Rapport général n° 92 (2000-2001) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 23 novembre 2000

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N° 92

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 novembre 2000.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2001 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME II

Fascicule 1

LES CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

( Première partie de la loi de finances )

(Volume 1 : examen des articles)

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2585 , 2624 à 2629 et T.A. 570 .

Sénat : 91 (2000-2001).

Lois de finances.

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES

I. - IMPÔTS ET REVENUS AUTORISÉS

A. - Dispositions antérieures

ARTICLE PREMIER

Autorisation de percevoir les impôts existants

Commentaire : le présent article consacre l'autorisation annuelle de percevoir les impôts et produits existants et fixe, comme chaque année, les conditions de l'entrée en vigueur des dispositions qui ne comportent pas de date d'application particulière.

Cet article rappelle que l'autorisation de l'impôt est à l'origine même de l'institution parlementaire.

Il s'applique aux impôts, produits et revenus affectés à l'Etat, aux collectivités territoriales, aux établissements publics et organismes divers habilités à les percevoir. L'article 4 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances dispose en effet en son premier alinéa que : " l'autorisation de percevoir les impôts est annuelle " .

Il convient d'observer que, comme à l'accoutumée, le présent article a une portée partiellement rétroactive puisqu'il dispose que la loi de finances s'applique :

- à l'impôt sur le revenu dû au titre de 2000 et des années suivantes, ce qui explique que la loi de finances de l'année " n " fixe le barème de l'impôt sur les revenus perçus l'année " n - 1 " ;

- de la même façon, s'agissant des sociétés, à l'impôt dû sur leurs résultats des exercices clos à compter du 31 décembre 2000, ce qui, pour un grand nombre d'entre elles, se traduit par une imposition sur des activités antérieures à l'année " n ".

Il est également précisé que cette " loi de finances s'applique à compter du 1 er janvier 2001 pour les autres dispositions fiscales " et cela " sous réserve de dispositions contraires " qui, en l'espèce, figurent notamment à l'article 10 du présent projet de loi.

Cette rétroactivité partielle est néanmoins inévitable, car il ne serait pas concevable que le Parlement se prive de toute marge de manoeuvre pour faire évoluer la fiscalité, notamment dans le cadre d'un changement de politique générale. Mais elle ne doit pas être confondue avec une forme de rétroactivité différente trop souvent utilisée par bien des gouvernements : celle qui consiste à revenir sur la parole de l'Etat en remettant en cause les engagements pris par celui-ci à l'égard d'épargnants ou d'investissements dont les décisions résultent du contexte fiscal qui leur est promis pour une période déterminée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

B. - Mesures fiscales

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 2

Crédit d'impôt en faveur des revenus d'activité

Commentaire : le présent article additionnel instaure un crédit d'impôt dégressif destiné à soutenir les revenus d'activité jusqu'à 1,8 SMIC.

I. LE CONTEXTE

A. LA RISTOURNE DE LA CSG ET L'EXONÉRATION DE LA CRDS PROPOSÉS PAR LE GOUVERNEMENT

1. Le dispositif de l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 1 ( * )

La contribution sociale généralisée a été mise en place en 1990 afin de créer une alternative au financement par les cotisations sociales de la protection sociale, accusé d'alourdir le coût du travail et de nuire à l'emploi tout en faisant trop dépendre l'équilibre de la sécurité sociale de l'évolution de la masse salariale, donc de la croissance économique.

Son taux a considérablement varié depuis sa création passant de 1,1 % sur tous les revenus en 1991 à 7,5 % sur les revenus d'activité, de placement et de patrimoine et 6,2 % sur ceux de remplacement en 1998.

Cet impôt est aujourd'hui le premier prélèvement obligatoire de France, représentant pour 2000 plus de 370 milliards de francs . Il est aussi le prélèvement le moins bien accepté : un sondage de la SOFRES en juin 1999 indiquait que 73 % des Français ne trouvaient pas normale son existence, contre 71 % pour l'impôt sur les successions, 66 % pour la TVA, 25 % pour l'impôt sur le revenu et 22 % pour les impôts locaux 2 ( * ) .

Le 31 août 2000, le gouvernement a proposé un plan global d'allégements de prélèvements obligatoires, étalé sur trois ans. Il comprend plusieurs mesures extrêmement différentes les unes des autres, pour un montant total de 120 milliards de francs, dont 57 milliards en 2001.

L'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 contient les dispositions législatives organisant la ristourne dégressive de CSG. Le champ de la ristourne vise l'ensemble des revenus tirés de l'activité professionnelle salariée et est borné par un plafond défini à l'origine à 1,3 fois le salaire minimum de croissance (SMIC), relevé par l'Assemblée nationale à 1,4 fois le SMIC. La ristourne fonctionne de manière dégressive en fonction du niveau de salaire. La mesure s'appliquera de manière progressive en trois tiers de 2001 à 2003.

Concrètement, le gain de revenu proposé par le gouvernement est substantiel, puisqu'il peut aller jusqu'à 540 francs par mois, soit 6.480 francs par an pour un revenu situé au niveau du SMIC.

Cette mesure concernait à l'origine (quand elle était limitée à 1,3 SMIC) selon le gouvernement 3 ( * ) sept millions de personnes. L'Assemblée nationale, en élevant le plafond à 1,4 SMIC, a étendu son bénéfice à un million supplémentaire de salariés selon le gouvernement 4 ( * ) , pour un surcoût d'un milliard de francs. La commission des finances quant à elle parlait de deux millions de salariés 5 ( * ) , pour un surcoût identique. Cependant, on a pu lire des chiffres plus élevés comme 9,6 millions de personnes, soit 2,6 millions de plus que ce qui était initialement prévu 6 ( * ) : 450.000 exploitants agricoles, 657.000 travailleur indépendants non agricoles, 7,4 millions de salariés du secteur privé et 1,12 million d'agents publics.

Le coût de la mesure initiale de ristourne de CSG était pour l'Etat de 8 milliards de francs la première année, puis 16,5 milliards la seconde et 25 milliards de francs en année pleine. L'extension adoptée à l'Assemblée nationale porterait le coût la première année à 9 milliards de francs soit un surcoût d'un milliard de francs.

2. Les raisons avancées par le gouvernement

Le gouvernement justifie cette mesure, élément essentiel de son programme de réduction d'impôts, par plusieurs raisons.

La première raison, la plus avouée, est le besoin de diminuer les effets de trappe à inactivité. Les études ne manquent pas pour souligner les conséquences du cumul d'allocations et minima sociaux sur l'attractivité de la reprise d'emploi surtout si ce dernier est rémunéré aux alentours du SMIC, a fortiori s'il est occupé à temps partiel. En effet, la conséquence cumulée de la mise sous condition de ressources, des liens entre allocations, de la familiarisation de nombre d'entre elles font que dans bien des cas occuper un emploi risque de se traduire par une perte de revenus. Retrouver un emploi signifiera perdre des exonérations de taxe d'habitation, perdre le bénéfice de la suspension de dettes, perdre la réduction ou la gratuité de certains services publics (transports, crèches, cantines, etc), perdre le bénéfice de la couverture maladie universelle. L'intérêt de la ristourne de CSG et de l'exonération de CRDS est alors d'augmenter le revenu net des actifs à faibles ressources, et donc de réduire la trappe à inactivité.

La seconde raison est la volonté qu'ont beaucoup de transformer la CSG en un nouvel impôt sur le revenu, en tout cas en un impôt progressif. Cette revendication n'est pas nouvelle. Elle était au coeur de l'argumentaire du groupe communiste dans son refus de la CSG lors de sa création en 1990. En effet, la CSG a été conçue comme un prélèvement proportionnel, à l'origine à faible taux et large assiette. Le taux a augmenté, l'assiette s'est à la fois élargie et complexifiée, mais le principe est demeuré jusqu'à l'année dernière. En effet, au cours de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, nos collègues députés ont relancé le débat sur l'absence de progressivité de la CSG et ont obtenu un relèvement de 160 à 400 francs du seuil de perception.

La troisième raison, probablement la plus difficilement avouable pour le gouvernement, est la nécessité de faire face aux tensions résultant de la modernisation salariale actuelle.

La hausse des coûts salariaux pour les entreprises ne s'accompagne pas en effet d'une amélioration des revenus des salariés à la hauteur de leurs espérances et de la croissance économique. La réduction et l'aménagement du temps de travail ont pour contrepartie un moindre volume d'heures travaillées qui se traduit pour ceux qui sont rémunérés à un salaire horaire, et même avec la hausse de ce dernier, par un revenu global stagnant voire baissant. Quant aux salaires mensuels, ils ne connaissent qu'une hausse modérée.

La " majorité plurielle " se retrouve ainsi confrontée à ses propres ambiguïtés et aux effets pervers des 35 heures.

B. UNE MESURE CRITIQUABLE

1. Une mesure complexe

Cette complexité se lit dans le mécanisme proposé : il ne faut pas moins de 24 alinéas pour mettre en oeuvre la ristourne dégressive de CSG, prendre en compte toutes les situations élaborer des méthodes de calcul différentes, etc. L'aménagement réalisé par l'Assemblée nationale, en l'étendant à 1,4 SMIC, ne facilite pas non plus la lecture et la réalisation de projections.

De plus, le plan du gouvernement annonçait une ristourne dégressive totale d'ici à 2003, mais égale aux deux tiers en 2002 et au tiers en 2001, soit une " ristourne dégressive progressive " en quelque sorte. Or le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2001 prévoit la mesure pour les années 2001 et 2002, mais pas pour l'année 2003 ce qui peut paraître étonnant. Où est la cohérence du gouvernement quand le ministre de l'économie annonce un plan d'ici à 2003, et quand le ministre de l'emploi et de la solidarité reprend la même annonce, alors que le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui en est la traduction juridique ne s'entend que jusqu'en 2002 ?

La complexité se lit ensuite dans les " acrobaties " de transferts de recettes auxquelles donne lieu la mesure. La CSG sera compensée à la CNAMTS, au FSV et à la CNAF pour 2001. Pour mettre en place une mesure complexe, le gouvernement brouille un peu plus les flux de financement de la protection sociale puisqu'il affecte une partie de la taxe sur les conventions d'assurance. Cette répartition a d'ailleurs été augmentée pour tenir compte de l'extension de la mesure, dans l'attente d'une hausse de la taxe sur les conventions d'assurance dans le projet de loi de finances. Ainsi, la CNAMTS touchera 20,8 % de cette taxe, le FSV 4,6 % et la CNAF 4,4 %, pour un montant total de 8,5 milliards de francs en 2001 (auxquels il faudra ajouter le coût des exonérations de CRDS).

D'un point de vue technique, la solution adoptée par l'Assemblée nationale met en exergue les problèmes d'articulation de la loi de financement et de la loi de finances : pour compenser la perte supplémentaire de recettes pour la sécurité sociale, il a fallu augmenter les clefs d'affectation de la taxe sur les conventions d'assurance à leur profit. Cependant cette nouvelle répartition du produit se fait au détriment de l'Etat. Pour que l'extension soit neutre pour lui, il faudra augmenter le taux de la taxe en loi de finances. Une fois de plus est démontrée la complexité qui existe dans l'articulation des mesures d'affectation de recettes entre l'Etat et la sécurité sociale.

De plus, le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit pas la compensation pour 2002 ni a fortiori la compensation pour 2003 . La raison en est connue et tient au caractère annuel des mesures d'affectation de recettes contenues dans le projet de loi de finances.

La mesure d'exonération est donc prévue jusqu'en 2003 par le gouvernement, inscrite jusqu'en 2002 comme perte de recettes dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale et compensée pour la seule année 2000 en projet de loi de finances. La cohérence de l'ensemble échappe à votre rapporteur général.

2. Une mesure potentiellement dangereuse

a) Les dangers de la ristourne de la CSG

La ristourne dégressive sur la CSG constitue en réalité, par les mécanismes qu'elle met en oeuvre, une mesure dangereuse : elle risque de susciter des trappes à pauvreté, elle remet en cause les principes qui fondent cette imposition, elle altère les bases mêmes de notre système de sécurité sociale.

(1) Le risque de trappe à pauvreté

Le premier danger de la mesure est le risque évident de trappe à bas salaires. Certes, l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale entend remédier aux situations de trappes à inactivité engendrées par les superpositions auxquelles donne lieu notre système de protection sociale et de minima sociaux. Cependant, à vouloir, à juste titre, tirer de l'inactivité, elle risque d'enfermer les bénéficiaires dans des " trappes à pauvreté " tout aussi redoutables.

En effet, la très forte dégressivité de l'aide apportée par l'exonération, dans le projet initial du gouvernement comme dans celui résultant des débats à l'Assemblée nationale, fait légitimement craindre que les ménages soient incités à demeurer dans une logique de bas salaires. D'abord, les entreprises risquent d'intégrer cet apport de revenu net dans la détermination de leur politique salariale, déjà modérée en raison des 35 heures et des aides qui les accompagnent. Ensuite, il y aura moins d'intérêt à chercher à élever son revenu, l'exonération de CRDS et la ristourne de CSG jouant comme un frein à la hausse. En effet, plus le salaire s'éloignera du SMIC, plus la hausse marginale sera mangée par la perte de l'avantage de CRDS et CSG. Entre 1 et 1,4 SMIC, il faudra que l'entreprise verse plus de trois fois ce qu'elle voudrait que le salarié perçoive.

Or la France connaît déjà des difficultés croissantes liées à l'existence d'un nombre important de travailleurs pauvres. Ainsi, Jacques Delors faisait état de son inquiétude devant tout ce qui peut empêcher les salaires de progresser : " il ne faut pas empêcher les salaires d'augmenter " 7 ( * ) . De toute évidence le mécanisme proposé par le gouvernement, notamment en raison de son amplitude trop réduite, va dans le mauvais sens. Il remplace la trappe à inactivité par une trappe à pauvreté.

(2) Le risque de la progressivité

Le second risque a trait à l'essence même du prélèvement que constitue la CSG. Il a été conçu avec l'idée simple de donner à la France un outil fiscal de financement de la protection sociale qui ne porte pas sur les seuls salaires mais élargi à l'ensemble des revenus. Comme l'écrivait le Conseil des impôts en 1995 8 ( * ) , " la création d'un nouvel impôt n'est pas chose courante et on peut a priori, se demander pourquoi la nécessité a été ressentie d'ajouter aux deux prélèvements déjà existants sur les revenus des ménages (l'impôt sur le revenu et les cotisations sociales) un troisième prélèvement. On pressent que la raison n'est pas seulement financière - s'il s'était agi de procurer des ressources supplémentaires, une hausse des prélèvements classiques aurait suffi - mais qu'elle se trouve dans une réflexion sur la structure des prélèvements : si on a créé un nouveau prélèvement, c'est pour éviter - voire atténuer - les inconvénients qui s'attachent aux prélèvements existants " . La CSG a été créée en réaction contre les cotisations sociales et l'impôt sur le revenu . Son objectif était donc de ne pas encourir les critiques vives dont ces prélèvements faisaient et font toujours l'objet.

On ne peut nier que cet objectif a été pleinement atteint. Le Conseil des impôts le confirme dans son dernier rapport, mais aussi que cet objectif et ce succès de la CSG sont considérablement remis en cause par le projet de réforme.

Il serait certes erroné de croire que la CSG est l'impôt le plus pur et le plus proportionnel qui soit. Il n'a pas fallu longtemps pour y instiller des exonérations, abattements, des taux différents, la complexité de la déductibilité partielle, etc. De même, il convient de rappeler, à l'instar du Conseil des impôts 9 ( * ) , que la CSG et la CRDS possèdent une dose de progressivité : " la CSG, la CRDS et le prélèvement social de 2 % sur les revenus sont généralement présentés comme des impôts proportionnels. Ces impositions sociales constituent en réalité un prélèvement faiblement progressif, ceci davantage chez les retraités que chez les actifs. Cette progressivité résulte surtout des exonérations de CSG portant sur les indemnités de chômage et les pensions de retraite des contribuables modestes (45 % des retraités, 25 % des préretraités et 88 % des chômeurs indemnisés par l'Unedic sont exonérés de CSG), qui réduisent fortement le prélèvement pour les trois premiers déciles de l'échelle des revenus chez les actifs, et pour les six premiers déciles chez les retraités. Une légère progressivité se maintient en haut de l'échelle des revenus grâce à l'ajout du prélèvement social sur les revenus du patrimoine. Ces revenus sont en effet fortement concentrés dans les déciles supérieurs ".

Ne faut-il pas cesser de toucher à la CSG qui est déjà un peu progressive et un peu complexe ? Il ne faudrait pas détruire un instrument efficace et moderne pour corriger les imperfections dont souffre l'impôt sur le revenu ou le système des minima sociaux. Ce n'est pas en instaurant de nouveaux biais que l'on corrigera les précédents. D'autant que le mécanisme proposé recèle des effets pervers nombreux et dangereux.

(3) Le risque de la fiscalisation

En assimilant davantage cette dernière à un impôt il renforce la tendance à l'étatisation de la protection sociale. La CSG deviendra un élément de stratégie fiscale au lieu d'être une variable d'ajustement de l'équilibre des comptes sociaux.

La progressivité de la CSG, en réduisant le nombre de Français payant la CSG, aura pour conséquence de faire en sorte que des millions de Français ne cotiseront plus à l'assurance maladie. Ils garderont certes leurs droits mais c'est l'Etat qui acquittera leur cotisation par le biais du transfert de recettes fiscales. La réforme proposée par le gouvernement est donc une étape supplémentaire vers une étatisation de la sécurité sociale et la marginalisation du dialogue social. Là réside probablement le plus grand danger de la réforme.

b) Les dangers des exonérations de CRDS

(1) Fragiliser la CADES

Le coût de la mesure, prévue par l'article 2 du projet de loi de finance de la sécurité sociale, non compensée par l'Etat, est de 625 millions de francs pour 2001, 1,25 milliard de francs pour 2002 et 1,875 milliard pour 2003, soit une perte totale pour la CADES de 22,5 milliards de francs d'ici à la fin de 2013.

Pertes totales de recettes pour la CADES

(en milliards de francs)

2001

2002

2003 à 2013

Total

Exonération pour les salariés jusqu'à 1,4 SMIC

0,625

1,25

1,875 x 11 = 20,625

22,5

Hypothèse : taux d'actualisation = taux d'évolution de l'assiette

Certes, la CADES a pu bénéficier d'un contexte favorable en encaissant de fortes ressources de CRDS liées à la croissance (le produit de CRDS est passé de 25,4 milliards de francs en 1997 à 28,7 milliards de francs en 2000) et en profitant de la baisse des taux d'intérêt, de la qualité de sa signature et d'une politique dynamique et inventive d'emprunt. Ceci a pu légitimement faire penser qu'elle serait en mesure d'achever de rembourser la dette sociale, et donc de prélever la CRDS, en 2012 soit deux ans avant son terme.

Il semble donc encore prématuré, de mettre en péril l'équilibre financier déjà fragile de la CADES.

(2) Reporter les charges

Priver la CADES de plus de 52 milliards de francs de recettes dont plus de 22 milliards de francs pour l'exonération sur les revenus d'activité, revient en réalité à en allonger le terme de plus de deux ans.

Il n'est donc pas exact de présenter cette mesure comme une baisse des prélèvements obligatoires : il ne s'agit ni plus ni moins d'un report de CRDS. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne prévoit donc pas une exonération de CRDS mais un transfert de la charge de CRDS.

3. Une mesure injuste

S'agissant d'une imposition cédulaire c'est-à-dire sur chaque source du revenu, elle a l'inconvénient d'empêcher tout mécanisme de progressivité puisqu'il ne prend pas en compte les autres revenus de la personne considérée ainsi que du foyer fiscal auquel elle appartient.

Ainsi, alors que deux conjoints occupant un emploi rémunéré au SMIC bénéficieront chacun de la ristourne, le ménage où un seul conjoint travaille mais gagne plus que 1,4 SMIC ne bénéficiera d'aucun allégement conformément au tableau ci-dessous :

L'injustice entre ménages

Situation du foyer fiscal

Revenus annuels d'activité des ménages

Gain annuel de CSG et CRDS en 2003

- deux conjoints payés au SMIC

134.626

12.960

- un conjoint payé à 1,4 SMIC

94.238

0

- un conjoint payé à 2 SMIC

134.626

0

La seconde source d'injustice provoquée par le mécanisme du revenu cédulaire concerne des personnes occupant deux emplois à temps partiel par rapport à celui de celles qui n'en occupent qu'un seul à plein temps.

L'injustice entre actifs et pluriactifs

Situation d'activité

Revenus annuels d'activité

Gain annuel de GSG et CRDS en 2003

Un emploi à temps plein payé 1,4 SMIC

94.238 F

0

Deux emplois à temps partiel payé 0,7 SMIC chacun

94.238 F

9.072 F *

* 70 % de l'avantage obtenu pour un SMIC à temps plein soit 0,7 X 6.480 X 2 emplois.

Ainsi, pour un revenu d'activité strictement identique, fixé ici à 1,4 SMIC, une personne employée à temps plein ne bénéficiera d'aucun avantage alors qu'une autre employée à deux endroits différents à temps partiel se verra exonérée de CSG et de CRDS soit un avantage de plus de 9.000 francs.

Votre rapporteur général pourrait enfin aussi évoquer le cas des familles. Le mécanisme du gouvernement ne prend aucunement en compte les charges de famille. Ainsi, si on rapporte l'avantage aux unités de consommation du foyer, les différences révèlent une nouvelle injustice.

Gain annuel de CSG et de CRDS en 2003

par unité de consommation pour un foyer gagnant 1 SMIC

Foyer

Gain/unité de conservation

Célibataire

6.480 F

Couple sans enfant

4.320 F

Couple avec 1 enfant

3.600 F

Couple avec 2 enfants

3.085 F

Couple avec 3 enfants

2.700 F

Hypothèses :

un seul des conjoints travaille et gagne 1 SMIC

les enfants ont moins de 14 ans

coefficients : 1 pour le 1 er adulte, 0,5 pour le second, 0,3 par enfant de moins de 14 ans.

Autant d'éléments qui pourraient affecter sur le fond la constitutionnalité de ce dispositif, ainsi d'ailleurs que cela a été soulevé lors des débats à l'Assemblée nationale notamment par le rapporteur de la commission des affaires culturelles.

II. LA PROPOSITION DE VOTRE COMMISSION

A. DE L'OBJECTIF PARTAGÉ AUX PRINCIPES

1. Les objectifs poursuivis

Votre rapporteur général entend affirmer un double souci : d'une part celui de lutter avec force contre les trappes à inactivité, ensuite celui de redonner du pouvoir d'achat aux salariés les plus défavorisés.

La volonté de lutter contre l'inactivité a ainsi été illustrée par la proposition de loi portant création d'un revenu minimum d'activité déposée avec le président de votre commission des finances, le 25 avril 2000 10 ( * ) .

La proposition de loi créant un revenu minimum d'activité (RMA)

Il s'agit de promouvoir l'insertion, non par l'assistance, qui a fait preuve de son inefficacité -le nombre de titulaires du RMI ne cesse de progresser malgré la décrue du chômage- mais par l'activité, un vrai travail salarié.

Le RMA comporterait deux parts :

- la première, appelée aide dégressive, correspondrait au minimum social ou à l'allocation perçus jusqu'alors par le bénéficiaire ;

Elle serait versée par l'Etat, ou l'UNEDIC pour l'ASS, aux entreprises qui, à leur tour, l'utiliseraient pour rémunérer le nouvel embauché, ce dernier tirant ainsi l'ensemble de ses ressources de son employeur, au lieu de bénéficier d'un revenu d'assistance. Le versement à l'entreprise serait effectué de manière dégressive pendant trois ans. Le coût pour l'Etat ou l'UNEDIC n'en sera donc pas alourdi : au contraire, il ira en diminuant de manière graduelle. En outre, l'allocataire recevra ainsi la garantie que son revenu total ne diminuera pas suite à son retour sur le marché du travail.

- la seconde part, dénommée salaire négocié, correspondrait au salaire proprement-dit versé au nouvel embauché par l'entreprise ;

Son montant serait égal à la différence entre le montant total du RMA et l'aide dégressive mentionnée ci-dessus. Il serait donc appelé à progresser au fur et à mesure de la diminution de la première part. Il conviendrait d'exonérer de charges sociales le salaire négocié afin de s'inscrire dans une logique de diminution du coût du travail, qui a démontré son efficacité en termes de créations d'emplois.

L'ensemble, c'est-à-dire le RMA, serait ainsi versé au nouveau salarié par son employeur. Le montant du RMA ne saurait être inférieur au SMIC, mais les négociations de branches pourront librement décider de l'établir à un niveau supérieur.

L'élément central du dispositif proposé consiste à donner aux entreprises un rôle actif dans sa mise en oeuvre, la proposition de loi étant conçue comme un dispositif-cadre, et non comme un mécanisme centralisé et uniforme.

Le RMA prendrait la forme d'une convention tripartite entre l'entreprise, le bénéficiaire du dispositif, et l'Etat ou l'UNEDIC lorsqu'il s'agit de l'ASS. Dans ce cadre :

- l'Etat, ou l'UNEDIC, verserait l'aide dégressive ;

- l'entreprise reverserait à son nouveau salarié cette aide dégressive à laquelle elle ajouterait sa propre participation, le tout constituant la rémunération du nouvel embauché, dont le niveau ne pourrait être inférieur au SMIC ; surtout, une large place serait laissée à la négociation entre les partenaires sociaux, par exemple au niveau des branches : cette négociation permettra d'adapter le dispositif aux réalités de chaque secteur d'activités, mais aussi d'arrêter les modalités de son application à la situation familiale des personnes concernées ;

- enfin, le bénéficiaire, en sortant de la spirale de l'inactivité et de l'assistance, serait en mesure de former un projet professionnel mais aussi personnel et ne percevrait plus d'allocation directement de l'Etat ou de l'UNEDIC. Il toucherait de son employeur un vrai salaire pour un véritable emploi dans le secteur marchand.

Le RMA serait conçu comme devant profiter à tous : aux anciens bénéficiaires, qui verraient leurs revenus progresser et qui, surtout, sortiraient de l'exclusion grâce à l'emploi qu'ils retrouveraient ; à l'Etat et à l'UNEDIC, qui pourraient réorienter leurs dépenses d'indemnisation du chômage en les activant mais aussi en envisageant leur réduction graduelle ; aux entreprises, qui verraient baisser le coût du travail sur les bas salaires et, dès lors, devenir rentables certaines activités qui ne l'étaient pas nécessairement.

En définitive, c'est la société tout entière qui en retirerait un véritable profit, l'activité étant réhabilitée au détriment d'une assistance déresponsabilisante et n'offrant aucune perspective.

Il s'agit donc sur le fond d'un objectif partagé avec le gouvernement. Mais les moyens proposés divergent complètement quant aux principes à suivre et aux outils à utiliser.

2. Des principes préservés

Votre rapporteur général estime qu'un certain nombre de grands principes doivent être préservés et d'autres suivis pour l'établissement d'une telle réforme.

Le premier principe est qu'il faut éviter de modifier la CSG et à la CRDS. Certes ces impositions ne sont pas sans défauts. Mais elles constituent des instruments modernes et bien adaptés au financement de notre protection sociale. Ils sont simples, ont une assiette large qui garantit une moindre sensibilité à l'évolution de la conjoncture économique et sont prélevés à la source. C'est aussi l'avis du Conseil des impôts : " la CSG est désormais l'impôt simple, recouvré à la source, à assiette large, à taux proportionnel et à fort rendement qui manquait en France. Sa place dans l'imposition des revenus s'est affirmée au fil des augmentations de son taux et de ses déclinaisons successives, avec la CRDS puis la contribution de 2 % sur les produits de l'épargne " 11 ( * ) . Ils matérialisent le lien entre les assurés sociaux et leur régime de protection sociale. Il serait imprudent d'y toucher.

Le second principe est de ne pas prendre en compte le revenu cédulaire mais l'ensemble des revenus d'activité du foyer fiscal considéré. Les effets pervers rappelés sont liés à cette utilisation du revenu cédulaire qui ignore les autres revenus que peut percevoir l'intéressé ainsi que, éventuellement, les autres membres de son foyer fiscal. Cela permet de supprimer le biais lié à la présence d'un ou de deux actifs au sein du ménage et l'injustice considérable qui pouvait en résulter. De même, le biais soulevé pour les pluri-actifs disparaîtrait.

Par ailleurs, il semble essentiel de prendre en compte la diversité des situations de famille. Certes, la familialisation de la mesure peut apparaître comme facteur de complexité. Elle est cependant justifiée non seulement par le souci de ne pas défavoriser les familles par rapport aux célibataires, mais aussi par la nécessité de corriger les effets de la familialisation de nombre de minima sociaux.

Parallèlement, votre rapporteur général estime qu'il est nécessaire de lisser au maximum les effets de seuil pour éviter les risques de trappe à pauvreté. Or les lois sur les 35 heures ont déjà établi un seuil important autour d'un salaire de 1,8 SMIC. Il peut sembler justifié de reprendre ce seuil afin de ne pas les multiplier et d'avoir une gamme de revenus allant assez loin.

Enfin, il convient de rester à l'intérieur du budget de l'Etat et de ne pas multiplier les flux croisés de recettes, de compensations, de passerelles entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale. De plus, cela permettrait de préserver la CSG, le lien social qu'elle représente et la dynamique des recettes de la sécurité sociale qu'elle engendre.

Votre rapporteur général estime donc que, tout en gardant les objectifs de hausse du revenu net et de lutte contre l'inactivité, un système alternatif devrait reposer sur un autre instrument que la CSG, respecter l'égalité de chacun devant l'impôt, intégrer la dimension familiale et surtout rester à l'intérieur de la sphère de l'Etat.

B. LE DISPOSITIF ET SES EFFETS

1. Un mécanisme novateur

a) Les bases du mécanisme

Il convient de renoncer à l'instrument de la CSG et de la CRDS pour leur préférer un système relié à l'impôt sur le revenu. En effet, c'est au travers de cet impôt à caractère déclaratif que l'on pourra le mieux appréhender les revenus globaux du ménage et donc à la fois supprimer les risques de fraude et, surtout, d'injustice.

Il faudrait ainsi mettre sur pied une nouvelle mesure de crédit d'impôt, destiné à favoriser la reprise d'activité. Il pourrait bien évidemment donner lieu à remboursement dans la mesure où il serait supérieur à la cotisation fiscale à acquitter. Ce système le rendrait compatible avec les règles de recevabilité financière des amendements dans la mesure, où il s'agirait d'un remboursement d'impôt, considéré comme un dégrèvement 12 ( * ) .

Plusieurs paramètres détermineraient l'avantage ainsi consenti. Ce serait en premier lieu la différence entre le revenu d'activité et le plafond de revenu retenu pour la mesure, qui pourrait s'élever à 1,8 SMIC. Puis il conviendrait de corriger ce rapport pour ne pas obtenir une courbe linéaire mais y instiller une dose de dégressivité de nature à surtout favoriser la sortie de l'inactivité. On pourrait alors appliquer un coefficient dégressif selon que l'on s'éloigne du plancher de la mesure soit le SMIC. Il conviendrait ensuite de proratiser ce rapport selon le nombre d'heures travaillées dans l'année, rapporté à la durée annuelle légale du travail, notamment pour éviter de favoriser le travail à temps partiel. Enfin, il serait envisageable d'y adjoindre une majoration pour le nombre d'enfants à charge, tout en plafonnant l'avantage ainsi obtenu.

Ainsi, votre rapporteur général vous propose-t-il, en cohérence avec la suppression par le Sénat de l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale, de créer un nouveau mécanisme de crédit d'impôt.

b) Le calcul du crédit d'impôt

Il serait destiné à encourager l'activité professionnelle et donc calculé à partir des seuls revenus d'activité au sens du code de la sécurité sociale, c'est-à-dire l'ensemble des revenus tirés de l'activité professionnelle salariée : les traitements, indemnités, émoluments, salaires, sommes allouées au titre de l'intéressement, contributions patronales de retraite et de prévoyance complémentaire, indemnités de licenciement et de mise à la retraite, indemnités journalières, compléments de rémunération versés par l'employeur, allocations reçues dans le cadre d'un congé parental d'éducation. Il s'agit donc de toutes les sommes auparavant touchées par la ristourne de CSG et l'exonération de CRDS. Le plafond de ces revenus pour le bénéfice du crédit d'impôt est égal à 121.162 francs soit 1,8 SMIC, seuil retenu dans le cadre des mesures d'aménagement et de réduction du temps de travail.

Ces revenus d'activité sont proratisés selon le nombre d'heures travaillées par rapport à la durée légale du travail de 35 heures par semaine, soit 1.600 heures par an. Cette proratisation est indispensable puisque c'est le revenu sur l'année qui est pris en compte.

Le crédit d'impôt en lui-même est égal, en dehors de la proratisation, à l'application d'un coefficient dégressif à la différence entre le revenu d'activité du foyer fiscal et le plafond de 1,8 SMIC.

Ce coefficient est fonction de l'inverse de l'écart du revenu avec le SMIC, soit 67.312 francs. A un SMIC, ce coefficient est donc maximum ; à un 1,8 SMIC il est minimum.

Coefficient de dégressivité

1 SMIC

1,1 SMIC

1,2 SMIC

1,3 SMIC

1,4 SMIC

1,5 SMIC

1,6 SMIC

1,7 SMIC

1,8 SMIC

Revenu

67 313 F

74 044 F

80 775 F

87 506 F

94 238 F

100 969 F

107 700 F

114 431 F

121 163 F

Coefficient

0,083

0,063

0,048

0,038

0,030

0,025

0,020

0,017

0,014

Formule : coefficient = 12 x (revenu/SMIC) 3

Afin de remédier à l'injustice familiale introduite par le gouvernement et de privilégier les ménages ayant des enfants à charge, il est appliqué sur ce crédit d'impôt une majoration de 20 % par enfant à charge. Cependant, le bénéfice total est plafonné au dixième du plafond de revenus d'activité retenu, soit 12.116 francs.

c) Son mode d'imputation sur les revenus

Il convient de préciser qu'il s'agirait d'un crédit d'impôt remboursable. Si son montant dépasse la cotisation à acquitter, le Trésor public rembourse au contribuable la différence. Ceci est indispensable pour que les ménages les plus défavorisés ou ceux qui bénéficient d'un fort abattement sur leur cotisation en raison du nombre d'enfants puissent profiter de la mesure.

Par ailleurs, votre rapporteur général souhaite reprendre l'idée d'une mise en place progressive de ce crédit d'impôt afin de rester dans une certaine épure budgétaire. Ainsi, le crédit d'impôt s'appliquerait sur l'impôt dû au titre de l'année au cours de laquelle ont été perçus les revenus. Afin d'éviter une mise en place trop tardive, il est donc proposé de commencer son application sur les revenus de 2000, faisant bénéficier les ménages du mécanisme dès 2001, année de leur déclaration. La mesure s'appliquerait ensuite aux deux tiers sur les revenus 2001 (déclarés en 2002) et en totalité aux revenus 2002 (déclarés en 2003).

2. Un mécanisme plus neutre, plus juste et plus favorable aux familles

Ce crédit d'impôt serait destiné à favoriser le retour à l'emploi en augmentant l'écart entre le revenu d'activité et le revenu de l'assistance sans diminuer ce dernier. Cependant, il est essentiel de prévoir un dispositif évitant les effets pervers de la baisse de la CSG et de la CRDS proposée par le gouvernement.

La justification de la préférence donnée aux ménages ayant des enfants à charge se fonde sur deux arguments. D'abord, il est normal de favoriser ces familles qui ont à supporter le poids financier du nombre d'enfants. Le crédit d'impôt familial est aussi plus neutre que la baisse par revenu puisqu'il n'engendre aucun effet pervers relatif à la pluriactivité, et respecte donc les choix de vie.

Mais surtout, il est économiquement rationnel d'établir ainsi une différence. En effet, l'écart entre le revenu d'activité et les minima sociaux est actuellement plus important pour un célibataire que pour une famille en raison de la familialisation croissante de ces prestations. Ainsi, dans un but de prévention des trappes à inactivité, il devient nécessaire de consentir un effort supplémentaire pour les familles puisque le chemin à faire est lui aussi plus important.

Transitions sur le marché de l'emploi

(gain monétaire mensuel en francs)

du RMI vers...

½ SMIC

1 SMIC

Célibataire

- 88

1.658

Isolé 1 enfant

- 345

1.671

Isolé 2 enfants

253

2.310

Isolé 3 enfants

1.559

3.731

Couple sans enfant

0

987

Couple 1 enfant

0

583

Couple 2 enfants

0

597

Couple 3 enfants

0

1.539

Source : Conseil des impôts

Le mécanisme du crédit d'impôt comparé à celui du gouvernement obtient donc des résultats plus favorables pour les familles, puisqu'il réduit l'écart, par unité de consommation, entre le gain d'un célibataire et celui d'un ménage avec 3 enfants : il passe ainsi de 3.780 francs dans le mécanisme du gouvernement à 1.258 francs dans le mécanisme proposé par votre rapporteur général.

Le système proposé par le Sénat est extrêmement favorable aux familles puisqu'il offre un avantage croissant selon le nombre d'enfants quand celui apporté par le gouvernement décroît selon le nombre d'enfants.

Revenu en point de SMIC

*

Au total, le crédit d'impôt que vous propose votre rapporteur général est plus favorable aux familles, encourt moins de risques de trappes à pauvreté et à bas salaires, fait disparaître les injustices liées à la composition du foyer ou la nature de l'activité, ne remet pas en cause les principes de la CSG, ne fragilise donc pas le financement de la protection sociale et ne complexifie pas les finances publiques en demeurant dans le seul champ de l'Etat.

Décision de votre commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 2

Aménagement du barème de l'impôt sur le revenu

Commentaire : le présent article a pour objet de modifier le barème de l'impôt sur le revenu, ainsi que certains seuils associés en vue de mettre en oeuvre le " Plan global d'allégement et de réforme des impôts (2000-2003) ".

Le présent article traduit en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, le plan global d'allégement de réforme des et impôts annoncé par M. Laurent Fabius, ministre de l'économie des finances et de l'industrie et par Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget, dans leur conférence de presse du 31 août 2000.

Ce dispositif s'inscrit dans le prolongement des mesures figurant dans la loi de finances rectificative pour 2000. Celle-ci avait prévu la baisse des deux premières tranches du barème de l'impôt, qui sont passées respectivement de 10,5 à 9,5 % et de 24 à 23 %.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Cet article concerne non seulement le barème de l'impôt sur les revenus perçus en 2000, mais également celui applicable aux revenus de 2001. Au nom de la " lisibilité " du plan gouvernemental, il a été décidé d'inscrire en première partie de loi de finances, des dispositions ne modifiant pas l'équilibre de l'année en cours.

Il y a là une liberté prise avec les principes qui guident la structure des lois de finances, d'autant plus critiquable que faute de connaître les limites de tranches qui dépendent, en l'état actuel des choses, de l'inflation, le dispositif n'est pas déterminé pour les revenus de 2001.

1. La baisse des taux et l'actualisation des tranches du barème

Au paragraphe I, le 1° a pour objet d'aménager le barème de l'impôt sur le revenu, tant en ce qui concerne les taux que les limites des tranches.

D'une part, il est procédé au relèvement de 1,4 % des limites des tranches du barème applicable aux revenus de 2000, conformément à l'évaluation de la hausse des prix hors tabac qui résulte du rapport économique, social et financier annexé au présent projet de loi de finances.

D'autre part, poursuivant le mouvement déjà amorcé avec la loi de finances rectificative pour 2000, le 1° du paragraphe I prévoit une baisse du barème pour les revenus des années 2000 et 2001, conformément au tableau ci-dessous.

2. Le relèvement du plafond du quotient familial

Le 2° du paragraphe I tend à relever les différents plafonds limitant l'avantage en impôt résultant d'une demi-part de quotient familial.

C'est ainsi que, pour les revenus de l'année 2000, il est procédé aux aménagements suivants :

1- le plafond de la demi-part de droit commun est relevé de 11.060 francs à 12.440 francs. Ce relèvement résulte à la fois de l'indexation au taux de 1,4 % du plafond, comme cela est le cas pour les tranches du barème, et d'un ajustement destiné à faire profiter de l'allégement du barème les contribuables soumis au plafonnement de l'avantage en impôt résultant du quotient familial ;

2- le plafond applicable aux demi-parts dont bénéficient les parents isolés au titre du premier enfant à charge est relevé de 20.370 francs à 21.930 francs. La hausse a été calculée en prenant en compte d'une part, une indexation au taux de 1,4 % et d'autre part, une augmentation portant sur la seule demi-part supplémentaire à laquelle a droit cette catégorie de contribuables, destinée comme au 1° ci-dessus, à leur faire bénéficier pleinement de l'allégement du barème ;

3- les plafonds applicables aux personnes célibataires, veuves ou divorcées ayant eu au moins un enfant à charge, mais n'en ayant plus, après l'année du 26 ème anniversaire du dernier-né, sont simplement indexés par application du taux de 1,4 % correspondant à la hausse des prix : il passe de 6.130 francs à 6.220 francs. Pour le gouvernement, cette différence de traitement se justifie par une différence de situation ;

4- la réduction d'impôt d'un montant variable dont bénéficient les contribuables célibataires, veufs ou divorcés ayant eu des enfants à charge jusqu'au 26 ème anniversaire du dernier-né, ainsi que les invalides et anciens combattants de plus de 75 ans est réduite de 5.410 francs à 4.260 francs. Cette réduction est justifiée par le fait que l'avantage fiscal vient s'ajouter au montant du plafond de la demi-part de droit commun, lui-même relevé : l'avantage total devrait être ainsi de 16.700 francs, soit une augmentation de 1,4 % correspondant à une indexation sur l'évolution des prix.

3. L'aménagement de la décote

Le 3° du paragraphe I propose un aménagement du système de la décote.

On sait que ce système a pour conséquence, certes de retarder l'entrée dans le barème des contribuables les plus modestes, notamment célibataires, mais aussi d'augmenter le taux marginal d'imposition des personnes qui en bénéficient au risque de susciter " des trappes à une activité ".

Conscient de cet effet pervers, le gouvernement de M. Alain Juppé avait, dans le cadre de sa réforme de l'impôt sur le revenu, proposé la suppression progressive de la décote. Le présent gouvernement choisit, au contraire, la voie d'un aménagement de son régime pour en atténuer la progressivité et augmenter le nombre de contribuables qui en bénéficient.

A l'heure actuelle, le système fonctionne de la façon suivante : l'impôt dû est égal au double du montant de la cotisation d'impôt calculé en application du barème, diminué du montant de la décote, soit 3.350 francs pour l'imposition des revenus 1999. On voit que la logique du système aboutit à faire croître l'impôt deux fois plus vite que le revenu, ce qui correspond au fait que le contribuable doit rattraper le régime de droit commun. Sur le plan technique on dit que la " pente " de la décote est de 2 : les taux des deuxième et troisième tranches du barème, qui sont actuellement de 9,5 % et de 23 % sont donc doublés pour atteindre 19 % et 46 %.

Le nouveau dispositif prévoit la réduction de 2 à 1,5 de la " pente " de la décote, ce qui se traduit par le relèvement de 3.350 francs à 4.900 francs (après indexation au taux de 1,4 % pour tenir compte de l'inflation) de la ligne supérieure de la décote.

Le nouveau seuil a été calculé de façon à ce qu'aucun contribuable ne voie sa cotisation d'impôt augmenter du fait de la réforme de la décote et donc, que le seuil d'entrée dans le barème reste identique.

Source : rapport n° 2624 de M. Didier Migaud rapporteur général du budget

Pour des raisons techniques, le texte ne fait plus référence à la limite supérieure de l'application de la décote mais à la moitié de cette limite soit 2.450 francs.

4. L'ajustement de l'abattement pour enfant à charge ayant fondé un foyer distinct ou du plafond de la déduction pour pension alimentaire versée à un enfant majeur

Le 2° du III de l'article 6 du code général des impôts permet aux enfants majeurs âgés de moins de 21 ans, de moins de 25 ans lorsqu'ils poursuivent des études ou sans condition d'âge lorsqu'ils effectuent leur service militaire, de demander le rattachement au foyer fiscal de leurs parents.

Le contribuable, qui accepte le rattachement, bénéficie, soit d'une majoration de son quotient familial, soit d'un abattement au titre de chacune des personnes rattachées, lorsque ces personnes sont mariées ou constituent un foyer distinct.

L'article 196 B du code général des impôts fixe le montant de cet abattement par référence au plafond de la demi-part de droit commun et compte tenu du taux de l'impôt applicable à la dernière tranche du barème. Ainsi, le relèvement à 12.440 francs du plafond de l'avantage en impôt correspondant à la demi-part de quotient familial entraîne mécaniquement celui de l'abattement, qui passe ainsi de 20.450 francs à 23.660 francs.

Cet abattement correspond également au montant maximum de la pension alimentaire qui peut être versée à un enfant majeur dans le besoin, en application du 2° du paragraphe II de l'article 156 du code général des impôts.

5. Le maintien à 400 francs du minimum de perception

Le 2 ème alinéa du 1 bis de l'article 1657 du code général des impôts, tel qu'il résulte de l'article 96 de la loi de finances pour 1997, avait prévu la diminution de 400 francs à 200 francs du minimum de perception de l'impôt sur le revenu. Cette mesure, à effet retardé, s'inscrivait dans le cadre de la réforme de l'impôt sur le revenu prévu par le gouvernement de M. Alain Juppé.

II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

Le barème proposé par le gouvernement n'est pas éloigné de celui que la commission des finances a fait adopter au Sénat en deuxième partie de la loi de finances pour 1999. Il y était prévu pour 2001 un barème assez proche de celui fixé pour les revenus de la même année par le présent article : identique pour les deux premières tranches, soit respectivement 7,5 % et 21 %, voisin pour la suivante, 29 % contre 31 %, il ne différait sensiblement que pour les deux dernières : 43 % contre 46,75 % et 48,5 % contre 52,75 %.

On ne peut donc s'opposer de façon frontale à des mesures qui vont enfin dans le sens réclamé par votre commission, même si celle-ci veut démontrer que l'on aurait pu " faire plus et surtout mieux ".

Le plan proposé, dès lorsqu'on le considère globalement avec les mesures relatives à la CSG et à la CRDS, se révèle d'abord relativement défavorable aux couches moyennes. Il apparaît ensuite comme une occasion manquée d'une remise à plat d'un système fiscal, dont on accentue encore les défauts dans un monde où le facteur travail est de plus en plus mobile.

1. Les classes moyennes oubliées du plan gouvernemental

En théorie, tous les contribuables sont concernés par l'allégement du barème, étant entendu que ceux qui sont soumis aux premières tranches bénéficieront d'un allégement supérieur à celui des tranches plus élevées : tandis que les uns devront se contenter d'une diminution du taux de la tranche supérieure de 1,5 % - même s'ils tireront avantage pour les premiers francs de la baisse des tranches inférieures - les autres pourront bénéficier d'une baisse de 3,5 % sur l'ensemble de leurs revenus.

Toutefois, la prise en compte des diverses mesures ne relevant pas de l'impôt sur le revenu et, notamment, de l'allégement de CSG-CRDS, peut faire dire que les classes moyennes ne retirent que peu d'avantages du plan d'allégement.

Certes, les chiffres dépendent également du type de fiscalité pris en compte - faut-il tenir compte de la suppression de la vignette mais en ce cas de quelle façon ? - et du mode de calcul - faut-il raisonner en masse ou en pourcentage du revenu ? -, mais une chose semble certaine : il y a des zones d'ombres et certaines catégories de contribuables, notamment dans les couches moyennes, sont moins exposées aux " radiations bienfaisantes " du plan gouvernemental.

Votre commission des finances estime que l'on ne peut considérer uniquement les valeurs absolues pour juger du caractère redistributif d'une réforme fiscale. De ce point de vue, l'étude publiée par l'OFCE au début du mois d'octobre 2000 pour intéressante qu'elle soit, doit être interprétée avec prudence 13 ( * ) , car les baisses d'impôts doivent avant tout être considérées en pourcentage du revenu des intéressés.

Ainsi, le rapporteur général de l'Assemblée nationale reconnaît à la suite des critiques exprimées dans la presse qu'il y a des zones sinon de gain " zéro " du moins de gains limités, qui concernent essentiellement des foyers mono-actifs ou des familles nombreuses à revenus modestes :

• Les foyers non imposables avec ou sans enfants à charge, ne disposant que d'un seul revenu supérieur à 1,4 SMIC ;

Les couples bi-actifs dont les revenus sont chacuns supérieurs à 1,3 SMIC et qui ne sont pas imposables du fait de leurs enfants à charge 14 ( * ) ;

Revenu salarial
déclaré

Gain total
annuel

L'inégalité est flagrante s'agissant des foyers ayant un revenu égal à deux SMIC, selon que ce couple est " mono ou bi actif " : tandis que la famille de deux enfants dont les deux parents sont payés au SMIC bénéficiera en 2003 d'une baisse d'impôt (y compris CSG/CRDS) de l'ordre de 13.700 francs, la famille identique mono-active ne verra son impôt diminuer que d'un peu plus de 500 francs.

L'exemple chiffré figurant dans le tableau ci-dessus pour une famille avec deux enfants montre que c'est au niveau d'un revenu de 10.000 francs bruts par mois que les gains sont nuls pour une famille avec un seul salaire et faibles, c'est à dire inférieur à 2.000 francs par an, pour les foyers avec deux salaires.

C'est la technique de l'intervention au niveau du revenu et non du foyer fiscal qui est à l'origine de la distorsion comme le reconnaît le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale : " la limite de tout aménagement de la CSG apparaît très clairement dès lors que l'on constate que, pour un revenu égal à deux SMIC, le gain est, à revenu égal, double dans un foyer dont les deux membres travaillent par rapport à un foyer où seul l'un d'entre eux travaille ".

C'est parce qu'elle a considéré ces distorsions comme inacceptables - même si elles procèdent en partie de la logique de la lutte contre les trappes à inactivité - que votre commission des finances a mis au point conjointement avec votre commission des affaires sociales un projet de crédit d'impôt compensatoire accordant l'aide au niveau du foyer fiscal 15 ( * ) .

2. L'occasion manquée d'une vraie réforme

L'importance des rentrées fiscales de 1999 et 2000 aurait permis une remise à plat sans heurts du système fiscal français. On allège, mais sans réformer : le plan n'en est pas un ; la grande ambition se révèle largement un " saupoudrage " à court terme. On manque ainsi une occasion unique - surtout si la conjoncture faiblissait - car, et c'était la philosophie du plan Juppé, pour qu'une réforme réussisse en une matière aussi sensible, il faut que " tout le monde y gagne ".

a) Les défauts structurels de l'impôt sur le revenu

C'est en vain que l'on chercherait dans le présent budget des traces de cette volonté de réforme en profondeur pourtant, semble-t-il, encouragée par le Premier Ministre, lorsqu'il affirmait que " notre fiscalité souffre autant de sa structure déséquilibrée que de son niveau excessif ". Le poids de l'impôt sur le revenu ne peut simplement être apprécié par des chiffres bruts, qu'il s'agisse de son produit ou du prélèvement qu'il représente en pourcentage du produit national. Les valeurs absolues sont en définitive moins importantes que les valeurs relatives. Dans un contexte européen d'allégement des prélèvements, celui qui n'avance pas aussi vite que ses concurrents, recule.

Au handicap que constitue ce poids, globalement et surtout relativement trop lourd, de l'impôt, il faut ajouter les effets pervers d'un barème trop progressif à ses deux extrémités.

La progressivité est trop forte à l'entrée du barème : les taux marginaux effectifs des prélèvements affectant les personnes disposant de faibles ressources ne peuvent que décourager la reprise de l'activité. Longtemps, la perte de certaines allocations a rendu la reprise d'un emploi peu intéressante pour le salarié bénéficiaire du RMI.

Les mesures déjà prises en matière de cumul temporaire de revenus d'activité et d'allocations, combinées avec celles résultant du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du présent texte, vont en dépit de leur caractère passablement arbitraire, atténuer largement cette progressivité à l'entrée du barème en réduisant l'écart entre revenus d'activité et d'inactivité. Il n'en reste pas moins que ce dispositif présente une grande complexité, qui nuira, forcément, à son efficacité, contrairement au système de revenu minimum d'activité (R.M.A.) présenté par votre président et votre rapporteur général 16 ( * ) .

Mais le problème reste entier et se trouve même aggravé pour le niveau supérieur du barème. Au moment où le chancelier allemand entreprend une réforme conduisant à une baisse très significative de l'impôt à tous les niveaux du barème, il faut se demander si l'on peut, durablement, avoir, dans notre pays, un barème plus progressif que chez nos partenaires européens .

Le dernier rapport du Conseil national des impôts constate que les taux d'imposition des très hauts revenus sont élevés en France, même s'il tend à relativiser le phénomène : " le taux marginal supérieur d'imposition sur le revenu fixé à 54 % en France, est élevé si on le compare avec les barèmes des pays voisins. Depuis 1980, les réformes fiscales dans les pays de l'OCDE ont eu pour effet de diminuer l'imposition des facteurs les plus mobiles, le capital et le travail très qualifié.... En termes d'imposition globale ( imposition des revenus + cotisations sociales) la France reste parmi les pays à forte imposition pour les hauts revenus ".

Le rapport de la commission d'études des prélèvements obligatoires présidée par M. Ducamin de la fin 1995, soulignait, déjà, qu'une " réforme d'ensemble de l'impôt sur le revenu, qui repose sur une baisse des taux moyens et un élargissement corrélatif de l'assiette, doit inclure une diminution significative du taux marginal le plus élevé " .

Si la conclusion du dernier rapport du conseil national des impôts n'est pas aussi directe, son souhait de voir intégrer au barème l'abattement de 20 % manifeste un souci analogue, d'autant plus que celui-ci ne dissimule pas les risques de délocalisation de certains titulaires de hauts revenus, même s'il estime que ce mouvement semble résulter essentiellement de la fiscalité des plus-values et du cumul de l'impôt sur le revenu et de l'ISF 17 ( * ) .

En outre, selon la commission d'étude des prélèvements obligatoires déjà citée, " le niveau jugé élevé des taux d'imposition a entraîné la floraison de mécanismes en tous genres (..) qui entachent gravement la progressivité, provoquent des ruptures d'égalité entre les contribuables car seuls les plus avertis bénéficient de ces mécanismes et peuvent avoir des effets pervers sur le fonctionnement de l'économie ".

Ce qui caractérise le régime de l'impôt sur le revenu en France c'est une excessive complexité et instabilité . Car, la tentation est forte, alors, selon les objectifs du moment, de manipuler les boutons et de modifier constamment les paramètres, au détriment de la nécessaire stabilité de la règle fiscale.

La " réforme fiscale la plus ample des cinquante dernières années " aurait dû être l'occasion d'entreprendre une opération vérité qui seule peut déboucher sur une simplification, à défaut de laquelle il n'est pas de vraie démocratisation.

Telle était bien la préoccupation du Conseil national des impôts comme en témoigne, en termes diplomatiques, la dernière phrase du rapport qu'il vient de consacrer à l'impôt sur le revenu : " la perspective annoncée par le gouvernement d'une baisse de la fiscalité directe fournit une opportunité qui devrait être mise à profit pour redonner cohérence, transparence et simplicité à notre imposition des revenus et renforcer le consentement à l'impôt ".

b) Les pistes indiquées par le Conseil national des impôts

Le gouvernement aurait pu, à tout le moins, s'inspirer des propositions du Conseil national des impôts et, notamment, réfléchir dans les directions suivantes :

(1) Intégration de l'abattement de 20 % dans le barème

Le Conseil des impôts suggère de rendre plus lisible la progressivité de l'IR en intégrant l'abattement de 20 % dans le barème afin d'afficher un barème de taux marginaux " réels ", correspondant à l'imposition effective des contribuables français.

Définition d'un nouveau barème de l'IR après intégration de l'abattement de 20 %

Barème actuel

Barème intégrant mécaniquement

l'abattement de 20 %

Tranches

Taux

Tranches

Taux

26 230 à 51 600 F

10,5

32 790 à 64 500 F

8,4

51 600 à 90 820 F

24

64 500 à 113 530 F

19,2

90 820 à 147 050 F

33

113 530 à 183 810 F

26,4

147 050 à 239 270 F

43

183 810 à 299 090 F

34,4

239 270 à 295 070 F

48

299 090 à 368 840 F

38,4

Plus de 295 070 F

54

Plus de 368 840 F

43,2

Définition d'un nouveau barème de l'IR après intégration de l'abattement

de 20 %

Barème actuel

Barème intégrant mécaniquement

l'abattement de 20 %

Tranches

Taux

Tranches

Taux

26 230 à 51 600 F

10,5

32 790 à 64 500 F

8,4

51 600 à 90 820 F

24

64 500 à 113 530 F

19,2

90 820 à 147 050 F

33

113 530 à 183 810 F

26,4

147 050 à 239 270 F

43

183 810 à 299 090 F

34,4

239 270 à 295 070 F

48

299 090 à 368 840 F

38,4

Plus de 295 070 F

54

Plus de 368 840 F

43,2

Source: DLF

L'intégration de l'abattement de 20 % est neutre, par construction, pour tous les revenus qui en bénéficient déjà et ne pourrait avoir des effets négatifs que pour les contribuables qui déduisent des charges du revenu global (pensions alimentaires, investissements outre-mer, SOFICA, etc.), du fait de la baisse des taux marginaux. Elle serait très favorable aux revenus qui n'en bénéficient pas jusqu'à présent. Il s'agit des traitements, salaires et pensions qui dépassent le plafond de l'abattement, des revenus fonciers, des revenus de capitaux mobiliers et des revenus de non salariés qui n'ont pas adhéré à un organisme agréé, ce qui devrait conduire à un réexamen des différentes règles d'assiette des revenus catégoriels qui ne bénéficient pas de l'abattement de 20 % 18 ( * ) .

(2) Homogénéisation du statut fiscal des prélèvements CSG-CRDS

Le Conseil des impôts note que la déductibilité complète de la CSG semble la conséquence naturelle des évolutions de 1996 et 1997, puisque désormais plus des deux tiers de la CSG sont déductibles et que la CSG s'est principalement substituée à des cotisations sociales elles-mêmes déductibles. La déductibilité totale de la CSG serait évidemment bien perçue par les contribuables qui ont le sentiment de payer l'impôt sur des sommes qu'ils n'ont pas perçues.

La mesure est coûteuse : 22 milliards de francs auxquels il faut additionner 4 milliards de francs, si l'on y ajoutait pour faire bonne mesure les charges de la CRDS. Elle entraînerait pour les contribuables une baisse moyenne de la cotisation d'impôt sur le revenu d'environ 720 francs. Pour les contribuables des trois premiers déciles, le poids de cette réduction dans leur revenu, serait nul ou négligeable. Tandis que pour les contribuables du dernier décile, la diminution serait plus sensible, puisque le poids de leur impôt sur leur revenu serait réduit de 0,8 %.

(3) Clarification du système du quotient familial

Le plafonnement du quotient familial, mis en place en 1982, a introduit une part de redistribution verticale croissante dans un mécanisme initialement prévu pour n'assurer que la redistribution horizontale entre foyers fiscaux, transformant l'avantage fiscal consenti aux familles en une simple réduction d'impôt de 11.000 francs par enfant à charge de droit commun.

Il est particulièrement mal ressenti par les contribuables qui doivent se livrer à des calculs complexes. Au surplus, la " valse-hésitation législative " observée en 1998 et 1999 autour de la politique familiale a contribué à obscurcir la compréhension du quotient. La réduction du plafond du quotient familial, de 16.380 francs à 11.000 francs aurait concerné 885.000 foyers fiscaux, soit 6 % de l'ensemble des foyers qui bénéficient de demi-parts supplémentaires, alors que la part des foyers fiscaux ainsi plafonnés n'était que de 2,4 % en 1990.

Le Conseil national des impôts attire également l'attention sur la multiplication des plafonds applicables aux parts supplémentaires, qui lui paraît peu justifiée si ce n'est comme contrepartie du retour à l'universalité des allocations familiales 19 ( * ) .

(4 ) L'adaptation globale du barème

La combinaison des effets d'une non-déductibilité totale de la CSG de l'assiette de l'impôt sur le revenu et de ceux de l'intégration de l'abattement de 20 % qui avait la faveur du Conseil national des impôts méritait d'être étudiée sur la base de simulations précises. Comme celui-ci le souligne une telle baisse des taux marginaux aurait pu être l'occasion de définir un barème avec des tranches et des taux plus réguliers et de résoudre plus facilement des questions lancinantes comme celle de la taxation des options d'achat d'actions.

La commission des finances souhaite connaître les raisons qui ont conduit le gouvernement à écarter les mesures préconisées par le Conseil des impôts , à l'exception de celles relatives à la décote et à la mention du taux moyen d'imposition : à défaut de constituer toujours des solutions pleinement acceptables, elles avaient le mérite de mettre l'accent sur des vraies questions qu'il était de la responsabilité du gouvernement de traiter dans le cadre d'une réforme d'ensemble.

3. L'accentuation des défauts de l'impôt sur le revenu

Le code, général des impôts ne s'est pas fait en un jour et les incohérences que votre commission veut souligner, ne datent pas d'aujourd'hui. Mais force est toutefois de constater que le gouvernement reprend aujourd'hui le processus d'allégement du barème entrepris, courageusement, par son prédécesseur, mais en renonçant à celui de rationalisation et de simplification, qui en était le corollaire.

a) Une progressivité renforcée par un effet de cliquet fiscal

Votre commission des finances rejoint assez largement l'analyse du Conseil national des impôts lorsqu'il souligne cette préférence bien française pour les systèmes sous haute pression fiscale nominale en s'interrogeant " sur l'intérêt d'un système qui persiste à afficher des taux marginaux élevés qu'il vient ensuite corriger par une multiplicité de mécanismes dérogatoires ".

Dans la surimposition des revenus élevés, il faut distinguer effectivement le poids objectif des prélèvements, lourds, dissuasifs pour l'initiative et donc pénalisants pour l'économie française dans son ensemble, de la pression simplement nominale, parce qu'en fait tempérée par de nombreux régimes incitatifs. L'observation du Conseil des impôts selon laquelle " la complexité de l'impôt sur le revenu trouve sans doute en partie son origine dans les faux-semblants de l'imposition des très hauts revenus ", n'est pas dénuée de fondement.

Sans doute cette situation tient-elle largement à cette propension bien française à se méfier de l'argent et à considérer comme suspects ceux qui en gagnent. S'agissant d'une tendance à contre-courant de celle du monde qui nous entoure, notamment en Europe, où la richesse est mieux acceptée, on aurait pu espérer que le gouvernement fasse, à l'instar de son homologue social-démocrate allemand, preuve vis-à-vis de nos compatriotes d'un peu plus de courage et de volonté pédagogique.

Or, bien au contraire, on constate le gouvernement non seulement préconise un régime qui ne devrait guère atténuer la concentration de l'impôt sur le revenu mais encore ne sait pas résister aux propositions les plus démagogiques.

Le 1 % des foyers les plus aisés, qui ont perçu en 1999, 10 % des revenus hors prestations sociales, ont acquitté 19 % de l'imposition du revenu et plus de 29 % de l'impôt sur le revenu stricto sensu . On assiste d'ailleurs à l' augmentation continue du nombre de foyers fiscaux soumis au taux supérieur de l'impôt sur le revenu : ce nombre passe de 219.000 en 1997 à 245.000 en 1998 pour atteindre 260.000 aujourd'hui, soit un pourcentage de 1,7 % des foyers fiscaux.

Cette évolution tient pour une part à l'amélioration de la conjoncture économique mais surtout à l'alourdissement de la pression fiscale sur les revenus élevés et notamment sur les familles: le quart de l'augmentation du nombre de foyers soumis au taux de la tranche supérieur, est constitué par des familles avec enfants à charge, alors que cette catégorie ne constituait qu'un peu plus de 10 % des foyers considérés

Dans le même ordre d'idées, on peut noter que près des deux tiers des " nouveaux entrants " ont comme catégorie dominante de revenus des revenus salariaux, contre moins du tiers des foyers en 1997.

On ne peut pas en définitive accroître la progressivité de l'impôt lorsqu'il s'agit de faire jouer la solidarité dans les moments difficiles, sans accepter une certaine réversibilité, quand viennent des jours meilleurs. Ne pas réduire un impôt, au motif que cette baisse bénéficie surtout à ceux qui paient l'impôt, c'est se condamner à voir le poids de la fiscalité s'accroître irréversiblement et encourager le développement d'une dérive dépensière.

La diminution de l'impôt résultant de la baisse de 1,5 % du taux de la dernière tranche resterait très modeste : 150 francs par tranche de 10.000 francs de revenus, soit au total un gain de 5.921 francs par foyer. Surtout si cet allégement se trouvait combiné avec la suppression de l'abattement de 8.000 francs ou de 16.000 francs pour un couple on resterait loin de la normalisation fiscale qu'exige notre intégration à un espace économique européen dans lequel les compétences sont de plus en plus mobiles.

A cet égard, votre commission des finances ne peut que s'inquiéter des raisonnements considérant que le problème de l'abaissement de la tranche marginale ne se pose pas en raison du petit nombre de personnes concernées. Peut-on crier " haro " sur les foyers soumis à la tranche supérieure et ce sous prétexte qu'ils sont minoritaires ? Il s'agit d'une logique non seulement inique sur le plan des principes mais encore à courte vue dans un monde économique de plus en plus ouvert : l'exode des compétences pour les tranches les plus élevées, pourrait bien constituer un handicap pour l'économie et la société françaises que l'on aurait tort de sous-estimer au moment où le développement des entreprises comme le déroulement des carrières individuelles ont de plus en plus tendance à s'internationaliser.

b) Une complexité et une opacité accrues

Ce jeu de la règle et des exceptions ne résulte pas seulement de la volonté de soigner des populations dignes d'intérêt; il procède, également, d'une préférence de structure pour les régimes fiscaux combinant règles rigoureuses et exceptions nombreuses .

La complexité que chacun regrette dans notre système fiscal, et qui explique à la fois l'épaisseur du code général des impôts et son caractère peu lisible, tient largement de la propension, bien française, à ne voir que des cas particuliers. Il ne s'agit pas seulement de la volonté de satisfaire tel ou tel groupe, telle ou telle clientèle, par une sorte d'infinie sollicitude pour les cas particuliers; la logique est plus profonde et résulte plutôt d'un certain perfectionnisme fiscal . Chaque situation est particulière et mérite un traitement sur mesure . D'où cette tendance à préférer les " costumes fiscaux sur mesure " aux " côtes mal taillées ", et donc à multiplier les exceptions à la règle.

Un certain nombre de mesures contenues dans le présent projet de loi de finances constitue une manifestation caractéristique de ce penchant pour la différenciation des régimes. On ne peut qu'être perplexe devant les argumentations de casuistique fiscale développées à l'Assemblée nationale au sujet du relèvement des différents plafonds applicables aux demi-parts de quotients familial , selon le niveau et leur fondement.

Le relèvement, pour l'imposition en 2001 des revenus de l'année 2000 de 1.380 francs du plafond de la demi-part supplémentaire de droit commun, qui passe de 11.060 francs à 12.440 francs 20 ( * ) , s'expliquerait de la manière suivante :

- pour 343 francs, " au titre du rattrapage de l'absence d'ajustement du quotient familial dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2000, sachant que cette somme correspond à la moitié de l'avantage maximum dont pouvait bénéficier un contribuable au titre d'une part de quotient familial " ;

- pour 880 francs " au titre de la baisse des taux du barème prévue pour l'imposition des revenus de l'année 2000, cette somme représentant le quart de la diminution d'impôt dont bénéficie, au titre de la seule baisse des taux, c'est-à-dire avant indexation du barème, un couple sans enfant ayant un revenu égal à celui d'un couple ayant deux enfants situé à la limite des effets du plafonnement du quotient familial ";

- pour 157 francs, au titre de l'indexation de l'actuel plafond du quotient familial (11.060 francs) majoré des deux sommes précédentes, sur l'évolution de l'indice des prix hors tabac.

On comprend globalement l'intention du gouvernement, qui est donner un petit " plus " aux familles en les faisant bénéficier elles aussi de la diminution des taux autrement qu'au niveau du quotient familial, en assortissant implicitement à chaque demi-part un allégement d'impôt.

Mais le mode de calcul laisse perplexe tant il est complexe. C'est pour la seconde composante de la réévaluation, que l'on suit le plus aisément le raisonnement : on prend le gain résultant de la réforme pour un couple sans enfants (2 parts) ayant un niveau de revenu égal à celui faisant entrer en jeu le plafonnement pour un couple avec deux enfants pour le diviser par quatre et déterminer un gain potentiel par demi-part, qu'il convient donc d'ajouter au plafond actuel. Soit, mais pourquoi prendre pour référence le niveau de revenu d'un couple plafonné ayant seulement deux enfants ?

Si l'indexation en revanche ne soulève guère de difficultés, la détermination du montant de la première composante est déjà moins évidente : on croit comprendre que la baisse des taux des deux premières tranches du barème ne faisant pas intervenir des niveaux de revenus auxquels joue le plafonnement, il a paru suffisant de se référer au gain maximal du célibataire divisé cette fois-ci par deux pour le ramener à la demi-part.

Le mode de calcul du plafond applicable aux deux demi-parts dont bénéficient les parents isolés au titre du premier enfant à charge témoigne d'une analyse aussi subtile qu'arbitraire. Le gouvernement propose de porter ce plafond à 21.930 francs, soit une croissance 1.560 francs par rapport au montant de 20.370 francs fixé par la loi de finances pour 2000. Cette majoration est égale à la moitié seulement de celle que l'on constaterait si l'on appliquait les mêmes principes que ceux définis pour la demi-part supplémentaire de droit commun.

Plusieurs raisons ont, selon le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale motivé le choix du gouvernement : " En premier lieu, ce plafond spécifique n'avait pas été diminué lorsque le plafond de la demi-part de droit commun de quotient familial avait été réduit par la loi de finances pour 1999. Il n'est donc pas infondé que les deux plafonds évoluent différemment à la hausse et, comme cela a déjà été le cas, à la baisse.

En deuxième lieu, la spécificité du dispositif relatif au premier enfant des personnes isolées justifie un traitement légèrement différent de chacune des demi-parts afférentes à cet enfant ".

Le traitement du régime des demi-parts à caractère non familial, dont on sait qu'elles n'avaient pas été en fait touchées par les abaissements de la loi de finances pour 1998, révèle également une volonté de doser au plus juste le bénéfice des allégements fiscaux prévus au titre du présent article. Où finit la distinction légitime fondée sur des critères objectifs et rationnels, où commence la discrimination attentatoire au principe d'égalité devant la loi, dont la méconnaissance est régulièrement sanctionnée par le juge constitutionnel ?

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission des finances aurait pu reprendre, mutatis mutandis , le plan présenté par le gouvernement de M. Alain Juppé, qui contrairement à celui qui est aujourd'hui soumis au vote du Parlement, constituait une véritable réforme de l'impôt sur le revenu. En outre, tandis que la réforme des services est sinon abandonnée du moins largement édulcorée, des questions importantes comme celle de la perception de l'impôt à la source - sur laquelle des sensibilités différentes peuvent se manifester de tous côtés de l'hémicycle - sont éludées .

Ce chantier de la modernisation de notre système fiscal n'est pas ouvert. Il faudra bien s'y atteler si l'on veut que la France soit compétitive en Europe. Votre commission des finances a choisi de ne pas le faire aujourd'hui pour se placer, comme le fait le gouvernement, sur le terrain de l'entrée dans le barème et du problème des « trappes à inactivité » afin de montrer qu'on peut, pour un coût identique, faire « plus et plus juste » au profit de l'emploi par l'adoption d'une stratégie reposant sur un crédit d'impôt.

Parce qu'elle a pris cette option, votre commission n'a pas voulu tout traiter en même temps au risque de brouiller son message : on peut faire plus efficace et plus juste que le plan gouvernemental. Elle a donc choisi de ne pas rebâtir l'architecture de notre système d'impôt sur le revenu pour se concentrer sur la situation des familles dont les besoins sont, une fois encore, insuffisamment pris en compte par le présent gouvernement et sur le lancinant problème des prélèvements rampants.

1. L'indexation du barème sur la croissance

L'année dernière votre commission avait insisté sur la montée de prélèvements rampants dus à la non-indexation de nombreux seuils contenus dans le code général des impôts et surtout à l'inadaptation d'un système d'indexation des tranches du barème de l'impôt sur les prix hors tabac. Elle avait préconisé, à ce sujet, de prévoir un système d'indexation faisant intervenir la croissance sur le modèle de ce qui existe en matière de dotation globale de fonctionnement, de façon à organiser un partage des fruits de la croissance entre l'état et les Français.

L'idée parait suffisamment fondamentale pour que votre commission réitère sa proposition cette année, alors que le débat à ce sujet ne semble pas clos à l'Assemblée nationale et que le Conseil des impôts a lui aussi soulevé le problème dans son dernier rapport. Celui-ci reconnaît que la règle actuelle d'indexation des tranches sur l'indice des prix conduit à une hausse tendancielle de la pression fiscale à laquelle il préfère une procédure de révision périodique.

Le tableau contenu dans son rapport comparant l'évolution du SMIC avec celle du barème est significatif, puisqu'il montre qu'entre 1990 et 1998, il s'est creusé un différentiel de 14 points entre les deux évolutions projetant mécaniquement des foyers à revenu modeste dans le champ de l'impôt.

Evolution du SMIC et l'indexation du barème de l'IR

Période en années de revenus

Taux de revalorisation du SMIC brut moyen (en %)

Taux d'indexation du barème de l'IR (en %)

Entre 1990 et 1991

4,9

3

Entre 1991 à 1992

4

2,8

Entre 1992 et 1993

2,6

1,9

Entre 1993 et 1994

2,2

1,4

Entre 1994 et 1995

3

1,8

Entre 1995 et 1996

3,6

1,9

Entre 1996 et 1997

2,9

1,1

Entre 1997 et 1998

2,8

0,8

Base 100 = 1990

129,13

115,66

On n'est guère étonné dans ces conditions qu'entre 1996 et 1999, le nombre de foyers fiscaux imposables soit passé de 15,2 à 16,7 millions soit une augmentation de 2,5 points en trois ans.

Le plan du ministre de l'économie et des finances doit avoir pour conséquence d'exonérer d'impôt le célibataire payé au SMIC en 2002. Soit, mais faute de modification des règles d'indexation, cet objectif pourrait toutes choses égales par ailleurs être difficile à atteindre.

Un tel constat incite votre commission à penser qu'il ne serait pas illégitime d'indexer l'évolution du barème sur celui du SMIC.

2. Le relèvement du plafond de la déductibilité par demi-part de quotient

Le présent article fait " remonter " le plafond de l'avantage en impôt de 11.060 francs à 12.440 francs au prix, comme on l'a montré, de calculs aussi complexes qu'arbitraires. Derrière les justifications techniques - la réforme de 1994 comportait un mécanisme de ce genre mais il s'agissait de compenser la suppression d'un mécanisme d'atténuation du barème - il faut voir l'aveu d'une erreur de la part du gouvernement et sa volonté de " rectifier le tir " après qu'il ait surestimé le correctif fiscal destiné à compenser le rétablissement de l'universalité des allocations familiales.

Compte tenu des surplus chroniques de la branche famille de la sécurité sociale, il a paru possible de revenir au statu quo ante en portant le niveau du plafond de l'avantage fiscal dont est assortie le demi-part de droit commun à son niveau antérieur, soit 16.380 francs , étant entendu que l'on devrait en toute rigueur l'actualiser en fonction du barème et même s'efforcer de lui appliquer les mêmes principes de rehaussements que ceux qui ont servi à justifier l'augmentation de 11.060 à 12.440 francs prévue au présent article.

3. Simplifier et faciliter la prise en charge des enfants majeurs

Nombreux sont ceux qui posent la question de l'adéquation du barème du quotient familial avec le coût réel qu'entraîne l'éducation d'un enfant.

Si le quotient familial paraît relativement favorable à partir du troisième enfant, qui bénéficie d'une part entière, il semble sous-estimer le coût des grands enfants au-delà de quatorze-quinze ans. Si votre commission des finances n'est pas en mesure de moduler les allocations familiales, elle peut aménager le régime fiscal des " grands enfants ", dont on sait qu'ils ont tendance à rester de plus en plus longtemps au foyer de leurs parents.

L'année dernière déjà, elle avait proposé au Sénat d'étendre les possibilités de rattachement au-delà de 21 ans, non seulement aux enfants qui poursuivent leurs études mais encore aux chômeurs. Poursuivant cette année sa réflexion et prenant à son compte la suggestion du Conseil national des impôts tendant à supprimer toute différence de traitement entre les enfants qu'ils soient ou non étudiants , votre commission va plus loin dans un souci de simplification en proposant que le rattachement des enfants soit possible jusqu'à 25 ans, quelle que soit leur situation.

En premier lieu, on permettrait le rattachement au foyer fiscal de tous les enfants majeurs âgés de moins de 25 ans , étant entendu que ce rattachement ne sera demandé pour des raisons évidentes que par les enfants ayant des revenus de faible importance ;

En second lieu, on propose de simplifier le régime fiscal des enfants majeurs rattachés en ne prévoyant que la possibilité d'un abattement , solution simple, dès lors que le niveau élevé de l'abattement permet d'offrir un régime favorable à tous et, notamment, aux couches les plus modestes pour lesquelles par construction l'abattement est plus favorable que le quotient. 30.330 francs, montant choisi également par coordination avec le plafond de 16.380 francs rétabli pour les demi-part de quotient. On note que le relèvement substantiel de l'abattement devrait compenser l'inconvénient qui pourrait résulter pour certains contribuables, de la diminution du nombre de parts pour le calcul du quotient familial.

Enfin, il faut souligner que a priori la mesure rendrait inutile pour les enfants de moins de 25 ans le recours au système des pensions alimentaires , en aboutissant en fait à dispenser les parents de fournir la preuve de leurs versements et facilitant d'autant la tâche des services fiscaux.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 2 bis (nouveau)

Suppression de l'abattement annuel sur certains revenus mobiliers pour les foyers imposés au taux supérieur de l'impôt sur le revenu

Commentaire : le présent article a pour objet de supprimer l'abattement annuel applicable à certains revenus mobiliers lorsque le foyer fiscal est imposé au taux de la tranche supérieur du barème de l'impôt sur le revenu.

L'Assemblée nationale a adopté cette mesure à l'initiative de nos collègues Didier Migaud rapporteur général, Henri Emmanuelli, président de la commission des finances, Augustin Bonrepaux et Jean-Louis Idiart.

Il s'agit de remettre en cause l'abattement lui-même prévu à l'article 158 du code général des impôts pour les contribuables dont les revenus sont imposés au taux de la tranche supérieure du barème sur le revenu. Cet abattement est actuellement de 8.000 francs pour les contribuables célibataires et de 16.000 francs pour les contribuables mariés.

L'argumentation avancée par les auteurs de l'amendement est la suivante :

le dispositif d'incitation à la détention d'action ne peut avoir qu'en effet limité et s'apparente à un effet d'aubaine, dans la mesure où les titulaires de hauts revenus sont " structurellement " conduits à privilégier les placements en action ;

il s'agit de corriger la propension très française consistant à afficher des taux d'imposition apparents élevés tout en limitant la portée par toute sorte d'abattements et de rééquilibrer la charge des prélèvements obligatoires entre les revenus du travail et ceux du capital.

Le produit attendu d'une suppression de l'abattement pour les foyers concernés serait de 500 millions de francs pour une dépense fiscale actuelle totale de 2,3 milliards de francs.

Votre commission des finances ne peut pour des raisons de principe et de technique fiscale, accepter une telle mesure.

En premier lieu, il est clair qu'il s'agit là d'une façon de " reprendre d'une main ce qu'on a donné de l'autre ". En d'autres termes, l'abaissement du taux de la tranche supérieure est gagé par une augmentation d'impôt pour les contribuables susceptibles de bénéficier de la diminution.

On note que, selon les informations fournies par le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, seuls 34.000 foyers saturent les plafonds sur 260.000 foyers relevant de la tranche supérieure.

D'un point de vue technique, on peut faire les observations suivantes :

pourquoi faire un sort particulier aux capitaux mobiliers qui ne sont pas d'une nature fondamentalement différente des autres revenus et notamment des revenus mobiliers au risque de porter atteinte au principe d'égalité ;

la référence à l'imposition au taux marginal, outre quelle présente le défaut de " montrer du doigt " une catégorie de français sur des bases discutables, n'est pas dénuée d'arbitraire : elle dépend en effet autant du revenu que du nombre de parts dont bénéficie le foyer fiscal, nombre de parts qui peut varier brutalement pour des raisons tout à fait indépendantes de la richesse du contribuable (mariage, divorce, âge des enfants). Il y a là un effet de seuil qui ne peut que rendre encore plus incompréhensible l'application d'un tel dispositif.

Telles sont les raisons pour lesquelles votre commission vous demande de rejeter cet article.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 2 bis

Suppression de l'interdiction de louer à un ascendant ou un descendant dans le nouveau régime fiscal en faveur de l'investissement locatif

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de permettre l'extension du nouveau régime fiscal en faveur de l'investissement locatif (régime dit " Besson ") à la location aux ascendants ou descendants de l'investisseur.

I. LE NOUVEAU REGIME FISCAL EN FAVEUR DE L'INVESTISSEMENT LOCATIF

A. UN NOUVEAU DISPOSITIF EN FAVEUR DU LOGEMENT INTERMEDIAIRE

L'article 96 de la loi de finances pour 1999 a créé un nouveau dispositif fiscal en faveur du logement locatif privé (dispositif dit " Besson "), en remplacement du régime d'amortissement autonome pour les biens locatifs neufs prévu par l'article 29 de la loi n° 96-314 du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier (dispositif dit " Perissol"), qui s'est achevé au 31 août 1999 pour les immeubles ayant obtenu un permis de construire avant le 31 décembre 1998.

Dans le neuf, le propriétaire doit prendre l'engagement de louer le logement nu à usage d'habitation principale pendant une durée au moins égale à 9 ans soit à une personne physique, soit à une personne morale. L'avantage fiscal dans le neuf consiste en un régime d'amortissement : le bailleur déduit de ses revenus fonciers 8 % du prix du logement les 5 premières années et 2,5 % de ce prix les 4 suivantes. A l'issue des neuf ans, il a la possibilité de continuer à amortir son bien à raison de 2,5 % par an pendant 6 ans si les conditions demeurent respectées. L'option pour l'amortissement du logement entraîne la possibilité d'amortir les gros travaux et la baisse de 14 % à 6 % du taux de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers, pendant la durée d'amortissement.

Dans l'ancien, le bailleur doit prendre l'engagement de louer le logement nu à usage d'habitation principale pendant une durée au moins égale à 6 ans. L'avantage fiscal consiste en un relèvement du taux de la déduction forfaitaire sur les revenus fonciers de 14 % à 25 % pendant 6 ans, puis par période renouvelable de 3 ans si les conditions demeurent respectées.

L'objectif de ce nouveau dispositif fiscal est de créer un véritable parc locatif intermédiaire, qui de fait accueillerait des ménages sous une double condition de ressources et de loyers .

Les locataires sont en effet soumis à des plafonds de ressources stricts, identiques pour la location dans le neuf ou dans l'ancien :

Plafonds de ressources des locataires

Composition du foyer locataire

IdF

Province

Personne seule (PS)

116 430 F

97 200 F

Couple marié (CM)

191 350 F

148 830 F

PS ou CM +1

229 830 F

178 190 F

PS ou CM + 2

274 370 F

215 650 F

PS ou CM + 3

325 000 F

253 110 F

PS ou CM + 4

365 490 F

285 510 F

Majorations par personne à charge

+ 41 510 F

+ 32 400 F

Source : DGUHC

De même, les loyers sont encadrés L'engagement du contribuable prévoit que les loyers et les ressources du locataire ne doivent pas excéder des plafonds fixés par le décret n° 99-244 du 29 mars 1999. Ces plafonds sont revalorisés chaque année. Pour les locations dans le neuf conclues en 2000, les loyers plafonds s'élèvent à 76 F en zone 1 bis (Paris et communes limitrophes), 66 F en zone 1 (reste de l'agglomération parisienne), 51 F en zone 2 (reste de l'Ile de France et agglomérations de plus de 100 000 habitants), et 46 F en zone 3 (reste du territoire). Pour les logements anciens, les plafonds de loyer sont fixés pour 2000 à 66 F en zone 1 bis , 56 F en zone 1, 36 F en zone 2 et 31 F en zone 3. Les plafonds de ressources sont les mêmes que pour les logements neufs. Le logement doit répondre en outre à certaines normes d'habitabilité, annexées au décret du 29 mars 1999.

L'avantage fiscal est donc conditionné à cette vocation " sociale " et doit, par conséquent, être suffisamment incitatif pour compenser en partie les restrictions apportées par le respect d'un plafond de loyer.

B. UNE APPRECIATION PLUTOT POSITIVE

Tout en regrettant l'abandon de tout soutien fiscal à l'investissement locatif dans le secteur libre, le Sénat avait approuvé le principe de la création d'un secteur locatif intermédiaire, avec des dispositions spécifiques pour le logement ancien.

Considérant toutefois le nouveau régime fiscal comme insuffisamment incitatif, il avait souhaité y apporter des améliorations sur trois points :

- ouvrir le nouveau dispositif aux locations en faveur des ascendants ou descendants, à condition qu'ils ne soient pas membres du foyer fiscal,

- allonger la durée d'amortissement des biens locatifs neufs de neuf à quinze ans, afin d'assurer une meilleure transition entre le régime fiscal en faveur des logements neufs et celui en faveur des logements anciens,

- porter le plafond de la déduction forfaitaire des revenus fonciers sur le revenu global de 70.000 à 100.000 francs.

L'Assemblée nationale a suivi la position du Sénat sur le second point, ce qui permet aux investisseurs d'amortir jusqu'à 65 % de la valeur de l'immeuble neuf, contre seulement 50 % dans le projet de loi initialement présenté par le gouvernement.

Toutefois, le plafond de la déduction forfaitaire n'a pas été relevé et contrairement au régime d'amortissement " Périssol ", la location à un ascendant ou à un descendant est demeurée explicitement exclue par les dispositions de l'article 31 du code général des impôts.

II. LA NÉCESSITÉ D'INCITER AU DEMARRAGE DU NOUVEAU DISPOSITIF FISCAL

A. UN DISPOSITIF FISCAL ASSEZ LENT À SE METTRE EN PLACE...

Le dispositif d'amortissement dit " Perissol " a soutenu le secteur de la construction pendant plusieurs années, de 1996 à 1999.

En 1996, environ 30.000 logements ont été acquis sous le bénéfice de ce régime fiscal, puis de 45.000 à 50.000 logements en 1998. En 1999, dernière année d'application de l'amortissement " Perissol ", le secteur de la construction a progressé de 13 %, et les mises en chantier ont atteint 317.600 unités.

Le nouveau régime " Besson " a été adopté dans la loi de finances pour 1999. Toutefois, la transition avec l'ancien régime fiscal est relativement longue.

De fait, le nombre d'investisseurs ayant opté pour le nouveau régime " Besson " n'est pas encore connu. Il n'est pas encore possible de chiffrer ses effets pour la construction immobilière ou la mise en location de logements anciens. Selon le ministère du logement, les premières réalisations ne devraient être visibles qu'au second semestre 2000.

Si aucune information n'est donnée sur le nombre d'investisseurs, votre rapporteur estime que c'est en raison de leur nombre encore trop restreint.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a chiffré le coût des mesures fiscales contenues dans le statut du bailleur privé.

Mesure dans le neuf (en MF)

Mesure dans l'ancien (en MF)

Coût total

Année budgétaire 2000

96

50

146

Année budgétaire 2001

370

99

469

Année budgétaire 2002

735

149

884

Année budgétaire 2003

1100

198

1298

Année budgétaire 2004

1465

248

1713

Année budgétaire 2005

1769

297

2066

Source : DGUHC

Ainsi, le coût de l'avantage fiscal pour le logement neuf en 2000 est estimé à 96 millions de francs et à 370 millions de francs pour 2001. Le coût pour le logement neuf devrait atteindre 1,5 milliard de francs dans 4 ans.

Le nouveau régime en faveur du logement ancien apparaît quant à lui extrêmement restreint, puisque après six ans d'application, le ministère de l'économie et des finances envisage qu'il coûtera moins de 300 millions de francs par an.

Par comparaison, le dispositif Perissol avait un coût d'environ 2,5 milliards de francs en année pleine.

Evaluation du coût du dispositif Perissol

Années

Première

Génération

Deuxième

Génération

Troisième

Génération

Coût brut

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

500

900

900

900

510

140

140

140

140

-

500

900

900

900

510

140

140

140

-

-

500

900

900

900

510

140

140

500

1400

2300

2700

2310

1550

790

420

420

source : DGUHC

Si l'on remonte encore plus loin dans le temps, on remarquera que le dispositif de crédit d'impôt en faveur de l'investissement locatif, mis en oeuvre entre 1987 et 1997, coûtait entre 1 et 1,5 milliard de francs par an.

Il apparaît donc que, par comparaison avec l'amortissement " Perissol " et même les anciens dispositifs l'ayant précédé, la montée en charge du nouveau régime fiscal devrait être relativement lente .

B. ...UN DISPOSITIF A AMÉLIORER

Une des raisons pour lesquelles le nouveau dispositif " Besson " tarde à démarrer est son caractère trop restrictif, alors même que l'investisseur doit louer à des personnes sous conditions de ressources et avec la contrainte spécifique constituée par le respect d'un plafond de loyer, notamment en Ile-de France.

Le dispositif actuel prévoit que le locataire doit être une personne physique, autre qu'un membre du foyer fiscal du propriétaire, un ascendant ou un descendant. Si le logement est la propriété d'une société non soumise à l'impôt sur les sociétés, et que cette société loue à l'un des associés ou un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant d'un associé, ce dernier ne peut bénéficier de la déduction au titre de l'amortissement.

Ces dispositions, qui sont reprises pour le dispositif en faveur du logement ancien, paraissent exagérément restrictives.

L'interdiction de louer à un membre du foyer fiscal, un ascendant ou un descendant est justifiée, selon le gouvernement, par le souci d'éviter des abus.

Toutefois, considérant que le dispositif fiscal s'accompagne de nombreuses conditions relatives, en particulier, aux revenus du locataire, les cas d'abus devraient être exceptionnels.

De plus, il apparaît que l'interdiction de louer à un ascendant ou descendant pourrait être contournée lorsque l'ascendant ou le descendant partage le logement avec une autre personne, qui pourra être titulaire du bail.

Votre rapporteur général ne trouve pas de justification pour qu'un contribuable ne puisse pas bénéficier d'un avantage fiscal s'il loue à un membre de sa famille dont les ressources ne sont pas élevées, à condition que la personne ne soit pas membre du foyer fiscal (afin de ne pas cumuler les avantages fiscaux) et que le bailleur ne dispose pas de la déduction au titre du versement d'une pension alimentaire.

Il estime que l'interdiction totale de louer à un ascendant ou à un descendant constitue une restriction susceptible de détourner nombre d'investisseurs de la location, s'ils savent qu'ils perdront tout avantage fiscal en louant à une personne de leur famille.

L'encouragement à l'investissement locatif conventionné est d'autant plus important que la reprise du marché immobilier commence à créer des tensions sur le marché locatif. Rendre le dispositif fiscal en faveur du logement " intermédiaire " plus incitatif apparaît donc comme un objectif prioritaire, et d'abord pour les locataires eux-mêmes.

Nos collègues députés ont d'ailleurs eu ce souci puisque lors de la discussion de la première partie du présent projet de loi de finances, MM. Méhaignerie, Jégou, de Courson, Mme Idrac, MM. Barrot et Ligot ont déposé un amendement dans le même esprit.

Votre rapporteur général vous propose donc d'adopter le présent article additionnel, dont le coût pour 2001 devrait être modeste, mais qui pourrait avoir un fort effet d'incitation à l'investissement locatif intermédiaire.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 3

Mesures favorisant le don par les entreprises de matériels informatiques
à leurs salariés

Commentaire : le présent article propose la création, à titre temporaire, d'un régime spécial pour les avantages en nature résultant pour les salariés du don ou de la mise à disposition par leur entreprise d'équipements et services informatiques destinés à leur usage privé, lorsque cette opération s'inscrit dans le cadre d'un accord signé selon les modalités prévues pour les accords d'entreprise ou de groupe relatifs à la participation, et à condition que l'entreprise rapporte les charges afférentes à son résultat imposable.

I. LE RÉGIME GÉNÉRAL DES AVANTAGES EN NATURE

Actuellement, le don ou la mise à disposition gracieuse d'équipements informatiques par une entreprise à ses salariés pour un usage exclusivement personnel est assimilable à un avantage en nature , et à ce titre :

- cet avantage est soumis aux cotisations sociales salariés et employeurs, à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), conformément aux articles L. 136-2 et L. 242-1 du code de la sécurité sociale et à l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 ;

- cet avantage est réintégré dans l'assiette des prélèvements sociaux annexes (participation des employeurs à la construction, taxe d'apprentissage, versement transport, contribution au titre du financement de la formation professionnelle) ;

- cet avantage est ajouté, en principe pour sa valeur réelle, au revenu imposable des salariés bénéficiaires, dans la catégorie des traitements et salaires ;

- les charges engagées à cette occasion constituent en contrepartie une charge déductible pour l'entreprise.

Au total, le don par une entreprise de matériels informatiques à ses salariés constitue aujourd'hui une opération relativement complexe à gérer, et surtout très coûteuse pour l'entreprise, comme pour ses salariés : à titre d'exemple, le don par une entreprise d'un ordinateur d'une valeur de 10.000 francs à un salarié " moyen " imposé à un taux marginal effectif de 15,66 % 21 ( * ) subirait des prélèvements fiscaux et sociaux de l'ordre de 90 % 22 ( * ) , c'est à dire que cet ordinateur coûterait au total plus de 19.000 francs à l'ensemble " entreprise + salarié ".

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ  POUR LE DON OU LA MISE À DISPOSITION D'ÉQUIPEMENTS INFORMATIQUES : UNE EXCEPTION TEMPORAIRE AU RÉGIME GÉNÉRAL DES AVANTAGES EN NATURE

A. LE PRINCIPE

Le présent article propose que, par exception au régime général des avantages en nature, l'avantage afférent à " l'attribution ou la mise à disposition gratuite par une entreprise à ses salariés de matériels informatiques neufs, de logiciels et de la fourniture gratuite de prestations de services liés directement à l'utilisation de ces biens " :

- soit exclu de l'assiette des cotisations de sécurité sociale , de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour remboursement de la dette sociale (CRDS), c'est l'objet du paragraphe III. ;

- et ne soit pas ajouté au revenu imposable des salariés concernés, c'est l'objet du paragraphe II.

En contrepartie , le paragraphe I. 1° prévoit que les charges engagées par une entreprise à l'occasion de l'octroi de cet avantage, par exemple l'achat ou la location des équipements mis à disposition des salariés concernés, sont rapportées au résultat imposable des exercices au cours desquels intervient l'attribution des équipements ou l'achèvement des prestations de services concernés.

En d'autres termes, les charges engagées par l'entreprise qui attribue gratuitement des équipements informatiques à ses salariés pour leur usage privé ne seraient pas considérées comme des charges déductibles , et seraient donc assujetties, selon le régime fiscal de l'entreprise concernée, soit à l'impôt sur les sociétés, soit à l'impôt sur le revenu de l'entrepreneur.

Au total, le présent article propose, s'agissant des matériels informatiques, de renverser les modalités d'imposition de l'avantage en nature : au lieu d'être assujetti aux prélèvements sociaux et à l'impôt sur le revenu pour le salarié, mais déductible du résultat fiscal de l'entreprise, l'avantage serait exonéré de prélèvements sociaux et d'impôt sur le revenu, mais non déductible du résultat de l'entreprise, donc assujetti à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu de l'entrepreneur.

Cette dernière disposition s'inscrit dans le cadre du principe selon lequel une charge ne peut être déduite du résultat fiscal d'une entreprise que si elle est exposée dans l'intérêt de l'exploitation , c'est-à-dire si elle se rattache à " une gestion normale ", ce qui ne semble pas pouvoir être le cas des coûts de mise à disposition d'équipements informatique aux salariés pour leur usage personnel.

