2. La réforme de la filière technologique supérieure

Afin de mieux adapter les formations supérieures à la diversité des nouvelles populations étudiantes, votre commission estime nécessaire d'accélérer la mise en oeuvre de la réforme de la filière technologique supérieure.

Cette réforme annoncée par le Gouvernement ne devrait en effet devenir applicable que dans plusieurs années et consisterait notamment à ouvrir plus largement les IUT aux bacheliers technologiques, à articuler de manière claire les IUT et les IUP et à professionnaliser l'ensemble des formations universitaires, notamment par la voie de l'apprentissage.

a) Les principes de la réforme

Une réflexion sur la filière technologique universitaire a été engagée par le Gouvernement dans le cadre des états généraux de l'université.

Cette réflexion a permis de constater un déséquilibre des formations proposées aux jeunes, la place majeure étant donnée aux formations générales conceptuelles au détriment des formations qui conduisent à la maîtrise des techniques, peu reconnues et mal construites, alors qu'un grand secteur universitaire consacré à la technologie, associant enseignement et recherche, apparaît nécessaire.

Le principe retenu par le Gouvernement est celui de la construction de filières technologiques, aussi bien dans le secteur tertiaire que dans le secteur secondaire, au sein des universités existantes.

Les premiers cycles technologiques devraient ainsi se construire en cohérence avec les STS et les IUT, qui seraient maintenus dans leur finalité professionnelle.

Si les perspectives de mise en place de la filière technologique annoncées par le Gouvernement sont à longue échéance, il est d'ores et déjà envisagé de favoriser la recherche d'accords avec des IUT ou des écoles d'ingénieurs pour l'utilisation de plateformes techniques.

b) Une plus grande ouverture des IUT aux bacheliers technologiques

L'accueil des bacheliers technologiques devrait constituer une des priorités pour les IUT, notamment pour lutter contre l'échec en DEUG auquel ces bacheliers, compte tenu de leur formation antérieure, sont particulièrement exposés. Depuis plusieurs années, le ministère poursuit, une politique d'incitation au recrutement des bacheliers technologiques en rappelant aux directeurs d'IUT et aux présidents d'université que leur accueil doit faire l'objet d'une attention particulière et qu'un objectif est fixé, à savoir accueillir au moins 50 % de bacheliers technologiques. À la rentrée 1995, 36 % des nouveaux bacheliers sont issus des séries technologiques contre à peine 32 % en 1994. Il est à noter qu'il s'agit, dans l'immense majorité des cas (88,8 %), de bacheliers lauréats de la session 1995 et non de réorientations par exemple à la suite d'un échec en DEUG. Les mesures d'incitation et d'information à l'intention des futurs bacheliers technologiques et des directeurs d'IUT devraient être poursuivies et l'objectif susvisé devrait être vraisemblablement atteint dans les toutes prochaines années, d'après les indications fournies à votre rapporteur.

Votre commission se demande néanmoins s'il ne serait pas encore plus efficace d'envisager d'instituer des quotas d'accès des bacheliers technologiques aux IUT, fixés par académie, selon les modalités préconisées par sa mission d'information sur les premiers cycles universitaires.

c) Une articulation claire entre les IUT et les IUP

La réunion en une seule filière des IUT et des IUP a été écartée par le Gouvernement et le principe de la dualité des filières a été réaffirmé sans exclure l'existence de passerelles. Les IUT constituant une filière courte orientée vers des débouchés professionnels immédiats, la poursuite d'études des titulaires de DUT vers les IUP, comme vers toute autre formation longue, ne peut donc être érigée en voie normale et doit être limitée, sous peine d'introduire un déséquilibre entre les besoins d'emplois et les flux de diplômés.

L'entrée en IUP continue ainsi à s'effectuer normalement après une première année de DEUG, l'accès en deuxième année d'IUP pour les étudiants titulaires d'un DUT ou d'un BTS étant autorisé par dérogation. Dans cette perspective, les universités devront veiller à limiter les pratiques d'accueil en 1ère année d'IUP de titulaires du DUT, qui constituent un parcours long et coûteux pour le système universitaire et pour les familles.

Afin d'assurer la cohérence aux niveaux national et régional entre les formations d'IUT et les formations d'IUP, il a été créé, par arrêté du 19 avril 1995, une commission consultative nationale des IUT et IUP, qui a une double compétence portant, d'une part, en formation plénière sur les questions d'intérêt général communes aux IUT et aux IUP, d'autre part, en sous-commissions sur les questions spécifiques relatives à chaque filière.

Votre commission tient à remarquer que certaines universités ne sont pas satisfaites du système actuel d'accès en IUP et considèrent notamment que la condition d'accès (bac+1) les conduit à refuser des candidats qui sont fréquemment en situation d'échec universitaire, c'est-à-dire des étudiants mal préparés et insuffisamment motivés pour s'engager dans une filière d'excellence.

Il convient également de noter que l'ancien président de la commission consultative nationale IUT-IUP estime que les IUP devront accueillir dans l'avenir une proportion significative d'étudiants venus des IUT.

Dans la pratique actuelle, un tiers des entrants en IUP viennent des IUT, ce qui montre que cette voie ne leur est pas fermée, même si la situation doit être examinée selon les disciplines et les secteurs géographiques. Par ailleurs, certaines universités ont pris l'initiative de créer des filières spécifiques en IUP pour accueillir des titulaires de DEUG-STAPS en leur proposant une formation au tourisme et à la gestion des activités sportives.

d) La professionnalisation des formations universitaires

L'expérience des dernières années a démontré combien la recherche d'une parfaite adéquation formation-emploi était illusoire. Une politique d'ouverture au monde du travail serait plus légitimement fondée sur le développement d'initiatives, jusqu'ici dispersées, visant à compléter les formations généralistes par des éléments de professionnalisation : contenus appliqués au secteur d'activité concerné, approche des réalités de la vie en entreprise, apprentissage des techniques et outils de communication, stages professionnels...

