B. UNE LOI QUI NE S'APPUIE PAS SUFFISAMMENT SUR LE DYNAMISME DES ENTREPRISES

1. Les entreprises sont réduites aux pollutions qu'elles causent, tandis que leur potentiel d'innovation est tout simplement éludé

Le projet de loi « Climat et résilience » prend le parti de se focaliser davantage sur les externalités négatives que sur les externalités positives.

Certaines mesures semblent avoir été proposées dans une logique purement punitive, tant elles semblent dépourvues de lien avec les objectifs recherchés. Par exemple, l'interdiction de la publicité sur les seuls produits pétroliers est à la fois excessive et insignifiante puisque l'essence et le gazole sont des produits de première nécessité, pour lesquels la demande est très peu élastique. La réglementation de la publicité à l'intérieur des vitrines est une atteinte à la propriété privée qui, là encore, semble avoir peu de rapport avec l'objectif du projet de loi.

Symbole de cette loi, le « délit d'écocide » introduit une logique punitive pour les entreprises, alors qu'il faudrait plutôt les responsabiliser en les incitant à réparer les dommages qu'elles causent.

2. Les incitations financières contenues dans le projet de loi ne permettent pas une réorientation significative de notre appareil productif

La fiscalité environnementale et les investissements verts relèvent de la loi de finances. Toutefois, alors que le fait générateur de ce projet de loi a été le relèvement non concerté de la « taxe carbone », mettre au point une trajectoire carbone ambitieuse compensée par des mesures de justice climatique, semblait prioritaire par rapport aux nombreuses dispositions anecdotiques du projet de loi.

De très nombreux objectifs sont fixés par ce projet de loi sans aucune incitation ni soutien public pour les atteindre. Pis, certaines dispositions risquent, à l'instar de la RE 2020 (réglementation thermique des bâtiments neufs) pour la mobilisation des matériaux biosourcés, d'être confrontés à l'absence de filière suffisamment préparée pour matérialiser les engagements pris.

C. LE CENTRALISME DE NOMBREUSES DISPOSITIONS DU PROJET DE LOI TRAHIT UN MANQUE DE CONFIANCE DANS LES RESSOURCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. Les collectivités territoriales sont inégalement mises à contribution alors qu'elles ne disposent pas toutes de l'effet de levier suffisant

L'articulation de ce texte avec le projet de loi « 4D », qui promeut la différenciation territoriale, ne semble pas avoir fait l'objet de suffisamment de soin.

Le texte suit en effet une approche centralisatrice, coercitive et descendante dans plusieurs domaines, notamment en matière d'urbanisme. Ainsi, l'inscription d'objectifs relatifs à l'artificialisation des sols fixés par décret dans les SRADDET, qui relèvent de la compétence des régions, impose une contrainte supplémentaire aux documents locaux d'urbanisme.

Quand de nouvelles compétences sont transférées aux collectivités territoriales, c'est généralement sans compensation des charges nouvelles par l'État. Ainsi de la mise en place, au sein de chaque EPCI, d'un service public de la performance énergétique de l'habitat (SPPEH) ou de nouvelles contraintes pour les régisseurs des cantines scolaires. La liberté tarifaire des collectivités est par ailleurs mise à mal par l'imposition d'une tarification attractive des trains régionaux, sans compensation.

Les rares mesures décentralisatrices, comme la municipalisation du règlement local de publicité (RLP), qui n'était pas réclamée par les intéressés, s'apparentent à de fausses bonnes idées.

Le projet de loi embrasse mal la diversité des territoires, et accroît même certaines fractures territoriales. C'est par exemple le cas des zones à faible émission (ZFE), qui risquent d'exclure des métropoles les habitants des zones périurbaines et rurales, ou de l'indexation du rythme d'artificialisation des sols sur les trajectoires passées, qui pénalisera les communes les plus vertueuses. Sans accompagnement, elle risque également d'éloigner le tissu artisanal.

2. Par contraste, le Gouvernement s'exonère pour partie de ses responsabilités dans la transition écologique

Selon l'étude d'impact du projet de loi « Climat-résilience », celui-ci permettrait de sécuriser seulement entre la moitié et deux tiers des 40 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030 par rapport à 1990 prévus par la SNBC. Pour atteindre la cible 2030, le rythme de réduction des émissions de GES devra en moyenne tripler dans la décennie 2020-2030 par rapport à son rythme moyen des trente dernières années. Le Haut Conseil pour le climat (HCC) a regretté que le Gouvernement préfère reporter les efforts à la deuxième moitié de la décennie au lieu de respecter les engagements de son budget carbone 2019-2023.

Le HCC a cependant salué les nombreuses dispositions transversales du projet de loi portant sur la gouvernance et le pilotage, propices à une plus grande cohérence de l'action en matière climatique, tout en soulignant qu'elles nécessitaient pour être suivies d'effets, des mesures concrètes et des financements. Le HCC a déploré que les feuilles de route ministérielles auxquelles le Gouvernement s'était engagé n'aient pas été publiées.

Plusieurs dispositions du projet de loi tendent cependant à améliorer la contribution climatique de la commande publique et vont dans le bon sens.

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