Par ailleurs, comme l'a incidemment confirmé 23 ( * ) M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en réponse à une question écrite de notre collègue René Tregouët, la TVA afférente aux biens et services informatiques attribués gratuitement aux salariés pour leur usage personnel ne sera pas récupérable . Cela résulte de l'application de deux principes convergents : la TVA ayant grevé les biens et services acquis par les redevables n'est déductible que si ces achats ont été exposés dans l'intérêt de l'exploitation, d'une part ; la TVA n'est pas récupérable sur des opérations à titre gratuit, d'autre part.

Malgré ces deux dernières dispositions, le régime d'exception proposé pour les équipements informatiques serait globalement plus favorable que le régime général des avantages en nature, comme l'illustre le tableau ci-après :

Principaux prélèvements effectifs (hors TVA) sur les avantages en nature octroyés par une grande entreprise assujettie à l'IS en 2001

Régime général des avantages en nature

Régime d'exception proposé pour l'attribution gratuite d'équipements informatiques

Cotisations de sécurité sociale + prélèvements annexes

OUI

(environ 25 % à 70 % selon les salariés)

NON

CSG, CRDS

OUI

(5,066 % à 7,6 % en 2001)

NON

Impôt sur le revenu des salariés bénéficiaires

OUI

(0 à 53,25 % en 2001)

NON

Impôt sur les sociétés + contribution sociale généralisée

NON (charge déductible)

OUI

36,4 % en 2001

Imposition totale hors TVA en % de l'avantage octroyé

environ 30 % à 130 % selon les cas

36,4 %

TVA

récupérable

non récupérable

Dans certains cas, l'avantage apporté par le régime d'exception proposé pour l'attribution gratuite d'équipements informatiques par rapport au régime général des avantages en nature peut d'ailleurs être accru par un effet d'assiette.

En effet, les avantages en nature consentis aux salariés sont en principe évalués, et imposés, à leur valeur réelle, même s'il est parfois admis une décote de 30 % par rapport au prix public.

En revanche, dans le cadre du régime d'exception proposé pour le don d'équipements informatiques, l'avantage est rapporté au résultat imposable de l'entreprise pour un montant correspondant au coût de revient pour l'entreprise, qui, notamment dans l'hypothèse où l'entreprise fabrique les équipements informatiques ou offre les services concernés, peut être significativement inférieur au montant précédent.

B. LES CONDITIONS

Le paragraphe I. 2° du présent article limite le bénéfice du régime de faveur des avantages en nature aux opérations de don ou d'attribution de matériels informatiques effectuées " dans le cadre d'un accord conclu, selon les modalités prévues aux articles L. 442-10 et L. 442-11 du code du travail " , concernant les accords d'entreprise ou de groupe relatifs à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise.

Rappelons à cet égard que les accords d'entreprise relatifs à la participation sont conclus :

- soit dans le cadre d'une convention collective ou d'un accord collectif de travail ;

- soit entre le chef d'entreprise et les représentants des organisations syndicales d'entreprise au sens de l'article L. 432-2 du code du travail ;

- soit au sein du comité d'entreprise ;

- soit par référendum d'entreprise.

Cette première condition répond à un double objectif :

- de transparence , notamment vis à vis de l'administration fiscale ;

- de protection des salariés , les représentants du personnel cosignataires des accords d'entreprise ou de groupe, ou, dans le cas d'un référendum d'entreprise, les salariés eux-mêmes, étant en mesure de s'assurer de ce que l'attribution d'équipements informatiques aux salariés pour leur usage personnel ne constitue pas, pour l'entreprise, un moyen de développer le travail à domicile en sus des horaires normaux.

Par ailleurs, le dispositif proposé est temporaire et non rétroactif, puisqu'il ne s'applique qu'aux accords conclus entre le 1 er janvier 2001 et le 31 décembre 2001, la mise à disposition des équipements ou le début de la prestation des services devant s'effectuer dans un délai d'un an après la conclusion de l'accord précité. Précisons toutefois, s'agissant des prestations de service, par exemple d'un contrat de maintenance, que la délivrance pourra évidemment poursuivre ses effets au-delà de ce délai.

Enfin, le bénéfice de régime de faveur est plafonné, pour chacun des salariés concernés , à un avantage équivalent à 10.000 francs " sur l'ensemble de la période couverte par l'accord ", ce plafond correspondant aujourd'hui au coût d'achat et de mise en service d'une configuration comprenant un ordinateur, une imprimante, des logiciels de base et une connexion à Internet.

Notons toutefois que ce plafond de 10.000 francs s'apprécie au regard de l'avantage dont bénéficie le salarié, et non pas au regard du coût de revient de cet avantage pour l'entreprise, qui, comme votre rapporteur général l'a déjà souligné, peut être significativement inférieur.

C. LE CHAMP D'APPLICATION DU DISPOSITIF

S'agissant des entreprises concernées, le champ d'application du dispositif proposé est particulièrement large. En effet, le régime de faveur proposé s'appliquerait aussi bien aux entreprises assujetties à l'IS qu'à celles imposées sur le revenu.

En outre, la rédaction de ce paragraphe I. 2°, et plus particulièrement la référence aux accords conclus " selon les modalités prévues aux articles L. 442-10 et L. 442-11 du code du travail ", ouvre la possibilité du régime de faveur, aussi bien aux entreprises de moins de 50 salariés, pour lesquelles les régimes de participation visés aux articles L. 442-10 et L. 442-11 du code du travail ne sont pas obligatoires, qu'aux entreprises publiques à statut, dont certaines ont déjà fait part de leur intérêt pour le dispositif.

S'agissant des biens et services concernés, le régime de faveur s'appliquerait aux biens d'équipements informatiques (ordinateurs, périphériques) et aux logiciels, mais aussi " aux prestations de service liées directement à l'utilisation de ces biens ", comme les abonnements internet, la maintenance ou la formation des utilisateurs.

Enfin, comme le précise le second alinéa du I. 1°, ce régime de faveur trouverait également à s'appliquer dans le cas où une entreprise met à disposition de ses salariés, pour leur usage personnel, des équipements ou prestations informatiques moyennant une contribution inférieure au coût de revient de ces biens ou services pour leur entreprise.

Dans ce cas, seul le montant correspondant à l'écart entre le coût de revient pour l'entreprise et la participation financière demandée aux salariés est rapporté au résultat imposable de l'entreprise, d'une part, est pris en compte pour le plafond de 10.000 francs, d'autre part.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LE DISPOSITIF PROCÈDE D'UNE BONNE INTENTION

Le dispositif proposé répond à la demande des entreprises, comme Vivendi ou France Télécom, qui ont exprimé leur intention d'attribuer des ordinateurs à tous leurs salariés pour leur usage personnel, moyennant une contribution modeste, sinon symbolique, à l'instar de ce qu'ont annoncé certaines entreprises américaines, comme Delta Airlines ou Ford.

Cette décision peut en effet s'avérer avantageuse pour les entreprises concernées, dont les salariés bénéficiaires se seront acclimatés à l'ordinateur et à Internet dans un cadre ludique et familial. A bien des égards, le don d'un ordinateur d'une valeur de 10.000 francs peut constituer à moyen terme une mesure de formation à l'informatique plus efficiente, car moins stressante, plus progressive et plus pérenne, qu'un stage de quelques jours, dont le coût serait pourtant du même ordre pour l'entreprise.

Par ailleurs, le dispositif proposé est à l'évidence avantageux pour les salariés et pour leurs familles.

Au total, la mesure pourrait être " gagnant - gagnant " pour les entreprises et leurs salariés, tout en soutenant le développement du capital humain de la Nation, en facilitant le rattrapage de la France en matière de diffusion d'équipements informatiques et en contribuant à la réduction de la fracture numérique entre les salariés les plus qualifiés, souvent déjà familiers avec l'informatique, et les salariés les moins qualifiés, qui voient souvent avec appréhension la diffusion des ordinateurs.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ EST RELATIVEMENT ÉQUILIBRÉ

Le régime d'exception proposé par le présent article parvient à un certain équilibre .

D'un côté, ce régime est plus favorable que le régime général des avantages en nature, et, selon les informations transmises à votre rapporteur général, son adoption pourrait effectivement conduire certaines entreprises à proposer à leurs salariés l'attribution d'équipements informatiques.

De l'autre, le régime d'exception pour le don d'équipements informatiques par les entreprises à leurs salariés est logiquement moins favorable que le traitement fiscalo-social des acquisitions d'ordinateurs par l'entreprise dans le cadre de son exploitation ou par les salariés pour leur intérêt personnel. On peut en effet rappeler que :

- les équipements fournis par l'entreprise et utilisés par les salariés dans un cadre professionnel ne sont évidemment pas soumis aux prélèvements sociaux et à l'impôt sur le revenu ; ils font l'objet par l'entreprise d'un amortissement selon les règles prévues pour ce type de biens et la T.V.A. ayant grevée ces biens est récupérable, quand bien même ces équipements, notamment les ordinateurs portables, seraient également utilisés par les salariés pour leur usage personnel ;

- les ordinateurs librement choisis et directement acquis par les salariés pour leur usage personnel ne supportent évidemment que la TVA, et, si les salariés apportent la preuve qu'ils ne peuvent utiliser le matériel informatique de leur employeur et qu'ils utilisent également ces équipements pour leur activité professionnelle, leurs acquisitions peuvent ouvrir droit à déduction au titre des frais professionnels.

Par ailleurs, dès lors que les charges afférentes sont rapportées au résultat imposable de l'entreprise, le régime d'exception proposé pour le don d'équipements informatiques par une entreprise à ses salariés, est moins favorable que le régime relatif aux équipements donnés par des entreprises à des oeuvres ou organismes d'intérêt général, ces dons étant, dans certaines limites, déductibles du résultat imposable de l'entreprise en vertu des dispositions de l'article 238 bis du code général des impôts visant à favoriser le mécénat.

De même, dès lors que le bénéfice du régime de faveur pour le don d'équipements informatiques est accordé, sur option de l'entreprise, sous réserve d'un accord conclu selon les mêmes modalités que les accords relatifs à la participation, et dès lors que le traitement fiscalo-social des dons d'ordinateurs n'est pas plus favorable que celui de la participation, le dispositif proposé ne risque guère de conduire à un effet d'éviction au détriment de la participation.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 4

Actualisation du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune

Commentaire : le présent article tend à actualiser le barème de l'impôt de solidarité sur la fortune en fonction du taux de la hausse des prix hors tabacs en 2000, soit + 1,4 %.

I. LE DÉBAT SUR L'IMPÔT DE SOLIDARITÉ SUR LA FORTUNE

La loi de finances pour 1999 avait particulièrement alourdi le poids des cotisations de l'impôt de solidarité sur la fortune. Trois mesures avaient contribué au durcissement du dispositif :

- l'absence d'actualisation du barème pour la deuxième année consécutive ;

- l'intégration de la majoration spéciale de 10 % introduite par la loi de finances rectificative de 1985 dans la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune ;

- la création d'une nouvelle tranche marginale (taux de 1,8 % concernant la fraction de la valeur nette taxable du patrimoine supérieure à 100 millions de francs).

Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avait annoncé, au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 1999, que ces seules mesures permettraient déjà de rapporter 2 milliards de francs supplémentaires.

En réalité, alors que le produit attendu aurait dû s'élever à 14,9 milliards de francs, les recettes se sont limitées à 12,7 milliards de francs. Des voix et notamment celle de notre collègue député Jean-Pierre Brard s'étaient alors élevées au sein de la " majorité plurielle " pour se demander si l'alourdissement de l'impôt de solidarité sur la fortune n'avait pas atteint ses limites, notamment en incitant certains patrimoines à se délocaliser

Pourtant, lors du vote du projet de loi de finances pour 2000, l'Assemblée nationale avait rejeté l'actualisation du barème de l'ISF proposée par le gouvernement.

Le présent article propose une nouvelle fois d'actualiser le barème de l'ISF en fonction du taux de la hausse des prix hors tabacs.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

A l'initiative de nos collègues députés Christian Cuvilliez et Yves Cochet, la majorité de l'Assemblée nationale a une nouvelle fois rejeté l'indexation du barème de l'ISF sur l'évolution de la hausse des prix hors tabac telle qu'elle était proposée par le gouvernement.

Pour anticiper cette décision, le rapporteur général de l'Assemblée nationale insiste dans son rapport sur le caractère limité du mouvement de délocalisation induit par la création d'une nouvelle tranche de taxation des hauts patrimoine en citant une réponse faite par le ministère de l'économie.

Par ailleurs, tout en admettant qu'il existe bien un flux annuel de départs, il tient à le relativiser en faisant remarquer qu' " un nombre sans doute non négligeable de départs peut trouver sa principale explication dans une perspective de carrière individuelle ".

Enfin, il insiste sur le bon rendement de l'ISF attendu pour 2000  lié à l'augmentation du nombre de déclarants et à la hausse sensible des cotisations recouvrées.

III . LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission ne peut que s'étonner de l'optimisme affiché par la " majorité plurielle " alors que tous les autres acteurs économiques et certaines institutions aussi respectables que la Banque de France s'inquiètent de cette spécificité française et de ses conséquences dommageables sur l'économie française.

Le rapporteur général de l'Assemblée nationale fait allusion dans son rapport à une réponse du ministère de l'économie sur les résultats de l'institution de la tranche marginale d'ISF au taux de 1,8 %.

Il aurait pu citer l'étude sur la délocalisation des contribuables qui lui a été remise au printemps dernier par la direction générale des impôts. Celle-ci reconnaît qu' " il semble que les motifs fiscaux de délocalisation résident notamment dans la combinaison de la taxation des plus-values (qui peuvent être exonérées ou peu taxées à l'étranger) et de l'imposition du patrimoine ".

Concernant les patrimoines élevés (plus de 60 millions de francs), l'étude précitée constate : " pour ces contribuables, il paraît crédible que la fiscalité soit à l'origine de la décision d'expatriation. C'est en effet dans le total constitué par l'ISF, l'IR et la taxation des plus-values (y compris prélèvement social) qu'il faut chercher le déclencheur éventuel de la délocalisation ".

La position de l'Assemblée nationale n'est donc guère compréhensible, tandis que celle du gouvernement reste très ambiguë.

L'année dernière, votre rapporteur général s'était félicité de voir le gouvernement actualiser le barème de l'ISF en fonction du taux de la hausse des prix hors tabac. Il s'agissait ainsi de lutter contre les " prélèvements rampants " qui insidieusement accroissent le poids des prélèvements obligatoires. On pouvait alors supposer que le gouvernement avait pris conscience des limites de l'alourdissement des cotisations d'ISF et de leur effet contre-productif sur le rendement de ce dernier.

Votre rapporteur général avait donc regretté que, malgré le débat lancé par notre collègue député Jean-Pierre Brard sur les délocalisations liées au poids de l'ISF, l'Assemblée nationale, au mépris des réalités économiques et budgétaires, ait cru devoir supprimer l'actualisation du barème.

Cette année, cette mesure a été de nouveau rejetée par l'Assemblée nationale, mais votre commission s'interroge sur la réelle volonté du gouvernement d'actualiser le barème, actualisation qui n'est pas intervenue depuis quatre ans.

Il semble en effet que l'adoption de cette disposition permette à ce dernier de " ménager " une des composantes de sa majorité plurielle en lui offrant la possibilité de durcir un impôt très symbolique.

Votre commission regrette cette utilisation politique de l'ISF alors même que ce dernier est à l'origine de délocalisations largement sous-estimées par le gouvernement.

Décision de la commission : votre commission vous propose de rétablir cet article.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 4

Rétablissement du plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune


Commentaire : le présent article additionnel tend à rétablir le plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune.

I. L'ÉVOLUTION DE LA LÉGISLATION EN MATIÈRE DE PLAFONNEMENT DE LA COTISATION DE L'IMPÔT DE SOLIDARITÉ SUR LA FORTUNE

La loi de finances pour 1989 avait introduit un plafonnement de la cotisation de l'impôt de solidarité sur la fortune pour éviter que cet impôt n'excède les revenus perçus au cours de l'année. En effet, lorsque l'impôt sur les grandes fortunes avait été créé par la loi de finances pour 1982 (n° 81-1160 du 30 décembre 1981), il avait été constaté que, tel qu'il était alors conçu, il pouvait conduire un contribuable à devoir aliéner une partie de son patrimoine pour acquitter l'impôt.

Afin de mettre un terme à cette situation, il avait été décidé que le montant de l'impôt global dû au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune, de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et du prélèvement libératoire ne devait pas dépasser 70 % du revenu annuel global. Le taux de plafonnement avait été porté à 85 % par la loi de finances pour 1991.

Toutefois, l'article 5 de la loi de finances pour 1996 a limité les effets du mécanisme de plafonnement de la cotisation d'impôt de solidarité sur la fortune en fonction du revenu disponible. Celui-ci ne peut désormais aboutir à une réduction de l'impôt supérieure à la moitié du montant de l'impôt normalement dû ou à 72.570 francs 24 ( * ) . En pratique, cela signifie que :

- les contribuables dont l'impôt initial est inférieur à 72.570 francs (ce qui correspond à un patrimoine déclaré inférieur à 15,16 millions de francs) bénéficient du plafonnement sans limitation ;

- tant que l'impôt avant plafonnement est compris entre 72.570 francs et 145.140 francs (ce qui correspond à un patrimoine déclaré inférieur à 22,64 millions de francs), la réduction d'impôt qui résulte du plafonnement peut être supérieure à la moitié de l'impôt, sans toutefois pouvoir dépasser 72.570 francs ;

- enfin, au-delà d'un impôt initial de 145.140 francs (ce qui correspond à un patrimoine déclaré supérieur à 22,64 millions de francs), la réduction d'impôt résultant du plafonnement peut être supérieure à 72.570 francs, sans toutefois pouvoir réduire l'impôt de plus de moitié.

II. LE RÉTABLISSEMENT DU PLAFONNEMENT DE LA COTISATION DE L'ISF : UNE URGENCE RECONNUE PAR TOUS SAUF PAR LE GOUVERNEMEMNT

Depuis l'examen du projet de loi de finances pour 1997, votre commission propose chaque année un amendement visant à supprimer la limitation du plafonnement de la cotisation. En effet, les craintes qu'elles avaient émises lors de l'instauration du plafonnement, à savoir le risque de délocalisation des fortunes françaises se sont révélées fondées.

Dans un étude sur la délocalisation de certains contribuables redevables sur l'ISF en 1997 et 1998, la Direction générale des impôts 25 ( * ) a admis le lien entre la délocalisation de contribuables dont le patrimoine est très élevé (plus de 100 millions de francs) et la fiscalité sur le patrimoine par l'intermédiaire de l'ISF.

Pour autant, le gouvernement n'en a pas tenu compte pour modifier sa politique fiscale, peut-être rassuré par le fait que le nombre des délocalisations (350 en 1997 comme en 1998), reste stable et que le rendement de l'ISF continue de progresser.

En réalité, ces chiffres sont trompeurs car ils ne tiennent pas compte des contribuables qui, risquant d'être soumis à l'ISF, organisent leur délocalisation. L'étude précitée estime que la perte de capital par la France s'élève à 13 milliards de francs et que la perte d'impôt qui en résulte représente environ 140 millions de francs par an.

L'analyse réalisée par le professeur Eric Pichet 26 ( * ) se révèle beaucoup plus alarmante puisque ce dernier évalue le manque de recettes fiscales à 600 millions de francs en 1998 et 1,6 milliard de francs en 1999.

En outre, il écrit : " Mesurer l'importance de l'expatriation est une tâche bien délicate, encore compliquée par l'obstination des services de Bercy à la minimiser. A en croire les professionnels du patrimoine, la réalité est bien différente et les principaux spécialistes de l'ingénierie patrimoniale estiment à près de 600 milliards de francs les patrimoines qui auraient quitté le pays depuis l'instauration de l'ISF (ils sont en outre unanimes à confirmer l'accélération des départs depuis 1995) ".

Or, les conséquences de l'expatriation sont de deux sortes.

D'une part, les délocalisations entraînent des manques à gagner pour l'Etat en termes de recettes non seulement au titre de l'ISF, mais également au titre des autres impôts (impôt sur le revenu, taxes foncières, taxe sur la valeur ajoutée etc).

D'autre part, les délocalisations représentent une perte pour la richesse nationale qui se prive ainsi de capitaux et de savoir-faire indispensables pour le développement de l'économie française et le renforcement de sa compétitivité. Ainsi, il est regrettable que pour des raisons fiscales, la France ne puisse ni attirer ni retenir des personnalités reconnues internationalement dans des domaines aussi divers que la recherche, la gestion financière ou la communication.

Or, cette situation pourrait facilement être renversée par quelques mesures fiscales simples, comme la suppression du plafonnement de la cotisation d'ISF. C'est la raison pour laquelle votre commission vous demande d'adopter un amendement en ce sens.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 4 bis

Actualisation du barème de conversion de l'usufruit et de la nue-propriété en pleine propriété

Commentaire : le présent article vise à actualiser le barème de conversion de l'usufruit et de la nue-propriété en pleine propriété prévu à l'article 762 du code général des impôts.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL : UN BAREME OBSOLETE ET TRÈS PENALISANT POUR LES CONTRIBUABLES

L'utilisation du démembrement du droit de propriété dans les stratégies patrimoniales nécessite une évaluation précise des droits démembrés. Deux méthodes existent : la méthode dite " économique " et la méthode dite " fiscale " résultant de l'article 762 du code général des impôts.

En termes économiques 27 ( * ) , le droit d'usufruit d'un bien correspond au flux de revenus futurs distribués par ce bien, pendant la durée de vie de l'usufruit ou le temps convenu pour terme du démembrement.

Pour évaluer l'usufruit, deux paramètres doivent donc être connus : le rendement du bien mis à la disposition de l'usufruitier et la durée de l'usufruit, qui est assimilée à la durée de vie de l'usufruitier, dans le cas où l'usufruit est viager. Cet élément peut être défini à partir des tables d'espérance de vie publiées par l'INSEE.

L'article 13 de la loi du 25 février 1901 portant fixation du budget général des dépenses et des recettes de l'exercice 1901 a créé le barème fiscal de l'actuel article 762 du code général des impôts.

Il s'agissait de poser les règles de " conversion en pleine propriété " des droits de l'usufruit et de nue-propriété revenant aux héritiers, en vue de la détermination de l'assiette des droits de mutation par décès. Il existe peu d'informations concernant les modalités de calcul du barème de l'article 762 du code général des impôts. Toutefois, il semblerait que ledit barème ait été établi selon la méthode du calcul actuariel des flux de revenus des biens démembrés (c'est-à-dire la méthode dite " économique " évoquée précédemment), mais à partir des données disponibles de l'époque.

Ainsi, ce barème est fondé sur les tables d'espérance de vie de 1898-1903 et évalue le rendement des biens détenus en usufruit à 2 %.

Or, ces paramètres sont complètement obsolètes : l'espérance de vie a, au cours du siècle, augmenté en moyenne de plus de 60 %, tandis qu'un écart significatif s'est creusé entre les hommes et les femmes.

Par ailleurs, le postulat d'un rendement uniforme de 2 % par an est très critiquable.

L'utilisation de ces paramètres conduit à surévaluer la nue-propriété. Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, cette surévaluation peut dépasser 70 % de la pleine-propriété, pour des investissements d'un rendement égal ou supérieur à 10 % 28 ( * ) .

Or, l'obsolescence du barème n'est pas neutre fiscalement. En cas de donation ou de donation-partage avec réserve de l'usufruit, elle s'avère très pénalisante pour les contribuables puisque l'assiette de l'impôt est maximisée par une sous-estimation artificielle de la valeur de l'usufruit.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE RÉACTUALISATION DU BARÈME

L'administration fiscale est consciente des imperfections qui entachent le barème de l'article 762 du code général des impôts. Pourtant, aucune réforme n'est entreprise pour actualiser ce dernier.

En revanche, la même administration critique fortement les stratégies transmissives qui consistent pour le propriétaire à apporter au préalable la nue-propriété d'un bien à une société civile constituée avec ses héritiers, puis à faire donation des parts sociales qui lui ont été attribuées, à titre onéreux, en contrepartie de son apport.

Il convient de relever que ces opérations seraient beaucoup moins fréquentes si l'application d'un barème obsolète ne rendait pas la taxation intolérable en manipulant l'assiette des droits de mutation à titre gratuit.

Il apparaît donc urgent de réactualiser le barème de l'article 762 du code général des impôts. Deux considérations contradictoires doivent être conciliées.

Le nouveau barème doit aboutir à un calcul le plus exact possible de la valeur de l'usufruit qui varie non seulement en fonction du rendement du bien mais aussi en fonction de la durée de vie de l'usufruitier et de son sexe. La prise en compte de ces paramètres conduit par conséquent à établir plusieurs barèmes.

Cette situation se heurterait au second impératif auquel doit obéir la méthode d'évaluation de l'usufruit et de la nue-propriété, à savoir la simplicité. L'utilisation de l'article 762 du code général des impôts n'est obligatoire que pour la liquidation et le paiement des droits de mutation à titre gratuit. Elle doit notamment permettre aux contribuables concernés de prévoir facilement l'impôt qu'ils auront à payer. La création d'un barème trop complexe serait donc contreproductive.

Votre rapporteur général a choisi une solution de compromis qui vise à conserver un barème unique mais à en actualiser les paramètres. Le taux de rendement du bien retenu est de 4 %. La durée de l'usufruit est calculée en fonction de l'espérance de vie constituée à partir de la table de mortalité 1990-1992 établie par l'INSEE. Enfin, les tranches d'âge sont fixées de 5 ans en 5 ans.

Votre rapporteur général tient à rappeler qu'une disposition identique avait été adoptée l'année précédente par votre commission. Toutefois, lors de son examen en séance publique, cet amendement avait été retiré en raison des assurances données par le secrétaire d'Etat au budget, M. Christian Pierret.

Ce dernier avait reconnu qu'il était " légitime de s'interroger sur l'adéquation de ce barème instauré au début de ce siècle au regard de deux évidences : le rendement des actifs patrimoniaux a changé et l'allongement de la durée de vie humaine a modifié les tables de mortalité : nous gagnons un trimestre d'espérance de vie par an. Les données ne sont donc plus ce qu'elles étaient en 1903, et c'est la raison pour laquelle je suis favorable à engager une réflexion de fond afin d'examiner dans leur globalité les difficultés que pose l'application de l'article 762 du code général des impôts. "

Il avait alors ajouté : " je peux vous donner l'assurance que ce chantier sera ouvert en l'an 2000 , que nous le traiterons avec ouverture et dans le souci de faire évoluer une situation devenue largement absurde. Je vous demande donc de prendre patience, de nous faire confiance, et de nous laisser revoir cette question devant vous dès que l'occasion s'en présentera en l'an 2000 ".

Votre rapporteur général s'attendait donc à ce que le projet de loi de finances pour 2001 comporte une disposition sur la modification de l'article 762 du code général des impôts.

Dans la mesure où aucune proposition n'est faite contrairement aux engagements pris par le gouvernement l'année dernière, votre rapporteur général vous propose d'adopter à nouveau l'amendement voté l'année précédente par votre commission.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 4 bis (nouveau)

Incitation à la constitution et au maintien à long terme d'un actionnariat stratégique de l'entreprise

Commentaire : le présent article tend à aménager le régime d'abattement spécifique de 50 % sur la valeur des titres ou des biens d'une entreprise transmis par décès, dans le cadre d'un pacte d'actionnaires.

I. LES LIMITES DU DISPOSITIF EXISTANT

L'article 11 de la loi de finances pour 2000 a institué, au regard des droits de mutation, un abattement de 50 % sur la valeur des titres ou des biens d'une entreprise qui sont transmis par décès. Toutefois, l'octroi de l'avantage fiscal est soumis à des conditions assez strictes :

1. - le donataire et ses associés doivent préalablement s'engager collectivement à conserver pendant huit ans au moins un montant de titres suffisant pour contrôler l'entreprise (c'est-à-dire 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres pour les sociétés cotées et 34 % pour les sociétés non cotées) ;

2. - en outre, les héritiers doivent eux-mêmes conserver les titres transmis pendant huit ans, à compter de la fin du délai précédent. La propriété des biens transmis serait donc gelée pendant 16 ans .

3. - enfin, l'un des associés ou l'un des héritiers, donataires ou légataires doit, pendant les cinq années qui suivent la date de la transmission par décès, assurer une fonction de direction dans l'entreprise .

Lors de l'examen de cet article votre commission avait fait remarquer que les conditions exigées pour bénéficier de cet abattement sur les droits de succession étaient trop rigoureuses au regard de la réalité économique.

Elle avait alors proposé de réduire les délais minimaux de détention des titres qui subordonnent l'octroi de l'avantage fiscal, à cinq ans pour le donataire et ses associés et à cinq ans pour les héritiers, ce qui ramenait au total la période pendant laquelle la structure du capital de l'entreprise serait gelée de seize à dix ans.

En dépit du caractère très mesuré de cette disposition, elle reçut un avis défavorable du gouvernement et ne fut pas retenue par l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, le dispositif proposé prévoyait des sanctions en cas de rupture de l'engagement de conservation des titres. Au-delà du rappel des droits éludés et du paiement de l'intérêt de retard sur ces sommes à un taux de 9 % par an, le donataire concerné est tenu d'acquitter une pénalité représentant la moitié de la réduction d'impôt précédemment consentie.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Dans son rapport sur le projet de loi de finances pour 2001 29 ( * ) , le rapporteur général de l'Assemblée nationale, notre collègue député Didier Migaud, reconnaît a posteriori le bien-fondé des réserves de votre commission puisqu'il écrit : " A l'expérience, il apparaît que la durée totale de seize années est excessive d'un point de vue économique, à une époque où les mutations d'entreprises interviennent de plus en plus rapidement ".

Selon les informations obtenues par votre rapporteur général, ce dispositif n'a pas été utilisé une seule fois. Il convient de rappeler que l'abattement de 50 % sur les valeurs du bien transmis dont bénéficient les donataires peut être obtenu si un chef d'entreprise transmet son entreprise avant 65 ans sans conditions particulières.

L'Assemblée nationale a pris conscience de ces difficultés et son rapporteur général propose, par le biais du présent article, deux modifications substantielles du dispositif adopté l'année précédente.

1. La réduction de la durée obligatoire de conservation des titres

Le paragraphe I du présent article propose de modifier l'article 789 A du code général des impôts qui accorde un abattement de 50 % au regard des droits de mutation, sur la valeur des parts ou actions d'une société industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale transmises par décès à condition :

- que le défunt et ses associés aient pris l'engagement de conserver au moins huit ans les titres transmis ;

- que les héritiers prennent l'engagement, le jour de la succession, de ne pas céder lesdits titres pendant huit années supplémentaires.

Désormais, la durée obligatoire de conservation des titres est réduite à deux ans en ce qui concerne l'engagement collectif et six ans en ce qui concerne l'engagement individuel.

L'article 789 B du code des impôts accorde le même avantage aux biens transmis par décès qui sont affectés à l'exploitation d'une entreprise individuelle lorsque les conditions mentionnées précédemment sont respectées.

Le paragraphe II du présent article propose donc d'appliquer les nouvelles durées de conservation des titres prévues aux articles 789 A à l'article 789 B du même code.

2. L'allégement des pénalités applicables en cas de rupture de l'engagement

L'Assemblée nationale a souhaité aménager le régime des pénalités applicables en cas de rupture de l'engagement d'un des héritiers de conserver les titres pendant six ans à compter de la date d'expiration du délai de deux ans.

Elle a estimé que " compte tenu de l'importance des engagements pris ", il était nécessaire de " prévoir une dégressivité du montant du droit supplémentaire en fonction de la durée effective de l'engagement ".

En conséquence, le paragraphe III du présent article modifie l'article 1840 G nonies du code des impôts qui fixe la sanction en cas de manquement aux engagements pris.

Le donataire est toujours tenu d'acquitter le complément de droits de mutation par décès, majoré de l'intérêt de retard, mais le montant supplémentaire qu'il doit également acquitter est moins élevé que dans le dispositif actuel et varie en fonction de la durée de détention des titres :

- s'il cède les titres dans les deux premières années, il doit payer un droit supplémentaire équivalent à 20 % de la réduction consentie ;

- s'il les cède la troisième ou la quatrième année, le droit supplémentaire à acquitter s'élève à 10 % de la réduction consentie ;

- s'il les cède pendant la cinquième ou la sixième année, le droit supplémentaire n'est plus que de 5 % de la réduction consentie.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général se félicite de l'aménagement proposé par l'Assemblée nationale qui rend le dispositif attractif pour les chefs d'entreprise et devrait faciliter la transmission des entreprises.

Il tient cependant à faire les remarques suivantes.

D'abord, il s'inquiète du retard pris dans la parution du décret d'application prévu à l'article 789 A du code des impôts. Selon les informations obtenues, il serait lié aux délais de consultation de la place qui aurait duré jusqu'à fin septembre. Dans la mesure où le texte proposé ne soulève plus l'opposition des associations d'entreprises, le décret devrait cette fois-ci être promulgué rapidement. Votre rapporteur général veillera attentivement à ce que le pouvoir législatif ne soit pas entravé par la lenteur d'élaboration du décret d'application.

Par ailleurs, votre commission souhaite poursuivre l'allégement du dispositif proposé par l'Assemblée nationale afin de renforcer son caractère incitatif auprès des entreprises.

Elle vous propose d'abord de réduire la durée de l'engagement individuel à trois ans. La durée totale de conservation des titres s'élèverait ainsi à cinq ans, conformément à la durée retenue pour l'engagement des associés liés par une convention de vote dans la proposition de loi de votre rapporteur général relative aux pactes d'actionnaires 30 ( * ) .

Votre commission vous propose également d'assouplir les règles de pénalités en cas de rupture des engagements pris par les héritiers. Ainsi, ces derniers devront payer le complément de droits de mutation par décès majoré de l'intérêt de retard, mais le droit supplémentaire ne sera que de 10 % les deux premières années et de 5 % la troisième année.

Enfin, votre commission tient à rappeler que les dispositions proposées aux articles 789 A et 789 B précités ne résolvent donc qu'une partie du problème des transmissions d'entreprises. En effet, un grand nombre d'héritiers de parts d'entreprises sont obligés de se dessaisir de leurs titres pour pouvoir acquitter l'ISF. Or, en les obligeant à garder les titres transmis sous le régime de faveur pendant huit ans 31 ( * ) , leur patrimoine entre dans l'assiette de l'ISF sans qu'ils puissent céder une partie des titres pour acquitter leur cotisation, à l'exception de ceux qui remplissent les conditions permettant de considérer le biens transmis comme des biens professionnels.

Elle vous proposera donc un article additionnel qui étend le régime des biens professionnels aux parts et actions détenues par des associés ayant souscrit un pacte d'actionnaires répondant à des conditions précises de nature et de durée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 4 bis

Extension du régime des biens professionnels, au regard de l'ISF, aux parts et actions détenues par des associés liés par une convention de vote

Commentaire : le présent article additionnel vise à étendre le régime des biens professionnels, au regard de l'ISF, aux parts et actions détenues par des associés liés par un pacte répondant à certaines conditions de nature et de durée.

Les articles 789 A et 789 B du code général des impôts ont institué, au regard des droits de mutation, un abattement spécifique de 50 % sur la valeur des titres ou des biens d'une entreprise transmis par décès, dans le cadre d'un " pacte d'actionnaire ".

Toutefois, la fixation de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ne tient toujours pas compte de la conclusion desdits pactes.

En d'autres termes, les actionnaires minoritaires qui auraient conclu avec d'autres un pacte portant sur au moins 25 % ou 34 % du capital, selon le cas, continuent à devoir inclure les biens ayant fait l'objet du pacte dans l'assiette de leur impôt, en dépit des pourcentages ainsi atteints qui correspondent aux seuils d'exonération prévus par l'article 885 O bis du CGI.

Les dispositions proposées aux articles 789 A et 789 B précités ne résolvent donc qu'une partie du problème des transmissions d'entreprises. En effet, un grand nombre d'héritiers de parts d'entreprises sont obligés de se dessaisir de leurs titres pour pouvoir acquitter l'ISF. Or, en les obligeant à garder les titres transmis sous le régime de faveur pendant huit ans 32 ( * ) , leur patrimoine entre dans l'assiette de l'ISF sans qu'ils puissent céder une partie des titres pour acquitter leur cotisation, à l'exception de ceux qui remplissent les conditions permettant de considérer les biens transmis comme des biens professionnels.

Il existe donc une distorsion de traitement entre l'héritier qui prendrait en charge la gestion de l'entreprise et qui pourrait bénéficier du régime des biens professionnels dès lors qu'il posséderait 25 % des titres transmis, et les autres héritiers.

C'est la raison pour laquelle votre rapporteur général vous propose d'adopter un amendement qui crée un article 885 O bis A nouveau dans le CGI afin d'accorder le caractère de biens professionnels au sens de l'ISF aux parts ou actions de sociétés détenues par des associés détenant collectivement au moins 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé, ou, à défaut, sur au moins 34 %, à condition qu'ils soient liés par un engagement collectif de conservation des titres pendant une période de cinq ans au moins et qu'ils exercent leurs droits de vote de manière à conforter la stratégie du chef d'entreprise.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 5

Suppression de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur (vignette) due par les personnes physiques pour leurs voitures particulières

Commentaire : le présent article propose d'exonérer du paiement de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, dite " vignette ", les voitures particulières et les véhicules utilitaires de moins de deux tonnes dont les propriétaires sont des personnes physiques, des associations et des syndicats.

I. LE DROIT ACTUEL

La taxe différentielle sur les véhicules à moteur a été instituée par la loi du 30 juin 1956 portant institution d'un Fonds national de solidarité, à l'initiative du président Paul Ramadier. Elle ne constituait alors qu'une recette parmi d'autre, et provisoire de surcroît, destinée à alimenter ce fonds, créé " en vue de promouvoir une politique générale de protection des personnes âgées par l'amélioration des pensions, retraites, rentes et allocations de vieillesse ". Le fonds de solidarité vieillesse et le fonds spécial d'invalidité, créés par la loi n° 93-936 du 22 juillet 1993 se sont substitués à ce fonds de solidarité.

La taxe différentielle sur les véhicules à moteur dite " vignette ", a été transférée au profit des départements par l'article 99-II de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la réforme des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat, à compter du 1 er janvier 1984 , afin de compenser les charges supplémentaires résultant de la nouvelle répartition des compétences en matière d'aide sociale. Il convient de noter que la vignette est le seul impôt dont l'intégralité du produit revient aux départements . Une exception a cependant été prévue pour la Corse, où la vignette n'est pas attribuée aux deux départements de la Haute Corse et de la Corse du sud, mais à la collectivité territoriale de Corse. Cette spécificité s'explique par le fait que les compétences d'aide sociale et de santé qui ont été transférées aux départements n'ont pas été transférées à la Corse par les lois de décentralisation.

Il convient de rappeler que les lois du 2 mars 1982 et du 7 janvier 1983 ont fixé les principes de base relatifs à la compensation des accroissements de charges qui résultent, pour les collectivités concernées, des transferts de compétence. Le principe fondamental posé par la loi est, nous y reviendrons plus loin, la compensation intégrale des charges résultant des transferts. Le financement des nouvelles charges s'est effectué pour partie, par le transfert aux collectivités locales de ressources fiscales nouvelles, et pour le reliquat, par le transfert de ressources budgétaires dans le cadre de la dotation générale de décentralisation , sous le contrôle d'une commission consultative d'évaluation des charges. Ces ressources transférées ont été calculées pour être strictement équivalentes aux dépenses effectuées par l'Etat en 1983 ou au cours des années antérieures, au titre des compétences transférées. Pour la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, les produits retenus pour le calcul des ressources transférées ont été calculés à partir des produits perçus dans chaque département au cours de l'année 1983, après correction des effets dus à l'obligation d'achat dans le département d'immatriculation. Or, ces produits n'ont compensé en général que partiellement les charges transférées. Le solde a donc fait l'objet d'une attribution de dotation générale de décentralisation, qui évolue chaque année comme la dotation globale de fonctionnement. Cette méthode de compensation a permis de prendre en compte l'inégalité entre les départements en matière fiscale , puisque toute insuffisance de recette fiscale a été compensée par le bais d'attributions de dotation générale de décentralisation.

L'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales prévoit le régime des transferts d'impôts en contrepartie des charges transférées aux collectivités locales. Le deuxième alinéa précise que, " dans le cas où, l'année d'un transfert de compétence, le produit des impôts affectés à cette compensation (...) est supérieur, pour une collectivité donnée, au montant des charges qui résultent du transfert de compétences, (...), il est procédé l'année même aux ajustements nécessaires . A cette fin, le produit des impôts revenant à la collectivité concernée est diminué, au profit du Fonds de compensation de la fiscalité transférée, de la différence entre le produit calculé sur la base des taux en vigueur à la date du transfert et le montant des charges visé ci-dessus ainsi que la moitié du supplément de ressources fiscales résultant des dispositions de l'article 14 de la loi de finances pour 1984. Dès l'année du transfert et pour les années ultérieures, le montant de cet ajustement évolue dans les conditions prévues à l'article L. 1614-1. Il est modifié, en tant que de besoin, pour tenir compte des accroissements de charges résultant des nouveaux transferts de compétences ".

Ainsi, lorsque des départements perçoivent un montant de recettes fiscales supérieur au niveau des charges que la fiscalité transférée est censée compenser, des ajustements sont opérés au détriment de ces départements 33 ( * ) .

Les départements " surfiscalisés " subissent donc un ajustement inverse de celui opéré par le biais de la DGD pour les collectivités qui ne bénéficient pas de recettes fiscales à la hauteur des charges qui leur ont été transférées. En 1999, 13 départements ont subi un écrêtement du produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, pour un montant total de 2.122 millions de francs.

A. LE PAIEMENT DE LA TAXE

La taxe différentielle sur les véhicules à moteur est annuelle, et sa période d'imposition s'étend du 1 er décembre au 30 novembre de l'année suivante. Le paiement de la taxe incombe en général au propriétaire du véhicule .

Toutefois, il est à la charge du locataire pour les véhicules loués pour plus de deux ans ou ayant fait l'objet d'un crédit-bail. La taxe s'applique à l'ensemble des véhicules immatriculés sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer. L'article 1599 J du code général des impôts précise que la vignette représentative du paiement de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur doit être acquise dans le département d'immatriculation du véhicule. Il convient de reconnaître que cette règle est la seule qui permette la localisation de cette taxe : la référence aux indications figurant sur le certificat d'immatriculation constitue en effet un critère simple et incontestable pour déterminer le taux de la taxe et le département destinataire de la recette, qui est celui de l'immatriculation où doit être acquise la vignette.

Pour les véhicules appartenant à des sociétés dont le parc automobile est important, ou appartenant à des sociétés de location, celles-ci ont la possibilité de les immatriculer au lieu de leurs établissements principaux ou secondaires, à la condition néanmoins que ces derniers soient effectivement inscrits au registre du commerce et des sociétés.

Pour les véhicules pris en location de longue durée ou avec option d'achat, la carte grise est établie au nom de la société en location propriétaire, mais elle est normalement revêtue de la mention des noms et adresse du locataire et délivrée dans le département de ce dernier qui est, aux termes de l'article 1599 E du code général des impôts, redevable de la taxe au lieu et place du propriétaire.

Les véhicules mis en circulation pour la première fois bénéficient d'un délai d'un mois pour acquitter la taxe. Cependant, lorsqu'un véhicule est mis en circulation pour la première fois entre le 15 août et le 30 novembre, la vignette correspondant à l'année en cours n'est pas exigible.

Enfin, les personnes séjournant à l'étranger pendant la période d'éligibilité de la taxe disposent d'un délai d'un mois, à compter de leur retour en France, pour se procurer la vignette dans leur département d'immatriculation, à condition de justifier de leur séjour à l'étranger. Elles ne sont donc pas passibles de l'amende fiscale applicable en cas de défaut de vignette, égale au double de la taxe et prévue à l'article 1840 N quater du code général des impôts. Dans ces conditions, et si la durée des séjours sur le sol national est inférieure à un mois, la taxe différentielle sur les véhicules à moteur peut ne pas être acquittée par les intéressés.

B. LES EXONÉRATIONS PRÉVUES PAR LA LOI

De nombreuses exonérations sont prévues par la loi. Elles sont relatives, soit à la nature du véhicule, soit à son utilisation, soit à la qualité de son propriétaire.

1. Les exonérations attachées à la qualité du propriétaire du véhicule

L'article 1599 F du code général des impôts prévoit des exonérations spécifiques au profit des personnes invalides et handicapées. Il indique que sont exonérés de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, les véhicules de tourisme appartenant :

- aux bénéficiaires des articles L. 36 et L. 37 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- aux pensionnés dont le taux d'invalidité est au moins égal à 80 % et qui sont titulaires de la carte d'invalidité portant la mention " station debout pénible " ;

- aux infirmes civils titulaires de la carte prévue à l'article 173 du code de la famille et de l'aide sociale et portant la mention " station debout pénible " ;

- aux aveugles titulaires de la carte prévue aux articles 173 et 174 du code de la famille et de l'aide sociale.

Les véhicules appartenant aux voyageurs représentants placiers (VRP) sont également exonérés.

Dans les cas cités ci-dessus, l'exonération est limitée à un seul véhicule par propriétaire.

2. Les exonérations dues à la nature du véhicule

Des exonérations sont prévues pour les véhicules ayant plus de 25 ans, les voitures d'admission temporaire, les transports en commun, les taxis, les ambulances, les véhicules sanitaires légers munis d'une vignette gratuite, les véhicules spéciaux des infirmes et des mutilés.

Ces exonérations concernent également les tracteurs et machines agricoles, les matériels de travaux publics, certains engins ou véhicules spéciaux, les véhicules à deux roues et les véhicules de fort tonnage, qui sont soumis à la taxe à l'essieu.

Enfin, les véhicules de démonstration utilisés par les concessionnaires et les agents de marque, les véhicules spécialement aménagés pour le transport du lait, du vin, du bétail et de la viande, et qui ne sortent pas de leur limite de rattachement ainsi que, d'une manière générale, les véhicules dispensés ou exonérés de la taxe et non aisément identifiables, peuvent bénéficier de la vignette gratuite.

A compter de la vignette du millésime 1999, l'article 1599 F bis du code général des impôts prévoit que les conseils généraux peuvent exonérer, en totalité ou à concurrence de la moitié de la vignette, les véhicules qui fonctionnent exclusivement ou non, au moyen de l'énergie électrique, au gaz naturel ou au gaz de pétrole liquéfié. Pour la vignette du millésime 2000, 35 départements ont fait bénéficier ces véhicules alternatifs d'une exonération totale, et 25 d'une exonération partielle.

3. Une interprétation parfois délicate des exonérations prévues par la loi

Les exonérations prévues, non au titre de la nature du véhicule ou de son propriétaire, donnent lieu à interprétation, dès lors que c'est l'affectation du véhicule qui détermine l'obligation d'acquitter la taxe.

Les réponses du ministère du budget aux questions écrites des parlementaires soulignent que la frontière est parfois délicate à tracer entre les véhicules exonérés et ceux qui sont redevables de la taxe :

- en réponse à une question écrite de notre collègue Alain Joyandet 34 ( * ) soulignant le fait que les établissements publics accueillant des personnes âgées et handicapées acquittent le prix de la vignette automobile, le ministre de l'économie indique que " l'article 1599 F du code général des impôts exonère de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur les voitures appartenant aux pensionnés, infirmes ou aveugles visés à cet article. L'exonération est également appliquée, sous certaines conditions, aux véhicules appartenant à des personnes qui leur sont proches ou aux personnes qui les ont recueillis à leur foyer. Il en est de même pour les véhicules immatriculés au nom des associations de handicapés, à la condition que ces véhicules soient aménagés et utilisés uniquement pour le transport des personnes handicapées ".

- en réponse à une question écrite de notre collègue Fernand Demilly 35 ( * ) , soulignant la disparité qui existe en matière d'exonération de la vignette pour les véhicules commerciaux dans la mesure où " tous les commerçants (...) ne sont pas traités également puisque la législation prévoit l'exonération de la vignette " des véhicules spécialement aménagés pour le transport du lait, du vin du bétail et de la viande ". Le boucher peut donc y prétendre mais pas le poissonnier ou le boulanger ", le ministre de l'économie indique que " une mesure d'exonération de tous les commerçants ambulants n'est pas envisagée , car elle entraînerait des demandes de reconventionnement auxquelles il serait difficile de s'opposer de la part des propriétaires de véhicules servant à l'exercice d'une profession mais aussi de catégories de redevables également dignes d'intérêt (associations humanitaires ou caritatives, personnes âgées, familles nombreuses, chômeurs...). Or, les pertes de recettes liées à de nouvelles exonérations amputeraient les ressources des départements au profit desquels la taxe différentielle est perçue depuis 1984 ".

- en réponse à une question écrite de notre collègue François Delga 36 ( * ) , rappelant que la vignette gratuite sur les camions-bétaillères n'est attribuée que pour le transport des animaux et ne donne aucun droit à effectuer au même titre, le transport des produits nécessaires aux besoins de la ferme, le ministère du budget indique que " la taxe différentielle sur les véhicules à moteur est applicable à tous les véhicules mentionnés au titre II du livre 1 er de la deuxième partie du code de la route, c'est-à-dire les voitures particulières, les camions et les camionnettes. Ce principe comporte des exceptions qui sont limitativement énumérées et qui sont plus liées à des droits acquis qu'à des justifications économiques . C'est la raison pour laquelle il a été pris pour règle depuis de nombreuses années de refuser toutes les demandes qui avaient pour objet d'étendre la portée de ces exemptions et, notamment, celles concernant les bétaillères utilisées par les agriculteurs qui ne sont pas exclusivement affectées au transport du bétail. Cette attitude est aujourd'hui d'autant plus justifiée que les pertes de recettes liées à de nouvelles exonérations amputeraient les ressources des départements, ce qui est incompatible avec leurs recettes budgétaires ".

Ces quelques exemples appellent plusieurs remarques concernant les exonérations prévues par la loi et leur mise en oeuvre sur le terrain :

- d'un part, la difficulté qu'il peut y avoir à distinguer les bénéficiaires des exonérations de ceux qui sont redevables de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur. Le critère de l'usage exclusif d'un véhicule apparaît en effet peu pertinent pour apprécier le champ de la taxe. Les exemples cités ci-dessus le montrent bien : un agriculteur dont la bétaillère n'est pas exclusivement affectée au transport du bétail ne bénéficie pas de l'exonération ; de même les véhicules aménagés immatriculés au nom des associations de handicapés sont exonérés à condition qu'ils soient utilisés uniquement pour le transport des personnes handicapées. Ces deux exemples montrent toute la difficulté de faire respecter la frontière qui détermine le droit à exonération.

- d'autre part, le choix de figer le dispositif d'exonérations : le gouvernement indique que les exonérations sont davantage liées à des droits acquis qu'à des justifications économiques ce qui est une manière implicite de reconnaître la cohérence limitée du dispositif existant. Le gouvernement justifie ce choix de ne pas retoucher la liste des exonérations prévues par la loi par le fait qu'étendre les exonérations priverait les départements de recettes fiscales. Cet argument ne paraît guère recevable, dès lors que la loi a étendu progressivement les dégrèvements et les exonérations en matière d'impôts perçus par les collectivités locales (taxe d'habitation et taxes foncières notamment), en compensant à due concurrence les pertes de recettes fiscales subies par celles-ci.

Au total, il convient de souligner que les cas d'exonérations sont relativement peu nombreux, puisqu'ils ne concernent qu'environ 5 % des véhicules immatriculés.

C. LES TARIFS

A compter de la période d'imposition du 1 er décembre 1984 au 30 novembre 1985, le tarif des vignettes est fixé chaque année par les conseils généraux. Ceux-ci peuvent donc, s'ils le souhaitent, modifier les taux qui s'appliqueront à la période d'imposition suivante. Les nouveaux tarifs doivent, dans ce cas, être notifiés par le préfet aux services fiscaux avant le 30 avril de chaque année. A défaut d'une décision du conseil général intervenue dans les délais légaux, les taux appliqués au cours de la période précédente sont automatiquement reconduits.

Des règles doivent être respectées par les conseils généraux quant à la fixation des taux de la taxe, afin de préserver son caractère " différentiel ", c'est-à-dire progressif. Par conséquent, les modalités de fixation des taux sont les suivantes :

le conseil général détermine le tarif de la vignette applicable aux véhicules de moins de cinq ans et d'une puissance fiscale inférieure ou égale à 4 CV ;

les autres tarifs sont ensuite déterminés en appliquant au tarif ci-dessus les coefficients multiplicateurs indiqués dans le tableau ci-dessous, qui peuvent être modifier dans la limite de 5 %.

Fourchette dans laquelle les coefficients multplicateurs peuvent être modulés
Voitures dont l'âge n'excède pas 5 ans et ayant une puissance fiscale de

5 à 7 CV

8 à 9 CV

10 et 11 CV

12 à 14 CV*

15 et 16 CV

17** et 18 CV

19 et 20 CV

21 et 23 CV

24 CV et +

Voitures de + de 20 ans mais - de 25 ans d'âge

Montant de la

maxi (+ 5 %)

1,995

4,725

5,565

9,87

12,075

14,805

22,155

33,285

49,98

0,42

vignette

taux normal

1,9

4,5

5,3

9,4

11,5

14,1

21,1

31,7

47,6

0,4

1 à 4 CV

mini (- 5 %)

1,805

4,275

5,035

8,93

10,925

13,395

20,045

30,115

45,22

0,38

* Coefficient applicable au tarif de base pour déterminer le tarif applicable aux véhicules utilitaires d'une puissance fiscale de 12 à 16 CV.

** Coefficient applicable au tarif de base pour déterminer le tarif applicable aux véhicules utilitaires d'une puissance fiscale de 17 CV et plus.

Pour les véhicules de plus de 5 ans, l'article 1599 I du code général des impôts précise que les tarifs sont réduits de moitié pour les véhicules de 5 à 20 ans d'âge. Pour les véhicules de 20 à 25 ans d'âge, la taxe est appliquée de manière uniforme à l'ensemble des véhicules, quelle que soit par ailleurs la puissance fiscale du véhicule considéré ; son tarif correspond à 40 % du tarif appliqué aux véhicules de moins de 5 ans d'âge dont la puissance fiscale est comprise entre 1 et 4 chevaux. Au delà de 25 ans d'âge, les véhicules sont exonérés du paiement de la taxe.

Enfin, il convient de noter que l'Etat majore de 3 % les tarifs votés par les conseils généraux, dont 2 % reviennent aux distributeurs de la vignette, et 1 % est perçu par l'Etat afin de couvrir ses frais d'impression et de distribution de la vignette.

Le cas de la Marne, symbole de la libre administration des collectivités locales

A l'occasion de l'examen du rapport sur les orientations budgétaires du conseil général de la Marne pour l'exercice 1989, son président, notre collègue Albert Vecten, avait suggéré la suppression totale, en trois ans, de la vignette automobile dans son département. Cette suppression visait à faire bénéficier les contribuables de la gestion rigoureuse du département. Le choix de la vignette comme vecteur d'une réduction de la pression fiscale se justifiait par le fait que la vignette est un impôt qui touche la quasi-totalité des ménages, compte tenu des exonérations limitées prévues par la loi, et plus particulièrement, en milieu rural, où les familles possèdent souvent deux véhicules. En réponse à une question au gouvernement visant à déterminer si l'application d'un tarif zéro de la vignette était possible, le ministre de l'initérieur, Pierre Joxe avait reconnu qu'un tarif zéro était imaginable, mais avait ajouté que " si l'orientation que vous avez évoquée prenait forme dans votre département, voire dans plusieurs, inévitablement les interrogations du gouvernement sur la nécessité de réexaminer l'indexation de la DGF seraient envisagées dans des perspectives nouvelles . (...) Je souhaite, Monsieur le Sénateur, que vous preniez en considération ces différentes observations et que vous renonciez à votre projet que je trouve funeste ".

Le conseil général de la Marne n'a pas choisi d'établir un tarif zéro. Cependant les tarifs ont été abaissés de 12 % pour le millésime 1990, et l'année suivante, de 10 % pour les véhicules dont la puissance fiscale était inférieure à 10 CV, et de 5 % pour les véhicules d'une puissance fiscale supérieure. Depuis 1990, les tarifs de la vignette dans la Marne n'ont pas été modifiés, se situant à un niveau près de deux fois inférieur à aux tarifs pratiqués en moyenne par les autres départements.

Ces deux diminutions des tarifs ont fait chuter à due concurrence le produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur dans la Marne, le produit passant de 88,8 millions de francs en 1988 à 78 millions en 1989, et à 72,7 millions de francs en 1990. A partir de 1991, le produit de la taxe a progressé annuellement en moyenne de 3,5 millions de francs. A compter de 1996, le produit de la taxe a en revanche augmenté très fortement : celui-ci est passé de 91,1 millions de francs en 1995 à 141,7 millions de francs en 1996 (soit une hausse de 55,4 %), puis à 195,8 millions de francs en 1997 (soit une hausse de 38,2 %) et à 240,1 millions de francs en 1998 (soit une nouvelle hausse de 22,6 %). En trois ans, le produit de la taxe perçue par le département de la Marne a donc été multiplié par 2,6.

Cette hausse correspondait, pour l'essentiel, à l'accroissement du parc automobile immatriculé dans le département. La diminution des tarifs de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur dans le département de la Marne a en effet créé une forte incitation, pour les loueurs de véhicules, à faire immatriculer ceux-ci dans ce département. A la hausse du produit perçu par la Marne correspond, pour les années citées ci-dessus, une stagnation, voire une régression du produit perçu par les départements de la région parisienne, ce qui confirme la délocalisation du parc automobile des loueurs de véhicules de cette région vers la Marne.

De nombreux départements ont considéré que la diminution des tarifs de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur pratiquée par le conseil général de la Marne constituait une forme de " dumping fiscal ", qui pénalisait l'évolution de leur propres recettes liées à la perception de cette taxe. Un débat s'est alors engagé afin de déterminer les aménagements possibles et souhaitables au dispositif en vigueur pour éviter une concurrence fiscale entre les départements. L'un des principaux éléments de ce débat portait sur l'hypothèse d'une modification des obligations en matière d'immatriculation des véhicules appartenant à des sociétés.

En 1998, lors de la discussion du projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier à l'Assemblée nationale, un amendement déposé par nos collègues députés Didier Migaud et Augustin Bonrepaux avait proposé, d'une part, de fixer un tarif " plancher " pour la vignette, et, d'autre part, de retenir comme critère d'immatriculation et de paiement de la vignette, le lieu d'utilisation habituelle d'un véhicule.

A l'occasion de la discussion du projet de loi de finances pour 1998 et, en particulier, d'un article visant à réformer le mode de calcul de la puissance fiscale des véhicules, la " bataille de la Marne " s'est engagée au Sénat à propos de plusieurs amendements qui visaient notamment à préciser que, pour les véhicules appartenant à une entreprise, la vignette devait être acquise sur le lieu principal de stationnement du véhicule, ou au lieu du principal établissement de son propriétaire.

D. LES MODALITÉS DE RECOUVREMENT ET DE VERSEMENT DU PRODUIT AUX DÉPARTEMENTS

L'article 25 de la loi de finances pour 1984 indique les conditions dans lesquelles les recettes issues de la perception par les services des impôts, du produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, sont versées aux départements :

" La taxe différentielle sur les véhicules à moteur (...) perçue pour le compte des départements métropolitains et d'outre-mer, peut faire l'objet d'avances de l'Etat. Ces avances sont attribuées mensuellement, le premier versement étant effectué avant le 31 janvier. Pour chaque département, le montant mensuel de l'avance ne peut excéder un douzième du produit des taxes encaissées au cours de la dernière période d'imposition connue. Aucune avance n'est allouée au titre du mois de décembre. Les attributions d'avances ne peuvent avoir pour effet de porter les versements effectués pendant l'année civile à un montant supérieur au produit réel des taxes encaissées au cours de cette année. La régularisation éventuelle est effectuée d'office. Ces opérations sont retracées sur un compte d'avance particulier ouvert dans les écritures du Trésor et intitulé " Avances aux départements sur le produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur " ".

Dans le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour 1999, elle relève, pour le compte d'avance n° 903-52, " Avances aux départements sur le produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur ", les montants suivants de recettes et de dépenses, en prévision et en exécution :

Recettes

Dépenses

Prévues

Effectives

Prévues

Effectives

Compte
n° 903-52


16.200,00


14.231,24


16.200,00


14.231,24

(en millions de francs)

Les balances d'entrée et de sortie sont égales à zéro, du fait de la régularisation du compte effectuée sur la ligne 901-11 du budget général.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le présent article énumère les conditions donnant lieu à l'exonération de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, et précise ensuite les modalité de compensation de la perte de recettes fiscales induite pour les départements et pour la collectivité territoriale de Corse, au titre de l'année 2000 et des années postérieures.

Le 1° du I du présent article propose de rédiger différemment l'article 1599 F du code général des impôts, qui prévoit les différents cas d'exonération du paiement de la taxe. Il substitue aux quatre cas d'exonération prévus par le texte en vigueur, un dispositif unique, visant à exonérer " les personnes physiques, à raison des voitures particulières, des véhicules carrossés en caravanes ou spécialement aménagés pour le transport des handicapés et dont elles sont propriétaires ou locataires en vertu d'un contrat de crédit-bail ou de location de deux ans ou plus ". Par ailleurs, l'exonération est étendue aux véhicules réservés exclusivement au transport gratuit des handicapés des associations et des établissements publics ayant pour unique activité l'aide aux handicapés.

Le 2° du I du présent article insère un article 1599 I bis dans le code général des impôts, précisant les conditions d'exigibilité de la vignette pour les véhicules qui ne bénéficieront pas de l'exonération prévue au 1° du I. Cet article ne modifie pas les conditions d'exigibilité qui sont en vigueur actuellement.

Le II indique que les exonérations prévues au 1° du I seront valables à compter de la période d'imposition s'ouvrant le 1 er décembre 2000. Par conséquent, elles s'appliqueront dès le millésime 2001 de la vignette, qui doit être acquise avant le 1 er décembre de cette année.

Il convient de remarquer que, compte tenu du calendrier spécifique applicable à la taxe différentielle sur les véhicules à moteur, cette disposition emporte un effet rétroactif . En effet, la loi de finances n'est promulguée qu'à la fin de l'année, alors que la période d'imposition de la vignette court du 1 er décembre au 30 novembre de l'année suivante. Il s'agit donc ici d'un cas particulier, puisque les redevables de la taxe seront, d'un strict point de vue juridique, en infraction avec les dispositions législatives en vigueur en n'acquittant pas la taxe au 1 er décembre. En somme, l'absence de campagne de la vignette pour 2001 pour les véhicules dont le présent article propose l'exonération présage, une fois n'est pas coutume, du vote de cet article par le Parlement. Au delà, il s'agit d'un problème plus grave : la loi de finances pour 2001 traite ici d'une matière qui relève en partie de l'exercice 2000 puisque la période d'imposition de la vignette s'étend du 1 er décembre d'une année au 30 novembre de l'année suivante. L'Etat va donc, en l'absence de texte le prévoyant, s'abstenir de percevoir la vignette, qui constitue une imposition de toute nature. Cette abstention constitue, d'un strict point de vue juridique, une infraction qui peut conduire des comptables publics devant la Cour de discipline budgétaire et financière.

Le III du présent article traite des modalités de compensation de la perte de recettes fiscales pour les départements . Il indique que les pertes de recettes fiscales seront compensées " soit par une majoration des attributions de dotation générale de décentralisation, soit par des diminutions des ajustements prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales ".

La compensation versée aux départements s'inscrit naturellement dans le cadre des dispositions relatives à la fiscalité transférée , qui imposent une compensation intégrale des pertes de produit fiscal. En effet, la rédaction proposée reprend les dispositions de l'article L. 1614-5 du code général des collectivités territoriales, qui prévoit que " les pertes de produit fiscal résultant, le cas échéant, pour les départements ou les régions, de la modification, postérieurement à la date de transfert des impôts et du fait de l'Etat de l'assiette ou des taux de ces impôts sont compensées intégralement, collectivité par collectivité, soit par des attributions de dotation de décentralisation, soit par des ajustements prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1614-4 ".

La diminution des ressources fiscales des départements induite par l'extension de l'exonération de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur sera essentiellement effectuée par le biais d'attributions de dotation générale de décentralisation. Cependant, pour les départements dits " surfiscalisés " (dont on a indiqué plus haut qu'ils étaient au nombre de 13 en 1999), la compensation pourra être effectuée, pour une part, par une réduction des ajustements opérés sur leurs montants de recettes fiscales.

Le gouvernement a souhaité que l'exonération prévue par le présent article entre en vigueur dès la période d'imposition à venir, à compter du 1 er décembre 2000. Les modalités de compensation pérennes ne seront mises en oeuvre qu'à compter de l'année 2001. Pour l'année 2001, le montant de la compensation sera calculé sur la base des taux votés par les conseils généraux avant le 30 avril 2000, pour la période d'imposition allant du 1 er décembre 2000 au 30 novembre 2001, appliqués au parc automobile tel qu'il sera constaté au 31 décembre 2000.

Le produit qui aurait dû être théoriquement perçu par les collectivités en 2000 sera reconstitué en ajoutant à cette évaluation les sommes perçues par les collectivités entre le 1 er janvier 2000 et le 15 août 2000, au titre des véhicules neufs ou des véhicules possédés par des personnes résidant à l'étranger et de retour en France au cours de cette période. Ces sommes constituent en effet un produit effectivement encaissé, dont une partie importante correspond à des véhicules bénéficiant de l'exonération à compter de la période d'imposition à venir. Le produit théorique ainsi obtenu sera ensuite diminué des recettes perçues par les départements pour les véhicules non exonérés par le présent article .

Le montant correspondra alors à la perte de recettes subie par les départements au titre de l'année 2000. Il faut souligner ici que l'évaluation ainsi faite ne vise pas à calculer la perte de recettes liée à la vignette au cours d'une période d'imposition (du 1 er décembre au 30 novembre de l'année suivante), mais à calculer la perte de recettes subie par les départements au cours d'un exercice budgétaire , relativement aux prévisions de recettes inscrites dans leurs budgets prévisionnels.

Schématiquement, la perte de recettes subie par les départements au titre de l'exercice 2000 sert de base de calcul à la compensation versée à compter de 2001 et est calculée de la manière suivante :

Bases de calcul de la compensation versée aux départements à compter de 2001 :

Produit théorique perçu au titre du millésime 2001 par les départements

-

Part de ce produit correspondant aux véhicules non exonérés pour le millésime 2001

+

Recettes encaissées en 2000 par les départements , au titre du millésime 2000 (nouvelles immatriculations, retour de l'étranger véhicules immatriculés en France, infractions...)

Le montant obtenu sera ensuite revalorisé en fonction du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour 2001, dont le présent projet de loi de finances prévoit qu'il augmentera de 3,42 %.

Le versement du produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur s'effectue, selon l'article 25 de la loi de finances pour 1984, par le biais d'avances mensuelles (" douzièmes ") calculées en fonction des sommes perçues au cours de la période d'imposition précédente.

Le IV du présent article prévoit que, pour l'année 2001 , la compensation versée aux départements dérogera à cette règle, en ne reprenant pas les montants perçus lors de la période d'imposition précédente pour le calcul des " douzièmes ". En effet, l'application de la règle fixée par la loi de finances de 1984 conduirait à verser aux départements un produit largement supérieur au produit qui sera effectivement encaissé en 2001, compte tenu du dispositif d'exonération prévu par le présent article, qui doit entrer en vigueur à compter de cette année.

Par conséquent, pour l'année 2001, le montant des avances mensuelles accordé aux départements sera calculé sur la base de la prévision d'encaissement totale des recettes de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur pour cette année, soit 2,5 milliards de francs . Compte tenu des modalités de versement du produit de la vignette aux départements prévues par l'article 25 de la loi de finances pour 1984 et exposées plus haut, les versements mensuels correspondant à la période d'imposition 2001 (du 1 er décembre 2000 au 30 novembre 2001) ont été effectués à compter du mois de janvier de cette année. Ces versements ont été calculés sur la base du produit effectivement encaissé au titre du millésime 2000 de la vignette.

Or, les recettes effectivement perçues au titre du millésime 2001 de la vignette seront largement inférieures au montant des avances, puisque l'exonération prévue par le présent article entre en vigueur dès l'ouverture de la prochaine période d'imposition. Par conséquent, les recettes perçues par les départements ne correspondront pas aux recettes effectivement perçues par l'Etat, et le compte d'avance connaîtra un solde négatif important à la fin du présent exercice .

La mise en oeuvre des dispositions relatives à la fiscalité transférée dès l'année 2000 aurait eu des conséquences pratiques particulièrement complexes . En effet, elles auraient contraint les départements à rembourser les avances perçues, qui auraient ensuite été compensées par une majoration de la dotation générale de décentralisation perçue au titre de l'année 2000.

Compte tenu des inconvénients pratiques évident d'une telle procédure, le gouvernement a préféré déroger aux principes relatifs à la fiscalité transférée, et mettre en oeuvre des modalités originales de compensation dans le cadre du compte d'avances.

Le V du présent article prévoit donc les conditions de régularisation de la somme perçue par les départements pour l'année 2000 , en modifiant les conditions d'attribution des avances, prévues au cinquième alinéa de l'article 25 de la loi de finances pour 1984 (" Les attributions d'avances ne peuvent avoir pour effet de porter les versements à un montant supérieur au produit réel des taxes encaissées au cours de cette même année. La régularisation éventuelle est effectuée d'office "). L'exonération prévue par le présent article serait en effet difficilement conciliable avec le maintien des dépenses du compte d'avances, qui seraient nécessairement largement supérieures aux recettes encaissées au cours de l'année.

Il précise donc que le montant des avances versées aux départements sera égal, pour l'année 2000 à ce que les départements auraient du percevoir en l'absence de réforme et non aux sommes qui seront effectivement perçues au cours de cette même année. Par conséquent , le compte d'avances connaîtra un solde négatif significatif (d'environ 10 milliards de francs) à la fin de l'exercice 2000.

L'évaluation du produit qu'auraient du percevoir les départements au titre de l'exercice 2000 nécessite de connaître dans le détail le parc automobile existant en France. En effet, il s'agit de connaître le nombre de véhicules, par département et par puissance fiscale. Cette opération de recensement sera effectuée en utilisant le fichier national des immatriculations. Par la suite, il conviendra d'extraire de ce recensement l'ensemble des véhicules ne bénéficiant pas de l'exonération prévue par le présent article, ainsi que l'ensemble des véhicules qui bénéficiaient d'ores et déjà d'une exonération compte tenu de la qualité du propriétaire, de l'énergie utilisée, de l'âge du véhicule ou de son utilisation.

Compensation des départements pour l'année 2000

Produit théorique perçu au titre du millésime 2001 par les départements

+

Recettes encaissées en 2000 par les départements , au titre du millésime 2000 (nouvelles immatriculations, retour de l'étranger véhicules immatriculés en France, infractions...)

-

Prélèvements éventuellement effectués en application de l'article L.1614-4 du code général des collectivités territoriales

Les prélèvements effectués en application de l'article L. 1614-4 du code général des collectivités territoriales, concernant les départements dits " surfiscalisés " au regard des charges transférées par les lois de décentralisation, seront déduits du montant servant de base de calcul de la compensation. En effet, ces recettes perçues au titre de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur ne sont pas versées à ces départements, mais sont intégrées au " Fonds de compensation de la fiscalité transférée ". Par conséquent, il apparaît logique que les départements ne bénéficient pas d'une compensation pour des recettes qui ne leur revenaient pas.

Le déficit du compte d'avances sera constaté par la loi de règlement du budget 2000.

Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale indique, dans son rapport, que cette procédure est autorisée par l'article 28 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances. Votre rapporteur général souhaite néanmoins souligner que le dispositif proposé par le présent article, s'il peut se justifier par des considérations pratiques, ne présente pas toutes les garanties juridiques nécessaires. En particulier, l'article 28 précise que " toute avance non remboursée à l'expiration d'un délai de deux ans, ou de quatre ans en cas de renouvellement, doit faire l'objet, selon les possibilités du débiteur :

- soit d'une décision de recouvrement immédiat ou, à défaut de recouvrement, de poursuites effectives engagées dans un délai de trois mois ;

- soit d'une autorisation de consolidation sous la forme de prêts du Trésor assortis d'un transfert à un compte de prêts ;

- soit de la constatation d'une perte probable imputée aux résultats de l'année dans les conditions prévues à l'article 35 ; les remboursements qui sont ultérieurement constatés sont portés en recettes au budget général ".

Il ressort de cet article que la perte est constatée à l'expiration d'un délai de deux ans après que l'avance ait été effectuée . La constatation d'une perte l'année même où l'avance a été faite équivaut stricto sensu à un renoncement à une créance de la part de l'Etat. Il faut noter, en outre, que l'Etat serait parfaitement fondé en droit à ne pas constater les pertes au titre de l'année 2000 et à prendre ultérieurement une décision de recouvrement immédiat des avances qu'il a faites aux collectivités locales , puisque les dispositions de l'ordonnance l'y autorise.

Par ailleurs, les dispositions de l'article 28 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 prévoient qu'une " perte probable " est constatée par la loi de règlement. Or, il s'agit ici d'une perte certaine, délibérée et, pour ainsi dire, organisée . Par conséquent, la procédure ne correspond pas parfaitement à l'esprit, sinon au texte même de l'ordonnance. Cette constatation souligne en réalité l'utilisation quelque peu détournée qui est faite par l'Etat des comptes d'avances en matière d'impôts locaux, par rapport au sens donné par le texte de l'ordonnance organique de 1959.

Le choix du gouvernement peut se justifier par des raisons pratiques. Cependant, la solution juridique mise en oeuvre ne semble pas parfaitement correspondre aux dispositions de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances.

Le VI du présent article prévoit la mise en oeuvre de dispositions spécifiques pour la Corse en matière de compensation de la perte de recettes fiscales. La compensation aura en effet lieu, dès l'année 2000, dans le cadre de la dotation générale de décentralisation, puisque la Corse ne bénéficie pas des avances prévues par l'article 25 de la loi de finances pour 1984, qui précise que ce compte d'avance ne concerne que les " départements métropolitains et d'outre mer ". Cette spécificité s'explique par le fait que les compétences d'aide sociale et de santé qui ont été transférées aux départements dans le cadre de la loi du 22 juillet 1983, n'ont pas été transférées à la Corse. Or, les avances avaient été prévues pour faciliter la prise en charge financière de ces compétences. Par conséquent, la collectivité territoriale de Corse perçoit le produit de la vignette au fur et à mesure de sa perception.

La compensation de la perte de recettes fiscales à la collectivité territoriale de Corse s'effectuera donc, à compter de l'année 2000, par le biais d'attributions de dotation générale de décentralisation, conformément au droit commun. Par conséquent, une mesure spécifique devra être prise en loi de finances rectificative pour 2000 afin d'augmenter l'attribution de dotation générale de décentralisation versée à la collectivité territoriale de Corse à hauteur de l'estimation des recettes qu'elle aurait perçues au titre de l'exercice 2000.

III. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Lors de la discussion du présent article à l'Assemblée nationale, de nombreux amendements ont été proposés par nos collègues députés. Ceux-ci visaient notamment à étendre le bénéfice de l'exonération prévue par le gouvernement à de nouvelles catégories de véhicules redevables de la taxe. Deux amendements significatifs, l'un émanant de la commission des finances, l'autre du groupe communiste, ont été adoptés par l'Assemblée nationale, après avis favorable du gouvernement.

Le premier amendement prévoit d'étendre l'exonération de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur aux véhicules utilitaires de moins de deux tonnes dont elles sont propriétaires ou locataires, en vertu d'un contrat de crédit-bail ou d'un contrat de location de deux ans ou plus.

Le second amendement , présenté par le groupe communiste, vise à étendre l'exonération aux véhicules appartenant aux associations, aux fondations, aux congrégations et aux syndicats professionnels, dont ils sont propriétaires ou locataires en vertu d'un contrat de crédit-bail ou d'un contrat de location de deux ans ou plus. Le coût de cette mesure a été évalué par le rapporteur général du budget à 50 millions de francs.

IV. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général regrette le choix effectué par le gouvernement de supprimer la taxe différentielle sur les véhicules à moteur afin de réduire la pression fiscale des contribuables. Il considère que ce choix, fait dans la précipitation afin de répondre aux tensions provoquées par la hausse des prix des carburants, n'est pas adapté, et déplore une fois encore le mépris dont le gouvernement fait preuve à l'égard des collectivités locales. L'absence de préparation et de concertation est avéré par le fait, ainsi que le relève le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, que l'impression et la diffusion de la vignette " 2001 " a coûté à l'Etat 20,8 millions de francs.

L'hypothèse d'une suppression de la redevance sur la télévision

Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale indique dans son rapport que " le choix d'exonérer du paiement de la vignette les particuliers à raison des véhicules particuliers qu'ils possèdent se légitime aussi par le coût élevé de son recouvrement (...), soit un taux d'intervention de 2,73 %. Ce taux est sensiblement plus élevé que la moyenne du taux d'intervention de l'ensemble des administrations fiscales françaises, qui s'élevait à 1,60 % en 1997 ".

Votre rapporteur général s'étonne de cet argument, dès lors que son homologue de l'Assemblée nationale a défendu publiquement, pendant plusieurs semaines, l'idée d'une suppression de la redevance télévision, en arguant notamment de son coût de recouvrement très élevé. Celui-ci s'élève en effet à 4 % en 1999, d'après les informations fournies par le service de la redevance. Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale indique par ailleurs qu' " il est nécessaire que la mise en oeuvre du présent dispositif aboutisse à un coût substantiellement plus bas du recouvrement des vignettes des véhicules qui resteront assujettis ". Ce souhait risque malheureusement de rester un voeu pieux. En effet, le réduction du nombre de véhicules assujettis devrait au contraire et fort logiquement, accroître le taux d'intervention de l'Etat, compte tenu des économies d'échelles que l'on peut supposer exister dans ce type d'opération. Cela, sans évoquer la question du contrôle et des fraudes, qui seront vraisemblablement considérablement affectés par les dispositions prévues par le présent article.

Votre commission considère que la suppression de cette redevance aurait été préférable, compte tenu :

- de la fraude massive à laquelle elle donne lieu ;

- de son coût de recouvrement particulièrement élevé ;

- de son caractère égalitaire, puisque, à la différence des véhicules, elle est acquittée par tous pour un même montant ;

- de l'absence d'effets négatifs sur la fiscalité locale.

A. UNE NOUVELLE MESURE DE RECENTRALISATION FINANCIÈRE

1. Une taxe considérée comme importante pour l'autonomie des collectivités...

La taxe différentielle sur les véhicules à moteur, dont le gouvernement et le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale tentent de démontrer la faible contribution à l'autonomie fiscale des collectivités locales, et, en l'occurrence, des départements, n'était auparavant pas perçue de la sorte par le gouvernement. En réponse à une question orale de notre collègue Gérard Roujas 37 ( * ) , M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur indiquait ainsi qu' " il s'agit [la vignette] je le rappelle, d' une ressource des départements qui est essentielle au succès de la décentralisation . (...) Je ne pense pas que le sénateur de Haute-Garonne prône une recentralisation jacobine ou un mode de redistribution qui naturellement, porterait atteinte à la liberté des collectivités locales de fixer le taux de leurs impôts . Par conséquent, nous nous acheminons vers d'autres possibilités ".

De même, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998 au Sénat, M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget, avait indiqué " Nous sommes tous très attachés au fait que les taux des impôts qui sont affectés aux collectivités locales soient librement déterminés par celles-ci ". En réponse à un amendement présenté par M. René Regnault, visant à établir une redistribution à l'échelle nationale des recettes de la taxe différentielle pour les véhicules de location, il indiquait que " il y a là une entorse forte aux lois de décentralisation et aux critères de répartition de cet impôt collecté à l'échelon national. (...) Il faut trouver une solution non seulement équitable mais aussi pratique, qui respecte la liberté des collectivités territoriales, telle que l'ont proclamée les lois de décentralisation , tout en étant conforme à l'utilisation de ces véhicules dans les départements ".

2. ... dont la suppression porte atteinte à l'autonomie fiscale des départements ...

Lors de la discussion du présent article à l'Assemblée nationale, le secrétaire d'Etat à l'industrie, M. Christian Pierret, a rappelé que " le manque à gagner pour les départements dû à la modification de la fiscalité devrait être intégralement compensé par une attribution de dotation générale de décentralisation, conformément aux dispositions de l'article 1614-5 du code général des collectivités territoriales. La compensation prévue ne pénalisera pas les départements, puisque l'évolution de la DGF sur les dix dernières années - plus 2,8 % en moyenne - est légèrement supérieure à celle du produit de la vignette perçue par les départements au cours de la même période : plus 2 % par an en moyenne. En effet, la progression du produit de la vignette a sensiblement fléchi ces dernières années, compte tenu d'une stabilisation voire d'une baisse des taux votés : moins 1,2 % pour la seule année 2000. ".

L'évolution des recettes de la taxe différentielle et du montant de la DGF, dont l'indice servira de base pour le calcul de la compensation versée aux départements au cours des années ultérieures, sont comparables au cours de la période 1983-1997, bien que très légèrement favorable à la DGF. La différence est un peu plus marquée pour les années 1997 à 2000, compte tenu de l'indexation favorable de la DGF, qui profite de la reprise économique dans notre pays. Cependant, si la compensation évoluera vraisemblablement d'une manière comparable à celle de la taxe différentielle - il sera d'ailleurs toujours possible, à l'instar de ce qui est pratiqué cette année pour le calcul de la compensation, de calculer le produit théorique de la vignette à partir du fichier national des immatriculations -, la question de principe fondamentale posée par le présent article demeure celle de l'autonomie fiscale des collectivités locales.

Il convient de souligner que le choix du gouvernement de calculer la compensation sur la base des taux votés par les départements en 2000 conduit à pénaliser très fortement pour l'avenir les conseils généraux qui avaient décidé de mettre en oeuvre, cette année, une baisse des tarifs de la taxe. Il s'agit principalement des départements de la Manche (- 50 %), de la Corrèze (- 24,8 %), et de l'Oise (- 20,5 %). Ainsi, le présent article va provoquer, pour le département de la Manche, une perte de recettes définitive de l'ordre de 50 millions de francs.

Or, ces diminutions de tarifs sont décidées par les collectivités, en tenant compte de leur réversibilité, car la fiscalité locale constitue une variable d'ajustement essentielle en cas de tension financière. Le choix de réduire la pression fiscale est transformé, par le biais des exonérations proposées par le présent article, en véritable renoncement définitif à des recettes . La suppression de la fiscalité locale récompense, une fois de plus, les collectivités locales les moins vertueuses : plus les taux pratiqués par elles étaient élevés, plus la compensation sera généreuse à l'avenir.

Répondant aux interrogations sur la remise en cause de l'autonomie fiscale des départements le secrétaire d'Etat à l'industrie indiquait également que " le produit de la vignette ne représente que 5 % environ des recettes totales hors emprunts des départements, et 10 % de leurs recettes fiscales totales. Après prise en compte des effets de la suppression totale de la part salaire de la TP en 2003, les recettes fiscales des départements devraient encore, cette année là, représenter environ 43 % de leurs recettes totales hors emprunts. Le Conseil constitutionnel statuant à propos de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation, laquelle ramène la part des recettes fiscales des régions à 37 % de leurs ressources totales a jugé qu'un tel niveau ne remettait pas en cause l'autonomie fiscale d'une collectivité territoriale. Par conséquent, avec 43 % d'autonomie financière, les départements se situent au-dessus de la limite acceptée par le Conseil constitutionnel pour les régions. Le gouvernement s'engage donc à garantir une compensation laquelle évoluera plutôt plus vite que les ressources procurées par jusqu'à présent aux départements par la vignette. Il garantit par là le maintien d'une autonomie fiscale jugée jusqu'à présent suffisante par des décisions récentes du Conseil constitutionnel ".

3. ... et entraîne des effets néfastes pour l'ensemble des finances publiques

Votre rapporteur général rappelle que la suppression de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur constitue la quatrième mesure de suppression de la fiscalité locale décidée par le gouvernement, après la suppression de la part salariale de la taxe professionnelle, celle des droits de mutation, et celle de la part régionale de la taxe d'habitation, dans la loi de finances rectificative pour 2000.

Il souligne que ces baisses d'impôts produisent un effet d'optique, mais ne constituent, à proprement parler, qu'un transfert de charge du contribuable local vers le contribuable national . En effet, si la baisse de l'impôt local est visible, la hausse de l'impôt national compensateur est, elle, invisible, mais pas indolore.

De plus, ainsi qu'il l'avait déjà indiqué dans son commentaire de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation votée dans la loi de finances rectificative pour 2000, votre rapporteur général ne peut que souligner les effets pervers de ces modalités de réduction de la pression fiscale sur les finances publiques dans leur ensemble : les initiatives du gouvernement en matière d'allégements d'impôts rigidifient les budgets locaux puisqu'elles limitent leur capacité de mobilisation autonome de leurs ressources, mais rigidifient également le budget de l'Etat, en accroissant la part des transferts de ressources indexés.

Le choix effectué par le gouvernement de réduire les impôts locaux plutôt que les impositions qu'il perçoit, rend d'autant plus difficile le retour de l'Etat vers l'équilibre budgétaire, puisqu'il conduit à rendre absolument rigide et bloquée une part croissante de ses dépenses . Les transferts de l'Etat au profit des administrations publiques locales représentaient en effet près de 305 milliards de francs en 1999, soit plus de 15 % de la dépense totale de l'Etat.

On constate donc que l'autonomie fiscale des collectivités locales va de pair avec l'autonomie de la politique budgétaire de l'Etat . Or celle-ci, encadrée et surveillée dans le cadre de la phase III de l'Union économique et monétaire, est déjà fortement grevée par le développement des dépenses de fonctionnement et de personnel des services de l'Etat d'une part, et par les remboursements de notre dette d'autre part. La croissance des dépenses de transfert aux collectivités locales, liées à la prise en charge des dégrèvements et des exonérations, mais également à la prise en charge des compensations consécutive à la suppression des impôts locaux, accentue la contrainte forte qui s'exerce sur le budget de l'Etat. En contrepartie de cette croissance des dépenses incompressibles, l'Etat n'a d'autre choix que d'accroître ses dépenses fiscales, ou de manière plus générale, d'ajuster ses dépenses d'intervention et d'investissement.

Cette réduction des dépenses d'investissement pèse par ailleurs sur le budget des collectivités locales, qui sont contraintes de pallier le désengagement de l'Etat. La voirie nationale et l'enseignement supérieur, constituent deux exemples parmi d'autres de compétences relevant de l'Etat qui font de plus en plus l'objet de financements croisés dans lesquels les collectivités interviennent lourdement, en particulier dans le cadre des contrats de plan.

En réduisant la capacité des collectivités locales de mobiliser leurs propres ressources, l'Etat est conduit, indirectement, à accroître le poids des charges auxquelles celles-ci doivent faire face. Ce mécanisme conduit, par ce double effet, à brouiller considérablement le système de responsabilité et de blocs de compétences qu'ont tenté de mettre en oeuvre les lois de décentralisation de 1982 et 1983.

D'après une étude récente de l'Association des Maires de France, après la prise en compte de la totalité de la suppression de la part salaires de la taxe professionnelle et de sa compensation, en 2003, la part du contribuable national dans les recettes de fonctionnement des collectivités locales atteindra 43 %, dépassant largement la part du contribuable local, soit 31 %. En particulier, le poids des compensations de l'Etat dans les recettes fiscales des collectivités devrait passer de 18 % en 1998 à 35 % en 2003. Cette évolution conduit les collectivités locales à devenir le deuxième poste de dépenses dans le budget de l'Etat derrière l'éducation nationale et devant le ministère de l'emploi et de la solidarité.

B. UNE MESURE DONT L'IMPACT EST GLOBALEMENT FAIBLE, QUI FAVORISE LES COUCHES AISÉES DE LA POPULATION ET LES VÉHICULES POLLUANTS

Il convient de souligner que le coût de la vignette automobile ne représente, en moyenne, qu'une part marginale du coût annuel lié à la possession d'un véhicule. D'après une étude de l'Automobile Club de France, il ne représente en effet, en 1999, que 0,7 % du budget annuel lié à la possession d'un véhicule à essence, et 1,1 % de celui lié à la possession d'un véhicule diesel. Par conséquent, la suppression de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur acquittée par les particuliers ne compense pas, loin s'en faut, la hausse des coûts des carburants.

La suppression de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur va à l'encontre de l'objectif de réduction de l'imposition fiscale des classes moyennes et des plus démunis affiché par le gouvernement. Compte tenu de la progressivité de la vignette selon la puissance fiscale du véhicule, les personnes possédant les véhicules les plus luxueux bénéficieront d'une réduction largement supérieure à celle dont bénéficieront les propriétaires de véhicules de faible cylindrée. Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale note en effet à juste titre dans son rapport que les coefficients de multiplication des catégories de puissance fiscale " révèlent une taxation extrêmement forte des voitures de tourisme très puissantes ". De plus, la puissance fiscale des véhicules diesel est supérieure, pour des modèles équivalents, à celle des véhicules à essence. Au total, même si l'effet sera, en pratique, insignifiant, le dispositif proposé par le présent article allège surtout la fiscalité afférente aux véhicules les plus polluants (véhicules de grosse cylindrée et véhicules diesel). Cette mesure est donc peu cohérente avec les engagements de protection de l'environnement et de réduction des émission de gaz polluants pris par le gouvernement.

C. UN DISPOSITIF D'EXONÉRATION INCOHÉRENT ET COMPORTANT DES EFFETS PERVERS

Lors de la discussion du présent article à l'Assemblée nationale, le rapporteur général du budget a indiqué que " le gouvernement nous propose d'exonérer les personnes physiques et les voitures particulières. Nous avons proposé plusieurs modifications du dispositif, mais peut-être sont-elles insuffisantes. Il conviendra vraisemblablement de l'améliorer encore. A partir du moment où nous sommes engagés dans une suppression qui concerne beaucoup de monde, peut-être faudra-t-il, monsieur le secrétaire d'Etat, aller jusqu'au bout, l'année prochaine ou dans un délai rapproché, sachant qu'un élargissement total des conditions d'exonération de la vignette coûterait 2,5 milliards supplémentaires ".

Votre commission souhaite que l'exonération prévue par le présent article soit étendue et concerne l'ensemble des véhicules . En effet, il convient de remarquer que le dispositif prévu par le présent article, tel que voté par l'Assemblée nationale, présente plusieurs défauts :

- il rendra particulièrement difficile le contrôle des véhicules , dès lors que seul un nombre restreint d'entre eux sera encore assujetti au paiement de la taxe. Or, le dispositif ne distingue pas seulement les véhicules selon leurs caractéristiques propres (tonnage, véhicule utilitaire ou voiture particulière...) pour déterminer si ceux-ci doivent acquitter la taxe. Dès lors, il est loisible de penser que la tentation de fraude sera renforcée par le présent dispositif d'exonération. En particulier, la nécessité pour le contrôleur, de vérifier la nature du contrat de location, risque de poser des problèmes délicats ;

- il risque d'accroître le coût de gestion de la vignette ;

- il introduit une rupture de l'égalité devant la loi , entre les artisans et les commerçants, selon leur statut juridique.

1. La distinction entre les véhicules appartenant à des particuliers et ceux appartenant à des sociétés

L'amendement présenté par la commission des finances de l'Assemblée nationale élargit l'exonération prévue dans le projet de loi, pour les véhicules utilitaires de moins de deux tonnes des particuliers. Cette exonération s'appliquerait donc aux véhicules utilitaires de moins de deux tonnes des artisans et des commerçants dont l'activité est exercée en nom propre. En revanche, dès lors que ces activités sont exercées dans le cadre d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL), elles ne donnent plus droit au bénéfice de cette exonération. Or, il peut s'agir des mêmes activités, exercées selon un régime juridique différent, le choix de l'EURL permettant au commerçant, par exemple, de ne pas engager entièrement son patrimoine.

Le maintien de la taxe différentielle pour les véhicules appartenant à des sociétés conduira celles-ci à privilégier, plutôt que la mise à disposition de véhicules pour leurs collaborateurs, l'indemnisation de ceux-ci pour l'usage professionnel qu'ils font de leur voiture particulière, par le versement d'indemnités kilométriques. Cette situation s'avérera vraisemblablement défavorable aux constructeurs nationaux, qui forment une part importante des véhicules de société, et entraînera une diminution des immatriculations de véhicules neufs en France, dès lors que les entreprises renouvellent leurs véhicules plus fréquemment que les particuliers.

De plus, il convient de noter que l'extension de l'exonération aux véhicules de société entraînerait une perte de recettes fiscales limitée pour l'Etat . En effet le basculement du financement d'une partie du parc de véhicules de tourisme par le biais d'indemnités kilométriques engendrera une perte de recettes fiscales pour l'Etat en matière de taxes sur les véhicules de société 38 ( * ) , et une perte de recettes pour les collectivités locales au titre de la taxe professionnelle.

Le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale indique, dans son rapport, que " cette distinction entre personne physique et personne morale permet, à tout le moins, de disposer d'un critère simple et fonctionnel. Il ne semble pas qu'elle puisse être à l'origine d'une rupture de l'égalité devant les charges publiques. La différence de traitement entre les particuliers et les entreprises peut se justifier par la possibilité pour elles de déduire le montant de la taxe du bénéficiaire imposable ainsi que par la faculté de répercuter son coût résiduel sur les prix consentis aux consommateurs ".

Votre rapporteur général s'étonne que le fait que le coût puisse être répercuté sur les consommateurs constitue un argument allant à l'encontre de la rupture d'égalité devant la loi. En effet, dès lors que des commerçants ou des artisans sont dans une situation de concurrence, le fait que des coûts supplémentaires soient pris en compte pour certains d'entre eux (en l'occurrence, ceux qui sont établis sous un régime juridique d'EURL) dans le prix de revient des produits facturés aux clients constitue, à l'évidence, une rupture de l'égalité . La différence de traitement entre les particuliers et les entreprises ne se justifie plus, dès lors qu'il s'agit en fait de mêmes activités à but lucratif, mais exercées selon un régime juridique distinct.

2. Une mesure discriminatoire à l'égard des sociétés de location de véhicules de longue durée

Le dispositif d'exonération, en distinguant les véhicules mis à la disposition des particuliers en vertu d'un contrat de crédit-bail ou d'un contrat de location de deux ans ou plus, qui bénéficient de l'exonération, des véhicules mis à la disposition en vertu d'autres contrats de location, qui continueront à supporter la taxe, entraînera vraisemblablement des modifications significatives dans les pratiques des entreprises pour la constitution de leur flotte de véhicules. Le fait que les véhicules financés en location pour une durée inférieure à deux ans ne puissent pas bénéficier de la suppression va pénaliser le recours à la location pour des durées inférieures à deux ans.

Il convient de souligner que cette distinction sera particulièrement défavorable aux sociétés de location de véhicule de longue durée. Ces sociétés se voient d'ores et déjà appliquer un régime fiscal défavorable par rapport aux sociétés de crédit-bail : ces dernières, assimilées à des établissements de crédit, bénéficient d'un régime de taxe professionnelle très avantageux par rapport aux sociétés de location de longue durée. Le maintien de la vignette pour les véhicules loués pour une durée inférieure à deux ans pénalisera davantage ce mode de financement par rapport au crédit-bail.

En particulier, cette mesure pénalisera les auto-écoles, qui financent leur parc de véhicules pour l'apprentissage de la conduite en location, pour une durée généralement inférieure à deux ans, compte tenu de la nécessité de renouveler régulièrement les véhicules servant à l'apprentissage de la conduite. La discrimination introduite par le présent article conduira vraisemblablement les auto-écoles à financer leur parc de véhicules en crédit-bail. En effet, la majorité des auto-écoles étant des sociétés en nom propre, elles pourraient alors bénéficier de l'exonération prévue pour les véhicules des personnes physiques.

Le préjudice des dispositions du présent article pour les loueurs de véhicules serait donc important.

V. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission ne partage pas les deux grandes options du gouvernement s'agissant des modalités de la suppression de la vignette.

D'une part, elle considère que la suppression de cet impôt ne peut pas être partielle car, outre l'accroissement du coût de recouvrement et les difficultés de contrôle fiscal auquel elle aboutirait, cela créerait des ruptures inacceptables d'égalité devant l'impôt.

