B. UN FOISONNEMENT INSTITUTIONNEL PEU PROPICE À L'EFFICACITÉ

On ne peut manquer d'être frappé par la multiplicité des organismes français compétents en matière de francophonie et de politique linguistique.


• Créé par décret du Président de la République, le 12 mars 1984, le Haut conseil de la francophonie occupe une place originale au sein des structures de la francophonie.

Organisme de droit public, il est présidé par le Président de la République, et ne relève d'aucune tutelle ministérielle.

Il est composé de trente-quatre personnalités, françaises et étrangères, nommées par le Président. S'y côtoient actuellement, les anciens présidents libanais Charles Hélou et sénégalais Léopold Sédar Senghor, nommé récemment président d'honneur du Haut conseil ; les anciens ministres Cu Huy Can, Salif Alassane N'Diaye et Alain Decaux ; le secrétaire d'État chargé de la francophonie, Mme Margie Sudre ; des personnalités occupant de hautes responsabilités dans leur pays ou dans les instances internationales, des représentants de la société civile francophone dans les secteurs des arts, de la communication, des sciences et de la médecine, de la recherche universitaire.

Votre rapporteur se félicite enfin de la récente nomination au poste de vice-président du Haut conseil d'une personnalité éminente, M. Maurice Schumann, ancien ministre et membre de l'Académie française, qui saura, à n'en pas douter, jouer un rôle déterminant au sein de cette institution.

La tâche assignée au Haut conseil est de mener un travail d'information et de recherche sur tous les aspects de la francophonie, et de formuler des propositions ainsi que des recommandations à l'intention de toutes les institutions françaises concernées.

Il s'en acquitte essentiellement par la voie de deux moyens :

- la publication d'un rapport annuel sur l'état de la francophonie dans le monde, qui fait du Haut conseil un observatoire averti de la francophonie internationale sous ses différents aspects ;

- l'organisation d'une session plénière annuelle au cours de laquelle sont analysées des évolutions, identifiées des urgences, et formulées des propositions sur les orientations de la politique .

THÈMES DES SESSIONS PLÉNIÈRES ANNUELLES DEPUIS 1984

1984 : « Chercher, créer et communiquer en français »

1985 : « Inventer le français »

« Enseigner le français et enseigner en français dans le monde »

1986 : « La Francophonie et l'opinion publique »

1988  : « L'espace économique francophone »

1989 : « La pluralité des langues en Francophonie »

1990 : « La Francophonie dans la coopération internationale »

1991 : « Monde francophone et Francophonie dans le monde : créations et

échanges »

1992 : « La Francophonie dans la communauté scientifique mondiale, la

responsabilité partagée des politiques et des scientifiques ».

1993 : « Jeunesse et Francophonie »

1994 : « Francophonie et Europe ».

1995 : « La Francophonie et les sociétés africaines ».

En 1996, la subvention accordée au Haut conseil de la francophonie sur le chapitre 37-94 (article 10) du budget du ministère des affaires étrangères sera reconduite, pour la deuxième année consécutive : elle atteint 1,46 million de francs. Plus de la moitié de cette subvention est consacrée à l'organisation de la session annuelle. Le Haut conseil couvre par ailleurs la moitié des dépenses liées à la publication de son rapport annuel grâce à la constitution d'un avoir auprès de la Documentation française, alimenté par les droits perçus sur le produit des ventes.


Le foisonnement institutionnel est surtout perceptible en matière linguistique.

Institués par le décret n° 89-403 du 2 juin 1989, le Conseil supérieur de la langue française et la Délégation générale à la langue française ont pris la suite d'autres organismes. Le Haut comité pour la défense et l'expansion de la langue française, créé en 1966, avait été, en effet, remplacé, en 1973, par le Haut comité de la langue française, lui-même supprimé en 1984, auquel s'était substituée une structure double comprenant le Comité consultatif de la langue française et le Commissariat général de la langue française. Ces deux organismes sont les prédécesseurs immédiats de ceux aujourd'hui en place.

En outre, le même décret du 2 juin 1989 a jugé utile de prévoir explicitement la constitution d'un Comité interministériel consacré à la langue française. Ce comité devait être chargé de définir les orientations du Gouvernement en la matière. Présidé par le Premier ministre, qui le réunit en tant que de besoin, il est composé des ministres chargés de l'éducation nationale, des affaires étrangères, de l'industrie, des affaires européennes, de la culture, de la communication, de la recherche, de la coopération et de la francophonie. Dans la pratique, ce comité ne s'est jamais réuni.

Le Conseil supérieur de la langue française est statutairement présidé par le Premier ministre. M. Bernard Quemada en est le vice-président depuis le 22 octobre 1993. Il a pour mission d'étudier, dans le cadre des grandes orientations définies par le Président de la République et le Gouvernement, les questions relatives à l'usage, à l'aménagement, à l'enrichissement, à la promotion et à la diffusion de la langue française en France et hors de France et à la politique à l'égard des langues étrangères.