Ces orientations devraient se concrétiser dans le cadre de la politique contractuelle et des campagnes d'habilitation des diplômes nationaux. D'après les indications fournies au rapporteur de votre commission, les universités seraient donc invitées à :

- intégrer aux maquettes des diplômes des contenus professionnalisants : programmes plus appliqués, éléments de gestion, de droit, de connaissance de l'entreprise, pratique des langues étrangères, des outils informatiques ;

- encourager la participation de professionnels à la formation et à la conception des contenus professionnalisants ;

- développer la pratique de stages professionnels ;

- faciliter les passerelles vers les filières professionnalisées (IUT, IUP, DEUST, MST) ;

- développer les actions d'aide à l'insertion professionnelle : aide à l'élaboration d'un projet professionnel et au choix du parcours de formation adapté, préparation des diplômés à la recherche d'emploi.

Votre commission estime pour sa part que la professionnalisation devrait viser l'ensemble des filières, y compris les formations littéraires et juridiques, notamment par le développement des stages professionnels, étant rappelé par exemple que les diplômés des filières littéraires de deuxième ou troisième cycle trouvent plus rapidement un emploi que les scientifiques, au prix parfois d'une certaine déqualification résultant de l'inadaptation de leur diplôme.

e) La réforme du BTS

La réforme du BTS a résulté du décret du 9 mai 1995 modifié portant règlement général du brevet de technicien supérieur. Les points essentiels de cette réforme concernent la structure du diplôme, l'accès à la formation, la validation et la durée de formation.

Pour la voie scolaire, les étudiants des STS qui ont suivi un premier cycle de l'enseignement supérieur peuvent, en fonction de leurs acquis, avoir accès à des formations aménagées. Cette formule s'apparente à la formule du « positionnement », son principe consistant à éviter à un élève de devoir recommencer des apprentissages qu'il a déjà suivis. Les formations aménagées visent donc à proposer des cursus adaptés aux jeunes qui ont déjà suivi des formations d'un niveau équivalent, qu'ils se trouvent en situation d'échec dans l'enseignement supérieur ou qu'ils souhaitent se réorienter.

Au total, la réforme du brevet de technicien supérieur vise dans son ensemble à élargir l'accès à la formation conduisant au diplôme et, sous certaines conditions, à moduler la durée de cette formation. Elle permettra d'établir des passerelles entre les différentes formations du même niveau que le brevet de technicien supérieur et de faciliter les échanges entre le monde de l'entreprise et le système éducatif.

Votre commission tient à rappeler que l'origine scolaire des élèves entrant en première année de section de technicien supérieur en septembre 1995 s'établissait ainsi :

- baccalauréat technologique : 61 %

- baccalauréat général : 18 %

- baccalauréat professionnel : 5 %

- université : 11 %

f) Le développement de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur

Le développement de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur s'inscrit dans le prolongement des lois du 23 juillet 1987 et du 20 juillet 1992 et de la loi quinquennale sur l'emploi de décembre 1993, qui ont assoupli le cadre juridique de l'apprentissage afin d'en favoriser l'extension à des professions nouvelles et à des niveaux de qualification plus élevés.

Des sections de préparation au BTS ont été à cet effet mises en place dès la rentrée 1988. À partir de 1990, tous les autres diplômes professionnalisés de l'enseignement supérieur se sont progressivement ouverts à l'apprentissage : DUT, DNTS, DEUST, licence et maîtrise d'IUP, MIAGE, MST, diplôme d'ingénieur et DESS.

Au total, en 1995-1996, près de 18.000 jeunes ont préparé un diplôme d'enseignement supérieur par la voie de l'apprentissage, soit une augmentation de près de 40 % en un an ; ils représentent 5 % de l'ensemble des effectifs d'apprentis.

Les universités, écoles publiques et privées, comptaient pour leur part 7.000 étudiants répartis entre dix CFA interuniversitaires, vingt-cinq instituts des techniques d'ingénieurs et d'industrie mais aussi de quelques CFA de branches, d'entreprises ou consulaires ou encore de sections d'apprentissage.

Actuellement, quarante universités offrent au moins une formation en apprentissage, selon un statut juridique variable et plus de trente formations supplémentaires devaient être ouvertes à tous les niveaux à la rentrée de 1996.

Votre commission considère que la poursuite du développement de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur constitue l'une des voies du renforcement de la professionnalisation des cursus, ce qui n'exclut pas une réflexion sur la nature des formations qui peuvent être préparées par l'apprentissage et sur les conditions pédagogiques et administratives d'organisation de ces formations.

g) La position de la commission consultative IUT-IUP sur la réforme de la filière technologique supérieure

La commission consultative nationale IUT-IUP estime que la réforme de la filière technologique supérieure devrait être abordée localement et par discipline et ne saurait faire l'objet d'une réglementation générale. Elle préconise ainsi de prolonger l'actuelle organisation, comportant des passerelles entre filières générales et technologiques, la finalité prioritaire étant de conférer un caractère professionnel à toutes les filières universitaires.

Dans cette perspective, les filières professionnalisées devraient être nombreuses et de faible dimension pour avoir un effet d'entraînement sur les filières générales. Elles devraient par ailleurs être financées par la formation continue, cette exigence pouvant même constituer un critère d'habilitation.

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