D'autre part, votre commission ne peut accepter cette nouvelle mesure de recentralisation, décidée par le gouvernement sans consultation préalable des élus locaux directement concernés, et, en particulier, sans concertation avec la commission présidée par notre collègue Pierre Mauroy, chargée de réfléchir à l'avenir de la décentralisation. Au contraire, elle souhaite, dans la continuité de ses positions, s'inscrire dans la logique définie par la proposition de loi constitutionnelle adoptée le 26 octobre 2000 à l'initiative du président Poncelet.

Dans ces conditions, votre commission vous propose le dispositif suivant :

- supprimer totalement la vignette, en abrogeant les articles 1599 C à 1599 J du code général des impôts ;

- supprimer la compensation budgétaire de la suppression de la vignette prévue au III du présent article ;

- supprimer trois impôts aujourd'hui perçus par l'Etat, la taxe sur les véhicules de sociétés, les droits de mutation à titre gratuits entre vifs (donations) et les droits de mutation à titre onéreux sur les cession de fonds de commerce ;

- créer, au profit des départements, trois nouveaux impôts présentant les mêmes caractéristiques que les trois impôts d'Etat supprimés.

Le produit de ce trois nouveaux impôts sera de même ordre que le produit total de la vignette. En effet, le projet de loi de finances pour 2001 estime le produit pour l'année à venir de la taxe sur les véhicules de société à 4 milliards de francs, le produit des donations à 9,4 milliards de francs et le produit des cessions de fonds de commerce à 1,3 milliard de francs.

Il convient de préciser, en premier lieu, que la création des nouveaux impôts est effectuée dans le cadre de la loi " Deferre " du 7 janvier 1983, dont l'article 99 énumère la liste des impôts transférés aux départements et aux régions pour compenser les transferts de compétences réalisés par cette loi.

Les articles L. 1614-4 et L. 1614-5 du code général des collectivités territoriales prévoient que, s'agissant de ces impôts, l'écart entre le coût des compétences transférées et le produit des impôts transférés est comblé par des attributions de dotation générale de décentralisation.

Par conséquent si, dans un département, le produit de la fiscalité transférée après le transfert des nouveaux impôts était inférieur au produit de cette fiscalité lorsque la vignette existait encore, ce département verrait sa DGD augmenter.

A l'inverse, les départements dans lesquels les nouveaux impôts rapporteront plus que la vignette verront leur DGD diminuer.

L'intégration des nouveaux impôts dans le régime de la fiscalité transférée tel que résultant des dispositions du code général des collectivités territoriales permet donc de neutraliser les transfert de richesses entre les départements qui auraient pu résulter de la création des nouveaux impôts.

En deuxième lieu, le dispositif proposé présente également rétablit le pouvoir fiscal des départements en leur permettant de voter les taux des trois nouveaux impôts. Cette liberté est cependant encadrée. Pour la taxe sur les véhicules de sociétés et les droits sur les cessions de fonds de commerce, les taux résultant des délibérations des conseils généraux ne peuvent s'écarter de plus de 10 % des taux prévus par la loi. S'agissant des donations, la marge de manoeuvre des conseils généraux peut jouer seulement à la baisse, de manière à ne pas rendre les donations moins avantageuses que les successions.

Au total, le transfert de ces trois impôts proposé par votre commission des finances permet d'atteindre l'objectif recherché par le Sénat :

- les départements bénéficieront de ressources assises sur les fluctuations de l'activité économique et non sur des dotations de l'Etat, déresponsabilisantes ;

- les nouveaux impôts présentent les mêmes caractéristiques que les impôts transférés en 1984 : outre qu'ils appartiennent aux mêmes familles (droits d'enregistrement, taxe sur les véhicules), ils ont une assiette plus moderne que les " quatre vieilles " puisqu'ils sont basés sur des flux et non des stocks ;

- leur transfert permet de rétablir une partie du pouvoir fiscal qu'ont perdu les exécutifs locaux depuis trois ans, puisque les conseils généraux pourront fixer librement les taux des trois nouveaux impôts, même si cette liberté sera encadrée.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 6

Baisse du taux de l'impôt sur les sociétés pour les petites entreprises

Commentaire : le présent article propose la création d'un dispositif d'imposition à taux réduit (25 % au titre des exercices ouverts en 2001 et 15 % au titre des exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2002), pour la fraction inférieure à 250.000 francs du bénéfice imposable des petites entreprises. En conséquence le régime actuel d'imposition réduite de la fraction des bénéfices incorporés au capital des petites entreprises serait abrogé.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL D'IMPOSITION À TAUX RÉDUIT DES BÉNÉFICES CAPITALISÉS DES PETITES ENTREPRISES

Le taux normal de l'impôt sur les sociétés est aujourd'hui de 33,33 %.

Par exception, le premier alinéa du I du a de l'article 219 du code général des impôts prévoit que le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 19 %, ce régime ne s'appliquant plus qu'aux plus-values de cession de titres de participation, de parts de fonds communs de placement ou de parts de sociétés de capital-risque.

Par ailleurs, l'article 9 de la loi de finances pour 1997 a créé un dispositif d'imposition au taux réduit de 19 % pour les bénéfices incorporés aux fonds propres des petites entreprises.

Dans chacun de ces cas, l'imposition effective est majorée de la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés prévue par l'article 235 ter ZA du code général des impôts. Les taux effectifs d'imposition s'élèvent donc, hors contribution sociale sur les bénéfices (CSB) respectivement à 36,66 % et à 20,9 %.

Codifié au f du I de l'article 219 du code général des impôts, le dispositif de taxation à taux réduit des bénéfices incorporés aux fonds propres des entreprises a pour objectif d'encourager les petites entreprises à s'engager dans un effort régulier d'augmentation de leurs fonds propres.

Ce dispositif est ouvert aux entreprises qui ne sont pas mères d'un groupe au sens de l'article 223 A du code général des impôts, qui sont assujetties à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun, et dont :

- le capital est entièrement libéré et détenu de manière continue, à hauteur d'au moins 75 %, par des personnes physiques, ou par des sociétés elles-mêmes détenues par des personnes physiques ;

- le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions de francs au cours du premier exercice d'application du taux réduit.

L'accès au dispositif s'effectue sur option pour une série de trois exercices comprenant obligatoirement un exercice bénéficiaire et les deux premiers exercices bénéficiaires suivants.

Concrètement, lors de la déclaration des résultats du premier des trois exercices bénéficiaires, la société doit souscrire un engagement d'incorporation au capital des bénéfices concernés. Pour chacun des trois exercices bénéficiaires, la fraction du bénéfice pouvant bénéficier du taux de faveur est limitée au plus faible des trois montants suivants :

- 200.000 francs ;

- 25 % du bénéfice comptable :

- le résultat fiscal.

Au cours de l'exercice suivant celui de la réalisation du bénéfice, le montant intégral du résultat taxé à 19 % (nécessairement identique pour chacun des exercices) doit être directement incorporé au capital ou bien porté à une réserve spéciale, individualisée dans un sous-compte distinct au passif du bilan, et qui doit elle-même être incorporée au capital au plus tard au cours de l'exercice suivant le troisième exercice bénéficiaire.

Cette dernière disposition a pour objet de permettre à l'entreprise concernée de ne procéder qu'à une seule augmentation de capital au terme des trois exercices bénéficiaires concernés. L'incorporation de résultats au capital suppose en effet la tenue d'une assemblée générale extraordinaire, seule compétente pour décider d'une augmentation de capital sur le rapport du conseil d'administration ou du directoire, selon le cas.

Au total, le dispositif actuel de taxation des bénéfices à taux réduit est néanmoins relativement complexe .

Lors de la création de ce mécanisme, le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, M. Alain Lambert, avait d'ailleurs souligné 39 ( * ) son caractère peu lisible et difficile à gérer, et observé que " l'arbitrage entre ce qui doit être mis en réserve afin d'alimenter l'autofinancement, et ce qui doit être distribué sous formes de dividendes afin d'assurer une juste rémunération des associés, relève de l'entière responsabilité des organes sociaux de l'entreprise ", la fiscalité devant être neutre à cet égard.

La commission des finances du Sénat était ainsi demeurée " dubitative " sur l'économie générale de ce dispositif, non sans clairvoyance.

En effet, les prévisions des dépenses fiscales liées au mécanisme d'imposition à taux réduit pour les bénéfices incorporés des PME réalisées par le ministère de l'économie et des finances, qui reposaient sur l'hypothèse selon laquelle plus de la moitié des entreprises éligibles opteraient pour le dispositif, se sont avérées largement surestimées chaque année depuis 1997.

Il faudra toutefois attendre quatre années pour que le ministère de l'économie et des finances le reconnaisse, le fascicule des " voies et moyens " annexé au présent projet de loi de finances pour 2001 procédant enfin à la réévaluation à la baisse des dépenses fiscales afférentes au dispositif, dans des proportions significatives par rapport aux évaluations contenues dans le fascicule des " voies et moyens " annexé au projet de loi de finances pour 2000 (cf. tableau ci-dessous).

Evaluation de la dépense fiscale pour le régime d'imposition à taux réduit des bénéfices capitalisés des PME (en millions de francs)

1998

1999

2000

2001

Evaluations annexées au PLF 2001

530

650

800

Evaluations annexées au PLF 2000

3 000

3 100

3 200

Source : ministère de l'économie et des finances, fascicule des " voies et moyens "

L'ampleur de ces réévaluations pour les années 1999 et 2000 laisse d'ailleurs songeur quant à la qualité des informations transmises au Parlement et à la fiabilité des évaluations de dépenses fiscales : pourquoi la dépense fiscale afférente au dispositif n'avait-elle pas été précédemment réestimée ?

En particulier, pourquoi la dépense fiscale n'a-t-elle pas été réévaluée à l'occasion de la préparation du projet de loi de finances 2000, à un moment où les liasses fiscales relatives à l'exercice 1997, déjà connues et traitées, devaient faire apparaître la faible utilisation du dispositif ?

Les estimations annexées au projet de loi de finances 2000 étaient-elles surévaluées afin de donner une image plus flatteuse de l'engagement du gouvernement en faveur des PME ?

De même, l'estimation de la dépense fiscale induite par le dispositif actuel, et dont le gouvernement propose la suppression, a-t-elle été opportunément réévaluée à la baisse afin de majorer d'autant les allégements nets d'impôt pour les PME résultant du projet de loi de finances 2001 ?

Notons que cette dernière question n'est pas sans importance : avec l'estimation faite dans le PLF 2000 de la dépense fiscale induite par le dispositif précédent, la mesure proposée au présent article ferait apparaître une augmentation d'impôt pour les PME de 100 millions de francs au lieu de l'allégement de 2,3 milliards de francs dont se targue le gouvernement.

A l'évidence ces évaluations à géométrie variable du coût des dépenses fiscales en fonction des besoins de la démonstration ne contribuent pas à un débat parlementaire de qualité. La responsabilité en incombe au gouvernement, et à lui seul puisqu'il s'agit d'une pratique courante de sa part 40 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LA BAISSE DU TAUX DE L'IMPÔT POUR LES PETITES ENTREPRISES

Le I du présent article propose une nouvelle rédaction du b du I de l'article 219 du code général des impôts, actuellement occupé par une disposition périmée, qui réduirait le taux de l'impôt sur les sociétés des petites entreprises, pour la fraction de leur bénéfice imposable inférieure à 250.000 francs, à 25 % pour les exercices ouverts en 2001, puis à 15 % pour les exercices ouverts à partir du 1 er janvier 2002.

Compte tenu par ailleurs de la baisse du taux de la contribution sur l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 7 du présent projet de loi de finances l'avantage maximal résultant de ce régime serait donc de 22.083 francs en 2001, et de 47.028 francs en 2002 (cf. tableau ci-après).

Allégements d'impôt sur les sociétés pour la fraction inférieure à 250.000 francs du bénéfice imposable des petites entreprises en 2001 et en 2002

2000

2001

2002

Taux de l'impôt sur les sociétés pour les petites entreprises

33,33 %

25 %

15 %

Contribution sur l'impôt sur les sociétés

10 %

6 %

3%

Taux effectif de l'IS pour la fraction du bénéfice inférieure à 250.000 francs.

36,66 %

26,5 %

15,45 %

Réduction d'impôt maximale

-

25.400 F

53.025 F

dont avantage résultant du taux réduit d'imposition

-

22.083 F

47.028 F

dont avantage résultant de la baisse du taux de la contribution sur l'impôt sur les sociétés

3 317 F

5 997 F

Ce régime d'imposition à taux réduit est ouvert de plein droit aux redevables de l'impôt sur les sociétés  répondant à deux critères :

- le chiffre d'affaires du redevable doit être inférieur à 50 millions de francs au cours de la période d'imposition, ramenée s'il y a lieu à douze mois ;

- si le redevable est une société, son capital doit être " entièrement libéré et détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques " (les participations des sociétés de capital risque, des fonds communs de placements à risques, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation n'étant pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies du code général des impôts entre la société en cause et ces dernières).

Notons que ces deux critères sont proches, mais différents, des trois critères ceux retenus par la Commission européenne dans sa recommandation du 3 avril 1996 pour définir les " petites entreprises " :

- moins de 50 employés ;

- et un chiffre d'affaires inférieur à 7 millions d'écus (46 millions de francs) ou un total du bilan inférieur à 5 millions d'écus ;

- et indépendance au sens où l'entreprise n'est pas détenue à hauteur de 25 % ou plus du capital ou des droits de vote par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition des petites entreprises, ce seuil pouvant toutefois être dépassé dans deux cas : si l'entreprise est détenue par des sociétés publiques de participation, des sociétés de capital risque ou des investisseurs institutionnels n'exerçant aucun contrôle sur l'entreprise, ni à titre individuel, ni conjointement ; s'il résulte de la dispersion du capital qu'il est impossible de savoir qui le détient et que l'entreprise déclare qu'elle peut légitimement présumer ne pas être détenue à 25 % ou plus par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition des petites entreprises.

Au total, les critères proposés par le présent article sont proches de ceux retenus par la Commission européenne pour la définition des petites entreprises. On peut toutefois observer que la coexistence de critères proches, mais dissemblables, n'est pas source de clarté .

En tout état de cause, le dispositif proposé par le présent article est plus large que le mécanisme actuel de taxation aux taux réduit des bénéfices incorporés au capital des PME :

- la condition d'incorporation des bénéfices au capital disparaît ;

- les sociétés mères d'un groupe au sens de l'article 223 A du code général des impôts sont désormais éligibles à la taxation des bénéfices à taux réduit, leur chiffre d'affaires étant apprécié, pour le respect du plafond de 50 millions de francs, en faisant la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres du groupe ;

- enfin, le nouveau dispositif s'applique aux redevables de l'IS autres que les sociétés (associations, congrégations religieuses, établissements publics, fondations, sociétés d'assurances mutuelles, syndicats professionnels). Lorsque ces redevables n'ont pas de capital social, ils devront seulement remplir la condition liée au montant du chiffre d'affaires imposable pour bénéficier de l'imposition à taux réduit.

Ce dispositif est a priori compatible avec la réglementation communautaire relative aux aides d'Etats. En effet, le montant maximum des allégements d'impôts consentis par ce dispositif (47.028 francs, soit un peu plus de 7.130 euros), est inférieur au montant dit de minimis de 100.000 euros en deça duquel les aides d'Etat sont présumées ne pas affecter la concurrence communautaire.

Notons toutefois que ce plafond s'applique au cumul des aides publiques perçues par une même entreprise sur une période glissant de trois années, sans que l'on sache, à ce stade, dans quelle mesure les allégements d'impôts résultant du présent article doivent être, ou non, rapportées à ce cumul.

B. L'ABROGATION DU MÉCANISME ACTUEL DE TAXATION A TAUX RÉDUIT POUR LES BÉNÉFICES INCORPORÉS AU CAPITAL

Le II du présent article met fin au régime actuel de taxation à taux réduit des bénéfices incorporés au capital, selon les modalités suivantes :

- l'option d'entrée dans ce régime ne peut plus être exercée pour l'imposition des résultats des exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2001 ;

- lorsqu'à cette date, la série des trois exercices bénéficiaires est en cours, le nouveau dispositif prend immédiatement le relais de l'ancien. Plus précisément, la fraction du bénéfice inférieure à 250.000 francs est imposée 25 % pour les exercices ouverts en 2001, puis à 15 % pour les exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2002, quelle que soit l'affectation de ces bénéfices : le taux d'imposition à 19 % ne s'applique plus aux bénéfices incorporés au capital selon les modalités fixées par l'ancien dispositif de taxation au taux réduit des bénéfices incorporés au capital des PME, et les entreprises ayant précédemment opté pour le dispositif ne sont plus contraintes d'incorporer une fraction de leur résultat à leur capital.

Si elle a le mérite de la simplicité, cette solution est toutefois pénalisante pour les entreprises éligibles à l'ancien dispositif dans deux configurations au moins.

En premier lieu, les bénéfices résultant de l'exercice 2001 et incorporés au capital des petites entreprises qui avaient précédemment opté pour l'ancien dispositif seront imposés à l'impôt sur les sociétés au taux de 25 % et non de 19 %. Compte tenu de la contribution sur l'impôt sur les sociétés, la perte maximale pour ces entreprises est de 12 720 francs.

En second lieu, les bénéfices des exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2001 et incorporés au capital des entreprises ayant opté pour l'ancien dispositif, mais dont le chiffre d'affaires dépasse désormais le seuil de 50 millions de francs seront imposés au taux de 33,33 % et non de 19 %. En effet, dans l'ancien dispositif les entreprises conservaient le bénéfice du taux réduit pour leur bénéfices incorporés au capital quand bien même elles dépassaient 50 millions de francs de chiffres d'affaires au cours des deuxième ou troisième exercices bénéficiaires de la série. Compte tenu de la contribution sur l'impôt sur les sociétés, la perte maximale pour ces entreprises est de 30 397 francs pour chacun des exercices concernés (au plus deux) ;

Votre rapporteur général vous propose un amendement pour remédier à ces situations particulières.

- enfin, s'agissant des bénéfices ayant été soumis à une taxation à taux réduit dans le cadre du dispositif antérieur et en attente d'incorporation au capital, le II prévoit que cette incorporation doit être effectuée au plus tard à la clôture du second exercice ouvert à compter du 1 er janvier 2001, ce qui laisse un délai d'au moins deux ans aux entreprises concernées.

C. LA COORDINATION DU DISPOSITIF AVEC LES RÉGIMES DE TAXATION A TAUX RÉDUIT DES PLUS VALUES À LONG TERME, DU REPORT EN ARRIÈRE DES DÉFICITS ET DU PRÉCOMPTE

1. La coordination du dispositif avec le régime de taxation à taux réduit des plus-values à long terme

Le I coordonne de manière simple le nouveau dispositif de taxation à taux réduit (25 % en 2001, puis 15 % à partir de 2002), avec le régime de taxation à 19 % des résultats relevant du régime des plus-values à long terme : pour les seuls exercices ouverts en 2001, les plus-values à long terme des petites entreprises seront imposées au taux de 19 %, et ne seront pas pris en compte pour l'appréciation de la limite de 250.000 francs. Il s'agit là de la solution la plus favorable pour les entreprises concernées.

2. La coordination du dispositif avec le régime du report en arrière des déficits

Le III du présent article coordonne de manière similaire le nouveau dispositif de taxation à taux réduit avec le régime de report en arrière des déficits ou " carry-back " prévu à l'article 220 quinquies du code général des impôts.

Rappelons que le régime du report en arrière des déficits permet de considérer le déficit constaté au cours d'un exercice " " n " comme une charge déductible du bénéfice de l'exercice  " n-3 ", et le cas échéant, des exercices " n-2 ", ou " n-1 ". Il en résulte une créance sur le Trésor public, imputable sur l'impôt du au titre des résultats des exercices " n+1 " à " n+5 ", et le cas échéant remboursable au terme de l'exercice " n+5 ".

Le troisième alinéa du I de l'article 220 quinquies prévoit actuellement que " cette créance est égale au produit du déficit imputé par le taux de l'IS applicable à l'exercice déficitaire ".

Cependant, à défaut de dispositions spécifiques, une petite entreprise déficitaire en 2001 ou en 2002 ne pourrait bénéficier que d'une créance égale à respectivement 25 % puis 15 % de son déficit. En d'autres termes, le dispositif de taxation à taux réduit serait pénalisant pour les entreprises déficitaires.

Le III supprime cette difficulté, en modifiant la rédaction du troisième alinéa du I de l'article 220 quinquies , de manière à ce que l'excédent d'IS résultant de l'application du régime de report en arrière des déficits fasse naître " une créance d'égal montant ".

En d'autres termes, les déficits constatés par les petites entreprises éligibles pourront, dans la limite de 250.000 francs, être reportés en arrière au taux effectivement pratiqué lors de l'exercice bénéficiaire (" n-3 ", le cas échéant " n-2 ", voire " n-1 ").

Au total, cette disposition remplace l'ancien système d'imputation des " impôts négatifs " sur les impôts dus, par un système d'imputation des déficits sur les bénéfices.

3. La coordination du dispositif avec le régime du précompte

Le IV du présent article coordonne le dispositif d'imposition à taux réduit avec le régime du précompte mobilier prévu par l'article 223 sexies du code général des impôts.

Rappelons que le précompte mobilier est un mécanisme complémentaire de celui de l'avoir fiscal : en théorie, il serait logique de n'attribuer l'avoir fiscal, destiné à éviter leur double imposition, qu'aux dividendes prélevé sur des bénéfices ayant supporté l'imposition au taux de droit commun, ou bien de limiter l'avoir fiscal au prorata de l'imposition ayant effectivement grevé les bénéfices distribués.

Cependant, par souci de simplification, l'article 223 du code général des impôts prévoit que le même avoir fiscal est attaché aux distributions régulières de dividendes, sans rechercher l'origine des sommes, ni l'imposition les ayant grevées.

En contrepartie, la société distributrice doit acquitter un précompte mobilier lorsque l'impôt sur les sociétés afférent aux sommes distribuées n'a pas été acquitté au taux de droit commun.

S'agissant des plus-values à long terme imposées à 19 %, l'article 223 sexies du code général des impôts prévoit ainsi que le montant de ce précompte est égal à la différence entre l'avoir fiscal et l'impôt à taux réduit effectivement adopté par la société distributrice.

Le IV du présent article propose d'étendre cette solution aux distributions de bénéfices imposés au taux réduit pour les petites entreprises.

Exemple simplifié (ne tenant pas compte de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés)

Soit une petite entreprise au sens du présent article, qui réalise au titre de l'exercice 2002 un bénéfice de 100. 000 francs, imposé au taux de 15 %.

Cette entreprise souhaite distribuer intégralement son résultat net, soit 85.000 francs. Pour ce faire, elle devra acquitter un précompte d'un montant de 33.333 francs (correspondant à l'IS du au taux normal) - 15.000 francs (correspondant à l'IS acquitté au taux réduit), soit 18.333 francs.

In fine, l'entreprise pourra donc distribuer 66 667 francs (= 100 000 - 15 000 - 18 833), assorti d'un avoir fiscal de 50 % correspondant à l'imposition totale effectivement payée (33 333 francs).

Au total, les bénéfices des petites entreprises subiront donc toujours une imposition à l'impôt sur les sociétés au taux de 33,33 %, si ces bénéfices sont distribués.

D. LA MODIFICATION COROLLAIRE DU MODE DE CALCUL ET DE VERSEMENT DES ACOMPTES D'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

1. La modification du mode de calcul des acomptes

Le V du présent article propose une nouvelle rédaction du premier alinéa du 1 de l'article 1668 du code général des impôts relatif aux acomptes trimestriels d'impôt sur les sociétés, qui laisse inchangé le montant des acomptes dus par les sociétés nouvellement créées, mais modifie les acomptes dus par les autres sociétés de la manière suivante :

Tableau comparatif du montant des acomptes

Les acomptes dus chaque trimestre (avant le 20 des mois de février, mai, août et novembre) sont déterminés à partir des résultats du dernier exercice clos (appelé exercice de référence) et correspondent à un quart de :

Rédaction actuelle du premier alinéa du 1. de l'article 1668

Nouvelle rédaction proposée pour le premier alinéa du 1. de l'article 1668

33,33 % du bénéfice de référence taxé au taux normal,

+

33,33 % de la fraction du bénéfice de référence taxée à taux normal,

+

33,33 % du bénéfice imposé à 19 % grâce au dispositif actuel d'imposition à taux réduit des bénéfices incorporés au capital des petites entreprises,

25 % ou 15 %, selon l'année, de la fraction du bénéfice de référence taxée à taux réduit...

[le bénéfice imposé à 19 % en vertu du régime des plus-values à long terme n'est pas inclus dans l'assiette des acomptes]

+

... diminuée, le cas échéant, de la part correspondant à la plus value nette provenant de la cession des éléments d'actif,

+

19 % du résultat net de la concession de licences d'exploitations de brevets et produits assimilés (taxables à 19 %)

19 % du résultat net de la concession de licences d'exploitations de brevets et produits assimilés, à l'exclusion de la fraction imposée au taux réduit de 15 %.

Au total, la nouvelle rédaction proposée pour le premier alinéa du 1. de l'article 1668 du code général des impôts ne change pas l'assiette des acomptes, mais en réduit le taux pour la fraction du résultat de référence imposée au taux réduit.

En d'autres termes, la nouvelle rédaction substitue à l'ancien système où chaque acompte était égal à un quart de 33,33 % du bénéfice de référence (hors plus-values et résultat net des concessions de licences) un dispositif plus logique où chaque acompte est égal à un quart de l'impôt dû.

2. Les modifications des modalités de versement des acomptes

Le VI du présent article propose une nouvelle rédaction du 4 bis de l'article 1668 du code général des impôts, relatif aux circonstances dans lesquelles le redevable peut se dispenser de nouveaux versements d'acomptes.

Dans sa rédaction actuelle, cette disposition prévoit qu'une entreprise qui estime que le montant des acomptes déjà versés est supérieur ou égal à l'impôt qui sera dû, déterminé selon les modalités du premier alinéa du 1. de l'article 1668, prenant en compte l'impôt qui résulterait des cessions d'éléments d'actifs soumis au régime des plus-values et moins-values à long terme, et avant imputation des crédits d'impôts et avoirs fiscaux, peut se dispenser de nouveaux versements en remettant au comptable du Trésor chargé du recouvrement des impôts directs, avant la date du prochain versement, une déclaration datée et signée.

La nouvelle rédaction proposée simplifie doublement ce régime :

- dans sa rédaction, en supprimant la référence à la détermination de l'impôt dû selon les modalités du premier alinéa du 1. de l'article 1668 ;

- au fond, en supprimant la prise en compte de l'impôt résultant des plus-values à long terme, par essence difficilement prévisibles.

Par ailleurs, le second alinéa du VII prévoit, par exception au premier alinéa fixant l'entrée en vigueur des dispositions des II, IV, V et VI aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2001, que les entreprises peuvent, pour le calcul des acomptes d'impôt sur les sociétés dus au titre du bénéfice imposable du premier exercice ouvert en 2001 et en 2002, tenir compte du taux réduit, dans la limite de 250.000 francs par période de 12 mois, sous réserves que les conditions d'éligibilité énoncées au I soient remplies au titre de l'exercice précédent.

Cette dernière disposition permet aux redevables qui étaient lors de l'exercice 2000 des " petites entreprises " au sens du dispositif, c'est à dire des entreprises indépendantes réalisant un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions de francs, de bénéficier immédiatement de l'effet des taux réduits en réduisant leurs acomptes.

Cette disposition explique également le coût budgétaire du dispositif pour l'Etat en 2001 : 2,3 milliards de francs , correspondant à 3,1 milliards de francs pour le coût brut de la mesure moins 0,8 milliard d'économies résultant de la suppression du dispositif précédent d'imposition à taux réduit des bénéfices incorporés. Le coût budgétaire du dispositif serait ensuite de 6,4 milliards de francs en 2002.

Notons toutefois que cette évaluation, fondée sur les données issues des liasses fiscales 1998, repose sur deux hypothèses relativement audacieuses, selon lesquelles :

- 70 % des 382.000 sociétés bénéficiaires imposables à l'IS ayant un chiffre d'affaires hors taxe inférieur à 50 millions de francs respectent les conditions de détention du capital nécessaires pour être éligibles au dispositif (ce taux de 70 % étant d'ailleurs appliqué par la direction de la législation fiscale pour chaque tranche de bénéfices, alors les plus grandes des petites entreprises sont vraisemblablement moins souvent indépendantes) ;

- les sociétés éligibles ne distribueront pas la fraction de leur bénéfice imposée au taux réduit, et ne seront donc pas soumises au paiement d'un précompte.

Le coût du dispositif pourrait donc être surestimé.

III. COMMENTAIRE

La baisse du taux de l'impôt sur les sociétés est nécessaire.

Par ailleurs, votre rapporteur général se félicite de l'effort de simplification de plusieurs dispositions du code général des impôt contenu dans le présent article.

Cependant, il s'interroge sur l'économie générale du dispositif retenu, qui se traduira par un nouvel effet de seuil : les entreprises dépassant 50 millions de chiffres d'affaires perdent brutalement le bénéfice du régime d'imposition à taux réduit.

Certes, cet effet de seuil n'est pas, par lui-même significatif, l'avantage fiscal ne représentant qu'au plus 0,1 % du chiffre d'affaires d'une société à la frontière du seuil d'éligibilité. Néanmoins, la multiplication de seuils de ce type constitue, sinon une entrave réelle, du moins un frein psychologique au développement des PME : des mesures exclusivement ciblées sur les PME peuvent ainsi se révéler contre-productives, et donc pénalisantes pour la croissance.

Sans doute eut-il donc été préférable, si l'on souhaitait spécifiquement alléger la fiscalité des PME, d'introduire une dose de progressivité dans les taux de l'impôt sur les sociétés, à l'instar des Etats-Unis, de l'Irlande, des Pays-Bas ou du Royaume-Uni.

Quoi qu'il en soit, le plafonnement de la mesure à la fraction du résultat imposable inférieure à 250 000 francs la prive de toute efficacité véritable.

Cette mesure contraste d'ailleurs avec la réforme fiscale intervenue en Allemagne, qui abaisse franchement le taux de l'impôt sur les sociétés quels que soient le montants des bénéfices et la taille de l'entreprise : la réforme fiscale allemande, plus simple est plus lisible, s'inscrit de ce fait dans une véritable perspective de compétitivité fiscale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 6 bis (nouveau)

Modification du statut des sociétés de capital-risque

Commentaire : le présent article, introduit par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, vise à simplifier le régime fiscal des sociétés de capital-risque en prévoyant notamment que celles-ci ont pour objet social unique et exclusif la gestion de portefeuille. Cette réforme avait été votée par le Sénat lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2000 en juin 2000 : l'Assemblée nationale s'était alors opposée à son inscription dans le droit positif.

I. LA SITUATION ACTUELLE

A. UN RÉGIME FISCAL PEU COMPRÉHENSIBLE

Les sociétés de capital-risque (SCR) ont pour objet de prendre des participations dans des sociétés non cotées. Afin d'encourager le financement de telles sociétés et notamment des sociétés nouvelles, un régime fiscal de faveur a été mis en place.

Ce régime fiscal est particulièrement complexe, principalement du fait de l'existence, à côté des activités de gestion de portefeuille, d'activités dites " concurrentielles " qui ne peuvent donner lieu aux mêmes avantages fiscaux et qu'il convient à chaque fois de distinguer afin de n'appliquer le régime de faveur qu'aux activités de gestion de portefeuille.

Or un régime fiscal peu compréhensible pour les particuliers peut conduire à freiner l'utilisation de ce type de société alors que ces particuliers seraient pourtant prêts à consacrer une partie de leurs ressources patrimoniales au financement d'entreprises non cotées.

Dans une volonté de simplification et dans le souci de ne pas prêter le flanc à un éventuel  détournement de ce régime fiscal avantageux 41 ( * ) , une réforme du dispositif actuel a été négociée entre les représentants de la profession des investisseurs en capital et l'administration.

B. DES TENTATIVES RÉPÉTÉES AU SÉNAT POUR FAIRE ADOPTER CETTE RÉFORME

En décembre 1999, à l'occasion de l'examen au Sénat du projet de loi de finances pour 2000, notre collègue Paul Loridant a déposé un amendement substantiel prévoyant la simplification du statut fiscal des SCR. Le gouvernement était favorable à cet amendement mais votre commission en a demandé le retrait au motif qu'elle n'avait pas disposé du temps nécessaire à l'examen complet de ce dispositif.

Elle avait étudié le dispositif quand elle a proposé de l'inscrire dans le droit positif lors de l'examen par le Sénat du projet de loi de finances rectificative pour 2000 42 ( * ) . Lors de sa séance du 8 juin 2000, le Sénat, sur proposition de sa commission des finances, a adopté ce dispositif avec le soutien sans réserve du gouvernement 43 ( * ) .

Lors de sa séance du 20 juin 2000, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des finances, a supprimé cet article du projet de loi de finances rectificative pour 2000, sur un avis de sagesse du gouvernement. Le motif avancé par notre collègue Didier Migaud, rapporteur général du budget, était le suivant : " Il ne serait pas de bonne méthode d`examiner dans la précipitation l'article additionnel introduit par le Sénat, car il mérite une étude plus approfondie de la part de notre Assemblée " 44 ( * ) .

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Un amendement réformant le statut fiscal des SCR a donc été introduit dans le présent projet de loi sur proposition de notre collègue député Dominique Baert. Il a reçu les avis très favorables de la commission des finances (qui a également proposé un sous-amendement rédactionnel, adopté par l'Assemblée nationale) et du gouvernement.

Il ne s'agit pas d'un régime totalement nouveau mais d'une modification du régime existant visant à le simplifier . Les dispositions fiscales proposées sont plus lisibles car généralisées à l'ensemble de l'activité des SCR grâce à l'obligation de filialiser les activités autres que la gestion de portefeuille. D'une façon générale ce régime serait rapproché de celui des fonds communs de placement à risque (FCPR). Le régime actuel subsisterait, à côté du nouveau régime, pendant une période transitoire de deux ans, à l'issue de laquelle le présent dispositif deviendrait le régime unique obligatoire.

A. MODIFICATIONS RELATIVES AUX CONDITIONS D'OBTENTION DU STATUT DE SOCIÉTÉ DE CAPITAL-RISQUE

1. La société de capital-risque

a) Le dispositif actuel

Aux termes de l'article 1 er de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, une SCR est une société française (société anonyme ou en commandite par actions) dont le portefeuille dont remplir certaines conditions. Par ailleurs, aucune personne physique, son conjoint, ses ascendants ou descendants ne peuvent détenir conjointement, directement ou indirectement, plus de 30 % des droits dans les bénéfices d'une SCR.

b) Les modifications proposées

Le présent article propose dans un nouvel article 1 er -1 de la loi de 1985 de prévoir que la SCR aura dorénavant un objet social exclusif : la gestion d'un portefeuille de valeurs mobilières.

Si le total de son bilan a excédé 65 millions de francs au cours de l'exercice précédent, cette société sera tenue de filialiser une éventuelle activité de prestation de services (expertise comptable, conseil, etc.). En revanche, les petites sociétés de capital-risque seront autorisées à conserver une activité " accessoire " (sous réserve que le chiffre d'affaires hors taxes de ces prestations reste inférieur à 50 % de leurs charges).

En outre, le bénéfice afférent à ces activités accessoires exonéré d'impôt sur les sociétés ne devra pas dépasser la limite de 250.000 francs sur une période de douze mois afin de ne pas tomber dans le champ des aides d'Etat telles que définies par la Commission européenne.

Enfin, il est prévu que la société de capital-risque ne pourra pas procéder à des emprunts d'espèces au-delà de 10 % de son actif afin de s'assurer qu'elle utilise bien, pour accomplir son objet social, son propre capital et non un capital d'emprunt. Cette innovation se substitue au dispositif très complexe qui existe en matière de limitation des interventions de la société de capital-risque sur le marché monétaire.

2. La composition du portefeuille

a) Le dispositif actuel

Actuellement, la SCR doit respecter un quota minimal de 50 % de sa situation nette qui doit être investi en titres dits " éligibles ". Cette contrainte assure que le portefeuille de la société est principalement constitué de titres non cotés.

Ces titres éligibles sont les parts, actions, obligations convertibles ou titres participatifs de sociétés ayant leur siège dans un Etat de la Communauté européenne, dont les actions ne sont pas admises à la négociation sur un marché réglementé français ou étranger, qui exercent une activité commerciale, industrielle ou artisanale et qui sont soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun. Depuis la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) sont également éligibles les titres de sociétés " holdings " communautaires ainsi que de " holdings de holdings ".

Une période transitoire de 3 ans est prévue pour atteindre ce quota de 50 % (à compter de la création de la société ou de l'exercice de l'option pour ce régime fiscal).

Enfin, la SCR ni aucun de ses actionnaires personne physique ne peut pas détenir plus de 40 % des titres d'une société dont les titres figurent au portefeuille de la société (dans le quota de 50 % des titres éligibles) et les titres émis par une société ne peuvent représenter plus de 25 % de la situation nette comptable de la SCR.

b) Les modifications proposées

Dans le dispositif proposé, les conditions d'éligibilité au quota de 50 % seraient assouplies puisque, seront également éligibles, dans la limite de 15 % de la situation nette, les avances en comptes courants consenties à des sociétés éligibles au quota de 50 % (avances consenties pour la durée de l'investissement réalisé) ainsi que les participations dans des sociétés cotées sur les marchés réglementés de valeurs de croissance de l'espace économique européen. Le nouveau dispositif précise que la SCR ne pourra pas procéder à des emprunts d'espèces au-delà de 10 % de son actif.

En outre, la période transitoire sera réduite à deux ans en contrepartie de la généralisation des avantages fiscaux.

Les nouvelles règles de composition du portefeuille des SCR s'appliqueront pour les titres entrant dans la composition des FCPR qui devront avoir 50 % de leur portefeuille constitué par des titres pris en compte pour le calcul du quota de 50 % des SCR.

B. MODIFICATIONS RELATIVES AU RÉGIME FISCAL

1. Le régime fiscal des bénéfices de la SCR

a) Le dispositif actuel

Actuellement, l'exonération d'impôt sur les sociétés ne vaut que pour les produits et plus-values retirés de la gestion des titres qui ont la nature de ceux du quota de 50 %. Les produits et plus-values provenant d'autres formes de placements financiers (par exemple les placements hors Communauté européenne, les obligations, etc.) sont également exonérés d'impôt sur les sociétés à titre accessoire dans certaines limites. Tous les autres produits sont soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

b) Les modifications proposées

Dans le dispositif proposé, dans la mesure où la société a l'obligation de filialiser ses activités autres que de gestion de portefeuille, la société de capital-risque bénéficiera d'une exonération totale d'impôt sur les sociétés .

Les " petites " sociétés de capital-risque, autorisées à conserver des activités autres que la gestion de portefeuille, bénéficieront également de l'exonération totale d'impôt sur les sociétés, sans qu'il soit besoin de distinguer ce qui, dans leurs bénéfices, relève de la gestion de portefeuille et ce qui n'en relève pas.

2. Le régime fiscal des distributions

a) Le dispositif actuel

Plusieurs dispositifs de taxation des distributions de la société de capital-risque coexistent aujourd'hui selon la qualité de l'actionnaire (personne physique, personne morale ou non-résident).

(1) Personnes physiques

Le régime de droit commun (barème progressif de l'impôt sur le revenu) s'applique pour les distributions issues d'activités soumises à l'impôt sur les sociétés ou exonérées à titre accessoire.

Pour les distributions issues des produits et plus-values réalisées au cours des quatre derniers exercices grâce à la gestion du portefeuille exonéré, un régime de faveur est prévu ; il permet l' exonération des distributions si l'actionnaire remplit les trois conditions suivantes :

- il s'engage à conserver les titres de la société pendant cinq ans ;

- il s'engage à réinvestir les dividendes ainsi perçus (les sommes réinvesties devant rester indisponibles pendant un délai de cinq ans) ;

- lui, son conjoint, ses ascendants et descendants ne peuvent pas détenir conjointement, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices d'une société dont les titres figurent à l'actif de la SCR.

Les distributions perçues par les personnes physiques qui ne remplissent pas les conditions pour bénéficier de ce régime de faveur sont taxées soit au taux de 16 % prévu pour les plus-values de cession de valeurs mobilières si elles sont prélevées sur des plus-values réalisées au cours des quatre derniers exercices, soit au barème de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus mobiliers dans les autres cas.

(2) Personnes morales

Le régime des plus-values à long terme est applicable aux dividendes prélevés sur les plus-values du portefeuille exonéré qui ont été réalisées au cours des quatre derniers exercices à l'occasion de la cession de titres détenus depuis au moins deux ans.

Dans les autres cas, les distributions perçues par les personnes morales sont taxées à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun.

(3) Non résidents

Sous réserve des conventions internationales, si l'actionnaire est non-résident, le régime de la retenue à la source est applicable (au taux de 25 % en règle générale et aux taux de 16 % pour les personnes physiques et 19 % pour les personnes morales lorsque la distribution est prélevée sur les plus-values du portefeuille-titres).

Toutefois, sont prévus quelques cas d'exonération. En bénéficient notamment les dividendes distribués aux personnes physiques non-résidentes placées sur option sous le régime d'exonération sous condition de remploi ainsi que, sous conditions, les dividendes prélevés sur les plus-values provenant du portefeuille exonéré et distribués aux personnes morales françaises qui bénéficient du régime des plus-values à long terme.

b) Les modifications proposées

Les actionnaires personnes physiques qui bénéficient du régime de faveur verront la condition de remploi allégée puisque la distribution sera définitivement exonérée au terme des cinq ans suivant la souscription. En outre, ce régime de faveur sera étendu aux personnes physiques domiciliées dans des pays qui ont conclu une convention fiscale avec la France.

S'agissant des personnes morales, la condition de réalisation des plus-values au cours des quatre derniers exercices est supprimée.

4. Le régime des plus values de cession d'actions de la SCR

Il est proposé que la plus-value de cession des titres des actionnaires personnes physiques soit définitivement exonérée au bout de cinq ans de détention des actions.

C. ENTRÉE EN VIGUEUR

Il est prévu que l'option pour le régime fiscal de la SCR est exercée avant la date d'ouverture de l'exercice au titre duquel ce régime s'applique si la société existe déjà et, dans le cas contraire, dans les six mois suivant celui de la création de son activité.

Le présent article prévoit que jusqu'en 2003, deux régimes de sociétés de capital-risque vont coexister : le régime actuel qui sera abrogé en 2003 et le régime prévu par le présent article qui peut d'ores et déjà être choisi sur option par les sociétés qui remplissent les conditions d'éligibilité - et en premier lieu l'obligation de filialisation des activités autres que la gestion de portefeuille. Les autres sociétés auront donc deux ans pour effectuer cette filialisation, faute de quoi elles perdront la qualité de société de capital-risque en 2003.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Dans la mesure où ce dispositif rejoint celui qui avait été proposé, il y a moins de six mois par votre commission et qu'il constitue une mesure opportune de simplification du régime des sociétés de capital-risque, il vous vous sera demandé d'adopter le présent article.

Toutefois, votre commission estime que le dispositif fiscal applicable aux non-résidents prévu dans le présent article - qui reprend le droit en vigueur - n'est pas satisfaisant. Il confère en effet un avantage à la détention de titres en direct (exonération d'impôt) plutôt qu'à la détention l'intermédiaire d'une société de capital-risque (retenue à la source).

C'est pourquoi votre commission vous propose un dispositif de neutralité fiscale et de reprendre sur ce point l'exonération de retenue à la source qui avait été votée par le Sénat à l'occasion de l'examen du collectif de printemps 2000.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 7

Aménagement de l'impôt sur les sociétés

Commentaire : le présent article propose d'un côté de réduire progressivement le taux de la contribution sur l'impôt sur les sociétés ; de l'autre d'accroître les prélèvements sur les entreprises en aménageant le régime mères-filles, en réduisant le taux de l'avoir fiscal pour les personnes morales et en baissant les taux de l'amortissement dégressif applicables dans le régime des bénéfices industriels et commerciaux.

Le présent article propose trois mesures relatives à l'impôt sur les sociétés (IS), et une mesure relative à l'imposition des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

En premier lieu, le présent article propose de réduire progressivement le taux de la contribution sur l'impôt sur les sociétés, c'est à dire de diminuer le taux effectif de l'impôt sur les sociétés .

En second lieu, le présent article propose d'accroître l'assiette de l'impôt sur les sociétés, grâce à deux mesures de rendement, intéressant l'une le régime des sociétés mères et filiales , l'autre le régime de l'avoir fiscal pour les personnes physiques.

Enfin, le présent article propose d'abaisser d'un quart de point les taux de l'amortissement dégressif dans le cadre du régime des BIC pour les biens acquis ou fabriqués à compter du 1 er janvier 2001.

L'effet combiné de ces différentes mesures représenterait un allégement de l'imposition des entreprises à hauteur de 360 millions de francs pour 2001 et de 7 milliards de francs pour 2002.

Votre rapporteur général présentera ces mesures successivement, avant d'en proposer un commentaire d'ensemble.

I. LA RÉDUCTION DU TAUX DE LA CONTRIBUTION SUR L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

A. LE DROIT EXISTANT

L'article 235 ZA du code général des impôts prévoit que les personnes morales redevables de l'impôt sur les sociétés sont assujetties à une contribution égale à 10 % de l'impôt sur les sociétés calculé sur leurs résultats imposables au taux normal (33,33 %) et au taux réduit (19 %).

Cette contribution, instituée par la loi de finances rectificative du 4 août 1995, est juridiquement distincte de l'impôt sur les sociétés. Elle s'applique à l'impôt sur les sociétés effectivement dû après imputation des amortissements différés, ainsi que des déficits et des moins values à long terme reportables, et après application des abattements prévus par les régimes spécifiques ou des dispositions prévoyant des reports ou des sursis d'imposition.

Il est à noter que les avoirs fiscaux, les crédits d'impôt de toute nature, la créance née du report en arrière des déficits (ou " carry-back ") et l'imposition forfaitaire annuelle (IFA) ne sont pas imputables sur la contribution.

Par ailleurs, la contribution ne constitue pas une charge déductible. La contribution est recouvrée comme l'impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions.

Enfin, pour les exercices arrêtés entre les mois de mars et de décembre, la contribution donne lieu au versement d'un acompte unique, égal à 10 % de l'impôt sur les sociétés acquitté sur les résultats de l'exercice précédent, qui doit être payé au plus tard à la date prévue pour le dernier acompte d'impôt sur les sociétés (c'est à dire le 15 décembre pour les sociétés qui arrêtent leurs comptes le 31 décembre).

La contribution sur l'impôt sur les sociétés est donc un impôt simple dont le rendement suit celui de l'impôt sur les sociétés.

Le rendement brut de la contribution additionnelle a ainsi doublé entre 1995, où il s'élevait à 10,43 milliards de francs, et 1999, où il a atteint 22,17 milliards de francs, selon la direction générale de la comptabilité publique.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le I. du présent article propose de diminuer le taux de la contribution additionnelle à 6 % pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée en 2001 , et à 3 % pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée à compter du 1 er janvier 2002.

Par ailleurs, le II. du présent article propose fort logiquement de diminuer de la même manière le taux des acomptes , réduits à 6 % de l'impôt dû au titre des résultats de l'exercice précédent pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée en 2001, et à 3 % du même montant pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée à compter du 1 er janvier 2002.

Grâce à la baisse du taux des acomptes, la mesure réduirait effectivement la contribution acquittée par les sociétés en 2001, à hauteur de 8,4 milliards de francs selon la direction de la législation fiscale.

Compte tenu du dynamisme de l'assiette et de la nouvelle baisse de taux, le coût net de la mesure serait ensuite de 17,6 milliards de francs en 2002.

Au total, si l'on tient compte de l'évolution prévue de la contribution sur l'impôt sur les sociétés ; de la contribution additionnelle de 15 % créée en 1998 (la surtaxe " Jospin ") , puis réduite à 10 % en 1999, et supprimée à partir de l'an 2000 ; de la création de la contribution sociale des bénéfices à partir de l'an 2000, enfin, de la baisse du taux d'imposition des PME pour la fraction du bénéfice inférieure à 250 000 francs, le taux effectif de l'impôt sur les sociétés évoluerait comme suit :

Evolution du taux marginal normal de l'impôt sur les sociétés en France (en %)

Année

1998

1999

2000

2000

2002

Chiffre d'affaires

>50MF

<50MF

>50MF

<50MF

<50MF et PME 1

>50MF

<50MF

<50MF et PME

Taux de base

33,33

33,33

33,33

33,33

33,33

33,33

25

33,33

33,33

15

Contribution

sur l'IS

3,33

(10%)

3,33

(10%)

3,33

(10%)

3,33

(10%)

2

(6%)

2

(6%)

1,5

(6%)

1

(3%)

1

(3%)

0,45

(3%)

Contribution additionnelle

5

(15%)

3,33

(10%)

-

-

-

-

-

-

-

-

CSB 2

-

-

1,11

(3,3%)

-

1,11

(3,3%)

-

-

1,11

(3,3%)

-

-

Total

41,66

40

37,76

36,66

36,44

35,33

26,5

35,44

34,33

15,45

(1) Le régime d'imposition à taux réduit s'applique, pour la fraction du résultat imposable inférieure à 250.000 francs, aux PME, entendues comme les entreprises indépendantes contrôlées par les personnes physiques et réalisant de moins de 50 millions de francs de chiffre d'affaires annuel.

(2) La contribution sociale sur les bénéfices prévue par l'article 235 ter ZC du code général des impôts s'applique, pour la fraction du résultat imposable supérieure à 5 millions de francs, aux redevables dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions de francs.

Ce tableau montre la complexité croissante des taux de l'impôt sur les sociétés.

Notons également que le taux marginal effectif de l'impôt sur les sociétés ne retrouverait pas en l'an 2002 son niveau de 1993 (soit 33,33 %).

C. COMMENTAIRE

1. Une mesure opportune et nécessaire

La réduction de la contribution sur l'impôt sur les sociétés est une mesure bienvenue .

• Rappelons que cette mesure avait été instituée en 1995 dans un contexte particulier : la politique budgétaire poursuivie durant la législature 1988-1993 avait porté le déficit public structurel de 1,8 % du produit intérieur brut (PIB) en 1988 à 4,9 % du PIB en 1993 45 ( * ) de sorte que le retournement de la conjoncture européenne à partir de 1993 s'était immédiatement traduit par des déficits publics courants trop élevés au regard des critères d'éligibilité à la monnaie unique.

Le contexte actuel est singulièrement différent : l'économie française bénéficie d'un environnement international et européen particulièrement porteur, et les recettes fiscales sont extrêmement dynamiques. Il semble donc légitime de supprimer la contribution sur l'impôt sur les sociétés.

• Cette mesure est aussi indispensable dans un contexte de concurrence fiscale accrue.

En effet, même si le taux nominal de l'impôt sur les sociétés ne rend pas toujours compte de l'imposition réelle à la charge des entreprises, il joue un rôle essentiel dans leurs décisions d'implantation : le taux de l'impôt sur les sociétés a un rôle psychologique essentiel, c'est à dire qu'il exerce ce que les économistes appellent un " effet de signal ".

Or en matière de taux marginal effectif de l'impôt sur les sociétés la France apparaît aujourd'hui comme l'un des pays européens les moins attractifs avec un taux de 37,77 % (dont 33,33 % d'IS + 3,33 % correspondant à la contribution de 10 % + 1,11 % correspondant à la contribution sociale sur les bénéfices), contre 35 % en Espagne, au Portugal (imposition locale comprise) et aux Pays-Bas ; 34 % en Autriche ; 32 % au Danemark ; 31,2 % au Luxembourg ; 30 % au Royaume-Uni ; 29 % en Finlande ; 28 % en Suède ; 24 % en Irlande.

En fait, seuls quatre autres pays européens, d'ailleurs tous caractérisés par un taux de chômage élevé, avaient en l'an 2000 un taux marginal effectif comparable pour l'impôt sur les sociétés : la Belgique, avec un taux de 40,17 % ; la Grèce avec un taux de 40 %, réduit à 35 % pour les entreprises cotées à la bourse d'Athènes ; l'Italie, avec un taux de 37 % ; enfin, l'Allemagne, avec un taux de 40 % pour les bénéfices non distribués et de 30 % pour les bénéfices distribués (plus une majoration de 5,5 %, soit des taux respectivement égaux à 42,2 % et à 31,65 %).

Or l'Allemagne a adopté un plan de baisse des impôts prévoyant de réduire le taux de l'impôt sur les sociétés à 25 % dès 2001, soit un taux effectif de 26,37 % compte tenu de la majoration de 5,5 %.

Dans ces conditions, la France se trouve singulièrement excentrée par rapport à la moyenne européenne.

La baisse de la contribution sur l'impôt sur les sociétés ne permettrait d'ailleurs même pas à la France de rejoindre la moyenne européenne, comme le montre le tableau ci-dessous.

Evolution du taux marginal effectif de l'IS en France et dans l'Union européenne

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

France

33,33

33,33

33,33

36,66

36,66

41,66

40

37,76

36,43

35,43

Moyenne européenne 46 ( * )47 ( * )48 ( * )

35,3

35,3

35,4

35,6

35,3

34,8

33,9

33,5

32,0 49 ( * )

nd

Source : ministère de l'économie et des finances, calculs de la commission.

2. Un dispositif à compléter

Dans le cadre de la présentation du projet de loi de finances pour 2001, le gouvernement avait indiqué que la cotisation sur l'impôt sur les sociétés serait supprimée à compter de 2003.

Pourtant, le dispositif initialement proposé ne prévoyait de baisser le taux de la contribution que pour les seules années 2001 et 2002, de sorte que le taux de la contribution devait toujours s'établir à 10 % à partir de 2003.

Outre qu'elle était facteur d'incertitudes, et qu'elle obérait singulièrement la lisibilité du dispositif, cette rédaction n'était pas sans conséquences pour les assujettis à l'IS en 2002, puisque les normes comptables relatives aux impôts différés obligent les entreprises à prendre en compte les impositions telles qu'elles résultent des textes en vigueur.

A l'initiative de son rapporteur général, l'Assemblée nationale a partiellement pallié à cette carence, en adoptant un amendement prévoyant que le taux réduit de 3 % s'appliquerait pour les exercices clos ou la période d'imposition arrêtée à partir du 1 er janvier 2002. En d'autres termes, elle a pérennisé au delà de 2002 la réduction du taux à 3 %.

Cela constitue un progrès par rapport à la rédaction initiale, mais un progrès insuffisant. En effet, contrairement à ce que le gouvernement avait annoncé, la contribution sur l'impôt sur les sociétés ne serait pas, en l'état, supprimée à partir de 2003. Pour s'y refuser, le gouvernement et l'Assemblée nationale avancent des arguments vertueux, puisqu'ils estiment ne pas pouvoir préjuger de décisions qui relèveront de la majorité issue des élections de 2002.

Cette argumentation spécieuse témoigne d'une certaine mauvaise foi.

En effet, est-il vraiment sérieux d'annoncer, d'inscrire dans le dossier de presse du projet de loi de finances et de prendre en compte dans les projections du rapport économique social et financier une mesure que l'on se refuse à transcrire dans le texte même du présent projet de loi de finances ?

Par ailleurs, le gouvernement ne semble guère emprunt des mêmes scrupules lorsqu'il annonce un plan triennal d'embauches de fonctionnaires, lorsqu'il " leste " les finances publiques de près de 100 milliards de francs de dépenses nouvelles pérennes pour financer les 35 heures ou lorsqu'il se contente de stabiliser le déficit de l'Etat alors que la conjoncture est au plus haut.

Votre commission vous propose donc un amendement visant à supprimer la contribution à partir de 2003, conformément à la volonté affichée par le gouvernement.

II. L'AMÉNAGEMENT DU RÉGIME DES SOCIÉTÉS MÈRES ET FILIALES

A. LE DROIT EXISTANT

Le régime des sociétés mères et filiales prévu aux articles 145 et 216 du code général des impôts permet, sur option, à une société, dite " société mère ", de retrancher de son résultat imposable les dividendes qu'elle perçoit de ses filiales françaises et étrangères, sous certaines conditions.

Ces conditions portent sur les filiales concernées, qui doivent être assujetties à l'impôt sur les sociétés, mais aussi sur les titres de participation : la participation doit notamment représenter, à la date de mise en paiement des dividendes, au moins 10 % du capital de la filiale, ou avoir un prix de revient d'au moins 150 millions de francs. En outre, la société mère doit avoir souscrit les titres de participation à l'émission ou prendre l'engagement de les conserver pendant un délai de deux ans. De plus, les titres de participation doivent être nominatifs, ou, à défaut, déposés dans un établissement désigné par l'administration. Enfin, ces titres doivent conférer le droit de vote.

Si ces conditions sont réunies, le régime des sociétés mères et filiales permet à la société mère d'éviter ou d'atténuer la double imposition des dividendes provenant de ses participations. Ce régime avantage principalement les entreprises qui disposent de participations financières importantes, notamment les banques et les sociétés d'assurance.

Notons toutefois que les lois de finances initiales pour 1998, puis pour 1999, ont quelque peu réduit l'intérêt de ce régime en prévoyant la réintégration au résultat imposable de la société mère d'une quote-part de frais et charges, fixée forfaitairement à 5 % du montant total du dividende, avoir fiscal ou crédit d'impôt compris (le montant de cette quote-part pouvant toutefois être plafonnée au montant total des frais et charges de toute nature engagés par la société mère).

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

• Le 1 du III. du présent article propose de modifier les seuils d'éligibilité du régime : ne seraient désormais éligibles que les participations représentant au moins 5 % du capital de la filiale, le seuil alternatif de 150 millions de francs étant supprimé.

En d'autres termes, les participations représentant entre 5 % et 10 % du capital de la filiale et d'un prix de revient inférieur à 150 millions de francs deviendraient éligibles au régime, tandis que les participations représentant moins de 5 % du capital de la filiale, mais plus de 150 millions de francs ne seraient plus éligibles, comme le résument les tableaux ci-après.

Eligibilité au régime mère-fille : situation actuelle

% du capital détenu

moins de 5%

5 à 10%

plus de 10%

Prix de revient inférieur à 150 millions de francs

NON

NON

OUI

Prix de revient supérieur à 150 millions de francs

OUI

OUI

OUI

Eligibilité au régime mère-fille : situation proposée

% du capital détenu

moins de 5%

5 à 10%

plus de 10%

Prix de revient inférieur à 150 millions de francs

NON

OUI

OUI

Prix de revient supérieur à 150 millions de francs

NON

OUI

OUI

Rappelons que ce seuil de prix de revient avait été instauré en 1967 (à 10 millions de francs), supprimé en 1983, puis rétabli en 1987 au niveau actuel (150 millions de francs), afin de faciliter la constitution de noyaux durs lors des opérations de privatisation .

La suppression de ce seuil n'est pas une mesure anodine : selon les estimations de la direction de la législation fiscale, le gain budgétaire induit serait de l'ordre de 3,1 milliards de francs en année pleine.

En revanche, l'extension du régime aux participations comprises entre 5 et 10 %, mais inférieures à 150 millions de francs coûterait 1 milliard de francs en année pleine.

Au total, cette mesure se traduirait par un gain budgétaire de l'ordre de 2,1 milliards de francs en année pleine.

La mesure s'appliquerait au premier exercice clos avant le 31 décembre 2000, c'est à dire en pratique, à l'exercice 2000. Comme le pourcentage déterminant le seuil d'application du régime est apprécié à la date de mise en paiement des produits de la participation, ce dispositif s'appliquerait rétroactivement aux distributions intervenues durant l'exercice 2000.

Le gain budgétaire serait donc doublé pour 2001, car s'y cumuleraient les effets de la mesure sur les acomptes relatifs à l'exercice 2001 et sur le solde de l'impôt dû au titre de l'année 2000 (les acomptes n'ayant évidemment pas tenu compte de l'impact du dispositif sur l'année 2000).

• Le 2 du III. du présent article neutralise toutefois l'effet de cette réforme sur le régime de taxation des plus et moins-values de long terme pour les contribuables assujettis à l'impôt sur les sociétés.

En effet, le a ter du I de l'article 219 du code général des impôts exclut du bénéfice du régime des plus values et moins values à long terme (imposition au taux réduit de 19 %) le résultat de la cession de titres de portefeuilles, à l'exclusion notable, sous certaines conditions, des parts ou actions de société revêtant le caractère de titres de participation, définis comme :

- les parts ou actions de société revêtant le caractère de titres de participation sur le plan comptable ;

- les actions acquises en exécution d'une offre publique d'achat ou d'échange par l'entreprise qui en est l'initiatrice ;

- les titres ouvrant le droit au régime des sociétés mères si ces actions ou titres sont inscrits en comptabilité au compte de titres de participation ou à une subdivision spéciale d'un autre compte du bilan correspondant à leur qualification comptable.

L'application mécanique des dispositions précédentes aurait eu ainsi pour effet de restreindre le champ des titres ayant la qualification de participations au plan fiscal et donc l'application à ces titres du régime des plus values à long terme.

Or, le huitième alinéa du a ter du I de l'article 219 du code général des impôts prévoit que si des titres inscrits au compte de participation ou à l'une des subdivisions spéciales cessent de remplir les conditions prévues, ils doivent être transférés hors du compte, la plus value constatée à cette occasion étant par la suite taxée lors de la cession de titres au taux normal de l'IS et non au taux d'imposition du régime des plus values à long terme.

Pour éviter cet effet collatéral, le 2 du III. du présent article prévoit que pour le régime des plus et moins values à long terme, constituent des participations non seulement les titres qui ouvrent droit au régime des sociétés mères, mais aussi les participations d'un prix de revient supérieur à 150 millions de francs si elles remplissent les autres conditions d'éligibilité au régime des sociétés mères que la détention de plus de 5% du capital.

De ce fait, le dispositif proposé étendrait le champ du régime des plus et moins values à long terme.

C. COMMENTAIRE

Le dispositif proposé est une mesure de rendement manifestement rétroactive et inopportune.

• Comme votre rapporteur général l'a déjà observé, le dispositif proposé est manifestement rétroactif , puisqu'il modifie le taux d'imposition de dividendes déjà distribués.

• Par ailleurs, ce dispositif, qui vise à pénaliser les participations non stratégiques et purement financières, méconnaît les conditions économiques contemporaines.

En effet, des participations représentant 3 ou 4 % du capital peuvent correspondre à de véritables logiques industrielles, quand les sociétés concernés sont de grande taille : rappelons qu'il faut aujourd'hui plusieurs dizaines de milliards de francs pour acquérir 5 % du capital des principales entreprises françaises. Pour ces sociétés, le seuil de détention de 5 % est donc particulièrement élevé, de sorte que des partenariats stratégiques se nouent autour de participations croisées de quelques pour cents.

De même, ce dispositif handicape les entreprises françaises dans la course à la taille à l'échelle européenne, en freinant leurs restructurations, dans deux configurations au moins :

- le nouveau dispositif pénalise les grandes entreprises qui, pour des raisons stratégiques (dilution des risques par exemple), ont réparti entre plusieurs filiales leurs participations dans une société tierce, de sorte que chacune de ces participations n'atteint plus le seuil de 5 % ;

- le nouveau dispositif s'avère particulièrement pénalisant en cas de dilution du capital d'une filiale, une opération de rapprochement économique se traduisant alors par une aggravation de la charge fiscale : à tout le moins conviendrait-il donc de prévoir une exemption pour ces opérations.

Par ailleurs, le dispositif pénalise fortement les investisseurs institutionnels, comme les banques ou les assurances , qui détiennent souvent des participations dont le montant est relativement élevé, mais qui représentent moins de 5 % du capital des sociétés concernées.

On peut d'ailleurs rappeler que les sociétés d'assurance n'ont pas le droit de dépasser ce seuil de 5 %, pour des raisons prudentielles.

Enfin, ce dispositif pourrait rendre plus difficile l'ouverture du capital et le développement de partenariats pour les grandes entreprises publiques , puisque la détention d'une part de leur capital significative en montant, mais inférieure à 5 %, devient moins avantageuse.

Plus généralement, ce dispositif s'inscrit à contre courant de l'évolution de la fiscalité de nos principaux partenaires vers une compétitivité fiscale accrue.

En effet, ce dispositif est particulièrement pénalisant pour les sociétés holding, alors même que la fiscalité française ne leur était déjà guère favorable.

Or les sociétés holding sont relativement mobiles, et, dans le même temps, la réforme fiscale allemande leur est particulièrement favorable, puisque les dividendes sont désormais entièrement exonérés en Allemagne (sauf quote-part de 5% pour les dividendes étrangers), quelle que soit le pourcentage ou la durée de détention.

En résumé,  l'objectif de cette mesure est de frapper les investissements qui n'auraient comme objectif que l'optimisation financière et fiscale au détriment de l'emploi. Mais cette mesure ne distingue pas les différents types d'investissements. Dans la situation actuelle de compétition fiscale (entre Etats) et d'optimisation fiscale (de la part des entreprises), elle pourrait inciter à une accentuation de la délocalisation hors de France non pas des filiales, mais des " têtes de groupe ".

III. LA BAISSE DU TAUX DE L'AVOIR FISCAL POUR LES PERSONNES MORALES

A. LE DROIT EXISTANT

Rappelons que l'avoir fiscal a été institué pour éviter la double imposition des bénéfices distribués qui ont déjà été soumis à l'impôt sur les sociétés.

L'avoir fiscal est normalement réservé aux personnes physiques ou morales ayant leur domicile ou leur siège en France.

Par exception, certaines conventions fiscales internationales prévoient l'extension de l'avoir fiscal aux résidents du pays lié à la France par cette convention. Ces conventions prévoient en général un taux de retenue à la source de 15 % qui ouvre droit à un crédit d'impôt d'égal montant dans l'Etat de résidence du contribuable. Cette retenue à la source procède de l'idée selon laquelle l'Etat de la source des bénéfices doit conserver un droit d'imposition sur ces bénéfices. Le paiement de l'avoir fiscal a lieu si l'Etat de résidence du bénéficiaire effectif impose les dividendes nets et l'avoir fiscal.

L'avoir fiscal, représente ainsi en principe l'impôt sur les sociétés payé par la société distributrice et vaut crédit d'impôt imputable sur l'impôt du par l'actionnaire.

De la sorte, les dividendes distribués ne sont imposés qu'une seule fois, au niveau de l'actionnaire.

En pratique, ce principe subit déjà deux atténuations .

En premier lieu, l'avoir fiscal, fixé à 50 % du dividende pour les personnes physiques, ne compense complètement le montant d'impôt sur les sociétés acquitté par la société distributrice que si le taux de l'impôt sur les sociétés acquitté est de 33,33 %.

Appliqué à partir de 1966, le mécanisme de l'avoir fiscal n'a donc atteint son plein effet qu'en 1993 et en 1994, quand le taux de l'impôt sur les sociétés a été fixé à 33,33 %. Depuis lors, compte tenu de la hausse du taux effectif de l'impôt sur les sociétés, le montant de l'avoir fiscal ne compense plus totalement, pour l'actionnaire personne physique, le montant acquitté par la société distributrice.

En second lieu, après avoir été invalidé par le Conseil constitutionnel 50 ( * ) en tentant de plafonner la restitution de l'avoir fiscal aux personnes physiques dans la loi de finances pour 1998, le gouvernement a réduit l'efficacité du dispositif en diminuant le taux de l'avoir fiscal pour les personnes morales , à 45 % dans la loi de finances initiale pour 1999, puis à 40 % dans la loi de finances initiale pour 2000.

Les personnes morales concernées par cette réduction du taux de l'avoir fiscal sont :

- les personnes morales soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun et susceptibles d'imputer l'avoir fiscal sur l'impôt dont elles sont redevables dans les conditions prévues au 1 de l'article 209 bis du code général des impôts ;

- les caisses de retraite et de prévoyance, les fondations et les associations reconnues d'utilité publique et susceptibles d'utiliser l'avoir fiscal dans les conditions prévues au 3 de l'article 209 bis ;

- les sociétés de personnes visées à l'article 8 du code général des impôts, pour la part du dividende revenant aux associés autres que les personnes physiques.

En particulier la baisse du taux de l'avoir fiscal s'applique aux actionnaires non résidents autres que les personnes physiques, notamment :

- les sociétés étrangères détenant des participations dans des sociétés françaises qui ne sont pas assimilées au régime des sociétés mères françaises ;

- les OPCVM étrangers qui bénéficient du transfert de l'avoir fiscal, c'est à dire notamment les OPCVM d'Allemagne, d'Autriche, d'Israël, du Japon, de Finlande, des Pays-Bas, de Suède, et de Suisse, ainsi que les " Regulated Investment Companies " des Etats-Unis qui remplissent les conditions fixées par la convention fiscale franco-américaine ;

- les fonds de pension étrangers qui bénéficient du transfert de l'avoir fiscal, c'est à dire les fonds de pension de cinq Etats exclusivement (Autriche, Etats-Unis, Japon, Pays-Bas, Royaume-Uni).

Ne conservent donc le bénéfice de l'avoir fiscal au taux de 50 % que :

- les personnes physiques ;

- les sociétés de personnes visées à l'article 8 du code général des impôts, pour la part du dividende revenant aux personnes physiques ;

- les participations éligibles aux régime mères-filles , dont le III. du présent article restreint toutefois significativement le périmètre.

B. LA MESURE PROPOSÉE

Le IV. du présent article propose poursuivre la diminution du taux de l'avoir fiscal pour les personnes morales à 25 % pour les crédits d'impôt utilisés à compter du 1 er janvier 2001 et à 15 % pour les crédits d'impôts utilisés à compter du 1 er janvier 2002 .

Il semble que cette mesure ait notamment pour objectif de réduire le coût du transfert de l'avoir fiscal aux non résidents, qui s'est accru, après déduction de la retenue à la source, de 3,06 milliards de francs en 1995 à 6,6 milliards de francs en 1999.

Par coordination , la seconde phrase du IV. procède à la modification du taux du précompte mobilier .

Rappelons en effet que l'avoir fiscal se justifie dans la mesure où les revenus distribués proviennent de bénéfices qui ont supporté l'impôt sur les sociétés au taux normal. Or, il existe des produits qui n'ont pas supporté cet impôt (bénéfices provenant de succursales étrangères, dividendes exonérés en application du régime des sociétés mères et filiales, dividendes versés par des sociétés nouvelles) ou qui n'ont supporté l'impôt qu'au taux réduit (cas des plus-values à long terme). Maintenir l'avoir fiscal dans ces hypothèses reviendrait à consentir une ristourne sur un impôt qui n'a pas été versé par la société.

Par mesure de commodité, les actionnaires bénéficient toujours de l'avoir fiscal, quelle que soit l'origine des bénéfices sur lesquels les dividendes ont été prélevés. Les servitudes ont en effet été reportées sur les sociétés distributrices auxquelles il revient de faire l'avance de l'avoir fiscal au Trésor, sous forme du versement d'un précompte mobilier, égal au montant de l'avoir fiscal attaché aux dividendes qu'elle distribue (article 223 sexies du code général des impôts). Le précompte est un substitut de l'IS qui n'a pas été payé. A l'inverse, les distributions qui n'ouvrent pas droit à l'avoir fiscal n'entraînent jamais l'exigibilité du précompte.

Par cohérence avec la fixation d'un avoir fiscal égal à 45 % des dividendes, l'article 41 de la loi de finances pour 1999 avait ainsi prévu que le précompte dû au titre des dividendes distribués aux personnes morales serait également égal à 45 %. En l'absence d'une telle mesure de coordination, la société distributrice aurait en effet été amenée à payer au titre du précompte un montant supérieur au montant de l'avoir fiscal réellement octroyé aux actionnaires.

Cette mesure s'est toutefois avérée d'une extrême complexité à mettre en oeuvre.

En effet, l'article 223 sexies du CGI autorisait la société distributrice à limiter le montant du précompte dû à celui de l'avoir fiscal à 45 % à condition de justifier que cet avoir fiscal à 45 % était susceptible d'être utilisé, c'est-à-dire de démontrer que la personne attributaire de l'avoir fiscal était une personne morale non bénéficiaire du régime mère-fille.

En conséquence, la loi de finances pour 2000 a remplacé le dispositif décrit précédemment par un nouveau dispositif tendant à maintenir un taux unique de précompte (50 %), le trop payé étant, le cas échéant, compensé par une majoration de l'avoir fiscal finalement accordé aux sociétés attributaires.

Il y a en effet deux façons de neutraliser la diminution de l'avoir fiscal au regard du précompte :

- soit en faisant en sorte qu'à un avoir fiscal de 45 % ou de 40 % corresponde un précompte de 45 % ou de 40 % ; c'est la solution mise en oeuvre dans la loi de finances pour 1999 ;

- soit en faisant en sorte que les distributions donnant lieu à un précompte de 50 % soient toujours assorties d'un avoir fiscal de 50 % ; c'est la solution retenue depuis la loi de finances pour 2000.

Ainsi, lorsque les sommes distribuées donnent lieu chez la société distributrice au paiement d'un précompte, l'avoir fiscal finalement octroyé à ceux des actionnaires qui reçoivent un avoir fiscal de 40 % est aujourd'hui rehaussé de 20 % du montant du précompte acquitté, ce qui ramène l'avoir fiscal à son montant normal, c'est-à-dire la moitié des dividendes.

Le présent article propose de conserver ce dispositif , mais le coordonne avec la baisse du taux de l'avoir fiscal.

Par exemple, si les sommes distribuées donnent lieu chez la société distributrice au paiement d'un précompte, l'avoir fiscal finalement octroyé à ceux des actionnaires qui reçoivent un avoir fiscal de 25 % serait rehaussé pour les crédits d'impôt utilisés à compter de 2001 de 50 % du montant du précompte acquitté, ce qui ramènerait l'avoir fiscal à son montant normal, c'est-à-dire la moitié des dividendes.

De même, si les sommes distribuées donnent lieu chez la société distributrice au paiement d'un précompte, l'avoir fiscal finalement octroyé à ceux des actionnaires qui reçoivent un avoir fiscal de 15% serait rehaussé, à compter de 2002 de 70 % du montant du précompte acquitté, de manière, là encore de ramener l'avoir fiscal à son montant normal.

Exemple :

Cas d'une société française ayant réalisé en Espagne en l'an 2000, un bénéfice net de 300, donnant droit à avoir fiscal en l'an 2001.

Bénéfice net 300

Précompte 100

Dividende distribué 200

Avoir fiscal attaché au dividende (25 %) 50

Complément d'avoir fiscal : 50 % x 100 50

Avoir fiscal total 100

On constate dans cet exemple que le montant du précompte est bien égal à celui de l'avoir fiscal.

Toutefois, comme votre rapporteur général l'avait déjà relevé l'an passé, pour le calcul de la majoration, il n'est pas tenu compte du précompte dû à raison d'un prélèvement sur la réserve des plus-values à long terme. En effet, en cas de prélèvement sur cette réserve, le précompte dû est plafonné afin d'éviter que l'imposition globale des plus-values n'excède le montant de l'impôt sur les sociétés applicable aux bénéfices distribués. Le précompte ne peut alors excéder un montant égal à la différence entre :

- l'IS calculé au taux normal sur le montant brut de la plus-value ;

- et le montant de l'IS au taux réduit acquitté sur cette plus-value lors de sa réalisation.

Bien qu'elle soit favorable aux actionnaires qui en bénéficient, on notera que cette correction créé une discrimination entre les actionnaires selon l'origine des dividendes distribués. Un actionnaire attributaire d'un dividende prélevé sur des bénéfices réalisés en France (donc ne donnant pas lieu au paiement du précompte) sera plus durement traité qu'un actionnaire touchant un dividende prélevé sur des bénéfices réalisés à l'étranger, puisque le second, bénéficiera grâce au mécanisme de neutralisation du précompte acquitté au taux de 50 % d'un crédit d'impôt de 50 %, contre 40 % pour le premier.

C. COMMENTAIRE

Rappelons que l'avoir fiscal n'est aucunement un " cadeau fiscal " : le principe de l'avoir fiscal ne vise aucunement à annuler l'imposition, mais seulement à éviter une double imposition.

Certes, les mécanismes de l'avoir fiscal et du précompte mobilier, tels qu'ils existent aujourd'hui en France, sont loin d'être parfaits.

En effet, en l'absence d'un mécanisme de report en avant des avoirs fiscaux et crédits d'impôt, les actionnaires en situation déficitaire se trouvent dans l'incapacité d'utiliser les avoirs fiscaux dont sont assortis les produits de leurs participations, ce qui se traduit par un enrichissement sans cause de l'Etat.

De même, certaines règles du précompte pénalisent lourdement les sociétés. Il en est ainsi de l'obligation d'acquitter le précompte lorsqu'une société met en distribution des réserves datant de plus de cinq ans. Les sommes ainsi distribuées subissent deux fois l'impôt sur les sociétés. Or l'incitation à distribuer existe déjà sur le plan juridique, sans qu'il soit besoin de prévoir un dispositif fiscal dédié.

En outre, la règle régissant l'ordre d'imputation des bénéfices distribués accroît le risque de " vieillissement " précoce des bénéfices en imposant l'imputation des distributions sur les résultats les plus récents.

Même lorsqu'il est dû sur des sommes n'ayant pas subi l'imposition au taux normal, le précompte s'apparente à une double-imposition lorsqu'il est prélevé sur des sommes provenant de pays avec lesquels la France n'a pas conclu de conventions de double-imposition.

Enfin, dans le cadre du régime mère-fille, la règle prévue par l'article 146 du code général des impôts selon laquelle l'imputation de l'avoir fiscal sur le précompte n'est possible que pendant une période de cinq ans peut s'avérer handicapante lorsque la société ne met en distribution les bénéfices provenant de sa filiale qu'à l'issue de ce délai de cinq ans.

Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 1999, votre rapporteur général avait donc déjà souligné l'urgence de procéder à une réforme d'envergure de ces mécanismes , afin de réduire les distorsions résultant de ces cas de double imposition.

Le présent article ne s'inscrit nullement dans cette perspective, au contraire. En effet, ce dispositif est pour l'essentiel une mesure de rendement destinée à " financer " la baisse du taux de la contribution sur l'impôt sur les sociétés prévue aux I. et II.

De plus cette mesure de rendement est rétroactive , puisque le taux de l'avoir fiscal est réduit pour des dividendes distribués au cours de l'exercice 2000.

Surtout, cette mesure de rendement se traduit par une surimposition accrue , comme le montre l'exemple ci-dess0us.

Surimposition des dividendes avec un taux d'impôt sur les sociétés de 37,77 %
(exercices clos à compter du 1 er janvier 2001)

Taux de l'avoir fiscal

50 %

40 %

15 %

1. Dividendes reçus de filiales

100.000

100.000

100.000

2. Avoir fiscal assorti

50.000

40.000

40.000

3. Impôt sur les sociétés brut

33.333

33.333

33.333

4. Imputation de l'avoir fiscal

33.333

26.667

16.666

5. Impôt sur les sociétés net

-

6.667

6.667

6. Surtaxe de 6 %

3.333

3.333

3.333

7. CSB de 3,3 %

1.100

1.100

1.100

8. Imposition totale (5+6+7)

4.433

11.100

21.100

% de double taxation

4,43 %

11,10 %

21,10 %

Surimposition des dividendes avec un taux d'impôt sur les sociétés de 36,43 %
(exercices clos à compter du 1 er janvier 2002)

Taux de l'avoir fiscal

50 %

40 %

15 %

1. Dividendes reçus de filiales

100.000

100.000

100.000

2. Avoir fiscal assorti

50.000

40.000

40.000

3. Impôt sur les sociétés brut

33.333

33.333

33.333

4. Imputation de l'avoir fiscal

33.333

26.667

10.000

5. Impôt sur les sociétés net

-

6.667

23.333

6. Surtaxe de 6 %

2.000

2.000

2.000

7. CSB de 3,3 %

1.100

1.100

1.100

8. Imposition totale (5+6+7)

3.100

9.767

26.333

% de double taxation

3,10 %

9,77 %

26,33 %

Pour les dividendes distribués en l'an 2000 et ouvrant droit à crédit d'impôt en 2001, la diminution de l'avoir fiscal à 25 % porte ainsi le pourcentage de double imposition subi par les sociétés au titre de leurs produits de participations à 21,1 % contre 11,1 % avec un avoir fiscal de 40 % et 4,43  % avec un avoir fiscal de 50 %.

Cette mesure amplifiera d'ailleurs les effets pervers de la réforme du régime des sociétés mères et filiales proposée au III. du présent article. En effet, compte tenu de la baisse du taux de l'avoir fiscal pour les personnes physiques, le rendement effectif net des participations qui sortent du régime mère-filles pourrait être réduit de 18 % en 2001 et de 23 % en 2002.

Par ailleurs, cette mesure crée une distorsion économique au détriment des placements en actions des entreprises, et en faveur des placements obligataires sans risque.

Enfin, cette mesure est de nature à rendre la détention de titres de sociétés françaises cotées moins attractive pour les investisseurs, notamment pour les investisseurs non résidents.

Au total, votre rapporteur général vous proposera de ne pas accepter cette mesure qui ajoute à l'instabilité et à l'archaïsme de notre système fiscal, d'une part, qui réduit la compétitivité fiscale de notre économie, d'autre part. Par surcroît, il tient à souligner que cette mesure touche sévèrement les fondations et les associations d'utilité publique pour la partie de leurs revenus tirée de leurs fonds propres.

Rappelons notamment que les fondations sont par nature vouées à fonctionner grâce aux revenus dégagés année après année par le placement de leur dotation initiale. Compte tenu des écarts de rendement à long terme entre les placements en actions et les placements en obligations, il est légitime que ce placement s'effectue largement sous formes d'actions. Dans certains cas, la dotation initiale des fondations provient d'ailleurs d'une dation constituée d'actions. L'exemple le plus illustre de ce type de fonctionnement est la fondation Nobel.

Or les fondations et les associations reconnues d'utilité publique sont au rang des personnes morales pénalisées par le dispositif proposé, et ce, dans des proportions significatives : une fondation dont les revenus proviennent pour un tiers de dons et subventions, pour un tiers de revenus de placement à revenu fixe et pour un tiers de revenus de placement en actions, aura perdu en quatre ans 7,77 % de ses revenus annuels du fait de la baisse du taux de l'avoir fiscal pour les personnes morales, ce qui pourrait remettre en cause son équilibre financier.

Votre rapporteur général s'étonne donc de ce que le dispositif proposé inclue les fondations et les associations reconnues d'utilité publique parmi les personnes pénalisées.

IV. LA BAISSE DES TAUX DE L'AMORTISSEMENT DÉGRESSIF

A. LE DROIT EXISTANT

L'amortissement dégressif permet aux entreprises industrielles et commerciales soumises au régime du bénéfice réel normal ou simplifié, aux entreprises commerciales imposées selon le régime de la déclaration contrôlée et aux entreprises agricoles relevant d'un régime de bénéfice réel ou transitoire d'amortir plus rapidement certains biens, énumérés par l'article 22 de l'annexe II du code général des impôts, qu'elles ont fabriqué ou acquis neufs.

Ce système est facultatif, l'entreprise pouvant avoir intérêt à l'amortissement linéaire, mais l'option est irrévocable.

En ce cas, les annuités d'amortissement se calculent comme suit :

annuité = valeur résiduelle du bien à amortir x taux d'amortissement linéaire x coefficient d'amortissement dégressif,

où le taux d'amortissement linéaire est lui même égal à la valeur initiale du bien divisée par sa durée normale d'amortissement,

et où les coefficients d'amortissement dégressif actuellement fixés par l'article 24 de l'annexe II au code général des impôts s'élèvent à :

- 1,5 si la durée normale d'utilisation est trois ou quatre ans ;

- 2 lorsque cette durée est de cinq ou six ans ;

- 2,5 lorsque cette durée est supérieure à six ans.

Par exemple , une entreprise achète au premier janvier un matériel d'une valeur de 100.000 francs, dont la durée normale d'utilisation est de 5 ans. Le taux de l'amortissement linéaire est donc de 20 %.

Si elle choisit un amortissement linéaire, elle pourra doter chaque année pendant cinq ans 20.000 francs aux amortissements, correspondant à 20 % de la valeur initiale.

Si elle choisit l'amortissement dégressif, la première année d'amortissement, l'annuité sera égale à 100 000 francs x 20 % (coefficient d'amortissement linéaire) x 2 (coefficient d'amortissement dégressif), soit à 40.000 francs. La valeur nette comptable résiduelle à la fin de la première année sera donc de 60.000 francs.

La seconde année d'amortissement, l'annuité sera égale à 60.000 francs x 20 % x 2, soit à 24.000 francs, d'où une valeur nette comptable résiduelle de 36.000 francs à la fin de l'année, etc.

A la fin des cinq années, pour éviter que la dernière annuité, qui représente le solde de l'amortissement, ne soit plus élevée que l'avant dernière, l'entreprise à le droit de pratiquer à la clôture des deux derniers exercices une annuité correspondant à la moitié de la valeur restant à amortir au terme de la troisième année.

Au total, ce dispositif confère un avantage de trésorerie aux investissements sous forme de biens amortissables.

B. LA MESURE PROPOSÉE

Le V. du présent article propose une mesure d'une grande simplicité visant à :

- insérer à l'article 39 A du code général des impôts un nouvel alinéa tendant à fixer par la loi les coefficients d'amortissement dégressif, qui sont actuellement fixés par décret ;

- et à réduire de 0,25 point les coefficients de l'amortissement dégressif pour les biens acquis à compter du 1 er janvier 2001. Les coefficients de l'amortissement dégressif s'établiraient donc 1,25 si la durée normale d'utilisation est trois ou quatre ans, à 1,75 lorsque cette durée est de cinq ou six ans et à 2,25 lorsque cette durée est supérieure à six ans.

Selon la direction de la législation fiscale, l'impact de cette mesure sera quasiment nul en 2001. Il s'agit là toutefois d'une assertion étonnante dès lors que certaines entreprises vont clore leur comptes en cours d'année 2001, et que la plupart d'entre elles auront réalisé des investissements éligibles.

Par ailleurs le gain budgétaire afférent est estimé à 2,3 milliards de francs pour 2002 .

C. COMMENTAIRE

Votre rapporteur général trouve dans la rédaction de ce dispositif deux motifs de satisfaction :

- à titre exceptionnel dans ce projet de loi de finances, cette mesure pénalisante pour les entreprises n'est pas rétroactive ;

- des règles relatives à l'assiette de l'impôt sont réintégrées dans la loi.

Cela étant, la mesure proposée est étonnante. Certes, l'effet actualisé de la baisse des coefficients de l'amortissement dégressif apparaît relativement faible. D'ailleurs, à l'instar de plusieurs autres dispositions de ce projet de loi de finances, ce dispositif accroît à court terme les recettes publiques, mais au prix d'une perte future de ressources.

Certes, les nouveaux coefficients proposés pour l'amortissement dégressif se comparent encore avantageusement avec les coefficients retenus dans les autres pays européens.

Néanmoins, le périmètre des biens amortissables est relativement restreint en France par rapport à la plupart des pays européens, nombre de nos partenaires permettant l'amortissement d'actifs incorporels, comme la clientèle ou les marques.

Quoi qu'il en soit, l'économie française est aujourd'hui confrontée à une pénurie d'offre : le taux d'utilisation des capacités de production atteint un record historique, les goulets d'étranglement se multiplient, les délais de livraison s'allongent.

De ce constat consensuel, les causes sont également bien établies : l'économie française paie aujourd'hui la stagnation de l'investissement productif au cours des années 1990.

Dans ces conditions, la logique voudrait que la politique économique favorise le dynamisme de l'investissement. Telle est d'ailleurs l'intention affichée par M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui estime que le projet de loi de finances devrait " inciter les entreprises  à investir " 51 ( * ) .

Or l'effet de la mesure proposée est exactement inverse : selon les calculs de la direction de la législation fiscale, la baisse des coefficients de l'amortissement dégressif équivaut à renchérir de 1,24 % le coût à un an des investissements éligibles !

En particulier, la mesure pourrait pénaliser les entreprises qui réaliseront des investissements importants en vue du passage à l'euro.

La mesure de rendement qui vous est proposée est donc particulièrement inopportune.

V. COMMENTAIRE D'ENSEMBLE

A. DES ALLÉGEMENTS D'IMPÔT EN TROMPE L'OEIL

Selon les estimations de la direction de la législation fiscale, les mesures rassemblées dans cet article conduiraient à réduire de 360 millions de francs l'imposition des entreprises en 2001.

Cette évaluation est sujette à caution : le rendement des mesures d'assiette pourrait en effet avoir été sous-estimé de manière à faire apparaître un solde légèrement favorable.

En effet, l'impact budgétaire pour l'an 2001 de la baisse des coefficients de l'amortissement dégressif n'est sans doute pas nul. Par ailleurs, on peut s'étonner de ce que le rendement attendu pour 2001 de la baisse du taux de l'avoir fiscal de 40 % à 25 % (15 points) soit évalué à 3,8 milliards de francs, quand le rendement de la baisse de ce même taux de 45 % à 40 % (5 points) avait été estimé à 1,5 milliard de francs pour l'an 2000, alors que le volume des dividendes concernés était significativement moindre.

Votre rapporteur général n'a d'ailleurs, à ce jour, reçu aucune réponse à ses questionnaires relatifs à l'évaluation de l'impact budgétaire des dispositions de cet article, ce qu'il ne peut manquer de déplorer très vivement.

Quoi qu'il en soit, si l'on agrège les dispositions du présent article aux autres mesures relatives aux entreprises qui sont inscrites dans le présent projet de loi de finances, il ressort clairement que les entreprises ne bénéficient globalement d'aucun allégement d'impôt en 2001, au contraire :

- 0,36 milliard de francs pour le présent article ;

- 2,3 milliards de francs pour la baisse du taux de l'IS pour les PME ;

- 0,3 milliard de francs pour l'aménagement de la taxe sur les salaires ;

+ environ 5 milliards de francs de prélèvements sur les entreprises pétrolières ;

= 2 milliards de francs de prélèvements supplémentaires.

Même si l'on excepte les entreprises pétrolières, nombre de grandes entreprises seront globalement perdantes en 2001 de la réforme de l'impôt sur les sociétés.

Votre rapporteur général s'étonne donc de l'assertion du gouvernement selon laquelle le présent projet de loi de finances allège les prélèvements à la charge des entreprises, quand les baisses de taux affichées sont explicitement " financées " en 2001 par des mesures d'assiette.

Rappelons pourtant que le produit net de l'impôt sur les sociétés a déjà doublé entre 1995 et l'an 2000, en raison, non seulement du redressement des résultats des entreprises, mais aussi d'une longue succession de dispositions législatives élargissant l'assiette de l'impôt : cela explique pour une large part l'origine de la " cagnotte " de 1999 et le dynamisme des rentrées fiscale en 2000.

Produit net de l'impôt sur les sociétés

(en milliards de francs)

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000
(révisé)

2001
(PLF)

Produit de l'IS

113,3

125,8

143,2

172,2

184,7

229,7

253

279

Source : ministère de l'économie

Dans ces conditions, il apparaissait souhaitable que le gouvernement engage une baisse résolue des prélèvements sur les entreprises. Votre rapporteur général ne peut que regretter qu'il n'en soit pas ainsi.

B. UNE RÉFORME BROUILLONNE ET PEU LISIBLE

Les différents aménagements de l'imposition des entreprises, le plus souvent rétroactifs, qui vous sont proposés dans le présent projet de loi de finances forment par surcroît un ensemble confus , dont il ne ressort aucune simplification de la fiscalité, et aucune vision d'ensemble .

Quel contraste avec le plan de réduction des impôts adopté par le Parlement allemand en juin 2000 !

En premier lieu, le plan allemand prévoit un partage clair et équilibré des fruits de la croissance entre les ménages et les entreprises, c'est à dire entre l'offre et la demande , là où la majorité plurielle s'échine à soutenir la demande tout en bridant l'offre.

En second lieu, le plan allemand de réforme des impôts est simple, lisible , ciblé sur quelques mesures phares, comme la baisse en un an de 40 % (pour les bénéfices non distribués) ou 30 % (pour les bénéfices distribués) à 25% du taux de l'impôt sur les sociétés, ce qui crée un choc psychologique, là où le présent projet de loi de finances procède par retouches impressionnistes d'un tableau déjà passablement embrouillé.

En outre, le plan allemand prend clairement acte de l'échec du sommet d'Helsinki sur l'harmonisation fiscale en Europe, et s'inscrit dans une perspective claire de compétitivité, sinon de concurrence fiscale à moyen long terme, en ciblant de manière pragmatique les allégements d'impôts sur les bases les plus mobiles, de manière à attirer des entreprises et des capitaux sur son territoire (cf. l'exonération des plus values de participation pour les entreprises, ou la baisse de 51 % à 42 % du taux marginal de l'impôt sur le revenu), alors que les mesures françaises sont empreintes d'une certaine schizophrénie.

En effet, d'un côté, M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'Industrie semblait découvrir à l'Assemblée nationale que " les décisions stratégiques des entreprises sont prises de plus en plus souvent en fonction de la réalité fiscale de chacun des pays. Au sein de cette compétition, il ne faut pas faire plus de bêtises que les autres... si la politique fiscale n'est pas suffisamment prudente, elle peut avoir pour conséquence de fragiliser l'emploi. Les entreprises décident souvent, stratégiquement, de s'installer dans tel ou tel pays en fonction, largement, du régime fiscal qui y est en vigueur " 52 ( * ) ; de l'autre, les mesures du présent article reflètent encore une vision idéologique de la fiscalité.

Enfin, le plan allemand de baisse des impôts est crédible , car gagé sur des efforts de réduction des dépenses publiques, alors que le programme français de réforme des impôts s'accompagne d'une dérive des dépenses et d'une inquiétante stabilité du déficit budgétaire.

Votre rapporteur général soulignera pour conclure que la réorientation de la politique fiscale allemande est efficace : entre 1997 et 1999, les parts de marché de la France et de l'Allemagne pour l'accueil d'investissements directs étrangers (IDE) se sont ainsi déjà inversées, comme le montre le tableau ci-dessous.

Investissements directs étrangers accueillis, en pourcentage des IDE accueillis par les pays de l'OCDE.

1997

1998

1999

France

7,8%

5,8%

5,7%

Allemagne

3,7%

4,2%

7,7%

Source : OCDE

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, votre rapporteur général vous suggère de rendre quelque lisibilité au présent article, en supprimant les paragraphes III, IV et V, et en supprimant la cotisation supplémentaire visée aux paragraphes I et II à partir de 2003.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 7

Imputation de l'imposition forfaitaire annuelle sur cinq ans


Commentaire : le présent article additionnel vise à ce que l'imposition forfaitaire annuelle (IFA) soit déductible de l'impôt sur les sociétés dû pendant l'année d'exigibilité de cette imposition et pendant les quatre années suivantes, et non plus seulement les deux années suivantes.

I. LE DROIT EXISTANT

L'imposition forfaitaire annuelle prévue par l'article 22O A du code général des impôts n'est en principe qu'un acompte à valoir sur l'un des versements exigibles de l'année en cours ou des deux années suivantes : elle est donc déductible de l'impôt sur les sociétés.

Ainsi, l'avance ne se transforme en impôt définitif que si la société accuse des déficits pendant trois années consécutives ou si elle n'acquitte pas pendant cette période un impôt sur les sociétés suffisant.

L'ensemble des personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés y sont assujetties, sauf les organismes sans but lucratif, les personnes morales exonérées de l'impôt sur les sociétés en vertu des articles 207 et 208 du code général des impôts, les groupements d'employeurs et les centres de gestion et associations de gestion agréées, les sociétés nouvelles, sous conditions, pendant les trois premières années de leur activité, certaines associations, les sociétés exerçant l'ensemble de leurs activités dans des zones d'entreprises, les zones franches urbaines ou en Corse, pour une période temporaire, enfin, les sociétés en liquidation judiciaire.

L'article 223 septies du code général des impôts précise que le montant de l'imposition forfaitaire annuelle varie selon le chiffres d'affaires , TVA incluse et majoré des produits financiers :

- de 5.000 francs pour les personnes morales assujetties à l'impôt sur les sociétés dont le chiffres d'affaires est compris entre 500.000 francs et 1.000.000 francs ;

- à 200.000 francs pour les personnes morales assujetties à l'impôt sur les sociétés dont le chiffres d'affaires est supérieur à 500 millions de francs.

L'IFA procédait au départ d'un double fondement :

- dissuader la pérennisation de sociétés en sommeil ;

- associer l'ensemble des sociétés au financement des charges communes.