Il fait des propositions, recommande des formes d'actions et donne son avis sur les questions dont il est saisi par le Premier ministre ou par les ministres chargés de l'éducation nationale et de la francophonie.

Il comprend, outre les membres de droit - le ministre de l'éducation nationale, le secrétaire d'État à la francophonie, le secrétaire perpétuel de l'Académie française, le secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, de 19 à 25 membres nommés pour 4 ans par décret du Premier ministre.

Lors de l'installation de ses nouveaux membres, en mars 1994, le Premier ministre a demandé au Conseil supérieur de se pencher en priorité sur les thèmes suivants : la présence du français dans les sciences et les techniques ; l'avenir du français face au développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication, la promotion du français dans le cadre du plurilinguisme européen. Deux rapports ont été remis au ministre de la culture en février 1995 : le premier, intitulé « le français soumis au choc des technologies de l'information » établi par M. André Danzin, a conduit à la création auprès des ministres chargés de la culture, de l'industrie, de la recherche et de l'enseignement supérieur d'un Comité consultatif sur le traitement informatique du langage (arrêté du 18 avril 1995) ; le second, confié au professeur Jean-Louis Boursin, portait sur « les publications scientifiques en langue française ».

Plusieurs travaux sont en cours, parmi lesquels on peut citer : l'établissement d'un rapport sur la diversification des langues dans l'enseignement et les mesures susceptibles de favoriser le développement de l'enseignement de deux langues vivantes par M. Claude Hagège ; le lancement d'une enquête par M. Chevalier sur la situation du français dans l'enseignement scolaire et universitaire et sur l'action des Instituts universitaires de formation des maîtres ; la réalisation d'une étude de MM. Bourdon et Zemb sur les actions de promotion du français et de l'allemand.

Bras séculier des deux structures précédentes, la Délégation générale à la langue française a pour mission, dans le cadre des orientations définies par le Gouvernement et des recommandations du Conseil supérieur de la langue française, de promouvoir et de coordonner les actions des administrations et des organismes publics et privés qui concourent à la diffusion et au bon usage de la langue française, notamment dans les domaines de l'enseignement, de la communication, des sciences et des techniques.

Le délégué général à la langue française est nommé par décret en Conseil des ministres, sur proposition du vice-président du Conseil supérieur 1 ( * ) . Il est assisté d'un secrétariat composé d'une vingtaine de personnes. Il veille à renforcer la coordination des efforts en matière d'aménagement, d'enseignement et de diffusion du français, tant dans les actions conduites par les administrations que dans celles menées au plan international pour le développement de l'usage du français.

Aux missions traditionnelles exercées par la Délégation générale à la langue française, notamment en matière de terminologie (création et coordination des commissions ministérielles de terminologie, diffusion de dictionnaires, glossaires et lexiques spécialisés) ou de promotion du plurilinguisme européen (soutien aux actions d'enseignement, développement de supports modernes pour l'enseignement du français, promotion du français en Europe centrale et orientale), le Parlement en a ajouté une, qui revêt un caractère essentiel : établir un rapport annuel sur l'application de la loi du 4 août 1994 et sur le respect du statut du français dans les organisations internationales.

Pour la deuxième année consécutive, la Délégation générale s'est acquittée de cette tâche, avec une ponctualité à laquelle il convient de rendre ici hommage, en déposant un rapport, le 15 septembre sur le bureau des assemblées parlementaires. Cette mission nouvelle fait de cette institution un lieu d'observation attentive de l'application de la réglementation linguistique nationale, et un observatoire tout aussi précieux des évolutions qui affectent notre langue dans les principales organisations internationales.

Le budget de la Délégation générale intègre les crédits de fonctionnement du Conseil supérieur de la langue française dont elle assure le secrétariat. Inscrits dans le fascicule budgétaire de la culture depuis le budget 1994, les crédits de fonctionnement de la Délégation générale seront reconduits en 1996 au niveau atteint en 1995 (4,26 millions de francs) ; en revanche, les moyens d'intervention inscrits sur le chapitre 43-40 (article 92), qui avaient enregistré une progression importante en 1995 (+38%), bénéficieront en 1996 d'une mesure nouvelle de 2,5 millions de francs, portant leur total à 6,837 millions de francs (+ 57,6 %).

Un regroupement institutionnel des différents organismes nationaux compétents en matière de francophonie permettrait sans aucun doute, de clarifier la situation actuelle et d'accroître l'efficacité et la lisibilité de la politique conduite en la matière.

C'est la raison pour laquelle votre rapporteur se félicite tout particulièrement que le Président de la République ait demandé au nouveau vice-président du Haut-Conseil de la francophonie, M. Maurice Schumann, de réfléchir à une meilleure articulation de ces structures.

* 1 Mme Anne Magnant a été nommée délégué général à la langue française le 3 novembre 1993.

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