EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 9 octobre 1996, sous la présidence de M. Christian Poncelet, président, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Philippe Marini sur le projet de loi n° 499 (1995-1996) portant réforme de la réglementation comptable et adaptation du régime de la publicité foncière.

Après s'être félicité du dépôt de ce texte sur le bureau du Sénat, M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a présenté les grandes orientations du projet de loi. À cet égard, il a rappelé que ce texte s'inscrivait dans le cadre plus vaste d'une réforme de la normalisation comptable, consistant à unifier les différentes normes comptables, générales ou sectorielles, et à faire du plan comptable général, le « vecteur privilégié » des normes comptables.

En amont de cette réforme qui devrait aboutir à l'élaboration d'un nouveau plan comptable général dans le courant de l'année 1997, le rapporteur a indiqué que le Gouvernement avait estimé indispensable de procéder à une réforme des institutions de réglementation comptable. Le premier volet de cette réforme a déjà été réalisé par le décret du 26 août 1996 qui modernise le Conseil national de la comptabilité et institue auprès de lui un comité d'urgence chargé de l'interprétation, dans des cas particuliers, des normes comptables. Le présent projet de loi constitue le second volet de cette première étape de la réforme.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a ensuite indiqué que ce projet de loi poursuivait deux objectifs.

En premier lieu, il s'agissait d'instituer un nouvel organisme, le Comité de la réglementation comptable, chargé d'établir les prescriptions comptables générales ou sectorielles. Cet organisme serait composé de dix membres, répartis de façon paritaire entre représentants des pouvoirs publics et représentants professionnels. Concomitamment, le Comité de la réglementation bancaire et financière perd les compétences qu'il détenait en matière de réglementation comptable des établissements de crédit et des entreprises d'investissement. À cet égard, le rapporteur a fait remarquer qu'il s'agissait de la fin de « l'exception bancaire ».

Puis M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a précisé que le second objectif du projet de loi était de permettre d'accompagner et d'encadrer le développement des sociétés commerciales françaises qui se financent sur les marchés internationaux. Dans cette perspective, l'article 6 du projet de loi prévoit que ces sociétés pourront, pour l'établissement et la publication de leurs comptes consolidés, utiliser des normes internationalement reconnues, à la condition que ces normes aient été adoptées par le Comité de la réglementation comptable et homologuées par un arrêté interministériel dans les mêmes conditions que les autres règlements du Comité de la réglementation comptable (CRC).

Enfin, le rapporteur a indiqué qu'il approuvait très largement les orientations de ce projet de loi sur lequel il émettait un avis d'ensemble favorable.

À l'issue de cette présentation, M. Joël Bourdin s'est étonné du fait que les lenteurs du processus d'harmonisation des normes comptables internationales et les difficultés à se mettre d'accord, s'agissant des comptes consolidés, sur le périmètre de consolidation, aient aboutit à l'introduction de l'article 6 qui conduit à renoncer à l'application des normes comptables françaises, qui ne sont pas, selon lui, forcément les plus mauvaises.

M. Alain Lambert, rapporteur général, a quant à lui interrogé le rapporteur sur l'état actuel de l'harmonisation des normes comptables au niveau européen et mondial.

En réponse à ces questions, M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a tout d'abord rappelé les difficultés qu'il pouvait y avoir à concilier des systèmes comptables qui ne reflétaient pas nécessairement la même conception de la comptabilité. Ainsi, le système américain, édicté par le Fédéral Accounting Standards Board (FASB) reflète une approche essentiellement centrée sur la gestion de l'entreprise et l'information de ses actionnaires. Il s'oppose en cela aux systèmes de comptabilité d'Europe continentale dont l'objet est davantage de quantifier les droits et obligations des destinataires des comptes par rapport à ceux qui les établissent.

M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a ensuite insisté sur le coût que représentait pour nos sociétés l'obligation d'établir une double comptabilité. En outre, il a fait remarquer que le retraitement des données pouvant aboutir à des modifications sensibles des résultats, et que le fait de tenir une double comptabilité affectait la crédibilité de ces comptes aux yeux des investisseurs internationaux, ceux-ci se demandant légitimement quels sont les bons comptes.