Ce premier fondement a toutefois disparu depuis la suppression, par la loi de finances pour 2000, de l'IFA pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500.000 francs.

Par ailleurs, ce second fondement s'est érodé, compte tenu de la forte progression du barème depuis le projet de loi de finances pour 1998.

Dans ces conditions, l'IFA est devenue un impôt relativement lourd pour les entreprises déficitaires.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Afin de ne pas pénaliser des entreprises en difficulté, il est proposé que l'IFA soit déductible, non plus seulement de l'impôt dû au titre de l'année en cours et des deux années suivantes, mais au titre de l'année en cours et des quatre années suivantes.

Cette mesure éviterait de pénaliser des entreprises qui connaissent des difficultés pendant plusieurs exercices consécutifs.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 7

Création d'un crédit d'impôt pour les frais de prise et de maintenance de brevets


Commentaire : le présent article additionnel propose la création d'un crédit d'impôt de 25 % sur les frais de prise et de maintenance de brevets.

I. LE DROIT EXISTANT

Les frais de prise et de maintenance de brevets sont aujourd'hui pris en compte parmi les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt recherche prévu par l'article 244 quater B du code général des impôts.

Cependant, le dispositif du crédit impôt recherche, qui prévoit que les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 50 % de l'écart entre les dépenses de recherche engagées au cours d'un exercice et la moyenne des dépenses de même nature, revalorisées de la hausse des prix à la consommation, exposées au cours des deux années précédentes, s'avère peu efficace.

Cela pourrait d'ailleurs s'expliquer pour partie par la pratique de l'administration consistant à déclencher un contrôle fiscal dès qu'une entreprise demande le bénéfice de ce crédit d'impôt.

Quoi qu'il en soit, la France se singularise par la faiblesse du nombre de brevets déposés, comme le concluait déjà l'avis du Conseil économique et social des 26 et 27 mai 1998 sur " Le rôle des brevets et des normes dans l'innovation et l'emploi ". Ce rapport soulignait notamment que si la contribution française à la production mondiale des connaissances scientifiques (8 %) est prometteuse, sa part dans les brevets déposés au niveau mondial (2 %) est inquiétante.

En 1999, selon l'Office européen des brevets, la France a ainsi déposé trois fois moins de brevets européens que l'Allemagne.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Afin de promouvoir la culture du brevet au sein des entreprises françaises, et plus particulièrement des PME, il est proposé de créer un système simple de crédit d'impôt à hauteur de 25 % sur les frais de prise et de maintenance de brevets.

Ce dispositif ne serait pas cumulable avec le crédit impôt recherche, c'est à dire que, s'agissant des frais de prise et de maintenance des brevets, l'entreprise devrait ou bien les inclure dans l'assiette du crédit impôt recherche, ou bien demander le bénéfice du crédit d'impôt brevets.

Par ailleurs, le présent article additionnel prévoit un plafond de 650.000 francs sur trois exercices consécutifs, à comparer aux frais de prise d'un brevet (de 30.000 à 100.000 francs selon les estimations).

Ce plafond vise à rendre le dispositif compatible, en l'état, avec la réglementation communautaire des aides d'Etat, qui tolère l'octroi d'aides aux entreprises d'un montant cumulé de 100.000 euros (soit 655.597 francs) sur trois années consécutives (régime dit de minimis ).

Notons que cette solution d'un plafonnement à 650.000 francs sur trois exercices consécutifs avait été également retenue pour étendre, à partir de 1998, le champ des dépenses éligibles au crédit impôt recherche aux dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections pour les entreprises du secteur textile-habillement.

Le dispositif proposé par le présent article additionnel a toutefois vocation à être étendu, dans le cadre de négociations du gouvernement avec la Commission européenne.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE ADDITIONNEL APRÈS L'ARTICLE 7

Indexation du taux de l'intérêt de retard

Commentaire : le présent article additionnel vise à indexer le taux de l'intérêt de retard sur le taux d'intérêt légal.

I. LE DISPOSITIF EXISTANT

L'article 1727 du code général des impôts dispose que : " le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toutes sanctions. Le taux de l'intérêt de retard est fixé à 0,75 % par mois et s'applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé ".

Lorsque la loi du 8 juillet 1987 a instauré ce dispositif, elle poursuivait deux objectifs.

D'une part, il s'agissait de compenser le préjudice financier subi par l'Etat du fait de l'encaissement tardif de sa créance puisque ce dernier doit emprunter un montant équivalent aux recettes dont la perception est différée. La doctrine administrative précise à ce sujet que l'intérêt de retard constitue le prix du temps et n'a pas le caractère d'une sanction .

D'autre part, ce dispositif permettait d'unifier le taux de l'intérêt de retard quelle que soit la nature de l'impôt concerné. En effet, antérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi, le préjudice financier subi par le Trésor était réparé de façon différente selon la nature des impôts :

- pour les impôts directs, les intérêts de retard s'élevaient à 0,75 % par mois ;

- pour les taxes sur le chiffre d'affaires et les droits d'enregistrement, l'indemnité de retard s'élevait à 3 % pour le premier mois et à 1 % pour chacun des mois suivants.

Dans un souci de simplification des pénalités, le système a été modifié pour aboutir à un intérêt de retard à taux faible. En effet, ce taux (soit 9 % par an) était à l'époque proche du taux de l'intérêt légal (9,5 % par an) qui sert de base au versement des intérêts moratoires dus aux contribuables qui obtiennent un dégrèvement d'impôt.

Ce taux était également proche des taux de marché pratiqués sur la place à la même date : en moyenne, les taux d'intérêt à trois mois ressortaient en 1987 à 8,3 % et les taux d'intérêt sur les emprunts d'Etat à 10 ans s'élevaient à 10,2 %.

Or, aujourd'hui, le taux de l'intérêt de retard ne correspond plus à l'objectif recherché par le législateur, à savoir la compensation du préjudice financier subi par le Trésor.

En effet, avec un taux d'inflation de 1,2 % en moyenne sur la période 1996-2000, le taux d'intérêt de retard correspond à un taux d'intérêt réel de 7,8 %. En outre le taux de l'intérêt de retard s'est considérablement éloigné du taux d'intérêt légal, qui est fixé à 2,74 % pour l'an 2000, (après 3,47 % en 1999 et 3,36 % en 1998).

De même, le taux d'intérêt légal est aujourd'hui beaucoup plus élevé que les principaux taux de marché : en moyenne, le taux d'intérêt Euribor à 1 mois s'élevait à 4,85 % en octobre 2000, et le taux d'intérêt des emprunts d'Etat à 10 ans s'élevait à 5,36 % à cette même date.

Le taux de l'intérêt de retard s'est donc beaucoup éloigné de l'évolution du loyer de l'argent et apparaît disproportionné par rapport à l'objectif poursuivi. Il est même supérieur à certains taux considérés comme usuraires pour les prêts aux entreprises (7,73 % pour les prêts d'une durée initiale supérieure à deux ans à taux variable 8,44 % pour les prêts d'une durée initiale supérieure à deux ans à taux fixe).

En outre, le montant de l'intérêt de retard est largement supérieur au montant des intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal que doit payer l'Etat lorsqu'il doit reverser définitivement un impôt dont le contribuable s'est acquitté, conformément à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales. Dans la mesure où, dans les deux cas, il s'agit d'indemniser le préjudice financier et non pas d'infliger une sanction, l'harmonisation des règles de computation des intérêts, qu'ils soient dus par le contribuable ou par l'Etat, apparaît nécessaire et justifiée.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article additionnel propose de modifier la règle de calcul du taux d'intérêt de retard, en l'indexant sur le taux du marché afin d'éviter que le taux d'intérêt de retard puisse apparaître comme une sanction, et afin que le taux d'intérêt de retard corresponde effectivement au préjudice subi par le Trésor, qui dépend à l'évidence du prix du temps sur la période considérée.

Votre rapporteur général propose de choisir comme indice le taux de l'intérêt légal, défini ainsi par l'article 1 er de la loi n° 75-619 du 11 juillet 1975 relative au taux de l'intérêt légal : " le taux de l'intérêt légal est, en toute matière, fixé par décret pour la durée de l'année civile. Il est égal, pour l'année considérée, à la moyenne arithmétique des douze dernières moyennes mensuelles des taux de rendement actuariel des adjudications de bons du Trésor à taux fixe à treize semaines ".

Toutefois, il n'a pas souhaité rétablir une symétrie parfaite entre le taux des intérêts moratoires et le taux de l'intérêt légal. En effet, il a estimé qu'il fallait choisir un taux suffisamment élevé pour éviter que la recherche d'optimisation fiscale n'incite les contribuables et les entreprises à ne pas payer leurs impôts et à placer les sommes correspondantes.

Votre rapporteur général a choisi de fixer le taux de l'intérêt de retard à un taux égal à celui de l'intérêt légal majoré de 0,25 % par mois, soit 3 % par an, ce qui correspond à un certain équilibre.

Cela représenterait à l'heure actuelle 5,74 %, à comparer avec les 9 % par an en vigueur actuellement.

Pour le décompte des intérêts de retard, il serait fait application des taux successifs de l'intérêt légal applicable entre le point de départ des intérêts et leur date d'arrêt.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 8

Simplification de la taxe sur les salaires et allégements pour les petites entreprises

Commentaire : le présent article simplifie le régime actuel de la taxe sur les salaires :

- en alignant l'assiette de la taxe sur les salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale ;

- en instaurant une franchise en base semblable à celle applicable en matière de TVA ;

- en relevant la franchise et le seuil d'application de la décote.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL

La taxe sur les salaires est un impôt d'Etat assis sur les traitements et salaires versés par certains employeurs. Elle a été créée par l'article 70 du décret n° 48-1986 du 9 décembre 1948 et a été modifiée depuis à de nombreuses reprises.

A. DES REDEVABLES LIMITÉS

La taxe sur les salaires est due par toutes les personnes ou organismes, domiciliés en France, qui versent des traitements, salaires, indemnités ou émoluments (y compris les avantages en nature) à l'exception :

1- de l'Etat, des collectivités locales et de leurs groupements ainsi que de certains organismes limitativement énumérés par la loi ;

2- des employeurs assujettis à la TVA sur au moins 90 % de leur chiffre d'affaires de l'année civile précédente.

Depuis la généralisation de la taxe sur la valeur ajoutée en 1968, la taxe sur les salaires n'a plus qu'un champ d'application résiduel, complémentaire de celui de la TVA. Le nombre des assujettis en a donc été fortement réduit. Il s'établit aujourd'hui à 350.000 personnes.

Ces redevables sont très divers. Il s'agit désormais : des établissements bancaires et financiers, des compagnies d'assurance, de certaines professions libérales, des organismes de retraite et de prévoyance, des organismes de sécurité sociale, des associations " loi 1901 ", des établissements de santé, du secteur de l'enseignement privé, des sociétés exerçant une activité civile, des organismes coopératifs, mutualistes et professionnels agricoles, des employeurs agricoles pour certaines de leurs opérations, etc.

Principaux redevables de la taxe sur les salaires en 1998

Secteur d'activité

Montant de la taxe sur les salaires versée (milliards de francs)

Taux moyen d'imposition

Activités hospitalières

14.3

9,3 %

Banques

6.3

10,4 %

Diverses administrations

5.9

8,7 %

Services aux entreprises

5.5

9,2 %

Assurance

2.9

9,8 %

B. UNE ASSIETTE ATYPIQUE

La taxe sur les salaires dispose d'une assiette propre 53 ( * ) . Contrairement aux autres prélèvements sur les salaires dus par les employeurs dont l'assiette est celle des cotisations de sécurité sociale (par exemple la taxe d'apprentissage), la taxe sur les salaires est assise sur le montant total brut des rémunérations imposables , c'est à dire de l'ensemble des sommes qualifiées de traitements ou de salaires pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, y compris la valeur des avantages en nature.

Les articles 231 bis C à 231 bis Q du code général des impôts déterminent les éléments de rémunération qui sont exonérés de taxe sur les salaires ( cf. infra ).

L'assiette est constituée par une part seulement des rémunérations versées : cette part est inversement proportionnelle au taux d'assujettissement des activités de l'employeur à la TVA l'année précédente. C'est la règle dite du " contreprorata ".

C. DES TAUX PROGRESSIFS

La taxe sur les salaires est une taxe progressive. Ses différents taux 54 ( * ) , inchangés depuis 1968, sont les suivants :

- 4,25 % sur la fraction des rémunérations individuelles annuelles inférieure à 41.780 francs :

- 8,50 % pour celle comprise entre 41.780 francs et 83.480 francs ;

- 13,60 % pour la fraction excédant 83.480 francs.

D. FRANCHISE, DÉCOTE ET ABATTEMENT

Depuis 1993, la taxe sur les salaires n'est pas payée en-dessous d'un certain montant dû : 4.500 francs aujourd'hui.

Par ailleurs, un mécanisme de décote a été instauré à la même date : entre 4.500 et 9.000 francs, l'impôt exigible bénéficie d'une décote égale aux trois quarts de la différence entre son montant et 9.500 francs.

En outre, un abattement spécifique de 33.000 francs est prévu à l'article 1679 A du code général des impôts, pour les associations loi 1901, les syndicats professionnels et leurs unions, les mutuelles du code de la mutualité.

E. UN PRODUIT DE 50 MILLIARDS DE FRANCS CHAQUE ANNÉE

Le produit de la taxe sur les salaires est d'une cinquantaine de milliards de francs par an , intégralement versée au budget général de l'Etat. Pour 2001, les prévisions l'établissent à 51,43 milliards de francs, en augmentation de 2,86 % par rapport à 2000. Elle représente 2,6 % des recettes brutes du budget général.

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

A. L'ALIGNEMENT DE L'ASSIETTE SUR CELLE DES COTISATIONS SOCIALES

1. L'alignement sur l'assiette des cotisations sociales

L'alignement de l'assiette de la taxe sur les salaires sur celle des cotisations sociales est opérée par le b) du 1° du I qui prévoit que le montant des rémunérations prises comme assiette de la taxe sera " évalué selon les règles prévues " dans le code de la sécurité sociale (ou pour les employeurs agricoles par celles du code rural). Il reprend ainsi la formulation prévue pour d'autres taxes assises sur les salaires comme la taxe d'apprentissage par exemple.

Extrait de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale

" Pour le calcul des cotisations des assurances sociales (...), sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire ".

Le 1° a) du I et le 4° du I tendent à remplacer, dans le texte de l'article 231 du code général des impôts qui définit l'assiette de la taxe sur les salaires, la notion de " traitements, salaires, indemnités et émoluments, y compris la valeur des avantages en nature " par la notion de " rémunérations ".

L'alignement de l'assiette de la taxe sur les salaires sur celle des cotisations de sécurité sociale permet d'harmoniser et donc de simplifier l'assiette de l'ensemble des prélèvements assis sur les salaires dont sont redevables les employeurs : ils seront désormais tous assis sur l'assiette des cotisations sociales.

2. Diverses dispositions de cohérence

Cet article supprime, par cohérence, des dispositions devenues sans objet en raison de l'alignement des assiettes.

Ainsi, dans le code général des impôts et le code du travail, diverses dispositions qui prévoyaient explicitement l'exonération de taxe sur les salaires de certains éléments de rémunération deviennent inutiles car d'autres textes qui prévoient l'exonération de cotisations sociales leur deviennent applicables.

Ces dispositions concernent :

- les indemnités, remboursements et allocations forfaitaires pour frais dont bénéficient les dirigeants de sociétés (1 ter de l'article 231 du code général des impôts abrogé par le 3° du I) ; l'exonération de cotisations sociales procède d'un arrêté d'avril 1975 confirmé par la jurisprudence de la Cour de cassation ;

- les participations versées en espèces aux salariés en application d'un accord d'intéressement (article 231 bis C du code général des impôts abrogé par le II et article L. 441-5 du code du travail modifié par le 3° du IV) ; l'exonération de cotisations sociales est prévue à l'article L. 441-4 du code du travail (modifié au 2° du IV) ;

- les dividendes des actions de travail attribuées aux salariés des sociétés anonymes à participation ouvrière (article 231 bis C du code général des impôts abrogé par le II) ; l'exonération de cotisations sociales est prévue à l'article 8 de la loi du 7 novembre 1990 ;

- les sommes portées à la réserve spéciale de participation (article 231 bis DA abrogé par le II et article L. 442-8 du code du travail modifié par le 4° du IV) ; l'exonération de cotisations sociales est prévue à l'article 442-8 du code du travail ;

- les sommes versées par l'entreprise en application d'un PEE (article 231 bis E abrogé par le II et article L. 443-8 modifié par le 4° du IV) ; l'exonération de cotisations sociales est prévue à l'article L. 443-8 du code du travail ;

- la contribution de l'employeur à l'achat de titres-restaurants (article 231 bis F abrogé par le II) ;

- la contribution de l'employeur aux fonds d'assurance-formation (article 231 bis G du code général des impôts qui sera abrogé par un décret de codification et article L. 961-9 modifié par le 5° du IV) ; l'exonération de cotisations sociales est prévue à l'article L. 961-9 du code du travail ;

- le versement complémentaire de l'employeur en cas d'émission ou d'achat d'actions réservées aux salariés ou en cas d'émission de parts sociales de sociétés coopératives ouvrières de production, destinées exclusivement à leurs salariés (article 231 bis J du code général des impôts abrogé par le II). Il s'agit aussi pour le gouvernement d'anticiper la disparition programmée des plans d'actionnariat issus de la loi du 27 décembre 1973, proposée aux 4° et 5° du I de l'article 14 du projet de loi sur l'épargne salariale et que le Sénat a refusée lors de l'examen de ce projet de loi ;

- les avantages accordés à l'occasion de privatisations (article 231 bis O abrogé par le II) ;

- les sommes versées aux salariés par l'employeur ou le comité d'établissement au titre des services d'aide à domicile (article 231 bis Q du code général des impôts qui sera abrogé par un décret de codification et article L. 129-3 du code du travail modifié par le 1° du IV) ; l'exonération de cotisations sociales demeurera soumise à conditions (mais différentes de celles qui permettaient l'exonération de taxe sur les salaires).

3. Différences liées à la modification du périmètre

a) Élargissement de l'assiette

La différence de périmètre entre les deux assiettes entraînera l'assujettissement à la taxe sur les salaires :

- des options de souscription ou stock-options , sauf si le délai d'indisponibilité de cinq ans est respecté ; actuellement elles sont totalement exonérées de taxe sur les salaires (article 231 bis H abrogé par le II) ;

- de la contribution de l'employeur à l'achat de chèques-vacances ; actuellement elle est exonérée (article 231 bis K abrogé par le II) ; l'exonération de taxe sur les salaires ne sera plus possible que si l'entreprise compte moins de cinquante salariés ou si cette contribution est versée par l'intermédiaire du comité d'entreprise en vertu de l'article 3 de la loi n° 99-584 du 12 juillet 1999 55 ( * ) ;

- des indemnités de départ volontaire à la retraite ou en préretraite hors plan social ; actuellement elles sont exonérées à hauteur de 20.000 francs.

b) Réduction de l'assiette

A l'inverse, des éléments de rémunération aujourd'hui touchés par la taxe sur les salaires, ne le seront plus - il s'agit par exemple des rémunérations versées à un titulaire de contrat de qualification, de contrat initiative-emploi et de contrat d'orientation qui bénéficient actuellement d'une exonération de cotisations sociales, dans la limite de du SMIC pour les deux premiers, et totale pour le troisième -.

c) Cas d'exonérations maintenues

Enfin, le gouvernement a souhaité maintenir l'exonération de certains éléments. Il s'agit des rémunérations :

- des apprentis employés par les entreprise qui emploient plus de dix salariés (article 231 bis I non abrogé) ;

- des personnes recrutées pour des manifestation de bienfaisance ou de soutien exonérée de la TVA (article 231 bis L non abrogé) ;

- des salariés bénéficiaires d'un contrat emploi-solidarité, d'un contrat emploi-consolidé ou d'un emploi-jeune (article 231 bis N non abrogé) ;

- d'un seul salarié à domicile employé par un particulier ; ou de plusieurs salariés à domicile si le particulier a besoin de l'assistance d'une tierce personne pour accomplir les actes ordinaires de la vie (article 231 bis P non abrogé).

Ces dispositions ne s'appliqueront qu'aux rémunérations versées à compter du 1 er janvier 2002, afin de permettre aux contribuables et à l'administration de se préparer au changement d'assiette.

B. L'INSTAURATION D'UNE FRANCHISE EN BASE

Le 2° du I insère un nouvel alinéa dans l'article 231 du code général des impôts pour prévoir que les employeurs dont le chiffre d'affaires de l'année précédente est inférieur aux montants prévus en matière de franchise de base de TVA ne sont pas redevables de la taxe sur les salaires.

Cette mesure revient à exonérer de taxe sur les salaires l'ensemble des redevables qui se situent en dessous d'un certain seuil de chiffre d'affaires - déterminé en fonction de la nature de l'activité exercée.

Seront ainsi exonérés les redevables dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas, en vertu de l'article 293 B du code général des impôts :

- 500.000 francs pour les employeurs exerçant une activité d'achat-revente ou de fourniture de logement ;

- 175.000 francs pour les prestataires de services ;

- 500.000 francs pour les employeurs relevant des deux catégories à condition que leur chiffre d'affaires relatif aux prestations de service n'excède pas 175.000 francs ;

- 245.000 francs pour les opérations réalisées par les avocats (y compris les avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation) et les avoués ; pour certaines opérations des " auteurs d'oeuvres de l'esprit " à l'exclusion des architectes et des artistes-interprètes. Pour ces catégories de redevables, une franchise en base de 100.000 francs est également prévue si le chiffre d'affaires global - y compris les activités accessoires - est inférieur à ce montant.

Ces dispositions s'appliqueront aux rémunérations versées à compter du 1 er janvier 2000. En effet, les redevables dont le chiffre d'affaires n'excédera pas en 2000 les limites de cette franchise en base, pourront bénéficier d'un remboursement des versements effectués au titre de la taxe sur les salaires au cours de la même année.

Toutefois, comme le souligne justement le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale dans son rapport : " L'exonération de la taxe sur les salaires proposée ne concernera que peu de redevables. (...) Une personne concernée par la franchise en base de TVA est presque toujours soit exonérée de la taxe sur les salaires parce qu'elle n'est pas employeur, soit concernée par la franchise d'impôt propre à la taxe sur les salaires. Les effets financiers de la mesure proposée par le gouvernement sont donc très limités ".

L'amélioration recherchée n'est donc pas tant l'allégement de la charge de la taxe sur les salaires que la simplification administrative pour les redevables comme pour l'administration.

C. LE RELÈVEMENT DE LA FRANCHISE ET DU SEUIL DE LA DÉCOTE

Le paragraphe III du présent article relève les seuils de la franchise et de la décote, créés en 1993, mais inchangés depuis 1995.

Le seuil de la franchise passe ainsi de 4.500 à 5.500 francs : désormais, cette taxe ne sera pas due si son montant annuel ne dépasse pas 5.500 francs, ce qui devrait permettre l'exonération totale d'un employeur occupant un salarié à temps plein rémunéré sur la base d'un SMIC brut. C'était l'objectif de la fixation du montant à 4.500 francs en 1995 mais l'absence d'indexation du dispositif fait progressivement perdre son effet à ce dispositif.

Le seuil de la décote passe de 9.000 à 11.000 francs (il demeure donc égal au double du seuil de la franchise) : l'impôt exigible dont le montant se situera entre 5.500 et 11.000 francs bénéficiera d'une décote égale aux trois quarts de la différence entre son montant et 11.000 francs (ce mode de calcul de la décote est inchangé).

Cette mesure devrait avoir un certain impact sur les employeurs relevant des bénéfices non commerciaux. C'est d'ailleurs, la seule disposition qui ait un coût non négligeable ( 70 millions de francs en 2001).

Ces dispositions s'appliqueront aux rémunérations versées à compter du 1 er janvier 2001.

L'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels présentés par le rapporteur général du budget de la commission des finances.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION

Votre commission a, à de nombreuses occasions 56 ( * ) , critiqué la taxe sur les salaires. Les principaux défauts de cette taxe sont les suivants :

1- c'est une taxe sans équivalent dans l'Union européenne et qui constitue à ce titre un handicap de compétitivité fort pour les activités qui l'acquittent, en notamment le secteur bancaire et celui de l'assurance ;

2- elle constitue également un frein à l'emploi et un encouragement à la délocalisation : dans les secteurs de l'assurance et de la banque, elle représente jusqu'à 10 % du montant brut des salaires ; l'exploitation des gisements d'emplois dans les associations, et en particulier d'emplois qualifiés, est également bridée par l'existence de cette taxe.

L'ensemble des mesures envisagées coûtera 70 millions de francs en 2001 , soit moins de 0,15 % du produit total de la taxe. C'est loin d'être une réforme en profondeur de la taxe.

Le bureau de votre commission a décidé de mener une réflexion sur une éventuelle réforme de la taxe sur les salaires. Les travaux sont en cours . Dans ce contexte, et par souci de réalisme, votre commission vous propose donc d'accepter dans leur principe les modifications proposées, certes très ponctuelles, mais qui n'en apportent pas moins une légère amélioration du dispositif.

Plus particulièrement, et conformément à sa position traditionnelle, votre commission vous propose une modification du présent article afin de rétablir l'exonération de taxe sur les salaires dont bénéficient les stock-options , considérant qu'il ne s'agit pas de rémunérations mais de plus-values sur valeurs mobilières.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 9

Aménagement de la fiscalité des entreprises pétrolières

Commentaire : le présent article propose de restreindre à titre définitif le champ de la provision pour reconstitution des gisements d'hydrocarbures aux seuls gisements exploités en France, d'une part ; d'instaurer une taxe exceptionnelle sur les provisions pour hausse de prix constituées par les entreprises dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation, d'autre part.

Cet article propose deux mesures de trésorerie , d'un rendement d'ailleurs inégal (0,5 milliard de francs pour la restriction de la provision pour reconstitution des gisements et 4 à 5 milliards de francs pour la taxe sur la provision pour hausse des prix), visant à prélever sur les entreprises pétrolières une contribution exceptionnelle pour financer les mesures d'allégements de la fiscalité des produits pétroliers prévues à l'article 10 du présent projet de loi de finances pour 2001.

Ces deux mesures n'ayant d'autre lien que leur finalité, votre rapporteur général les détaillera successivement, avant de commenter l'ensemble du dispositif.

I. LA RESTRICTION DU CHAMP DE LA PROVISION POUR RECONSTITUTION DES GISEMENTS D'HYDROCARBURES AUX SEULS GISEMENTS EXPLOITES EN FRANCE

A. LE PRINCIPE ET LES MODALITÉS ACTUELLES DE LA PROVISION POUR RECONSTITUTION DES GISEMENTS

1. Le principe général

En vertu des dispositions du b du 1 bis de l'article 39 ter du code général des impôts, les entreprises qui effectuent la recherche et l'exploitation d'hydrocarbures liquides ou gazeux en France (DOM et TOM compris), dans les Etats qui faisaient partie de la Communauté instituée par la Constitution de 1958, ainsi qu'en Algérie, au Cameroun, au Maroc, en Tunisie et au Togo, sont autorisés à déduire de leur bénéfice net d'exploitation une provision spéciale appelée " provision pour reconstitution des gisements " (PRG).

Cette provision instaurée en 1953 est doublement plafonnée :

- à 23,50 % du montant des ventes des produits marchands extraits des gisements susceptibles d'engendrer un bénéfice imposable en France, c'est à dire des gisements situés en France et dans les DOM, ainsi que des gisements retenus dans le périmètre de consolidation pour les entreprises agrées au régime du bénéfice mondial ou consolidé ;

- et à 50 % du bénéfice de l'exercice imposable en France, provenant de la vente de ces mêmes produits, en l'état ou après transformation.

Les bénéfices affectés à cette provision doivent être employés , dans un délai de deux ans à compter de la clôture de l'exercice 57 ( * ) , à l'amélioration de gisements anciens ou la recherche de nouveaux gisements en France, dans les territoires précités, et, depuis 1964, dans des " zones géographiques prioritaires ", définies par arrêté " de manière à réduire la dépense énergétique de la France ", sans que la pertinence de cette délimitation n'apparaisse toujours clairement 58 ( * ) .

A défaut de dépenses libératoires dans ce délai de deux ans, la provision est reprise et rapportée au résultat imposable de l'exercice au cours duquel a expiré ce délai de deux ans, et l'impôt correspondant à la réintégration des sommes non employées est majoré de l'intérêt de retard prévu à l'article 1729 du code général des impôts (soit 0,75 % par mois).

Concrètement, les dépenses libératoires peuvent être :

- l'acquisition de participations dans des sociétés et organismes " désignés par arrêté du ministre de l'économie et des finances et du ministre de l'industrie " et ayant pour objet d'effectuer la recherche et l'exploitation de gisements d'hydrocarbures en France et dans les territoires précités ;

- ou bien des dépenses directes pour la mise en valeur des gisements d'hydrocarbures, soit sous la forme de charges (par exemple des dépenses de recherche et de prospection), soit sous la forme d'immobilisations amortissables (par exemple l'acquisition de nouvelles têtes de puits).

Les entreprises qui réalisent des dépenses libératoires en emploi de la provision doivent ensuite les rapporter à leur résultat imposable,  en une seule fois si ces dépenses ne sont pas amortissables (par exemple pour les charges de recherche), au rythme des amortissements annuels dans le cas contraire.

Au total, ce dispositif d'exception ne confère donc aux entreprises pétrolières qu'un avantage de trésorerie , en leur permettant de provisionner des investissements ou des charges de reconstitution de gisements prévus pour les deux années à venir.

2. Le régime de faveur pour les dépenses réalisées en France

Pour les investissements réalisés en France, les entreprises sont autorisées depuis 1985 à ne réintégrer à leur bénéfice imposable que 20 % du montant des dépenses libératoires .

Cet avantage fiscal , qui a pour effet d'exonérer à hauteur de 80 % les dépenses de reconstitution de gisement effectuées en France, avait été prorogé de deux ans, jusqu'aux exercices clos avant le 1 er janvier 2002 (c'est à dire jusqu'en 2001), par l'article 31 de la loi de finances rectificative pour 1999, à l'initiative de l'Assemblée nationale.

La dépense fiscale induite avait été chiffrée à 170 millions de francs pour 1998 par le fascicule budgétaire des " voies et moyens " du projet de loi de finances pour 1998, et n'a plus été évaluée depuis lors.

Selon les informations transmises à votre rapporteur général, cette dépense fiscale bénéficierait pour l'essentiel aux entreprises qui exploitent des gisements d'hydrocarbures en Ile-de-France et en Aquitaine.

3. Les avantages issus de la combinaison de ce dispositif et du régime du bénéfice consolidé

Rappelons que le régime du bénéfice consolidé prévoit que, lorsqu'elles ont été agréées à cet effet par le ministère de l'économie et des Finances, les sociétés et les autres personnes morales assujetties à l'impôt sur les sociétés sont autorisées à consolider leurs résultats avec les résultats de leurs exploitations directes situées hors de la France métropolitaine et des départements d'outre-mer et avec ceux de l'ensemble de leurs " exploitations indirectes " (pour l'essentiel des participations majoritaires).

Ce régime intéresse des sociétés pétrolières françaises.

Pour ces sociétés, l'article 39 ter du code général des impôts relatif à la provision pour reconstitution des gisements, se borne à prévoir, dans le dernier alinéa du 1. bis , que " les entreprises imposées selon le régime du bénéfice mondial ou du bénéfice consolidé défini à l'article 209 quinquies effectuent la réintégration dans leur résultat d'ensemble ".

Cependant, une des dispositions réglementaires qui organisent la transposition des dispositions législatives du code général des impôts pour les entreprises agrées au régime du bénéfice consolidé, le dernier alinéa du 3 de l'article 126 de l'annexe II au code général des impôts, stipule que " pour l'application des dispositions de l'article 39 ter du code général des impôts... les provisions, peuvent, sauf disposition contraire de la décision d'agrément, être employées dans tous pays, Etats ou territoires dans lesquels la société agréée possède des exploitations directes ou indirectes dont les résultats doivent être compris dans le résultat consolidé du groupe ".

En d'autres termes, les entreprises pétrolières françaises agréées pour le régime du bénéfice consolidé sont, au contraire de leurs concurrentes, affranchies de la contrainte de réemploi de la provision pour reconstitution de gisement dans les zones énumérées par l'article 39 ter .

En outre, comme votre rapporteur général l'a déjà mentionné supra , ces entreprises bénéficient de fait de plafonds plus élevés pour leur provision pour reconstitution des gisements, puisque ces plafonds sont calculés à partir des ventes et des bénéfices issus de l'ensemble des gisements relevant du périmètre de consolidation, et non pas seulement des gisements exploités en France.

4. Un dispositif considéré comme " potentiellement dommageable " par le rapport Primarolo

Le rapport du 23 novembre 1999 du groupe " code de conduite " sur la fiscalité des entreprises dans l'Union européenne, dit " rapport Primarolo ", du nom la Présidente du groupe de travail, a classé le régime français de la provision pour reconstitution des gisements d'hydrocarbures parmi les mesures fiscales " potentiellement dommageables " pour l'Union européenne, c'est à dire parmi les mesures susceptibles d'avoir une incidence sensible sur la localisation des activités au sein de l'Union européenne, au premier rang desquelles figurent les mesures établissant un niveau d'imposition effective nettement inférieur à celui qui s'applique normalement dans l'Etat-membre concerné.

Notons que seuls trois autres dispositifs français, tous de faible portée, ont été considérés comme potentiellement dommageable : le régime des provisions pour reconstitution des gisements de substances minérales solides 59 ( * ) , l'imposition au taux réduit des plus-values à long terme des redevances sur les brevets et l'instruction du 21 janvier 1997 prévoyant l'imposition sur une base réduite des quartiers généraux de multinationales.

S'agissant de la provision pour reconstitution des gisements d'hydrocarbures, il semble que ce classement s'explique par les deux dispositions d'exception détaillées ci-dessus : l'avantage fiscal exceptionnel conféré aux opérations de reconstitution des gisements effectuées en France, d'une part ; l'avantage conféré aux holdings pétrolières françaises, d'autre part.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

1. La restriction du champ de la provision pour reconstitution des gisements

Le présent article du projet de loi de finances pour 2001 propose une nouvelle rédaction de l'article 39 ter du code général des impôts.

Cette nouvelle rédaction, qui supprime toutes les procédures d'agrément, ainsi que l'ensemble des dispositions périmées, est plus simple et plus lisible.

Par ailleurs, cette nouvelle rédaction comporte trois importantes novations s'appliquant à partir du premier exercice clos à compter du 31 décembre 2000 (c'est à dire à partir de l'exercice 2000), et qui réduisent singulièrement la portée du dispositif.

• En premier lieu, conformément au principe de territorialité de l'impôt sur les sociétés, le régime de la provision pour reconstitution des gisements est désormais restreint à la France métropolitaine et aux départements d'outre - mer . En sont donc exclues les opérations effectuées dans les TOM, en Nouvelle-Calédonie, dans les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre et Miquelon, dans les Etats de la Communauté établie par la Constitution de 1958, en Algérie, au Cameroun, au Maroc, au Togo et en Tunisie, ainsi que dans l'ensemble des pays visés par l'arrêté ministériel de 1993.

Cette restriction s'applique :

- en vertu du premier alinéa du 1 du I., aux entreprises concernées, qui doivent désormais effectuer la recherche ou l'exploitation des hydrocarbures en France métropolitaine ou dans les DOM  ;

- corollairement, au calcul de la provision, désormais plafonnée à 50 % du bénéfice net d'exploitation et à 23,50 % des ventes issues des seuls gisements exploités en France et dans les DOM. En pratique, cette seconde restriction n'a d'effet que pour les entreprises pétrolières françaises agréées au régime du bénéfice consolidé  ;

- en vertu du second alinéa du 1 du I., au réemploi de la provision, limité aux immobilisations ou aux travaux de recherche réalisés pour la mise pour la mise en valeur des gisements situés en France ou dans les DOM, ou à l'acquisition de participations dans les sociétés ayant cet objet.

Notons que, selon la direction de la législation fiscale, l'exclusion des TOM, ainsi que de la Nouvelle-Calédonie et des collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre et Miquelon est sans portée pratique s'agissant des deux premiers points. En effet, compte tenu des règles de territorialité de l'impôt, seul les groupes pétroliers français agréés au régime du bénéfice mondial consolidé pouvaient en théorie utiliser les gisements exploités dans ces territoires pour accroître le plafond de leur provision pour reconstitution des gisements, or ces groupes n'exploitent à ce jour aucun gisement dans ces territoires.

En revanche, cela n'est a priori pas le cas s'agissant de la faculté de réemploi de la provision.

Afin de ne pas brider la recherche pétrolière dans les TOM, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie et dans collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, votre rapporteur général vous propose donc un amendement visant à maintenir ces territoires dans le champ géographique de réemploi de la provision pour reconstitution de gisement.

• En second lieu, l'exonération à hauteur de 80 % des dépenses libératoires effectuées en France est supprimée .

• Enfin, le paragraphe 3. précise que " les entreprises soumises à l'un des régimes prévus à l'article 209 quinquies dotent et emploient leurs provisions pour reconstitution des gisements dans les conditions prévues aux 1 et 2 pour la détermination de leur résultat mondial ou consolidé ". En d'autres termes, la souplesse en termes de réemploi dont bénéficiaient les holdings pétrolières françaises est supprimée .

Au total, la portée du dispositif de l'article 39 ter est considérablement restreinte, puisque les opérations effectuées en France et dans les DOM ne constituaient qu'une très faible part des opérations éligibles, et qu'elles perdent l'essentiel de leur traitement fiscal privilégié.

2. Les dispositions transitoires

Le 4 du I. détaille le traitement applicable aux provisions constituées avant le 31 décembre 2000 et non encore employées, ainsi qu'aux investissements amortissables qui n'ont pas encore été entièrement réintégrés.

S'agissant en premier lieu des provisions constituées jusqu'au 31 décembre 2000 pour reconstituer des gisements dans l'ensemble des pays éligibles, et non encore employées, le premier alinéa précise qu'elles doivent être utilisées en France métropolitaine et dans les DOM exclusivement, et ce, dans un délai de deux ans après leur constitution.

A défaut, ces provisions seront rapportées au résultat imposable de l'exercice au cours duquel expire le délai de deux ans. Par ailleurs " l'impôt correspondant à la réintégration des sommes non employées dans ce délai est majoré de l'intérêt de retard prévu à l'article 1729 ".

Ces dispositions sont manifestement rétroactives et inéquitables .

En effet, il est évident, compte tenu de l'ampleur modeste des gisements d'hydrocarbures en France métropolitaine et dans les DOM, que les entreprises concernées ne pourront y employer qu'une faible part des provisions qu'elles ont constituées pour renouveler les gisements qu'elles exploitent dans l'ensemble des pays éligibles.

Or l'impôt correspondant à la réintégration des provisions ainsi " piégées " sera majoré d'un intérêt de retard dont le taux (9% par an) constitue manifestement une sanction.

En d'autres termes, cet article prévoit de sanctionner des entreprises qui n'ont fait qu'appliquer, en toute bonne foi, la législation existante.

S'agissant en second lieu des provisions constituées avant le 31 décembre 2000, et employées sous la forme d'investissements amortissables qui n'ont pas encore été entièrement réintégrés, le dispositif proposé distingue deux cas de figure :

- si les investissements ont été réalisés hors de France et des DOM, la partie non encore rapportée du montant de ces investissements doit être rapportée, en une seule fois, au résultat imposable du premier exercice clos à compter du 31 décembre 2000 (c'est à dire en pratique l'exercice 2000).

- si les investissements ont été réalisés en France métropolitaine ou dans les DOM, leur réintégration " continue de s'effectuer au même rythme que l'amortissement ". Néanmoins, comme votre rapporteur général l'a déjà observé, ces investissements perdent leur régime fiscal de faveur (réintégration à hauteur de 20 % seulement).

Là encore, il s'agit d'une disposition manifestement rétroactive et inéquitable, puisque les entreprises concernées ont décidé les investissements concernés sur la base du droit existant, prorogé il y a moins d'un an à l'initiative de députés du groupe socialiste de l'Assemblée nationale !

Au total, selon le projet de loi de finances, ces dispositions se traduiraient par un gain de 500 millions de francs pour l'Etat en 2001.

Ce montant agrège en fait deux gains de nature bien distincte :

- la suppression de l'avantage fiscal accordé aux dépenses de reconstitution des gisements effectuées en France se traduit par la suppression d'une dépense fiscale reconductible, dont le coût avait été évalué à 170 millions de francs pour 1998 ;

- en revanche, les autres mesures proposées, d'un rendement immédiat supérieur ne se traduisent pour l'Etat que par un gain de trésorerie. En effet, les provisions concernées présentaient un caractère provisoire, et n'occasionnaient pour l'Etat qu'un décalage de trésorerie. Leur restriction ne permet à l'Etat que d'améliorer sa trésorerie, au détriment de la trésorerie des entreprises concernées, comme de leurs calculs économiques antérieurs. Au total l'Etat ne bénéficie que d'un surcroît temporaire de recettes, tout en se privant de ressources équivalentes pour l'avenir.

II. L'INSTAURATION D'UNE TAXE EXCEPTIONNELLE DUE PAR LES ENTREPRISES PÉTROLIÈRES ET ASSISE SUR LA PROVISION POUR HAUSSES DE PRIX

A. LA PROVISION POUR HAUSSE DES PRIX

1. Les fondements de la provision pour hausse des prix (PHP)

Les industries qui transforment des matières premières acquises sur les marchés internationaux ou le territoire national sont exposées aux fluctuations permanentes des cours de ces matières qui affectent le coût de renouvellement des stocks nécessaires à leur exploitation.

Or, bien que les stocks de ces entreprises doivent être renouvelés à un volume constant ou croissant, la différence entre la valeur comptabilisée du stock à la clôture d'un exercice et la valeur du même stock à l'ouverture de l'exercice fait partie intégrante du résultat imposable. Le profit sur stock ainsi constaté est soumis à imposition alors même qu'il est affecté d'une obligation de remploi et ne constitue donc pas un profit disponible susceptible d'être distribué aux actionnaires.

Dans de nombreux pays, cette difficulté est résolue par la valorisation des stocks selon la méthode " dernier entré, premier sorti " (DEPS ou LIFO). En effet, les stocks sont consommés à une valeur proche de leur coût de remplacement et l'augmentation de la valeur des stocks ne touche pas le stock comptable tant que le stock outil reste stable. Cette méthode permet donc de neutraliser la quasi-totalité des variations de prix affectant les stocks de base indispensables à la poursuite de l'exploitation.

Cette méthode, bien que prévue par la 4 ème directive comptable européenne, n'est jusqu'à présent pas admise par la législation fiscale française, qui, conformément à la législation comptable, prévoit l'évaluation des stocks selon le prix d'acquisition historique.

En effet, aux termes du 3 de l'article 38 du code général des impôts, " les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice si ce cours est inférieur au prix de revient ".

Par ailleurs, en vertu de l'article 12 du code du commerce, " les biens fongibles sont évalués soit à leur coût moyen pondéré d'acquisition ou de production, soit en considérant que le premier bien sorti est le premier bien entré " (PEPS). Les produits sont ainsi réputés vendus dans l'ordre chronologique de leur comptabilisation. Sans mécanisme correcteur, les entreprises françaises paieraient donc davantage d'impôt que leurs concurrentes tenant leur comptabilité en LIFO.

Exemple

Soit une entreprise réalisant un chiffre d'affaires de 100 millions de francs et un bénéfice de 1,5 million de francs. Elle dispose d'un stock acquis au prix historique de 2 millions de francs. Supposons que le prix de cette matière augmente brutalement de 50 %.

En méthode LIFO, le stock se trouve automatiquement revalorisé de 1 million de francs et le bénéfice fiscal réduit d'autant. L'entreprise peut donc financer le renouvellement de son stock sur le bénéfice de l'exercice.

En revanche, en méthode française, le stock n'est pas revalorisé, ce qui laisse le bénéfice fiscal inchangé et l'entreprise ne peut financer le renouvellement de son stock

Pour éviter que ces règles restrictives compromettent l'activité des entreprises qui effectuent la première ou la deuxième transformation de matières dont les prix sont liés aux variations des cours internationaux, la législation française permettait jusqu'en 1997 à ces entreprises de constituer, en franchise d'impôt, une provision représentative de la dérive des coûts d'un stock de base strictement défini : la provision pour fluctuation de cours (PFC).

Encadrée par des dispositions relativement complexes, la provision pour fluctuation de cours (PFC) avait pour effet de détaxer, dans une certaine mesure, les bénéfices " virtuels " correspondant aux augmentations des cours mondiaux de certaines matières premières, et de faciliter l'autofinancement, en franchise fiscale, du coût de réapprovisionnement des stocks.

Constituée au passif des entreprises, la PFC permettait de compenser le coût, constaté à l'actif, de l'intégration dans le résultat fiscal imposable des plus ou moins-values latentes consécutives à la valorisation des stocks selon la méthode " premier entré, premier sorti " ou selon celle du coût moyen pondéré.

Lorsque les cours augmentaient, les entreprises provisionnaient, puis elles rapportaient ces provisions à leurs résultats imposables lorsque le mouvement s'inversait.  Ainsi, elles diminuaient leur bénéfice des profits nominaux réalisés en période de hausse. En revanche, ces profits devenaient imposables en cas de baisse des cours, puisque la provision était alors réintégrée dans la base imposable. La PFC avait ainsi pour conséquence de " lisser " les résultats des entreprises dans le temps, et d'éviter des " à-coups " sur leur trésorerie.

Cette provision s'apparentait donc à un LIFO réservé au seul stock outil des entreprises. Elle ne pouvait se cumuler, pour un même bien, avec la provision pour hausse des prix.

Or l'article 6 de la loi de finances pour 1998 a supprimé la provision pour fluctuation de cours pour les exercices clos à compter du 31 décembre 1997, au détriment principalement des entreprises de raffinage de pétrole.

Fort logiquement, ces entreprises se sont alors réorientées vers une disposition techniquement plus frustre, mais d'esprit analogue : la provision pour hausse de prix (PHP) prévue à l'article 39, 1-5° du CGI.

A l'appui de la suppression de la provision pour fluctuation de cours, le gouvernement avait d'ailleurs fait valoir que les entreprises pourraient recourir à cette provision pour hausse des prix.

2. Le dispositif de la provision pour hausse des prix (art. 39, 1-5° du CGI)

Les entreprises peuvent, lorsque pour une matière ou un produit donné, il est constaté, au cours d'une période ne pouvant excéder deux exercices successifs, une hausse de prix supérieure à 10 %, pratiquer une provision correspondant à la fraction de cette hausse excédant 10 %.

Sont susceptibles de donner lieu, le cas échéant, à la constitution d'une provision pour hausse des prix (PHP), les matières, produits et approvisionnements de toute nature existant en stock à la clôture de l'exercice.

L'exonération d'impôt dont bénéficient la PHP n'est pas définitive . En effet, la provision pratiquée à la clôture d'un exercice est rapportée de plein droit aux bénéfices imposables de l'exercice en cours à l'expiration de la sixième année suivant la date de cette clôture. Toutefois, dans le cas des entreprises dont la durée normale de rotation des stocks est supérieure à trois ans, la réintégration est seulement effectuée dans un délai correspondant au double de cette durée.

Enfin, à la différence de l'ancienne provision pour fluctuation de cours (PFC), la provision pour hausse des prix peut être constituée même si les résultats de l'exercice sont déficitaires.

Néanmoins, la PHP est à certains égards moins avantageuse que ne l'était la PFC. En effet, la PHP laisse à la charge des entreprises les conséquences des hausses de prix inférieures à 10 % très fréquentes dans certains secteurs industriels (transformation des métaux notamment). Or, si à cinq hausses annuelles successives de 10 % succède une chute des prix de 50 %, les entreprises se retrouvent dans la situation initiale, mais la PHP ne les aura pas exonérées du paiement d'un impôt sur 50 % du stock outil.

Par ailleurs, la PHP fait obligation aux entreprises de réintégrer la provision au cours du sixième exercice, ce qui peut constituer une charge très lourde pour les entreprises si la hausse de départ a été élevée.

B. LA TAXE EXCEPTIONNELLE PROPOSÉE PAR LE PRÉSENT ARTICLE

Le II. du présent article propose la création d'une taxe exceptionnelle d'une " brutale simplicité ".

Cette taxe serait due par les seules entreprises (au nombre de 12), dont l'objet principal est d'effectuer la première transformation, c'est à dire le raffinage du pétrole brut ou de distribuer les carburants issus de cette transformation.

Cette taxe serait assise sur la fraction excédant 100 millions de francs du montant de la provision pour hausse des prix inscrite au bilan à la clôture du premier exercice clos à compter du 20 septembre 2000, ou à la clôture de l'exercice précédent si le montant correspondant est supérieur.

Concrètement, sous réserve qu'elles ne dotent pas trop leur PHP en l'an 2000, cette franchise de 100 millions de francs pourrait exempter de la taxe exceptionnelle au moins 5 des 6 entreprises concernées dont l'objet principal est d'effectuer la distribution des carburants, parmi lesquelles les filiales de chaînes de supermarchés.

Inversement, selon les informations dont dispose votre rapporteur général, les six autres entreprises concernées, c'est à dire les raffineurs-distributeurs, auraient constitué des provisions pour hausses de prix supérieures à ce montant dès la fin de l'exercice 1999. Compte tenu de l'effet de cliquet du dispositif (assujettissement à la taxe si le montant de la PHP dépasse 100 millions de francs, soit à la clôture du premier exercice clos après le 20 septembre 2000, c'est à dire à la fin de l'exercice 2000, soit à la clôture de l'exercice précédent), ces entreprises devront donc acquitter la taxe, quelles que soient l'évolution jusqu'à la clôture de l'exercice du montant de leur PHP, d'une part, des cours du pétrole, d'autre part.

Pour ces redevables, la taxe exceptionnelle doit être acquittée dans les quatre mois de la clôture de l'exercice concerné, c'est à dire le premier exercice clos à partir du 20 septembre 2000. Concrètement, la taxe sera donc acquittée en avril 2001.

La taxe exceptionnelle " est liquidée, déclarée, recouvrée et contrôlée comme en matière de taxe sur le chiffre d'affaires et sous les mêmes garanties et sanctions ".

A l'initiative de son rapporteur général, l'Assemblée nationale a précisé que cette taxe " n'est pas admise en charge déductible pour la détermination du résultat imposable ".

Initialement fixé à 20 % par le gouvernement, le taux de la taxe a été porté à 25 % par l'Assemblée nationale, sur proposition de son rapporteur général.

En d'autres termes, l'intérêt de la provision pour les entreprises concernées n'a pas entièrement disparu, sauf pour les sociétés déficitaires, puisque les montants provisionnés seront taxés à hauteur de 25 % , et non pas à hauteur du taux marginal de l'impôt sur les sociétés, soit 37,7 % au titre de l'exercice 2000.

Le rendement attendu de la taxe dépend largement des évolutions respectives du prix du pétrole et du dollar d'ici à la fin de l'année 2000 (cf. encadré ci-dessous). Aux cours actuels, ce rendement pourrait être de l'ordre de 4,5 milliards de francs.

Le calcul du rendement de la taxe sur la provision pour hausse de prix

Selon les liasses fiscales rassemblées par la D.L.F., les principales sociétés concernées avaient constitué au 31 décembre 1999 un montant de provision de 11 milliards de francs (entre le 1 er janvier 1999 et le 31 décembre 1999, le dollar s'est apprécié de 5,62 francs à 6,59 francs, et le pétrole de 11 $ par baril à 26 $ par baril, ce qui signifie que le prix en francs du baril de pétrole s'est élevé de 61,8 francs à 171,3 francs, soit une augmentation de 109,5 francs par baril, s'appliquant à un stock d'environ 100 millions de barils).

Sous les deux hypothèses suivantes :

- le volume des stocks restera constant d'une année sur l'autre ;

- les entreprises continueront de provisionner, dès lors qu'elles y ont intérêt ;

alors, le rendement attendu de la taxe ne dépend plus que du prix du pétrole et du cours du dollar au 31 décembre 2000.

Si ces paramètres se maintenaient à leur niveau du 30 octobre 2000, alors le prix du pétrole en francs serait de 30,90 $/baril x 7,83 F/$ = 242 francs, et le montant de la provision s'élèverait à (242 F -61,8 F) x 100 millions de barils, soit environ 18 milliards de francs.

Au taux de 25 %, le rendement de la taxe pourrait ainsi s'élever à 4,5 milliards de francs .

Avec un dollar à 8 francs et un prix du pétrole à 35$ le baril, le rendement de la taxe serait proche de 5,5 milliards de francs.

Inversement, avec un dollar à 7,50 F et un prix du pétrole à 28 $ par baril, le rendement de la taxe ne serait plus que de 3,7 milliards de francs.

Ces calculs montrent que le produit de cette taxe est très incertain d'une part, que cette taxe permet à l'Etat, comme aux entreprises pétrolières d'être mécaniquement gagnant lorsque l'euro baisse et lorsque le prix du pétrole s'accroît.

Fort logiquement, le dispositif proposé prévoit que la taxe est imputable sur l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice au cours duquel la provision sur laquelle elle est assise est réintégrée (au plus tard à l'expiration de la sixième année suivant la date de la clôture de l'exercice où la provision a été dotée). Cette disposition vise à éviter toute double imposition.

Néanmoins, cette disposition ne règle pas le cas des entreprises qui seraient déficitaires l'année où elles réintègrent la provision pour hausse des prix. En l'état du texte, ces entreprises ne pourraient en effet imputer la taxe précédemment acquittée au titre de l'exercice 2000.

Pour les entreprises déficitaires, la taxe se transformerait donc en un impôt définitif, alors que le texte vise à instaurer un prélèvement temporaire. Cette situation serait contraire au principe d'égalité devant l'impôt.

Votre rapporteur général vous propose donc un amendement visant à ce que la taxe soit, le cas échéant, imputable ou remboursable.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LES ÉLÉMENTS DU DÉBAT RELATIF À LA PROVISION POUR RECONSTITUTION DES GISEMENTS.

La provision pour reconstitution de gisements prévue par l'article 39 ter du code général des impôts est à bien des égards un dispositif désuet et complexe. Par surcroît, ce dispositif peut à juste titre être considéré comme " potentiellement dommageable " à l'échelle communautaire.

Il est d'ailleurs étonnant de voir aujourd'hui l'Assemblée nationale adopter la suppression d'un dispositif peu compatible avec les principes communautaires, dont elle avait elle-même demandé la prorogation il y a moins d'un an !

Néanmoins, les conséquences de cette réforme sur la recherche et l'exploitation d'hydrocarbures en France et dans les DOM sont, au mieux, incertaines. A très court terme, les dispositions transitoires du dispositif proposé pourraient inciter certaines entreprises pétrolières à accroître leurs dépenses de recherche en France. Mais les incitations fiscales pérennes à ces dépenses disparaissent.

Au total, à moyen terme, ce dispositif pourrait freiner la recherche de nouveaux gisements et l'amélioration de l'exploitation des gisements existants en France. On peut donc s'interroger sur la pertinence de ce dispositif dans le contexte actuel d'insuffisance de l'offre d'hydrocarbures.

Sous ces réserves, votre rapporteur général vous propose d'adopter le principe de la réforme de la provision pour reconstitution de gisement

Néanmoins, les modalités transitoires d'application de la réforme proposée sont rétroactives et confiscatoires. Votre rapporteur général vous propose donc plusieurs amendements visant à supprimer le caractère rétroactif du dispositif.

B. LE DÉBAT RELATIF À LA TAXE EXCEPTIONNELLE SUR LA PROVISION POUR HAUSSE DES PRIX

• Les prix du pétrole exprimés en francs ont quadruplé au cours des deux dernières années.

Or, il est indéniable que les entreprises pétrolières retirent un avantage de trésorerie des modalités actuelles de fonctionnement de la provision pour hausse des prix.

En effet, la provision ne fonctionne qu'à la hausse, sans suivre la variation des cours (à la différence de l'ancienne provision pour fluctuation des cours) et n'est rapportée aux résultats, au plus tard, que six ans après sa constitution. Surtout, la provision s'applique à des stocks pétroliers pour lesquels la rotation réelle est de 80 jours.

Dans ces conditions, le prélèvement temporaire proposé n'est pas injustifiable dans son principe, sous réserve que la taxe exceptionnelle soit imputable ou, le cas échéant, remboursable, afin qu'elle ne se transforme pas en un prélèvement définitif.

• Par ailleurs, votre rapporteur général rappelle que lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1998, la commission des finances avait proposé l'adoption de la suppression de la provision pour fluctuation de cours (PFC), " dans l'attente que le gouvernement mette en place dans les plus brefs délais un dispositif similaire à la PFC permettant d'atténuer l'impact de la variation des cours des matières premières sur les résultats des entreprises transformatrices de ces matières ".

En effet, la commission des finances avait souligné les effets induits par la suppression de la PFC, et proposé pour y répondre d'étudier la mise en place d'un LIFO fiscal, c'est à dire de la valorisation fiscale des stocks selon la méthode " dernier entré, premier sorti ". A l'exception de la Norvège et du Royaume-Uni, tous les pays européens valorisent leurs stocks selon cette méthode.

A bien des égards, les difficultés actuelles résultent de ce que le gouvernement a refusé d'envisager les conséquences de la suppression de la PFC, en refusant de moderniser le traitement fiscal des stocks.

Votre rapporteur général regrette que cette imprévoyance ne soit aujourd'hui traitée que par des mesures de circonstance.

De même, il déplore que le dispositif proposé ne se traduise par un nouvel effet de seuil au détriment des plus grandes entreprises du secteur (les raffineurs-distributeurs) : ces entreprises seront donc redevables d'un impôt supplémentaire que leurs concurrentes, plus petites, n'auront pas à acquitter, et sont donc parfaitement fondées à invoquer une rupture de concurrence .

• Enfin, votre rapporteur général s'inquiète de certains arguments avancés pour justifier le prélèvement exceptionnel

En premier lieu, il est exact que la hausse des prix du pétrole profite mécaniquement à l'ensemble des entreprises pétrolières , au point que leurs bénéfices ont récemment atteint des records, le résultat opérationnel du groupe Total Fina Elf atteignant ainsi 44,7 milliards de francs au seul premier semestre 2000. On peut toutefois remarquer que cet avantage est mécaniquement accru par la nécessité de constituer des stocks stratégiques imposée par la loi n° 92-1443 du 31 décembre 1992 portant réforme du régime pétrolier. En outre, le groupe français n'est pas plus profitable que ses concurrents. Et aucun autre pays n'a eu l'idée de les surtaxer ainsi.

Il n'y a d'ailleurs aucune logique économique à accroître les taux d'imposition des entreprises sous le seul prétexte que leurs bénéfices augmentent. Est-il souhaitable d'accréditer ainsi l'idée selon laquelle une entreprise profitable est suspecte ? Par ailleurs, l'émotion suscitée par les conséquences du naufrage de l'Erika est légitime, mais faut-il pour autant chercher à " punir " fiscalement les entreprises pétrolières françaises, en dehors de toute procédure judiciaire ?

En second lieu, les débats de l'Assemblée nationale laissent planer sur les entreprises concernées une épée de Damoclès inacceptable. En effet, le rapporteur général de l'Assemblée nationale a conclu les débats en séance publique relatifs à cet article en indiquant : " il n'est bien sûr pas exclu, Monsieur le secrétaire d'Etat [à l'Industrie], que nous vous demandions soit la reconduction de mesures exceptionnelles, soit une amplification de celles-ci si les entreprises ne revenaient pas à un comportement plus normal... [c'est à dire]... une politique de prix plus compréhensive vis à vis du consommateur ". En d'autres termes, " la majorité plurielle " menace d'aggraver le prélèvement exceptionnel, sur le seul fondement d'une appréciation subjective du " comportement des entreprises concernées ". Il s'agit là d'une dérive inquiétante dans une économie de marché.

C.  UNE PRÉSENTATION DÉMAGOGIQUE

Rappelons qu'en prélevant aujourd'hui une taxe exceptionnelle sur les provisions pour hausse de prix, et en contraignant les entreprises à réintégrer immédiatement l'essentiel de leurs provisions pour reconstitution de gisements, l'Etat se prive d'une ressource équivalente pour l'avenir.

En effet, les provisions présentent un caractère provisoire : elles n'occasionnent pour l'Etat qu'un décalage de recettes en trésorerie car toute provision dotée doit être un jour rapportée aux résultats : les provisions réglementées sont des " aides fiscales " remboursables. Sur le plan de l'analyse financière, elle se présentent comme des réserves provisoirement affranchies d'impôt.

Si elles permettent ainsi un surcroît de recettes bien commode pour 2001, et si elles induisent une perte de trésorerie sensible pour les entreprises concernées 60 ( * ) , les mesures proposées ne font donc que restreindre l'assiette des prélèvements futurs .

Par ailleurs, il est triplement démagogique d'annoncer, comme l'a fait le gouvernement à l'occasion de la présentation du présent projet de loi de finances, que les prélèvements sur les entreprises pétrolières serviront à financer la baisse de la TIPP sur le fioul :

- en premier lieu, le rendement prévisible des prélèvements exceptionnels proposés par le présent article - de l'ordre de 4,5 à 5 milliards de francs - dépasse aujourd'hui très nettement le coût pour l'Etat de la baisse de la TIPP sur le fioul ;

- en second lieu, le prélèvement proposé est non seulement imputable, mais aussi non reconductible . En effet, la taxe exceptionnelle aura déjà frappé l'assiette correspondant à la hausse des prix du pétrole en francs jusqu'au 31 décembre 2000. Sauf à supposer que les prix du pétrole continuent d'augmenter dans des proportions importantes au-delà de cette date, ou baissent fortement avant de réaugmenter de nouveau, il n'y aura plus de base taxable. Ce prélèvement provisoire et exceptionnel ne peut donc durablement compenser une baisse de la TIPP sur le fioul, ni, a fortiori , la financer la lutte contre l'effet de serre, comme le souhaitaient certains de nos collègues députés ;

- enfin, la pseudo-affectation de la taxe exceptionnelle à la baisse de la TIPP dissimule le fait que le niveau élevé des prix de l'énergie est sans doute durable, et nécessite donc de notre part des changements de comportements , visant notamment à retrouver la notion d'économie d'énergie. A bien des égards ce dispositif permet ainsi au gouvernement de cacher son impuissance en désignant des boucs émissaires - les entreprises pétrolières -, au lieu de tenir à nos concitoyens le discours de vérité qu'ils attendent.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 10

Modification du tarif de la taxe intérieure de consommation sur le fioul domestique, amélioration du remboursement pour le transport routier de marchandises, mise en oeuvre d'un remboursement aux exploitants de transport public routier en commun de voyageurs et mise en place d'un mécanisme de régulation des taux

Commentaire : le présent article prévoit diverses mesures visant à amortir l'augmentation du prix de détail des produits pétroliers pour les particuliers et les entreprises :

1- la baisse de 30 % de la TIPP sur le fioul domestique ;

2- l'amélioration du dispositif de remboursement partiel de la TIPP sur le gazole accordé aux routiers et l'extension de ce dispositif aux transports en commun de voyageurs ;

3- la création d'un mécanisme de modulation des taux de la TIPP lorsque le cours moyen du pétrole brut varie de plus de 10 %, afin de neutraliser l'incidence des variation de prix sur la TVA.

I. LE CONTEXTE

A. LA HAUSSE DES PRIX DU PÉTROLE ...

1. Des évolution erratiques des cours en 1999 et 2000

Fin 1997, la conjonction d'une augmentation forte de la production de l'OPEP et de la crise asiatique, a entraîné une baisse forte des cours du brut sur le marché mondial. En dépit de deux resserrements de sa production dans la première moitié de l'année 1998, cette chute des cours n'a pu être endiguée par l'OPEP. Ce n'est qu'en mars 1999 que la diminution de la production va entraîner une hausse des prix qui, depuis cette date, sont demeurés supérieurs à 20 dollars le baril de brut en raison principalement de trois facteurs :

- une discipline forte des pays de l'OPEP qui respectent leurs quotas,

- une demande croissante de produits pétroliers,

- un taux d'occupation des installations de production et des raffineries très élevé.

Evolutions des cours du baril de brent daté (1999-2000)

(en francs)

Janv.

Fév.

Mars

Avril

Mai

Juin

Juillet

Août

Sept.

Oct.

Nov.

Déc.

1999

63

60

75

94

94

100

121

125

141

135

156

165

2000

165

185

187

156

201

206

200

219

249

-

-

-

2. Le pétrole est-il trop cher ?

Plus que le niveau du prix de l'essence, c'est son augmentation qui a été spectaculaire en 2000. En effet, le cours du pétrole n'est pas historiquement élevé ( cf. tableau ci-après), et certains économistes n'hésitent pas à affirmer que " le pétrole n'est pas trop cher " 61 ( * ) . Selon eux, la période 1986-98 a été une période de pétrole bon marché dont les effets pervers ont été nombreux : appauvrissement des pays producteurs, investissements en recherche et en production insuffisants, arrêt des économies d'énergie et développement de la pollution.

Le prix du brut importé en France en moyenne annuelle (1973-1999)

1973

1980

1997

1998

1999 *

En francs courants par tonne

115

1.019

830

561

787

En dollars courants par baril

3,5

32,9

19,4

13,0

17,4

Source : ministère de l'économie

* prévision

Les prix actuels sont donc certes élevés, mais sans être atypiques et l'impact de la hausse des prix des produits pétroliers sur le budget des ménages doit être relativisée : cette part (2,7 %) demeure en 2000 bien inférieure à celle observée en 1985 (4,5 %), en dépit d'un accroissement de 45 % de la circulation sur cette même période.

Dépenses de produits pétroliers dans le budget des ménages en France (1985-2000)

1985

1995

1999

2000 *

4,5 %

2,6 %

2,5 %

2,7 %

3. L'augmentation inquiétante de la consommation et de la pollution

Assurant près de 40 % des besoins énergétiques du pays, le pétrole est toujours, en 1999, la première des énergies consommées en France.

Le tableau ci-après montre bien la progression continue des quantités consommées depuis 1996, avec notamment la substitution du super sans plomb au super plombé et l'augmentation continue des consommations de gazole (qui sont passées de 48 % du total en 1995 à 63 % en 2001).

Consommation de carburants routiers en France (1995-2001)

(en milliers d'hectolitres)

Produits

1995

1996

1997

1998

1999

2000 *

2001 *

Super plombé

102.300

87.300

75.240

65.600

54.200

43.400

33.800

Super sans plomb

103.200

111.000

117.620

124.700

135.600

148.800

161.400

Gazole

267.200

273.400

281.310

294.900

306.400

319.500

332.400

Essence

23

12

18

23

33

0

0

TOTAL

499.723

471.712

474.188

485.223

496.233

511.700

527.600

Source : DGDDI

* prévisions.

Les émissions de carbone liées à l'utilisation du pétrole ont donc continuellement augmenté depuis 1990 dans le monde.

Emissions de carbone dues à l'utilisation de pétrole

(en millions de tonnes)

1990

1995

2000

Pays industrialisés

1.509

1.598

1.680

Pays en développement

692

889

989

Monde

2.628

2.732

2.929

Source : P. Artus, Flash n° 179 du 3 octobre 2000

B. ... A ÉTÉ AMPLIFIÉE PAR LA STRUCTURE DE LA FISCALITÉ

La taxation des produits pétroliers fournit la quatrième ressource du budget de l'Etat après la TVA, l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés. En 1999, l'Etat a ainsi bénéficié de 162 milliards de francs de TIPP et de 38 milliards de francs de TVA sur les produits pétroliers.

La France se caractérise en Europe par un prix hors taxes des produits pétroliers plus faible que la moyenne européenne mais un poids des taxes plus important qui renchérissent le prix à la pompe de ces produits, parmi les plus chers en Europe.

Part des taxes dans le prix total d'un litre de carburant au 8 septembre 2000

Pays considéré

Super sans plomb

Gazole

Royaume-Uni

75,7 %

73,9 %

France

68,7 %

59,9 %

Allemagne

67,1 %

57,4 %

Italie

63,1 %

57,8 %

Belgique

63,4 %

50,1 %

Espagne

58,2 %

51,4 %

Moyenne UE

67,7 %

59,0 %

Source : ministère de l'économie

La TIPP est proportionnelle aux seules quantités consommées, la hausse des prix n'a donc pas entraîné directement de modification de son produit. A l'inverse, la TVA est proportionnelle au prix des produits (y compris la TIPP) et les rentrées de TVA ont donc suivi l'évolution des cours à la hausse. Par rapport à 1999, et même compte tenu de la baisse d'un point du taux de TVA et de la baisse de la TIPP sur le fioul, les rentrées de TVA sur les produits pétroliers en 2000 seront vraisemblablement supérieures de 10 milliards de francs à celles de 1999 , soit une augmentation de 26 % en un an ( cf. tableau ci-après).

Encaissements de TVA sur les mises à la consommation de produits pétroliers (1995-2000)

(en milliards de francs)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2000 *

2000  **

32,5

37,0

40,1

38,5

37,7

43,7

42,2

48,0

Source : DGDDI

* LFR, y compris baisse du taux de TVA à 19,6 % au 1 er avril 2000.

** y compris baisse de la TIPP sur le fioul domestique le 21 septembre 2000.

II. LA BAISSE DE 30 % DE LA TIPP SUR LE FIOUL DOMESTIQUE (PARAGRAPHE I)

A. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

1. Une baisse de 30 % applicable dès le 21 septembre 2000

Le 1° du paragraphe I du présent article modifie le tableau B de l'article 265 du code des douanes pour fixer le tarif de la TIPP sur le fioul domestique à 36 francs par hectolitre. Ce fioul, qui est le même produit que le gazole mais qui bénéficie d'un taux réduit de TIPP, est principalement utilisé comme combustible pour le chauffage (domiciles et entreprises) mais certains véhicules professionnels dont la liste est fixée par arrêté peuvent l'utiliser comme carburant 62 ( * ) .

Le tarif précédent était de 51,73 francs par hectolitre : la modification proposée correspond donc à une diminution de 30,4 % du prix du fioul domestique.

Cette modification du tarif est applicable à compter du 21 septembre 2000 : il s'agit donc d'une modification à caractère rétroactif qui a d'ores et déjà eu des effets, alors même que la loi n'est pas votée. Si le Parlement choisissait de ne pas valider cette décision du gouvernement, les utilisateurs de fioul devraient donc rembourser l'écart de TIPP dont ils auront indûment bénéficié 63 ( * ) .

Facture moyenne de chauffage pour un ménage (1999-2000)

(en francs)

1999

2000

Chauffage à l'électricité

4.000

3.900

Chauffage au gaz

2.800

3.000

Chauffage au fioul

4.500

6.600

Source : ministère de l'économie, Observatoire de l'énergie

2. Application aux stocks existants

L'article 266 bis du code des douanes prévoit actuellement que tout relèvement des taux de la TIPP sur les produits pétroliers et assimilés (prévus au tableau B de l'article 265 du même code) et des autres taxes perçues sur ces produit, s'applique " aux produits déclarés pour la consommation avant la date de changement du tarif existant en stock à cette date chez les importateurs, producteurs, raffineurs et distributeurs de produits pétroliers et assimilés, à l'exception des produits se trouvant dans les cuves des stations-services ". Cette disposition vise à éviter la spéculation : toute annonce de hausse de TIPP est automatiquement applicable aux stocks de produits pétroliers, quand bien même ils auraient déjà acquitté la TIPP au taux inférieur. La TIPP est en effet acquittée lors de la mise à la consommation des produits. Les détenteurs de tels stocks doivent alors s'acquitter de la variation de TIPP sur leurs stocks déclarés.

Le 2° du paragraphe I du présent article modifie cet article pour prévoir que ce dispositif qui applique une hausse de la TIPP aux produits en stock dans la filière en amont de la consommation est également valable en cas de baisse de celle-ci. Dans ce cas, le Trésor public devra rembourser l'écart de TIPP aux détenteurs de stocks de produits pétroliers dont le prix d'achat a intégré une TIPP plus élevée.

Le dernier alinéa de l'article 266 bis du code des douanes prévoit que " le relèvement n'est pas recouvré lorsque son montant est inférieur à cinq cents francs ". Le 2° b) du paragraphe I propose d'étendre cette rédaction aux cas de baisses du tarif et de réévaluer le montant minimal de cinq cents à deux mille francs. Pour mémoire, ce montant avait déjà été réévalué de cent à cinq cents francs, par l'article 39 IV de la loi de finances pour 2000 entrée en vigueur il y a moins d'un an. Son relèvement à deux mille francs constitue une mesure de simplification administrative.

En vertu du 3° du paragraphe I du présent article ce mécanisme est en vigueur depuis la même date que le mécanisme principal de baisse des tarifs du fioul domestique, le 21 septembre 2000.

Le coût de cette mesure est estimé à 3,45 milliards de francs pour 2001 64 ( * ) et 864 millions de francs pour 2000 65 ( * ) . Elle est, dans la présentation faite par le gouvernement, financée par les modifications prévues à l'article 9 du présent projet de loi.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

1. Extension de la baisse de la TIPP sur le fioul domestique à toute l'année 2000 pour certains professionnels

En votant un amendement présenté par le gouvernement, l'Assemblée nationale a rendu applicable la diminution de 30 % du tarif du fioul domestique aux acquisitions de ce combustible effectuées du 1 er janvier au 20 septembre 2000 pour l'exercice de leur activité par les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole et les transporteurs fluviaux. Il s'agit donc d'un avantage supplémentaire de neuf mois accordé à ces professionnels.

Le bénéfice de ces dispositions serait accordé sous la forme d'un remboursement correspondant à la différence entre l'ancien tarif et le nouveau, soit 15,73 francs par hectolitre.

Le coût (en dépenses car il s'agit d'un remboursement) serait de 200 millions de francs en 2000 - au titre du premier semestre 2000 - et de 150 millions de francs en 2001 - au titre du second semestre 2000 -, soit 350 millions de francs au total.

2. Propositions d'autres baisses de TIPP

L'Assemblée nationale a également voté un amendement de notre collègue députée Nicole Bricq qui fixe, à compter du 21 novembre 2000, la TIPP sur l'émulsion d'eau dans du gazole utilisée comme combustible (utilisé principalement dans les locomotives) à 11,80 francs par hectolitre au lieu de 40,85 francs par hectolitre, soit une baisse de plus de 71 %. Ce tarif serait ainsi ramené au minimum communautaire afin de lui donner un avantage comparatif par rapport au gazole. Le coût de cette mesure est évalué à 11 millions de francs pour 2001 (et environ 1 million de francs pour 2000). Le gouvernement y a été favorable.

Un amendement similaire de notre collègue député Michel Bouvard a été adopté par l'Assemblée nationale : il réduit, à compter du 21 novembre 2000, le tarif de la TIPP sur l'émulsion d'eau dans du gazole utilisée comme carburant (utilisé principalement pour les bus) à 161 francs par hectolitre, contre 196,95 actuellement, soit une baisse de plus de 18 % . Ce tarif serait ainsi ramené au minimum communautaire afin de lui donner un avantage comparatif par rapport au gazole. Le coût de cette mesure est évalué à 5 millions de francs pour 2001 (et environ 0,5 million de francs pour 2000). Le gouvernement y a été également favorable.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général s'interroge sur l'application rétroactive du dispositif gouvernemental à compter du 21 septembre 2000 et sur le peu de cas qui est fait en pareille hypothèse de l'autorisation parlementaire. On met ainsi la représentation nationale devant un " fait accompli " sur lequel il sera extrêmement difficile de revenir : comment peut-on envisager en effet de demander aux particuliers qui ont acquis un fioul à TIPP réduite de rembourser l'écart de taxation dont ils auront bénéficié entre le 21 septembre et le 31 décembre 2000 ?

Il n'est pas dans l'objectif de votre rapporteur général de vous proposer une telle chose. Toutefois, sur le plan des principes il déplore de telles pratiques prises sans accord ni consultation du Parlement dans une matière pourtant réservée à ce dernier par la Constitution.

S'agissant du financement de cette mesure, votre rapporteur général souligne que l'on prévoit ici encore le financement d'une mesure pérenne (baisse de la TIPP sur le fioul domestique) par des mesures de financement temporaires (mesures fiscales particulières applicables aux compagnies pétrolières) 66 ( * ) .

III. L'AMÉLIORATION DU DISPOSITIF DE REMBOURSEMENT PARTIEL DE LA TIPP SUR LE GAZOLE (PARAGRAPHES II ET III)

A. LE DISPOSITIF ACTUEL

L'article 26 de la loi de finances pour 1999 67 ( * ) a prévu l'augmentation du tarif de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) sur le gazole pour réduire progressivement l'écart de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb : il était ainsi prévu une augmentation de 7 centimes par an de la TIPP sur le gazole et la stagnation de celle sur le supercarburant sans plomb.

Afin d'atténuer les effets de ce rééquilibrage de la fiscalité sur la compétitivité du secteur des transports routiers, le même article de la loi de finances pour 1999 a instauré un mécanisme de remboursement d'une fraction de la hausse de TIPP sur le gazole, conformément à la possibilité ménagée à l'article 8 de la directive du Conseil n° 92/81 du 19 octobre 1992 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur les huiles minérales.

L'article 265 septies du code des douanes prévoit donc ce dispositif de remboursement. Suite à la " grogne " des routiers de janvier 2000, le gouvernement a assoupli les modalités de ce dispositif dans la loi de finances rectificative pour 2000.

Actuellement, peuvent obtenir, sur leur demande, un remboursement de la TIPP sur le gazole, les entreprises (établies dans l'Union européenne) propriétaires ou, en leur lieu et place, les entreprises titulaires soit d'un contrat de crédit - bail, soit d'un contrat de location de deux ans ou plus :

- de véhicules routiers à moteur destinés au transport de marchandises et dont le poids total autorisé en charge est égal ou supérieur à 7,5 tonnes ;

- de véhicules tracteurs routiers dont le poids total roulant est égal ou supérieur à 7,5 tonnes.

Initialement le poids minimal requis était de 12 tonnes mais le gouvernement l'a fait passer lors de la loi de finances rectificative pour 2000 à 7,5 tonnes afin d'y inclure certaines catégories de véhicules comme les camions de messagerie et ceux de déménagement ; le nombre de véhicules français bénéficiaires est ainsi passé de 435.000 à 510.000.

Le remboursement est semestriel et non plus annuel, depuis la loi de finances rectificative pour 2000. Cet assouplissement a correspondu à une avance de trésorerie offerte aux entreprises : le remboursement peut désormais être demandé pour chaque semestre, à compter du 12 janvier et du 12 juillet pour chacun des semestre de la période considérée 68 ( * ) ; le remboursement de la TIPP payée entre le 11 janvier et le 10 juillet 2000 a donc pu être demandé à compter du 12 juillet de la même année et non plus seulement à partir du 12 janvier 2001.

Le remboursement est plafonné à 25.000 litres de gazole par semestre et par véhicule . Initialement, ce plafond était fixé à 40.000 litres par an et par véhicule ; il correspondait à la consommation annuelle moyenne du type de véhicules routiers visés mais il a été revalorisé par la loi de finances rectificative pour 2000.

B. LES MESURES PROPOSÉES PAR LE GOUVERNEMENT

1. Un assouplissement supplémentaire du mécanisme en faveur des transporteurs routiers (paragraphe II)

Suite à des négociations avec les représentants des professionnels du transport routier, le gouvernement propose de supprimer la règle d'actualisation du taux spécifique posée par l'article 265 septies du code des douanes pour le calcul du remboursement, pour la remplacer par des taux fixés discrétionnairement chaque année.

En effet, cet article prévoit actuellement une méthode de calcul " objective " pour le remboursement ; il s'agit de la différence entre les deux taux de TIPP sur le gazole qui coexistent :

- d'une part, le taux de droit commun,

- et, d'autre part, le taux spécifique du " carburant professionnel " (taux applicable à ce type d'utilisation au cours de l'année n-1 augmenté d'une somme correspondant au produit de la taxe sur le supercarburant sans plomb au cours de l'année n-1 par la variation des prix à la consommation, ce qui aboutit à un remboursement seulement partiel de l'écart de taxation).

Le II de cet article prévoit que par dérogation aux dispositions présentées ci-dessus, et compte tenu de la " pause " décrétée dans le rattrapage de l'écart de taxation entre le gazole et le supercarburant sans plomb, le remboursement est fixé à 35 francs par hectolitre ( au lieu de 8,62 francs par hectolitre actuellement prévus ) pour le gazole utilisé entre le 11 janvier 2000 et le 10 janvier 2001. Il s'agit donc ici encore d'un dispositif rétroactif.

En outre, cet article supprimant le mode de calcul général présenté plus haut pour la fixation du taux spécifique " carburant professionnel ", celui-ci sera dorénavant fixé année par année dans le code des douanes. Il est prévu qu'il soit fixé à 230,18 francs par hectolitre en 2001 (soit un remboursement de 25 francs par hectolitre au lieu de 2,38 francs prévus en appliquant les règles actuelles) et à 241,18 francs par hectolitre en 2002 (soit un remboursement de 21 francs par hectolitre ). Pour les années suivantes, la loi devra fixer de nouveaux taux, sans aucune règle " rationnelle ".

Pour chaque semestre, ce taux peut être corrigé pour tenir compte de la modulation du taux de TIPP prévue au IV (en cas de hausse forte des cours du brut) mais ces corrections ne pourront aboutir à rendre le taux effectif supérieur au taux fixé dans la loi.

Comparaison des taux et des montants maximaux de remboursement (1999/2002) 69 ( * )

1999

2000

2001

2000

2001

2002

Ancienne méthode

Nouvelle méthode

TIPP sur le supercarburant sans plomb (F/ hl)

384,62

384,62

384,62

384,62

384,62

384,62

TIPP de droit commun sur le gazole = (1) (F/hl)

248,18

255,18

262,18

255,18

255,18

262,18

TIPP dérogatoire sur le gazole = (2) (F/hl)

244,64

246,56

259,80

220,18

230,18

241,18

Taux du remboursement partiel de TIPP aux transporteurs routiers = (1) - (2) = (3) (F/hl)

3,54

8,62

2,38

35

25

21

Remboursement maximal = (3) * 400 en 1999 puis 500 (F/véhicule)

1.416

4.310

1.190

17.500

12.500

10.500

Ainsi, il apparaît que le remboursement maximal pour 2000 est passé de 3.500 francs à 17.500 francs au cours des différentes modifications de la législation applicable en moins d'un an :

- dans le système de 1999, le remboursement maximal au titre de 2000 aurait été de 3.448 francs par véhicule, payables à compter du 12 janvier 2001 ;

- dans le système actuel, ce remboursement maximal au titre de 2000 aurait été de 4.310 francs par véhicule, payable pour moitié à compter du 12 juillet 2000 et pour l'autre à compter du 12 janvier 2001 ;

- et dans le système proposé, le montant remboursé pourra atteindre 17.500 francs pour 2000, soit cinq fois le montant maximal autorisé en 1999 , également payable en deux fois par le Trésor public.

Le coût de ce dispositif (en dépenses supplémentaires pour l'Etat puisqu'il s'agit d'un mécanisme de remboursement) s'élève à 920 millions de francs en 2000 et à 1,5 milliard de francs en 2001, à comparer à seulement 600 millions de francs pour 2000 dans l'ancien dispositif.

2. La création d'un dispositif similaire en faveur des transports en commun (paragraphe III)

Le paragraphe III du présent article propose, dans un nouvel article 265 octies du code des douanes, d'octroyer aux exploitants de transport public routier en commun de voyageurs (exploitants de lignes régulières et transports occasionnels) un dispositif similaire de TIPP sur le gazole qu'ils utilisent.

Pour cela, le gouvernement a demandé, mais pas encore obtenu, une dérogation à la directive du Conseil n° 92/81 du 19 octobre 1992 précitée, conformément aux dispositions de son article 8.

Le volume maximal est moins élevé que pour les transporteurs routiers puisqu'il s'élève à 15.000 litres par semestre , soit 30.000 litres par an, ce qui correspond à une consommation moyenne. Le taux et la période de remboursement sont les mêmes que pour les transporteurs routiers. Un décret complétera ces dispositions.

Taux et montants maximaux de remboursement (2000/2002)

2000

2001

2002

Taux du remboursement partiel de TIPP (F/hl)

35

25

21

Remboursement maximal (F/véhicule)

10.500

7.500

6.300

Le coût de cette mesure serait de 60 millions de francs en 2000 et 70 millions de francs en 2001.

Par ailleurs le 2° du paragraphe III apporte une précision dans le dispositif de remboursement de la TIPP sur le gaz naturel véhicules (GNV) et sur le gaz de pétrole liquéfié (GPL) aux exploitants de transport public en commun de voyageurs prévu à l'article 265 sexies . Il s'agit d'ôter toute ambiguïté au texte en précisant que ne peuvent bénéficier du dispositif que les véhicules affectés au transport en commun de voyageurs (et donc pas les véhicules personnels de l'exploitant, bien entendu).

C. LES MODIFICATIONS APPORTÉES À L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a étendu, en adoptant deux amendements du gouvernement, le dispositif de remboursement à 35 francs jusqu'au 20 janvier 2001 (et non pas 10 janvier 2001 comme dans le texte initial du gouvernement) afin d'éviter un chevauchement de tarifs sur la période du 11 au 21 janvier 2001 et de caler les dates retenues pour le mécanisme de remboursement sur celle de changement de taux de la TIPP. Il s'agit d'une mesure de simplification administrative.

Considérant que le texte actuel sur les exploitants de transports en commun de voyageurs n'était pas rétroactif (il devrait en effet s'appliquer à compter du 21 janvier 2001), le gouvernement a proposé à l'Assemblée nationale de permettre à ces exploitants de se faire rembourser la TIPP à hauteur de 35 francs par hectolitre (comme pour les transporteurs de marchandises) pour leurs acquisitions de gazole effectuées entre le 1 er juillet 2000 et le 21 janvier 2001 , soit un allongement de leur dispositif de six mois, au taux de remboursement très intéressant de 35 francs par hectolitre. Le coût de cette mesure est de 100 millions de francs supplémentaires au titre de 2000.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission est favorable à la préservation de la compétitivité du secteur des transports, touché, ne l'oublions pas, par les surcoûts liés à la politique de réduction du temps de travail à 35 heures imposée par le gouvernement .

Néanmoins, votre rapporteur général s'étonne toutefois de la fréquence avec laquelle ce dispositif est retouché, au gré des concessions du gouvernement pour maintenir la paix sociale :

1- création du dispositif par la loi de finances pour 1999 ;

2- modifications dans la loi de finances pour 2000 ;

3- modifications dans la loi de finances rectificative pour 2000 ;

4- modifications dans le présent projet de loi de finances pour 2001.

En deux ans, le dispositif aura donc été modifié à quatre reprises par le gouvernement.

La Commission européenne a décidé le 15 novembre de limiter à deux ans les réductions fiscales sur le fioul accordées par certains Etats membres aux transporteurs routiers. La France est clairement visée : elle devra donc supprimer définitivement d'ici au 1 er janvier 2003 l'application de " taux d'accises différenciés sur le diesel utilisé dans les véhicules utilitaires ".

IV. LA MODULATION DES TAUX DE LA TIPP (PARAGRAPHE IV)

A. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Les produits pétroliers sont soumis à deux taxes principales :

1- une taxe de fiscalité énergétique : la TIPP, fixée en fonction des quantités et qui est donc totalement indépendante des prix ; elle ne varie qu'en fonction des volumes consommés ;

2- une taxe de fiscalité de droit commun : la TVA, fixée à 19,6 % 70 ( * ) du prix hors taxes ; elle varie en fonction des prix et des quantités et amplifie mécaniquement toute augmentation ou diminution du cours du brut ou de la TIPP (sur laquelle elle est également assise) ; un surcroît de recettes de TVA de l'ordre de 6 milliards de francs est donc imputable en 2000 à la hausse des prix des carburants.

Le paragraphe IV du présent article propose un mécanisme de modulation des taux de la TIPP pour le supercarburant 71 ( * ) , le gazole et le fioul domestique lorsque le cours moyen du pétrole brut (" brent daté ", prix au jour le jour d'une cargaison identifiée livrable sous quinzaine) varie de plus de 10 %, afin de neutraliser l'incidence des variations de prix sur les montants de TVA.

Il s'agit de restituer aux automobilistes le surplus de recettes de TVA consécutif à tout hausse du prix des carburants. La TIPP serait diminuée à hauteur du surcroît de recettes de TVA.

La variation cumulée du cours moyen sur la période de septembre à décembre 2000 sera ainsi comparée au cours moyen sur la période mai-août 2000 (et ainsi de suite pour les trimestres suivants : la variation cumulée du cours moyen sera comparée à la moyenne des prix ayant entraîné la modification précédente).

Dès lors que l'augmentation de plus de 10 % sera acquise, les tarifs de la TIPP seront corrigés d'un montant égal au surplus de recettes de TVA, calculée comme le produit de cette variation des prix (en valeur absolue) par 16,388 %.

Taux TIPP nouveau = Taux TIPP ancien +/- (Variation des prix > 10 % x 0,16388)

Les variations peuvent se faire à la baisse comme à la hausse dans les deux limites suivantes :

- le taux résultant ne peut être supérieur aux taux actuels (fixés par la loi de finances pour 2000) : ce qui suppose que la première modification de ce taux ne peut s'effectuer qu'à la baisse ;

- ces modifications ne sont plus applicables dès lors que le cours moyen trimestriel du " brent daté " est redevenu inférieur à la moyenne constatée sur mai-août 2000 ; il s'agit donc d'un mécanisme spécialement prévu pour une période de " mini-crise pétrolière ".

Ces variations s'appliqueront à compter du 21 du premier mois du trimestre civil suivant celui au titre duquel une variation de 10 % du cours a été constatée. Elles seront fixées par arrêté du ministre chargé du budget.

B. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le gouvernement a présenté un amendement, adopté par l'Assemblée nationale, qui modifie le mécanisme de comparaison des cours sur différentes périodes pour déterminer l'augmentation de 10 % qui permettra de déclencher le mécanisme de la modulation : le dispositif devient rétroactif et pourra être déclenché tous les deux mois.

Cet amendement prévoit donc qu'une première modification " pourra " être effectuée le 1 er octobre 2000 (en considérant la période du 1 er au 15 septembre et en la comparant au cours moyen de janvier 2000 pour déterminer s'il y a eu augmentation de plus de 10 %). Une seconde modification pourra avoir lieu le 1 er décembre 2000 (en comparant la période 1 er octobre - 9 novembre au mois de septembre). Une troisième modification est prévue le 21 janvier (en comparant la période 10 novembre - 31 décembre à la période 1 er octobre - 9 novembre). En régime de croisière, le mécanisme pourra se déclencher tous les bimestres et non plus tous les trimestres, afin de tenir compte de la volatilité des cours.

Le gouvernement a également proposé un amendement voté par l'Assemblée nationale qui prévoit que le mécanisme de stabilisation ne fonctionnera pas dès lors que les cours seront repassés en-dessous du cours moyen de janvier 2000, soit 25,44 dollars par baril (et non pas le cours moyen de mai-août 2000 comme prévu initialement, soit 29,10 dollars par baril).

L'Assemblée nationale a ensuite adopté un amendement du gouvernement qui permet une réduction exceptionnelle de la TIPP :

- de 5,80 francs par hectolitre pour le supercarburant sans plomb,

- de 4,77 francs pour le supercarburant ARS,

- de 5,01 francs pour le gazole,

- et de 2,33 francs pour le fioul domestique.

Cette réduction exceptionnelle est valable à compter du 1 er octobre et jusqu'à ce que le cours moyen du brent daté soit inférieur au cours moyen observé en janvier 2000. Il s'agit donc d'un dispositif provisoire.

Ce même amendement permet de faire concilier la périodicité du déclenchement éventuel du mécanisme de stabilisation de la TIPP avec celle de la fixation forfaitaire de la TVA applicable aux produits pétroliers.

Il permet enfin, en modifiant la rédaction d'un article du code des douanes, de garantir le niveau de recettes de la taxe spéciale de consommation sur les produits pétroliers applicable dans les départements d'outre-mer. Ce sont en effet les conseils généraux qui en fixent le taux, dans la limite des taux applicables en métropole. L'instauration de la modulation de la TIPP aurait eu pour conséquence de restreindre le pouvoir fiscal des DOM en cette matière : il est donc prévu que la base de référence demeure les taux de TIPP prévus au tableau B de l'article 265 du code général des douanes, c'est à dire les taux fixés par la loi de finances pour 2000.

C. LA MISE EN oeUVRE DU DISPOSITIF DEPUIS LE 1 ER OCTOBRE

Le gouvernement a donc décidé de mettre en oeuvre le dispositif de modulation de la TIPP pour la première fois à compter du 1 er octobre, ce qui a entraîné une baisse de la TIPP de l'ordre de 20 centimes par litre (grâce également aux réductions exceptionnelles), selon le tableau ci-après.

Modifications des tarifs de TIPP au 1 er octobre 2000

(en centimes par litre)

Produits

Effet de la modulation

Effet de la baisse exceptionnelle

Effet de la moins-value de TVA liée à la baisse de la TIPP

Baisse effective

Super sans plomb

10,93

5,80

3,27

20

Super ARS

11,93

4,77

3,27

20

Gazole

11,72

5,01

3,27

20

Fioul domestique

14,39

2,23

3,27

20

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

1. Un coup d'arrêt au rattrapage de l'écart de fiscalité entre le gazole et l'essence

En 1998, le gouvernement a présenté un plan sur sept ans de réduction de l'écart de taxation entre le gazole et l'essence afin de rapprocher la situation française de l'écart moyen européen. Ce plan s'est traduit en 1999 et en 2000 par une augmentation de 7 centimes par litre du tarif de la TIPP applicable au gazole. Pour 2001, le gouvernement a décidé une " pause " dans ce plan.

Votre commission regrette que l'an dernier le gouvernement n'ait pas suivi sa proposition d'accélérer le rattrapage. D'un point de vue économique, votre rapporteur général se demande si les dispositifs visant à supprimer les variations de prix (qui régulent en principe les quantités et intègrent les externalités, notamment en termes de pollution, d'une consommation) et à les faire supporter par le budget général de l'Etat sont compatibles avec une politique raisonnable de maîtrise de l'énergie et de réduction des pollutions.

En tout état de cause, il estime que la crédibilité des engagements en matière d'écologie du gouvernement est pour le moins émoussée : le plan de rattrapage à sept ans et le Programme national de lutte contre l'effet de serre ont été remis en cause par des mesures contradictoires peu de temps après avoir été annoncés et alors qu'ils n'en étaient encore qu'au stade du démarrage.

2. Le Sénat rétablit la compétence du gouvernement, le gouvernement néglige celle du Parlement

a) Le Sénat respecte la compétence du gouvernement

Votre commission s'étonne que le gouvernement méconnaisse sa propre compétence résultant de l'article 20 de la Constitution qui stipule que le gouvernement " dispose de l'administration ". En effet, le texte qui nous est proposé prévoit que c'est le " directeur chargé des carburants " qui fixe les cours moyens du pétrole et les prix moyens des carburants.

Il ne semble pas utile que la représentation nationale interfère dans les répartitions de compétences au sein de l'administration, elle n'a besoin de désigner que " l'autorité administrative compétente ", à charge pour le gouvernement de désigner la personne effectivement compétente.

b) Le gouvernement méconnaît la compétence du Parlement

Le gouvernement méconnaît certes sa propre compétence en matière de répartition des fonctions internes à l'administration, mais il méconnaît plus encore celle du Parlement.

Il semble en effet peu acceptable au regard de l'article 34 de la Constitution, que le gouvernement ait d'ores et déjà mis en oeuvre des dispositifs élaborés par lui, sans recueillir l'avis, sinon l'accord, du Parlement.

Si le Parlement souhaitait modifier les dispositifs proposés dans un sens plus restrictif, il contraindrait l'ensemble des bénéficiaires des mesures gouvernementales (particuliers et entreprises) à rembourser le différentiel de taxation à l'Etat. Cela est, bien entendu, inimaginable et votre commission déplore que le gouvernement ait ainsi retiré au Parlement ses pouvoirs de décision.

En outre, il faut souligner l'excessive complexité du dispositif qui rend la loi illisible et ne facilite pas la tâche des parlementaires.

