances.


* 1 Voir le rapport d'information n° 501 (2019-2020) du 10 juin 2020 - par M. Jean-Marie BOCKEL et Mme Christine PRUNAUD sur le suivi de l'action du service de santé des armées pendant la crise sanitaire.

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