Répondant à M. le rapporteur général, M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a indiqué que l'harmonisation comptable européenne avait connu des développements importants dans les années soixante-dix et quatre-vingts et qui s'étaient traduits par l'adoption des quatrième et septième directives, déclinées en quatrième bis et quatrième ter puis en septième bis et septième ter pour le secteur des banques et celui des assurances. Cependant, cette harmonisation s'était arrêtée en cours de chemin. Compte tenu de la globalisation de l'économie et du développement des marchés financiers, il est en effet apparu rapidement illusoire de réaliser une telle harmonisation au niveau européen, le seul niveau pertinent étant de ce point de vue le niveau mondial.

La commission a ensuite abordé l'examen des articles premier à dix du titre premier relatif à la réglementation comptable.

À l' article premier relatif à l'obligation de respecter les prescriptions comptables générales ou sectorielles, la commission a adopté un amendement tendant, d'une part, à préciser les missions du Comité de la réglementation comptable (CRC) et, d'autre part, à simplifier la rédaction de l'obligation générale faite à toute personne physique ou morale de respecter les règlements du CRC.

La commission a ensuite adopté un amendement de coordination à l'article 1 relatif à la composition du CRC.

Puis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles 3 , 4 et 5 relatifs respectivement à l'avis du Conseil national de la comptabilité, aux procédures spécifiques d'adoption des règlements du CRC en matière de banque et d'assurance, et à la procédure normale d'adoption, d'homologation et de publication de ces mêmes règlements.

À l' article 6 relatif à la dérogation à l'application des règles françaises en matière de comptes consolidés, de M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a présenté un amendement tendant, d'une part, à exclure du champ de la dérogation les sociétés ayant seulement recours à des crédits bancaires sur les places financières étrangères et, d'autre part, à imposer que des sociétés utilisent des règles internationalement reconnues, elles soient contraintes d'appliquer l'ensemble de ces règles et pas seulement la partie qui leur convenait. Il a indiqué que cet amendement avait précisément pour objet de conjurer tout risque de « vagabondage comptable », conformément à l'objectif poursuivi par le ministre de l'économie et des finances.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Joël Bourdin a interrogé le rapporteur sur les raisons qui avaient motivé l'exclusion du bénéfice de la dérogation, des sociétés françaises qui sont cotées exclusivement sur une place étrangère.

En réponse, M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a indiqué qu'il avait lui-même envisagé d'élargir le bénéfice de la dérogation aux sociétés mentionnées, mais qu'il s'était finalement rangé aux arguments du Gouvernement selon lesquels cette extension constituerait, d'une certaine façon, une incitation pour nos sociétés à aller se financer ailleurs que sur les marchés financiers européens.

M. Yann Gaillard s'est déclaré consterné d'assister au démantèlement progressif du principe de territorialité des normes françaises. Le risque que la dérogation, actuellement cantonnée aux seuls comptes consolidés et aux sociétés cotées, soit progressivement étendu à toutes les sociétés commerciales pour l'ensemble des normes comptables est, selon lui, très grand.

En réponse, M. Philippe Marini, rapporteur pour avis, a indiqué que le législateur avait le choix entre une position fermée de « nationalisme sourcilleux » qui conduirait à handicaper nos sociétés et une position ouverte qui consisterait à laisser toutes les sociétés déroger à l'ensemble des normes. Entre ces deux positions, la solution retenue par le Gouvernement lui a semblé constituer un équilibre qui, tout prenant acte de la réalité, s'efforçait d'y mettre bon ordre.

Après l'intervention de M. Christian Poncelet, président, la commission a décidé de rectifier l'amendement afin de préciser que les sociétés visées par la dérogation étaient bien les sociétés françaises.

La commission a ensuite adopté deux amendements rédactionnels aux articles 7 (modification par coordination de la loi bancaire) et 8 (modification par coordination du code des assurances).

Puis, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des articles 9 (suppression par coordination de la base légale du plan comptable général) et 10 (décret d'application).

Enfin, la commission a émis un avis favorable quant à l'adoption du projet de loi ainsi amendé.

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