Enfin, votre commission tient à dénoncer l'usage qui est fait de la loi à des fins de communication. Face à des pressions de l'opinion publique ou de certaines catégories professionnelles, le gouvernement s'engage à légiférer et la loi tend à devenir la compilation de traductions législatives d'effets d'annonces. L'Etat a " engrangé " plus de six milliards de francs de TVA supplémentaire en 2000 grâce à la hausse des prix du carburants ; afin d'enlever tout crédit à l'idée que " l'Etat s'enrichit sur le dos des automobilistes " et sous la pression de l'opinion, le gouvernement a décidé de faire l'aumône du dispositif de modulation des taux de TIPP, qui n'est pas une redistribution des 6 milliards de francs déjà engrangés mais des surplus futurs de TVA.

3. Des effets pervers très probables

Le dispositif proposé par le gouvernement est supposé être contra-cyclique mais l'impact décalé dans le temps de la baisse de TIPP par rapport à la hausse des cours risque, dans certains cas, d'aboutir à un effet procyclique : une hausse de TIPP enclenchée par la diminution des cours sur la période de référence peut coïncider avec la remontée des cours... Le gouvernement sera bien en peine, ce moment venu, d'expliquer aux automobilistes que le dispositif amplifie la remontée des cours.

Le dispositif proposé repose en outre sur la bonne volonté des distributeurs qui peuvent annuler un effet de baisse de TIPP ou des cours en restaurant leurs marges.

Par ailleurs, l'impact du dispositif risque d'être presque imperceptible dans bien des cas : c'est pour ces raisons que le gouvernement a instauré un " bonus " exceptionnel et modifié les dates des périodes de référence afin d'arriver à une modification symbolique de 20 centimes par litre cet automne. Sans ces artifices de dernière minute, l'impact de la modulation aurait été faible. Et il risque de le demeurer dans les prochaines semaines.

4. Faut-il baisser artificiellement les prix des produits pétroliers ?

Votre rapporteur général est dubitatif quant à la justification économique et écologique d'une baisse artificielle du prix (et donc du coût économique et social) des produits pétroliers. Les variations de ces prix en fonction de l'équilibre entre l'offre et de la demande doivent permettre d'internaliser les coûts de l'utilisation des carburants en termes de pollution et de maîtrise de l'énergie.

Au lieu de cela, le gouvernement propose de réduire artificiellement les prix des produits pétroliers, donc de faire perdre tout repère au consommateur et finalement de ne jamais l'inciter à réduire sa consommation. Finalement, ce mécanisme ne joue-t-il pas au bénéfice des producteurs et distributeurs de carburants qui ne rencontrent plus de sensibilité de la consommation à la hausse de leurs prix ?

Ce dispositif n'est donc pas, aux yeux de votre commission, satisfaisant pour les automobilistes pour lesquels il a pourtant été construit.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 10 bis (nouveau)

Modification de l'assiette et du taux de la taxe sur les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés

Commentaire : le présent article, introduit par voie d'amendement gouvernemental à l'Assemblée nationale, a pour objet de modifier l'assiette et le taux de la taxe sur les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés sans modifier son rendement.

I. LE DROIT EXISTANT

A. UN TAXE CRÉÉE POUR ALIMENTER LE FONDS D'INVESTISSEMENT DES TRANSPORTS TERRESTRES ET DES VOIES NAVIGABLES

L'article 22 de la loi n° 94-1162 du 29 décembre 1994 a inséré trois nouveaux articles dans le code général des impôts, les articles 302 bis Z, 302 bis ZA et 302 bis ZC, concernant respectivement une taxe due par les entreprises de transport public aérien sur le nombre de passagers embarquant dans les aéroports, une taxe sur les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés à raison du nombre de kilowattheure produit, et une taxe due par les concessionnaires d'autoroutes à raison du nombre de kilomètres parcourus par les usagers.

L'article 302 bis ZA instituait ainsi une taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés d'une puissance maximale supérieure à 4.500 kilowatts implantés sur les voies navigables. Le tarif de la taxe était de 4,2 centimes par kilowattheure produit.

Cette taxe était affectée à un compte spécial du Trésor : l'article 47 de la loi précitée ouvrait dans les écritures du Trésor un compte d'affectation spéciale n° 902-26 intitulé " fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables " (FITTVN) retraçant en recettes le produit de la taxe sur les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés, le produit de la taxe sur les concessionnaires d'autoroutes, les participations des collectivités locales et de leurs établissements publics et des recettes diverses.

L'article 37 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire confirmait ensuite la création d'un fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) avec les recettes correspondantes.

Au fil des ans, la taxe sur les ouvrages hydroélectriques fut modifiée. L'article 27 de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 remplaça la référence aux 4.500 kilowatts par la référence à une puissance électrique totale supérieure à 8.000 kilovoltampères et le taux de la taxe fut porté de 4,2 centimes à 4,24 centimes par kilowattheure produit.

L'article 43 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997 doubla le tarif de la taxe, le faisant passer de 4,24 à 8,48 centimes.

B. UNE TAXE QUI DEVRAIT ÊTRE VERSEE AU BUDGET GENERAL SI LE FITTVN ETAIT SUPPRIME

Dans le droit actuel, la taxe due par les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés est due pour les ouvrages d'une puissance électrique totale supérieure à 8.000 kilovoltampères implantés sur les voies navigables. Le tarif de la taxe est de 8,48 centimes par kilowattheure (kWh) produit.

La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les même procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée.

Jusqu'à cette année, la taxe était affectée au fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) que le gouvernement entend rebudgétiser pour 2001 72 ( * ) . Selon les intentions du gouvernement, cette taxe, de même que la taxe due par les concessionnaires d'autoroutes sera versée au budget général pour 2001.

Selon les estimations du fascicule " voies et moyens ", la taxe devrait rapporter 1,7 milliard de francs en 2001.

II. LES DISPOSITIONS DU PRESENT ARTICLE

Le présent article modifie l'article 302 bis ZA du code général des impôts, afin de changer l'assiette et le taux de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques.

Trois modifications sont proposées :

- le seuil de taxation est relevé : seuls les ouvrages dont la puissance électrique est supérieure à 20.000 kilowatts seront taxés, au lieu de 8.000 kilowatts ;

- la taxe est étendue à tous les ouvrages hydroélectriques et ne vise plus seulement les seuls ouvrages situés sur les voies navigables ;

- le tarif de la taxe est abaissé de 8,48 centimes par kWh à 6 centimes pour les ouvrages implantés sur les voies navigables et fixé à 1,5 centime pour les autres ouvrages hydroélectriques.

Selon les informations données par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, ces modifications ne changent pas le rendement total de la taxe mais transforment sensiblement sa répartition entre les différents contributeurs.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Selon les informations recueillies par votre rapporteur général, le présent article aurait deux justifications.

A. UNE CONSEQUENCE DE LA SUPPRESSION DU FITTVN ?

Suite à la suppression du FITTVN, le gouvernement considérerait qu'une taxe sur les seuls ouvrages hydroélectriques implantés sur les seules voies navigables ne se justifierait pas. En effet, la taxe acquittée par les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés ne portait que sur les voies navigables, dans la mesure où le compte spécial du Trésor avait pour mission de financer des investissements sur les réseaux routier, ferroviaire et fluvial.

Votre rapporteur général estime effectivement que la suppression du FITTVN rendrait illogique le maintien d'une telle taxe spécifique, mais il s'étonne que le gouvernement ne tire pas de la suppression du compte spécial la conclusion qu'il faut supprimer les taxes spécifiques qui lui étaient affectées et non la conclusion qu'il faut étendre leur assiette. Plutôt que de la supprimer, le gouvernement préfère en effet étendre la taxe à tous les ouvrages hydroélectriques.

Il s'interroge sur la logique qui conduit le gouvernement à étendre une taxation des ouvrages hydroélectriques, sans l'affecter à des dépenses précises . Si la taxe sur les ouvrages hydroélectriques a été créée en 1995, c'était à condition qu'elle soit affectée au FITTVN dont une des missions importantes était l'investissement sur le réseau des voies navigables. Prendre prétexte de la suppression du FITTVN pour étendre une taxe qui n'aurait, après la suppression du compte spécial du trésor, plus de justification, relève véritablement d'un simple objectif de rendement, sans aucun fondement économique.

Par ailleurs, il est plutôt étrange que le gouvernement étende la taxation d'un mode de production d'énergie, qui, du fait de son faible impact sur l'environnement, devrait plutôt bénéficier d'une fiscalité accommodante.

D'autre part, votre rapporteur général tient à relever que le taux de la taxe sera encore très différent entre les ouvrages implantés sur les voies navigables (6 centimes) et les autres ouvrages (1,5 centime). Dans ces conditions, il est illusoire de parler d'uniformisation de la taxe, qui restera, de fait, plus pénalisante pour les ouvrages sur les voies navigables , sans aucune garantie sur le montants des crédits qui seront dégagés dans le budget des transports pour ce mode.

Enfin, il note que la taxation de tous les ouvrages hydroélectriques pourra avoir des répercussions sur certaines entreprises, qui, en vertu de l'article 8 alinéa 7 de la loi du 8 avril 1946 disposent d'une garantie de fourniture d'électricité à un prix modéré. Les sociétés bénéficiaires de ces droits sont Péchiney, Atochem, Ugine (Usinor-Sacilor), Métaux spéciaux SA et Carbonne Savoie.

Dans ces conditions, votre rapporteur estime que la suppression du FITTVN, à laquelle il s'opposera, n'est pas un argument suffisant pour justifier la modification de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques, tout au contraire. Cependant, il existe une justification plus essentielle.

B. NE PAS ENTRAVER LE DEVELOPPEMENT DE LA COMPAGNIE NATIONALE DU RHONE

La justification essentielle à l'extension de la taxe accompagnée d'un abaissement du tarif est de favoriser l'activité de la Compagnie nationale du Rhône (CNR) , dont tous les ouvrages hydroélectriques sont implantés sur des voies navigables.

L'article 50 de la loi n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité a permis la transformation de la CNR en un producteur d'électricité autonome. Alors que jusqu'à présent l'électricité produite par la CNR était achetée par EDF à prix coûtant, ce qui faisait supporter par EDF les surcoûts liés aux taxes, la CNR devra bientôt vendre son électricité à de nouveaux clients.

Or, le montant de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques ajouté au coût brut de production de l'électricité atteint de 16 à 17 centimes par kWh, ce qui est jugé excessif dans un environnement concurrentiel, où le prix de l'électricité se situe autour de 14 centimes par kWh.

L'allégement de la taxe devrait permettre de rendre la CNR plus compétitive.

L'évolution de la Compagnie nationale du Rhône (CNR) après la loi du 10 février 2000

Avant la loi de transposition

Après la loi de transposition

Régime de production associée entre EDF et la CNR :

- CNR propriétaire des barrages

- EDF responsable de l'exploitation et de la maintenance

Fourniture par la CNR à EDF de la totalité de sa production électrique

• Paiement par EDF d'une redevance couvrant les coûts de la CNR

CNR devient un producteur électrique indépendant

• Révision des contrats EDF/CNR nécessaire d'ici 201 pour :

- transférer à la CNR la pleine responsabilité de l'exploitation

- permettre à la CNR de commercialiser son électricité directement auprès de clients éligibles

Processus de négociation contractuelle entre EDF et la CNR supervisé par la commission Gentot et la commission européenne.

La modification de l'assiette de la taxe permettrait de faire acquitter son produit pour les deux tiers par des ouvrages implantés sur les voies navigables et pour un tiers par les autres ouvrages hydroélectriques.

Répartition prévisible de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques

Part voies navigables

70 %

Part voies non navigables

30 %

Source : secrétariat d'Etat à l'industrie

Selon les informations fournies par le secrétariat d'Etat à l'industrie, compte tenu de l'élévation du seuil de taxation, les petits producteurs d'électricité ne seraient pas concernés par l'extension de la taxe, mais seulement EDF et, pour une part plus marginale, la filiale d'électricité de la SNCF (la SHEM). En effet, le relèvement du seuil de taxation, de 8.000 à 20.000 kW permet d'exclure 4 centrales exploitées par des industriels.

Répartition prévisible de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques

EDF

52 %

CNR

47 %

SHEM

1 %

Source : secrétariat d'Etat à l'industrie

Alors qu'aujourd'hui, formellement, la CNR paye le double de taxe par rapport à EDF, l'extension de la taxe devrait aboutir à une répartition par moitié entre ces deux opérateurs. La présente mesure se traduirait par une amélioration de l'équilibre financier de la CNR pour 330 millions de francs.

Tout en comprenant l'intérêt de ces dispositions, votre rapporteur général rappelle qu'il refusera la suppression du FITTVN et, en conséquence, il lui apparaît dangereux de dénouer le lien entre la taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés et les voies navigables. Alors que le FITTVN accumulait une trésorerie dormante, de plus de 4 milliards de francs désormais, le gouvernement n'a pas proposé de réduire le taux de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques des voies navigables. Il le propose aujourd'hui en échange d'une extension de la taxe, alors même qu'elle ne servira plus aux investissements publics.

Toutefois, votre rapporteur relève également que, dans son nouveau statut, la Compagnie nationale du Rhône (CNR) ne peut supporter seule le poids d'une taxe très élevée.

De plus, il note qu'en vertu de la loi du 27 mai 1921 et des trois cahiers des charges qui s'appliquent à elle, la CNR a pour mission, outre la navigation sur le Rhône, mission de service public, l'aménagement du fleuve en vue de la navigation et l'usage agricole de ses eaux. La CNR ne peut produire d'électricité hydraulique (19 barrages existent aujourd'hui sur le Rhône) qu'à condition de maintenir la libre circulation fluviale. La compagnie, qui entretient les berges et gère les ports fluviaux, a l'obligation de garantir le niveau adéquat du fleuve pour la navigation, ainsi que la régulation des bras secs du Rhône. Elle contribue donc déjà beaucoup au maintien du réseau de navigation fluvial.

En conséquence, conscient de l'importance de développer un véritable marché concurrentiel de l'électricité, il vous proposera d'accepter la réduction du taux de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques implantés sur les voies navigables. Il note toutefois qu'en raison de la distorsion entre les taux appliqués sur les voies navigables et sur les autres ouvrages persistera une inégalité de traitement malgré l'extension de la taxe. Compte tenu de ces distorsions, de nouvelles modifications de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés sont à attendre.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11

Mesures d'adaptation de la fiscalité agricole

Commentaire : le présent article vise à mettre en oeuvre diverses mesures d'adaptation de la fiscalité agricole, dans un souci de clarification et de simplification.

Cet article comprend huit mesures d'adaptation de la fiscalité agricole et fait suite à la parution, le 28 mars 2000, du rapport, à l'attention du Premier ministre, rédigé par nos collègues députés, Béatrice Marre et Jérôme Cahuzac, portant sur les adaptations à apporter à la fiscalité et au mode de calcul des cotisations sociales agricoles.

I. L'AMÉNAGEMENT DE LA DÉDUCTION FISCALE POUR INVESTISSEMENT AFFECTÉE À L'ACQUISITION DE PARTS DE SOCIÉTÉS COOPÉRATIVES AGRICOLES

Le paragraphe I du présent article vise à permettre la réintégration de la déduction pour investissement affectée à la souscription de parts sociales de coopératives agricoles dans le droit commun de la déduction pour investissement.

A. LE DROIT EXISTANT

1. Le régime instauré par la loi de finances pour 1987

L'article 72 D du code général des impôts a codifié la mise en place par la loi de finances pour 1987 n° 86-1317 du 30 décembre 1986 d'un mécanisme de déduction pour investissement (DPI) en faveur des exploitants agricoles soumis à un régime réel d'imposition, leur permettant de déduire, chaque année, de leur bénéfice imposable une somme plafonnée et devant être utilisée dans les cinq ans suivant la réalisation de la déduction pour l'acquisition et la création d'immobilisations amortissables strictement nécessaires à l'activité ou pour l'acquisition et la production de stocks de produits ou d'animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an.

Ce mécanisme de déduction pour investissement doit permettre de renforcer les capacités d'autofinancement des exploitants agricoles et encourager le renouvellement du capital de leur exploitation.

Depuis sa création, la DPI a cependant considérablement évolué ce qui en a modifié le sens.

La situation actuelle est la suivante :

Déduction fiscale pour investissement article 72 D du code général des impôts

Situation actuelle


Bénéfice

Déduction maximale (exercices ouverts à partir
du 01.01.98)

Déduction maximale (exercices ouverts à partir du 01.01.99)

< 15.000 F

égale au bénéfice

égale au bénéfice

Compris entre 15.000 F et 42.858 F

15.000 F

15.000 F

Compris entre 42.859 F et 150.000 F

35 % du bénéfice

35 % du bénéfice

Compris entre 150.001 F et 500.000 F

30.000 F + 15 % du bénéfice total

22.500 F + 20 % du bénéfice total

Supérieur à 500.000 F

105.000 F

122.500 F

Source : DGI

Selon la direction générale des impôts, en 1998, 84.000 exploitants ont fait usage de la déduction fiscale pour investissement, soit environ un tiers des exploitants au réel.

Outre les évolutions destinées à augmenter les effets de la DPI (passage du taux d'abattement sur les bénéfices agricoles de 10 à 35 % et de la déduction annuelle maximale autorisée de 20.000 à 122.500 francs), d'autres modifications sont intervenues depuis 1987 :

- extension du bénéfice de la DPI à toutes les formes de sociétaires : en 1987 prise en compte du nombre d'associés dans les Groupements Agricole d'Exploitation en Commun ( GAEC ), à partir de 1989 prise en compte du nombre d'associés exploitants dans les Exploitations Agricoles à Responsabilité Limitée ( EARL ) (pour les EARL qui n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, la limite de la DPI est multipliée par le nombre des associés exploitants sans pouvoir excéder trois fois les limites fixées pour le droit commun) ;

- assouplissement des conditions de réintégration des sommes non investies , en autorisant le choix de l'année et du montant de ces réintégrations : la loi de finances pour 1987 qui a instauré la DPI prévoyait en effet la nécessaire réintégration du montant de la déduction au bout de cinq ans en cas de non utilisation ou d'utilisation non conforme à son objet. La loi de finances pour 1997 introduit une nouvelle disposition de l'article 72 D du CGI qui prévoit la possibilité de réintégration de cette somme en cas de baisse du revenu sans attendre le délai de cinq ans. De plus, la possibilité de modulation tant de la déduction que de la réintégration est également introduite en 1997.

En outre, en 1991, une disposition est introduite permettant le transfert de l'utilisation de la DPI en cas d'apport d'exploitation individuelle à un GAEC ou une EARL. Enfin, en 1995, la possibilité de transfert de l'utilisation de la DPI en cas d'apport d'exploitation individuelle est étendue à toutes les sociétés civiles agricoles.

Ces différentes évolutions ont eu pour conséquence de changer la nature de la DPI en la transformant en un outil sélectif de provision pour risque de baisse du revenu et d'écrêtement libre des revenus. Elle ne répond donc plus que partiellement à son objectif initial de financement des biens amortissables et par voie de conséquence n'est plus un outil fiscal d'orientation des investissements.

Ainsi, la DPI constitue aujourd'hui, en fonction de l'usage qui en est fait, soit un simple avantage de trésorerie, soit une aide directe à la production.

Selon les dispositions de l'article 72 D du CGI, lorsque la DPI est utilisée pour l'acquisition ou la création d'immobilisations amortissables, la base d'amortissement est réduite à due concurrence, augmentant ainsi, du fait de la diminution des charges déductibles, le résultat imposable. La DPI apporte donc, dans cette hypothèse, un simple avantage de trésorerie. La déduction ne fait en revanche l'objet d'aucune réintégration lorsqu'elle est utilisée pour le financement de stocks à rotation lente : l'avantage est, dans ce cas, définitif.

Historique de la déduction fiscale pour investissement

Première année d'application

Montant de la déduction

Particularités

1986

10 % du bénéfice avec :

un minimum : 10.000 francs

un maximum : 20.000 francs

Utilisation pour l'acquisition ou la création de stocks à rotation lente ou d'immobilisations amortissables. Réintégration au bout de cinq ans en cas de non-utilisation

1987

Prise en compte du nombre d'associés dans les GAEC

1989

Prise en compte du nombre d'associés-exploitants dans les EARL

1991

Transfert de l'utilisation possible en cas d'apport d'exploitation individuelle à un GAEC ou une EARL

1992

20 % du bénéfice avec

un minimum : 10.000 francs

un maximum : 30.000 francs

1993

20 % du bénéfice jusqu'à 150.000 francs et 10 % jusqu'à 450.000 francs

minimum : 10.000 francs

maximum : 75.000 francs

1995

Transfert de l'utilisation possible en cas d'apport d'exploitation individuelle étendu à toutes les sociétés civiles agricoles

1997

35 % du bénéfice jusqu'à 150.000 francs et 10 % jusqu'à 500.000 francs

minimum : 15.000 francs

maximum : 87.500 francs

Réintégration possible en cas de baisse du revenu sans attendre le délai de cinq ans. Modulation possible tant de la déduction que de la réintégration

1998

35 % du bénéfice jusqu'à 150.000 francs et 15 % jusqu'à 500.000 francs

minimum : 15.000 francs

maximum : 105.000 francs

1999

35 % du bénéfice jusqu'à 150.000 francs et 20 % jusqu'à 500.000 francs

minimum : 15.000 francs

maximum : 122.500 francs

1999 (loi d'orientation)

Utilisation possible pour la souscription de parts de coopératives

Source : rapport Marre - Cahuzac (mars 2000)

2. Les dispositions de la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999

La loi d'orientation agricole (n° 99-574 du 9 juillet 1999) a eu pour effet d'élargir l'utilisation de la DPI à " la souscription de parts sociales de sociétés coopératives agricoles visées à l'article L. 521 - 1 du code rural, dans la limite des investissements nouveaux réalisés par elles, et dont elles peuvent justifier à la clôture de l'exercice et au prorata du capital souscrit par les coopératives dans le financement de cet investissement " , c'est-à-dire au-delà de l'acquisition de biens amortissables inscrits au bilan.

Les dispositions de la LOA relatives à cette extension de l'utilisation de la DPI présentent cependant de grandes difficultés d'application pratique, dans la mesure où :

- l'ouverture de la DPI est conditionnée par la réalisation des investissements nouveaux de la coopérative, c'est-à-dire que la DPI n'est pas directement affectée à la souscription de parts sociales de coopératives, ce qui suppose que les coopératives puissent établir la réalité de ces investissements ;

- la réduction du bénéfice imposable offerte à chaque coopérateur est plafonnée au prorata de leur participation dans la souscription de parts sociales ayant servi à financer les investissements précités.

Dès lors deux problèmes majeurs se sont posés : établir la preuve du lien existant entre la réalisation de nouveaux investissements et la souscription de parts de coopératives d'une part, répartir la DPI entre les différents membres de la coopération d'autre part.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le dispositif proposé par le gouvernement, conformément d'ailleurs à une des propositions du rapport Marre-Cahuzac précité, vise à mettre fin à ces incertitudes en maintenant la possibilité d'utiliser la DPI pour la souscription de parts sociales de sociétés coopératives agricoles tout en supprimant la référence aux investissements nouveaux réalisés par elles (c'est l'objet du 1° du paragraphe I du présent article).

Désormais l'utilisation de la DPI pour la souscription de parts sociales de coopératives agricoles relève du régime de droit commun de la DPI.

Le 2° du paragraphe I du présent article dispose en effet que lorsqu'elle est utilisée pour la souscription de parts sociales de coopératives agricoles, la DPI est rapportée, par parts égales, au résultat de l'exercice qui suit celui de la souscription et des neufs exercices suivants. En outre, la cession des parts sociales entraîne la réintégration immédiate dans le résultat imposable de la fraction de la déduction qui n'a pas encore été rapportée.

La déduction pourrait donc être utilisée dans un délai de cinq ans à la souscription de parts sociales de coopératives dans les limites édictées par l'article 72 D du CGI. Elle cesserait d'être plafonnée à hauteur des investissements nouveaux réalisés par les coopératives mais se verrait appliquer les plafonds de droit commun.

En outre, une réintégration échelonnée est prévue, par analogie avec les règles applicables en cas d'utilisation de la DPI pour l'acquisition d'immobilisations amortissables.

La DPI utilisée pour la souscription de parts sociales ne constitue donc plus une aide définitive mais, comme pour les autres biens amortissables, une simple mesure de trésorerie.

Le nouveau dispositif proposé par le gouvernement prévoit également que la cession de parts entraîne la réintégration immédiate dans le résultat imposable des sommes qui n'ont pas encore été rapportées.

Ce dispositif serait applicable aux exercices clos à compter du 1 er janvier 2000 pour l'ensemble des coopératives, soit un total de 16.3000 dont 13.000 sont des coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA). Ces chiffres représentent un potentiel de 200.000 exploitants agricoles.

D'après le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, ce nouveau dispositif ne devrait engendrer aucun surcoût par rapport aux dispositions introduites par la loi d'orientation agricole, soit un coût annuel estimé à 120 millions de francs sur le plan fiscal et 310 millions de francs en termes de cotisations sociales.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté ces dispositions visant à l'aménagement du régime de la DPI affectée à la souscription de parts sociales de coopératives agricoles tout en en modifiant certains termes.

Il s'agissait :

- d'une part de remplacer toute référence, dans le corps du paragraphe I du présent article, à la notion de " souscription " de parts de coopératives par la notion d'acquisition ;

- d'autre part, de substituer à la notion de " cession de parts sociales " celle de " retrait de l'adhérent ".

Ces amendements dits " rédactionnels " se justifient par le fait que les notions de souscription et de cession de parts ne couvrent pas l'ensemble des situations qui se rencontrent dans les coopératives agricoles. Le gouvernement étant favorable à ces amendements, ils furent adoptés par l'Assemblée nationale.

C. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que cette clarification du régime de la DPI affectée à l'acquisition de parts sociales de coopératives agricoles était nécessaire mais elle estime également que le gouvernement n'est pas allé assez loin. D'autres réformes de plus grande ampleur s'imposent en effet.

D'ailleurs, le rapport précité de nos collègues députés, relatif à la fiscalité agricole, l'a souligné.

1. La mise en place d'un système de réserve d'autofinancement

La DPI ne répond plus aujourd'hui que partiellement à son objectif initial de financement des biens amortissables et par voie de conséquence n'est plus un outil fiscal d'orientation des investissements.

Des améliorations sont possibles. Alors même que le rapport précité proposait d'améliorer le dispositif de la DPI par la mise en oeuvre d'un système de réserve d'autofinancement, cette idée n'a pas été reprise par l'Assemblée nationale.

Il s'agirait :

- d'inscrire au passif du bilan des sommes réservées à l'autofinancement, sommes qui ne seraient imposées qu'au taux des plus-values à long terme. Lors de la sortie de réserve, ces sommes d'une part donneraient lieu à un crédit d'impôt équivalent à cette imposition (15 %), d'autre part seraient soumises au taux normal de cotisations sociales agricoles ;

- de prévoir que cette mise en réserve ne pourrait être utilisée qu'à concurrence d'un tiers de l'investissement réalisé, et en tout état de cause, au tiers du plafond actuel de la DPI, soit 40.000 francs.

En effet, l'investissement dans les entreprises agricoles doit, comme dans les autres secteurs économiques, être soutenu. A cet égard, le mécanisme déjà existant de la DPI peut être amélioré et complété par une provision pour autofinancement. Il s'agirait donc de permettre l'affectation des sommes déduites à un compte de réserve figurant au passif de l'entreprise sous une imposition au taux proportionnel de 15 %.

Cette réserve, tant qu'elle ne serait pas appréhendée par l'exploitant, ne subirait aucune taxation supplémentaire. En revanche, en cas de prélèvement sur la réserve, il conviendrait de distinguer deux hypothèses :

- prélèvement à des fins d'investissement : les sommes prélevées ne supporteraient aucune taxation complémentaire dans la limite d'un plafond de 40.000 francs par an ;

- prélèvement pour des besoins autres que l'investissement : les sommes prélevées seraient réintégrées dans le bénéfice de l'exercice en cours lors de ce prélèvement. Elles donneraient droit au bénéfice d'un crédit d'impôt égal à l'impôt proportionnel acquitté lors de la mise en réserve.

Ce mécanisme permettrait de transposer à l'agriculture les mesures prévues pour les sociétés relevant de l'impôt sur les sociétés et réduisant le taux de l'IS à 25 % puis 15 % pour les 250.000 francs de bénéfice sous certaines conditions.

2. La libre réintégration de la DPI

Actuellement, la déduction pour investissement ne peut être rapportée qu'en cas de non-utilisation au terme de cinq ans suivant sa constitution ou en cas de baisse de plus de 20 % du résultat par rapport aux trois dernières années.

Il semblerait opportun d'assouplir le dispositif de la DPI en permettant aux exploitants agricoles de réintégrer par anticipation les sommes déduites sans subir une chute de 20 % de leur revenu. Ainsi, l'exploitant pourrait réintégrer la somme déduite au moment auquel il le juge opportun pour la gestion de son exploitation.

II. LA PROLONGATION DE TROIS ANS DE L'ABATTEMENT DE 50 % SUR LES BÉNÉFICES DES JEUNES AGRICULTEURS

Le paragraphe II du présent article vise à proroger pour trois ans (jusqu'au 31 décembre 2003) l'abattement de 50 % sur les bénéfices en faveur des jeunes agriculteurs.

A. LE DROIT EXISTANT

Depuis 1982 (loi de finances rectificative pour 1982, n° 82-540 du 28 juin 1982), les jeunes agriculteurs qui s'installent bénéficient d'un abattement sur leurs bénéfices imposables ( article 73 B du CGI ). La loi de finances pour 1993 avait prolongé le dispositif initial en le modifiant partiellement, jusqu'au 31 décembre 1999. La loi de finances pour 2000 a prolongé le dispositif jusqu'au 31 décembre 2000.

Dans son écriture actuelle, l'article 73 B du CGI accorde un abattement de 50 % aux exploitants agricoles soumis à un régime réel d'imposition, établis entre le 1 er janvier 1993 et le 31 décembre 2000 et qui bénéficient de prêts à moyen terme spéciaux (prévus par les articles R. 343-13 à R. 343-16 du code rural) ou de la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs (prévue par les articles R. 343-9 à R. 343-12 du code rural), au titre des soixante premiers mois d'activité.

Cet abattement destiné aux jeunes agriculteurs est le pendant de l'exonération , totale ou partielle, applicable jusqu'au 31 décembre 2004, accordée aux créateurs d'entreprises dans les autres secteurs d'activité économique et dans certaines parties du territoire : exonération totale de l'impôt sur le revenu pendant deux ans puis abattement dégressif les trois années suivantes (article 44 sexies du CGI). Ce dernier dispositif a été modifié par l'application d'une disposition communautaire appelée le " de minimis " (plafonnement de l'exonération à 225.000 euros par période de 36 mois).

Toutefois un jeune agriculteur ne peut s'installer le plus souvent sans reprendre une exploitation existante, il ne s'agit donc pas, au sens de l'article 44 sexies du CGI, d'une création d'entreprise.

Ce système d'aide fiscale à l'installation des jeunes agriculteurs souffre d'imperfections.

Il est d'abord inéquitable : vis-à-vis de l'installation agricole non aidée, au regard de sa proportionnalité avec le niveau de revenu (les jeunes les plus dotés sont aussi les plus aidés), enfin par rapport au traitement de l'installation des jeunes d'autres professions (artisans et commerçants).

Il est ensuite peu performant puisqu'il ne touche que partiellement à la question de fond : le financement du capital d'exploitation, comme le souligne d'ailleurs l'analyse de nos collègues députés Béatrice Marre et Jérôme Cahuzac dans leur rapport relatif à la réforme de la fiscalité agricole.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le paragraphe II du présent article vise à reporter de trois ans, jusqu'au 31 décembre 2003, la date limite de l'installation prévue pour bénéficier de l'abattement de 50 % sur les bénéfices des jeunes agriculteurs.

Le coût de cette mesure est estimé, pour 2002, à 30 millions de francs. Plus de 40.000 jeunes agriculteurs seront concernés par cette mesure.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement, présenté par sa Commission des finances, visant à étendre le bénéfice de l'article 73 B du CGI aux jeunes agriculteurs qui, s'installant dans le cadre d'un contrat territorial d'exploitation (CTE), ne répondent pas pour autant à l'ensemble des critères d'attribution de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) ou des prêts spéciaux d'installation à moyen terme. Un tiers des jeunes agriculteurs ne perçoit en effet aucune aide à l'installation et est donc, de fait, exclu du bénéfice de l'abattement de 50 % sur le bénéfice imposable.

L'extension de ce dispositif aux jeunes agriculteurs signataires d'un CTE correspond à une des mesures proposées par le rapport précité relatif à la réforme de la fiscalité agricole. Cette mesure est présentée, à juste titre, dans ce rapport, comme une mesure d'équité en faveur des jeunes agriculteurs et un gage d'efficacité. En outre, il propose surtout une modification des critères d'attribution de la DJA, réforme qui relève du code rural et non du code général des impôts. Cette extension de l'abattement aux signataires d'un CTE n'est donc en quelque sorte qu'un " pis-aller " en attendant une véritable réforme du code rural.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission apprécie l'effort réalisé en faveur des jeunes agriculteurs mais estime, une fois encore, que ces mesures restent de faible portée.

Il apparaît notamment à votre commission que cette prolongation du bénéfice de l'abattement de 50 % sur les bénéfices des jeunes agriculteurs est trop limitée dans le temps.

1. La prorogation de l'application de l'article 73 B aux installations effectuées jusqu'au 31 décembre 2004

Dans un souci d'harmonisation des dispositions de l'article 73 B du CGI avec les dispositions relatives aux jeunes créateurs d'entreprise (article 44 sexies du CGI précité), votre commission vous propose de prolonger l'application de l'abattement de 50 % sur les bénéfices des jeunes agriculteurs jusqu'au 31 décembre 2004 (date qui figure dans l'article 44 sexies du CGI pour l'application de l'exonération de l'impôt sur le revenu accordée aux jeunes créateurs d'entreprises) et non pas jusqu'au 31 décembre 2003 comme le préconise le gouvernement.

2. L'extension du bénéfice du taux réduit des droits de mutation à titre onéreux à toute installation relevant de l'article 73 B du CGI, étendu aux signataires d'un CTE

Les dispositions de l'article 1594 F quinquies - E I du CGI prévoient que les acquisitions d'immeubles ruraux effectuées par les jeunes agriculteurs sont soumises à la taxe de publicité foncière ou au droit d'enregistrement (c'est-à-dire au droit départemental de vente) au taux de 0,60 %, au lieu de 3,60 %, lorsque ces immeubles sont situés dans un territoire rural de développement prioritaire.

Votre commission estime qu'il pourrait être intéressant, conformément d'ailleurs à ce qui était proposé par le rapport Marre-Cahuzac mais qui n'a été repris ni par le gouvernement ni au cours de la discussion à l'Assemblée nationale, d'étendre l'application du taux réduit du droit départemental de vente de 0,60 % à toutes les installations relevant de l'article 73 B du CGI, y compris désormais aux signataires d'un CTE.

Il s'agirait donc ici de favoriser l'installation des jeunes agriculteurs par des mesures fiscales incitatives. Désormais toutes les installations éligibles à l'article 73 B du CGI pourraient bénéficier de ce taux réduit du droit départemental de vente.

III. LE RELÈVEMENT DE LA LIMITE D'IMPUTATION DES DÉFICITS AGRICOLES

Le paragraphe III du présent article vise au relèvement de 200.000 francs à 500.000 francs du montant des revenus non agricoles au-delà duquel les déficits agricoles d'un exploitant ne peuvent s'imputer sur le revenu global du foyer fiscal de l'exploitant.

A. LE DROIT EXISTANT

D'après les dispositions de l'article 156 du CGI, l'impôt sur le revenu est établi d'après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé eu égard aux propriétés et aux capitaux que possèdent les membres du foyer fiscal, aux professions qu'ils exercent, aux traitements, aux salaires, pensions et rentes viagères dont ils jouissent ainsi qu'aux bénéfices de toutes opérations lucratives auxquelles ils se livrent, sous déduction, entre autres, du déficit constaté pour une année dans une catégorie de revenus. Si le revenu global n'est pas suffisant pour que l'imputation puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté successivement sur le revenu global des années suivantes, jusqu'à la cinquième année inclusivement.

Toutefois n'est pas autorisée l'imputation, entre autres des déficits provenant d'exploitations agricoles lorsque le total des revenus nets d'autres sources excède 200.000 francs ; ces déficits peuvent cependant être admis en déduction des bénéfices de même nature des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement.

Ainsi donc si l'un des membres du foyer fiscal a subi un déficit dans son exploitation agricole, ce déficit est imputé sur les bénéfices ou revenus de la même catégorie réalisés la même année par les autres membres de la famille. Si cette imputation ne permet pas de résorber la totalité du déficit le reliquat peut être compensé avec les résultats positifs des autres catégories de revenus. Les déficits d'activité réduisent donc d'autant le revenu imposable.

Ce principe a connu certaines évolutions s'agissant des déficits provenant d'une exploitation agricole. Ils ne peuvent donner lieu à imputation sur le revenu global que si le total des revenus nets d'autres sources dont dispose le foyer fiscal n'excède pas 200.000 francs (loi n° 95-95 du 1 er février 1995). En cas de franchissement de cette limite, le déficit agricole ne peut s'imputer que sur les bénéfices de même nature des années suivantes jusqu'à la cinquième année comprise.

Ces modalités d'imputation des déficits agricoles concernent l'ensemble des exploitants dont le revenu est imposé au titre des bénéfices agricoles, à l'exclusion de ceux soumis au régime du forfait, pour lesquels la notion de déficit agricole n'existe pas. La limite de 200.000 francs correspond à un revenu disponible d'environ 277.000 francs.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Présenté comme un moyen de favoriser la pluriactivité des exploitations agricoles, le dispositif proposé par le gouvernement vise à porter de 200.000 à 500.000 francs la limite des revenus autres qu'agricoles en deçà de laquelle les déficits agricoles peuvent s'imputer sur le revenu global.

A cet égard, le rapport précité de nos collègues députés suggérait plutôt d'aligner le traitement fiscal des déficits d'exploitation agricole sur le régime en vigueur pour les autres activités économiques, en autorisant l'imputation des déficits de l'activité agricole véritablement professionnelle sur les autres revenus du foyer fiscal.

Les règles applicables en matière de bénéfices industriels et commerciaux (article 156 du CGI) disposent que les déficits constatés sont imputables sur le revenu global dès lors qu'ils proviennent d'une activité véritablement professionnelle, c'est-à-dire comportant la participation personnelle, continue et directe d'un membre du foyer fiscal à l'accomplissement des actes nécessaires de celle-ci. Les modalités d'imputation sont donc indépendantes du revenu net global du foyer fiscal.

Pourtant le gouvernement a préféré proposer de relever la limite des revenus non agricoles en deçà desquels l'imputation des bénéfices agricoles est autorisée. Là encore, il s'agit d'une position de repli adoptée par le gouvernement.

Le coût de cette mesure est estimé, par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, à 50 millions de francs en 2001.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à porter de 200.000 francs à 350.000 francs (et non plus 500.000 francs comme le proposait le gouvernement) le plafond des revenus non agricoles au delà duquel les déficits agricoles ne peuvent plus être déduits du revenu global. Il s'agit donc de limiter le relèvement à 75 % au lieu des 150 % proposés par le gouvernement.

Cet amendement a été adopté dans le souci de rendre le relèvement plus raisonnable que celui proposé par le gouvernement mais toutefois suffisant pour encourager la pluriactivité.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que ce nouveau dispositif devrait être à même d'encourager le développement de la pluriactivité parmi les exploitants agricoles.

Toutefois, il est également important de s'assurer que le développement de la pluriactivité agricole ne se fera pas au détriment des activités artisanales et commerciales ni ne s'effectuera sur des bases conduisant à accroître les distorsions de concurrence vis-à-vis des artisans et commerçants.

Actuellement n'est pas autorisée l'imputation des déficits provenant d'une exploitation agricole sur le revenu global imposable lorsque le total des revenus net d'autres sources excède 200.000 francs. Ainsi, lorsque l'agriculteur tire un bénéfice net supérieur à 200.000 francs correspondant à l'exercice d'une activité artisanale ou commerciale par exemple, il lui est interdit d'imputer son déficit agricole sur cette source de revenus. Cette limite est élevée si on se réfère au revenu annuel moyen d'un artisan qui est actuellement inférieur à 130.000 francs.

Le nouveau plafond adopté par l'Assemblée nationale (350.000 francs), semble à cet égard constituer un juste milieu permettant à la fois de soutenir la pluriactivité des agriculteurs et de ne pas nuire aux professions artisanales et commerciales.

IV. L'AMÉNAGEMENT DES RÈGLES DE CALCUL DU RÉSULTAT DES SOCIÉTÉS DE PERSONNES EN CAS DE RETRAIT D'UN ASSOCIÉ

Le paragraphe IV du présent article vise à autoriser les associés des sociétés de personnes soumises au régime fiscal des sociétés de personnes, imposées dans la catégorie des bénéfices agricoles au bénéfice réel, d'arrêter un résultat intermédiaire, en cours d'exercice, à la date de retrait de l'un des associés, afin que son successeur ne supporte plus, sur la quote-part de résultat lui revenant, l'imposition du bénéfice de l'exercice entier.

A. LE DROIT EXISTANT

Selon les dispositions de l'article 8 du CGI, les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société.

S'agissant des sociétés de personnes et assimilées exerçant une activité agricole et n'ayant pas opté pour un assujettissement à l'impôt sur les sociétés, chacun des associés ou chaque membre participant est personnellement soumis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles, pour la part des bénéfices sociaux correspondant à ses droits dans la société ou le groupement.

Sont notamment concernés les associés :

- des sociétés en nom collectif ;

- des sociétés en commandite simple ;

- des sociétés en participation ;

- des groupements fonciers agricoles, gérant leurs exploitations en faire-valoir direct ;

- des groupements forestiers ;

- des groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) ;

- des sociétés civiles agricoles ;

- des groupements fonciers ruraux.

Il en est de même, sous les mêmes conditions, pour, entre autres :

- l'associé unique d'une entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) ;

- les associés d'une EARL formée uniquement entre personnes parentes en ligne directe ou entre frères et soeurs et les conjoints de des personnes.

Il convient ici de souligner que les bénéfices sociaux des sociétés de personnes sont réputés mis à la disposition des associés présents à la clôture de l'exercice. Dès lors, le bénéfice réalisé par une société au cours de l'exercice où intervient une modification de la répartition du capital social, telle que celle résultant du retrait d'un associé, est imposable au titre des seuls associés présents à la date de la clôture de l'exercice au prorata de leurs droits appréciés à cette date, à l'exclusion de l'associé sortant. En cas de retrait d'un associé, son successeur supporte donc l'imposition du bénéfice de l'intégralité de l'exercice.

En pratique, le recours à la méthode de la valorisation des parts cédées, dont le prix diminue à hauteur de l'imposition supportée par le nouvel associé, permet de passer outre cette difficulté mais cette solution apparaît insuffisante.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le paragraphe IV du présent article propose d'introduire dans le CGI un nouvel article 203 bis autorisant les associés des sociétés dont les résultats sont imposés dans la catégorie des bénéfices agricole d'arrêter un résultat intermédiaire, en cours d'exercice, en cas de transmission ou de rachat de parts, à la date de cette opération.

Le dispositif proposé par le gouvernement présente les caractéristiques suivantes :

- les sociétés concernées sont celles mentionnées à l'article 8 du CGI, exerçant une activité agricole et soumises obligatoirement au régime d'imposition d'après le bénéfice réel (sociétés pour lesquelles l'exercice comptable d'une durée de douez mois ne correspond pas nécessairement à l'année civile) ;

- en cas de transmission ou de rachat de parts de ces sociétés, l'impôt sur le revenu peut être immédiatement établi au nom de l'associé concerné pour sa quote-part dans les résultats réalisés depuis la fin de la dernière période d'imposition jusqu'à la date de l'opération de transmission ou de rachat ;

- cette mesure s'applique sur demande conjointe de l'associé dont les titres sont transmis ou rachetés et du bénéficiaire de la transmission ou, en cas de rachat, des associés présents dans la société à la date du rachat ;

- le bénéficiaire de la transmission est imposable à raison du bénéfice social afférent à la période comprise entre la date d'acquisition de ses droits et la clôture de l'exercice ;

- les autres associés présents dans la société à la clôture de l'exercice sont imposables dans les conditions habituelles, à raison de la part leur revenant dans les résultats réalisés par la société au cours de l'exercice. En cas de rachat de titres par la société, le bénéfice à répartir est déterminé sous déduction de la part du résultat imposée au nom de l'associé dont les titres sont rachetés.

Un décret doit fixer les modalités d'application de ces nouvelles dispositions du CGI, notamment concernant les obligations déclaratives des contribuables.

En outre, ces dispositions seraient applicables aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 2001.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté les dispositions du paragraphe IV du présent article sans modification.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que le dispositif ainsi proposé par le gouvernement constitue un effort de simplification et de transparence bienvenu, d'ailleurs réclamé par les professionnels.

Une mesure similaire avait d'ailleurs été introduite par l'article 19 de la loi de finances rectificative pour 1996 (n° 96-1182 du 30 décembre 1996) pour l'imposition du résultat des sociétés civiles relevant de bénéfices non commerciaux en cas de retrait d'un associé en cours d'année.

V. LA CLARIFICATION DES RÈGLES D'EXONÉRATION APPLICABLES AUX PLUS-VALUES PROFESSIONNELLES

Le paragraphe V du présent article vise à clarifier les règles d'exonération des plus-values lorsque les recettes n'excèdent pas le double des limites d'application des régimes micro-entreprises commerciales et non commerciales ou du forfait agricole.

Il s'agit de préciser, d'une part, que le niveau de recettes en deçà duquel un exploitant agricole bénéficie d'une exonération des plus-values réalisées sur l'actif immobilisé de son exploitation s'apprécie en retenant la moyenne des recettes des deux années précédant celle de la réalisation de la plus-value et, d'autre part, que l'exonération en vigueur concerne la plus-value nette, déterminée après compensation avec les moins-values de même nature, ce qui autorise l'imputation sur le revenu imposable des moins-values si elles sont excédentaires.

A. LE DROIT EXISTANT

Depuis la mise en place d'un régime réel d'imposition dans le cadre du secteur agricole, le traitement fiscal des plus-values a toujours fait l'objet de textes particuliers.

Les plus-values et moins-values de cession d'éléments d'actifs désignent les profits et pertes de caractère exceptionnel provenant de la réalisation d'éléments de l'actif immobilisé d'une exploitation agricole.

L'historique des modalités d'appréciation du régime d'exonération des plus-values des exploitants agricoles permet de dégager trois grandes périodes.

1. De 1972 à 1976

Le régime d'exonération des plus-values des exploitants agricoles était alors défini par les dispositions de l'article 38 sexdecies G de l'annexe III au CGI et commenté par la doctrine administrative 5 E - 2322 du 1 er septembre 1973 dans les termes suivants :

" - lorsque la cession des immeubles intervient plus de cinq ans après leur inscription au bilan, la fraction des plus-values qui a été acquise antérieurement au passage de l'exploitant sous le régime du bénéfice réel institué par la loi de finances pour 1971, est exonérée quelle que soit la date du changement de régime ;

- lorsque cette condition n'est pas remplie, les plus-values afférentes aux biens cédés sont calculées par rapport à la valeur vénale des biens au 1 er janvier 1972 ou à leur prix de revient d'origine si leur acquisition ou leur construction est postérieure à cette date ".

Il résulte donc de cette doctrine que les plus-values réalisées :

- par un exploitant agricole relevant d'un régime de forfait étaient exonérées,

- par un exploitant relevant du régime réel étaient exonérées si la cession intervenait plus de cinq ans après l'inscription des biens au bilan.

Il y a donc à cette époque un lien indéniable entre les modalités d'appréciation des limites du forfait, qui définissaient la date d'application d'un régime réel fixant le point de départ de la date d'inscription des biens au bilan, et les modalités d'exonération des plus-values professionnelles.

2. De 1976 à 1988

Les dispositions de l'article 38 sexdecies G de l'annexe III au CGI ont été implicitement abrogées par la loi n° 76-660 du 19 juillet 1976, à compter du 1 er janvier 1977.

Les dispositions de l'article 151 septies du CGI , introduit par la loi du 19 juillet 1976 précitée, prévoient un régime d'imposition spécifique des plus-values pour les contribuables dont les recettes n'excèdent pas le double de la limite du forfait ou de l'évaluation administrative.

Ainsi, l'article 151 septies du CGI prévoit une exonération, sous trois conditions, des plus-values professionnelles réalisées par les exploitants agricoles relevant de l'impôt sur le revenu et dont les recettes n'excèdent pas le double de la limite du forfait, soit 1.000.000 francs.

Cette exonération est donc subordonnée à trois conditions :

- les recettes ne doivent pas excéder le double de la limite du forfait (1.000.000 francs) ;

- l'activité doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans ;

- le bien cédé ne doit pas constituer un terrain à bâtir, au sens de l'article 1594-OG-A du CGI.

Pourtant la question s'est posée de savoir, dans le cas des bénéfices agricoles, quelles années de recettes devaient être prises en compte.

Une instruction administrative du 30 décembre 1976 BOI 8 M - 1 - 76 précise que :

" Le paragraphe II de l'article 11 de la loi du 19 juillet 1976 institue sous certaines conditions une exonération générale des plus-values professionnelles réalisées par les contribuables dont les recettes n'excèdent pas les limites du forfait ou de l'évaluation administrative.

Cette exonération concerne tous les contribuables exerçant une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale, répondant aux conditions définies par le texte légal.

Elle bénéficie aux intéressés quel que soit le régime selon lequel ils sont assujettis à l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire même lorsqu'ils auront opté pour le régime du bénéfice réel ou pour celui de la déclaration contrôlée. "

Après avoir rappelé les limites du forfait, cette instruction administrative précise les règles d'appréciation des limites d'exonération sans distinguer la nature de l'activité réalisée :

" Il convient de retenir, dans tous les cas, les recettes de l'année civile au cours de laquelle la plus-value a été réalisée. Il en est ainsi, même lorsque le contribuable soumis à un régime de bénéfice réel a la possibilité de clôturer un exercice à une date autre que le 31 décembre. Pour les agriculteurs imposés suivant le régime du bénéfice réel, comme pour les autres contribuables, la limite des recettes s'apprécie année civile par année civile ".

L'application de cette règle a soulevé des difficultés dans le secteur agricole compte tenu de la nouvelle rédaction de l'article 69 A du CGI applicable pour la première fois aux exercices ouverts à compter du 1 er janvier 1977. Cet article précise en effet que, lorsque la moyenne des recettes de deux années civiles excède 1.000.000 de francs, l'exploitant relève d'un régime réel à compter du 1 er janvier de la deuxième année de la période biennale de référence.

Ce point a été repris dans une instruction du 20 mars 1979 en ces termes :

" Conditions de l'exonération.

L'exonération est subordonnée aux conditions suivantes :

- les recettes de l'année de la réalisation de la plus-value ne doivent pas excéder pas la limite du forfait ;

- l'activité doit être exercée à titre principal ;

- l'activité doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans.

Ces conditions doivent être remplies simultanément pour que l'exploitant bénéficie de l'exonération. "

La première condition à remplir appelle des précisions en raison des modifications apportées par la loi de finances pour 1977 aux règles d'appréciation du franchissement de la limite du forfait agricole.

Aux termes de l'article 69 A du CGI, les exploitants dont les recettes annuelles pour l'ensemble de leurs exploitations dépassent une moyenne de 500.000 francs mesurée sur deux années consécutives sont obligatoirement imposés sur leur bénéfice réel à compter de la deuxième de ces années.

Par suite, il y a lieu de considérer que le franchissement de la limite du forfait s'effectue également le 1 er janvier de la deuxième de ces années. Il en est ainsi même :

- si le montant des recettes de la première et de la deuxième année excède 500.000 francs lorsque l'agriculteur n'était pas, malgré ce montant, déjà soumis au régime du bénéfice réel ;

- lorsque le montant des recettes de la deuxième année de la période biennale de référence est inférieur à 500.000 francs, dès lors que la moyenne des recettes des deux années dépasse ce chiffre.

Dès lors, les autres conditions étant supposées remplies, l'exonération des plus-values professionnelles ne peut être accordée que si, l'année de leur réalisation, l'exploitant n'est pas soumis obligatoirement, en raison du montant de ses recettes, à un régime réel pour l'imposition de ses bénéfices agricoles.

Il existe donc un lien particulièrement clair entre les règles d'application du régime réel et les règles d'appréciation du régime d'exonération des plus-values : seuls les exploitants ne relevant à titre obligatoire d'un régime réel d'imposition peuvent bénéficier du régime d'exonération de plus-values.

Or l'article 38 sexdecies A de l'annexe III au CGI exclut des recettes à prendre en compte pour déterminer les limites d'application du régime réel, les revenus accessoires tels que les bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et les bénéfices non commerciaux (BNC), ainsi que les revenus fonciers déclarés dans la catégorie des bénéfices agricoles au titre des revenus ayant pour origine le droit de propriété.

3. Depuis 1988

L'existence d'un lien entre les modalités d'application du régime d'imposition et les modalités d'appréciation du régime d'exonération des plus-values a soulevé une difficulté lorsque les dispositions de l'article 49 de loi n° 88-15 du 5 janvier 1988 ont modifié les limites d'exonération des petites entreprises mentionnées à l'article 151 septies du CGI en les portant au double de la limite du forfait.

A cet égard, la nouvelle doctrine administrative de base issue d'une instruction de 1989 précise que : "  Les recettes ne doivent pas excéder le double de la limite du forfait.

Pour l'application de cette condition, il y a lieu de considérer que le franchissement de la limite du forfait s'effectue de la même façon que pour la détermination du régime d'imposition.

Autrement dit, l'exonération est applicable si la moyenne des recettes des deux années qui précèdent celle de la réalisation de la plus-value n'excède pas le double des limites du forfait, soit 1.000.000 de francs. Il n'est pas tenu compte du montant effectif des recettes de l'année de réalisation de la plus-value" .

L'interprétation actuelle et très récente de l'administration est de considérer que cette rédaction avait pour objet simplement de définir la période de référence mais non la nature des recettes à prendre en compte.

Plusieurs éléments vont à l'encontre de cette interprétation et notamment le récent arrêt du Conseil d'Etat du 8 juillet 1998, Ministre c/ Péchou . Le Conseil d'Etat dans cette affaire infirme la doctrine administrative qui aligne les recettes à prendre en compte pour le champ de l'article 151 septies du CGI sur celles qui déterminent l'application des régimes forfaitaires : recettes de l'année pour les BIC et les BNC, recettes des deux années antérieures pour le forfait agricole. La thèse du ministre dans cette affaire était que le franchissement du seuil fixé par l'article 151 septies par référence au montant du forfait doit s'apprécier selon les mêmes règles que le franchissement du seuil du forfait lui-même.

Le Conseil d'Etat a choisi d'appliquer de manière uniforme le seuil de recettes fixé par l'article 151 septies , que l'activité soit agricole, commerciale, artisanale ou libérale et a donc clairement cassé le lien existant entre les modalités d'appréciation de la limite du forfait et les modalités d'appréciation du régime d'exonération des plus-values. Le lien entre l'article 151 septies et les règles propres aux régimes forfaitaires a pu en effet lui sembler distendu par la loi n° 88-15 du 5 janvier 1988 qui a porté le seuil d'exonération de l'article 151 septies au double de la limite du forfait. En citant l'article 202 bis du CGI, issu de la loi n° 85-1404 du 30 décembre 1985 et destiné à régler le problème des cessations d'activité en cours d'année, le CE indique un fondement de sa solution. La prise en compte des deux années précédant l'année de réalisation serait contraire à la lettre de l'article 202 bis du CGI qui impose, en cas de cessation d'entreprise, de prendre en compte les recettes de l'année de cessation et de l'année antérieure.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le paragraphe V du présent article vise à clarifier les règles applicables en matière d'exonération des plus-values professionnelles.

1. La suppression de la référence au franchissement du double de la limite du forfait

D'abord, les dispositions du V du présent article ont pour objet d'affirmer que le franchissement de la limite des recettes prévue à l'article 151 septies du CGI s'apprécie, pour les exploitants agricoles uniquement, en retenant la moyenne des recettes des deux années qui précèdent celle de la réalisation de la plus-value et supprimer toute référence au franchissement du double de la limite du forfait.

Dès lors l'exonération des plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole par des contribuables dont la moyenne des recettes, toutes taxes comprises, des deux années civiles qui précèdent celle de leur réalisation n'excède pas 1.000.000 francs (et non plus la référence au double de la limite du forfait), s'applique dans les mêmes conditions que l'exonération des autres plus-values professionnelles.

Cette disposition doit permettre de déconnecter les recettes prises en compte pour apprécier le franchissement du seuil d'exonération des plus-values professionnelles de celles déterminant la mise en oeuvre du régime du forfait.

La question de la nature des recettes permettant d'apprécier le franchissement du seuil de 1 million de francs reste entière.

2. La définition des plus-values professionnelles à prendre en considération

Les dispositions du V du présent article précisent également que l'exonération des plus-values professionnelles réalisées dans le cadre d'une activité artisanale, commerciale, libérale ou agricole, ou à l'occasion de cession de matériels agricoles ou forestiers, concerne les plus-values nettes, déterminées après compensation avec les moins-values de même nature, ce qui autorise la déduction du revenu imposable des moins-values lorsqu'elles sont excédentaires. Cette proposition permet l'imputation des moins-values nettes sur le bénéfice imposable.

3. Dispositions relatives aux plus-values réalisées en cas de cession ou de cessation d'activité d'une exploitation agricole (article 202 bis du CGI)

Le paragraphe V du présent article précise que le montant des recettes conditionnant l'exonération des plus-values s'apprécie en tenant compte de la moyenne des recettes des deux années précédant celle de la réalisation de la plus-value.

En outre, il est précisé que les dispositions précitées du paragraphe V du présent article s'appliquent pour les exercices clos à compter du 31 décembre 2000.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté les dispositions du V du présent article sans modification.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission est favorable à cette clarification des modalités d'appréciation des limites d'exonération des plus-values des exploitants agricoles.

Toutefois la prise en compte des revenus accessoires de nature commerciale ou non commerciale, ainsi que des revenus fonciers déclarés dans la catégorie des bénéfices agricoles, pour apprécier les limites des exonérations des plus-values, ne doit pas s'accompagner d'une modification de l'esprit du texte de loi au risque de voir apparaître de nouveaux schémas d'optimisation.

Les dispositions des articles 69 et 70 du CGI ont été plusieurs fois modifiées afin de mettre fin à la pratique des schémas d'optimisation destinés à éviter l'application du régime réel d'imposition.

Ces textes prévoient notamment :

- que les revenus perçus par les éleveurs intégrés doivent faire l'objet d'une multiplication par 5, afin d'assurer une équité de traitement entre ces éleveurs et les éleveurs qui élèvent leurs propres animaux, contrairement aux éleveurs intégrés ;

- qu'il doit être tenu compte, pour apprécier les limites d'imposition d'un exploitant individuel, de la quote-part de chiffre d'affaires que celui-ci réalise indirectement au travers des sociétés relevant de l'impôt sur le revenu, et ceci afin d'éviter de se maintenir au forfait.

Il serait donc souhaitable de maintenir un lien juridique entre les modalités d'appréciation des limites d'application du régime réel d'imposition défini par ces articles et les modalités d'appréciation du régime d'exonération des plus-values.

En outre, dans le but de favoriser l'installation des jeunes agriculteurs, il apparaît également souhaitable de compléter l'article 151 septies du CGI par une disposition précisant que les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole sont exonérées en cas de transmission d'exploitation à un jeune agriculteur. La fiscalité des transmissions demeure en effet un réel obstacle à l'installation. Beaucoup d'installations ne se font pas car les cédants appréhendent le coût fiscal de la transmission.

VI. LA SUPPRESSION DU RÉGIME TRANSITOIRE D'IMPOSITION DES BÉNÉFICES AGRICOLES

Le paragraphe VI du présent article vise à supprimer le régime transitoire d'imposition des bénéfices agricoles introduit par l'article 68 F du CGI.

A. LE DROIT EXISTANT

Le régime transitoire d'imposition a été introduit par la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1996) afin de favoriser le passage d'un régime forfaitaire d'imposition à un régime réel d'imposition.

D'après les dispositions de l'article 68 F du CGI, ce régime transitoire s'applique sur option aux exploitants agricoles qui ne sont pas déjà soumis à un régime réel d'imposition et qui exercent à titre individuel lorsque la moyenne de leurs recettes, calculée sur deux années consécutives, est comprise entre 500.000 francs et 750.000 francs. Les groupements et sociétés exerçant une activité agricole, ainsi que les exploitants individuels ayant déjà été soumis à un régime réel d'imposition, sont donc exclus du bénéfice du régime transitoire d'imposition.

Les agriculteurs soumis au régime du forfait peuvent opter pour l'application de ce régime. L'option doit être formulée avant le 1 er mai de l'année au titre de laquelle elle s'applique. Ce régime s'applique pendant une durée de cinq ans. L'option est donc valable pour une période de cinq ans non renouvelable.

Ce régime s'appliquait de droit pour les exercices ouverts avant le 1 er janvier 1994, il est devenu optionnel avec la loi de finances pour 1994 (n° 93-1352 du 30 décembre 1993) dans le but de le rendre plus attractif.

L'intérêt présenté par ce régime transitoire était sa simplicité : bénéfice déterminé à partir d'une comptabilité de caisse, non prise en compte des créances, des dettes ou des stocks, enfin coïncidence obligatoire de la période d'imposition avec l'année civile.

Cependant, en 1999, seuls 2.842 exploitants agricoles étaient soumis à ce régime, qui ne semble pas avoir joué son rôle de transition entre le régime forfaitaire et le régime réel.

En outre, l'article 68 F du CGI dispose également qu'en cas de dépassement de la limite de la moyenne des recettes de l'exploitant (750.000 francs), les intéressés sont soumis de plein droit au régime d'imposition d'après le bénéfice réel à compter de la première année suivant la période biennale considérée.

Dénombrement des entreprises agricoles, artisanales et commerciales,

selon leur régime d'imposition

Régime du forfait

Micro-BIC et spécial BNC

Total forfait + micro

RSI et régime transitoire

Réel normal

Total réel

Réel normal

Bénéfices agricoles

511.085

511.085

120.198

122.208

242.006

753.491

Bénéfices industriels et commerciaux

%

142.756

119.311

262.067

19 %

933.842

188.184

1.122.026

81 %

1.384.093

100 %

Bénéfices non commerciaux

%

44.915

40.387

85.302

15 %

476.821

476.821

81 %

562.123

100 %

Source : DGI (données 1997)

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le paragraphe VI du présent article vise à supprimer le régime transitoire d'imposition des bénéfices agricoles à compter de l'imposition des revenus de l'année 2001. Il faut ici préciser que c'est l'option en faveur de ce régime qui ne pourra plus être exercée à compter de l'imposition des revenus pour 2001. Dès lors, les exploitants qui avaient, auparavant, opté pour le régime transitoire continuent de bénéficier de ce régime jusqu'au terme des cinq ans pendant lesquels il s'applique.

Ce régime concerne aujourd'hui quelque 3.000 exploitants. Le coût de cette suppression n'aurait pas été évalué par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le dispositif proposé par le gouvernement a été adopté sans modification par l'Assemblée nationale.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que cette mesure de simplification, qui figurait d'ailleurs parmi les propositions du rapport précité de nos collègues députés, relatif à la réforme de la fiscalité agricole, est une mesure qui se justifie aujourd'hui.

En effet ce régime transitoire ne concerne aujourd'hui qu'un petit nombre d'exploitants agricoles, ce qui prouve la désaffection des exploitants pour l'option qui leur était offerte. En pratique, le régime transitoire n'a donc pas assumé son rôle de transition entre le régime du forfait et le régime réel.

VII. LE RAPPROCHEMENT DES RÈGLES D'IMPOSITION APPLICABLES AUX BÉNÉFICES AGRICOLES DE CELLES PRÉVUES POUR LES BÉNÉFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX CONCERNANT LA COMPTABILISATION DES FRAIS GÉNÉRAUX ET DES STOCKS AINSI QUE LES MODALITÉS DE PROVISION

Le paragraphe VII du présent article vise à autoriser les exploitants soumis au régime réel simplifié d'imposition des bénéfices agricoles à comptabiliser, d'une part, les frais généraux à la clôture de l'exercice selon une comptabilité d'engagement, et, d'autre part, les stocks au prix de revient ou au cours du jour si celui-ci est inférieur au prix de revient. Il autorise également la constitution de provisions.

A. LE DROIT EXISTANT

D'après les disposition du CGI, le régime réel d'imposition est applicable à un exploitant agricole lorsque ses recettes, pour l'ensemble de ses exploitations, excèdent une moyenne de 500.000 francs sur deux années consécutives.

Toutefois un régime simplifié d'imposition d'après le bénéfice réel a été introduit par la loi de finances rectificative pour 1976 (n° 76-1220 du 28 décembre 1976). Ce régime simplifié s'applique aux exploitants dont la moyenne des recettes sur deux années consécutives ne dépasse pas 1.800.000 francs. En 1999 ce régime s'appliquait à quelque 124.000 exploitants agricoles.

Les dispositions de l'article 74 du CGI précisent que le bénéfice imposable des exploitants placés sous le régime simplifié d'imposition est déterminé d'après les règles applicables au bénéfice réel normal, sous réserve des particularités suivantes :

- la comptabilité de l'exploitation n'enregistre journellement que les encaissements et les paiements ; les créances et les dettes sont constatées à la clôture de l'exercice, sauf, pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 1 er janvier 1997, en ce qui concerne les dépenses relatives aux frais généraux, qui sont payées à échéances régulières et dont la périodicité n'excède pas un an. Contrairement au principe de l'affectation des charges à l'exercice de leur engagement, ces frais sont comptabilisés de manière définitive ;

- les stocks, y compris les animaux, mais non compris les matières premières et les avances aux cultures, sont évaluées selon une méthode forfaitaire, à partir du cours du jour à la clôture de l'exercice ;

- les exploitants agricoles, relevant du régime simplifié, ne peuvent constituer de provision. Toutefois la loi de finances pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) autorise les exploitants agricoles soumis au régime réel simplifié d'imposition de leurs bénéfices à évaluer, sur option, leurs stocks de spiritueux au prix de revient ou au cours du jour à la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. Lorsque ces stocks sont évalués au prix de revient, ils peuvent donner lieu à la constitution de provisions.

Ainsi donc, deux différences existent actuellement entre le régime réel simplifié et le régime réel normal, différences dont la profession demande aujourd'hui la suppression. Il s'agit :

- de l'évaluation des stocks : estimation d'une partie très importante des stocks de produits finis et d'animaux achetés ou nés sur l'exploitation, non pas d'après le prix de revient, mais selon le cours du jour ; prise ne compte de tous les animaux sans exception. Si les règles en vigueur fonctionnent correctement lorsque les cours sont stables, elles aboutissent, en revanche, en cas de hausse, à taxer de manière " fictive " les exploitants sur des profits latents ;

- du traitement des provisions : l'interdiction, à une exception près introduite par la loi de finances pour 2000, de constituer des provisions est également contestée par les exploitants.

En outre, les règles de comptabilisation des frais généraux sont susceptibles d'introduire des contraintes, en imposant aux sociétés relevant du régime réel simplifié, et dont certains associés relèvent eux du régime normal, de procéder à une double détermination du résultat social, les privant ainsi du bénéfice des simplifications fiscales et comptables prévues par ce régime.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le 1 du paragraphe VII du présent article vise à rendre optionnelles les mesures d'allégement comptable prévues en matière de frais généraux. La comptabilisation des frais généraux selon une comptabilité de caisse cesserait donc d'être une obligation.

Le 2 du VII du présent article vise à rendre optionnelles les modalités actuelles de comptabilisation des stocks en régime simplifié d'imposition, à l'exception des stocks de matières premières achetées et des avances aux cultures, autorisant ainsi les exploitants à comptabiliser leurs stocks selon les règles applicables sous le régime réel normal, c'est-à-dire soit au prix de revient, soit au cours du jour à la clôture de l'exercice si ce cours est inférieur au prix de revient.

Le 2 du VII du présent article autorise également la constitution de provisions. Cette autorisation de provisions introduite ne se limite pas aux provisions pour dépréciation de stock, comme cela était le cas pour les vins et spiritueux, mais a une portée générale.

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté sans modification les dispositions du paragraphe VII du présent article.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Les dispositions proposées par le gouvernement et ayant pour objet de modifier les règles de valorisation des stocks des exploitants relevant du régime réel simplifié et d'autoriser les exploitants soumis à ce régime à constituer des provisions, constituent une avancée notable en faveur des exploitants agricoles et dans le sens d'un rapprochement entre le régime réel normal et le régime réel simplifié.

En outre, la suppression de l'interdiction de constitution de provisions est perçue par votre commission comme un élément appréciable, mais la date d'entrée en vigueur retenue (exercices clos à compter du 1 er janvier 2001) est trop tardive. Elle ne permettra pas aux exploitants de constituer des provisions au titre de l'exercice clos en 2000, exercice qui prend en compte les effets de la tempête de la fin 1999. Il apparaît donc nécessaire d'autoriser les exploitants à constituer des provisions au cours de l'exercice 2000 afin de mieux prendre en compte les effets de la tempête.

VIII. L'ASSOUPLISSEMENT DE LA RÈGLE D'INTANGIBILITÉ DE LA DATE DE CLOTURE D'UN EXERCICE

Le paragraphe VIII du présent article vise à limiter à dix ans la règle d'intangibilité de la date de clôture de l'exercice comptable pour les exploitants agricoles soumis au régime réel, simplifié ou normal, d'imposition.

A. LE DROIT EXISTANT

Selon les dispositions de l'article 73 du CGI, introduit par la loi de finances pour 1984 (n° 83-1179 du 29 décembre 1983), pour l'application du régime du bénéfice réel agricole, normal ou simplifié, les exercices ont une durée de douze mois. La durée de l'exercice comptable ne coïncide donc pas avec l'année civile.

Une fois déterminée, la date de clôture de l'exercice est réputée intangible.

Toutefois trois exceptions existent à cette règle d'intangibilité :

- les exploitants qui passent du régime du forfait ou du régime transitoire (article 68 F du CGI) au régime du bénéfice réel peuvent clore leur premier exercice soumis à ce régime avant le 31 décembre ;

- les exploitants soumis au régime du bénéfice réel dès le début de leur activité peuvent clore leur premier exercice durant l'année civile du début de leur activité ou l'année suivante ;

- les exploitants soumis au régime du bénéfice réel peuvent modifier la date de clôture de leur exercice lorsqu'ils opèrent une reconversion d'activité par suite d'un changement très important de production.

L'intangibilité de la date de clôture d'un exercice trouvait sa justification dans le fait qu'on craignait qu'un changement de date ne favorise l'évasion fiscale. Mais le passage à la comptabilité des créances et des dettes, ainsi que les méthodes d'évaluation des stocks ont fortement diminué ce risque, dès lors la limitation à douze mois de la durée des exercices comptables pour les exploitants soumis au réel ne se justifie, comme le soulignait d'ailleurs nos collègues députés Béatrice Marre et Jérôme Cahuzac dans le rapport relatif à la fiscalité agricole.

S'agissant des bénéfices industriels et commerciaux, les entreprises soumises au régime réel d'imposition ont pour obligation de clore au moins un exercice au cours d'une année civile mais elles sont libres de choisir la date de clôture de cet exercice.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le paragraphe VIII du présent article vise à modifier les dispositions de l'article 73 du CGI dans le sens d'un assouplissement de la règle d'intangibilité de la date de clôture de l'exercice comptable des exploitants agricoles soumis à un régime de bénéfice réel.

Le dispositif proposé par le gouvernement vise en effet à permettre à ces exploitants de modifier la date de clôture de leur exercice :

- soit lorsqu'ils opèrent une reconversion par suite d'un changement très important de production ;

- soit lorsqu'ils ont clôturé à la même date les dix exercices précédents.

Il est également précisé dans le VIII du présent article que ce nouveau dispositif s'applique pour la détermination des résultats des exercices clos à compter du 1 er janvier 2001.

Les quelques 253.000 exploitants soumis au régime réel en 1999 sont concernés par ces dispositions. D'après le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le coût de ce nouveau dispositif serait " négligeable ".

C. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement visant à assouplir le dispositif proposé par le gouvernement en autorisant les exploitants agricoles soumis au régime réel à modifier la date de clôture de leur exercice comptable tous les cinq ans, et non plus tous les dix ans.

D. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime que cet assouplissement de la règle d'intangibilité de la date de clôture de l'exercice comptables des exploitants agricoles est un progrès.

Pourtant, dans un souci de rapprochement encore plus prononcé  entre la fiscalité des bénéfices agricoles et celle des bénéfices industriels et commerciaux, il serait opportun de faire bénéficier les exploitants de la liberté complète de choix de la date de clôture de l'exercice comptable en vigueur pour les entreprises relevant du régime des bénéfices industriels et commerciaux. Cette proposition fait d'ailleurs partie des mesures préconisées par le rapport précité sur la fiscalité agricole.

Les raisons ayant motivé la limitation du choix de clôture de l'exercice des exploitants ont aujourd'hui disparu : les règles comptables applicables aux exploitants agricoles permettent désormais de prévenir le risque d'un décalage de recettes et de dépenses d'un exercice sur l'autre.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 11

Prise en compte de l'inflation pour la détermination des plus-values résultant de la cession d'un fonds de commerce

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de prendre en compte, pour le calcul des plus-values résultant de la vente d'un fonds de commerce possédé depuis plus de cinq ans, l'inflation constaté sur la durée de l'exploitation.

I. LE DROIT EXISTANT

L'article 151 septies du code général des impôts prévoit que la plus-value imposable d'un contribuable exerçant une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale, et qui cède son fonds de commerce est exonérée si les recettes TTC résultant de l'activité n'excèdent par le double de la limite du forfait régi par les articles 64 à 65 A du code général des impôts ou de régimes définis aux articles 50-0 et 102 ter de ce même code (c'est à dire aujourd'hui 350.000 francs pour les entreprises de services et 1.000.000 francs pour les entreprises " d'achat-revente "), à condition notamment que l'activité ait été exercée pendant au moins cinq ans.

Selon le ministère de l'économie et des finances, environ la moitié des commerçants et des artisans seraient susceptibles de bénéficier de cette exonération. Dans le cas contraire, le montant de la plus value est en principe imposé à un taux de faveur, fixé initialement à 16 %, la cession étant par ailleurs soumise à des droits de mutation, à hauteur de 4,80 % depuis la loi de finances initiale pour 2000.

Quand il fut mis en place, se régime se voulait un régime de faveur, permettant aux commerçants de disposer d'un petit pécule au moment de leur départ en retraite. Les avantages de ce régime se sont toutefois singulièrement érodés.

En effet, le montant de la plus-value est déterminé par la différence entre le prix d'achat et le prix de cession, sans actualisation du prix d'achat en fonction de l'inflation. Ainsi, le Trésor public encaisse la plus-value fictive née de l'inflation. Compte tenu de la forte inflation des années 1970 et 1980, cette plus-value fictive peut être importante. Rappelons en effet que les prix à la consommation ont progressé de 18 % seulement depuis 1990, mais de 96 % depuis 1980 et de plus de 400 % depuis 1970.

La plus value fictive représente donc 15 % de la valeur d'un fonds de commerce acquis en 1990, mais 49 % de la valeur d'un fonds de commerce acquis en 1980, et près de 80 % de la valeur d'un fonds de commerce acquis en 1970. Par surcroît, le taux de taxation des plus-values professionnelles à long terme - qui s'établit en principe à 16 % - est passé en réalité à 26 % compte tenu des impositions additionnelles (CSG, CRDS, et prélèvement social).

Le taux de taxation d'une cession de fond de commerce dont la valeur réelle serait constante, s'établit ainsi à 4,7 % pour un fonds de commerce acquis en 1990, mais à 12,7 % pour un fond de commerce acquis en 1980, et à 21 % pour un fonds de commerce acquis en 1970. Cette disposition est ainsi particulièrement pénalisante pour les personnes exploitant leur fond de commerce depuis 20 ou 30 ans, et qui partent aujourd'hui à la retraite alors qu'ils disposent souvent de droits à pension peu élevés.

En outre cette disposition constitue un frein à la cession des fonds de commerce, donc à la transmission d'entreprises et à la mobilité géographique ou sectorielle des exploitants. Par ailleurs, ce régime fiscal est devenu à bien des égards beaucoup moins avantageux que le régime des plus-values immobilières privées pour les entreprises passibles de l'impôt sur le revenu.

Certes, les plus-values de cession de biens immobiliers sont assujetties au barème progressif de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et, compte tenu de la forte progressivité des taux marginaux de l'impôt sur le revenu, cela est a priori moins favorable que le régime de taxation des plus-values professionnelles à long terme, même si la plus-value est imposée selon le système du quotient.

Néanmoins, ce régime se caractérise par les correctifs suivants :

- pour tenir compte de l'érosion monétaire, le prix d'acquisition est revalorisé à l'aide de coefficients de variation de l'indice annuel des prix à la consommation depuis l'acquisition du bien jusqu'à sa vente (article 150 K du code général des impôts) ;

- un abattement est effectué sur la plus-value de cession qui augmente en fonction de la durée de détention du bien cédé (abattement de 5 % par année de possession de l'immeuble au delà de la 2 ème ).

En outre ce régime prévoit des exonérations pour les mutations à titre gratuit et des abattements spécifiques aux expropriations et opérations assimilées, sous condition de réemploi.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Pour faciliter la transmission de fonds de commerce, et répondre à des situations injustes lors du départ à la retraite des exploitants, le présent article propose, à défaut d'une réforme d'ensemble des régimes des plus-values, de prendre en compte l'inflation pour le calcul des plus-values de cession des fonds de commerce possédés depuis plus de cinq ans.

Ce dispositif serait dérogatoire au régime général des plus-values de cession de biens professionnels, qui sont déterminées par la différence entre le prix de vente et le prix d'acquisition, sans correctifs d'aucune sorte.

Cette dérogation se justifie toutefois pleinement, dès lors qu'on ne peut raisonnablement comparer, en l'espèce, les professionnels assujettis à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels ou commerciaux (BIC) ou des bénéfices non commerciaux (BNC), aux contribuables assujettis à l'impôt sur les sociétés.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 11 bis (nouveau)

Harmonisation des droits d'enregistrement pour les cessions de parts des sociétés agricoles

Commentaire : le présent article vise à harmoniser le régime des droits d'enregistrement applicable aux cessions de parts de sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA) à celui en vigueur pour les groupements agricoles d'exploitation en commun (GAEC) et les exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL).

I. LE DROIT EXISTANT

Dans le droit en vigueur, il existe deux régimes distincts de taxation des cessions de parts des sociétés agricoles :

- les cessions de parts de sociétés civiles d'exploitation agricole (SCEA) sont taxées au taux de 4,80 %, d'après les dispositions de l'article 726 du CGI ;

- les cessions de parts de groupements d'exploitation en commun (GAEC) et d'exploitations agricoles à responsabilité limitée (EARL) sont taxées au droit fixe de 500 francs, lorsqu'elles ne sont pas corrélatives à la cession au même acquéreur de parts représentatives du fonds exploité, d'après les dispositions de l'article 730 bis du code général des impôts (CGI).

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à harmoniser les droits d'enregistrement pour les cessions de parts des sociétés agricoles, qu'il s'agisse de SCEA, de GAEC ou de EARL.

Cette mesure faisait partie des propositions du rapport de nos collègues députés Béatrice Marre et Jérôme Cahuzac relatif à la réforme de la fiscalité agricole.

Il est proposé de modifier les dispositions de l'article 730 bis du CGI de telle sorte que désormais, les cessions de gré à gré de parts de GAEC, d'EARL et de sociétés civiles à objet principalement agricole soient enregistrées au droit fixe de 500 francs. Dès lors les cessions de parts de l'ensemble des sociétés agricoles seront soumises au même droit fixe de 500 francs, quel que soit le type d'apport qu'elles représentent .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission est favorable à cette mesure d'harmonisation du régime de taxation des cessions de parts des sociétés agricoles.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11 ter (nouveau)

Autorisations temporaires de vente de boissons alcoolisées sur les stades, dans les salles d'éducation physique, les gymnases et les établissements d'activités physiques et sportives ainsi que lors des manifestations publiques organisées par des associations

Commentaire : le présent article vise à réparer l'oubli de certaines dispositions législatives à l'occasion de la codification du code de la santé publique et à simplifier le régime d'autorisation pour l'ouverture temporaire de débits de boissons.

I. REPONDRE A UNE SITUATION JURIDIQUE MAL DÉFINIE

A. L'OUBLI DE DISPOSITIONS LÉGISLATIVES DANS LA CODIFICATION DU CODE DE LA SANTÉ PUBLIQUE

Le présent article vise à clarifier le droit en vigueur. Le code des débits de boissons a été, par ordonnance de codification 73 ( * ) , intégré dans le code de la santé publique. Cependant, certaines dispositions législatives n'ont pas été intégrées dans ce code. En effet, l'article 21 de la loi de finances rectificative pour 1998 (buvettes sportives), ainsi que l'article 15 de la loi de finances rectificative pour 2000 (buvettes des associations), ont été " oubliés " lors de la retranscription du code des débits de boissons dans le code de la santé publique. Pour les buvettes sportives, les modifications introduites par la loi de finances pour 1998, bien qu'intégrées dans le code des débits de boissons, ont été omises dans le nouveau code de la santé publique. Pour les associations, l'oubli s'explique par le fait que le code de la santé publique a été publié quelques semaines seulement après la promulgation de la loi de finances rectificative pour 2000.

Plusieurs amendements ont donc été présentés à l'Assemblée nationale afin d'intégrer purement et simplement les dispositions dans le code de la santé publique, ou apportant éventuellement quelques modifications au dispositif en vigueur.

B. LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES EN CAUSE

1. La dérogation à l'interdiction de vente d'alcool dans les stades, dans les salles d'éducation physique et les établissements d'activités physiques et sportives

La loi Evin du 10 janvier 1991 avait posé le principe de l'interdiction de vente d'alcool dans les stades , les salles d'éducation physique, les gymnases et d'une manière générale, dans tous les établissements d'activités physiques et sportives (premier alinéa de l'article L. 49-1-2 du code des débits de boissons). Il s'agissait alors de lutter contre une pratique qui s'était développée en violation des dispositions de l'article L. 49-5 du code des débits de boissons, celui-ci prévoyant déjà un périmètre autour de certains établissements (hôpitaux, établissements scolaires, stades et terrains de sport) avec l'interdiction d'installer tout débit de boissons.

La loi Evin avait toutefois prévu que le préfet pouvait, dans des conditions fixées par décret, accorder des dérogations temporaires à ces interdictions, pour des raisons liées à des événements de caractère sportif, agricole ou touristique (3ème alinéa de l'article L. 49-1-2 du code des débits de boissons).

Le décret n° 92-880 du 26 août 1992 a donc permis au préfet d'accorder des autorisations dérogatoires temporaires, d'une durée de quarante-huit heures au plus, dans la limite d'une autorisation annuelle pour chacun des groupements sportifs qui en fait la demande.

Plusieurs parlementaires avaient considéré qu'une autorisation annuelle était insuffisante, compte tenu du fait que les buvettes représentaient environ un tiers des recettes des clubs sportifs. Aussi, lors de l'examen de la loi du 28 mai 1996 portant diverses dispositions d'ordre social, un amendement autorisant la vente d'alcool dans les stades vingt week-ends par an avait été adopté par l'Assemblée nationale. Mais il n'avait finalement pas été retenu en commission mixte paritaire, suite à son rejet par le Sénat.

Peu après cette discussion, le décret n° 96-704 du 8 août 1996 a porté la limite des autorisations dérogatoires à dix autorisations annuelles . Or, cette modification a été annulée par le Conseil d'Etat , qui a considéré que ce texte réglementaire altérait la porté de l'interdiction édictée par la loi Evin et avait ainsi " méconnu l'objectif poursuivi par le législateur ".

Lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 1998, un amendement présenté par notre collègue Michel Charasse a proposé de rétablir le dispositif prévu par le décret de 1996, permettant aux clubs de bénéficier de 10 autorisations annuelles de vente de boissons alcoolisées. Le Sénat a voté cet amendement, en rapportant cependant le nombre de dérogations de 10 à 5. L'article a été repris par l'Assemblée nationale, qui a rétabli à 10 le nombre des dérogations.

2. Les autorisations temporaires de vente d'alcool lors de manifestations publiques organisées par des associations

L'article L. 31 du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme prévoyait que toute personne qui veut ouvrir un café, un cabaret, un débit de boissons à consommer sur place est tenue de faire, quinze jours au moins à l'avance et par écrit, une déclaration à la mairie de la commune, ou, à Paris, à la préfecture de police. Le maire de la commune doit ensuite transmettre copie de cette déclaration au préfet et au procureur de la République.

L'article L. 48 du même code prévoyait cependant une dérogation à cette obligation de déclaration pour " les individus qui, à l'occasion d'une foire, d'une vente ou d'une fête publique, établissent des cafés ou débits de boissons ", puisqu'ils doivent obtenir l'autorisation de l'autorité municipale. La Cour de cassation avait interprété cette dérogation de manière restrictive, en considérant qu'elle ne concernait que les manifestations limitativement énumérées par l'article, excluant notamment les fêtes patronales organisées par les associations.

L'article 15 de la loi de finances rectificative pour 2000 a complété l'article L. 48 du code des débits de boissons et des mesures contre l'alcoolisme en élargissant la dérogation à l'obligation de déclaration prévue par cet article. Il permet à toute association de solliciter l'autorisation de l'autorité municipale afin d'établir un débit de boissons, dans la limite de cinq autorisations par association et par an. Ce dispositif visait donc à simplifier le régime applicable aux associations, qui ne sont désormais plus contraintes d'aller devant le préfet ou le procureur de la République pour solliciter une autorisation temporaire d'ouverture d'un débit de boissons.

Cependant, cet article a maintenu un régime d'autorisation préalable, en transférant la décision du préfet au maire, en tant que représentant de l'Etat sur le territoire de la commune. Il a fixé de surcroît une limite absolue de cinq autorisations par association et par an. Un droit de timbre symbolique de 10 francs par autorisation a enfin été institué, afin d'éviter que l'article constitue un " cavalier budgétaire " et soit en conséquence censuré par le Conseil constitutionnel.

II. LE TEXTE VOTÉ À L'ASSEMBLÉE NATIONALE CLARIFIE LA SITUATION JURIDIQUE ET SIMPLIFIE LE DISPOSITIF EN VIGUEUR

Le texte voté à l'unanimité par l'Assemblée nationale inscrit dans le code de la santé les dispositions législatives dont la transcription avait été omise lors de la codification. Il propose également, notamment à l'initiative du gouvernement, une simplification du dispositif en vigueur.

A. LA SUPPRESSION DU DROIT DE TIMBRE

A l'initiative du gouvernement, le droit de timbre de 10 francs est supprimé. Ce droit de timbre symbolique entraînait en effet des coûts de gestion largement supérieurs à la recette qu'il procurait, et ne constituait pas un élément essentiel du dispositif législatif. Il avait en effet été institué afin d'éviter que le texte ne soit censuré par le Conseil constitutionnel comme un " cavalier budgétaire ".

Sa suppression proposée par le gouvernement constitue donc une simplification utile, tant vis-à-vis des associations que des services de l'Etat chargés de sa perception.

B. LA SUPPRESSION DU RÉGIME DE DÉCLARATION AUX DOUANES

A l'initiative du gouvernement, l'article 502 du code général des impôts est complété par un alinéa précisant que " les personnes ou associations qui établissent des débits de boissons temporaires (...) en vertu d'une autorisation municipale (...) ne sont pas soumises à l'obligation déclarative prévue par le présent article ".

L'article 502 du code général des impôts prévoit en effet que " les cabaretiers, aubergistes, traiteurs (...), et, en général, les personnes qui veulent se livrer à la vente au détail d'alcools, ou à celle de boissons ne provenant pas de leur récolte doivent, avant de commencer leurs opérations, en faire la déclaration à l'administration et désigner le lieu de vente, les espèces et quantités de boissons possédées en ce lieu et dans le canton et les communes limitrophes du canton dans lequel est situé l'établissement. Les boissons ainsi déclarées sont prises en charge à titre imposable, sauf justification du paiement antérieur des droits ".

La déclaration aux services des douanes constituait en fait une simple formalité : l'association qui souhaitait ouvrir une buvette transmettait au service des douanes une copie de la demande d'autorisation envoyée au maire ou au préfet. La direction générale des douanes est en effet compétente pour contrôler les débits de boissons. Dans les faits, le contrôle de ces débits de boissons temporaires était rarement effectué par les services des douanes, et la déclaration adressée à eux n'avait guère intérêt. Elle constituait, au contraire, une charge de travail supplémentaire en produisant un volume de papier largement inutile.

La suppression de la déclaration aux services des douanes pour l'ouverture d'un débit de boissons temporaire constitue donc une simplification tant pour le demandeur que pour l'administration elle-même. Elle n'a pas d'autre effet particulier, puisque le service des douanes demeure évidemment compétent en matière de contrôle des débits de boissons.

Cependant, dans les faits, le contrôle des débits de boissons temporaires relève essentiellement de la police municipale ou de la gendarmerie.

C. LE RÉGIME D'AUTORISATION PRÉABLABLE EST MODIFIÉ AU PROFIT DU MAIRE

Le III du présent article propose de confier au maire, en tant que représentant de l'Etat sur le territoire de la commune, et non au préfet, le soin d'apprécier l'opportunité d'accorder les autorisations temporaires de vente d'alcool, y compris pour les buvettes sportives. En effet, le maire est parfaitement à même d'apprécier le contexte local et les risques potentiels de la délivrance d'une telle autorisation sur la santé et sur la sécurité publique.

Tableau récapitulatif des modifications apportées par le présent article

Droit en vigueur

Propositions du présent article 74 ( * )

Buvettes sportives

Autorisation d'ouverture par le Préfet

Autorisation d'ouverture par le Maire

Déclaration du débitant de boissons au service des douanes

Suppression de la déclaration du débitant de boissons au service des douanes

10 ouvertures par an autorisées

10 ouvertures par an autorisées

Droit de timbre de 10 francs par autorisation

Suppression du droit de timbre

Boissons autorisées : les trois premiers groupes du code de la santé

Boissons autorisées ; les trois premiers groupes du code de la santé publique

Buvettes à l'occasion des kermesses, fêtes d'associations....

Autorisation d'ouverture par le Maire

Autorisation d'ouverture par le Maire

Droit de timbre de 10 francs par autorisation

Suppression du droit de timbre

Boissons autorisées : les 2 premiers groupes du code de la santé publique (jusqu'aux vins, bières, cidres et poirés)

Boissons autorisées : les 2 premiers groupes du code de la santé publique (jusqu'aux vins, bières, cidres et poirés)

5 ouvertures par an autorisées

5 ouvertures par an autorisées

Déclaration du débitant de boissons au service des douanes

Suppression de la déclaration du débitant de boissons au service des douanes

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général considère que le présent article permet de réparer un oubli pour le moins surprenant et, en conséquence, de clarifier le droit en vigueur en évitant tout risque de mauvaise interprétation du droit.

Il se félicite de la suppression du droit de timbre de dix francs. En effet, son caractère symbolique ne justifiait pas la complication qu'il entraînait, et notamment, son coût de gestion pour les pouvoirs publics. Il en va de même pour l'obligation de déclaration aux services des douanes, qui n'était d'aucune utilité.

Votre rapporteur général considère également que la modification du régime déclaratif apparaît comme une mesure de bon sens consistant à confier la responsabilité de l'autorisation au maire, qui peut évaluer au mieux les éventuels troubles à l'ordre public qu'un tel établissement est susceptible de provoquer.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12

Création d'un nouveau dispositif d'aide à l'investissement outre-mer

Commentaire : le présent article propose la création d'un nouveau dispositif d'aide à l'investissement outre-mer, qui replacerait à partir du 1 er janvier 2001 le dispositif actuellement en vigueur.

I. PRESENTATION GÉNÉRALE DU NOUVEAU DISPOSITIF

Le dispositif actuel d'aide à l'investissement outre-mer est issu de la loi de finances rectificative du 11 juillet 1986, dite " loi Pons ", modifiée successivement par la loi de finances pour 1992, par la loi de finances rectificative pour 1993, puis par les lois de finances pour 1994, 1996, 1998 et 1999.

Ce dispositif se compose en fait de trois mesures de défiscalisation des investissements réalisés outre-mer :

- l'article 163 tervicies du code général des impôts permet aux contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu de déduire de leur revenu net global le montant des investissements productifs , diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique, qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (DOM), les territoires d'outre-mer (TOM), et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, dans un des secteurs socioprofessionnels considérés comme prioritaires pour l'économie des départements, territoires et collectivités précités ;

- l'article 199 undecies du code général des impôts prévoit une réduction d'impôt sur le revenu pour les contribuables qui investissement dans la construction ou dans l'acquisition de logements neufs dans ces mêmes départements, territoires et collectivités, en vue de les affecter à leur habitation principale ou de les louer nus à usage d'habitation principale du locataire pendant au moins cinq ans. Cette réduction est étendue à la souscription de parts de sociétés ayant le même objet, et elle est majorée pour les investissements locatifs dans le secteur intermédiaire ;

- enfin, les articles 217 undecies et 217 duodecies du code général des impôts permettent aux entreprises assujetties à l'impôt sur les sociétés (IS) de déduire de leur résultat imposable le montant de leurs investissements physiques dans les secteurs jugés prioritaires des départements, territoires et collectivités précités, d'une part, le montant de leurs investissements dans l'immobilier locatif intermédiaire de ces mêmes zones, d'autre part.

A l'occasion de la loi de finances pour 1999, qui avait prolongé ces mesures jusqu'au 31 décembre 2002, le gouvernement s'était engagé à proposer un nouveau dispositif d'incitation fiscale à l'investissement outre-mer avant pour le 1 er janvier 2002.

Tel est l'objet du présent article.

Cet article résulte largement des réflexions d'un groupe de travail réunissant les administrations du ministère de l'économie et des finances et du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, des professionnels locaux et des " monteurs " en financement externalisé.

Le nouveau dispositif, qui s'appliquerait aux investissements réalisés entre le 1 er janvier 2001 et le 31 décembre 2006, comporte sept novations majeures :

- la principale novation consiste à remplacer, pour les contribuables soumis à l'impôt sur le revenu, l'actuel régime de déduction du revenu net global prévue à l'article 163 tervicies par une réduction d'impôt égale à 50 % ou à 60 % de l'investissement, qui serait codifiée dans un nouvel article 199 undecies B ;

- par ailleurs, le nouveau dispositif prévoit un régime d'exception particulièrement favorable pour les investisseurs " professionnels " des départements d'outre-mer, c'est à dire les investisseurs " domiens " participant à l'exploitation ;

- le nouveau dispositif prévoit également, s'agissant des investissements productifs, un taux de rétrocession minimum de l'avantage fiscal aux opérateurs locaux , à hauteur de 60 % pour les personnes physiques et de 75 % pour les assujettis à l'IS. Selon le gouvernement, ces taux correspondent aux taux déjà appliqués, en pratique, pour les investissements soumis à l'agrément de l'administration fiscale ;

- le périmètre des investissements éligibles serait modifié. D'un côté, le secteur de la croisière (mais pas de la plaisance) en serait exclu ; de l'autre, seraient désormais éligibles l'ensemble des activités de maintenance , les services informatiques (à la suite d'un amendement introduit par le gouvernement à l'Assemblée nationale), les logiciels nécessaires à l'utilisation des investissements éligibles et la rénovation d'hôtel ;

- les investissements productifs réalisés dans les secteurs éligibles en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna par les contribuables soumis à l'impôt sur le revenu ouvriraient droit à une réduction d'impôt plus élevée, à hauteur de 60 % du montant de l'investissement, contre 50 % dans les autres DOM, TOM et en Nouvelle-Calédonie. Cette disposition introduit donc une discrimination positive en faveur de la Guyane, de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon et de Wallis-et-Futuna  ;

- les souscriptions réalisées par des entreprises assujetties à l'IS au capital d'entreprises en difficulté seraient désormais éligibles, même si ces dernières ont déjà bénéficié d'investissements défiscalisés, et même si ces souscriptions ne sont pas affectées à des investissements productifs. Cette novation vise à favoriser le soutien aux entreprises en difficulté ;

- enfin, les paramètres (taux, plafonds, éligibilité) de la réduction d'impôt sur le revenu pour les investissements dans le secteur du logement seraient modifiés.

Pour le reste, le dispositif proposé par le présent article reprend largement l'architecture, sinon la rédaction, des dispositions existantes. Votre rapporteur général en présentera donc le détail en s'attachant à mettre en évidence les différences avec les régimes de défiscalisation actuels.

II. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LE NOUVEAU DISPOSITIF

A. LE NOUVEAU RÉGIME DE RÉDUCTION D'IMPÔT SUR LE REVENU POUR INVESTISSEMENT DANS LE SECTEUR DU LOGEMENT

Le A du I de l'article 12 propose d'insérer dans le code général des impôts un nouvel article 199 undecies A, instituant un nouveau régime de réduction d'impôt sur le revenu pour les investissements dans le secteur du logement.

Comme l'ancien dispositif, ce régime s'appliquerait aussi bien aux investissements directs, qu'aux investissements qui prennent la forme de souscription de parts ou d'actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs situés dans les DOM, TOM et collectivités précitées, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie, et donnés en nue location pendant au moins cinq ans à des personnes qui en font leur habitation principale.

La rédaction du nouveau dispositif reproduit d'ailleurs largement celle du dispositif de l'article 199 undecies, dont il prendrait la suite pour les investissements réalisés à compter du 1 er janvier 2001 .

Les dispositions du 2 (relatif à l'assiette de la déduction), du 4 (agrément au delà de 30 millions de francs), du 6, 1 er alinéa (fixant le taux de la réduction à 25 % de la base pour les investissements ordinaires), du 7, 1 er alinéa (sanctions) et du 7, 3 ème alinéa (bénéfice de la réduction d'impôt pour les immeubles neufs loués, dans des conditions fixées par décret, à un organisme public ou privé pour le logement à usage d'habitation principale de son personnel, à l'instar des lois " Méhaignerie " et " Quilès "  en métropole), sont ainsi identiques aux dispositions de l'actuel article 199 undecies .

La réduction d'impôt serait donc toujours égale à 25 % de l'investissement, étalés sur cinq années consécutives, soit 5 % de l'investissement initial chaque année à compter de l'acquisition ou de la souscription de parts ou d'actions.

La nouveau dispositif comporterait toutefois les novations détaillés ci-dessous.

• La rédaction proposée tient compte de la loi du 19 mars 1999 portant réforme du statut de la Nouvelle-Calédonie .

• Le 1 de l'article 199 undecies A (nouveau) limite la réduction d'impôt aux seuls contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts, c'est à dire les résidents.

Sont donc désormais exclus du dispositif les personnes domiciliées fiscalement dans les TOM, en Nouvelle-Calédonie ou dans les collectivités de Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, même s'ils sont imposés sur le revenu en France à raison de revenus de source française.

• La rédaction du 2, qui définit l'assiette de l'investissement éligible, oblige désormais l'investisseur ou bien à prendre l'engagement d'affecter l'immeuble, dès l'achèvement ou dès l'acquisition si elle est postérieure, à son habitation principale pendant une durée de cinq ans (alinéa 2b) ; ou bien de le louer nu pendant cinq ans au moins à des personnes, autres que son conjoint ou les membres de son foyer fiscal, qui en font leur habitation principale (alinéa 2 b).

Contrairement aux dispositions de l'article 199 undecies , cette nouvelle rédaction ne permet donc pas à l'acquéreur d'alterner l'affectation de l'immeuble pendant les cinq années requises (habitation principale puis location), ni de louer à son conjoint ou à des membres de son foyer fiscal .

Cette seconde exclusion, inspirée de la " loi Besson " , est d'ailleurs reprise dans le 2 d relatif aux souscriptions de part de sociétés civiles.

• Le 3 exclut du champ de la réduction d'impôt les immeubles et les parts de société dont le droit de propriété est démembré , tout en prévoyant que " lorsque le transfert de la propriété des immeubles, parts ou actions, ou le démembrement du droit de propriété résulte du décès de l'un des époux soumis à imposition commune, le conjoint survivant attributaire de l'immeuble, des parts ou actions, ou titulaire de leur usufruit peut demander la reprise à son profit, dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, du bénéfice de la réduction d'impôt pour la durée restant à courir à la date du décès ".

• De manière similaire, le deuxième alinéa du 7 légalise un assouplissement administratif de bon sens, en prévoyant que le décès du contribuable ou de l'un des époux soumis à imposition commune au cours d'une des années suivant celle où le droit à réduction d'impôt est né, n'a pas pour conséquence la reprise des réductions d'impôt pratiquées.

• Le 5 plafonne à 10.000 francs par mètre carré de surface habitable le montant pris en compte pour les réductions d'impôt prévues au 2 a, c'est à dire les réductions d'impôt pour la construction d'un immeuble neuf à usage d'habitation principale.

Précisons que les habitations principales d'un coût plus élevé ne sont pas entièrement exclues du dispositif, puisque les sommes versées pour leur construction seront prises en compte à hauteur de ce plafond 10.000 francs par mètre carré pour le calcul de la réduction d'impôt. En outre, ce plafond ne s'applique pas aux constructions à usage locatif.

• Le 6, 1 er alinéa corrige une erreur rédactionnelle de l'actuel article 199 undecies, en prévoyant que la réduction d'impôt a pour base annuelle 20 % " des sommes effectivement payées au 31 décembre de l'année au cours de laquelle le droit à réduction d'impôt est né ", c'est à dire où ont eu lieu la souscription ou l'acquisition, et non plus " 20 % des sommes effectivement payées à la date où le droit à réduction d'impôt est né ", ce qui n'avait guère de sens lorsque le paiement de l'acquisition ou de la souscription était décalé.

• Enfin, le 6, 3 ème alinéa fixe le taux de la réduction d'impôt à 40 % dans le cas des investissements dans le secteur locatif intermédiaire , dont la définition est toujours précisée par décret.

Pour les investissements dans le secteur locatif intermédiaire la réduction d'impôt serait donc égale à 40 % de l'investissement total, étalés sur cinq années consécutives, c'est à dire 8 % de l'investissement initial chaque année à compter de l'acquisition ou de la souscription de parts ou d'actions.

Rappelons que l'article 199 undecies prévoit actuellement que la réduction d'impôt est portée à 50 % de la base (soit 10 % de l'investissement), pour les années 1996 à 2001, le taux de 25 % (soit 5 % de l'investissement) s'appliquant à partir de 2002.

Il résulte de cette rédaction complexe que le taux effectif de réduction d'impôt devait diminuer de 50 % pour des investissements réalisés en 1996 ou en 1997, à 45 % pour les investissements réalisés en 1998, à 40% pour les investissements réalisés en 1999, à 35 % pour les investissements réalisés en 2000, à 30 % pour les investissements réalisés en 2001 et à 25 % pour les investissements réalisés en 2002.

Le dispositif initialement proposé par le gouvernement propose de mettre fin dès l'an 2000 au caractère dégressif de l'avantage et de fixer le taux de la réduction d'impôt à un niveau plus avantageux (40 %) que celui qui est actuellement prévu sur la période 2000-2002 (de 35 % à 25 %).

S'agissant des investissements effectués en l'an 2000 , l'Assemblée nationale a toutefois estimé que le dispositif proposé par le gouvernement se traduisait par un effet d'aubaine fiscale pour les investissement déjà réalisés en 2000 (cf. tableaux infra).

L'Assemblée nationale a donc adopté, à l'initiative de son rapporteur général et contre l'avis du gouvernement, un amendement modifiant le 7 du D du présent article de manière à repousser l'entrée en vigueur du nouveau dispositif aux investissements effectués à partir du 1 er janvier 2001.

Réduction d'impôt pour un investissement dans le secteur locatif intermédiaire en l'an 2000.

Tableau 1 : dispositif actuel, prolongé par l'Assemblée nationale

2000

2001

2002

2003

2004

Taux effectif total de la réduction d'impôt

Base (en %)

20

20

20

20

20

Taux (en %)

50

50

25

25

25

Réduction d'impôt apparente (en %)

10

10

5

5

5

35%

Réduction d'impôt actualisée à 6%

32,03%

Tableau 2 : dispositif initialement proposé le gouvernement

2000

2001

2002

2003

2004

Taux effectif total de la réduction d'impôt

Base (en %)

20

20

20

20

20

Taux (en %)

40

40

40

40

40

Réduction d'impôt apparente (en %)

8

8

8

8

8

40%

Réduction d'impôt actualisée à 6%

35,72%

On peut cependant noter qu'une large part des investissements, notamment des souscriptions de parts ou d'actions, s'effectue en fin d'année .

Comme l'a souligné le gouvernement, l'amendement retenu par l'Assemblée nationale pourrait donc " être de nature à inciter les personnes physiques à retarder jusqu'en 2001 leurs investissements physiques dans le seul but de bénéficier d'un taux plus élevé de réduction d'impôt ", ce qui " s'avérerait préjudiciable à un secteur aussi sensible qu'est le logement intermédiaire ".

B. LE NOUVEAU RÉGIME DE RÉDUCTION D'IMPÔT SUR LE REVENU POUR LES INVESTISSEMENTS PRODUCTIFS OUTRE-MER

Le A du I du présent article insère dans le code général des impôts un nouvel article 199 undecies B, qui fixe le régime de réduction d'impôt sur le revenu pour les investissements productifs outre-mer, c'est à dire dans les DOM, les TOM, en Nouvelle-Calédonie et les collectivités territoriales de collectivités de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, se substituant à la déduction du revenu imposable actuellement prévue par l'article 163 tervicies .

La rédaction du nouveau dispositif s'inspire largement de celle du régime actuel. En particulier :

- le I, 4 ème alinéa prévoit, comme dans l'actuel article 163 tervicies , la possibilité de réaliser des investissements par l'intermédiaire d'une société de personnes, d'un groupement d'intérêt économique (GIE) ou d'un groupement européen d'intérêt économique ;

- les 8 ème , 9 ème et 10 ème alinéas reprennent, en les adaptant, les dispositions de l'actuel article 163 tervicies relatives aux sanctions en cas de non respect de l'engagement de conservation des investissements physiques, des parts ou des actions.

Néanmoins, le nouveau régime comporte plusieurs innovations importantes.

• En premier lieu, comme celle du nouveau dispositif relatif aux investissements immobiliers, la rédaction du nouveau dispositif relatif aux investissements productifs tient compte de la loi du 19 mars 1999 portant réforme du statut de la Nouvelle-Calédonie , et limite la réduction d'impôt aux seuls contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts, c'est à dire les résidents.

• Par ailleurs, les 1 er et 2 ème alinéas du I du nouvel article 199 undecies B, qui définissent les activités dans lesquelles les investissements peuvent ouvrir droit à réduction d'impôt :

- excluent désormais le secteur de la navigation de croisière . En effet, les incitations fiscales aux investissements dans ce secteur sont considérées comme extrêmement coûteuses, et peu porteuses pour l'emploi local, les navires ainsi subventionnés relâchant peu dans les ports français d'outre-mer. En revanche, le secteur de la navigation de plaisance est toujours éligible .

- incluent désormais l'ensemble des activités de maintenance au profit des activités exercées dans l'un des secteurs éligibles (alors que l'ancienne rédaction n'incluait que la maintenance au profit des activités industrielles) ;

- incluent désormais les services informatiques , sur agrément au premier franc, comme il est précisé au II 2 du présent article. Cette extension résulte d'un amendement introduit par le gouvernement lors des débats à l'Assemblée nationale.

Précisons que, selon le gouvernement, la notion de services informatiques recouvre la gestion et la maintenance informatiques, la création de logiciels, la fourniture d'accès à Internet, l'hébergement de sites et la création de services en ligne ;

- incluent les travaux de rénovation d'hôtel , lorsque ces travaux constituent des éléments de l'actif immobilisé, et sur agrément au premier franc comme il est précisé au II 2 du présent article, alors que l'ancienne rédaction limitait en pratique les investissements éligibles aux seuls travaux de reconstruction.

Notons toutefois que la rédaction proposée n'étend pas le bénéfice de l'incitation fiscale aux travaux de rénovation de résidences touristiques ou para-hôtelières, dont seule la construction demeure éligible.

Cette différence s'explique par le fait que les résidences touristiques ou para-hôtelières seraient mieux entretenues.

Par ailleurs, la nouvelle rédaction :

- étend le bénéfice de l'incitation fiscale aux logiciels " qui constituent des éléments de l'actif immobilisé et qui sont nécessaires à l'utilisation des investissements éligibles " ;

- précise que les investissements nécessaires à l'exploitation d'une concession de service public local à caractère industriel ou commercial doivent constituer des éléments de l'actif immobilisé pour être éligibles ;

- à l'initiative de l'Assemblée nationale, précise que les investissements productifs concernés doivent être " neufs ".

• Le I, 3 ème alinéa remplace l'actuelle déduction de la base imposable de l'article 163 tervicies par une réduction d'impôt de 50 % de la base imposable , dont la définition est inchangée : " le montant des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique ".

Par ailleurs, cet alinéa porte le taux de la réduction d'impôt à 60 % :

- pour les investissements réalisés dans les secteurs éligibles en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna. Cette discrimination positive est justifiée selon le gouvernement par les difficultés particulières de ces département, territoire et collectivités, et par la faible ampleur des flux d'investissements défiscalisés dont ils ont bénéficiés ;

- pour les travaux de rénovation d'hôtel . Cet avantage particulier aux travaux de rénovation par rapport aux travaux de construction vise à freiner le développement de " friches hôtelières " sur le littoral des départements, territoires et collectivités d'outre-mer.

• Alors que la réduction d'impôt est toujours pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé, le 6 éme alinéa prévoit un dispositif complexe de double plafonnement des contribuables non professionnels.

Les contribuables non professionnels sont ceux qui, dans le cadre de l'activité ayant ouvert droit à réduction, ne participent pas à l'exploitation au sens du 1 bis de l'article 156 du code général des impôts (notamment une participation personnelle, continue et directe de l'un des membres du foyer fiscal à l'activité).

Pour ces contribuables, notamment métropolitains :

- le montant de la réduction d'impôt ne peut excéder, au titre d'une année, 50 % de l'impôt dû avant application de celle-ci et avant imputation de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires ;

- l'excédent éventuel peut être imputé sur l'impôt dû de l'année suivante exclusivement, dans la limite de 50 % de l'impôt dû au titre de cette année suivante, ce montant étant diminué, le cas échéant, de la réduction d'impôt afférente aux investissements outre-mer de cette même année.

Cette rédaction complexe, qui résulte notamment de deux amendements adoptés par l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur général, vise à ce que l'impôt dû ne puisse plus être effacé par le dispositif qu'à hauteur de 50 % de l'impôt dû avant imputation de l'avoir fiscal, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires, et ce, chaque année.

Par exemple, soit un investisseur dont l'impôt dû, au titre de la première année est de 500.000 francs, et qui réalise un investissement à hauteur de 900.000 francs, ouvrant droit a priori à une réduction d'impôt totale de 450.000 francs :

- la première année, la réduction d'impôt sera plafonnée à hauteur de 250.000 francs, mais le contribuable pourra bénéficier d'un report de réduction d'impôt à hauteur de 200.000 francs sur la seconde année ;

- si l'impôt dû au titre de la seconde année est toujours de 500.000 francs, ce contribuable pourra donc bénéficier d'une réduction d'impôt de 200.000 francs au titre de ce report. En outre, s'il réalise un nouvel investissement défiscalisé, il ne pourra bénéficier au titre de la seconde année que d'une réduction d'impôt supplémentaire de 50.000 francs, l'excédent éventuel étant imputable sur l'année suivante exclusivement ;

- en revanche, si l'impôt du au titre de la seconde année n'est plus que 350.000 francs, le contribuable ne pourra imputer que 175.000 francs au titre du report de réduction d'impôt. La différence, soit 25.000 francs, est définitivement perdue.

Ce système complexe contraindra donc les investisseurs à une gestion fine du dispositif en fonction de leur situation fiscale prévisible s'ils veulent en bénéficier au maximum.

• Le 7 ème alinéa prévoit en revanche un régime d'exception particulièrement favorable pour les investisseurs " professionnels ", c'est à dire pour les contribuables des départements d'outre-mer qui participent à l'exploitation.

En effet, pour les investisseurs professionnels, si le montant de la réduction d'impôt excède l'impôt dû, cet excédent constitue une créance sur l'Etat d'égal montant, imputable sur l'impôt sur le revenu dû au titre des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement et remboursable à l'expiration de cette période dans la limite d'un montant d'investissement de 10 millions de francs.

Ce régime est à bien des égards beaucoup plus favorable que le régime actuel , qui traite l'investissement des entreprises soumises à l'impôt sur le revenu comme un déficit reportable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), mais non remboursable .

Notons que le nouveau régime est d'autant plus favorable que le plafond de 10 millions de francs s'apprécie à raison de l'investissement initial, et non pas contribuable par contribuable. Un même contribuable pourrait ainsi recevoir la même année plusieurs chèques du Trésor public.

• Enfin, le 11 ème et dernier alinéa du I élève au niveau législatif la possibilité pour des assujettis à l'impôt sur le revenu d'investir dans le cadre de montages locatifs . Ces montages, de fait devenus la norme depuis la " détunnelisation des déficits " opérée par la loi de finances pour 1998, sont définis au C du présent article (cf. infra).

En outre, ce même alinéa prévoit, s'agissant des montages locatifs, qu'au moins 60 % de la réduction d'impôt doit être rétrocédée à l'entreprise locataire (c'est à dire à l'exploitant local) sous forme de diminution de loyer et, le cas échéant, de diminution prix de cession du bien à l'exploitant, sous peine de reprise de la réduction d'impôt.

Rappelons que le taux de rétrocession est déjà, pour les projets soumis à agrément , l'un des critères retenus par l'administration fiscale.

En effet la loi inclut l'intérêt du projet pour l'économie locale parmi les critères de délivrance de l'agrément. Sur ce fondement, l'administration fiscale est conduite à rejeter des projets juridiquement au point et ne posant pas de problèmes économiques en soi, mais qui ne favorisent pas assez l'opérateur local.

Par ailleurs, selon la direction générale des impôts, le taux de rétrocession proposé (60 %) correspond, en pratique, aux taux proposés dans les projets soumis à l'agrément de l'administration fiscale en raison de leur montant élevé (plus de 2 millions de francs si l'investisseur n'est pas l'exploitant) ou de ce qu'ils interviennent dans des secteurs jugés sensibles, comme la pêche, la navigation de plaisance, la construction d'hôtel ou de résidences à vocation touristique ou para-hôtelière, les transports, la production et la diffusion audiovisuelle ou cinématographique ou l'exploitation d'une concession de service public à caractère industriel et commercial, c'est à dire des secteurs en risque de surcapacité et/où les risques sont plus élevés pour les investisseurs.

Néanmoins, le niveau satisfaisant du taux de rétrocession est, à ce jour, apprécié en opportunité par l'administration.

En outre, aucun taux de rétrocession n'est actuellement imposé pour les projets qui ne sont pas soumis à agrément.

Les taux de rétrocession pratiqués pour les investissements qui ne sont pas soumis à agrément, c'est à dire notamment les investissements en montage locatif de moins de deux millions de francs dans le secteur industriel ou la maintenance, sont donc mal connus, et la fixation de taux de rétrocession minima constitue une contrainte nouvelle pour ce type d'investissements en montage locatif.

C. LES AMÉNAGEMENTS APPORTÉS AU RÉGIME DE DÉDUCTION DU RÉSULTAT IMPOSABLE POUR LES INVESTISSEMENTS OUTRE-MER DES ENTREPRISES SOUMISES À L'IMPÔT SUR LES SOCIÉTÉS

Le C du présent article propose divers aménagements du régime, codifié à l'article 217 undecies du code général des impôts, de déduction du résultat imposable pour les investissements outre-mer des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés.

• En premier lieu, les 1a, 1c, 2 et 4 procèdent aux mêmes modifications du périmètre des secteurs éligibles que pour le régime relatif aux investissements des personnes soumises à l'impôt sur le revenu.

• Par ailleurs, le 1d, qui concerne en fait aussi bien les personnes assujetties à l'IR que celles assujetties à l'IS, définit les conditions d'éligibilité des montages locatifs :

- le contrat de location doit être conclu pour une durée au moins égale à cinq ans ou pour la durée normale d'utilisation du bien loué si elle est inférieure ;

- le contrat de location doit revêtir un caractère commercial. Cette qualification, qui vise à éviter une éventuelle qualification dans la catégorie des bénéfices fonciers, ne vaut évidemment que pour les investisseurs assujettis à l'IR ;

- il faut que l'entreprise locataire eusse pu bénéficier de la déduction prévue si, imposable en France, elle avait acquis directement le bien. Cet alinéa concerne les investissements réalisés hors des départements d'outre-mer ;

- il faut que l'entreprise propriétaire de l'investissement ait son siège en France métropolitaine ou dans un département d'outre-mer. Cette condition vise à faciliter le contrôle fiscal ;

- enfin, les trois quarts de l'avantage fiscal doivent être rétrocédés à l'exploitant local .

Le ministère de l'économie et des finances estime que ce taux de rétrocession, plus élevé que pour les particuliers, est réaliste dans la mesure où les montants unitaires sont plus élevés et où les frais de gestion et de placement sont plus réduits pour les entreprise, d'une part ; dans la mesure où ce taux est d'ores et déjà atteint dans certains dossiers, d'autre part.

L'avantage fiscal effectif pour l'investisseur serait néanmoins limité : au maximum 9,11 % en 2001 (25 % x 36,43 %), compte tenu du taux marginal effectif de l'impôt sur les sociétés.

La rédaction proposée pour cet alinéa est en outre pour le moins abscons : " les trois quarts de la réduction d'impôt correspondant à la déduction pratiquée augmentée de celle procurée par la déduction des frais et charges liés à l'acquisition des biens ayant bénéficié des dispositions du présent article sont rétrocédés à l'entreprise locataire sous forme de diminution du loyer et le cas échéant, du prix de cession du bien à l'exploitant ".

Votre rapporteur général vous propose donc un amendement rédactionnel.

Notons que si l'une des conditions précédentes n'est plus remplie, les sommes déduites sont rapportées au résultat imposable de l'entreprise propriétaire de l'investissement.

• Le 3 procède à un assouplissement substantiel du dispositif en rendant éligible la souscription au capital de sociétés en difficulté ,

- même si la société en difficulté a déjà bénéficié du dispositif de défiscalisation ;

- même si la souscription ne finance pas des investissements productifs (mais, par exemple, le désendettement de la société en difficulté).

• De même, le 5 assouplit le régime applicable en matière de conservation de biens :

- le premier alinéa du IV bis de l'article 217 undecies du code général des impôts prévoit actuellement que l'abattement du tiers sur les résultats des entreprises d'outre-mer prévu à l'article 217 bis n'est applicable ni au calcul de la déduction pour investissement outre-mer, ni aux résultats (notamment les déficits) provenant de l'exploitation des investissements ayant donné lieu à cette déduction et qui sont acquis pendant la durée normale d'utilisation de ces mêmes investissements.

Le second alinéa du IV bis prévoit toutefois que si l'investissement est cédé ou cesse d'être exploité avant l'expiration de sa durée normale d'utilisation, l'avantage résultant du premier alinéa est rapporté au résultat imposable de l'exercice, majoré d'un montant égal au produit de l'avantage par le taux de l'intérêt de retard.

Or, la durée normale d'utilisation peut être de 15 ou 20 ans pour certains investissements (comme les hôtels).

Pour ces investissements, les dispositions du second alinéa du IV bis sont donc particulièrement pénalisantes.

Le 5 propose donc de ramener le délai de conservation des investissements à cinq ans ou à leur durée normale d'utilisation si elle est inférieure ;

- par ailleurs, le 5c prévoit que la reprise de l'avantage n'est pas effectuée lorsque les biens ayant ouvert droit à déduction sont transmis dans le cadre d'opérations de fusion, de scission ou d'apport partiel d'actifs, soumises aux dispositions des articles 210 A et 210 B du code général des impôts, sous réserve que le bénéficiaire de la transmission s'engage à maintenir l'exploitation des biens outre-mer pendant la fraction du délai de conservation restant à courir.

D. LES MODALITÉS D'ENTRÉE EN VIGUEUR ET LES MESURES DE COORDINATION

Le D du I du présent article propose des mesures de coordination visant à prévenir le cumul des nouveaux régimes des articles 199 undecies A et 199 undecies B avec d'autres régimes favorables, comme " l'amortissement Périssol " et " l'amortissement Besson ", l'abattement annuel de 8.000 ou 16.000 francs sur les dividendes, les dispositions du plan d'épargne en action, la réduction d'impôt au titre de la souscription au capital de sociétés non cotées, la déduction pour achat de parts de copropriétés de navires, etc.

Le II prévoit l'application des nouveaux régimes à partir du 1 er janvier 2001, et jusqu'au 31 décembre 2006 .

Enfin, le III, qui résulte d'un amendement proposé par le président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, demande que le rapport présenté chaque année par le gouvernement au Parlement sur les conditions de mise en oeuvre de l'agrément prévu pour certains investissements défiscalisés, soit annexé au projet de loi de finances et indique " pour les cinq dernières années, par zones géographiques et par secteurs d'activité, les engagements en matière d'emplois pris par les investisseurs ayant obtenu l'agrément préalable et la manière dont ils ont été tenus ".

Rappelons que l'agrément est accordé par l'administration fiscale, sur avis du secrétariat d'Etat à l'outre-mer, " si l'investissement présente un intérêt économique pour le département dans lequel il est réalisé, favorise le maintien ou la création d'emplois, s'intègre dans la politique de l'aménagement du territoire et de l'environnement et garantit la protection des investisseurs et des tiers ".

L'emploi est donc l'un des critères d'octroi de l'agrément. Le rapport réalisé chaque année par le ministère de l'économie et des finances sur les conditions de mise en oeuvre de l'agrément recense ainsi un certain nombre d'emplois crées.

Néanmoins, ce rapport :

- ne comptabilise que les emplois directs, à l'exclusion des emplois temporaires ou induits ;

- ne porte que sur les emplois créés, sans tenir compte des emplois maintenus ;

- repose sur les déclarations des porteurs de projets ;

- par construction, ne concerne que les dossiers ayant reçu un agrément. Or, certains projets agréés peuvent ne pas connaître de suite. En outre, beaucoup de projets ne nécessitent pas d'agrément.

Le rapport demandé apporterait donc d'importantes précisions, s'il pouvait être effectivement réalisé dans des conditions satisfaisantes.

Mais l'administration fiscale, pour qui la gestion du dispositif représente déjà une tâche d'une ampleur et d'une nature inhabituelles, puisqu'il lui faut porter une appréciation économique sur les projets soumis à agrément, ne semble guère en mesure ni d'exercer ce suivi des emplois créés, ni d'apprécier réellement le nombre d'emplois indirectement induits par le dispositif.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. LE PRÉSENT ARTICLE CONSACRE LE PRINCIPE DE LA DÉFISCALISATION

Votre rapporteur général se félicite de ce que le débat relatif au dispositif de défiscalisation des investissements outre-mer, dont le présent article consacre le principe, ait gagné en sérénité .

Il se félicite aussi de ce que le présent article s'inscrive largement dans la continuité du dispositif existant, ce qui est de nature à favoriser le dynamisme et l'efficience de l'investissement outre-mer.

On peut en effet rappeler que les dispositifs de défiscalisation des investissements, dont le gouvernement propose aujourd'hui le renouvellement, ont été remis en question à de nombreuses reprises par des parlementaires de l'actuelle majorité, ce qui a placé les opérateurs dans une incertitude croissante et sans doute contrarié de nombreux projets.

En outre, les incertitudes récurrentes sur la stabilité de la législation et le mauvais procès dressé contre le dispositif, ont pu perturber la rationalité économique de certaines décisions et l'allocation des investissements défiscalisés.

Rappelons, s'il en est encore besoin, que ce dispositif est pourtant légitime et nécessaire .

En effet, les économies des départements, territoires et collectivités d'outre-mer connaissent des handicaps structurels en matière d'investissement :

- le coût du travail y est, à productivité égale, plus élevé qu'en métropole ;

- la compétitivité de l'offre locale est bridée par des handicaps structurels (éloignement, coûts de transport, coûts de " surstockage " induits par les aléas climatiques, étroitesse des marchés locaux, concurrence de pays à bas salaires) ;

- la rémunération requise du capital y est structurellement plus élevée, en raison des risques induits par les handicaps précédents, mais aussi des surcoûts liés aux conditions de l'activité bancaire (salaires, communications) ;

- enfin, les besoins de financement à moyen et à long terme des entreprises sont plus difficilement couverts par les établissements financiers locaux, la plupart des banques commerciales locales ayant subi des pertes importantes qui les rendent extrêmement sélectives dans l'octroi de crédits, de sorte que les PME, qui constituent l'essentiel du tissu productif local, manquent le plus souvent de fonds propres.

En se cumulant, tous ces facteurs dissuadent l'investissement outre-mer : toutes choses égales par ailleurs, il vaut mieux investir en métropole. Cette constatation vaut d'ailleurs à la fois pour les épargnants métropolitains et pour les épargnants locaux.

L'accumulation du capital, c'est à dire le développement de l'offre , est donc spontanément insuffisante pour soutenir la progression de l'emploi et engager une véritable dynamique de développement

L'insuffisance de l'offre contraste d'ailleurs avec le dynamisme de la demande , soutenu par les surrémunérations des fonctionnaires métropolitains et par la progression des transferts sociaux. Ce déséquilibre inflationniste entre l'offre et la demande se traduit notamment par des importations massives.

A moins de réduire le pouvoir d'achat (donc la demande) de nos compatriotes des DOM, TOM et collectivités d'outre-mer, cet écart entre l'offre et la demande n'a pas d'autre solution que de stimuler le développement de l'offre . Cela suppose de soutenir l'investissement, c'est à dire de favoriser des investissements, qui autrement, n'auraient pas été effectués parce que trop risqués ou insuffisamment rentables.

Or, parmi la panoplie des moyens disponibles (investissements publics, subventions, défiscalisation), la défiscalisation " a toute de même un mérite inestimable ", puisqu'elle " ne correspond pas à une logique d'assistance mais, au contraire, stimule l'initiative et favorise les adaptations ", comme le relevait dès 1991 M. Alain Richard, alors rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale.

Contrairement à une idée tenace, la défiscalisation ne date d'ailleurs pas de la loi Pons de 1986 : depuis 1952, il y eu en permanence un système d'aide à l'investissement, d'abord sous la forme d'exonérations de bénéfice sous condition de réemploi, puis, à partir de 1980, d'un dispositif de défiscalisation des investissements proprement dit.

B. CERTAINES ORIENTATIONS DU NOUVEAU DISPOSITIF SONT OPPORTUNES

S'agissant des investissements dans le secteur du logement, le nouveau dispositif prolonge, pour l'essentiel, le dispositif existant. Votre rapporteur général y est donc favorable.

Par ailleurs, le nouveau dispositif de défiscalisation des investissements productifs pourrait permettre une réallocation des flux actuels d'investissement :

- vers la Guyane, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, qui n'ont accueilli au total que 4,4 % du volume des investissements soumis à agrément en 1999 ;

- vers la rénovation d'hôtel plutôt que vers la construction de nouveaux établissements ;

- vers les activités de maintenance et les services informatiques, plutôt que vers la navigation de croisière.

Votre rapporteur général approuve ces orientations. Il paraît ainsi légitime que certain territoires bénéficient d'un traitement différencié, comme c'est déjà largement le cas en métropole.

De même, il est préférable de favoriser la rénovation des hôtels existants plutôt que la construction de nouveaux bâtiments, aussi bien pour favoriser la protection du littoral, que pour stimuler l'emploi : les activités de rénovation sont en effet plus riches en emplois.

Par ailleurs, l'extension du dispositif aux activités de maintenance et aux services informatiques relève du bon sens, l'obligation d'un agrément au premier franc pour les services informatiques permettant par surcroît de prévenir les abus. En outre, l'extension des secteurs éligibles réduit les distorsions et les effets de frontières entre les activités.

Enfin, l'assouplissement du dispositif pour les investissements dans les entreprises en difficulté, ainsi que son extension aux travaux de rénovation d'hôtel et aux activités de maintenance sont de nature à freiner le déclassement du capital productif, ce qui concourt évidemment à l'objectif recherché.

C. L'ÉQUILIBRE DU DISPOSITIF PROPOSÉ POUR LES INVESTISSEMENTS PRODUCTIFS REPOSE TOUTEFOIS SUR UN PARI

• Selon le gouvernement la mise en oeuvre des nouvelles mesures de défiscalisation des investissements productifs , devrait s'effectuer  :

- à dépense fiscale constante ;

- à volume d'investissements dans les DOM, TOM et collectivités d'outre-mer constant.

Cependant, l'impact du dispositif proposé sur le volume des investissements est pour le moins incertain.

En effet, cet impact dépendra :

- de l'évolution des pratiques des investisseurs métropolitains actuels ;

- de la diffusion - ou non - du dispositif à de nouveaux investisseurs métropolitains ;

- de l'ampleur de la réallocation de l'épargne d'outre-mer vers des investissements locaux.

Votre rapporteur général analysera successivement ces trois points.

• En premier lieu, le remplacement de la déduction du revenu imposable par une réduction d'impôt limite l'intérêt du dispositif pour les contribuables imposés au taux marginal de l'impôt sur le revenu, qui constituaient jusqu'alors la source essentielle d'investissements défiscalisés en provenance de métropole.

En effet, pour ces contribuables, le taux effectif de la réduction d'impôt est réduit de 54 % à 50 %. En outre, la réduction d'impôt est étalée sur deux ans, ce qui représente une perte de trésorerie.

Or, compte tenu des montages à effet de levier utilisés pour les investissements locatifs (les investisseurs empruntant en fin d'année pour souscrire des parts ou actions, puis remboursant au moment où ils bénéficient de la réduction d'impôt), le nouveau dispositif pourrait réduire le rendement réel de la défiscalisation, comme le montrent des simulations réalisées en 1998 par le groupe de travail interministériel chargé d'établi le bilan de l'application du dispositif (cf. tableau ci-dessous).

Gain définitif pour l'investisseur, selon le taux de réduction d'impôt applicable, pour un investissement de 100 et une commission de montage et commercialisation de 10

Taux de réduction d'impôt (en %)

Economie fiscale

Economie définitive pour un apport en fonds propres de 35

Economie définitive pour un apport en fonds propres de 40

54

54

19

14

50

50

15

10

Source : rapport du groupe de travail interministériel

Par ailleurs, le mécanisme du double plafonnement du dispositif réduit de plus de moitié le montant que les contribuables métropolitains intéressés peuvent allouer à l'investissement outre-mer.

Par surcroît, l'obligation pour les montages locatifs de rétrocéder 60 % de l'avantage fiscal (pour les particuliers) et 75 % de l'avantage fiscal (pour les entreprises) constitue a priori une contrainte supplémentaire.

En effet, aux termes du présent article, le taux effectif de réduction d'impôt pour un particulier métropolitain serait de fait plafonné à 20 %.

Or, il convient de déduire de ces 20 % les frais de montage, de commission et de gestion. Compte tenu des caractéristiques actuelles du dispositif, ces frais sont relativement élevés, comme l'illustrent les données ci-dessous, extraites du rapport du groupe de travail précité, qui s'appuient sur un décompte effectué par la direction générale des impôts des frais facturés pour chacun des dossiers agrées en 1996.

Frais de montage, de commission et de gestion pour les dossiers agrées en 1996

Montant des dossiers
(en millions de francs)

Frais de montage et de commission
(en % de l'investissement)

Frais de gestion sur cinq ans
(en % de l'investissement)

Frais totaux
(en % de l'investissement)

moins de 1

12,98

8,80

21,78

entre 1 et 10

12,49

6,35

18,84

entre 10 et 100

11,69

2,25

13,94

plus de 100

12,89

1,00

13,89

moyenne

12,42

3,00

15,42

Source : DGI

Certes, il est vraisemblable que les frais de montage et de commission se soient réduits depuis lors, en raison d'effets d'apprentissage et d'effets de série pour les opérateurs, de la concurrence entre ces derniers et des pressions de l'administration fiscale, de sorte que la direction générale des impôts puisse effectivement, pour certains dossiers, obtenir sinon constater des taux de rétrocession de l'ordre de 60 %.

Néanmoins, les frais de montage et de commercialisation seront toujours relativement élevés, surtout pour les petits projets . La fixation de taux de rétrocession risque ainsi de se traduire par une triple éviction :

- de certains investisseurs, qui préféreront d'autres dispositifs de réduction d'impôt désormais plus avantageux ;

- des monteurs les moins performants ;

- surtout des petits projets et des projets les plus risqués .

En outre, la fixation d'un taux de rétrocession pourrait se traduire par un nivellement vers le bas des taux de rétrocession pratiqués pour les projets peu risqués, de grande ampleur et conduits par des entreprises importantes, qui, du fait du faible taux de risque qu'ils présentent, laissent aujourd'hui à l'investisseur une part plus réduite de l'avantage fiscal.

En effet, on voit mal sur quels fondements l'administration fiscale pourrait désormais contraindre des investisseurs à rétrocéder plus de 60 % de l'avantage fiscal aux opérateurs locaux.

Cet effet pervers serait évidemment contraire à l'objectif recherché.

Au total, votre rapporteur général s'interroge sur les conséquences de la fixation administrative d'un taux minimal de rétrocession, alors que ce taux résultait jusqu'alors de la combinaison d'un mécanisme de marché et de la régulation opérée par l'administration fiscale.

S'agissant des projets soumis à agrément il s'étonne d'ailleurs de la faible confiance accordée par le gouvernement au pouvoir d'appréciation de sa propre administration. A tout le moins, il eût été souhaitable de prévoir la possibilité de dérogations pour certains projets.

S'agissant par ailleurs des petits montages locatifs non soumis à l'agrément de l'administration fiscale, les effets d'éviction précédemment soulignés pourraient être amplifiés. En effet, ces projets sont par nature, des projets de faible montant.

En outre, l'introduction d'un taux minimal de rétrocession soulève une difficulté particulière pour les montages locatifs non soumis à agrément. Rappelons en effet que l'agrément constitue à bien des égards une sécurité pour les investisseurs. Or l'appréciation du taux de rétrocession est un exercice difficile, surtout pour les particuliers.

A défaut d'agrément préalable, des investisseurs de bonne foi pourraient donc se voir sanctionnés d'une reprise d'impôt sur le seul fondement de ce que le taux de rétrocession fixé entre le monteur et le locataire est en fait légèrement inférieur au taux de 60 %.

Le contrôle fiscal du taux de rétrocession risque d'ailleurs d'être particulièrement délicat :

- en effet, le contrôle fiscal des montages locatifs est une opération lourde, puisqu'il faut rapprocher la comptabilité de la structure intermédiaire de celle de l'utilisateur du bien. Or si celui-ci est localisé outre-mer, celui là peut être situé en métropole ou dans un autre DOM ;

- en outre, si le contrôle fiscal débouche sur le retrait de l'agrément ou la reprise de réduction d'impôt, l'avantage fiscal de l'investisseur est remis en cause depuis l'origine. Il s'agit là d'une sanction sévère dans la mesure où elle ne résulte pas d'une faute de l'investisseur, mais d'une faute du fait d'autrui (le monteur et l'opérateur). Ce constat conduit d'ailleurs aujourd'hui l'administration fiscale à ne recourir à cette sanction qu'avec parcimonie.

Au total :

- la fixation d'un taux minimal de rétrocession semble une disposition peu opportune et modérément applicable ;

- les flux d'investissement en provenance des investisseurs métropolitains actuels vont se réduire.

• Cette baisse sera-t-elle compensée par un élargissement du nombre des investisseurs métropolitains ?

Rien n'est moins sûr.

Certes, le remplacement de la déduction du revenu imposable par une réduction d'impôt rend a priori la défiscalisation attractive pour l'ensemble des contribuables métropolitains imposables à l'impôt sur le revenu.

Le gouvernement postule donc implicitement que le dispositif pourrait devenir un " produit de guichet " accessible à un grand nombre d'épargnants, à l'instar des FCPI.

Néanmoins, la diffusion du dispositif suppose que le montant unitaire des parts soit réduit à quelques dizaines de milliers de francs au lieu de plusieurs centaines de milliers de francs. Or la réduction du montant unitaire des parts se traduit inévitablement par une hausse des coûts de gestion du dispositif, c'est à dire par une baisse de son rendement pour l'investisseur.

Toutes choses égales par ailleurs, et compte tenu des remarques précédentes sur le taux de rétrocession, le dispositif sera donc beaucoup moins rentable pour les petits épargnants qu'il ne l'est aujourd'hui pour les contribuables imposés au taux marginal de 54 %, à moins que les circuits d'intermédiation ne réalisent des gains de productivité importants.

Or, les volumes en jeu ne sont pas considérables (de l'ordre d'un millier de projets par an), ce qui ne permet guère que des effets de série (la répétition de projets semblables réduisant les coûts) et non pas des économies d'échelle.

L'élargissement du nombre des investisseurs métropolitains repose donc sur un pari incertain quant aux capacités de réorganisation des structures de commercialisation des placements défiscalisés.

Il n'est d'ailleurs pas certain que cet élargissement soit souhaitable. En effet, la défiscalisation indirecte se caractérise encore par des risques juridiques et fiscaux pour les investisseurs. Il serait ainsi particulièrement dommageable que des petits épargnants mal informés ne soient in fine lésés si ces risques survenaient.

Au total, il est donc vraisemblable que le volume des investissements défiscalisés en provenance de métropole pourrait se réduire.

• En revanche, le nouveau dispositif apparaît beaucoup plus favorable pour les investisseurs des DOM.

En effet, les investisseurs professionnels des DOM bénéficient du nouveau dispositif de crédit d'impôt.

Par ailleurs, le nouveau dispositif est de facto très attractif pour les contribuables non professionnels des DOM, mieux informés des réalités du marché local, et qui peuvent investir dans des entreprises locales sans frais de montage ou de commercialisation.

Le nouveau dispositif est donc de nature à favoriser l'allocation de l'épargne des DOM vers l'économie locale, ce dont votre rapporteur général ne peut que se féliciter.

• En conclusion, le dispositif pourrait modifier le financement de l'économie des DOM, TOM et collectivités d'outre-mer de la manière suivante :

- les investissements dans les secteurs éligibles en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna, ainsi que les projets de rénovation d'hôtel, qui ouvrent droit à une réduction d'impôt de 60  %, bénéficieraient de financements accrus, selon des modalités sans doute proches de celle du dispositif actuel ;

- les grands projets d'investissements dans les secteurs éligibles des autres DOM, TOM et en Nouvelle-Calédonie seraient financés par une épargne métropolitaine moins abondante et plus coûteuse, quoique drainée auprès d'un nombre de contribuables un peu plus large qu'aujourd'hui ;

- les petits projets d'investissement dans les secteurs éligibles des autres DOM, TOM et en Nouvelle-Calédonie auront un accès réduit à l'épargne métropolitaine, mais pourraient être financés de manière croissante par les épargnants locaux, selon un circuit court.

Le nouveau dispositif pourrait donc raccourcir les circuits de financement des économies ultramarines, ce dont votre rapporteur général ne peut a priori que se féliciter, mais au risque d'une baisse du volume total des investissements contraire à l'objectif poursuivi.

Il conviendra donc d'en suivre la mise en oeuvre avec la plus grande vigilance.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 12

Diminution de l'assiette de taxe professionnelle pour les titulaires de bénéfices non commerciaux

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de ramener progressivement la fraction des recettes prise en compte dans les bases de taxe professionnelle des titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC) de 10 % à 7 % en quatre ans.

I. LE DROIT EXISTANT

En vertu de l'article 1467 du code général des impôts, l'assiette de la taxe professionnelle des titulaires de BNC, des agents d'affaires et des intermédiaires de commerce employant moins de cinq salariés est constituée du dixième des recettes et de la valeur locative des immobilisations passibles des taxes foncières dont le contribuable a disposé pour les besoins de son activité. Contrairement aux autres contribuables, ils ne sont donc pas taxés sur leur masse salariale, même si les recettes recouvrent en réalité le financement de frais salariaux.

En conséquence, ces professions ont été exclues de la réforme tendant à supprimer progressivement la part salariale de l'assiette de la taxe professionnelle opérée par l'article 44 de la loi de finances pour 1999 pour les entreprises assujetties aux bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et pour les professions assujetties aux BNC qui emploient plus de 5 salariés.

Or, les différentes professions concernées - experts comptables, avocats, cabinets conseil, géomètres, professions de santé - acquittent aujourd'hui au titre de la taxe professionnelle, selon le secteur d'activité, entre 2 % et 4 % de leur chiffre d'affaires TTC.

Il est inéquitable, au motif que la taxe professionnelle de ces contribuables repose sur leurs recettes et non sur leur masse salariale, qu'ils ne puissent bénéficier d'une réforme qu'ils contribuent à financer. Ils se trouvent déjà dans une situation d'inégalité que la réforme va accentuer.

En particulier, on assiste à une très grande expansion, dans le domaine du conseil, des cabinets anglo-saxons (conseil juridique, fiscal et financier) qui se trouvent dans une situation plus favorable, au regard de la taxe professionnelle, que le " petit cabinet français ". Il existe ici une rupture d'égalité manifeste.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A l'occasion de la séance de questions d'actualité au gouvernement du 7 juin 2000 à l'Assemblée nationale, Mme Marylise Lebranchu, alors secrétaire d'Etat aux PME, avait indiqué : " nous avons proposé à l'Union nationale des associations de professions libérales (UNAPL), à la Confédération nationale des professions libérales (CNPL), et à l'ensemble des professionnels qui ont accepté de travailler avec nous de soumettre au ministère de l'économie et des finances, dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances, l'idée d'un système de décote pour les personnels embauchés.... A partir du moment où on raisonne sur les bénéfices industriels et commerciaux, les BIC, ou sur les bénéfices non commerciaux, les BNC, il conviendrait d'instituer, pour l'imposition des professions libérales, une franchise en fonction du nombre de personnes embauchées avec un chiffre d'affaires équivalent ".

De même, dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances rectificative de juin 2000, la commission des finances de l'Assemblée nationale avait notamment justifié en ces termes le rejet d'un amendement adopté par le Sénat tendant à réduire progressivement la taxe professionnelle des titulaires de BNC de moins de cinq salariés : " il importe d'ajouter, néanmoins, que votre commission des finances et le gouvernement étudient une réforme de la taxe professionnelle des contribuables concernés. En particulier, lors de la séance de questions au gouvernement du 7 juin dernier, la secrétaire d'Etat aux PME, au commerce à l'artisanat et à la consommation a indiqué qu'elle allait soumettre au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie un système de décote dont les modalités restent à définir ".

Force est néanmoins de constater que ces projets de décote ou de franchise ne figurent pas dans le présent projet de loi de finances.

Dans ces conditions, votre rapporteur général vous propose de nouveau un dispositif simple et réaliste, qui permettrait de ramener progressivement la fraction des recettes prise en compte dans les bases de taxe professionnelle des titulaires de BNC, des agents d'affaires et des intermédiaires de commerce de moins de cinq salariés de 10 % à 7 % en quatre ans.

En prenant pour hypothèse que la base " recettes " constitue 90 % de l'assiette de taxe professionnelle des professionnels libéraux, un tel amendement revient à réduire de 25 % en moyenne la cotisation de taxe professionnelle acquittée par ces contribuables.

Le coût budgétaire de ce dispositif serait de l'ordre de 300 millions de francs en 2001.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 12 bis (nouveau)

Extension du bénéfice de l'amortissement dégressif aux équipements de production d'énergies renouvelables

Commentaire : le présent article, introduit par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, vise à étendre le bénéfice de l'amortissement dégressif, prévu aujourd'hui notamment pour les matériels destinés à économiser de l'énergie, aux équipements de production d'énergies renouvelables.

I. LA SITUATION ACTUELLE

Certains biens d'équipement dont la durée d'utilisation est au moins égale à trois ans peuvent bénéficier d'un amortissement dégressif qui consiste à pratiquer des annuités d'amortissements d'importance décroissante (contrairement au régime de l'amortissement linéaire dans lequel les annuités sont d'un montant identique). Le taux de l'amortissement est égal au taux linéaire multiplié par un coefficient qui dépend de la durée normale d'utilisation du bien.

L'article 39 AA du code général des impôts prévoit notamment que les matériels destinés à économiser l'énergie acquis ou fabriqués par les entreprises (entre le 1 er janvier 1977 et le 1 er janvier 1991) qui figurent sur une liste établie par arrêté conjoint du ministre chargé du budget et du ministre chargé de l'industrie, peuvent bénéficier d'un régime d'amortissement dégressif avec les coefficients suivants.

Durée normale d'utilisation du matériel

Coefficient de l'amortissement dégressif

Trois ou quatre ans

2

Cinq ou six ans

2,5

Plus de six ans

3

Source : article 39 AA du code général des impôts

II. LA PROPOSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de nos collègues députés Yves Cochet, André Aschieri, Marie-Hélène Aubert, Noël Mamère et Jean-Michel Marchand qui étend le dispositif aux équipements de production d'énergie renouvelable, qui, selon les auteurs de l'amendement, " forment un tout " avec les matières destinés à économiser de l'énergie.

Cet amendement a reçu l'avis favorable du gouvernement.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission estime également utile d'intégrer ces équipements dans le dispositif afin d'encourager le développement des équipement de production d'énergies renouvelables dans les entreprises industrielles.

Toutefois, elle s'interroge sur la portée vraisemblablement nulle du présent article puisqu'il ne s'applique pas , en vertu du dernier alinéa de l'article 39 AA du code général des impôts, aux " matériels acquis ou fabriqués à compter du 1 er janvier 1991 ". De fait, ce dispositif est donc fermé et le gouvernement a pu, à peu de frais, donner un avis favorable à un dispositif sans effet.

En réalité, le dispositif de l'article 39 AA a été " fermé " et s'y est substitué le régime de l'article 39 AB qui prévoit un amortissement exceptionnel sur douze mois 75 ( * ) , en principe plus intéressant pour les entreprises que l'amortissement dégressif, mais dont la durée de vie est limitée puisqu'il doit en principe s'éteindre en 2003. A compter du 1 er janvier 2003, plus aucun de ces deux mécanismes ne sera donc applicable.

Votre commission vous propose donc d' " ouvrir " à nouveau le dispositif du 39 AA à l'ensemble de ses composantes (matériels destinés à économiser les énergies, à produire de l'énergie renouvelable ainsi qu'à réaliser des économies de matières premières) sans limitation de durée. La possibilité de pratiquer un amortissement dégressif pourra donc être à nouveau utilisée à partir de 2003, lorsque l'amortissement exceptionnel aura disparu.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 12 ter (nouveau)

Extension du bénéfice de l'amortissement exceptionnel sur douze mois aux équipements de production d'énergies renouvelables

Commentaire : le présent article, introduit par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, vise à étendre aux équipements de production d'énergies renouvelables le bénéfice de l'amortissement exceptionnel sur douze mois, prévu aujourd'hui uniquement pour les matériels destinés à économiser de l'énergie.

L'article 39 AB du code général des impôts prévoit que " les matériels destinés à économiser l'énergie qui figurent sur une liste établie par arrêté conjoint du ministre du budget et du ministre de l'industrie, acquis ou fabriqués avant le 1 er janvier 2003, peuvent faire l'objet d'un amortissement exceptionnel sur douze mois à compter de leur mise en service ". La liste mentionnée figure à l'article 2 bis de l'annexe IV du code général des impôts. La loi de finances pour 1999 76 ( * ) a étendu un dispositif jusqu'au 1 er janvier 2003.

Un tel amortissement est dit exceptionnel car il ne correspond pas à la dépréciation réelle du bien mais résulte d'une disposition incitative prévue par le législateur 77 ( * ) .

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de nos collègues députés Yves Cochet, André Aschieri, Marie-Hélène Aubert, Noël Mamère et Jean-Michel Marchand qui étend le dispositif aux équipements de production d'énergies renouvelables.

Cet amendement a reçu l'avis favorable du gouvernement.

Votre commission estime également utile d'intégrer ces équipements dans le dispositif afin d'encourager au développement des énergies renouvelables.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12 quater (nouveau)

Aménagement du régime fiscal des titres-restaurant

Commentaire : le présent article, introduit par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, tend à augmenter la limite sous laquelle le complément de rémunération résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition d'un titre-restaurant par son salarié est exonérée d'impôt sur le revenu.

L'article 81-19° du code général des impôts tend à soustraire à l'impôt le complément de rémunération résultant de la contribution de l'employeur à l'acquisition par le salarié de titres-restaurant émis conformément au titre III de l'ordonnance n° 67-830 du 27 décembre 1967 dans une limite actuellement égale à 28 francs.

Le présent article additionnel, qui a été accepté par le gouvernement, se propose de porter cette limite à 30 francs.

Votre commission estime utile d'actualiser ce montant qui n'avait pas été revu depuis 1997.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12 quinquies (nouveau)

Taxe professionnelle des entreprises de transport sanitaire terrestre

Commentaire : le présent article a pour objet de dégrever de 50 % les cotisations de taxe professionnelle des entreprises de transport sanitaire terrestre.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article a été introduit dans le présent projet de loi de finances par un amendement d'origine gouvernementale présenté au cours de la première lecture du texte à l'Assemblée nationale.

La disposition a été défendue ainsi par le secrétaire d'Etat à l'industrie : " Le carburant représente le troisième poste de dépense des entreprises de transport sanitaire, appelées souvent, d'un terme plus générique, les ambulanciers. Afin de prendre en compte l'augmentation des charges qui résultent de la hausse des carburants à laquelle sont confrontées ces entreprises, le gouvernement est convenu de réduire de 50 % les cotisations de taxe professionnelle dues au titre de cette activité ".

Les entreprises qui pourraient bénéficier du dégrèvement sont celles qui exercent l'activité visée à l'article L. 6312-1 du code de la santé publique (" Constitue un transport sanitaire, tout transport d'une personne malade, blessée ou parturiente, pour des raisons de soin ou de diagnostic, sur prescription médicale ou en cas d'urgence médicale ") et qui réalisent un transport " terrestre ". Les entreprises de transport sanitaire par des moyens " aériens ou maritime ", qui sont également mentionnées à l'article L. 6312-1, sont donc exclues du bénéfice de la mesure.

Pour bénéficier du dégrèvement, les entreprises devront avoir obtenu l'agrément administratif prévu à l'article L. 6312-2 du code de la santé publique.

S'agissant des entreprises qui exercent plusieurs activités, le dégrèvement ne portera que sur la fraction de la cotisation de taxe professionnelle correspondant à l'activité de transport sanitaire. Le dégrèvement est accordé à compter des impositions établies au titre de 2001 et des années suivantes.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général observe que le présent article constitue en réalité une validation par le Parlement d'un accord conclu par le gouvernement et les représentants d'une profession.

Il se demande s'il appartient vraiment à l'Etat de modifier la loi lorsque la structure des coûts d'une profession connaît une évolution défavorable, et si la relation bilatérale entre des entreprises et leurs clients n'est pas plus saine du point de vue économique qu'une relation dans laquelle les entreprises et les clients reportent la hausse des coût vers le contribuable national. On peut cependant noter que l'Etat assume son choix et n'a pas procédé à l'allégement des coûts des ambulanciers en décidant d'augmenter les tarifs remboursés par la sécurité sociale.

Il relève que cette disposition s'inscrit dans la logique de " saupoudrage fiscal " qui caractérise le présent projet de loi de finances. Il regrette que la volonté du gouvernement de desserrer les contraintes financières qui pèsent sur la profession d'ambulancier se traduise par une mesure contraire aux principes de la fiscalité écologique, puisque le dégrèvement de 50 % de la cotisation de taxe professionnelle revient à minorer artificiellement le coût économique et social de la circulation automobile.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

C. - Mesures diverses

ARTICLE 13

Suppression de la taxe sur les passagers

Commentaire : le présent article a pour objet de supprimer la taxe sur les passagers, inscrite dans le code des ports maritimes et assise sur les passagers embarqués, débarqués ou transbordés, afin de lui substituer un droit de port de droit commun dont le taux serait fixé non plus par voie réglementaire mais par chaque port en fonction de ses besoins.

I. LE DROIT ACTUEL

A. LA TAXE SUR LES PASSAGERS

1. Un prélèvement au profit des ports essentiellement...

La taxe sur les passagers a été créée par la loi n° 67-1175 du 28 décembre 1967 et inscrite dans le code des ports maritimes aux articles L.211-2 et 211-3.

Assise sur les passages embarqués, débarqués ou transbordés, elle est à la charge de l'armateur, bien qu'en pratique son montant soit systématiquement répercuté sur les passagers. Le produit de cette taxe est perçu à concurrence de 75 % au profit des collectivités ou des établissements publics participant au financement du port (en pratique, les ports autonomes), et à concurrence de 25 % au profit de l'Etat.

Le taux de la taxe sur les passagers est fixé par décret et est uniforme pour chaque façade maritime.

D'après les informations fournies par le gouvernement, le produit de la taxe sur les passagers s'est élevé en 1999 à 380 millions de francs et est évalué pour 2000 à 400 millions de francs.

2. ...et de nature fiscale

La taxe sur les passagers est l'une des trois taxes composant le droit de port institué par la loi n° 67-1175 précitée, les deux autres taxes étant :

- la taxe sur les navires ;

- la taxe sur les marchandises.

Or, depuis la décision du Conseil constitutionnel n° 76-92 du 6 octobre 1976, la taxe sur les passagers est le seul de ces droit de port à posséder une nature fiscale, car d'après le Conseil, seuls les droits " dont le montant est intégralement affecté au financement des dépenses portuaires " ont le caractère de redevance pour service rendu.

B. LA NÉCESSITÉ D'UN POLITIQUE TARIFAIRE PLUS ADAPTÉE AUX TRAFICS

L'année dernière la Cour des comptes publiait un rapport intitulé " La politique portuaire française " dans lequel était notamment critiquée la politique commerciale et tarifaire des ports autonomes, jugée inadaptée à un contexte de concurrence accrue.

" Le code des ports maritimes pourrait (...) être interprété comme donnant au port la seule mission de fournir une infrastructure d'outillage sans se préoccuper du trafic traité ", était-il indiqué dans le rapport. Cette critique est particulièrement fondée s'agissant de la taxe sur les passagers, son montant n'étant pas fonction du coût réel des services portuaires rendus aux navires de passagers, mais d'un taux fixé par décret, uniformément pour chaque façade maritime, alors qu'un port comme celui de Calais concentre 60 % du produit global de la taxe.

La gestion des tarifs entre par ailleurs dans le cadre de la politique de concurrence communautaire . La Commission européenne, qui s'intéresse de près à la tarification des infrastructures portuaires, estime que les tarifs des infrastructures portuaires doivent être fixés de telle sorte que les utilisateurs supportent les coûts réels des services et installations portuaires. Dans le cas de la France, une tarification au coût réel constituerait de surcroît une vive incitation à restructurer l'organisation des ports français, alors que l'outillage public géré par les ports y constitue une activité largement déficitaire.

II. LA MESURE PROPOSÉE

Le I du présent article consiste à supprimer la taxe sur les passagers afin d'y substituer une redevance pour service rendu dont le taux et l'assiette seront fixés chaque année par chaque port autonome.

- Le 1° est une mesure de coordination ;

- Le 2° abroge les dispositions relatives à la taxe sur les passagers ;

Cette disposition se traduit par une perte de recettes évaluée à 100 millions de francs pour la part de la taxe affectée à l'Etat.

En revanche la perte de recettes devrait être nulle pour les ports autonomes, un droit de port de droit commun étant institué qui leur permettra une compensation intégrale.

L'institution de ce droit de port va dans le sens d'une adéquation progressive des tarifs avec les prix de revient des prestations fournies par les ports. Le taux et l'assiette fixés par chaque port autonome sera en effet fonction du coût réel des prestations offertes.

- Le 3° du I du présent article vise à mettre à jour le code des ports maritimes.

Le II du présent article vise à introduire une période transitoire pendant laquelle seule sera supprimée la part de la taxe sur les passagers revenant à l'Etat, la part perçue au profit des ports autonomes continuant à être perçue dans les conditions prévues par la loi n° 67-1175 précitée.

La part de la taxe revenant à l'Etat doit être supprimée le 1 er janvier 2001 alors que la part revenant aux établissements portuaires sera supprimée le 1 er juin 2001. Il s'agit ici d'accorder un délai suffisant pour permettre aux ports autonomes de déterminer l'assiette et le taux du nouveau droit de port qui remplacera la taxe.

Au cours de sa première lecture, l'Assemblée nationale a adopté un amendement rédactionnel.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission des finances est convaincue de la nécessité de moderniser la politique tarifaire des ports et rejoint les analyses évoquées ci-dessus de la Cour des Comptes et de la Commission européenne tendant à préconiser une réforme du financement des infrastructures portuaires. La suppression de la taxe sur les passagers s'inscrit parfaitement dans cette logique et c'est pourquoi votre commission approuve pleinement cette mesure.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

ARTICLE 14

Allégement, simplification et unification des taxes afférentes à l'exercice d'une activité dans le secteur des télécommunications

Commentaire : le présent article prévoit dans le prolongement de mesures adoptées en loi de finances initiale pour 2000, de nouveaux allégements et simplifications concernant les taxes de constitution de dossier et de gestion et de contrôle des autorisations exigées des opérateurs de télécommunications. Par ailleurs, les opérateurs de téléphonie mobile, titulaires d'autorisations antérieures à la loi de réglementation des télécommunications du 29 juillet 1996, sont désormais assujettis à la même taxe que les autres, ce qui va dans le sens d'une unification du régime des impositions concernées et correspond donc à l'objectif de simplification visé par les autres dispositions de cet article.

L'article 45 modifié de la loi de finances pour 1987 définit le régime des taxes afférentes à l'exercice d'une activité dans le secteur des télécommunications.

Ces impositions sont destinées à compenser les charges administratives de contrôle, de suivi et d'évaluation occasionnées par :

- la constitution de dossiers lors du dépôt de demandes d'autorisation d'ouverture ou d'exploitation de réseaux et services de télécommunications (téléphoniques ou autres), indépendants ou destinés au public 78 ( * ) ;

- la gestion et le contrôle des autorisations déjà délivrées (sauf en ce qui concerne les réseaux indépendants) ;

- enfin, l'agrément , en vue de l'évaluation de leur conformité aux prescriptions d'intérêt général définies par l'article 34-9 du code des postes et des télécommunications, des équipements terminaux, des installations radioélectriques et des installateurs en télécommunications et en radiocommunications.

I. LES MESURES PROPOSÉES

A. LES ALLÉGEMENTS DE TAXE DE CONSTITUTION DE DOSSIERS

1. L'exonération des opérateurs de réseaux indépendants

Les réseaux indépendants, définis par l'article L. 33-2 du code des postes et télécommunications, peuvent être à usage privé (transmissions de données, téléalarme, télécommandes) ou partagé (taxis, ambulances).

Ils sont susceptibles d'utiliser des technologies de transmission :

- soit satellitaires ;

- soit terrestres, de type filaire (cas des réseaux indépendants de la SNCF et d'EDF) ou hertzien (réseaux radioélectriques).

Ce sont les réseaux satellitaires et filaires qui sont visés par cet article.

En effet, l'article 38 de la loi de finances initiale pour 2000 (n° 99-1172 du 30 décembre 1999) a déjà supprimé la taxe de constitution de dossier pour les réseaux indépendants radioélectriques à usage privé ou partagé. L'exonération bénéficiera donc, cette année, aux derniers réseaux indépendants qui étaient encore soumis à cette taxe. Son coût est estimé à environ 2 millions de francs.

Les réseaux satellitaires concernés sont, par exemple, des réseaux de communication avec des mobiles (navires ou avions) ou des réseaux dits VSAT (very small aperture terminal) de diffusion à partir d'une antenne d'émission principale vers des stations disposant d'une très petite antenne asservie. Ce type de communications est utilisé pour les liaisons avec les plates-formes pétrolières ou celles d'un groupe automobile comme Renault avec ses concessionnaires.

Le montant de la taxe était de 40.000 francs dans le premier cas (communication avec les mobiles) et de 25.000 francs pour les VSAT, lorsque l'emplacement des stations était connu à l'avance et leur nombre inférieur à cinq.

Outre ceux déjà mentionnés, de la SNCF et d'EDF, il existe, d'autre part, des centaines de réseaux indépendants filaires. De nombreux réseaux modestes étaient déjà exonérés, en raison du niveau de débit de la première tranche du barème applicable (ce dernier, assez complexe, établissait cinq tranches en fonction de la quantité d'informations transmises, l'imposition, progressive, variant entre 10.000 francs et 300.000 francs).

2. La suppression de la progressivité de la taxe due par les fournisseurs de services téléphoniques au public en fonction de l'étendue de leur zone de couverture

La progressivité, en fonction de l'étendue des zones de couverture des réseaux, du barème actuel de la taxe de constitution de dossier, due par les fournisseurs de services téléphoniques au public, a été renforcée par l'article 22 de la loi de finances pour 1998.

Ce barème est le suivant :

Zone de couverture

Montant de la taxe

Unité urbaine de moins de 100.000 h

50.000 F

Un département au plus

100.000 F

Une région au plus

250.000 F

Cinq régions au plus

500.000 F

Plus de cinq régions

1.750.000F

Réseau satellitaire

250.000 F

Cinq catégories sont distinguées, au lieu de trois précédemment, en raison :

- d'une volonté de tenir compte de la spécificité de réseaux de télécommunications par satellite ;

- du souhait de l'ART (Autorité de régulation des télécommunications) de réserver un traitement plus favorable aux projets dont les dimensions sont celles d'une commune de moins de 100.000 habitants ou d'un département.

La " forfaitisation " proposée par le présent article (250.000 francs pour tous les opérateurs, sauf dans les DOM, provoquant une perte de recettes évaluée à 30 millions de francs) résulte également d'un voeu de l'ART. L'autorité s'est aperçue, en effet, que les règles du précédent barème étaient contournées par certaines pratiques (des opérateurs n'ayant sollicité une autorisation de fourniture de service que pour une seule région, offraient, en réalité, une couverture totale du territoire métropolitain, grâce à des cartes téléphoniques prépayées utilisables depuis n'importe quel poste...).

3. Les mesures en faveur des départements d'outre-mer

Afin de favoriser le développement des réseaux propres à ces départements et aussi dans un souci d'équité 79 ( * ) , il est proposé de réduire, par rapport au droit commun, le montant de la taxe de constitution de dossier exigée des opérateurs intervenant dans les DOM.

Ce montant serait ainsi plafonné à 100.000 francs pour les réseaux couvrant un ou plusieurs départements d'outre mer et à 50.000 francs dans le cas des fournisseurs de services téléphoniques au public (article L. 34-1 du code des postes et télécommunications).

Sans impact immédiat, cette mesure pourrait occasionner, au pire, une perte ultérieure de recettes estimée à 1 million de francs, si elle incitait de nouveaux opérateurs à demander une autorisation.

B. LA SUPPRESSION DE LA TAXE POUR DIVERS AGRÉMENTS

Il s'agit de l'agrément que doivent recevoir :

- les équipements terminaux des réseaux ouverts au public ;

- les installations radioélectriques connectées à ces mêmes réseaux ;

- les installateurs en télécommunications et en radiocommunications.

La justification de ces agréments 80 ( * ) est d'assurer, dans l'intérêt général, la sécurité des usagers et des exploitants -ainsi que la protection des réseaux et de veiller à une utilisation normale du spectre radioélectrique.

Doivent également être prises en compte des préoccupations liées à l'aménagement du territoire et aux contraintes d'urbanisme et de protection de l'environnement.

Le montant de la taxe d'agrément était de 2.000 francs par dossier s'agissant des équipements et de 1.000 francs pour les démarches d'admission des installateurs.

Une directive du Parlement européen et du Conseil n° 1999/5/CE du 9 mars 1999 a prévu une reconnaissance mutuelle de conformité des équipements concernés au niveau communautaire, le respect de toutes les exigences essentielles nécessaires dans ce domaine étant garanti par un marquage " CE ".

Cette directive aurait dû être transposée avant le 7 avril 2000. Elle entraîne la suppression de la procédure administrative au titre de laquelle la taxe -qu'elle rend donc sans objet- était perçue. Elle entre dans le champ du projet de loi, récemment adopté par le Sénat, portant habilitation du gouvernement à transposer par ordonnance, différentes directives communautaires et à mettre en oeuvre certaines dispositions de droit communautaire.

La perte de recette correspondante est évaluée à 3 millions de francs.

C. L'ALLÉGEMENT ET L'UNIFICATION DE LA TAXE DE GESTION ET DE CONTRÔLE DES AUTORISATIONS

1. Un mouvement de baisse amorcé en 2000

Lors de sa création par l'article 22 de la loi de finances pour 1998, le montant de la taxe de gestion et de contrôle des autorisations était le double de celui de la taxe de constitution de dossier.

L'article 38 de la loi de finances pour 2000 a égalisé ces deux prélèvements, afin, notamment qu'elles aient uniquement pour objet de couvrir les frais administratifs correspondants, comme l'exige l'article 6 de la directive " licences " 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil du 10 avril 1997.

Le présent article prévoit de ramener le montant annuel de la taxe de gestion et de contrôle à la moitié de celui de la taxe de constitution de dossier dans le cas de réseaux de télécommunications ouverts au public (art. L. 33-1 du code des postes et télécommunications).

En revanche, le montant annuel -ce qui constitue une simplification- serait désormais de 125.000 francs en métropole, quelle que soit la couverture assurée, et de 25.000 francs pour les services ne couvrant qu'un ou plusieurs départements d'outre mer, s'agissant de fourniture du service téléphonique au public (article L.34- du code précité).

Il en résulterait une perte de recettes estimée à 60 millions de francs.

2. L'assujettissement de certains opérateurs préalablement exemptés

Les opérateurs titulaires, pour une durée indéterminée d'autorisations délivrées antérieurement à la loi de réglementation des télécommunications du 29 juillet 1996 ont disposé d'un délai d'un an, à compter de sa promulgation, pour se conformer à ses dispositions en présentant, en tant que de besoin, une nouvelle demande d'autorisation.

S'agissant d'autorisations, à durée déterminée, l'article 22 de la loi précitée avait prévu que les autorisations accordées restent valables jusqu'à leur terme prévu.

Il est proposé -ce qui contribue à unifier donc à simplifier le régime de cette imposition- que la taxe de gestion et de contrôle soit désormais acquittée aussi par les bénéficiaires d'autorisations antérieures à la loi susvisée de juillet 1996, qui en étaient jusqu'à présent exonérés.

Le gain attendu de cette extension serait de 6 millions de francs.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Allégement, simplification, mise en conformité avec les directives européennes, prise en compte de la spécificité des départements d'outre-mer : toutes les mesures proposées par cet article vont dans le bon sens et ne soulèvent aucune objection de la part de votre commission.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 15

Taux et conditions de versement par les organismes collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction

Commentaire : le présent article fixe le montant du versement d'une contribution à l'Etat, par les organismes collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction, en application d'une convention conclue le 3 août 1998. Ce versement s'élèvera à 3,52 milliards de francs en 2001.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LA PARTICIPATION DES EMPLOYEURS A L'EFFORT DE CONSTRUCTION

L'article L 313-1 du code de la construction et de l'habitation dispose que toutes les entreprises de plus de dix salariés doivent acquitter chaque année une contribution égale à 0,45 % de leur masse salariale de l'année n-1.

Avec plus de sept milliards de francs de collecte et 9 milliards de francs de remboursements de prêts 81 ( * ) , la participation des employeurs à l'effort de construction, communément appelée " le 1 % logement ", représente donc un volume de 17 milliards de francs par an de crédits disponibles pour la construction, l'acquisition ou la rénovation de logements.

B. LA CONVENTION DU 3 AOUT 1998 A MIS UN TERME AUX PRELEVEMENTS ARBITRAIRES

Le dispositif du 1% logement a été de nombreuses années mis à contribution, afin de financer le prêt à taux zéro, dispositif budgétaire en faveur de l'accession à la propriété des ménages modestes.

La diminution constante du taux de prélèvement sur la masse salariale (réduit progressivement de 1 % à 0,45 % en 1992) a conduit à réduire l'effort des entreprises en faveur des aides à la pierre au profit des aides personnelles, par l'intermédiaire de versements au fonds national d'aide au logement (FNAL).

A cette diminution tendancielle du taux s'est ajoutée, depuis 1995, une série de prélèvements sur la trésorerie des organismes collecteurs du 1 % logement. Ces prélèvements étaient destinés au financement des dispositifs d'accession à la propriété, et notamment, dès sa mise en place, au financement du prêt à taux zéro.

Des négociations ont été engagées entre le gouvernement et les collecteurs du 1 % logement pour trouver une solution de sortie du dispositif de prélèvements sur le 1 % logement, sans mettre en péril le prêt à taux zéro.

La convention du 3 août 1998 a permis de mettre fin au démantèlement progressif du 1 % logement. Le taux de collecte est maintenu à 0,45 % pendant toute la durée de la convention, et la lourde charge de financement du prêt à taux zéro ira en diminuant : la convention donne le montant exact des prélèvements sur le 1% logement et ces prélèvements seront dégressifs jusqu'à s'éteindre dans 5 ans.

Aux termes de la convention, l'UESL verse donc les montants suivants :

- 6,4 milliards de francs en 1999 ;

- 5 milliards de francs en 2000 ;

- 3,4 milliards de francs en 2001 ;

- 1,8 milliard de francs en 2002.

La contribution s'éteint en 2003 . En contrepartie, l'Etat s'engage à maintenir le taux de participation à 0,45 % des salaires et à n'effectuer aucun autre prélèvement.

C. L'APPLICATION DE LA CONVENTION

Depuis 1999, la convention conclue entre l'Etat et l'UESL a connu une application conforme à son objet.

L'article 56 de la loi de finances pour 1999 a prévu un prélèvement de 6,4 milliards de francs sur les organismes collecteurs du 1 % logement. Dès 1999, une partie des crédits destinés au financement des prêts à taux zéro a été rebudgétisée, marquant ainsi une déconnection entre les dépenses liées au prêt à taux zéro et les prélèvements sur les collecteurs de la participation à l'effort de construction.

II. LES DISPOSITIONS DU PRÉSENT ARTICLE

L'article 26 du projet de loi de finances pour 2000 a repris le dispositif de l'article 56 de la loi de finances pour 1999, en limitant le prélèvement à 5 milliards de francs.

Le présent article reprend le dispositif prévu dès 1999, en modifiant simplement le montant des prélèvements.

En effet, le taux de prélèvement choisi pour la première année de réforme procédait d'une estimation des ressources de 1999 sur la base des résultats provisoires de 1998, soit 15,4 milliards de francs.

Ces ressources étaient constituées de deux flux :

la collecte prélevée sur les entreprises, à savoir la participation des employeurs à l'effort de construction proprement dite (0,45 % de la masse salariale des entreprises de plus de 10 salariés) ;

les remboursements de prêts de plus de trois ans.

Pour obtenir le prélèvement souhaité en application de la convention de 1998, il faut tenir compte de l'évolution de ces ressources et modifier en conséquence la fraction des ressources stables servant au calcul du prélèvement : celle-ci a été fixée à 42,6 % en 1999, 32,5 % en 2000, et s'élèvera à 21 % en 2001.

Comme les deux années précédentes, il n'existe pas de risque que la contribution soit supérieure au montant prévu, car le présent article prévoit un plafonnement de la contribution à 3,4 milliards de francs.

Par ailleurs, la contribution des associés non membres de l'UESL est fixée de manière à garantir une égalité de traitement entre tous les organismes, quels que soient leurs liens avec l'UESL. Lorsque le plafond jouera en faveur de l'UESL, c'est-à-dire si la collecte s'arrête à 3,4 milliards de francs, alors que le pourcentage de 21 % n'est pas atteint, les organismes non membres de l'UESL bénéficieront de l'application du même pourcentage de prélèvement réel.

La contribution des organismes non membres de l'UESL est évaluée à 120 millions de francs pour 2001, qui viendront donc s'ajouter au prélèvement de 3,4 milliards de francs pris en application de la convention de 1998.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

II. - RESSOURCES AFFECTÉES

ARTICLE 16

Dispositions relatives aux affectations

Commentaire : le présent article confirme, pour l'année 2001, les affectations résultant des budgets annexes et des comptes spéciaux.

L'article 18 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances dispose que, par exception au principe d'universalité, certaines recettes peuvent être affectées à certaines dépenses par le biais de budgets annexes et de comptes spéciaux du Trésor. L'affectation à un compte spécial est de droit pour les opérations de prêts et d'avances. Au sein même du budget général ou d'un budget annexe, des procédures comptables particulières d'affectation peuvent être décidées par voie réglementaire (fonds de concours ou rétablissements de crédits).

Le présent article propose de confirmer les affectations en vigueur pour l'année 2001, sous réserve des dispositions du présent projet créant de nouvelles affectations ou modifiant les règles de certaines d'entre elles.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 17

Modalités d'affectation de la taxe sur les conventions d'assurance, de la taxe sur les véhicules des sociétés et du droit de consommation sur les tabacs


Commentaire : le présent article propose de procéder à l'affectation du produit de trois recettes fiscales à des organismes de sécurité sociale afin d'assurer le financement de dispositions figurant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

I. LA COMPENSATION PAR L'ÉTAT DE LA RÉDUCTION DE LA CSG SUR LES BAS SALAIRES

A. LA RÉDUCTION DÉGRESSIVE DE CSG ET DE CRDS SUR LES BAS SALAIRES

L'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 propose d'entreprendre une réduction dégressive de la contribution sociale généralisée (CSG) et de la contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les revenus d'activité.

Le dispositif du gouvernement s'inspire du mécanisme de la " ristourne dégressive " sur les bas salaires, dite " ristourne Juppé " : la réduction serait égale au montant total de la CSG et de la CRDS pour des revenus d'activité égaux au salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), puis diminuerait régulièrement jusqu'à disparaître pour des revenus supérieurs ou égaux à 1,3 SMIC.

Comme la " ristourne Juppé ", la réduction dégressive de la CSG et de la CRDS poursuit un objectif d'allégement du coût du travail , destiné à réduire le " coin fiscal et social " pénalisant essentiellement le travail peu qualifié. Il s'agit notamment, selon le gouvernement, de lutter contre le phénomène connu sous le nom de " trappe à inactivité ", qui dissuade trop souvent les allocataires de minima sociaux de reprendre une activité salariée, en raison de la baisse de revenus qu'ils subissent lorsqu'ils retrouvent le marché du travail.

Cette mesure doit entrer en vigueur au 1 er janvier 2001, mais elle s'appliquera de façon progressive, sur une période de trois ans : en 2001, la réduction sera égale au tiers de son montant théorique, et aux deux tiers en 2002. En revanche, rien n'est prévu, volontairement, pour 2003 puisque, à cette date, la présente législature aura pris fin.

Le coût de la réduction dégressive de CSG et de CRDS devrait s'établir à 7,5 milliards de francs en 2001, soit un manque à gagner d'autant pour la sécurité sociale.

B. UNE COMPENSATION EN RÉALITÉ INCOMPLÈTE

1. Un principe... pour le principe

Le I du présent article pose le principe selon lequel " la perte de ressources résultant, pour les régimes obligatoires de base de sécurité sociale et pour les organismes créés pour concourir à leur financement, de la réduction de la contribution sociale prévue [par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001] est compensée chaque année par l'Etat ".

Or, votre commission ne perçoit pas bien l'utilité de cet alinéa.

En effet, il convient de rappeler que l'article 5 de la loi n° 94-637 du 25 juillet 1994 relative à la sécurité sociale, dite " loi Veil ", avait déjà posé le principe similaire, s'agissant toutefois des cotisations sociales : " toute mesure d'exonération, totale ou partielle, de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter de la date d'entrée en vigueur [de la présente loi] donne lieu à compensation intégrale aux régimes concernés par le budget de l'Etat pendant toute la durée de son application ". Le principe posé par le I du présent article a donc pour objet de compléter les dispositions de la loi Veil précitées : les pertes de recettes pour la sécurité sociale doivent être compensées par l'Etat, lorsqu'elles résultent non seulement d'exonérations de cotisations sociales, mais aussi de la réduction de CSG proposée.

Il convient toutefois de noter que poser un tel principe de compensation ne règle pas tous les problèmes, loin s'en faut. Cette situation a d'ailleurs été parfaitement perçue par le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale.

• Il a ainsi insisté sur la limite de la valeur juridique d'un principe exprimé par voie législative, en vertu du principe, général celui-là, selon lequel " ce qu'une loi a fait, une loi peut le défaire ". De surcroît, comme il l'a d'ailleurs rappelé, " un principe ne vaut que par les dispositions concrètes qui déterminent ses conditions d'application ".

• Par ailleurs, il existe des incohérences rédactionnelles entre le présent article et l'article 4 du projet de loi de financement de la sécurité sociale , dont le I porte lui aussi sur le principe de compensation :

- le présent article évoque " la perte de ressources ", tandis que l'article 4 du PLFSS mentionne " la diminution de ressources " ; ces différences dans les termes employés ne constituent qu'une illustration formelle du manque de cohérence entre projet de loi de finances et projet de loi de financement de la sécurité sociale ;

- la même disposition du PLFSS précise que cette diminution de ressources est compensée " intégralement ", ce que n'indique pas le présent article ;

- enfin, ce principe de compensation sera inséré, en vertu de l'article 4 du PLFSS, au III du livre I er du code de la sécurité sociale, sous la forme d'un chapitre 1 er quater , le présent article restant quant à lui muet sur ce point.

Surtout, cette compensation est incomplète. Elle ne concernera en effet que la perte de ressources consécutive, pour la sécurité sociale, à la réduction de CSG.

La perte de ressources résultant de la réduction de la CRDS ne sera pas compensée par le budget de l'Etat : il s'agira donc d'une perte de recettes nette pour la caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES), évaluée à environ 500 millions de francs en 2001.

Sur ce point, le rapporteur général de l'Assemblée nationale, considère que " la bonne santé de l'économie française, en plaçant les revenus d'activité sur une trajectoire dynamique, a modifié dans un sens favorable les conditions de financement de la CADES ".

Or, votre commission ne peut partager cette analyse, qu'elle considère du reste comme extrêmement dangereuse pour l'équilibre financier de la sécurité sociale. En effet, sous prétexte de bonne conjoncture, toute perte de ressources pour la sécurité sociale pourrait ne pas être compensée, puisqu'un regain d'activité se traduit mécaniquement par des recettes supplémentaires, mais aussi par de moindres dépenses, pour les organismes de sécurité sociale.

2. Les modalités de compensation retenues

Le II du présent article prévoit les modalités de la compensation, par le budget de l'Etat, de la réduction de la seule CSG sur les revenus d'activité inférieurs à 1,3 SMIC.

Cette compensation sera assurée par une partie du produit de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance, que le II du présent article propose d'affecter à la sécurité sociale.

La taxe spéciale sur les conventions d'assurance

La taxe spéciale sur les conventions d'assurance est régie par les articles 991 à 1004 bis du code général des impôts.

L'article 991 dispose ainsi que " toute convention d'assurance conclue avec une société ou compagnie d'assurances ou avec tout autre assureur français ou étranger est soumise, quels que soient le lieu et la date auxquels elle est ou a été conclue, à une taxe annuelle et obligatoire moyennant le paiement de laquelle tout écrit qui constate sa formation, sa modification ou sa résiliation amiable, ainsi que les expéditions, extraits ou copies qui en sont délivrés, sont, quel que soit le lieu où ils sont ou ont été rédigés, exonérés du droit de timbre et enregistrés gratis lorsque la formalité est requise. La taxe est perçue sur le montant des sommes stipulées au profit de l'assureur et de tous accessoires dont celui-ci bénéficie directement ou indirectement du fait de l'assuré ".

Le tarif de cette taxe est variable. Il est fixé à :

- 7 % pour les assurances contre l'incendie relatives à des risques agricoles non exonérés ; pour les assurances garantissant les pertes d'exploitation consécutives à l'incendie dans le cadre d'une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ; pour les contrats d'assurance maladie ;

- 9 % pour toutes assurances autres que celles citées ;

- 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur ;

- 19 % pour les assurances contre les risques de toute nature de navigation maritime ou fluviale des bateaux de sport ou de plaisance ;

- 24 % pour les assurances contre l'incendie souscrites auprès des caisses départementales ;

- 30 % pour toutes les autres assurances contre l'incendie.

Elle est normalement liquidée et versée par l'assureur, après dépôt d'une déclaration.

Le fascicule " voies et moyens " annexé au présent projet de loi de finances évalue le montant tendanciel de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance à 28,3 milliards de francs en 2001, en progression de 2,2 % par rapport à 2000, " cohérente avec les évolutions historiques du produit de cette taxe ".

Selon le projet initial du gouvernement, le produit de cette taxe doit être affecté de la façon suivante en 2001 :

- 59,4 %, soit 16,8 milliards de francs, au budget de l'Etat ;

- et 40,6 %, soit 11,5 milliards de francs, aux organismes de sécurité sociale bénéficiaires de la compensation , pour 7,5 milliards de francs, et au fonds de financement de la sécurité sociale (FOREC) , chargé d'assurer le financement des 35 heures, pour les 4 milliards de francs restants.

C'est l'article 4 du PLFSS qui détermine la répartition de ces 7,5 milliards de francs, soit 26,5 % du total du produit de cette taxe, entre les organismes de sécurité sociale concernés par la compensation :

- 5,2 milliards de francs à la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ;

- 1,1 milliard de francs à la caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) ;

- 1,2 milliard de francs au fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Votre commission ne peut que souligner l'extrême complexité de cette " tuyauterie " rendant peu compréhensibles les relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale.

D'ailleurs, sur cette question, le rapporteur général de l'Assemblée nationale s'il " comprend bien la logique " de ce mécanisme, n'en estime pas moins que " cette division des tâches entre deux textes différents mais intimement liés ne contribue ni à la lisibilité de la loi, ni à la sûreté de la procédure ".

II. LES 35 HEURES EN QUÊTE DE FINANCEMENT

A. LE FOREC RESTE TOUJOURS VIRTUEL

1. Les 35 heures auraient dû être financées par le FOREC dès cette année

L'article 5 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000 a créé un fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, dénommé FOREC , dont les dispositions figurent aux articles L. 131-8 et suivants du code de la sécurité sociale.

Le FOREC a pour objet de financer :

- d'une part, les allégements de charges sociales patronales, qui ont été prétendument " réformées " ;

- et, d'autre part, les aides à la réduction du temps de travail.

La création du FOREC résulte donc directement de la décision du gouvernement d'imposer la durée hebdomadaire du travail à 35 heures, tant aux entreprises qu'aux salariés.

2. Une existence jusqu'à présent virtuelle

La réduction du temps de travail est le dispositif sans doute le plus symbolique du gouvernement, et a été menée au " pas de charge ". Pourtant, curieusement, le FOREC n'a toujours, pour l'instant, qu'une existence virtuelle.

En effet, les décrets d'application de l'article 5 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée n'ont toujours pas été publiés , ni le directeur ni les membres du conseil d'administration nommés, ni les conventions financières régissant les relations Etat/FOREC et FOREC/sécurité sociale rédigées.

Les règles de fonctionnement du FOREC

Le fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale est un établissement public national à caractère administratif. Il peut donc faire l'objet de contrôles par la Cour des comptes.

Ses règles de fonctionnement comme ses personnels relèvent d'un statut de droit public.

Un décret en Conseil d'Etat doit fixer :

- la composition du conseil d'administration, qui sera constitué de représentants de l'Etat ;

- la composition du conseil de surveillance, qui comprendra, notamment, des membres du Parlement et des représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations d'employeurs les plus représentatives au plan national ;

- les conditions de fonctionnement et de gestion du fonds.

Le statut du fonds de financement est semblable à celui du fonds de solidarité vieillesse (FSV) et à celui du fonds de financement de la protection complémentaire de la couverture universelle du risque maladie (CMU). En effet, comme eux, le FOREC gère des transferts financiers entre l'Etat et les organismes sociaux.

Il est prévu que les frais d'assiette et de recouvrement des impôts, droits, taxes et contributions constituant les recettes du fonds, sont à la charge de ce dernier, en proportion du produit qui lui est affecté. Leur montant est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés du budget et de la sécurité sociale.

Par ailleurs, des conventions sont prévues entre le fonds de financement et les organismes de protection sociale, d'une part, et le fonds de financement et l'Etat, d'autre part, afin de régler leurs relations financières respectives.

Ces conventions sont notamment destinées à garantir la neutralité en trésorerie des flux financiers pour les organismes de sécurité sociale. Il s'agit en effet d'éviter un éventuel décalage entre le bénéfice de l'exonération de cotisations patronales et sa compensation par le fonds.

En raison de l'absence, à la date d'aujourd'hui, de publication de ces décrets, les ressources du FOREC sont versées à l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et centralisées par elle, à titre transitoire, et jusqu'à la création effective du fonds de financement. Ce retard dans la publication des textes d'application du FOREC est pour le moins étonnant s'agissant d'une mesure aussi emblématique pour le gouvernement.

B. COMME PRÉVU, LE FINANCEMENT DU FOREC N'A PAS ÉTÉ ASSURÉ EN 2000

1. Des prévisions gouvernementales inexactes

Les prévisions initiales du gouvernement relatives à l'équilibre du FOREC en 2000 s'établissaient de la façon suivante :

Or, ces prévisions ne se sont pas réalisées , pour au moins deux raisons :

1) Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 99-423 DC du 13 janvier 2000 portant sur la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, dite " Aubry II ", a annulé la disposition de ladite loi prévoyant la taxation des heures supplémentaires, privant ainsi le FOREC d'une recette de 7 milliards de francs.

2) Le montant des ressources du FOREC ne correspond pas aux prévisions : le produit du droit de consommation sur les tabacs s'est révélé plus élevé que prévu (40,7 milliards de francs au lieu de 39,5 milliards de francs), alors que celui de la TGAP et de la CSB s'est établi à un niveau inférieur (respectivement, 2,8 milliards de francs au lieu de 3,25 milliards de francs, et 3,8 milliards de francs au lieu de 4,25 milliards de francs).

Il est dès lors devenu indispensable, pour le gouvernement, de " boucler " le financement des 35 heures pour 2000 , en assurant l'équilibre du FOREC ex post , faute d'avoir pu le faire ex ante , comme le Sénat l'avait d'ailleurs démontré lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Il convient en effet de rappeler que l'équilibre du FOREC est une obligation légale.

2. Comment " boucler " le financement des 35 heures en 2000 ?

En dépit du déséquilibre initial du FOREC, le gouvernement n'a pas jugé bon de déposer un projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificative pour 2000. Il n'a donc pas voulu prêter attention aux recommandations fort opportunes de la commission des affaires sociales du Sénat.

Il a décidé, pour " boucler " le financement des 35  heures en 2000, d'affecter au FOREC des recettes complémentaires, de façon rétroactive. Mais, en raison des multiples flux financiers existant entre l'Etat et la sécurité sociale, la décision d'affecter une recette provenant du budget général doit être prise par la loi de finances.

Tel est l'objet du IV du présent article , qui prévoit d'affecter le reliquat du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés qui restait affecté au budget de l'Etat en 2000 " aux régimes obligatoires de base de sécurité sociale et aux organismes créés pour concourir à leur financement ", laissant le soin au projet de loi de financement de la sécurité sociale de déterminer la répartition de ce produit.

Ainsi, l'article 11 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit :

- d'affecter au FOREC la quasi-totalité, soit 96,8 %, du droit de consommation sur les tabacs manufacturés 82 ( * ) ; toutefois, cette affectation ne prenant effet qu'au 1 er janvier 2001, il sera nécessaire, pour équilibrer le FOREC en 2000, de prévoir dans le prochain projet de loi de finances rectificative une disposition qui procède à cette affectation à titre rétroactif : le montant du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés continuant de bénéficier au budget de l'Etat est évalué à 3,1 milliards de francs ;

- de verser au FOREC, à titre rétroactif, la totalité du produit des droits sur les boissons (droit de consommation sur les produits intermédiaires ; droit de circulation sur les vins, cidres, poirés et hydromels ; droit sur les bières et les boissons non alcoolisées ; ainsi que 55 % du produit du droit de consommation sur les alcools 83 ( * ) ) actuellement affecté au fonds de solidarité vieillesse (FSV) , pour un montant actuellement estimé à 5,4 milliards de francs.

Le financement des 35 heures, qui ne sera finalement " bouclé " qu'après des contorsions législatives et, probablement, des charges importantes de trésorerie pour les régimes de sécurité sociale en raison des retards de l'Etat, devrait donc s'établir de la façon suivante en 2000 :

Equilibre financier du Forec en 2000

(en milliards de francs)

RECETTES

DEPENSES

Droit de consommation tabac

44,6

Ristourne dégressive 1,3 Smic

39,5

Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés

3,8

Allégement supplémentaire jusqu'à 1,8 Smic

5,8

Taxe générale sur les activités polluantes

2,8

Aides à la réduction du temps de travail

21,7

Droits de consommation alcools

11,5

Taxe sur les conventions d'assurance

-

Taxe sur les véhicules de sociétés

Taxe sur les véhicules de sociétés

Contribution de l'Etat

4,3

Total

67

Total

67

Le coût des 35 heures sera donc plus élevé que prévu, s'établissant à 67 milliards de francs en 2000, au lieu de 64,5 milliards de francs.

C. LES PRÉVISIONS DE FINANCEMENT POUR 2001

1. Des dépenses croissantes

Le coût de la réduction du temps de travail en 2001 est évalué à 85 milliards de francs , après 67 milliards de francs en 2000, une fois entrées en vigueur les mesures destinées à assurer l'équilibre financier du FOREC au cours du présent exercice, soit une augmentation de près de 27%.

Votre commission rappelle que le FOREC supporte trois types de dépenses :

- la " ristourne dégressive " de cotisations patronales sur les bas salaires jusqu'à 1,3 SMIC ;

- l'extension jusqu'à 1,8 SMIC de l'allégement des cotisations patronales, au bénéfice des seules entreprises passées aux 35 heures ;

- et les aides à la réduction du temps de travail : l'aide incitative, instaurée par la loi " Aubry I ", et l'aide pérenne, introduite par la loi " Aubry II ".

Il convient toutefois de préciser que deux mesures existantes sont transférées au FOREC, en 2001, par l'article 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 :

- l'allégement de cotisations patronales de sécurité sociale en faveur de l'aménagement et de la réduction conventionnels du temps de travail, instauré par la loi n° 96-502 du 11 juin 1996, dite " de Robien ", dont les dispositions avaient été reprises des articles 39 et 39-1 de la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 modifiée relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle ; si l'accès à ce dispositif a cessé à compter de l'entrée en vigueur de la loi " Aubry I " du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation à la réduction du temps de travail, les crédits qui lui sont alloués étaient inscrits, jusqu'à présent, au chapitre 44-77 article 20 du budget de l'emploi ;

- les exonérations de cotisations d'allocations familiales concernant les salariés des exploitants agricoles, des entreprises agricoles en zone de revitalisation rurale et des entreprises relevant de certains régimes spéciaux (visées aux articles L. 241-6-2 et L. 241-6-4 du code de la sécurité sociale, et L. 741-5 et L. 741-6 du code rural), l'article 58 du projet de loi de finances pour 2001 prévoyant de supprimer les autres cas particuliers où ces mesures demeuraient applicables, notamment au bénéfice des entreprises non agricoles.

Ces deux transferts engendrent une augmentation des dépenses du FOREC de 3,7 milliards de francs en 2001, de telle sorte que, à " périmètre constant ", la hausse de leur montant n'en reste pas moins de 21,3 % par rapport à 2000.

2. Les recettes : une " tuyauterie " de plus en plus sophistiquée

L'impératif légal que constitue, pour le gouvernement, la nécessité d'équilibrer le FOREC le conduit à rendre plus complexe encore l'" usine à gaz " qu'il avait échafaudée l'année dernière. Il propose en effet d'y ajouter quelques " tuyaux " en 2001.

Votre commission considère que la " tuyauterie " mise en place par le gouvernement a uniquement pour objectif de trouver le moyen de financer un dispositif particulièrement coûteux.

Il convient de rappeler les recettes dont bénéficiera le FOREC en 2001 :

1) la quasi-totalité du produit du droit de consommation sur les tabacs manufacturés ;

2) une grande partie du produit des droits de consommation sur les boissons, dont l'intégralité de celui du droit sur les alcools jusqu'alors affecté au FSV ;

3) le produit de la TGAP, dont l'assiette sera élargie à la taxation de la consommation d'énergie 84 ( * ) ;

4) le produit de la contribution sociale sur les bénéfices des sociétés (CSB) ;

5) enfin, le produit de deux nouvelles recettes affectées : en premier lieu, l'intégralité du produit de la taxe sur les véhicules des sociétés , soit 4 milliards de francs en 2001, dont l'affectation au FOREC est proposée par le III du présent article , et, en second lieu, une autre part , équivalant à 4 milliards de francs en 2001, de la taxe sur les conventions d'assurance , dont l'affectation est prévue par le II du présent article .

La taxe sur les véhicules des sociétés

La taxe sur les véhicules des sociétés est régie par les dispositions de l'article 1010 du code général des impôts.

Il s'agit d'une taxe annuelle non déductible pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés frappant les véhicules immatriculés dans la catégorie des voitures particulières, possédés ou utilisés par les sociétés.

Elle connaît deux tarifs :

- 7.400 francs pour les véhicules dont la puissance fiscale n'excède pas 7 CV ;

- 16.000 francs pour les autres véhicules.

La taxe n'est toutefois pas applicable aux véhicules destinés exclusivement soit à la vente, soit à la location de courte durée, soit à l'exécution d'un service de transport à la disposition du public, lorsque ces opérations correspondent à l'activité normale de la société propriétaire. Lorsqu'elle est exigible en raison des véhicules pris en location, la taxe est à la charge de la société locataire.

Il convient de noter que la contribution du budget de l'Etat au FOREC, qui s'établissait à 4,3 milliards de francs en 2000, est supprimée en 2001.

Le tableau ci-après retrace le plan de financement des 35 heures prévu pour 2001 :

Toutefois, la plus grande incertitude demeure sur le coût de la réduction du temps de travail à terme, c'est-à-dire lorsque l'ensemble des entreprises sera passé aux 35 heures, à partir du 1 er janvier 2002.

Notre collègue député Jérôme Cahuzac note ainsi, dans l'avis qu'il a établi sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale, que " pour l'avenir, l'administration n'a pas été en mesure de fournir un tableau prévisionnel de l'équilibre du FOREC en rythme de croisière. Il n'est donc pas possible, aujourd'hui, d'assurer que les modalités de financement retenues pour 2001 permettront de faire face aux dépenses du FOREC en rythme normal, qui étaient estimées, l'an passé, à 105 milliards de francs par an, soit encore 20 milliards de francs de plus que prévu pour 2001 " 85 ( * ) .

Il faudrait donc s'attendre à voir se renouveler, l'année prochaine, le même exercice visant à un " bouclage équilibriste " du FOREC.

Votre rapporteur général, quant à lui, continue à considérer que le coût annuel des 35 heures, en " rythme de croisière ", sera de l'ordre de 110 milliards de francs, c'est-à-dire sensiblement plus que la totalité des investissements civils de l'Etat...

III. LA POSITION DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté le présent article, en l'amendant toutefois sur deux points.

Au I du présent article, elle a adopté un amendement de nature rédactionnelle, précisant que la réduction de la CSG, que le présent article vise précisément à compenser, est prévue à l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Surtout, elle a adopté un amendement destiné à tirer les conséquences de l'extension de 1,3 à 1,4 SMIC de la réduction de CSG et de CRDS, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 à l'Assemblée nationale.

Cette mesure se traduit par une perte de ressources supplémentaire pour la sécurité sociale de 940 millions de francs, que le budget de l'Etat devra, en vertu du I du présent article, entièrement compenser. C'est pourquoi l'amendement adopté au II du présent article prévoit d'accroître la fraction de la taxe sur les conventions d'assurance affectée à la sécurité sociale : les pourcentages 59,4 % et 40,6 % sont donc remplacés, respectivement, par les pourcentages 56,1 % et 43,9 %.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission considère que, au-delà des dispositions techniques proposées par le présent article, son appréciation doit porter sur le fond des politiques décidées par le gouvernement.

Or, elle juge inacceptable de bouleverser la cohérence interne de la CSG comme de cautionner le coût exorbitant d'une promesse électorale aux effets néfastes.

A. REMPLACER LA RÉDUCTION DE CSG ET DE CRDS PAR UN CRÉDIT D'IMPÔT

La ristourne de CSG et de CRDS sur les bas salaires est une " fausse bonne idée ", qui aurait pour conséquence de s'attaquer à la cohérence d'impositions dont les qualités sont pourtant reconnues - base d'imposition large, taux réduits, proportionnalité. Il convient en effet d'éviter que la CSG ne connaisse, à terme, le même sort que l'impôt sur le revenu, dont le nombre d'abattements ou d'exonérations divers le rend excessivement complexe et payé par seulement la moitié des contribuables.

A ce titre, votre commission, conjointement avec la commission des affaires sociales, vous proposera de substituer un système de crédit d'impôt à cette réduction de CSG et de CRDS.

Cette proposition est plus intéressante que ladite réduction, et permet de répondre à un certain nombre de problèmes soulevés par cette réforme : elle prend en considération la situation familiale des intéressés, et tient compte des salariés ayant plusieurs activités et donc plusieurs revenus soumis, séparément, à la CSG et à la CRDS.

Enfin, elle évite de bouleverser le financement de la sécurité sociale, comme le fait la proposition du gouvernement.

B. LES MULTIPLES EFFETS NÉFASTES DES 35 HEURES ET DE LEURS MODALITÉS DE FINANCEMENT

1. Des affectations de recettes dépourvues de tout lien avec l'objet de la mesure à financer

Votre rapporteur général ne peut que constater l'absence de cohérence, au sein du FOREC, entre les affectations proposées de recettes à des dépenses dont l'objet est sans lien avec l'origine des ressources.

Cette " tuyauterie " paraît contraire à l'un des principes de base du droit budgétaire français, la non-affectation des recettes aux dépenses. Si ce principe s'applique au budget de l'Etat, il ne devrait pas être étranger, à ce point, aux divers fonds de financement, puisque ceux-ci ont vocation à isoler des politiques publiques et les moyens qui leur sont affectés, en principe dans un but de visibilité et donc de simplification de la présentation des actions de l'Etat.

Mais au-delà des principes, votre commission considère que cette situation est source de risques réels. En effet, quel devrait être l'objet d'une imposition des tabacs, des alcools, ou des activités polluantes ? Logiquement, du point de vue de la rationalité économique, ce type d'imposition a un but dissuasif : réduire la consommation de produits qui peuvent être dangereux pour la santé, ou inciter à l'utilisation d'énergies propres protectrices de l'environnement, afin d'acquitter une imposition moins importante.

Or, l'affectation du produit de ce type d'impôts au FOREC va à l'encontre de ces objectifs.

L'affectation à des dépenses pérennes d'impôts aussi sensibles transforme la nature de ces derniers : l'objectif de santé publique ou de protection de l'environnement passe au second plan, le rendement fiscal devenant prioritaire.

Ainsi, en 2001, le coût des 35 heures sera supporté, à hauteur de 71 milliards de francs, soit 83,5 % du total, par les droits de consommation sur les tabacs manufacturés et sur les alcools, ainsi que par la TGAP.

2. Le coût de la politique de l'emploi devient illisible

Votre rapporteur général s'interroge sur les raisons qui ont poussé le gouvernement à intégrer le financement de la réduction du temps de travail dans la loi de financement de la sécurité sociale. Les 35 heures, en effet, constituent - et c'est d'ailleurs bien ainsi que le gouvernement les a présentées - un dispositif de la politique de l'emploi. Elles devraient à ce titre être supportées par le budget de l'Etat.

En décidant de créer un fonds distinct du budget général, le gouvernement a procédé à une débudgétisation massive, extrêmement préjudiciable à la sincérité des comptes publics , alors que, dans le même temps, il proclame ses bonnes intentions en la matière. Ainsi note-t-il, dans l'exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2001, que ce dernier " comporte, dans un souci de clarté, des modifications de périmètre qui font l'objet d'une charte de débudgétisation ", tandis qu'il annonce plus loin " la poursuite de la clarification des relations entre l'Etat et la sécurité sociale ".

Cette débudgétisation massive lui permet aussi de contenir en apparence les dépenses de l'Etat qui, sinon, auraient augmenté, avec les 35 heures, dans des proportions incompatibles avec nos engagements européens. Le gouvernement se sert donc des liens entre lois de finances et lois de financement pour " piloter " " certains indicateurs stratégiques, comme le rythme d'évolution des dépenses, au prix de complexités, et de contorsions comptables. De plus, le coût de la politique de l'emploi devient illisible, comme l'a fort opportunément rappelé notre collègue Joseph Ostermann, rapporteur spécial du budget de l'emploi.

Il convient donc, pour l'appréhender dans sa réalité, d'ajouter les charges du FOREC (85 milliards de francs) aux crédits inscrits sur la section emploi du budget de l'Etat (111,83 milliards de francs) : le coût de la politique de l'emploi s'établit ainsi à 196,83 milliards de francs en 2001.

3. Les effets sur l'emploi sont incertains

Dans leur rapport consacré à l'application de la loi de financement de la sécurité sociale, nos collègues Charles Descours, Jacques Machet et Alain Vasselle estimaient que " le nombre d'emplois créé par les 35 heures ne sera jamais connu " 86 ( * ) .

Ils appuyaient leur démonstration sur le fait que la loi " Aubry II " prévoit seulement un vague " engagement de création d'emplois ", ajoutant que les services compétents de l'Etat, en l'occurrence les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, disposaient d'une marge de manoeuvre certaine pour apprécier le respect des engagements de créations d'emplois contenus dans les accords. Ils rappelaient pourtant que " la communication gouvernementale [...] rapproche souvent le nombre d'emplois créés de manière générale des engagements de créations d'emplois ".

Votre rapporteur général partage entièrement cette analyse, du reste confirmée par l'examen des informations communiquées par le gouvernement.

En effet, l'exploitation des informations transmises par les directions régionales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle faisait apparaître les résultats suivants, au 31 août 2000 :

Ensemble des accords RTT (lois Aubry) au 31 août 2000

Entreprises recevant

l'aide

incitative

l'aide structurelle

seule

aucune aide

(non éligibles)

Total

Accords

29.039

5.370

13

34.422

Effectifs concernés

1.848.319

1.366.408

606.808

3.821.535

Créations ou préservations d'emplois annoncées

143.814

58.942

19.277

222.033

dont engagements sur des créations d'emplois

132.066

52.590

11.227

195.883

dont engagements sur des préservations d'emplois

11.748

6.352

8.050

26.150

Source : MES-DGEFP, accords pour lesquels l'ensemble des informations sont renseignées

dont accords signés avant le 31 décembre 1999

l'aide

incitative

l'aide structurelle

seule

aucune aide

(non éligibles)

Total

Accords

27.502

1.042

9

28.553

Effectifs concernés

1.838.170

705.882

599.520

3.143.572

Créations ou préservations d'emplois annoncées

142.184

24.732

18.864

185.780

Source : MES-DGEFP.

Ainsi, à cette date, plus de 222.000 emplois auraient été créés ou préservés grâce à la réduction du temps de travail.

Le ministère de l'emploi et de la solidarité n'est pas capable de distinguer clairement les emplois créés, d'une part, et les emplois préservés, d'autre part.

Surtout, quand il s'y essaie, il ne peut que mentionner des engagements soit de créations soit de préservations d'emplois, et non des effets certains.

Par ailleurs, dans ses commentaires, le ministère indique, s'agissant du second des tableaux présentés ci-dessus, que " dans la mesure où certains emplois auraient de toute façon été créés ou maintenus, les effets nets de la réduction du temps de travail sur l'emploi sont moins importants ". Les effets d'aubaine interviennent donc de façon certaine, et rendent encore plus délicate l'estimation de l'effet des 35 heures sur l'emploi.

D'autant plus que, comme le précise lui-même le ministère, " les engagements d'emplois peuvent être remplis sous la forme d'une hausse de la durée du travail de salariés à temps partiel ".

Il semble donc avéré par les services du ministère de l'emploi eux-mêmes que, la réduction du temps de travail a des effets pour le moins incertains sur l'emploi.

Cette incertitude est d'ailleurs à l'origine de divergences d'appréciation au sein des services de l'Etat sur les effets des 35 heures.

Le ministère de l'emploi et de la solidarité, on l'a vu, estime à plus de 220.000 le nombre d'emplois créés ou préservés grâce aux 35 heures. Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie est, quant à lui beaucoup moins optimiste.

Le rapport économique, social et financier accompagnant le projet de loi de finances pour 2001 prévoit en effet que " de 1999 à 2001, la réduction du temps de travail pourrait conduire à créer entre 220.000 et 280.000 emplois ". L'utilisation du conditionnel comme la marge assez importante en termes de créations d'emplois montrent que la prudence est de mise. Il note également que " la diffusion des 35 heures a été accélérée par le dispositif incitatif de la 1 ère loi et le rythme de progression du nombre de salariés couverts fléchirait un peu en 2000 et 2001 ; ce nombre passerait de plus de 5.000.000 fin 2000 à environ 7.000.000 fin 2001 ".

Pourtant, il estime à environ 770.000 le nombre d'emplois salariés créés dans le secteur marchand au cours des années 2000 et 2001. Autrement dit, les créations d'emplois résulteront bien davantage de la croissance que des 35 heures !

4. Les effets néfastes sur l'environnement économique

Si les 35 heures ont des effets incertains sur l'emploi, en revanche elles ont des effets déjà perceptibles sur l'environnement économique du secteur productif. Ceux-ci sont loin d'être positifs.

La réduction du temps de travail pénalise la compétitivité des entreprises.

Le passage de la durée hebdomadaire du travail de 39 heures à 35 heures sans baisse de salaire entraîne mécaniquement une hausse du coût horaire de 11,4 %, ce qui ne peut que détériorer le compétitivité des entreprises.

Or, la revalorisation sensible du taux horaire du SMIC, de 3,2 %, intervenue le 1 er juillet dernier, s'applique à l'ensemble des entreprises, y compris celles qui ne sont pas encore passées aux 35 heures, soit parce qu'elles n'ont pas signé d'accord, soit parce que, ayant moins de 20 salariés, elles ne seront concernées par la réduction du temps de travail qu'à partir du 1 er janvier 2002.

Les 35 heures vont donc directement pénaliser les petites entreprises, en renchérissant le coût du travail, alors qu'elles ne les appliquent pas encore !

Il convient par ailleurs de rappeler que, pour les entreprises ayant réduit leur temps de travail, la loi " Aubry II " a mis en place le système complexe de la garantie mensuelle devant permettre aux salariés payés au SMIC de ne pas voir leur rémunération diminuer, en réduisant l'écart entre le salaire minimum horaire appliqué aux 35 heures et le SMIC mensuel. Mais, pour des raisons politiques évidentes, il ne faut pas douter que le taux horaire du SMIC et son montant mensuel ne se rejoignent au cours des prochaines années, grâce, notamment, à des " coups de pouce " réguliers.

Or, dans une étude très instructive parue dans sa revue mensuelle de juillet 2000, Économie et statistique , l'INSEE indique qu' " une augmentation de 10 % du SMIC détruirait environ 290.000 emplois, à long terme ". Cette évolution entraînerait de nombreuses destructions d'emplois, s'accompagnant d'une nette diminution de la production et d'une dégradation des comptes publics consécutive à des ressources en cotisations sociales plus faibles mais également à des dépenses plus importantes sous forme de prestations.

A la même époque, l'OCDE estimait que la forte croissance attendue en France en 2000 et 2001 pourrait être freinée par des tensions sur le marché du travail, liées notamment à la réduction du temps de travail.

La réduction du temps de travail comporte des risques inflationnistes.

L'OCDE jugeait également que les emplois résultant de la réduction du temps de travail risquaient, à court terme, d'entraîner une hausse de l'inflation, en raison de la hausse des salaires qu'elle pourrait susciter : " la réduction de la durée du travail et la gestion du salaire minimum doivent être menées avec prudence et pragmatisme " concluait-elle. Certes, la modération salariale prévaut actuellement en France depuis l'adoption des lois " Aubry ", mais elle est essentiellement contrainte. Elle pénalise ainsi la demande, relativement forte en raison de la bonne tenue de la conjoncture, et suscite des tensions sociales, alors que, dans le même temps, les capacités d'offre sont bridées.

Les 35 heures sont ainsi à l'origine d'une situation paradoxale : soit elles suscitent des hausses de salaires, ce qui provoque des tensions inflationnistes, soit elles fondent une modération salariale, ce qui pénalise l'appareil de production !

La réduction du temps de travail tend à réduire la capacité de production des entreprises.

Il est pour le moins paradoxal de constater la concomitance actuelle du chômage, certes en réduction, mais dont le taux s'élève encore à 9,6 % de la population active, et les difficultés croissantes à recruter, les entreprises étant confrontées à de réelles pénuries de main-d'oeuvre 87 ( * ) .

Les 35 heures, en effet, créent une réelle contrainte d'offre dans l'économie française. C'est d'ailleurs dans ce contexte qu'est apparu un débat sur l'application des 35 heures aux petites et moyennes entreprises (PME).

Ce débat a d'ailleurs été initié par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Laurent Fabius, qui avait d'abord considéré qu'il fallait aborder la question des 35 heures dans les PME " avec souplesse ", puis qui, observant que la croissance plafonnait en France, estime qu'il convient de ne pas " céder à la vieille tentation malthusienne consistant à réduire notre capacité de produire " 88 ( * ) . Il ajoutait : " la mis en oeuvre [des 35 heures] doit prendre en compte la diversité des situations concrètes ; nous devons veiller à ce que les entreprises, notamment les PME, ne se heurtent pas à une impossibilité de produire davantage en raison de difficultés d'embauche ou de formation ".

Sans doute le ministre n'a-t-il pas été insensible aux analyses de l'OCDE qui, dans son étude précitée de juillet 2000, estimait que la loi " Aubry II ", " si elle n'est pas mise en place avec la souplesse suffisante ", pourrait " peser sur les coûts de production et la compétitivité des entreprises ". Les PME, notamment, auront du mal à dégager des gains de productivité, ce qui aura de graves conséquences pour elles : " les entreprises de moins de 20 salariés ont une marge de manoeuvre réduite pour embaucher ou réorganiser le travail et les 35 heures pourraient bien se traduire soit par une baisse de production, soit par un coût plus élevé ".

Votre rapporteur général considère qu'il est nécessaire, au titre de la souplesse réclamée par le ministre lui-même, de modifier la législation sur la réduction du temps de travail. Il ne peut, dès lors, qu'être favorable à la proposition de loi présentée par notre collègue Alain Gournac, visant à reporter à 2004 l'abaissement de la durée du travail pour les entreprises de moins de 20 salariés, et à assouplir les règles de recours aux heures supplémentaires.

La réduction du temps de travail nuit à l'attractivité de la France.

D'après une étude récente du cabinet de consultants Ernst et Young, 65 % des dirigeants de filiales françaises de multinationales estiment que, si leur groupe devait investir en Europe aujourd'hui, il ne choisirait pas la France.

En dépit des atouts de notre pays, ces dirigeants citent, parmi ses principaux handicaps, le poids des prélèvements fiscaux et sociaux, pour 93 % d'entre eux, les rigidités sociales, pour 85 %, les 35 heures, pour 84 %, les lourdeurs administratives, pour 62 %, et la fiscalité des stock-options, pour 58 %. De surcroît, 44 % des entreprises interrogées envisagent de délocaliser à l'étranger une partie de leurs activités implantées en France.

Les 35 heures occupent ainsi la troisième place sur la liste des principaux handicaps français.

Il est clair, en effet, que, à l'heure où l'on parle de plus en plus du phénomène de la " fuite des cerveaux ", la réduction du temps de travail dégrade l'image de la France à l'étranger. Ainsi, seulement 40 % des cadres dirigeants des entreprises concernées ont une image positive de la France. Cette situation résulte en partie de " la communication inefficace sur les 35 heures, totalement incomprise à l'étranger ". En revanche, 80 % d'entre eux ont une image positive des autres pays européens.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 18

Détermination du montant du prélèvement de solidarité pour l'eau affecté au compte d'affectation spéciale n° 902-00 " Fonds national de l'eau "

Commentaire : le présent article propose de renouveler pour 2001, au même montant de 500 millions de francs et avec la même répartition entre les agences, le prélèvement dit " de solidarité " sur les agences de l'eau, destiné à abonder le " Fonds national de solidarité sur l'eau " qui prend en charge le financement de missions régaliennes de l'Etat en matière de politique de l'eau.

I. LE DISPOSITIF ACTUEL

A. LA CRÉATION DU FNSE

L'article 58 de la loi de finances initiale pour 2000 89 ( * ) a renommé le compte d'affectation spéciale n° 902-00 " Fonds national de développement des adductions d'eau " (FNDAE) en " Fonds national de l'eau " (FNE) et créé deux sections autonomes en son sein 90 ( * ) :

• l'une correspondant à l'ancien FNDAE, géré par le ministre de l'agriculture ;

• l'autre à un nouveau fonds dénommé " Fonds national de solidarité pour l'eau " (FNSE) qui concerne les opérations relatives aux actions de solidarité pour l'eau et qui est géré par le ministre chargé de l'environnement.

Chacune de ces sections a ses dépenses, ses recettes propres, son comité de gestion ainsi que son ministère dépensier. En particulier, le FNSE est géré par le ministre chargé de l'environnement, assisté par un comité consultatif dont la composition est fixée par un décret publié neuf mois après la promulgation de la loi 91 ( * ) . Ce comité, composé de trente-deux membres, " émet un avis sur le projet de programmation annuelle des crédits du FNSE et sur le bilan annuel de l'utilisation de ces crédits ". Institué par un décret de septembre 2000, il n'a pas encore été réuni et ne s'est donc pas prononcé sur le présent article.

Ce fonds a pour objectifs :

• d'une part de renforcer les moyens de l'Etat dans le domaine de la politique de l'eau . Les " programmes publics d'intérêt national " (préservation des zones humides, économies d'eau dans les quartiers d'habitat social dégradés, connaissance de la ressource en eau, assainissement outre-mer, etc.) sont pris en charge par ce fonds ;

• et d'autre part de mener des actions de péréquation entre bassins .

Actions financées en 2000

(en millions de francs)

Actions financées

DO

AP-CP

Péréquation inter-bassins

Restauration des rivières et des zones d'expansion des crues

Réduction des pollutions diffuses

Restauration des zones humides

4

-

-

4

180

90

70

20

Solidarité nationale dans le domaine de l'eau

Incitation aux économies d'eau dans l'habitat collectif social

Assainissement dans les DOM TOM

Bassin minier de Lorraine

Reconquête de la qualité des eaux pollués du Nord Pas de Calais

-

-

-

-

-

94,5

20

42,5

20

12

Connaissance de l'eau, de la pêche et des milieux aquatiques

Données, mesures, contrôles de la pêche et des milieux aquatiques

Données, mesures et contrôles en matière d'eau

150,3

50

100,3

17,5

-

17,5

Actions d'intérêt commun aux bassins

Actions inter-bassins

Fonctionnement de la Mission et de l'Inspection inter-agences

37,5

32,5

5

-

-

-

Instances de concertation relatives à la politique de l'eau

10,4

-

TOTAL

208

292

Source : ministère de l'économie

B. LES RECETTES DU FNSE : UN PRÉLÈVEMENT SUR LES AGENCES DE L'EAU

Le FNSE comporte en recettes, outre des recettes diverses ou accidentelles, le produit d'un prélèvement de solidarité pour l'eau versé à l'Etat par les agences de l'eau et dont le montant est déterminé chaque année en loi de finances. Le montant de ce prélèvement est inscrit comme dépense obligatoire dans le budget primitif des agences de l'eau. La répartition du prélèvement entre les différentes agences est fondée :

- pour un tiers sur la part de chaque bassin dans la population recensée en métropole 92 ( * ) ;

- et, pour les deux autres tiers, sur la part de chaque bassin dans le montant total des redevances autorisées pendant la durée du programme pluriannuel (actuellement le VIIème programme est en cours, sur la période 1997-2001).

Plafond du montant des redevances autorisées pour le VIIème programme

(en millions de francs)

Agence

Montant

Adour-Garonne

4.180

Artois-Picardie

3.780

Loire-Bretagne

7.100

Rhin-Meuse

4.780

Rhône-Méditerranée-Corse

11.480

Seine-Normandie

19.750

TOTAL

51.070

La répartition des 500 millions de francs prévus en 2000 pour ce prélèvement s'est établie de la façon suivante :

Répartition du prélèvement par bassin pour 2000 93 ( * )

(en millions de francs et %)

Agences de l'eau

Montant du prélèvement

Pourcentage du total

Artois Picardie

38,3

7,7 %

Rhin Meuse

42,3

8,5 %

Adour Garonne

46

9,2 %

Loire Bretagne

79,7

15,9 %

Rhône Méditerranée Corse

115,2

23,0 %

Seine Normandie

178,5

35,7 %

Total

500

100 %

Source : ministère de l'aménagement du territoire et de l'environnement

Cette répartition ne serait pas modifiée en 2001.

Le FNSE s'est substitué à deux fonds de concours abondés par les agences de l'eau qui, d'un montant 250 millions de francs, étaient rattachés au budget de l'environnement et qui traduisaient la participation des agences de l'eau aux missions régaliennes de l'Etat en matière de politique de l'eau.

Le prélèvement instauré par la loi de finances pour 2000 (500 millions de francs) a donc correspondu en réalité à un prélèvement supplémentaire de 250 millions de francs , compte tenu de la disparition des deux fonds de concours. Ces 500 millions de francs ont représenté environ 4 % des redevances perçues en 2000. Ce pourcentage de prélèvement pourrait augmenter jusqu'à un maximum de 8 % avant 2008.

²

II. LE PROJET DU GOUVERNEMENT

Le gouvernement propose dans le présent article de reconduire ce prélèvement pour 2001 à un niveau et avec une répartition identiques à celle de 2000.

Ce montant de 500 millions de francs sera complété par la perception de recettes diverses à hauteur de 12 millions de francs provenant de participations relatives au programme Saône-Rhin et au financement des réseaux d'hydrométrie.

Pour 2001, la nomenclature du fonds est modifiée. Et des mesures de clarification des dépenses relevant du budget général et du fonds conduisent à faire financer par ce dernier les mesures suivantes :

- les comités de bassin,

- les études de planification,

- les futurs offices de l'eau dans les DOM,

- la subvention de fonctionnement pour l'office international de l'eau,

- les plans migrateurs,

- le programme de restauration de l'étang de Berre.

Les actions financées en 2001 sont retracées dans le tableau suivant.

Actions prévues en 2001

(en millions de francs)

Actions financées

DO

AP-CP

Péréquation métropole

Restauration des rivières et des zones d'expansion des crues

Restauration des zones humides

Economies d'eau dans l'habitat collectif

Après mines Lorraine

Noues toxiques Nord-Pas-de-Calais / sédiments pollués

Plan migrateur

Etang de Berre

13,47

-

10

-

1,2

1

0,27

1

172,69

110

-

20

18,8

11

6

6,89

Solidarité DOM-TOM

Assainissement dans les DOM TOM

Offices de l'eau DOM

Comités de bassin DOM

SDAGE DOM

9,92

-

4

1,8

4,12

42,5

42,5

-

-

-

Connaissance et maîtrise des données sur l'eau, la pêche et les milieux aquatiques

Moyens techniques du CSP

Etudes locales de connaissance de l'eau, de la pêche et des milieux aquatiques

Recueil et valorisation des données - équipement des réseaux de mesure - conventions d'études aux établissements publics d'Etat

132,22

50

17,72

64,5

16

-

-

16

Actions de sensibilisation et de promotion du domaine de l'eau

Actions inter-bassins

Formation, actions internationales

Office international de l'eau - subvention de fonctionnement

29,80

26

1,5

2,3

-

-

-

-

Opérations " pollutions diffuses "

Pollutions diffuses - programme pesticides bassin versant Bretagne

81

81

2,4

2,4

TOTAL

266,41

233,59

Source : ministère de l'économie

III. L'APPRÉCIATION DE VOTRE COMMISSION

A. FAIRE FINANCER DES DÉPENSES RÉGALIENNES PAR LES AGENCES

Le rattachement du FNSE au budget de l'environnement constitue des moyens supplémentaires mis à la disposition de la direction de l'eau . Ainsi, le prélèvement de 500 millions de francs sur les agences a permis en 2000 d'augmenter de 95 % les moyens d'intervention de la direction de l'eau . En 2001, compte tenu de l'augmentation propre des moyens de la direction (qui passent de 264 millions de francs à 279 millions de francs), l'apport n'est plus que de 90 % mais il demeure substantiel.

Les moyens de l'Etat s'agissant de la politique de l'eau (environ 2 milliards de francs) sont en effet actuellement sans commune mesure avec les sommes gérées au niveau local, notamment par les collectivités locales (environ 75 milliards de francs) et les agences de l'eau (environ 12 milliards de francs 94 ( * ) ).

Votre rapporteur général ne peut que réitérer les réserves déjà exprimées l'an dernier à l'occasion de l'examen de l'article 58 de la loi de finances pour 2000. En particulier, il s'étonne que l'on ait choisi la voie d'un compte d'affectation spéciale pour financer des dépenses qui auraient pu relever des missions régaliennes de l'Etat. En effet, le critère de répartition des dépenses entre le budget du ministère et le compte spécial du Trésor n'est pas évident, en dépit d'une " clarification " censée être intervenue cette année. Les actions de solidarité ne constituent-elles pas le coeur de l'action de l'Etat ? les actions en faveur des poissons migrateurs doivent-elles relever du compte et pour quelles raisons ?

En outre, on peut regretter la dégradation de l'équilibre entre fonctionnement et investissement du FNSE : les dépenses de fonctionnement qui ne représentaient en 2000 que 42 % du total, constituent en 2001 53 % des 500 millions de francs du fonds.

Répartition des dépenses du FNSE entre fonctionnement et investissement

(en millions de francs)

Année

Dépenses de fonctionnement

Dépenses d'investissement

2000

208 (42 %)

292 (58 %)

2001

266,41 (53 %)

233,59 (47 %)

B. LE FNSE N'A QUE TRÈS PEU CONSOMMÉ LES CRÉDITS VOTÉS L'AN DERNIER

Il ne s'agit pas tant d'une recentralisation des actions des agences - à l'exception du programme d'études inter-agences et des actions de communication, les actions financées ne coïncident pas avec des actions financées par les agences - que d'un détournement de financement des agences vers l'Etat.

Pourquoi faut-il donc retirer ces sommes aux agences qui vont connaître, de l'avis même du ministère de l'environnement 95 ( * ) , une " reprise forte des investissements " et la confirmation de " l'impact du programme de maîtrise des pollutions d'origine agricole (PMPOA) " en 2001, alors qu'elles ne seront pas intégralement utilisées par la direction de l'eau et ne feront que grossir artificiellement les moyens d'intervention du ministère de l'environnement ?

Certaines agences ont d'ores et déjà annoncé qu'elles comptaient réduire les crédits accordés aux collectivités locales, arguant du prélèvement ici commenté.

Votre rapporteur général estime donc que la situation n'est pas saine. L'Etat doit assumer les dépenses de solidarité et financer sur ses propres crédits les dépenses qui lui reviennent ; s'il estime que les agences sont trop " riches " 96 ( * ) , le ministre de l'environnement pourra, lors de la préparation des VIIIème programmes, renégocier les plafonds de redevances accordés à chaque agence.

C'est pourquoi votre commission vous propose d'instituer une " année blanche " en matière de prélèvement sur les agences de l'eau, d'autant que le prochain projet de loi de réforme de la politique de l'eau, annoncé pour le printemps 2001, doit être l'occasion de reposer ces questions et de leur trouver des réponses plus adaptées pour les prochaines années.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 19

Modification des quotités de répartition de la taxe d'aviation civile entre le budget annexe de l'aviation civile et le compte spécial n° 902-25 " Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien "

Commentaire : le présent article propose de modifier la clef de répartition du produit de la taxe d'aviation civile en majorant la part de ce produit affectée au budget annexe de l'aviation civile qui passerait de 77,7 % à 83,6 %, tandis que celle affectée au " Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien " (FIATA) passerait de 22,3 % à 16,4 %.

I. RAPPEL DU CONTEXTE

La loi de finances pour 1999 a, à la fois, créé la taxe d'aviation civile (TAC) et le mécanisme de l'affectation de son produit entre le budget annexe de l'aviation et le FIATA, ainsi qu'avec celui-ci, un nouveau compte d'affectation spéciale.

A. LE RÉGIME DE LA TAXE D'AVIATION CIVILE

L'article 51 de la loi de finances pour 1999 a institué la taxe d'aviation civile qui constitue une version élargie de la précédente taxe de sécurité et de sûreté dont le produit était, depuis sa création en 1985, sous l'intitulé alors de taxe de sûreté, versé en totalité au budget annexe de l'aviation civile (BAAC).

La taxe d'aviation civile qui, nouveauté de son régime par rapport à celui de sa devancière, s'applique également au fret, est exigible pour chaque vol commercial.

Elle est assise sur le nombre de passagers et la masse de fret et de courrier embarqués en France, quelles que soient les conditions tarifaires accordées par le transporteur, avec quelques exceptions pour les personnels dont la présence à bord est directement liée au vol considéré (membres de l'équipage assurant le vol, agents de sûreté ou de police, accompagnateurs de fret), les enfants de moins de deux ans et les passagers en transit direct, le fret ou le courrier effectuant un arrêt momentané sur l'aéroport et repartant par le même aéronef.

Le tarif de la taxe, qui est inchangé depuis sa création, est le suivant :

- 22,90 francs par passager embarqué à destination de la France ou d'un autre Etat-membre de la Communauté européenne ;

- 38,90 francs par passager embarqué vers d'autres destinations ;

- 6 francs par tonne de courrier ou de fret embarquée.

Ce tarif a été calculé à l'origine en tenant compte de la suppression de la taxe de péréquation des transports aériens (TPTA) qui a alors été intégré dans la nouvelle taxe d'aviation civile. La TPTA devait rapporter 51 millions de francs en 1999.

B. L'AFFECTATION DU PRODUIT DE LA TAXE D'AVIATION CIVILE

Si la taxe de sécurité et de sûreté était en totalité affectée au budget annexe de l'aviation civile, il en va autrement pour la taxe d'aviation civile dont le produit est affecté pour partie au BAAC et pour une autre partie au FIATA.

Le FIATA est également une création de la loi de finances pour 1999. Il s'agit d'un compte d'affectation spéciale issu de la modification du périmètre de l'ancien Fonds de péréquation des transports aériens (FPTA). Celui-ci avait pour vocation exclusive de financer les déficits d'exploitation des " lignes aériennes d'aménagement du territoire ". Il était financé par la TPTA précitée.

Le FIATA conserve un chapitre qui reprend les charges du FPTA mais son objet est plus large. Il a en effet également pour double-vocation d'abriter les crédits autrefois logés dans le BAAC destinés aux dépenses directes de l'Etat en matière de sécurité et de sûreté et ceux nécessaires au versement des subventions aux aéroports pour lesquels le produit de la taxe d'aéroport, également créée par la loi de finances pour 1999, qui leur est directement affecté ne permettrait pas de couvrir les coûts des mesures de sûreté dont le financement leur incombe.

Le FIATA est donc un compte permettant de clarifier les interventions de l'Etat dans les domaines de la sécurité et de la sûreté du transport aérien, et d'alléger le BAAC d'un ensemble de crédits dont le financement n'était pas sans poser de redoutables problèmes juridiques et financiers identifiés par le rapporteur spécial de votre commission des finances chargé de l'aviation civile 97 ( * ) .

Il est aussi un compte permettant d'assurer une certaine péréquation au profit, d'une part, de l'exploitation des " lignes d'aménagement du territoire " et, d'autre part, des petits aéroports dans lesquels les coûts des dispositifs de sûreté auraient justifié un niveau de taxe d'aéroport plus élevé que celui permis dans le cadre du dispositif adopté en 1999.

II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

A. LE PRÉSENT ARTICLE MODIFIE LA RÉPARTITION DU PRODUIT DE LA TAXE D'AVIATION CIVILE AU PROFIT DU BAAC

A l'occasion de la loi de finances pour 1999, la répartition du produit de la taxe d'aviation civile avait été fixée ainsi : 90 % pour le BAAC ; 10 % pour le FIATA.

L'an dernier, cette clef de répartition a été modifiée, les parts revenant au BAAC et au FIATA étant respectivement de 77,7 et 22,3 %.

Cette mesure était alors justifiée par les compléments apportés au transfert du BAAC vers le FIATA des charges de sécurité et de sûreté assumées par l'Etat, et par l'extension en année pleine du régime des subventions versées aux aéroports en manque de produits de taxe d'aéroport.

De fait, les crédits du FIATA étaient passés de 148 à 361 millions de francs.

Cette année, un raisonnement inverse prévaut. Les besoins du BAAC s'accroissent tandis que les crédits inscrits au FIATA sont en repli, passant de 361 à 279 millions de francs (- 82 millions de francs).

Il est donc proposé dans le présent article de minorer la part du produit global de la TAC affectée au FIATA qui passerait de 22,3 à 16,4 % et, inversement, de majorer celle affectée au BAAC, qui passerait de 77,7 à 83,6 %.

B. UNE MESURE QUI INTERVIENT DANS UN CONTEXTE MARQUÉ PAR UNE GRANDE OPACITÉ ET QUI VIENT L'ACCROÎTRE ENCORE

La faculté de graduer l'affectation alternative du produit de la TAC entre le BAAC et le FIATA crée un mécanisme au terme duquel les alourdissements de la fiscalité réelle sont masquées.

En outre, le fonctionnement de ce mécanisme est d'autant moins satisfaisant que l'identification des besoins du FIATA manque de clarté. Enfin, votre rapporteur général ne peut que rappeler son hostilité aux principes qui ont inspiré le dispositif de financement des dépenses de sûreté dans les aéroports.

1. Le mécanisme de double-affectation du produit de la TAC, facteur d'illusion budgétaire

Si le gouvernement n'affiche pas de hausse du taux de la TAC, cette situation résulte certes du dynamisme de son assiette mais aussi du mécanisme de double-affectation de son produit.

En effet, l'augmentation des besoins de financement du BAAC qui se traduit par une augmentation du produit de la TAC affecté à ce budget annexe de 12,7 % peut intervenir à taux inchangé grâce à la modification de quotité ici proposée.

Celle-ci crée ainsi l'illusion d'une stabilité de la pression fiscale alors que la réduction des crédits du FIATA qui minore les besoins de financement de ce fonds se traduirait, si celui-ci était financé par une ressource propre et exclusive, par une réduction de son taux qui, de fait, n'intervient pas. L'alourdissement de la fiscalité affectée au BAAC est donc dissimulée grâce au " jeu de passe-passe " rendu possible par le mécanisme de double-affectation du produit de la TAC.

2. Un mécanisme d'autant moins satisfaisant que l'identification des besoins du FIATA manque de prévision

Les crédits du FIATA sont consacrés à des dépenses directes de l'Etat en matière de sécurité et de sûreté pour un montant qui passerait de 174 à 216 millions de francs entre 2000 et 2001. On relèvera la vive croissance de ces crédits. Elle incline à confirmer le caractère quelque peu erratique de dépenses qui, pourtant, se prêtent, par leur nature, à programmation.

Si les dépenses directes de l'Etat s'accroissent dans de telles proportions et absorbent en 2001 77,4 % des crédits du FIATA, contre 48,2 % en 2000, c'est parce que les deux autres catégories de crédits ouverts dans le compte sont en retrait spectaculaire.

Ainsi, les crédits destinés au financement des déficits d'exploitation des " liaisons aériennes d'aménagement du territoire " disparaissent en 2001 et les crédits destinés à pourvoir les besoins de financement des aéroports en manque de recettes de taxe d'aéroport sont réduits de 88,1 %, passant de 84 à 10 millions de francs.

Pour les premiers d'entre eux, l'absence d'ouvertures de crédits nouveaux en 2001 est justifiée par l'existence d'importants reports de crédits disponibles au terme de la gestion 2000. Cette explication, qui confirme les difficultés de calibrage de ces crédits, devrait se traduire, en bonne logique, par une réduction du taux de la TAC à hauteur de la diminution des besoins. Il n'en est rien.

Pour les seconds de ces crédits, leur spectaculaire diminution confirme, elle aussi, la difficulté à appréhender les besoins dans le cadre du système inventé en 1999 pour apporter des solutions aux problèmes juridiques posés par l'ancien mode de financement par les aéroports des dépenses de sécurité et de sûreté.

L'embarras des administrations que cette très ample variation trahit n'est rien en comparaison de celui que ressent le Parlement face à un système dont la pierre angulaire, la taxe d'aéroport 98 ( * ) , échappe à sa vigilance puisqu'elle n'est retracée, ni en recettes ni en dépenses, dans le budget de l'Etat.

Votre commission avait dénoncé en son temps cette opération de débudgétisation qu'elle souhaite à nouveau voir rapportée.

3. Le dispositif de financement des dépenses de sûreté par les aéroports n'est pas satisfaisant

L'opacité résultant de l'affectation directe aux aéroports d'une taxe au produit si élevé (1,2 milliard de francs) que la taxe d'aéroport suffirait, en soi, à condamner le système.

Mais votre rapporteur général souhaite à nouveau rappeler que le transfert des charges nécessitées par la sûreté dans les aéroports, et le transfert des financements, de l'Etat vers les aéroports a constamment été dénoncé par votre commission comme incompatible avec les responsabilités que l'Etat doit assumer au service d'une question qui est, au plus haut point, une question d'intérêt général.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 19 bis (nouveau)

Aménagement du régime de la redevance

Commentaire : le présent article, introduit par voie d'amendement à l'Assemblée nationale, tend à exonérer de redevance pour droits d'usage d'un appareil de télévision les personnes âgées de 70 ans et plus, non imposables au titre de l'impôt sur le revenu.

Alors que l'on pouvait croire que le débat sur la redevance pour droit d'usage d'un appareil de télévision portait sur son principe même, on a vu au cours des débats à l'Assemblée nationale à l'initiative du rapporteur général du budget, resurgir la question, souvent évoquée au Sénat, des exonérations.

Certes, le régime actuel des exonérations n'est pas parfaitement satisfaisant, au regard de l'égalité entre les citoyens, mais on peut se demander s'il est bien opportun de le modifier dans la mesure où, même si le principe de la redevance n'est finalement pas remis en question, il paraît inévitable de remettre à plat tant son assiette que l'organisation de la collecte.

I. L'ÉVOLUTION DU RÉGIME DES EXONÉRATIONS DE REDEVANCE

Il faut, en effet, rappeler que, si le principe des exonérations est confirmé par l'ordonnance du 14 février 1959, leur champ d'application s'est trouvé considérablement étendu par le décret n° 92-971 du 17 novembre 1982.

En application de ce décret, repris et complété par le décret n° 92-304 du 30 mars 1992, sont exonérés :

1°) les personnes physiques remplissant les conditions suivantes :

- avoir 60 ans révolus au 1er janvier de l'année en cours,

- ou bien

- être infirme ou invalide au taux minimum de 80 %,

- ne pas être passible de l'impôt sur le revenu, c'est-à-dire avoir une cotisation d'impôt sur le revenu inférieure au minimum de recouvrement. Cette limite est appréciée, après réintégration des avoirs fiscaux ou crédits d'impôts, des réductions d'impôts et de certains revenus exonérés en France,

- ne pas être passible de l'impôt de solidarité sur la fortune,

- vivre seul ou avec son conjoint et, éventuellement, avec des personnes à charge ou avec d'autres personnes non passibles de l'impôt sur le revenu, avec une tierce personne chargée d'une assistance permanente, ou avec ses parents en ligne directe, si ceux-ci ne sont pas eux-mêmes passibles de l'impôt sur le revenu.

2°) les établissements hospitaliers, sous réserve de ne pas être assujettis à la TVA, habilités à recevoir les bénéficiaires de l'aide sociale, et les établissements hospitaliers ou de soins, à l'exception des appareils destinés à l'usage privatif des personnels de ces établissements.

Face à cette explosion du nombre des comptes exonérés, qui sont passés de 1.054 000 en 1983 à 4.335 000 en 1992, on s'est efforcé de réagir. Ainsi, dans un premier temps, est intervenu un décret n° 93-1314 du 20 décembre 1993, qui a élevé progressivement l'âge requis pour pouvoir bénéficier de l'exonération de la redevance de 60 à 65 ans dans les conditions suivantes :

- relèvement de l'âge minimal de 60 à 61 ans en 1994,

- de 61 à 62 ans en 1995,

- de 62 à 63 ans en 1996,

- de 63 à 64 ans en 1997,

- de 64 à 65 ans en 1998.

En fait, la révision des conditions d'âge a évité une réduction du produit de la redevance liée à l'exonération, mais n'a pas apporté véritablement de ressources nouvelles.

Le décret de 1993 n'ayant pas stoppé la dynamique des exonérations, est intervenu, un nouveau décret n° 96-1220 du 30 décembre 1996, qui n'est entré en vigueur qu'à partir de 1998.

A partir de cette date, pour être exonéré de la redevance, il ne fallait plus être non imposable , pour les personnes remplissant la condition d'âge (avoir 65 ans au 1er janvier 1998), mais être titulaire de l'allocation supplémentaire définie aux articles L. 815-2 et suivants du code de la sécurité sociale . Les conditions de revenus sont restées toutefois inchangées pour les invalides.

Cette mesure ne s'appliquant qu'aux nouvelles demandes d'exonérations, le service de la redevance a dû, à compter de 1998, gérer deux fichiers d'exonérés au titre des personnes âgées : le premier concernant toutes les demandes acceptées avant le 1er janvier 1998 (les " droits acquis " devant continuer à être soumis à la condition de revenu antérieure, - être non imposable - pour être renouvelés) et le second s'appliquant aux demandes présentées à compter du 1er janvier 1998 et soumises à la condition de revenu nouvellement définie, le bénéfice de l'allocation supplémentaire du Fonds national de solidarité.

Le correctif apporté par le décret de décembre 1996, insuffisant car il ne règle pas le problème de fond qui est la structure du financement de l'audiovisuel public était aussi critiquable : peut-on vraiment parler de " droits acquis " pour certains et créer deux régimes différents pour des personnes placées dans des situations identiques ?

II. LA QUESTION DES EXONÉRATIONS EST INSÉPARABLE DU DÉBAT SUR LE FINANCEMENT DE L'AUDIOVISUEL

Au 30 juin 2000, on dénombrait près de 22 millions de comptes, qui se répartissaient en 18,5 millions de comptes payants et 3,5 millions de comptes non payants.

En 1999, on a enregistré plus de 480 000 nouveaux comptes soit une augmentation exceptionnelle due aux possibilités de contrôle offerte par la possibilité de croisement avec le fichier de la taxe d'habitation permise par un article voté à l'initiative du Sénat dans la loi de finances rectificative pour 1996. Mais le service de la redevance prévoit avec le temps un tassement de cet effet, qui est à l'origine des importants dépassements des recettes par rapport aux prévisions en 1998 et en 1999.

Le montant annuel des pertes de recettes dues aux exonérations de redevance est estimé à 2.093 millions de francs en 1999. Quant à l'évasion, elle est estimée par le service de la redevance à 4 % du nombre de détenteurs d'appareils. L'enjeu des contrôles porte donc sur 3 à 4 % des ménages équipés, soit près de 800.000 comptes à ouvrir.

Il est important de noter qu'une partie de l'importance des frais de recouvrement de la redevance tient à la complexité du régime des exonérations.

La France se distingue par un régime de redevance extrêmement favorable et un taux relativement modéré comme le montre le tableau ci-dessous.

Tous ces éléments devaient être portés à la connaissance du Sénat avant de statuer sur un article additionnel dont votre commission salue les intentions généreuses mais dont elle estime qu'il aboutit à rendre encore plus complexe le régime des exonérations actuelles, aussi bien pour les intéressés que pour le service qui aura à les gérer.

Plutôt qu'un replâtrage plus ou moins opportuniste sur des bases d'autant plus contestables qu'elles aboutissent à créer de nouvelles discriminations fondées sur l'âge, il lui semble qu'il serait préférable de revoir globalement l'assiette de la taxe et son mode de recouvrement.

Ce n'est qu'à l'issue d'un débat sur le principe même de la redevance, puisque celui-ci n'est semble-t-il pas clos, que l'on pourra se poser la question de ses modalités et, dans ce cadre général, remettre à plat le régime des exonérations.

En outre, il conviendrait que le gouvernement fasse connaître le coût de la mesure et le compense pour le budget de l'audiovisuel en application de l'article 53 modifié de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, tel qu'il résulte de la loi du 1 er août 2000, qui stipule que :

" V.- Les exonérations de redevance audiovisuelles décidées pour des motifs sociaux donnent lieu à remboursement intégral du budget général au compte d'emploi de la redevance audiovisuelle.

" Ce remboursement est calculé sur le fondement des exonérations à la date de la publication de la loi n° 2000- 719 du 1 er août 2000 précitées ainsi que de celles qui pourraient intervenir postérieurement " .

La perte de recettes qu'il conviendrait donc de compenser serait de l'ordre 600 millions de francs .

En tout état de cause, on peut s'interroger sur le principe même d'une intervention de la loi dans le régime de l'assiette d'une taxe parafiscale de nature réglementaire, et qui est donc actuellement fixé par décret .

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article

ARTICLE 20

Suppression du financement, par voie de fonds de concours, des frais de gestion du service chargé de la perception de la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision

Commentaire : le présent article tend à réintégrer dans le budget de l'Etat les crédits à ouvrir pour financer les frais de gestion du service chargé de la perception de la redevance.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. AU DISPOSITIF EN VIGUEUR...

Les frais de gestion du service chargé de gérer la redevance audiovisuelle sont, en vertu de l'article 33 de la loi n° 74-1129 du 30 décembre 1974 portant loi de finances pour 1975, financés à partir du compte d'emploi de la redevance, créé par le même article, au moyen de rattachements de fonds de concours.

Une fois définis les produits affectés au compte n° 902-15, qui est placé sous le régime des comptes d'affectation spéciale, (principalement les recettes tirées de la redevance audiovisuelle), l'article 33 précité énumère les différents chefs de dépenses dudit compte parmi lesquelles figurent " les frais de gestion du service de la redevance ". Plutôt que de prévoir, comme c'est l'habitude, un versement au budget général, les dépenses du compte au titre des frais de gestion ont été " fléchées " au moyen de la formule du fonds de concours. Celle-ci permettait d'attribuer une destination précise aux versements effectués à partir du compte, à savoir le service de la redevance, qui fait partie des services fiscaux du ministère de l'économie et des finances.

Corollaire de l'usage de la formule du fonds de concours, le chapitre correspondant, le chapitre 37-98 du budget du ministère, n'était pas doté en loi de finances initiale. Il était abondé en exécution à partir des crédits du chapitre 2 du compte n° 902-15 d'emploi des produits de la redevance.

Les versements effectués à ce titre depuis 1997 sont présentés dans le tableau ci-après.

Versements effectués au bénéfice du chapitre 37-98
du " budget des services financiers " à partir du compte n° 902-15

(en millions de francs)

1997

1998

1999

2000 (e)

Produit de la redevance

11.762,3

12.697,5

13.268,3

13.602,2

Frais de gestion du service de la redevance

487

488,4

488,4

482,4

Source : compte général de l'administration des finances et projets de lois de finances

B. ... SERAIT SUBSTITUÉ UN RÉGIME DE DROIT COMMUN

Le présent article tend à supprimer le recours à la procédure des fonds de concours qui régit les relations entre le compte n° 902-15 et le budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. A l'avenir, les crédits nécessaires au fonctionnement du service de la redevance seraient directement ouverts dans le budget de ce ministère en loi de finances initiale.

En conséquence, la mention selon laquelle les dépenses du compte n° 902-15 relatives aux frais de gestion du service de la redevance font " l'objet de rattachements par voie de fonds de concours au budget des services financiers " disparaîtrait.

Il est à noter que la commission des finances de l'Assemblée nationale a adopté un amendement à cet article, de vocation purement rédactionnel. Il vise d'abord à substituer dans le texte de l'article 33 de la loi de finances pour 1975 la référence aux " versements du budget général " à celle aux " remboursements de l'Etat au titre des exonérations et tarifs spéciaux prévus à l'article 21 de la loi n° 74-696 du 7 août 1974 " dans la partie de cet article consacrée à la définition des recettes du compte.

Cette initiative est logique compte tenu de l'abrogation des dispositions pertinentes de cette loi. Elle pourrait être complétée par la mention explicite de la cause des versements du budget général, à savoir les " exonérations de redevance audiovisuelle décidées pour des motifs sociaux ", selon la formule de la loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 relative à la liberté de communication.

Il vise ensuite à faire disparaître de l'article 33 la mention du " versement au compte de commerce " Liquidation d'établissements publics de l'Etat et d'organismes para-administratifs ou professionnels et liquidations diverses " des sommes nécessaires à la couverture des charges de liquidation de l'ORTF et notamment, le cas échéant, du service des emprunts contractés par cet établissement ".

Cette disposition n'a plus d'intérêt aujourd'hui et l'amendement de la commission des finances de l'Assemblée nationale apparaît, sur ce point, entièrement satisfaisant.

II. LES OBSERVATIONS DE VOTRE COMMISSION

La suppression de la mention du recours à la formule des fonds de concours pour financer le service de la redevance ne peut qu'être approuvée compte tendu du progrès de transparence qu'elle est susceptible de comporter.

En revanche, il faut déplorer que les modalités pratiques de la réintégration au budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie des crédits du service de la redevance aillent à l'encontre de l'intention de transparence qu'affiche le présent article.

Enfin, il faut relever que le prélèvement sur la recette produite par la redevance afin d'en financer les frais de gestion, d'ailleurs particulièrement élevés, pose un problème de fond et de lisibilité budgétaire.

A. L'HEUREUSE SUPPRESSION D'UN FONDS DE CONCOURS

Les fonds de concours portent une atteinte grave au principe d'universalité budgétaire.

Elle ne saurait être justifiée que pour les " vrais fonds de concours ", les fonds de concours par nature qui, pour reprendre la distinction faite par l'article 19 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 sur les lois de finances correspondent aux legs, donations ou aux fonds versés par des personnes autres que l'Etat pour concourir à des dépenses d'intérêt public. Les fonds de concours institués par la loi de finances pour 1975 ne relèvent pas de cette catégorie.

Il s'agit donc de fonds de concours assimilés, créés en application de l'ordonnance organique qui dispose que " des décrets pris sur le rapport du ministre des finances peuvent assimiler le produit de certaines recettes de caractère non fiscal à des fonds de concours pour dépenses d'intérêt public ".

Cette procédure d'assimilation de telles recettes à des fonds de concours offre des marges d'appréciation considérables aux gouvernements dont témoigne le cas d'espèce.

On relèvera d'abord le caractère très contestable de l'assimilation du produit de la redevance à une recette de caractère non fiscal. Sans doute, la redevance n'est-elle pas un impôt depuis que la jurisprudence du Conseil constitutionnel 99 ( * ) en a décidé ainsi mais une taxe parafiscale au sens de l'article 4 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959. Il n'en reste pas moins que lui attribuer la nature d'une ressource non fiscale au sens de l'article 19, que cette même ordonnance consacre aux fonds de concours, est pour le moins discutable.

On doit aussi se féliciter que cette mesure conduise à inscrire, dès la loi de finances initiale, les crédits nécessaires au fonctionnement du service de la redevance audiovisuelle au sein du budget du ministère de l'économie et des finances.

B. LES MODALITÉS PRATIQUES DE RÉINTÉGRATION DES CRÉDITS DU SERVICE DE LA REDEVANCE AUDIOVISUELLE VONT, MALHEUREUSEMENT, A L'ENCONTRE DE LA VOLONTÉ DE TRANSPARENCE QUI SOUSTEND CET ARTICLE

En gestion, les crédits nécessaires au financement du service de la redevance audiovisuelle étaient regroupés sur le chapitre 37-98 du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Ce regroupement permettait de les identifier clairement. Les modalités pratiques de " rebudgétisation " de ces crédits retenus dans le cadre du budget 2001 suppriment ce facteur de lisibilité. Les crédits sont éclatés en sept chapitres ce qui rend leur identification plus que malaisée. La réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 devra s'attacher à jeter les bases d'une plus grande clarté budgétaire.

C. LES PROBLÈMES POSÉS PAR LE MAINTIEN D'UN SYSTÈME DE FINANCEMENT DES COÛTS D'ADMINISTRATION DE LA REDEVANCE À PARTIR DE SON PRODUIT

Ces problèmes sont de deux ordres, les uns de fond, les autres de lisibilité et de cohérence budgétaire.

1. Le financement des coûts d'administration de la redevance à partir de son produit pose des problèmes de fond

La multiplication des systèmes de " prélèvements pour frais d'assiette et de recouvrement ", au demeurant très divers dans leurs régimes, pose un problème de fond. Elle est contraire à l'esprit de l'universalité budgétaire selon lequel l'ensemble des recettes de l'Etat couvre l'ensemble de ses charges. Elle invite à vérifier l'adéquation entre lesdits prélèvements et les coûts qu'ils sont censés financer. Dans la situation d'espèce, cette comparaison conduit à conclure à l'insuffisance du prélèvement sur le produit de la redevance par rapport à ces coûts.

Le pourcentage des coûts de gestion rapportés aux encaissements nets de la redevance s'élèverait à 7,06 %, contre 1,6 % pour l'ensemble des impôts administrés par les services fiscaux du ministère de l'économie et des finances. Ces coûts ne sont couverts que pour un peu plus de la moitié par les versements du compte n° 902-15. La tentation pourrait être grande à l'avenir de majorer le prélèvement sur le produit de la redevance au détriment des organismes de l'audiovisuel.

2. Un problème de lisibilité et de cohérence budgétaire

En conséquence du renoncement à la formule des rattachements de fonds de concours, différents chapitres du budget du ministère de l'économie et de finances sont dotés de crédits supplémentaires dans le présent projet de loi de finances.

Ces inscriptions ne font pas disparaître l'ouverture dans la compte n° 902-15 des crédits correspondant aux dépenses du compte relatives aux frais de gestion du service de la redevance. Il en résulte une double-écriture en charges ce qui n'est pas satisfaisant.

Une même préoccupation doit être énoncée en ce qui concerne les écritures concernant les recettes. Le produit de la redevance est, en totalité, affecté au compte n° 902-15 dans le projet de loi de finances pour 2001. Il inclut donc la part de la redevance destinée à financer les dépenses du compte au titre des frais de gestion. Dans le même temps une nouvelle ligne de recettes non fiscales est ouverte dans le fascicule " voies et moyens (ligne n° 333) ". Hormis la qualification douteuse de la redevance comme recette non fiscale, ces écritures conduisent à compter deux fois une même recette.

Le gouvernement serait bien inspiré de mettre de l'ordre dans ces inscriptions budgétaires. Aussi sous réserve de ses observations, votre commission vous propose d'adopter cet article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 21

Clôture du compte d'affectation spéciale n° 902-23
" Actions en faveur du développement des départements, des territoires et des collectivités territoriales d'outre-mer "

Commentaire : le présent article a pour objet, d'une part, de modifier le régime des recettes affectées au compte n° 902-23 pour l'année 2001 et, d'autre part de prononcer la clôture de ce compte à la date du 31 décembre 2001.

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ ET LES JUSTIFICATIONS PRÉSENTÉES

A. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

- Le I de l'article modifie l'article 61 de la loi de finances pour 1990, qui avait crée le compte d'affectation spéciale n° 902-23, en prévoyant que, pour 2001, seule la moitié du bénéfice net de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) fait l'objet d'une affectation au compte, l'autre moitié étant répartie au profit de la Banque de France.

- Le II de l'article prononce la clôture du compte à la date du 31 décembre 2001. Il dispose aussi que les opérations en compte à la date de clôture du compte seront reprises au sein du budget général. Il dispose enfin que les bénéfices de l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM) sont versés au budget général à compter du 1 er janvier 2002.

- Le III de l'article abroge en conséquence l'article 61 de la loi de finances pour 1990 qui avait créé le compte n° 902-23.

B. LES JUSTIFICATIONS PRÉSENTÉES PAR LE GOUVERNEMENT

L'exposé des motifs de l'article justifie ses dispositions par l'obligation dans laquelle le gouvernement s'est trouvé d'adapter le statut de l'IEDOM, régi par l'ordonnance n° 59-74 du 7 janvier 1959, aux règles qui s'appliquent au système européen de banques centrales (SEBC) en vigueur depuis l'entrée en troisième phase d'Union économique et monétaire.

Etablissement public d'Etat dépourvu des éléments essentiels de statut d'une banque centrale, l'IEDOM ne pouvait continuer à déterminer et conduire la politique monétaire dans des territoires sous sa juridiction appelés à adopter l'euro.

L'ordonnance n° 2000-347 du 19 avril 2000 prise en application de la loi n° 99-899 du 25 octobre 1999, autorisant le gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'application du droit applicable outre-mer, en a tiré une première conséquence. Tout en étant maintenu, l'IEDOM devait agir à partir du 1 er juillet 2000 comme simple mandataire de la Banque de France.

Le gouvernement en a tiré une seconde conséquence qui fonde, à ses yeux, la suppression du compte. Par l'article 7 de l'ordonnance précitée il a prévu que les bénéfices nets de l'IEDOM sont versés à la Banque de France. Il estime que cette disposition est l'une des obligations imposées par les statuts du SEBC.

Toutefois, l'ordonnance n° 2000-347 ayant réservé l'application de cet article en la conditionnant à l'abrogation par une loi de finances - abrogation que réaliserait le vote du présent article - de l'article 61 de la loi de finances pour 1990 qui prévoit l'affectation du bénéfice de l'IEDOM au compte n° 902-23, une période transitaire devait être ménagée.

L'IEDOM ayant conservé tout son statut au cours du premier semestre 2000, il a été convenu que la moitié de son bénéfice pour 2000 serait affecté au compte en 2001. Cela explique le maintien de ce compte l'an prochain et c'est pourquoi sa clôture n'interviendrait qu'au 31 décembre 2001.

Le maintien du statut de l'IEDOM jusqu'à mi-2000 a également conduit le gouvernement à conclure une convention avec la Banque de France au terme de laquelle seule la moitié du bénéfice 2000 de l'IEDOM serait acquise à l'Etat, l'autre moitié étant versée à la Banque de France.

Enfin, les recettes du compte d'affectation spéciale provenant en très grande majorité du bénéfice de l'IEDOM (151,9 millions de francs en 1999), les recettes en provenance de l'IEOM 100 ( * ) étant considérés comme marginales (36,8 millions de francs en 1999), le gouvernement, dans son souci de réduction du nombre des comptes d'affectation spéciale, a souhaité supprimer purement et simplement le compte n° 902-23, à la date du 31 décembre 2001.

II. ...CRÉENT UNE SÉRIE D'INTERROGATIONS

A. LA DISPARITION D'UN INSTRUMENT UTILE

Votre commission des finances avait adopté en juin 1997 un rapport présenté par notre collègue M. Yann Gaillard, alors rapporteur spécial chargé des comptes spéciaux du Trésor, consacré au compte n° 902-23.

Il rappelait la vocation du compte à financer les interventions de l'Etat au bénéfice des organismes publics de caractère agricole, immobilier ou social intervenant dans les DOM, les TOM et les collectivités à statut particulier. Il soulignait sans doute le caractère un peu adventice de ces interventions mais il mettait également l'accent sur son utilité dans le contexte économique, financier et social très difficile de l'outre-mer.

La suppression du compte ne supprimera pas les problèmes dont ses interventions contribuaient à réduire l'ampleur.

Or, si le présent article dispose que les opérations en compte seront reprises au sein du budget général après la clôture du compte, les crédits disponibles étant également reportés, cette disposition ne s'appliquera que pour le budget 2002 et son respect ne peut évidemment être vérifié aujourd'hui.

La considération des opérations budgétaires pour 2001 entretient, quant à elle, tous les doutes. Du fait de la convention passée entre le gouvernement et la Banque de France, le compte se trouvera privé, dès 2001, de la moitié des recettes qu'il aurait perçues au titre du bénéfice de l'IEDOM. Ses crédits ne se retrouvent pas dans la " ligne budgétaire unique " du budget de l'outre-mer. Les " réalités budgétaires " de 2001 n'amènent pas à accorder de crédit aux " virtualités budgétaires " annoncées par le gouvernement pour 2002.

B. DES JUSTIFICATIONS PEU CONVAINCANTES

Si les modifications apportées au régime monétaire des territoires appelés à partager l'euro semblent inéluctables compte tenu des règles du SEBC, l'affectation de la totalité des " revenus monétaires " produits dans les DOM et à Mayotte à la Banque de France ne paraît pas découler d'une obligation de cette nature.

Le rapport 101 ( * ) adopté par votre commission à l'initiative de M. Alain Lambert, alors rapporteur général, a consacré à ce sujet des développements qui n'ont pas été contredits et qu'il faut rappeler : " Si une BCN 102 ( * ) est pleinement indépendante des points de vue institutionnel et fonctionnel mais ne peut, en même temps, se doter, de façon autonome, des moyens économiques lui permettant d'accomplir son mandat, son indépendance globale sera compromise... Toutefois, dans les pays où des tiers, en particulier le gouvernement ou le Parlement, sont en mesure d'influencer, directement ou indirectement, le budget de la BCN ou l'affectation de ses bénéfices, les dispositions statutaires correspondantes doivent contenir une clause de sauvegarde garantissant que cette situation n'empêche pas la BCN d'accomplir de façon convenable les missions relatives au SEBC ".

L'affectation du bénéfice de l'IEDOM à la Banque de France apparaît ainsi comme une mesure allant au-delà des exigences du SEBC.

C. UNE MALFAÇON JURIDIQUE

Le 3 ème du II de l'article statue sur le sort des bénéfices de l'IEOM dont l'affectation au compte disparaîtrait en même temps que celui-ci, c'est à dire après le 1 er janvier 2002.

Cette disposition qui n'affecte pas l'équilibre de la loi de finances pour 2001 n'a pas à figurer dans un article de première partie de la présente loi de finances.

Votre commission n'est donc pas convaincue par les motivations développées par le gouvernement.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 22

Clôture du compte d'affectation spéciale n° 906-26 " Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables "

Commentaire : le présent article a pour objet de clôre le compte d'affectation spéciale dénommé " Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables " et de transférer sur le budget général l'ensemble des opérations auparavant retracées sur ce compte ainsi que les crédits correspondants.

I. LES DISPOSITIONS DU PRESENT ARTICLE

Le I. de l'article clôt, à la date du 31 décembre 2000, le compte d'affectation spéciale n° 902-26 " Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables " (FITTVN) créé par l'article 47 de la loi de finances pour 1995.

Le II. précise que les opérations du FITTVN sont reprises au sein du budget général et que les crédits disponibles " à la clôture des comptes " sont reportés sur le budget général.

Les opérations du FITTVN concernent les routes, les voies navigables et le transport ferroviaire. Elles devraient être reprises, au sein du budget général, dans le nouveau fascicule " transports " qui regroupera, à partir de 2001, les crédits consacrés aux routes, au transport ferroviaire, au transport fluvial et au transport aérien.

Les crédits disponibles à la clôture du FITTVN devraient être compris entre 4,5 et 5 milliards de francs. En effet, les crédits reportés au 31 décembre 1999 se sont élevés à 3,9 milliards de francs. Compte tenu du dynamisme des taxes affectées au FITTVN et du rythme de consommation des crédits, le niveau des crédits reportables de 2000 sur 2001 devrait être accru d'un milliard de francs, écart entre les produits recouvrés en 1999 et les crédits consommés au cours de cet exercice.

Le III. abroge l'article 47 de la loi de finances pour 1995 et l'article 37-1 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

L'article 37 de la loi du 4 février 1995 mentionnait la création du FITTVN qui avait été institué par l'article 47 de la loi de finances pour 1995.

Le IV. modifie le deuxième alinéa de l'article 4 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, en remplaçant la référence au FITTVN par une référence au budget de l'Etat. Il reviendra désormais au budget général d'encourager le recours au transport combiné par des compensations tarifaires aux opérateurs.

Le V. prévoit le dépôt au Parlement, avant le 30 juin 2002, d'un rapport relatif au développement de la politique intermodale de transports et au financement des infrastructures de transport.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. CRÉÉ POUR DÉVELOPPER LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT, LE FITTVN N'A PAS ÉTÉ PLEINEMENT UTILISÉ

1. Une sous-consommation des crédits du FITTVN

Créé à l'initiative du Sénat, le Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables (FITTVN) devait répondre à un besoin essentiel, à savoir le développement de nouvelles infrastructures.

Malheureusement, il a été détourné de son objet pour compenser les défaillances du budget des transports terrestres. Entre 1996 et 1999, l'effort consenti par l'Etat pour les investissements dans le domaine des routes et des transports terrestres a en effet diminué de 1,3 milliard de francs, alors que la création d'un compte spécial du trésor avait pour justification la nécessité d'augmenter les moyens.

En outre, la consommation des crédits du FITTVN s'est montrée difficile.

Ainsi, la loi de finances initiale pour 1999 avait inscrit des crédits pour le FITTVN à hauteur de 3.930 millions de francs. Cette dotation en ligne avec les prévisions de recettes s'est révélée sous-dimensionnée par rapport à l'exécution. Les recettes de l'année se sont en effet établies à 4.352 millions de francs. Pourtant, les dépenses effectives ont encore été inférieures aux crédits ouverts avec 3.361 millions de francs, soit un écart de près d'un milliard de francs. La comparaison avec les crédits réellement disponibles, 7.265,9 millions de francs compte tenu des reports de 1998 à 1999 est encore plus édifiante.

D'une manière générale, la faible utilisation du FITTVN s'inscrit dans un contexte plus large de diminution des moyens en faveur des infrastructures de transport.

2. Une diminution générale de l'investissement en faveur des transports

Comme l'ont montré les travaux du groupe de travail sur le financement des infrastructures de transport, présidé par notre collègue Jacques Oudin 103 ( * ) , l'investissement civil en faveur des transports a fortement chuté ces dernières années.

En 10 ans, l'investissement ferroviaire est passé de 18 milliards de francs par an à 10 milliards de francs. L'investissement routier et autoroutier stagne à 25 milliards de francs par an (y compris le financement extra-budgétaire par les concessions autoroutières) après avoir atteint 30 milliards de francs en 1996.

La crainte de l'endettement semble la justification principale du freinage des investissements. La dette liée aux infrastructures de transports atteint 340 milliards de francs, dont la majorité est constituée de la dette ferroviaire (la dette de Réseau ferré de France atteint 170 milliards de francs fin 1999). L'idée du ministère des finances, qui concerne tous les investissements, est donc que " les équipements les plus rentables socio-économiquement comme financièrement ayant été réalisés, les projets aujourd'hui à l'étude affichent un besoin en concours publics accru ".

Dans un contexte de raréfaction de la ressource budgétaire, ceci sonne comme un jugement sans appel. La suppression du FITTVN ne procède en réalité pas tant du souhait de mieux identifier les concours budgétaires aux infrastructures de transport que, in fine , de les réduire.

B. LA SUPPRESSION DU FITTVN EST AUJOURD'HUI INACCEPTABLE

1. Une suppression expliquée par le souci de " rationaliser " le financement des infrastructures de transport

Après le Fonds pour l'aménagement de la région Ile-de-France (FARIF) l'an dernier, le présent projet de loi de finances supprime le FITTVN et réintègre ses crédits dans le budget des transports regroupant les crédits des routes et des transports terrestres. Cette rebudgétisation fait notamment suite aux critiques de la Cour des comptes et de la mission d'évaluation et de contrôle (MEC) menée par l'Assemblée nationale.

Des arguments techniques sont avancés pour expliquer la suppression du FITTVN, arguments qui sont souvent contradictoires.

Tout d'abord, un compte d'affectation spéciale ne serait pas adapté au financement d'investissements, en raison de ses règles de gestion spécifiques, et notamment de l'obligation de disposer des crédits de paiement (CP) en compte pour ouvrir les autorisations de programme (AP), selon la formule des comptes spéciaux " AP=CP ".

Le dynamisme des recettes du FITTVN permet d'abonder régulièrement le fonds en crédits de paiement. Si celui-ci est mal utilisé, il faut plutôt en rechercher la cause dans les choix d'investissements, l'absence de politique cohérente de financement des infrastructures, et surtout les méthodes de travail du ministère de l'équipement et de ses échelons déconcentrés. Mais outre qu'il serait possible d'atténuer les rigueurs de cette formule, il faut souligner qu'elle n'emporte en soi aucun inconvénient pratique.

Par ailleurs, un autre argument est avancé : le FITTVN ne serait plus suffisant pour financer l'ensemble des projets d'infrastructures, qui nécessiteraient des dotations budgétaires plus importantes. Cet argument est pour le moins surprenant lorsque l'on sait que ce compte d'affectation spéciale dispose d'environ 4 milliards de francs de crédits de report.

Il est d'autant plus choquant de l'avancer que la rebudgétisation des crédits du FITTVN est un " trompe-l'oeil " qui montre que le gouvernement ne souhaite pas accroître son effort budgétaire, bien au contraire.

2. Une suppression motivée par l'importante trésorerie du fonds et le dynamisme des taxes qui lui étaient affectées

Loin de signifier une simplification du financement des investissements de transports, la suppression du FITTVN permet en réalité, au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie de puiser dans la trésorerie du fonds et d'affecter au budget général des taxes dynamiques, particulièrement la taxe d'aménagement du territoire, dont le taux avait été relevé l'an dernier, contre l'avis de votre commission.

Les ressources du FITTVN se composent en effet de deux taxes : la taxe sur les ouvrages hydroélectriques concédés et la taxe d'aménagement du territoire. Le produit de la taxe sur les ouvrages hydroélectriques a augmenté de 25 % en 1999 (+ 397,2 millions de francs) et la taxe sur les concessionnaires d'autoroute a également augmenté plus vite que prévu. Pour 2001, ces taxes devraient rapporter 4,5 milliards de francs au budget général de l'Etat.

Conséquence de la faible utilisation de ses crédits et de l'écart croissant entre les recettes affectées et les dépenses, le FITTVN disposera d'importants reports de crédits fin 2000.

Il disposera également et surtout d'un solde créditeur qui de 3,9 milliards de francs fin 1999 pourrait passer fin 2000 à 5 milliards de francs. Le sort de ce solde créditeur n'est pas mentionné par l'article ici commenté. Il devrait être transporté au compte des découverts du Trésor comme c'est la règle habituellement rappelée explicitement par les dispositions qui clôturent des comptes d'affectation spéciale. Mieux eût valu le dire que d'améliorer ainsi de façon subreptice de 5 milliards de francs le solde d'exécution 2000.

3. Une budgétisation très partielle des crédits

Même s'il est difficile de faire une évaluation précise, en raison du manque d'information sur les modalités de la rebudgétisation du FITTVN pour 2001, votre rapporteur général estime que les crédits de paiement inscrits au budget des transports correspondent globalement à 20 % des crédits de paiement inscrits sur le FITTVN, soit un peu moins d'un milliard de francs.

Réntégration des crédits de paiement du FITTVN

dans le budget des transports pour 2001

(en millions de francs)

2000

2001

évolution

FITTVN (part transports ferroviaire et fluvial)

2.808

1.132

-59,7%

FITTVN (part routes)

1.527

-316 104 ( * )

-120,7%

Total

4 435

816

- 81,2%

La budgétisation des autorisations de programme est plus favorable, mais elle n'a qu'une signification programmatique dès lors que les crédits de paiement ne sont pas reportés sur le budget général.

Réintégration des autorisations de programme du FITTVN

dans le budget des transports pour 2001

(en millions de francs)

2000

2001

évolution

FITTVN (part transports terrestres et fluvial)

2.808

2.390

-14,9%

FITTVN (part routes)

1.527

1.678

9,9%

Total

4.435

4.068

-6,2%

Certains chapitres budgétaires sont très mal dotés. Par exemple, le chapitre 53-47/30 du budget des transports, qui correspond aux investissements routiers, reprend les opérations qui étaient jusqu'alors financées sur le chapitre 53-43/20 du budget des routes et le FITTVN. Or, ce chapitre n'est doté que de 2 milliards de francs en crédits de paiement, alors que l'ancien chapitre budgétaire était doté de 2,4 milliards de francs et le FITTVN de 1,5 milliard de francs, soit au total 3,9 milliards de francs.

Le FITTVN jouait un rôle non négligeable dans le financement routier et autoroutier. Les programmes spécifiques d'aménagement du Massif central (les autoroutes A 20 et A 75, le programme spécifique d'accélération de la RN7) et la mise aux normes autoroutières de la RN 10 dans les Landes ont par exemple été financés sur le FITTVN depuis 1996.

Aucune assurance n'est donnée quant à l'inscription complète des crédits en compte au FITTVN sur le budget général en 2001.

Lors de la séance publique du 20 octobre 2000, plusieurs députés de la majorité plurielle, qui avaient pourtant préconisé la suppression du FITTVN, se sont alarmés de cette situation .

Notre collègue Jean-Pierre Brard a ainsi déclaré " on nous propose aujourd'hui la suppression de ce fonds qui était l'un des outils de financement de ces infrastructures et dont les ressources augmentaient, selon les années, entre 3 et 5 % par an. On le fait en outre sans nous dire si le gouvernement a prévu des modes de financement pérennes pour mener à bien les projets d'infrastructures à réaliser ". Il a ajouté : " nous souhaitons (...) que le gouvernement dise à la représentation nationale comment il comptait abonder les nouvelles lignes budgétaires créées afin de tenir les engagements pris avec les régions dans les contrats de plan et les contrats spécifiques ". De même, notre collègue Augustin Bonrepaux s'est également demandé " si les crédits prévus cette année au FITTVN s'ajouteront à ceux du budget de l'Etat ".

Notre collègue Didier Migaud, rapporteur général du budget, a conclu : " il ne faudrait pas que la suppression du FITTVN aboutisse à une diminution des moyens. Car, dans les crédits de l'Etat, il y a des pertes en lignes que nous ne nous expliquons pas ".

Les réponses de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, ont été embarrassées et n'ont apporté aucune des clarifications nécessaires. Il a tout d'abord garanti que " l'ensemble des crédits non consommés seront reportés de telle manière que l'on procède bien à une addition (...) ", ce qui est tout de même la moindre des choses. Enfin, devant les questions insistantes de nos collègues députés, il a pris l'engagement " que les crédits non consommés, c'est-à-dire les crédits ouverts en autorisations de programme non consommés seraient intégralement reportés ".

Cette dernière observation montre que le gouvernement n'a en effet pas l'intention de reporter tous les crédits de paiement non consommés sur le budget des transports pour 2001. Ceux-ci, qui devraient représenter de 4,5 à 5 milliards de francs en fin d'année 2000, voient donc leur sort laissé dans le flou.

En conséquence, la suppression du FITTVN aura bien pour conséquence de réduire les moyens jusqu'à présent disponibles pour le développement des infrastructures de transport. La publication d'un rapport dans un an et demi, en juin 2002, ne permettra en aucune manière de modifier cet état de fait.

En revanche, le gouvernement n'a pas de doute quant au sort des taxes qui venaient alimenter le FITTVN . Si les crédits sont amputés, les recettes demeurent. Le gouvernement retire en effet de cette opération un avantage de solde, artificieux et non-reconductible, de 3,7 milliards de francs.

En conclusion, votre rapporteur général considère que, après trois années de diminution de l'investissement public en faveur des transports, la rebudgétisation du FITTVN sonnerait définitivement le glas d'une politique ambitieuse en faveur de l'investissement en infrastructures de transport. Il estime en outre, qu'à l'heure où le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, à la suite du premier ministre, souhaite lutter contre l'opacité budgétaire, les conditions de clôture du FITTVN manifestent un mépris du Parlement qui ne peut être accepté.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 23

Création du compte d'affectation spéciale n° 902-23 " Fonds de provisionnement des charges de retraites et de désendettement de l'Etat "

Commentaire : le présent article institue un échéancier particulier pour le paiement des redevances dues au titre de l'attribution des licences " UMTS " et prévoit l'affectation des 130 milliards de francs de produit de ces recettes à la CADEP et au FRR.

I. LE CONTRIBUABLE FRANÇAIS A T'IL ÉTÉ LÉSÉ ?

A. L'UMTS, UNE TECHNOLOGIE PROMETTEUSE

1. Les avancées par rapport au GSM

Historiquement, le passage à la deuxième génération de téléphones mobiles s'était traduit par des améliorations dues au remplacement de technologies analogiques par des technologies numériques. Il en est résulté de nombreux avantages concernant tant les communications elles-mêmes (qualité, confidentialité, meilleure utilisation du spectre de fréquences) que les terminaux (rendus plus performants et moins onéreux, du fait notamment du progrès de leurs composants).

La troisième génération, autorisera, grâce à des débits plus élevés l'accès à de nouveaux services, notamment multimédia, et à Internet.

Alors que le GSM d'aujourd'hui offre un débit maximal de 9,6 Kb/s, l'UMTS de demain permettra, en effet, d'atteindre des flux d'au-moins 384 kb/s et même de 2 Mb/s en mobilité réduite.

2. Les points forts de l'Europe

a) Une norme commune et une utilisation harmonisée des fréquences

L'Europe entend rééditer avec l'UMTS (Universal Mobile Telecommunication System) le succès du GSM (Global System for Mobile communication), en utilisant la même arme : une norme commune, rapidement mise en oeuvre.

L'acronyme UMTS, tout comme celui de GSM, désigne en fait une norme. Les spécifications en ont été approuvées non seulement par l'institut de normalisation européen ETSI (European Telecommunication Standards Institute), mais par d'autres organismes analogues asiatiques et même américains, dans le cadre du forum international 3 GPP. Cette proposition n'est toutefois pas la seule en lice comme le montre l'encadré ci-dessous.

Technologies et fréquences UMTS

Les réseaux de téléphonie mobile sont des réseaux cellulaires, c'est à dire construits à partir d'unités géographiques de base dont la dimension varie en fonction de la longueur d'onde utilisée. Les mêmes fréquences sont utilisées dans chaque cellule.

Le GSM s'appuie sur une technologie baptisée TDMA (Time Division Multiple Access) dans laquelle une fréquence est attribuée à une communication pendant une unité de temps.

Une technologie rivale a été mise au point aux Etats Unis par la société californienne Qualcomm. Elle est basée sur le principe du CDMA (code division multiple access) qui diffère du TDMA en ce que l'ensemble de la bande de fréquences est attribuée à toutes les conversations qui sont codées et transmises simultanément.

Cette solution dont le potentiel d'évolution vers les hauts débits est supérieur a convaincu dans le monde la majorité des techniciens, et les européens s'y sont ralliés. Ces derniers en ont néanmoins défini une variante dite " wide Band CDMA " ou W-CDMA, compatible avec GSM, qui se distingue de celle dite " CDMA 2000 " dont se réclament la majorité des industriels américains.

La conférence mondiale des radiocommunications (CMR) de l'UIT a désigné, au plan mondial, les bandes de fréquences 1885-2025 MHZ et 2110-22000 MHZ comme bande d'accueil pour les services mobiles (IMT 2000) de troisième génération (y compris la composante satellite).

Mais s'agissant des normes, quatre ou cinq propositions restent en présence (W-CDMA et CDMA 2000 qui sont dominantes plus deux ou trois autres dont certaines font appel à la technologie TDMA).

Les Etats-Unis ont obtenu de l'Union européenne la garantie qu'il soit seulement exigé des Etats membres que l'un au moins de leurs réseaux utilise la norme recommandée par l'ETSI (European Telecommunication Standards Institute). La plupart des attributaires de licences, à ce jour, en Europe, comptent utiliser la technologie W-CDMA.

Certes, la communauté internationale est parvenue à un accord ; dans le cadre de la conférence mondiale de l'UIT de 1992, en ce qui concerne la bande d'accueil des fréquences utilisées par les services mobiles de troisième génération, mais il est désormais certain qu'il n'en ira pas de même, s'agissant du projet IMT (International Mobile Telecommunication for year 2000) de norme mondiale unique pour un système universel de communication mobile.

Il importe, dans ces conditions, ce qui a déjà été, en son temps, l'une des clés de la réussite commerciale du GSM, de profiter du consensus dont la norme UMTS fait l'objet en Europe, pour la rendre rapidement opérationnelle et créer en même temps un marché pour les équipements et les services correspondants.

b) Un calendrier d'introduction très serré

La téléphonie mobile représente l'une des rares technologies de pointe où l'Europe soit en avance sur les Etats-Unis, sinon du point de vue conceptuel, du moins de celui de la mise en oeuvre. Les européens ont été les premier, avec GSM, à se doter d'une système numérique.

Le taux de pénétration moyen du mobile dans l'Union était supérieur à 40 % au 1 er janvier 1999. En 2000, les 50 % ont dû être atteints en Italie et les 60 % approchés ou dépassés dans les pays scandinaves (la France et l'Allemagne se situant aux alentours de 30 %, et le Royaume-Uni à 40 %).

Au total, le nombre d'abonnés est supérieur à 150 millions sur notre continent.

Concernant la troisième génération, le Président Clinton a annoncé que des enchères ne seraient pas organisées aux Etats-Unis avant septembre 2002. Cela donne à l'Europe une longueur d'avance, dans la mesure où la décision de décembre 1998 du Parlement européen et du Conseil sur l'introduction coordonnée des systèmes mobiles au sein de la communauté a prévu le calendrier suivant :

- décision jusqu'au 1 er janvier 2000, du mode d'attribution des licences ;

- introduction coordonnée et progressive des services UMTS par les Etats-membres (qui doivent prendre " toutes les mesures nécessaires " à cet effet) le 1 er janvier 2002 au plus tard.

3. Des opportunités attractives

a) La convergence de deux technologies dont l'utilisation progresse très rapidement

L'UMTS se trouve à la confluence de deux des évolutions en cours les plus fulgurantes du monde des télécommunications :

- la croissance du marché des mobiles d'une part (le nombre d'abonnés au réseaux cellulaires progresse, en moyenne, en Europe, chaque année, d'au-moins 50 %) ;

- le phénomène Internet, d'autre part, avec notamment le nouvel essor du commerce électronique.

Téléphone Mobile et Internet : deux marchés en croissance très rapide

Selon The Economist (19 août 2000), les prévisions d'augmentation des bénéfices des entreprises concernées sont, pour la période 2000-2001 :

- de plus de 40 % dans le secteur des téléphones mobiles

- de plus de 30 % en ce qui concerne la " net-économie ".

La croissance du trafic sur le web demeure explosive et le chiffre d'affaires du commerce électronique entre entreprises a été, par exemple, multipliée par trois aux Etats-Unis depuis 1998 et celui des ventes aux particuliers par 2,5 d'après le n° 295 (mars-avril 2000) des cahiers français (documentation française) consacré à l'Internet.

Concernant la France :

- le pourcentage des ménages raccordés à Internet a plus que triplé en un an (passant de 2 % à 7 % en 1999), si l'on en croit l'INSEE (n° 700 de février 2000 d'INSEE première) ;

- quant à la croissance du parc de téléphones mobiles, elle a été très forte (+ 84 %) pour la cinquième année consécutive en 1999, selon le rapport public d'activité de l'ART.

L'Europe pourrait ainsi, espère-t-on, profiter de l'UMTS pour combler son retard en matière d'utilisation de l'Internet, tout en confortant son avance dans le domaine des mobiles.

L'IDATE (Institut de l'audiovisuel et des télécommunications en Europe) situe le nombre d'abonnés potentiels à l'Internet mobile en 2004 dans une fourchette de 125 à 200 millions d'abonnés sur un total de 300 millions d'abonnés aux réseaux de téléphones mobiles.

Au Japon, 17 millions de personnes profitent déjà des 600 services proposés par l'opérateur DoCoMo (filiale de NTT) aux possesseurs d'un " i-mode ". Il ne s'agit pourtant - comme dans le cas du WAP (wireless application protococol) - que de technologie de deuxième génération. Alcatel, qui vient de conclure une alliance avec Fujitsu, évalue à 60 milliards d'euros le marché de l'UMTS dont il espère prendre une part de 15 %.

b) Des incertitudes qui n'ont pas empêché un engagement important des acteurs intéressés

L'introduction de l'UMTS en Europe comporte des risques, inhérents à la mise en oeuvre de toute technologie nouvelle, mais particulièrement lourds, en l'occurrence, du fait de l'importance des investissements nécessités par le développement de nouvelles infrastructures et aussi en raison des sommes qui peuvent être exigées en contrepartie de l'utilisation de fréquences constituant une ressource rare (voir infra).

Selon une évaluation citée 105 ( * ) dans la Vie financière 106 ( * ) , les investissements mondiaux pour l'installation des réseaux UMTS coûteront au moins 55 milliards d'euros dont 15 milliards d'euros pour l'Europe.

Bouygues-Telecom estime, pour sa part, que le déploiement d'infrastructures qui lui soient propres sur le territoire français lui coûterait de 25 à 50 milliards de francs, en fonction des décisions prises concernant la rapidité du passage du GSM à l'UMTS.

Comment cette charge sera-t-elle répartie entre équipementiers, opérateurs et usagers ? Dans quelle mesure ces derniers seront-ils intéressés par les nouveaux services qui leur seront proposés et combien accepteront-ils de payer pour y accéder ? La taille d'un écran de mobile permet-elle, notamment, d'accéder à des informations de façon satisfaisante ?

Enfin, quelle sera l'attitude des banques face aux demandes d'emprunts qui risquent de leur être adressées et des actionnaires vis-à-vis des augmentations ou des recompositions de capital jugées nécessaires ?

A ces incertitudes s'ajoutaient, initialement, celles liées au montant de la redevance qui serait exigée des opérateurs.

En définitive, seul un engouement rapide des abonnés pour les nouveaux services offerts, entraînant une forte augmentation de leurs dépenses de communication semble permettre de rentabiliser, dans les meilleures conditions, les dépenses occasionnées par le déploiement de l'UMTS.

Le montant des enchères atteint en Grande-Bretagne et en Allemagne a montré néanmoins que les risques, inévitables, évoqués ci-dessus n'avaient pas suffi à décourager les opérateurs.

En d'autres termes, ceux-ci ont jugé que le " jeu en valait la chandelle ". Certes, il est possible de faire valoir que certains d'entre eux, déjà engagés dans le GSM, étaient quasiment contraints d'enchérir pour assurer leur survie dans le domaine de la téléphonie mobile, mais ce n'était pas, de toute façon, le cas des nouveaux entrants (l'article 10 de la directive " licences " n° 97/13/CE du 10 avril 1997 oblige les Etats, dans l'octroi des licences individuelles, à " faciliter le développement de la concurrence ").

L'optimisme dont ont finalement fait preuve les différents candidats peut se justifier par :

la conviction d'une explosion de la croissance des services mobiles de transmission de données,

la possibilité d'une transition douce du GSM (dont les infrastructures pourraient être en partie réutilisées) à l'UMTS,

une installation, en conséquence, très progressive des réseaux de troisième génération et donc un étalement des dépenses correspondantes sur les premières années de la durée des licences,

de solides alliances internationales permettant de consolider les risques, tout en les répartissant sur plusieurs marchés.

L'enjeu, en fin de compte, ne concernait pas que les entreprises. Dans la mesure où ces dernières étaient prêtes à miser des sommes considérables, non seulement pour investir, mais aussi pour accéder à des ressources à la fois rares et collectives, il s'agissait aussi d'une opportunité exceptionnelle de procurer des ressources abondantes aux budgets des Etats concernés. Cette collecte de fonds revêtait, comme les enchères elles-mêmes, un caractère concurrentiel. Les ressources des opérateurs étant nécessairement limitées, on pouvait penser, en effet, que les premiers à enchérir risquaient d'être les mieux dotés.

Il y avait, en somme, un partage des rôles.

Il appartenait :

- aux entreprises d'assumer le risque immédiat, mais d'engranger aussi les bénéfices ultérieurs éventuels, liés à l'introduction en Europe de l'UMTS ;

- aux Etats, de défendre les intérêts de leurs contribuables dans la mise à disposition de ce bien collectif rare que constituent les fréquences.

Il y avait en définitive trois avantages à retirer de l'introduction de l'UMTS en Europe :

- l'offre de nouveaux débouchés aux entreprises européennes ;

- une amélioration des services offerts aux consommateurs ;

- une opportunité d'améliorer la situation des finances publiques.

La France n'a pas suffisamment exploité cette dernière possibilité.

B. LA FRANCE N'A PAS SU MAXIMISER LE RENDEMENT DE L'ATTRIBUTION DES LICENCES

1. Le choix de la soumission comparative

a) Les raisons invoquées

Le gouvernement, on le sait, suivant en cela les recommandations de l'ART et l'avis de la commission supérieure du service public des postes et télécommunications a finalement opté pour le système de la soumission comparative (" beauty contest ").

Ce mode d'attribution des licences avait également la préférence des opérateurs français actuels du GSM (France Telecom, Cegetel et Bouygues-Telecom).

Ces derniers, ainsi que les industriels concernés, soit, au total, une trentaine d'acteurs de premier plan, avaient pu exprimer leur point de vue, à l'occasion de la consultation publique sur l'introduction des systèmes mobiles de troisième génération en France, lancée en février 1999 par l'ART, suivant les recommandations du groupe de travail spécialisé créé en janvier 1998 au sein de la CCR (Commission consultative des radiocommunications).

Les raisons invoquées pour le choix final de la soumission comparative (assortie, en fait, d'une sorte de droit d'entrée, du fait de l'échéancier prévu pour le paiement des redevances) peuvent se classer en deux catégories.

Elles tiennent :

- d'une part aux risques, évoqués ci-avant, inhérents à l'introduction de l'UMTS, eu égard aux incertitudes relatives au développement du marché correspondant (la consommation de services pouvant seule permettre de rentabiliser les investissements) ;

- d'autre part à des spécificités françaises : fragilité de la situation de certains acteurs du fait d'un certain retard pris dans l'introduction du GSM, surcoûts liés à ce retard et à la faible densité moyenne de population sur le territoire français.

Les opérateurs ont fait valoir ainsi les arguments suivants :

- les montants atteints par les enchères britanniques (plus de dix fois supérieur aux prévisions) représentent non pas la valeur du spectre mais le coût de survie des opérateurs en place qui augmente celui de l'accès des nouveaux entrants ;

- la dimension des opérateurs n'est pas une garantie contre d'éventuelles faillites (risque de " malédiction du vainqueur ") comme le montre l'échec de la constellation Iridium de satellites de télécommunication mobiles ;

- le prix des enchères aurait obéré la capacité d'investissement des intéressés alors que le coût des infrastructures en France est particulièrement lourd, du fait de la faible densité moyenne de la population ;

- en outre, les trois opérateurs GSM français auront encore, à la fin 2001, un résultat net cumulé négatif.

Le dernier entré sur le marché, Bouygues-Telecom, doit continuer d'investir pour améliorer la couverture du territoire et la qualité de son réseau de deuxième génération.

De son côté, le gouvernement a invoqué, en outre, la nécessaire prise en compte de critères autres que la seule loi du marché tels que l'égalité d'accès à l'UMTS, la qualité des services ou les conditions requises pour que son introduction contribue, de façon maximale, au développement économique et à l'emploi.

b) Les avantages des enchères

En réalité, les avantages des enchères, à condition que nous nous trouvions parmi les tous premiers à les organiser auraient été de l'avis de votre rapporteur général, bien supérieurs.

En tout premier lieu, elles auraient vraisemblablement rapporté davantage aux finances publiques que les 130 milliards de redevances issus de la soumission comparative. On peut avancer raisonnablement, par exemple, l'hypothèse de 200 milliards de francs (soit 54 % de supplément et 2 % au lieu de 1,1 % du PIB).

La charge de la dette, donc le déficit budgétaire, s'en seraient trouvés davantage réduits 107 ( * ) et la réduction des prélèvements obligatoires facilitée (à condition que l'effort de maîtrise des dépenses publiques ne se relâche pas pour autant), avec les effets macro-économiques favorables que cela implique (augmentation des investissements et de la consommation des ménages...).

La procédure des enchères est également plus transparente, plus neutre (sinon plus équitable) et sans doute plus rapide que celle de la soumission comparative. Elle accélère des alliances ou des recompositions de capital, à terme, inévitables et même souhaitables du point de vue de la compétitivité internationale des acteurs européens des télécommunications.

Partisan de la soumission comparative en France et trouvant élevé le prix des licences françaises (32,5 milliards de francs par titulaire), France Telecom n'en a pas moins profité du système des enchères pour prendre pied sur les marchés allemands et britanniques (après avoir acquis le groupe Orange pour un montant, licence UMTS comprise, d'environ 50 milliards d'euros et dépensé 8,5 milliards d'euros via Mobilcom Multimedia en Allemagne).

Le système des enchères a enfin l'avantage de s'en remettre aux seules lois du marché pour la détermination, ainsi simplifiée, de la valeur des fréquences et du prix des licences.

Le gouvernement français, afin de tenter d'éviter tout arbitraire en la matière, a été contraint de faire procéder à deux expertises effectuées, l'une par l'administration et l'autre par " un grand consultant privé on croit savoir qu'il s'agit du Crédit lyonnais libre de lien avec les candidats potentiels ".

Ces analyses, complexes de la valeur du marché français des licences ont fait expressément référence, d'après ce que le gouvernement a bien voulu nous en révéler, aux indications de prix connues à ce jour en Europe (y compris le niveau des offres des opérateurs lors des enchères britanniques !), pondérées par des paramètres tenant à prendre en compte les spécificités des différents pays dont la France.

c) Le retard de la France en matière d'attribution de licences

A la vérité, la préférence accordée par la France à la soumission comparative plutôt qu'aux enchères, s'explique peut-être par des raisons, non seulement de principe, mais aussi de calendrier.

" A la traîne ", par rapport aux pays scandinaves et britanniques, en ce qui concerne l'équipement des ménages en mobiles et en ordinateurs 108 ( * ) , la France apparaît comme la lanterne rouge de l'Europe en ce qui concerne la chronologie de l'introduction de l'UMTS.

En effet, alors que la décision précité de décembre 1998, du Parlement européen et du Conseil enjoignait les Etats-membres de l'Union de " mettre en place un système d'autorisation pour l'UMTS le 1 er janvier 2000 au plus tard ", ce n'est que le 6 juin dernier que le gouvernement a annoncé son choix en faveur de la méthode de la soumission comparative.

Le tableau suivant rend compte du retard de la France par rapport à ses principaux partenaires européens dans ce domaine.

Dates d'attribution des licences

Enchères

- Grande-Bretagne

Printemps 2000

- Allemagne

Eté 2000

- Pays Bas

Eté 2000

- Autriche

Automne 2000

Soumission comparative

- Finlande

Novembre 1999

- Espagne

Mars 2001

- Suède

Automne 2000

- Norvège

Automne 2000

- France

Juin 2001

- Danemark

Septembre 2001

Système mixte

- Italie

Automne 2000

Seul le Danemark aura achevé cette opération après la France.

En outre, notre pays n'aura dégagé, en 2002, que 80 Mhz sur les 120 Mhz que les Etats-membres de l'Union européenne ont prévu d'affecter à l'UMTS.

Les fréquences correspondantes continuent, en effet, d'être utilisées principalement par les faisceaux hertziens de France Telecom (transports sans fil de données à haut débit) et, surtout, par les forces armées (celles des autres pays, qui, à la différence de la France n'ont pas quitté le commandement intégré de l'OTAN, emploient, de façon coordonnée, d'autres longueurs d'onde pour leurs communications militaires et ne connaissent donc pas le même problème).

La décision européenne relative à l'affectation de fréquences à l'UMTS datant de décembre 1998, l'Agence nationale des fréquences a pourtant entrepris, dès le premier semestre 1999, de libérer les parties de spectre qui devaient l'être. Plus de 250 millions de francs ont été dépensés par l'Etat à cette fin. Mais les opérations de réallocation correspondantes s'avèrent longues et délicates.

Sans doute y a-t-il là une raison plus ou moins inavouée, à la fois de notre manque de réactivité à l'annonce des enchères organisées par nos principaux partenaires -quoiqu'on puisse également invoquer des obstacles juridiques à cette procédure inhabituelle en France-Telecom et aussi de la limitation à quatre du nombre de licences.

Malgré le précédent de Bouygues Telecom, rentré après les deux autres opérateurs, dans la compétition du GSM, il paraît difficile de partager en cinq 80 Mhz en 2002, ou de prier un opérateur supplémentaire de bien vouloir attendre que d'autres fréquences se libèrent ! (d'autant que la directive n° 97/13/CE exige que les licences individuelles soient attribuées de façon non discriminatoire).

En outre, seules l'Allemagne et l'Autriche ont prévu deux licences UMTS supplémentaires par rapport au nombre de licences GSM.

Il apparaît bien, en tout état de cause, que le contribuable français a été lésé -quels que puissent être, par ailleurs, les mérites de la soumission comparative- par rapport à ses voisins allemands et britanniques, du fait de la double incapacité de notre pays :

- à organiser, en temps utile, c'est-à-dire parmi les tous premiers en Europe, des enchères qui auraient rapporté bien davantage que les 130 milliards affichés par le présent article (les gouvernements britanniques et allemands ont recueilli de sept à dix fois plus. Malgré leur relatif échec, les enchères italiennes pourraient rapporter le double !...) ;

- à attribuer une cinquième licence, comme l'a suggéré le rapporteur général de l'Assemblée nationale, à un deuxième nouvel entrant.

A défaut, il aurait pu être envisagé de calculer en francs 2001 le montant des redevances annuelles versées jusqu'en 2016.

Certes, il est prévu que la moitié du total dû soit versée durant les deux premières années, mais cette particularité contribue à faire douter de la nature juridique du prélèvement ainsi opéré.

II. LA NATURE JURIDIQUE DU PRÉLÈVEMENT PRÉVU ET SA CONFORMITÉ AU DROIT EUROPÉEN SEMBLENT DOUTEUSES

A. REDEVANCE OU IMPOSITION ?

1. Une redevance objectivement assez particulière

Sans entrer d'emblée dans le débat, qui peut être ouvert, concernant le caractère de la " redevance " exigée des opérateurs concernés, il peut être observé que celle-ci apparaît très particulière par son montant et ses modalités de versement.

a) Un montant exorbitant

Le montant (130 milliards de francs) de la redevance UMTS apparaît tout à fait exceptionnel, d'autant qu'il devra être acquitté, au départ, par cinq titulaires de licences seulement, qui ne seront pas en mesure initialement de répercuter sur les usagers les coûts correspondants.

Certes, le paiement en sera étalé sur 15 ans, mais la moitié devra être versée dans les deux premières années (voir ci-dessous) et les échéances annuelles, à partir de 2003, dépasseront le milliard de francs (1,161 milliard de francs), l'impact de ce prélèvement étant ,il est vrai, progressivement réduit par l'érosion monétaire.

Il ne semble pas s'être produit de phénomène analogue, dans le passé.

En fait, 130 milliards de francs, c'est à la fois trop peu, par rapport à ce qui aurait pu résulter des enchères, et trop, s'agissant d'une simple redevance pour occupation du domaine public.

b) Un échéancier qui déroge au droit commun

Malgré l'importance des sommes en cause (130 milliards de francs, ce n'est pas loin, par exemple, du produit de la TIPP en 2000 évalué à 167 milliards de francs) le Parlement n'a été conduit à débattre de la redevance UMTS que de façon incidente.

En effet, le législateur n'a été, en réalité, amené à connaître de cette ressource que par le biais de son affectation (en vertu de l'article 18 de l'ordonnance de 1959 qui exige, dans ce cas, " une disposition de loi de finances d'initiative gouvernementale ") et du fait que le système de paiement choisi s'éloignait des modalités prévues par l'article L.31 du code du domaine de l'Etat.

Comme le précise l'avis rendu par le Conseil d'Etat au gouvernement à ce sujet, il résulte, en effet, clairement de l'article précité -et aucune autre disposition dudit code ne permet d'y déroger- que se trouve actuellement interdit " tout paiement anticipé de redevances domaniales pour des périodes autres que triennales, s'agissant d'autorisation d'une durée supérieure à cinq ans ".

Outre la création d'un nouveau compte d'affectation spéciale destiné au provisionnement des charges de retraite et au désendettement de l'Etat, la raison d'être du présent article est précisément d'autoriser, par exception aux dispositions de l'article L. 31 du code du domaine de l'Etat, l'échéancier du paiement des redevances UMTS prévu par le gouvernement.

Cet échéancier est le suivant :

On constate que la moitié du total des redevances exigibles devra être versé durant les deux premières années de validité des licences, le paiement du solde, en francs courants, étant établi sur la durée restante.

Dans son avis précité, donné au ministre de l'économie et des finances, le Conseil d'Etat rappelle tout d'abord que le montant des redevances pour occupation privative du domaine public de l'Etat (auquel l'espace hertzien a été assimilé par la loi de septembre 1986 relative à la liberté de communication) :

- est fixé par voie réglementaire,

- doit, légalement, être déterminé en fonction de l'avantage procuré au titulaire de l'autorisation par le droit qui lui est concédé.

Mais, il considère de façon contestable, que le fait pour le bénéficiaire de se voir délivrer les fréquences nécessaires à l'exercice de son activité, lui confère, dès la délivrance de l'autorisation correspondante , un avantage valorisable .

Comme l'ont fait valoir les intéressés, l'échéancier prévu s'apparente plutôt à une préemption de l'Etat sur les recettes futures, non garanties, et impossibles à évaluer par avance, procurées par les activités concernées.

c) Un système hybride

En réalité, le fait d'exiger la moitié du total des redevances durant les deux premières années suivant l'attribution des licences s'apparente à un " droit d'entrée " non déclaré, étranger à l'esprit de la soumission comparative.

Il va à l'encontre de la préoccupation, affichée par le gouvernement, de favoriser une couverture rapide de l'ensemble du territoire et de ne pas privilégier les groupes financièrement les plus puissants.

En effet, la plupart des pays ayant opté pour la soumission comparative :

- soit n'exigent aucun droit d'entrée (cas des pays nordiques),

- soit, comme l'Espagne, l'ont fixé à un niveau modeste.

La France semble s'être ralliée à un compromis bâtard : encore une fois, c'est trop ou trop peu.

2. Une qualification discutable

Il est a priori choquant du point de vue démocratique qu'une recette de l'importance de celle des redevances UMTS puisse être instituée, par voie réglementaire, sans que le Parlement n'ait à en connaître ni l'assiette, ni le montant, ni les modalités de recouvrement.

Le montant des redevances pour occupation privative du domaine public est pourtant bien, selon notre droit, fixé par voie réglementaire, comme le rappelle le Conseil d'Etat. Mais s'agit-il réellement d'une redevance ou d'une " imposition de toute nature " dont le législateur, selon l'article 34 de la Constitution, doit " fixer les règles " ? D'autre part, si c'est bien une redevance, son montant peut-il être contesté devant le juge administratif ?

a) L'évolution de la législation

Il convient tout d'abord de rappeler que :

- l'assimilation de l'utilisation de fréquences hertziennes à une occupation privative du domaine public de l'Etat est discutable et a été contestée lors de la modification par la loi du 17 janvier 1989, de celle du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;

- d'autre part, la notion de service universel de télécommunications incluse dans la définition du service public des télécommunications est susceptible d'évoluer ;

- l'application, en 1989, à l'utilisation des fréquences, des principes de la domanialité publique, a été contestée par une partie de la doctrine (le Sénat s'y était lui aussi opposé, lors de la discussion de la loi précitée de 1989). Certains juristes lui préféreraient une assimilation au concept de res communis selon lequel l'utilisation des fréquences par un opérateur de télécommunications peut être assimilée à celle de l'air par un avion, ou de la mer par un navire. Cette conception prévaut dans l'ordre international et aussi, semble-t-il, dans les pays nordiques puisqu'ils n'imposeront -ainsi qu'il été indiqué- aucune redevance aux titulaires de licences UMTS opérant sur leurs territoires. Néanmoins, les principes de la domanialité publique peuvent permettre de prendre davantage en compte la rareté de certaines ressources en fréquences.

Toutefois, l'idée d'occupation privative d'un domaine public ne correspond pas à la réalité technologique car le CDMA (code division multiple access), adopté par les opérateurs européens, suppose une utilisation collective simultanée des fréquences que la notion de res communis traduit beaucoup plus fidèlement.

Quoiqu'il en soit, l'assimilation de l'espace hertzien au domaine public de l'Etat est désormais inscrite dans la loi.

- La théorie de la domanialité publique de l'espace hertzien avait été esquissée il y a un demi-siècle pour fonder le caractère de service public des radios autorisées. Or, le Conseil d'Etat, à l'époque ne l'avait pas approuvé et le Conseil constitutionnel, aujourd'hui, ne reconnaît pas aux services privés de radio ou de télévision le caractère de services publics. Cependant, le code des postes et télécommunications définit, pour sa part, un service public des télécommunications comprenant des services obligatoires (tels que l'accès à des réseaux de transmission de données) et ce qu'on appelle le " service universel " (appels d'urgences, desserte du territoire en cabines téléphoniques).

Cette notion paraît susceptible d'évoluer. La commission supérieure du service public des postes et télécommunications vient du reste de demander au gouvernement de faire adopter au Conseil européen de Nice le principe d'une directive sur les services d'intérêt économique général, parmi lesquels figureraient les services en réseaux de communications (la notion de services d'intérêt économique général désigne les activités de services marchands remplissant des missions d'intérêt général et soumises, de ce fait, par les Etats membres, à des obligations spécifiques de service public).

Or, certaines occupations du domaine public peuvent être consenties gratuitement ou moyennant des redevances réduites lorsqu'un intérêt public le justifie.

b) Les enseignements de la doctrine et de la jurisprudence

La distinction entre impôts et redevances est à la fois essentielle et difficile à établir. Pourtant, ces deux concepts devraient être les plus communément perceptibles de notre droit fiscal, en raison de leur importance.

Une imposition est, en principe, perçue sans contrepartie directe au profit d'une personne morale de droit public alors qu'une redevance rémunère normalement un service rendu.

Mais, du fait d'un " désordre des qualifications en droit fiscal ", pour reprendre l'expression de M. Franck Moderne, cette distinction s'est brouillée.

L'appellation " redevance " couvre ainsi, en réalité, tout l'éventail des recettes publiques (certaines redevances, comme celle des mines constituant des impositions).

A l'inverse, des impôts créés par le législateur peuvent être affectés au financement de certaines politiques (formation professionnelle), voire à celui du fonctionnement de certains établissements publics (l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat bénéficie, par exemple, d'une fraction du produit de la CSG). Ainsi, comme il est écrit dans le dictionnaire encyclopédique des finances publiques publié sous la direction de M. Loïc Philip " il convient de n'attacher aucune importance aux appellations officielles données aux différents prélèvements ; elles sont souvent fantaisistes du point de vue juridique . "

S'agissant de l'occupation privative du domaine public, à laquelle l'utilisation des fréquences hertziennes a été assimilée, on retrouve les mêmes confusions. Ainsi, souligne Jean Dufau dans son ouvrage " Le domaine public ", " la détermination de la nature juridique des redevances dues en contrepartie de l'utilisation privative du domaine public n'est pas une tâche facile ". En définitive, le débat sur cette question se ramène à l'alternative suivante : taxe fiscale ou redevance pour service rendu ? Un prélèvement obligatoire qui ne peut être regardé comme une redevance pour service rendu est entâché d'illégalité. 109 ( * ) En effet, une taxe, contrairement à une redevance, ne peut être établie qu'en vertu d'une autorisation donnée par le législateur.

Le problème de distinction entre la taxe et la redevance obéit à des critères spécifiques, s'agissant de déterminer la nature des droits perçus en contrepartie d'une occupation privative du domaine public.

En effet, écrit Jean Dufau, à propos des conclusions du commissaire du Gouvernement sur l'arrêt du 22 décembre 1989 Chambre de commerce et d'industrie du Var, " il y a tout lieu de penser que la redevance d'occupation a été considérée, en l'occurrence, comme un prélèvement lié à l'exercice des prérogatives de puissance publique reconnues à l'administration pour l'exploitation de son domaine public ".

Dans les autres cas, la jurisprudence estime que l'on se trouve en présence de taxes, chaque fois que le montant des droits est sans aucun rapport avec les avantages qu'en retirent les usagers.

Toutefois, le Tribunal des conflits a considéré, dans une décision du 20 octobre 1997 (TC Papeteries Etienne) que la taxe sur les ouvrages hydrauliques pourtant directement liée à l'occupation du domaine public ne constituait pas une redevance pour service rendu (ni d'ailleurs une contribution indirecte ou un impôt direct).

Cette taxe était affectée, en l'occurrence à l'établissement public voies navigables de France, mais une affectation de cette nature, depuis la décision du Conseil constitutionnel du 23 juin 1982 relative aux ressources des agences de bassin ne suffit pas à établir qu'il s'agit ni d'une taxe parafiscale ni d'une redevance pour service rendu (les " redevances " en question servaient à financer les dépenses " de toute nature " incombant aux agences).

Des évolutions récentes de la jurisprudence sont venues, heureusement, contribuer à éclaircir ces questions.

La décision précitée du Conseil constitutionnel du 23 juin 1982 relative aux agences financières de bassin permet d'établir que des " redevances " qui ne constituent ni la rémunération d'un service rendu, ni une taxe parafiscale, ne peuvent être considérées que comme des impositions de toute nature. Cette décision est capitale, d'une part car elle élargit la notion d'imposition, d'autre part, car elle la clarifie. Elle consacre la disparition des " impositions quasi fiscales ". Ainsi, mises à part les cotisations sociales, un prélèvement obligatoire ne peut plus appartenir qu'à l'une des deux catégories que constituent les " impositions de toute nature d'une part " et les " taxes parafiscales ", d'autre part.

Par ailleurs, lorsqu'il y a rémunération pour service rendu (au sens de l'article 5 de l'ordonnance de 1959), on se trouve en présence d'une troisième catégorie, concurrente, de recettes versée à une personne morale de droit public.

c) Un doute qui aurait dû bénéficier au Parlement

En conséquence de ce qui précède, il se confirme que la nature juridique du prélèvement versé par les titulaires de licences UMTS est ambiguë et que la qualification de redevance pour service rendu est contestable.

On peut se demander, tout d'abord, s'il y a occupation privative du domaine public dès lors que la technologie employée conduit à une utilisation simultanée des mêmes fréquences par les différents utilisateurs.

Si tel n'était pas le cas, la fixation du montant de la redevance relèverait à un degré beaucoup moindre de l'exercice des prérogatives de puissance publique reconnues à l'administration. On pourrait montrer que l'on se trouve en présence d'une taxe et non d'une redevance, dès lors qu'il serait établi que le montant des droits exigés de l'occupant du domaine public est sans aucun rapport avec les avantages qu'en retirent les usagers.

En effet, les redevances pour services rendus doivent trouver leur contrepartie directe dans la prestation constituée par la mise à disposition du domaine au bénéfice de l'occupant pour une utilisation excédant le droit d'usage gratuit du domaine public qui appartient à tous (CE Chambre de commerce et d'industrie du Var, 22 décembre 1989).

La cause de l'intérêt public pourrait également être plaidée (certaines occupations du domaine public peuvent être consenties gratuitement ou moyennant des redevances réduites lorsqu'un intérêt public le justifie selon le code du Domaine de l'Etat).

Le problème de l'égalité devant les charges publiques des différents utilisateurs de fréquences risque, d'autre part, de se poser un jour. Au nom de quel principe peut-on justifier de faire payer aux opérateurs UMTS une redevance sans commune mesure avec les droits exigés des autres catégories d'usagers (radios, télévisions...) ?

Par ailleurs, l'avis précité du Conseil d'Etat rappelle que d'après l'article R.6 du code du Domaine de l'Etat, le montant d'une redevance pour occupation privative du domaine public de l'Etat doit être déterminé, légalement, en fonction de l'avantage procuré au titulaire de l'autorisation par le droit qui lui est concédé.

Ce n'est manifestement pas le cas, en ce qui concerne l'attribution des licences UMTS : l'avantage est hypothétique et le montant disproportionné.

L'argumentation du Conseil d'Etat, selon laquelle l'avantage lié à l'utilisation des fréquences est valorisable dès la délivrance de l'autorisation est très critiquable, d'autant que les licences ne sont pas cessibles.

Enfin, du point de vue de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, quel est le service rendu par l'Etat aux titulaires de licences (mis à part une mise à disposition de fréquences que le droit européen a rendu obligatoire) ? Est-ce que ce ne sont pas plutôt les opérateurs qui rendent service à la collectivité en prenant le risque de développer, à travers la mise en oeuvre coûteuse d'une technologie nouvelle, un service d'intérêt général ?

L'affectation au désendettement de l'Etat et au financement des retraites ne prouve-t-elle pas, en elle-même, l'absence de liens directs entre la détermination du montant de la redevance et le service rendu aux occupants du domaine public ?

Dès lors que le prélèvement ne constitue ni une taxe parafiscale, ni une rémunération pour services rendus, il doit être regardé comme une imposition de toute nature en vertu de la jurisprudence précitée du Conseil constitutionnel (décision n° 82-1242 relative aux agences financières de bassin).

En attendant que le juge constitutionnel ou administratif soit amené à trancher, le doute aurait dû bénéficier au Parlement, dont le consentement à l'impôt constitue la prérogative la plus ancienne et la plus fondamentale, étant donné l'importance des sommes en cause.

Or, si l'avis au Guvernement du Conseil d'Etat a bien été obligeamment communiqué à votre commission, il n'en est a pas été de même des estimations permettant au Parlement d'apprécier l'assiette et le montant du prélèvement en cause.

La conformité de ce dernier au droit européen apparaît, par ailleurs, également contestable.

B. LA NOTION DE PROPORTIONNALITÉ EN DROIT EUROPÉEN

Les critères du droit européen sont heureusement moins complexes que ceux de la législation ou de la jurisprudence française.

1. Les intentions du Conseil et du Parlement de l'Union européenne

Dans un compte rendu à la presse du 6 mars 1997 relatif à une proposition de directive du Conseil, amendée par le Parlement européen, sur les autorisations et licences dans le secteur des services de télécommunications, un certain nombre de principes clairs étaient énoncés :

- Le nombre de licences individuelles pour une catégorie de services ou pour l'exploitation des infrastructures correspondantes, ne pouvait être limité que dans la mesure nécessitée par une optimisation de l'utilisation du spectre.

- Les conditions attachées aux autorisations devaient être non seulement objectivement justifiées, non discriminatoires et transparentes (ce qui pouvait justifier le recours à des enchères) mais aussi " proportionnées ".

- Des critères similaires (y compris donc la proportionnalité) devaient s'appliquer aux taxes et redevances imposées aux entreprises dans le cadre des procédures d'autorisation.

2. La directive " licences " du 10 avril 1997

La directive finale dite " licences " n° 97/13/CE qui s'en est suivie est en retrait sur ce dernier point, mais le communiqué susvisé peut néanmoins faire figure de déclaration d'intentions.

L'article 11 de la directive concernant les taxes et redevances applicables aux licences individuelles, dispose en effet que " dans le cas de ressources rares, les Etats membres peuvent autoriser leurs autorités réglementaires nationales à imposer des redevances afin de tenir compte de la nécessité d'assurer une utilisation optimale de cette ressource ".

Toutefois :

- Le principe de proportionnalité est évoqué en préambule et en annexe de la directive (mais dans ce dernier cas, il ne s'agit que de conditions spécifiques qui " peuvent " être attachées aux licences individuelles).

- L'article susmentionné précise que les redevances tiennent compte de la nécessité de promouvoir le développement de services innovateurs.

Il en résulte que la compétence du pouvoir réglementaire en matière d'établissement d'une redevance est reconnue, mais que le montant de celle-ci doit être compatible avec, d'une part, le principe de proportionnalité qui figure dans les considérants du préambule et, d'autre part, le financement par les assujettis de " services innovateurs ".

La redevance française pourrait donc, en ce qui concerne son montant, faire l'objet d'un recours devant la Cour de justice des communautés européennes.

Il reste cependant que la notion de proportionnalité semble bien vague : à quoi se rattache-t-elle ? S'applique-t-elle également aux enchères ?

Mais, en tout état de cause, l'instauration d'une redevance, inhérente au choix de la soumission comparative, semble soumise par la directive à davantage de contraintes que le recours aux enchères (compatible avec les nécessités imposées par l'accès à des ressources rares et plus conformes aux exigences d'objectivité, de transparence, et de non discrimination).

*

* *

De toute façon, la situation entièrement inédite, résultant du montant exorbitant de la nouvelle redevance créée en France appelle des solutions nouvelles aux niveaux :

- soit législatif, l'ordonnance de 1959 ou la loi relative à la liberté de communication pouvant être modifiées en conséquence,

- soit jurisprudentiel, en espérant que le juge constitutionnel puisse saisir l'occasion d'un recours qui lui serait adressé pour émettre une décision de principe renforçant les prérogatives du Parlement en matière de contrôle des prélèvements obligatoires.

III. UNE AFFECTATION CONTESTABLE

Outre l'échéancier, déjà évoqué, du paiement des redevances, c'est leur affectation et non pas leur principe ni leur montant qui se trouve soumise au vote du Parlement, à travers la création, par le présent article 23 du compte d'affectation spéciale n° 902-33 " Fonds de provisionnement des charges de retraites et de désendettement de l'Etat ".

En fait, à l'exception de 28 milliards de francs (sur 130 milliards de francs) destinés à la Caisse d'amortissement de la dette publique, à raison de 14 milliards pour chacune des années 2001 et 2002, le compte doit effectuer principalement des versements au Fonds de réserve pour les retraites (FRR), comme le montre le tableau suivant.

Votre commission préférerait que le produit des redevances UMTS soit intégralement affecté au désendettement de l'Etat.

A. LES VERSEMENTS AU FONDS DE RÉSERVE DES RETRAITES : UN PLACEMENT INADÉQUAT

102 milliards de francs sur 130 du produit des redevances UMTS sont destinés au Fonds de réserve de retraites à raison de 18,5 milliards de francs par an, en 2001 et 2002, puis 4,6 milliards pour chacune des années de 2003 à 2016.

Votre commission des finances estime que ces ressources iraient à un instrument inadapté et, en outre, ne seraient pas appropriées aux besoins qu'elles seraient censées couvrir.

1. Un instrument inadapté

a) Un fonds toujours virtuel

Comme le fait observer notre collègue Jacques Oudin, dans son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, le fonds de réserve des retraites (voir encadré) n'est encore qu'un instrument virtuel dont ni la mission, ni les modes de gestion n'ont encore été définis.

Se contentera-t-il de lisser les hausses de cotisations rendues nécessaires par l'arrivée à l'âge de la retraite, à partir de 2006, des générations nombreuses de l'après-guerre, ou devra-t-il apporter aux régimes de retraite par répartition un complément de ressources tendant à minorer durablement le niveau futur de ces cotisations d'assurance vieillesse ?

Le fonds de réserve des retraites

Le fonds de réserve des retraites a été créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 (n° 98-114 du 23 décembre 1998).

Ce fonds est géré par le fonds de solidarité vieillesse, qui s'est vu ainsi confier une nouvelle mission qu'il retrace dans sa seconde section comptable.

Aux recettes initialement prévues par la loi susvisée, s'en sont ajoutées d'autres, créées par :

- l'article 26 de la loi du 25 juin 1999 relative à l'épargne et à la sécurité financière (versements de caisses d'épargne) ;

- l'article 16 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (fraction du prélèvement de 2 % sur les revenus du capital, excédents des fonds gérés par la CNAVTS, versements de la Caisse des dépôts), sans compter le projet d'affectation de la majeure partie des redevances UMTS prévu par le présent article.

Le bilan des recettes encaissées à différents titres par le fonds de réserve des retraites est le suivant :

Le compte du FSV en encaissements/décaissements
(2 ème section)

(en millions de francs)

1999

2000

2001

Ressources

2.007

21.271

31.790

Excèdent du FSV 1 ère section

0

nd

nd

Prélèvement de 2 % sur le capital

5.410

5.750

Acompte de l'excèdent de la CNAVTS (n)

-

2.900

0

Affectation de l'excèdent de la CNAVTS (n-1)

-

5.033

1.421

Versement des caisses d'épargne

-

4.719

4.719

Versement de la CDC

-

3.000

0

Licence des téléphones mobiles de 3 ème génération

-

-

18.500

Produits financiers

7

209

1.400

C3S

2.000

-

Emplois

-

-

-

Solde (ressources - emplois)

2.007

21.271

31.790

Solde cumulé

2.007

23.278

55.068

Source : annexe au PLFSS 2001

b) Des modalités de financement complexes et incertaines

En outre, comme l'a déjà souligné votre rapporteur général dans l'avis qu'il a rédigé au nom de votre commission des finances sur deux propositions de loi sénatoriales 110 ( * ) , les modalités de financement du fonds de réserve sont particulièrement complexes et ses ressources incertaines.

En effet, comme le montre notre collègue Jacques Oudin, dans son avis précité, le Fonds de réserve, depuis sa création en 1999, connaît un rythme de progression bien inférieur aux prévisions.

Il n'a, notamment, jamais bénéficié de ressources du Fonds de solidarité vieillesse (FSV), pourtant en excédent structurel tendanciel, et n'a reçu, au titre de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) que deux milliards de francs.

Or, 20 milliards de francs par an étaient attendus de ces deux sources, d'après ce qu'avait déclaré le Premier Ministre le 21 mars 2000. Il est à craindre, dans ces conditions, que le gouvernement ne se serve de l'affectation du produit des licences UMTS au Fonds de réserve afin de " renflouer " plus facilement le Fonds de solidarité vieillesse ou les recettes de la C3S.

Celles-ci sont en effet couramment mises à contribution pour renflouer le BAPSA. Quant au FSV, son solde positif cumulé subit des prélèvements importantes au titre du financement des 35 heures tandis que ses ressources diminueront notablement en 2001 du fait des exonérations de CSG consenties aux redevables à revenus modestes.

Le Fonds de réserve s'est ainsi vu priver de revenus importants (7,4 milliards de francs du FSV et 1,35 milliard de francs de la C3S).

De telles pratiques ne doivent pas être encouragées par l'affectation de ressources qui ne seraient, en plus, pas appropriées aux besoins.

2. Des ressources inappropriées

Notre collègue Jacques Oudin exprime dans son avis précité le point de vue de votre commission des finances selon lequel le Fonds de réserve a besoin d'un mode de financement clair et immuable et doit donc être doté de ressources pérennes et non du produit de cessions occasionnelles.

Il estime que les ressources provenant de la redevance UMTS présentent un caractère aléatoire.

En effet, rien ne permet a priori d'exclure la faillite d'un ou plusieurs opérateurs de téléphones mobiles de troisième génération, qui, ainsi, ne seraient pas en état de verser leurs droits d'occupation du domaine hertzien.

D'autre part, il doit être souligné que la moitié du produit des redevances sera encaissé en 2001 et 2002 alors que ce n'est qu'à partir de 2006 que les régimes de répartition seront confrontés au choc du départ massif à la retraite des générations nombreuses de l'après guerre. En outre, les versements ultérieurs (4,6 milliards de francs par an) n'ayant pas été calculés en francs constants, seront amputés par l'érosion monétaire.

Certes, les sommes correspondant aux redevances des deux premières années pourront être placées, mais selon quelles modalités ? Comment s'assurer que le rendement en sera efficace alors que les principes de gestion du Fonds de réserve définis par le décret du 22 octobre 1999 ne sont que transitoires ?

Une affectation à un véritable investisseur institutionnel aurait pu se concevoir, mais celle prévue par le présent article ne convient pas. Il ne faut pas compter sur elle pour assurer l'avenir de nos retraites mais plutôt sur un affermissement véritable du système de répartition complété par l'indispensable troisième pilier que constitue la capitalisation.

Comme l'écrit notre collègue dans son avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 " sur le long terme, le taux de rendement de la capitalisation a toujours été supérieur à celui de la répartition... le développement de la capitalisation constituerait un complément indispensable à la réforme des retraites et pourrait en atténuer les rigueurs ".

Votre commission des finances préférerait, en conséquence, affecter entièrement le produit des redevances UMTS au désendettement de l'Etat.

B. LE DÉSENDETTEMENT DE L'ÉTAT : UNE MEILLEURE FAÇON DE PRÉPARER L'AVENIR

Plutôt qu'un versement au Fonds des retraites, de la majeure partie du produit des redevances, il semble à votre commission qu'une affectation exclusive au désendettement de l'Etat de son produit constituerait une meilleure façon de préparer l'avenir car la dette supportée par les générations futures s'en trouverait soulagée.

1. La nouvelle mission de la CADEP

En sommeil depuis 1995 (cf. encadré) la CADEP doit être réactivée par les mesures prévues par le présent article.

Elle devrait recevoir, en effet, du nouveau compte d'affectation spécial n° 902-33, 14 milliards de francs pour chacune des années 2001 et 2002.

Une telle somme donnerait à cet établissement public une confortable marge de manoeuvre pour dynamiser la gestion de la dette de l'Etat, notamment par des remboursements anticipés qui permettrait de réduire les charges d'intérêt ou de lisser l'échéancier des titres de l'Etat à moyen et long terme.

A fortiori, cette politique pourrait avoir un impact renforcé si, comme le propose votre commission, l'intégralité des 130 milliards de redevances lui étaient réservés (tout en respectant l'échéancier prévu, c'est-à-dire le versement de la moitié du total les deux premières années).

La CADEP

La CADEP (Caisse d'amortissement de la dette publique) a été instituée par l'article 32 de la loi de finances rectificative du 11 juillet 1986 (n° 86-824 du 11 juillet 1986). C'est un établissement public national administratif qui a pour mission de concourir à l'amortissement de la dette de l'Etat.

A cette fin, elle peut acquérir des titres en vue de leur annulation, ou prendre en charge l'amortissement de titres à leur échéance.

Ses modalités d'intervention sont donc de deux ordres :

- l'amortissement de la dette venant à échéance au cours de l'année considérée ;

- le remboursement de la dette par anticipation.

Ce dernier permet de réduire la charge des intérêts qui auraient été exigibles jusqu'à l'échéance normale des titres concernés. Il rend possible également un lissage de l'échéancier des titres de l'Etat à moyen et long terme.

Les recettes de la CADEP étaient initialement constituées par les versements du compte d'affectation spéciale des produits de la privatisation.

La loi de finances rectificative pour 1995 (n° 95-885 du 4 août 1995), a prévu de recourir à nouveau à la CADEP pour effectuer des opérations de désendettement de l'Etat. Sa durée d'existence a été étendue de 10 à 20 ans.

De fait, les versements et donc les activités de la CADEP ont été modestes dans les années 1990. La caisse n'a même eu aucune activité jusqu'en 1995 où 5,4 milliards de francs lui ont été versés pour la prise en charge d'un amortissement de titres. Depuis lors, elle n'a à nouveau pas connu d'activité.

Ses modalités de fonctionnement sont définies par le décret du 30 janvier 1996. Le conseil d'administration comprend deux représentants du ministère de l'économie et des finances, dont le président, un membre du Conseil d'Etat, un membre de la Cour des comptes, et un membre de l'Inspection générale des finances.

La gestion administrative, financière et comptable de la CADEP était précédemment assurée par la Caisse des dépôts et consignations.

Elle relève désormais directement des services du ministère de l'économie et des finances, et plus particulièrement des directions du Trésor et de la comptabilité publique : les opérations de rachat de titres sont effectués par la direction du Trésor, la traduction comptable et les mouvements effectifs des titres concernés par ces opérations étant assurée par la direction de la comptabilité publique.

Mais, même en se contentant du dispositif gouvernemental prévu, non seulement la dette de l'Etat dans le PIB serait mécaniquement réduite de près de 0,3 point mais la charge nette supportée chaque année par le budget de l'Etat serait minorée d'environ 1.600 millions de francs, à la fin de 2002, pour un coût apparent de la dette chiffré à 5,8 % par le gouvernement. Il y aurait donc un double dividende pour l'Etat, que ce soit au titre de la moindre progression du stock de la dette et de la dette et de la baisses de son poids dans le PIB, ou au titre de la réduction du coût annuel des charges d'intérêt supportées par le budget.

2. L'impact d'une utilisation exclusive au profit du désendettement

a) La description comptable

D'un point de vue comptable, Eurostat 111 ( * ) a choisi de traiter les opérations d'attribution de licences comme la vente en une seule fois d'un actif non financier. L'essentiel des recettes perçues au cours de toute la période de concession a donc été imputé sur un seul exercice. Ces recettes ne sont pas considérées (d'un strict point de vue comptable) comme des prélèvements obligatoires et sont enregistrées au moment de l'attribution de la licence.

Elles sont, évidemment, un impact massif mais temporaire sur le solde du financement des administrations publiques (les recettes de l'Etat sont augmentées et son déficit réduit au titre de l'année au cours de laquelle la licence a été attribuée).

Concernant la valeur de la licence, elle correspond à la valeur actualisée des versements attendus. Ces derniers étant étalés dans le temps, selon un échéancier déterminé, tout se déroule comme si une opération de crédit était accordée par l'Etat aux opérateurs (ce qui est le contraire de la réalité fiscale !).

Le crédit initial correspond à la valeur actualisée de la licence en 2001. Dès 2002, est prévue une décomposition des versements effectués, considérés comme des remboursements, entre amortissement du crédit (sans effet sur le solde public) et paiement d'intérêts.

Par rapport à la réalité budgétaire, les effets de l'amélioration du solde de financement des administrations publiques sont différemment répartis dans le temps.

b) Les conséquences budgétaires

Il faut tout d'abord constater que 130 milliards de francs représentent, ce qui est loin d'être négligeable, près de 3 % du stock de la dette (4.500 milliards de francs) et environ 70 % du déficit budgétaire prévu en 2001.

Les 32,5 milliards de francs que doivent rapporter les redevances durant cette même année 2001 correspondent à plus de 13 % de la charge nette de la dette annoncée pour l'exercice considéré.

Certes, il est impossible de prédire, exactement, de quelle façon l'utilisation de la manne de la redevance sera étalée dans le temps (la durée de vie moyenne de la dette négociable est de plus de six ans). Mais, il est, en tout état de cause, d'autant plus appréciable de pouvoir disposer de marges de manoeuvre accrues que la dette de l'Etat continue d'augmenter en valeur absolue comme en valeur relative alors qu'elle est peut être sous-estimée (du fait d'une estimation incomplète de sa composante " hors bilan ").

Un examen houleux de cet article par l'Assemblée nationale

Lors de l'examen de cet article par l'Assemblée nationale en séance publique le 20 octobre 2000, le rapporteur général M. Didier Migaud et le président M. Henri Emmanuelli ont questionné ou critiqué le gouvernement en ce qui concerne :

- le premier, le manque d'information du Parlement, s'agissant notamment du nombre d'opérateurs, de la détermination du prix et du traitement fiscal de la redevance,

- le deuxième, l'affectation éventuelle des recettes à " la mise à niveau technologique de l'ensemble du territoire ".

Un questionnaire a été adressé par la commission des finances de l'Assemblée nationale au ministère de l'économie, des finances et de l'industrie au sujet :

- de la limitation à quatre du nombre de licences ;

- et de la prise en compte des nécessités de l'aménagement du territoire dans les décisions prises relatives à l'UMTS.

Sur le premier point, la réponse du gouvernement n'est pas entièrement convaincante quand il invoque les contraintes techniques imposant d'accorder les fréquences par bloc indivisible de 2x5MHZ soit 10MHZ (le trafic n'est pas forcément symétrique et beaucoup de pays européens ont choisi d'autres répartitions, notamment 2x15+5MHZ dans le cas de l'Allemagne et de l'Espagne ou 2x10+5MHZ dans celui du Royaume-Uni). Les contingences de calendrier, en revanche sont réelles (cf. infra), notamment du fait que nous ne serons en mesure de dégager, d'ici 2002, que 80 MHZ sur les 120 nécessaires.

Sur le second point, il a été indiqué que la DATAR n'avait pas été consultée, l'ART étant chargé de veiller à la prise en compte des territoires mais que la couverture de celui-ci compterait pour 20 % de la note attribuée aux candidats à l'issue de l'examen de leurs dossiers.

Le gouvernement a, en outre, précisé que les redevances seraient considérées fiscalement comme des charges, amorties -conformément au droit commun-, selon le mode linéaire, sur quinze ans.

Le Président Emmanuelli a obtenu du gouvernement l'engagement que lui serait remis le cahier des charges des opérateurs avant l'octroi des autorisations et qu'un rapport, donnant lieu à un débat, serait remis au Parlement sur ces question.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Au terme de son analyse de cet article, il apparaît à votre commission que le montant des ressources procurées par l'attribution des licences est à la fois :

- pas assez important par rapport à ce qui aurait pu être obtenu si le processus avait été différemment conduit,

- trop élevé, pour que le Parlement n'ait pas eu à donner préalablement son consentement au sujet sinon du mode de sélection retenu, du moins de l'assiette et du montant du prélèvement instauré.

Il est regrettable que tous les éléments d'appréciation nécessaires n'aient pas été mis à la disposition des assemblées, notamment les expertises concernant la valeur des licences.

Certaines contraintes spécifiques qui affectent la répartition des fréquences dans notre pays ont pu également ne pas être bien maîtrisées ou, à tout le moins, insuffisamment expliquées à la représentation nationale.

Juridiquement, la qualification de " redevance pour service rendu " apparaît contestable. L'assimilation de l'utilisation des fréquences UMTS à une occupation privative du domaine public est discutable. Dès lors qu'il ne s'agit pas d'une taxe parafiscale et que la rémunération demandée semble ne pas correspondre à un avantage ou à un service évident, ne s'agit-il pas d'une " imposition de toute nature " ou d'une taxe comme celle perçue sur les ouvrages hydrauliques qui, bien qu'elle soit directement liée à l'occupation du domaine public, a un caractère fiscal ?

Le doute à ce sujet aurait dû bénéficier au Parlement.

Votre commission estime enfin qu'il faut affecter l'intégralité du produit de la redevance au désendettement de l'Etat. Cela lui semble être une meilleure façon de préparer le futur que d'abonder le fonds de réserve des retraites dont la nature comme les modalités de financement et de gestion apparaissent flous et incertains. L'avenir des retraites passe par une véritable consolidation du régime de répartition complété par des systèmes de capitalisation.

Décision de la commission : votre commission vous propose de supprimer cet article.

ARTICLE 24

Financement de la revalorisation des retraites agricoles et de diverses mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles

Commentaire : le présent article vise à la reconduction du prélèvement sur le produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S), pour un montant de 1.350 millions de francs, prélèvement qui contribue au financement de la revalorisation des retraites agricoles en 2001 et au financement de trois mesures d'allégement de charges sociales.

I. LE PRÉLÈVEMENT SUR LA C3S AU PROFIT DU BAPSA

La contribution au financement du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) sous la forme d'un prélèvement sur les recettes de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S) était jusqu'à présent conçue comme exceptionnelle et non reconductible mais est en pratique devenue pérenne puisqu'intervenant en 2001 pour la troisième année consécutive.

La contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés (C3S)

Ses principales caractéristiques

La C3S a été instituée par la loi du 3 janvier 1970. Elle est versée par les sociétés commerciales aux régimes d'assurance maladie et d'assurance vieillesse des non-salariés afin de compenser les pertes de recettes subies par ces régimes du fait du développement de l'exercice sous forme sociétaire des professions artisanales et commerciales. Elle a fait l'objet d'une réforme en 1995 destinée à augmenter son rendement (loi du 4 août 1995 portant loi de finances rectificative pour 1995) : extension du champ de recouvrement, de l'assiette et augmentation du taux. Son taux est fixé par décret à 0,13 % du chiffre d'affaires des sociétés redevables. Elle n'est pas perçue lorsque le chiffre d'affaires est inférieur à 5 millions de francs.

La répartition de son produit

En application de l'article L. 651-2-1 du code de la sécurité sociale, le produit de la C3S est réparti, au prorata et dans la limite de leurs déficits comptables, entre trois régimes prioritaires : le régime d'assurance maladie des travailleurs non salariés des professions non agricoles (CANAM), le régime d'assurance vieillesse des professions industrielles et commerciales (ORGANIC) et le régime d'assurance vieillesse des artisans (CANCAVA).

Le cas échéant, le solde du produit de la C3S était jusqu'en 1998 réparti entre les autres régimes de non-salariés déficitaires, parmi lesquels le BAPSA. Depuis 1999, ce solde est versé au Fonds de solidarité vieillesse (FSV).

Ces montants de répartition sont fixés par un arrêté conjoint du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget.

A. HISTORIQUE DU FINANCEMENT DU BAPSA PAR LA C3S

En 1992, la contribution sociale de solidarité sur les sociétés, destinée à financer les régimes sociaux des non-salariés non-agricoles, et la cotisation similaire prélevée sur les sociétés agricoles sont fusionnées. Le BAPSA devient dès lors l'un des affectataires de la nouvelle contribution unique.

L'affectation au BAPSA a été opérée en 1992 et 1993 au-delà du produit annuel de la contribution, conduisant à épuiser rapidement les réserves constituées sur le produit de la C3S.

De 1994 à 1996, le BAPSA, bien que demeurant attributaire d'une partie du produit de la contribution, cesse en pratique d'en recevoir une fraction.

La loi n° 96-314 du 12 avril 1996 exclut le BAPSA de la liste des bénéficiaires de la C3S. Il semblait donc acquis que désormais le BAPSA ne pourrait plus être bénéficiaire d'une fraction de la C3S.

Toutefois en 1999 et en 2000, 1 milliard de francs est prélevé forfaitairement sur le produit de la C3S au profit du BAPSA alors même que les projets de BAPSA pour 1999 et pour 2000 ne prévoient aucun versement au titre de cette contribution. En exécution pourtant il s'avère que les versements pour 1999 et 2000 s'élèvent chacun à 1 milliard de francs avec pour objet le financement de la revalorisation des petites retraites agricoles.

En outre, on peut ici souligner l'arbitraire du partage entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale puisque :

- pour 1999, le financement de la politique de revalorisation des petites retraites agricoles par le biais d'un versement au titre de la C3S figurait en loi de financement de la sécurité sociale (article 2 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999) ;

- pour 2000, la même mesure était inscrite en loi de finances pour 2000 (article 54 de loi de finances pour 2000). D'ailleurs le projet de loi de finances pour 2000 n'intégrait initialement pas ce prélèvement sur la C3S mais le gouvernement avait contré cette omission par un amendement présenté en fin de première partie. En revanche, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 ne prévoyait pas la répercussion de ce dispositif.

B. LES MESURES DE REVALORISATION DES PETITES RETRAITES AGRICOLES

Les revenus des exploitants agricoles à la retraite bénéficiant uniquement des retraites forfaitaires se caractérisent par leur faiblesse . Cette situation s'explique principalement par la constitution tardive d'un régime d'assurance vieillesse obligatoire (en 1952) ainsi que par la modicité des cotisations.

1. Un effort de revalorisation depuis 1994

Depuis 1994, des mesures significatives ont été prises en faveur des retraités agricoles. Elles ont privilégié les personnes aux revenus les plus faibles et ayant exercé l'essentiel de leur vie active dans le secteur agricole. On pourra toutefois regretter la stratification et la complexité des différentes mesures de revalorisation qui se sont succédées depuis 1994.

Le gouvernement s'est engagé à mener à bien un plan pluriannuel (juin 1997 - juin 2002) de revalorisation des plus petites retraites agricoles.

L'objectif du gouvernement est d'atteindre pour des carrières complètes (37 années et demi) le minimum vieillesse avant la fin de la législature (3.500 francs par mois par mois pour les chefs d'exploitation et les personnes veuves et 2.800 francs par mois pour les aides familiaux et conjoints) 112 ( * ) .

Par ailleurs, l'article 3 de la loi d'orientation agricole 113 ( * ) prévoit un rapport du gouvernement au Parlement décrivant l'évolution qu'il compte imprimer aux retraites agricoles sur la période juin 1997 - juin 2002 avec un effort plus marqué au début pour relever les pensions les plus faibles. Notre collègue Germinal Peiro a été nommé parlementaire en mission par le Premier ministre pour préparer ce travail. Il a remis son rapport à la fin du mois d'octobre. Le gouvernement devrait déposer ce rapport, modifié à la marge, sur le bureau des assemblées dans les jours prochains.

2. Les mesures pour 1999 et 2000

La loi de finances pour 1999 114 ( * ) a prévu une nouvelle mesure de revalorisation des petites retraites agricoles pour un coût de 1,2 milliard de francs en 1999 (et 1,6 milliard de francs en année pleine à partir de 2000). Un effort tout particulier a porté sur les veufs, veuves et les personnes seules, qui ont bénéficié de plus de 50 % du total du relèvement des retraites et un dispositif d'harmonisation des carrières mixtes d'aide familial et de chef d'exploitation a été instauré.

La loi de finances pour 2000 a quant à elle prévu une nouvelle étape du plan 1997-2002 de revalorisation des petites retraites agricoles 115 ( * ) . Le coût des mesures fut de l'ordre de 1,6 milliard de francs en année pleine (1,2 milliard de francs pour 2000). Sur cette somme, 1.473 millions de francs furent consacrés à la revalorisation des montants minima de pensions.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR LE GOUVERNEMENT

Le présent article vise donc à reconduire le prélèvement sur la C3S au profit du BAPSA dans le but de financer la revalorisation des retraites agricoles ainsi que diverses mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles.

Le montant du prélèvement pour 2001 est porté à 1,35 milliard de francs, contre 1 milliard de francs en 1999 et en 2000.

1. Le financement de la revalorisation des petites retraites agricoles

Il s'agit, à travers le présent article de financer la quatrième étape du plan pluriannuel (1997-2002) de revalorisation des petites retraites agricoles qui fait l'objet d'un article de la seconde partie du présent projet de loi (article 50). Le projet de BAPSA pour 2001 prévoit une augmentation des prestations vieillesse de l'ordre de 1,2 %. Le coût de ces mesures de revalorisation s'élèvera à 1,6 milliard de francs en année pleine et à 1,2 milliard de francs pour le budget 2001.

La poursuite de ce plan de revalorisation devrait porter les montants des pensions minimales à :

- 3.395 francs par mois pour les chefs d'exploitation ;

- 3.185 francs par mois pour les personnes veuves ;

- 2.740 francs par mois pour les conjoints dont le niveau minimum de pension rejoint celui des aides familiaux.

2. Le financement de diverses mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles

Le prélèvement de 1,35 milliard de francs sur la C3S doit également permettre de financer, outre la revalorisation des petites retraites agricoles, trois mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles, mesures qui font l'objet de l'article 25 du présent projet de loi.

Il s'agit d'une mesure de majoration et de deux mesures de minoration relatives aux charges sociales des exploitants agricoles, qui se traduisent par une diminution globale nette des recettes de cotisations techniques du BAPSA. Le montant net de ces mesures représente 104 millions de francs.

III. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de précision tendant à prévoir dans le texte même du présent article l'affectation explicite au BAPSA du prélèvement sur la C3S.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN FINANCEMENT INACCEPTABLE

1. Un financement incomplet

Certes cette année, contrairement aux deux années précédentes, le prélèvement de 1,35 milliard de francs sur la C3S devrait permettre de couvrir le coût estimé des mesures de revalorisation des petites retraites agricoles prévues dans le cadre du plan pluriannuel du gouvernement (1,6 milliard de francs en année pleine et 1,2 milliard de francs en 2001).

Toutefois, ce financement demeure cette année encore incomplet dans la mesure où l'article 19 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 prévoit quant à lui une mesure de revalorisation de 2,2 % des pensions de retraite et en particulier des retraites du régime des non-salariés agricoles. Cette mesure de revalorisation devrait engendrer un coût supplémentaire de 274 millions de francs pour le BAPSA ; or, aucun financement ne semble avoir été prévu.

En 1999, c'est par l'augmentation de la subvention budgétaire d'équilibre que le financement de la mesure nouvelle de 1,2 milliard de francs avait été complété.

2. Un financement non pérenne

Comme cela avait été relevé par votre rapporteur général lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, on remarquera avec intérêt que l'on finance ici une mesure pérenne (1,6 milliard de francs en année pleine) avec une recette d'appoint , débloquée ponctuellement pour 2001.

En effet, les étapes successives de revalorisation des retraites les plus modestes des exploitants agricoles et de leurs conjoints, qui correspondent à des charges permanentes du BAPSA, ont été financées par des prélèvements ponctuels, non reconductibles sur le produit de la C3S.

3. Un financement chaotique

L'historique du prélèvement sur la C3S et son affectation au BAPSA, précédemment évoqué, reflète parfaitement les tergiversations et les hésitations du gouvernement quant à l'affectation de la C3S au régime agricole.

Les conséquences de ces hésitations sont que le prélèvement opéré au profit du BAPSA modifie, en dehors de toute règle de calcul affichée, la répartition à trois étages de la C3S définie par l'article 651-1 du code de la sécurité sociale, entre le fonds de réserve des retraites, la première section du Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et les régimes maladie et vieillesse de certains non-salariés non-agricoles, au profit du régime de retraite et du régime maladie des exploitants agricoles.

Cette méthode contrevient donc, pour la troisième année consécutive, à une règle de répartition fixée pour la dernière fois en 1996. La récurrence de cette dérogation aurait d'ailleurs pu être pressentie puisque la contribution a pour objet de financer les étapes annuelles successives du plan de revalorisation des retraites agricoles engagé au début de la législature.

Les conséquences de cette dérogation font que le fonds de réserve pour les retraites est le véritable perdant du prélèvement envisagé : le produit de la C3S ne compensera que partiellement le déséquilibre du FSV prévu par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (un déficit de 1,08 milliard de francs en 2001, soit un ordre de grandeur comparable à celui du prélèvement opéré au profit du BAPSA). Ce sont autant de recettes dont ne bénéficiera plus la première partie du FSV dont les excédents doivent pourtant abonder le fonds de réserve pour les retraites.

Votre rapporteur général s'étonne de ces tergiversations, de ces arbitrages tardifs et de ces financements qui ne sont ni pérennes ni intégraux.

B. UNE PROPOSITION ALTERNATIVE : AUGMENTER LE TAUX DE LA COTISATION INCLUSE DANS LES TAUX DE TVA

Votre rapporteur général estime plus sain de financer cette mesure de revalorisation des petites retraites agricoles, par une augmentation du taux de la cotisation incluse dans les taux de la TVA. Celle-ci permettrait de majorer les recettes de TVA affectées au BAPSA.

Ce taux est actuellement fixé à 0,70 % par l'article 1609 septedecies du code général des impôts.

Afin de financer les mesures de revalorisation des retraites agricoles ainsi que les diverses mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles prévues à la fois par le projet de loi de finances pour 2001 et par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, il est proposé de fixer le taux de la cotisation à 0,74 %, conformément aux indications fournies par les services du ministère de l'agriculture.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 25

Mesures diverses relatives aux charges sociales des non-salariés agricoles

Commentaire : le présent article comprend trois mesures d'allégement des charges sociales des exploitants agricoles, pour un coût total de 104 millions de francs.

I. LA SUPPRESSION DU PLAFOND DE L'ASSIETTE DES COTISATIONS SOCIALES DES EXPLOITANTS AGRICOLES

Le régime d'assurance-maladie des exploitants agricoles prévoit, depuis le 1 er janvier 1992, un plafonnement des revenus professionnels du chef d'exploitation soumis à cotisation à hauteur de six fois le plafond de la sécurité sociale, soit en 2000 : (6 * 176.400 francs) = 1.058.400 francs. Le taux de cotisations applicable à cette assiette plafonnée est de 10,84 %.

Le I du présent article envisage la suppression de ce plafonnement de l'assiette des cotisations sociales des exploitants agricoles.

Le gain attendu pour le BAPSA de cette mesure est de l'ordre de 16 millions de francs et ne concernerait que 375 personnes sur un nombre total de 600.000 exploitants agricoles cotisants actifs.

Cette mesure trouve sa justification dans le fait que ce plafonnement aboutit pour des revenus très élevés (supérieurs à 1 million de francs) à une cotisation dégressive.

II. LA SUPPRESSION DE LA COTISATION DE SOLIDARITÉ SUR LES EXPLOITANTS AGRICOLES À TITRE SECONDAIRE

Il existe trois types de cotisations de solidarité (n'ouvrant droit à aucune contrepartie) dans le régime social agricole :

- l'article L. 731-23 du code rural prévoit une cotisation de solidarité concernant toute personne qui met en valeur une exploitation agricole dont la superficie est comprise entre 2 et 3 hectares ou dès lors que le revenu cadastral de cette exploitation est supérieur à un certain montant ;

- l'article L. 731-24 du code rural prévoit une cotisation de solidarité concernant les associés de sociétés de personnes non affiliées au régime agricole (minoritaires ne participant pas aux travaux) ;

- l'article L. 622-1 du code de la sécurité sociale prévoit une cotisation de solidarité concernant les chefs d'exploitation pluriactifs, qui, à titre secondaire, mettent en valeur une exploitation d'une taille supérieure à la moitié de la surface minimum d'installation (SMI).

Cette cotisation de solidarité sur les exploitants agricoles à titre secondaire est affectée à l'assurance-vieillesse. Elle consiste en un prélèvement de 12,51 %, soit sur les revenus professionnels du chef d'exploitation ou d'entreprise, soit sur l'assiette forfaitaire.

Le II du présent article vise à supprimer cette troisième cotisation qui :

- concerne 4.000 assujettis ;

- a un rendement de 9 millions de francs par an ;

- sans contrepartie pour l'agriculteur à titre secondaire n'a pas son pendant pour les agriculteurs à titre principal exerçant une activité non salariée non agricole à titre secondaire.

III. LA SIMPLIFICATION DU CALCUL DE LA COTISATION MINIMAL D'ASSURANCE-MALADIE

D'après les dispositions de l'article L. 731-11 du code rural, l'assiette des cotisations maladie, famille, maternité et vieillesse ne peut être inférieure à des planchers fixés par décret, ce qui a pour effet de créer une cotisation minimale pour chacun de ces risques.

L'article 14 du décret n° 94-690 du 9 août 1994 fixe le montant de cette assiette minimale pour les exploitants dont la surface est comprise entre 0,5 SMI et 1,5 SMI à un niveau de revenu équivalent à :

- 800 fois le SMIC, pour sa valeur au 1 er janvier de l'année pour laquelle les cotisations sont dues soit, en 2000 32.576 francs pour l'assurance-maladie (régime AMEXA) et l'assurance-vieillesse individuelle ;

- 400 fois le SMIC (16.288 francs en 2000) pour l'assurance-vieillesse proportionnelle.

La seconde phrase de l'article L. 731-11 du code rural précise que, pour ce qui concerne les cotisations maladie, l'assiette minimale peut elle-même être modulée en fonction de la taille de l'exploitation ou de l'entreprise agricole. Au-delà de 3,5 SMI, l'assiette minimale devient fixe, quelle que soit la taille de l'exploitation, et correspond au niveau maximal de l'assiette minimum majorée. Celui-ci pour les exploitations d'une taille supérieure ou égale à 3,5 SMI est égal à 40 % du plafond de la sécurité sociale, ce qui correspond à une cotisation annuelle minimale de 7.648 francs en 2000.

S'agissant des surfaces comprises entre 1,5 et 3,5 SMI, la majoration de l'assiette et de la cotisation minimale est respectivement de 18.985 francs et 2.059 francs pour la partie de la surface excédant 1,5 SMI.

La majoration de l'assiette minimale de 800 SMIC en fonction de la superficie de l'exploitation concerne 94.000 exploitants dont 54.000 disposent d'un revenu professionnel inférieur à 800 SMIC.

La mesure proposée par le gouvernement consiste à supprimer la possibilité de majorer l'assiette minimale en abrogeant la deuxième phrase de l'article L. 731-11 du code rural.

Cette mesure devrait concerner 94.000 exploitants, pour un coût total de 148 millions de francs correspondants aux pertes de cotisations, dont 111 millions de cotisations techniques diminuant d'autant les ressources du BASPA.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à préciser que les dispositions du présent article sont applicables à compter du 1 er janvier 2001.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Il faut tout d'abord souligner le manque de clarté qui existe dans la répartition des dispositions relatives aux recettes de cotisations sociales entre le projet de loi de finances, d'une part, et le projet de loi de financement de la sécurité sociale, d'autre part. Il est en effet difficile de comprendre selon quelle logique s'effectue le partage des dispositions relatives aux charges sociales des non-salariés agricoles : le présent article comprend, comme on l'a vu, diverses mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles, tandis que les articles 5 et 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 contiennent également de telles mesures, portant notamment harmonisation des assiettes de référence des revenus professionnels soumis aux cotisations sociales agricoles pour l'article 5 et aménagement de l'assiette de la CSG des exploitants agricoles pour l'article 6.

Votre commission a eu plusieurs fois l'occasion de s'étonner de telles méthodes qu'elle ne peut que désapprouver.

S'agissant de la suppression du plafond de l'assiette des cotisations sociales des exploitants agricoles , votre commission estime qu'il s'agit d'une mesure pouvant se justifier puisqu'il s'avère que ce plafonnement, dont les exploitants agricoles sont les seuls à bénéficier au titre de leurs cotisations maladie, aboutit pour des revenus élevés, supérieurs à 1 million de francs, à une cotisation dégressive.

S'agissant de la suppression de la cotisation de solidarité sur les exploitants agricoles à titre secondaire , elle considère également cette mesure acceptable dans la mesure où cette cotisation peut effectivement poser des problèmes d'équité comme cela a été souligné.

S'agissant enfin de la simplification du calcul de la cotisation minimale d'assurance maladie des exploitants agricoles , votre commission ne peut qu'approuver la motivation de cette réforme mais estime qu'une étape supplémentaire devra à l'avenir être franchie dans le sens d'une suppression totale de cette cotisation minimale. Certes la suppression totale immédiate de l'ensemble du dispositif d'assiettes minimales pour la maladie aurait un coût très important estimé à 431 millions de francs de perte de cotisations. Il serait ainsi nécessaire de procéder en deux étapes successives, mais le maintien à terme de ces assiettes minimales serait inconcevable, d'une part en raison de l'existence actuelle de la couverture maladie universelle (CMU), d'autre part, en raison du nécessaire respect d'un principe général de la sécurité sociale selon lequel les assujettis contribuent à raison de leurs moyens afin de bénéficier de prestations servies en fonction de leurs besoins.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE ADDITIONNEL AVANT L'ARTICLE 26

Indexation du contrat de croissance et de solidarité

Commentaire : le présent article additionnel a pour objet de prendre en compte 50 % du taux de croissance du produit intérieur brut pour l'indexation de l'enveloppe normée des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales.

Les concours de l'Etat aux collectivités locales sont regroupés au sein d'un " ensemble " appelé " enveloppe normée ". Cet ensemble évolue en fonction d'un taux d'indexation fixé pour une période de trois ans par une loi de finances.

L'article 57 de la loi de finances pour 1999 a défini les modalités de l'actuel contrat de croissance et de solidarité, qui s'applique aux exercices 1999, 2000 et 2001. Le principe du contrat de croissance est le même que celui de son prédécesseur, le pacte de stabilité. Chacune des dotations qui compose l'enveloppe évolue à son rythme propre 116 ( * ) .

Si le taux d'évolution de l'ensemble de ces dotations est supérieur à celui de l'enveloppe, cela se traduit par une réduction de la variable d'ajustement. Si, mais cela n'est jamais arrivé, le taux de progression de ces dotations était inférieur à celui de l'enveloppe, le montant de la variable d'ajustement progresserait.

Dans le contrat de croissance, comme précédemment dans le pacte de stabilité, c'est la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) qui joue le rôle de variable d'ajustement.

Cette architecture, dans son principe, présente des avantages. Elle permet tout d'abord de fournir une vision d'ensemble des dotations de l'Etat aux collectivités locales. Elle permet également de fixer un plafond à la progression de ces concours, de sorte que l'évolution des concours de l'Etat aux collectivités locales, qui relève d'indexations mécaniques, ne remette pas en cause le cas échéant la politique de maîtrise des dépenses de l'Etat.

Cependant, pour que ce dispositif fonctionne de manière optimale, il convient que le taux de progression de l'enveloppe retenu soit pertinent et réaliste.

Si le taux était trop élevé, l'association des collectivités locales à la maîtrise des finances publiques serait de " pur affichage ". Si le taux est trop faible, il se traduit par une contrainte excessive sur les budgets locaux, d'autant plus que, contrairement aux préconisations du Sénat en 1995, le taux de progression de l'enveloppe n'est pas lié à l'évolution des charges des collectivités locales.

Le Sénat a toujours contesté les modalités de fonctionnement de l'enveloppe normée des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales en considérant que les modalités, d'abord du pacte de stabilité, puis de l'actuel contrat de croissance et de solidarité, mettent en évidence que ces outils sont principalement destinés à réaliser des économies budgétaires. Comme le soulignait dès 1995 le président Christian Poncelet, alors président de votre commission des finances, le dispositif de l'enveloppe normée " reflète avant tout, une fois de plus, la volonté du gouvernement d'utiliser les concours qu'il verse aux collectivités locales comme la variable d'ajustement de son propre budget ".

Lors des débats sur l'article 57 de la loi de finances pour 1999, qui définit le fonctionnement du contrat de croissance et de solidarité, votre commission des finances avait fait valoir que seule une indexation de l'enveloppe normée sur l'indice de la DGF ( prix de n+ 1 + ½ du PIB de n ) était de nature à maintenir l'équilibre entre la maîtrise des dépenses publiques et le respect du contrat moral vis-à-vis des collectivités locales.

Le gouvernement et l'Assemblée nationale ont préféré s'en tenir à une prise en compte de la croissance du PIB limitée à 20 % en 1999, 25 % en 2000 et 33 % en 2001. Il en résulte que le montant de la variable d'ajustement a toutes les chances de baisser puisque l'indexation de l'enveloppe est significativement inférieure à celle de principale composante (la DGF représente à elle seule les deux tiers de l'enveloppe normée).

Pourtant, l'objet du contrat n'est pas réduire d'année en année le montant de la variable d'ajustement. S'agissant de la DCTP, il convient de garder en mémoire que cette dotation reste une allocation compensatrice de réductions de bases fiscales, donc de " manque à gagner " pour les collectivités locales. Si la DCTP n'était pas la variable d'ajustement du contrat, son montant augmenterait chaque année.

Evolution du montant de la DCTP depuis la création de l'enveloppe normée

(en millions de francs)

1996

1997

1998

1999

2000

PLF 2001

17.632

17.815

17.343

13.825

11.899

11.523

NB : Les montants ci-dessus sont les montants des prélèvements sur recettes au titre de la DCTP, ils intègrent la REI (qui ne fait pas partie du périmètre de l'enveloppe normée)

Source : lois de finances, projet de loi de finances pour 2001

La DCTP ne doit pas avoir vocation d'être " rabotée " d'année en année. Son montant doit baisser seulement lorsque l'on constate une croissance non maîtrisée des autres concours de l'Etat aux collectivités locales. Par convention, on peut accepter de considérer que cette croissance n'est pas maîtrisée lorsqu'elle dépasse le taux résultant de l'indice de la principale dotation de fonctionnement, la DGF, cet indice ayant été défini de manière consensuelle en 1993.

C'est pourquoi, à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances pour 1999 et 2000, votre commission vous a présenté des amendements tendant à aligner le taux de progression de l'enveloppe normée sur celui de la DGF.

L'indice de la DGF pour 2000 s'élève à 2,9 % (1,2 % d'augmentation des prix en 2001 et la moitié de 3,4 % d'augmentation du PIB prévue pour 2000).

Le présent article additionnel se situe dans la continuité de la position de votre commission depuis l'examen de la loi de finances pour 1999. S'il était adopté, la DCTP ne baisserait pas de 5,4 % en 2001 mais progresserait de 2,5 %. La DCTP ne baisserait pas de 639 millions de francs mais progresserait de 304 millions de francs.

Le contrat mériterait alors son appellation en associant véritablement les collectivités à la croissance

Ce résultat montre que les concours financiers de l'Etat autres que la DGF progresseront en moyenne en 2001 moins vite que l'indice de la DGF. Cela vient du fait que le taux de progression de la formation brute de capital fixe des administrations publiques, sur lequel sont indexées les dotations d'équipement, sera limité en 2001 à 1,6 %.

Le taux de progression des recettes fiscales nettes de l'Etat s'établit pour sa part à 4,67 %, tandis que le taux de progression de la DGF, après recalage et régularisation négative, est de 3,42 %.

Evolution de l'enveloppe normée résultant du PLF 2001 et du dispositif proposé par votre commission des finances

(en millions de francs)

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 26

Financement des communautés d'agglomération

Commentaire : le présent article a pour objet de majorer le financement par l'Etat " hors DGF " des nouvelles communautés d'agglomération, en portant de 500 millions de francs à 1.200 millions de francs le montant du prélèvement sur les recettes de l'Etat prévu à cet effet.

I. LE CONTEXTE : LES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION ET LEUR FINANCEMENT

A. L'ORIGINE DES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION

Les communautés d'agglomération ont été créées par la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale dans le but de devenir la formule la plus courante de coopération intercommunale en milieu urbain. Cette nouvelle catégorie d'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) est réservée aux EPCI de plus de 50.000 habitants.

La création des communautés d'agglomération répondait à la nécessité de remédier à l'échec des communautés de villes, créées par la loi du 6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la République.

Les communautés de villes n'étaient pas très différentes des communautés de communes, si ce n'est que les communes qui en étaient membres étaient obligées de transférer à l'EPCI le produit de leur taxe professionnelle. Le régime fiscal de la taxe professionnelle unique y était en effet obligatoire.

Les communautés de ville ont été un échec. Il n'en existait que quatre en 1999. Cet échec était attribué à la contrainte très forte pour les communes que représentait la taxe professionnelle unique.

Pour autant, il a semblé aux auteurs du texte qui est devenu la loi du 12 juillet 1999 que ce régime fiscal correspondait aux nécessités de l'intercommunalité urbaine, notamment parce qu'il entraîne une péréquation des charges de centralité.

C'est pourquoi les communautés d'agglomération, comme les communautés de villes, sont soumises au régime fiscal de la taxe professionnelle. Mais, pour atténuer les réticences, le régime de la taxe professionnelle a été assoupli. La période d'unification des taux a été portée de dix à douze ans (article 86 de la loi précitée).

Et surtout, des incitations financières ont été mises en place : possibilité de compléter les recettes provenant de la taxe professionnelle par le vote de taux additionnels aux " impôts ménages " (article 86 de la loi précitée), suppression de l'écrêtement au profit des fonds départementaux de la taxe professionnelle (article 92 de la loi précitée), exonération du deuxième prélèvement au profit du fonds de solidarité de la région Ile-de-France (article 95 de la loi précitée). La principale incitation financière consiste surtout en la fixation par la loi du montant de l'attribution moyenne par habitant au titre de la dotation globale de fonctionnement (article 105). L'attribution moyenne par habitant des anciennes communautés de villes était d'environ 100 francs par habitant.

Le succès de la nouvelle formule des communautés d'agglomération a été immédiat et massif. L'objectif prévu pour 2004, une cinquantaine de créations, a été atteint dès 2000.

B. LE FINANCEMENT DES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION

La rédaction de l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales issue de l'article 105 de la loi du 12 juillet 1999 prévoit trois sources de financement pour les communautés d'agglomération :

- la DGF des groupements : les EPCI qui se transforment en communautés d'agglomération restent financés par la fraction de la dotation d'aménagement de la DGF des communes destinée à financer les structures intercommunales à hauteur des attributions qu'elles percevaient avant leur transformation ;

- un nouveau prélèvement sur les recettes de l'Etat : afin que le surcoût provoqué par la création de la nouvelle catégorie d'EPCI ne pèse sur la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale, il est prévu un financement extérieur à la DGF, destiné à prendre en charge, pour les communautés d'agglomération issues de la transformation de groupements préexistants, la différence entre leurs anciennes attributions et leurs nouvelles. Le nouveau prélèvement sur recette finance par ailleurs la totalité des attributions versées aux communautés d'agglomération créées ex nihilo .

Le nouveau prélèvement sur recettes existera jusqu'en 2004. La loi du 12 juillet 1999 prévoit que son montant s'établit à 500 millions de francs ;

- la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) : la loi du 12 juillet 1999 prévoit, si les deux sources de financement prévues " se révèlent insuffisantes " pour couvrir l'intégralité du coût des communautés d'agglomération, que les sommes nécessaires soient prélevées sur la DCTP.

Le rapporteur pour avis au nom de votre commission des finances de la loi du 12 juillet 1999, notre collègue Michel Mercier, avait dénoncé le recours à la DCTP en considérant que cette dotation ne pouvait pas à la fois supporter le rôle de variable d'ajustement du contrat de croissance et celui de " soupape de sécurité " de la DGF.

Cette réserve était confortée par les prévisions de prélèvements sur la DCTP établies par le rapporteur pour avis au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale, qui estimait que " le coût annuel du financement de la DGF des communautés d'agglomération devrait s'élever au moins à 2,5 milliards de francs en 2004. Il n'en serait autrement que si les objectifs fixés n'étaient pas atteints ". Dès lors, et même si une partie de la DGF des communautés d'agglomération reste financée par la DGF des groupements, il était manifeste que le prélèvement sur la DCTP n'avait pas vocation à être exceptionnel.

C'est pourquoi, à l'initiative du Sénat, la commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce texte a prévu que la possibilité de " piocher " dans la DCTP pour financer les communautés d'agglomération serait limitée aux seules années du contrat de croissance et de solidarité, c'est-à-dire 2000 et 2001. Pour la suite, la négociation du nouveau contrat de croissance entre l'Etat et les collectivités locales devra prendre en compte la nécessité de financer les communautés d'agglomération.

Selon les simulations fournies à l'époque par le gouvernement, il ne devait pas y avoir de prélèvement sur la DCTP en 2000 et, pour 2001, un prélèvement limité à 500 millions de francs.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ RÉSULTE DU SUCCÈS INATTENDU DES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION

A. LES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION ONT COÛTÉ BEAUCOUP PLUS CHER QUE PRÉVU EN 2000

En 2000, le coût de la DGF des communautés d'agglomération s'est élevé à 1.540 millions de francs , répartis entre :

- 543 millions supportés par la DGF des groupements, correspondant à la prise en charge par cette enveloppe de la DGF perçue antérieurement par les structures intercommunales qui se sont transformées en communauté d'agglomération ;

- 500 millions de francs correspondant au prélèvement sur les recettes de l'Etat prévu à l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales ;

- 497 millions de francs prélevés sur la DCTP. Il a donc fallu recourir à la DCTP un an plus tôt que prévu.

En 2000, la baisse de la DCTP par rapport à 1999 devait s'établir à 3,44 %. Le prélèvement au profit de l'intercommunalité porte cette diminution à 7,5 %. Grâce au mécanisme de plafonnement de leur baisse à 50 % prévu à l'article 57 de la loi de finances pour 1999, la baisse qu'enregistrent les communes éligibles à la DSU et à la fraction " bourgs-centres " de la DSR, les départements éligibles à la DFM 117 ( * ) et les régions éligibles au FCDR 118 ( * ) est ramenée à 3,75 %. En revanche, les autres bénéficiaires de la DCTP voient leurs attributions baisser de 16,5 %.

L'article 14 de la loi de finances rectificative pour 2000 du 13 juillet 2000 a mis en place une dotation " ad hoc " destinée à compenser partiellement la baisse de la DCTP résultant du prélèvement au profit des communautés d'agglomération, d'un montant de 250 millions de francs.

Le Sénat, à l'initiative de votre commission des finances, avait adopté un amendement tendant à porter le montant de cette dotation à 497 millions de francs, de manière à ce que le financement des communautés d'agglomération soit totalement neutre pour les bénéficiaires de la DCTP. Le gouvernement et l'Assemblée nationale n'ont pas souhaité aller en ce sens.

Les bénéficiaires de la dotation " ad hoc "

L'article 14 de la loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 portant loi de finances rectificative pour 2000 prévoit que la dotation de 250 millions de francs est répartie entre les " communes et les établissements publics de coopération intercommunale non mentionnés au 2° bis du II de l'article 1648 B du code général des impôts, ainsi que les départements, les régions, la collectivité territoriale de Corse et les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle ", autrement dit l'ensemble des bénéficiaires de la DCTP qui ne bénéficient pas d'une compensation par le FNPTP (le FNPTP prend en charge l'intégralité des baisses de DCTP enregistrées par les communes éligibles à la DSU et à la DSR et par les groupements comportant des communes éligibles à ces dotations, à hauteur de la part de la population de ces communes dans la population totale du groupement).

Les communes éligibles à la DSU, à la DSR " bourgs-centres " et les communes éligibles à la fraction " péréquation " de la DSR dont le potentiel fiscal n'est pas inférieur à 90 % du potentiel fiscal moyen des communes de leur strate démographique ne sont pas éligibles à la nouvelle dotation.

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) dont aucune des communes membres n'est éligible à la DSU ou à la DSR " bourgs-centres " seront éligibles à la nouvelle dotation. S'agissant des EPCI dont certaines communes membres sont éligibles à l'une des deux dotations précitées, ils ne bénéficieront de la nouvelle dotation qu'à hauteur du pourcentage de leurs habitants résidant dans des communes non-éligibles à la DSU ou la DSR " bourgs-centres ".

Les départements éligibles à la DFM et les régions éligibles au FCDR pourront cumuler le plafonnement de leurs baisses à 50 % et l'éligibilité à la nouvelle dotation.

Cette dotation a permis de ramener le taux moyen de baisse de la DCTP de 7,5 % à 5,5 %.

B. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA MAJORATION DU PRÉLÈVEMENT SUR LES RECETTES DE L'ETAT

Le présent article propose de porter de 500 millions de francs à 1.000 millions de francs le montant du prélèvement sur les recettes de l'Etat destiné à financer, en plus des crédits figurant au sein de la DGF des groupements, les communautés d'agglomération.

Si une telle disposition était entrée en vigueur dès 2000, il n'aurait pas été nécessaire d'opérer un prélèvement sur la DCTP.

Il semble que, dans cette affaire, le gouvernement agisse toujours avec un an de retard. Il prévoit de consacrer en 2001 les sommes qui auraient été nécessaires en 2000, et ne prévoit aucun crédit pour financer les communautés d'agglomération qui se sont créées en 2000 et qui commenceront à percevoir une DGF en 2001.

On estime qu'une trentaine de communautés d'agglomération seront créées entre le 1 er janvier et le 31 décembre 2000. Il n'est pas possible de chiffrer avec précision le coût de ces créations car la population de ces nouveaux groupements n'est pas encore connue. Par ailleurs, leur répartition entre communautés issues de transformations et communautés créées ex nihilo n'est pas arrêtée.

Le rapporteur général de la commission des finances de l'Assemblée nationale se livre cependant à une tentative de chiffrage et estime que le coût des nouvelles communautés d'agglomération s'élèverait à 379,5 millions de francs, ce qui porterait le coût total des communautés d'agglomération à 1.935 millions de francs (contre 1.540 millions de francs en 2000), financé par le prélèvement sur recettes porté à 1.000 millions de francs, la DGF des groupements pour 675 millions de francs et la DCTP pour 200 à 300 millions de francs.

Tout en soulignant que son chiffrage est une hypothèse basse 119 ( * ) , le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale estime qu'il est " inacceptable " d'amputer à nouveau la DCTP dans des proportions importantes car celle-ci est déjà la variable d'ajustement du contrat de croissance (la baisse prévue en 2001 est de 5,9 %). En outre, il souligne que le poids de la baisse du montant de la DCTP est concentré sur certaines collectivités qui, bien que n'étant pas éligibles à une dotation de solidarité, ne doivent pas, pour autant, être considérées comme riches.

Par conséquent, sur la proposition de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a porté de 1.000 millions de francs à 1.200 millions de francs le montant du prélèvement sur les recettes de l'Etat destiné à financer les communautés d'agglomération.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général partage les arguments développés par son homologue de l'Assemblée nationale. Il considère que cette dernière a, certes, fait un pas dans la bonne direction, mais qu'il faut aller plus loin.

Il relève que le financement " hors DGF " des communautés d'agglomération s'est élevé en 2000 à 997 millions de francs (500 millions de francs de prélèvement sur recettes et 497 millions de francs de prélèvement sur la DCTP) et que ces 997 millions ont servi à financer une cinquantaine de communautés d'agglomération.

En faisant l'hypothèse que les communautés créées en 2000 présenteront les mêmes caractéristiques que celles créées en 1999 (même nombre d'habitants, même proportion de créations ex nihilo), on peut procéder au chiffrage, certes sommaire, suivant : si 997 millions de francs ont servi à financer 50 communautés d'agglomération (hors DGF), le coût unitaire des communautés d'agglomération est d'environ 20 millions de francs. Dès lors, si 30 communautés d'agglomération supplémentaires devaient être financées en 2001, leur coût (hors DGF) serait de l'ordre de 600 millions de francs.

Le coût hors DGF des communautés d'agglomération serait d'environ 1.600 millions de francs (997 + 600), alors que le financement hors DGF ne serait que 1.200 millions de francs. Un prélèvement de 400 millions de francs sur la DCTP serait alors nécessaire.

Pour éviter le recours à la DCTP, probable en l'état actuel du texte même si le secrétaire d'Etat à l'industrie a estimé lors du débat à l'Assemblée nationale que " le 1,200 milliard ainsi dégagé sera largement suffisant pour faire face aux engagements de la loi de juillet 1999 visant à accélérer l'intercommunalité ", votre rapporteur général vous proposera par conséquent un amendement portant de 1.200 à 1.600 millions de francs le montant du prélèvement sur les recettes de l'Etat prévu à l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales, de façon à éviter que la DCTP ne soit ponctionnée à nouveau en 2001. Il convient de relever que l'article L. 5211-28 précité prévoit que ce montant est une " limite maximale " et non une masse à répartir.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 26

Reconduction du mécanisme compensant les diminutions de dotation de compensation de la taxe professionnelle subies par les collectivités défavorisées

Commentaire : le présent article additionnel vise à compenser intégralement les baisses de dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) enregistrées en 2001 par les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU) ou à la dotation de solidarité rurale (DSR), ainsi que par les établissements publics de coopération intercommunale auxquels elles appartiennent.

I. LE PROLONGEMENT D'UN DISPOSITIF MIS EN PLACE PAR LES LOIS DE FINANCES POUR 1999 ET POUR 2000

A. LE CONTRAT DE CROISSANCE ET DE SOLIDARITÉ ORGANISE LA BAISSE DU MONTANT DE LA DCTP

L'article 57 de la loi de finances pour 1999 fixe les modalités de fonctionnement de l'enveloppe normée des concours de l'Etat aux collectivités locales dans le cadre du contrat de croissance et de solidarité, dont la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) est la variable d'ajustement.

Outre la DCTP, l'enveloppe normée est composée de douze dotations, qui évoluent en fonction soit du taux de progression de la dotation globale de fonctionnement, de l'évolution des recettes fiscales nettes de l'Etat ou de l'évolution de la formation brute de capital fixe des administrations publiques.

Lorsque le taux d'évolution des douze dotations est supérieur à celui de l'enveloppe normée elle même, la DCTP joue le rôle de variable d'ajustement et son montant diminue. Ainsi, en 2001, l'enveloppe normée augmentera de 3.790 millions de francs (2,32 %) tandis que les douze dotations progresseront de 4.429 millions de francs (2,9 %). Par conséquent, la DCTP baissera de 639 millions de francs (5,4 %).

B. LE CONTRAT DE CROISSANCE ET DE SOLIDARITÉ LIMITE LES BAISSES DE DCTP DES COLLECTIVITÉS DÉFAVORISÉES

L'article 57 précité prévoit que les baisses de DCTP enregistrées par les communes éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU) et à la dotation de solidarité rurale (DSR), les départements éligibles à la dotation de fonctionnement minimale (DFM) et les régions éligibles au Fonds de correction des déséquilibres régionaux (FCDR) voient leurs baisses de DCTP plafonnées à 50 % de leur baisse théorique.

Par exemple, en 2001, ces collectivités ne supporteront que la moitié de la baisse de 5,4 %, soit une baisse de 2,85 %.

Les collectivités qui ne sont pas éligibles à l'une des dotations de solidarité supporteront la baisse de 5,4 %, ainsi que les 2,85 % de baisse dont sont exonérées les collectivités défavorisées. En 2000, la baisse moyenne de la DCTP a été de 7,5 % mais, compte tenu du jeu du plafonnement des baisses, la DCTP des collectivités non plafonnées a été de 16 %.

C. EN 1999 ET EN 2000, LE FNPTP A COMPENSÉ INTÉGRALEMENT LES PERTES DE DCTP ENREGISTRÉES PAR LES COMMUNES DÉFAVORISÉES ET LEURS GROUPEMENTS

Lors de la discussion de la loi de finances pour 1999 à l'Assemblée nationale, nos collègues députés ont estimé que les communes éligibles à la DSU ou à la DSR devaient être totalement exonérés de baisse de DCTP (article 58 de la loi de finances pour 1999). Le Sénat a précisé que les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre auxquels elles appartiennent devraient également être exonérés de baisse de DCTP, à hauteur de la part de leur population totale résidant des les communes membres éligibles à la DSU ou à la DSR.

Néanmoins, ces nouvelles exonérations ne pouvaient pas être prises en charge par le mécanisme de plafonnement des baisses prévu dans le contrat de croissance et de solidarité, car cela aurait provoqué une baisse trop importante de la DCTP des collectivités qui ne bénéficient pas du plafonnement et des exonérations. Par conséquent, il a été choisi de faire prendre en charge les compensations des baisses de DCTP prévues à l'article 58 de la loi de finances pour 1999 par le Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle, le FNPTP .

Au total, la loi de finances pour 1999 prévoit le dispositif suivant s'agissant des exonérations de baisse de DCTP :

- pour les département éligibles à la DFM et les régions éligibles au FCDR, les pertes de DCTP sont réduites de moitié dans le cadre du contrat de croissance et de solidarité (article 57 de la loi de finances pour 1999) ;

- pour les communes éligibles à la DSU ou la DSR " bourgs-centres ", les pertes de DCTP sont réduites de moitié dans le cadre du contrat de croissance et de solidarité (article 57), l'autre moitié étant intégralement compensée par le FNPTP (article 58) ;

- pour les ECPI à fiscalité propre comprenant au moins une commune éligible à la DSU ou la " DSR 1 " et les communes éligibles à la " DSR 2 " dont le potentiel fiscal est inférieur à 90 % du potentiel fiscal moyen de leur strate démographique, les pertes de DCTP sont intégralement compensées par le FNPTP (article 58).

L'article 58 de la loi de finances pour 1999 prévoit que les attributions du FNPTP destinées à compenser les baisses de DCTP enregistrées entre 1998 et 1999 seront versées pendant les trois années du contrat de croissance et de solidarité (en 1999, 2000 et 2001).

L'article 63 de la loi de finances pour 2000 a mis en place un dispositif de même type pour compenser par le FNPTP les baisses de DCTP enregistrées entre 1999 et 2000 . Les attributions de cette compensation sont versées pendant les deux années restantes du contrat de croissance et de solidarité (en 2000 et en 2001).

Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, le Sénat à l'initiative de votre rapporteur général, avait adopté un amendement tendant à étendre aux pertes de DCTP enregistrées entre 2000 et 2001 le dispositif applicables aux pertes de DCTP enregistrées entre 1999 et 2000. Cette anticipation apparaissait en effet conforme avec la philosophie des contrats pluriannuels, dont l'objectif est notamment d'améliorer la prévisibilité de l'évolution des concours financiers de l'Etat.

Le secrétaire d'Etat à l'industrie avait émis un avis défavorable à cet amendement au motif que, à l'automne 2000, " nous ne savons même pas, à la date d'aujourd'hui, si une baisse interviendra en 2001 ". A votre rapporteur général qui estimait que " on peut penser qu'il y aura baisse ", le secrétaire d'Etat avait répondu : " Oh non ! ".

Pourtant, le présent projet de loi de finances prévoit une baisse de 5,4 % de la DCTP (hors réduction pour embauche et investissement). Dès lors, votre rapporteur général est conduit à présenter à nouveau l'amendement adopté par le Sénat lors de la discussion de la loi de finances pour 2000.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UNE COMPENSATION DES BAISSES DE DCTP RESPECTUEUSE DES RESSOURCES DU FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION

A. LA RECONDUCTION DU DISPOSITIF DE COMPENSATION DES BAISSES DE DCTP PAR LE FNPTP

A l'occasion des projets de loi de finances pour 1999 et 2000, c'est l'Assemblée nationale qui, en première lecture, avait introduit le dispositif de compensation par le FNPTP des baisses de DCTP.

Elle ne l'a pas fait à l'occasion de son examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2001. Le présent article additionnel a pour objet de pallier cet oubli.

Il prévoit que, en 2001, les communes éligibles à la DSU et à la DSR ainsi que les communes éligibles à la fraction " péréquation " de la DSR (" DSR 2 ") dont le potentiel fiscal par habitant est inférieur à 90 % du potentiel fiscal moyen de leur strate démographique seront intégralement compensées des baisses de DCTP enregistrées entre 2000 et 2001 par le biais d'attributions du Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP). Il dispose également que les baisses de DCTP enregistrées entre 2000 et 2001 par les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre comprenant au moins une commune éligible à la DSU ou à la fraction " bourgs-centres " de la DSR seront compensées par le FNPTP.

B. EVITER DE PÉNALISER LE FONDS NATIONAL DE PÉRÉQUATION

La compensation des baisses de DCTP prévue par le présent article additionnel, comme les compensation organisées par les lois de finances pour 1999 et 2000, est confiée au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP). Pourtant, c'est le Fonds national de péréquation (FNP), qui est pénalisé par cette charge nouvelle confiée au FNPTP.

Ce paradoxe apparent s'explique par les liens financiers qui unissent les deux fonds. Les dépenses du FNPTP sont en effet très inférieures à ses recettes, le solde constituant la principale ressource du FNP. Par conséquent, toute augmentation des charges du FNPTP entraîne une baisse des ressources du FNP , donc des crédits à répartir entre les collectivités éligibles au FNP (principalement des petites communes, à faible potentiel fiscal et à fort effort fiscal).

Pour remédier à cette difficulté, l'article 129 de la loi de finances pour 1999 a prévu que, pendant les trois années d'application du contrat de croissance et de solidarité (1999, 2000 et 2001), la dotation de l'Etat au FNP serait majorée de 150 millions de francs.

Malheureusement, cette majoration se révèle insuffisante pour compenser la perte de recettes supportée par le FNP . La compensation des baisses de DCTP entre 1998 et 1999 a coûté 569 millions de francs au FNPTP en 1999 et en 2000. La compensation des baisses de DCTP entre 1999 et 2000 a coûté 323 millions de francs au FNPTP en 2000. Par conséquent, compte tenu de la majoration de 150 millions de francs des recettes du FNP, le manque à gagner pour le FNP s'est élevé en 1999 à :

569 -150 = 419 millions de francs

et en 2000 à :

569 + 323 -150 = 742 millions de francs en 2000 120 ( * ) .

Le tableau ci-dessous récapitule l'ensemble des recettes et des dépenses du FNPTP et du FNP en 2000. Il met en évidence les conséquences sur le FNP de la prise en charge de la compensation des baisses de DCTP par le FNPTP. Il ressort en effet que, alors que les dépenses totales des deux fonds ont progressé de 5,7 %, les sommes consacrées à la péréquation en faveur des petites communes à faible potentiel fiscal et à effort fiscal élevé ont baissé de 0,2 %.

Pourtant, lors de la discussion au Sénat du projet de loi de finances pour 2000, le secrétaire d'Etat à l'industrie avait estimé que " le FNPTP connaît une croissance naturelle de ses ressources qui est suffisante pour faire face aux responsabilités qui sont les siennes et qui resteront les siennes dans les années à venir ".

Les ressources et les charges des deux fonds de péréquation en 2000

(en millions de francs)

* Les réserves sont des reliquats des exercices précédents. Elles expliquent que le total des ressources des fonds soit différent du total des dépenses des fonds.

Le tableau ci-dessous montre quelle aurait été en 2000 l'évolution des crédits de la péréquation en faveur des petites communes si le dispositif de prise en charge par le FNPTP de la compensation des baisses de DCTP (et la majoration correspondante de la dotation de l'Etat au FNP) n'avaient pas existé. Il en ressort que, si le dispositif de prise en charge de la compensation des baisses de DCTP n'avait pas existé en 2000, les ressources totales des deux fonds auraient progressé de 5,8 % mais les crédits destinés à la péréquation en faveur des petites communes auraient progressé de plus de 7 % :

Ressources et dépenses du FNPTP et du FNP en 2000 si le mécanisme de compensation des baisses de DCTP n'avait pas existé

(en millions de francs)

Selon les informations transmises à votre rapporteur général, une éventuelle prise en charge par le FNPTP de la compensation des baisses de DCTP enregistrées entre 2000 et 2001 coûterait environ de 250 millions de francs. Par conséquent, le manque à gagner en 2001 pour le FNP s'établirait à :

569 + 323 + 250 -150 = 992 millions de francs.

Comme il l'avait déjà fait l'année dernière, votre rapporteur général ne pourrait se résoudre à mettre en place un dispositif péréquateur (la compensation des baisses de DCTP des communes défavorisées) qui pénaliserait un autre dispositif péréquateur (le FNP). Par conséquent, il vous proposera de neutraliser les conséquences sur le FNP de la prise en charge par le FNPTP de la compensation des baisses de DCTP enregistrées entre 2000 et 2001. A cette fin, il vous soumettra un amendement tendant à majorer de 250 millions de francs les ressources du FNPTP.

Le Sénat, à l'initiative de votre rapporteur général, avait déjà adopté un amendement majorant de 250 millions de francs les ressources du FNPTP lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000.

Décision  de la décision : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.

ARTICLE 26 bis (nouveau)

Allégement de taxe foncière sur les propriétés bâties pour certains logements sociaux à usage locatif

Commentaire : le présent article a pour objet d'introduire dans le code général des impôts de nouvelles modalités d'allégement de taxe foncière sur les propriétés bâties en faveur de certains logements locatifs sociaux.

I. LES DISPOSITIONS DU PRESENT ARTICLE

A. UN ABATTEMENT DE TAXE FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES POUR LES LOGEMENTS SOCIAUX EN ZONE URBAINE SENSIBLE

Le I. du présent article insère un nouvel article 1388 bis dans le code général des impôts, afin d'introduire, pour la première fois, un dispositif d'abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties, au bénéfice des logements sociaux.

1. Les logements visés par le dispositif d'abattement : les logements sociaux situés dans les zones urbaines sensibles, ayant déjà fait l'objet d'exonérations

Le I. du nouvel article 1388 bis du code général des impôts a pour objet d'appliquer un abattement de 30 % à la base d'imposition de la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) dans les zones urbaines sensibles mentionnées au 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

Les logements visés par cet abattement sont les logements à usage locatif mentionnés à l'article L. 444-1 du code de la construction et de l'habitation et appartenant à l'un des organismes cités à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ou à une société d'économie mixte.

Les logements mentionnées à l'article L. 444-1 du code de la construction et de l'habitation sont les logements acquis et améliorés avec le concours financier de l'Etat ou ouvrant droit à l'aide personnalisée au logement et appartenant aux organismes d'habitations à loyer modéré ou gérés par ceux-ci.

Les organismes cités à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation sont tous les organismes d'habitations à loyer modéré, à savoir les offices publics d'aménagement et de construction, les offices publics d'habitations à loyer modéré, les sociétés anonymes d'habitations à loyer modéré, les sociétés anonymes coopératives de production d'habitations à loyer modéré, les sociétés anonymes de crédit immobilier et les fondations d'habitations à loyer modéré.

Outre les organismes d'habitations à loyer modéré, les sociétés d'économie mixte sont prévues dans le dispositif.

• Par ailleurs, les logements tels que précédemment définis doivent avoir bénéficié d'une exonération prévue aux article 1384, 1384 A, au II bis de l'article 1385 ou avoir été acquis avant le 1er janvier 1998 en vue de leur location avec le concours financier de l'Etat en application du 3° de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation.

Ces dispositions visent précisément les logements locatifs sociaux ayant déjà bénéficié d'exonérations, soit de plein droit, soit par décision des collectivités locales.

L'article 1384 du code général des impôts exonère de TFPB les constructions neuves affectées à l'habitation principale pendant une durée de quinze ans à compter de leur achèvement, pour les parties d'immeubles réellement occupées par des logements à loyers modérés.

L'article 1384 A du code général des impôts exonère de TFPB les constructions neuves affectées à l'habitation principale pendant une durée de quinze ans à compter de leur achèvement, pour les constructions financées à concurrence de plus de 50 % au moyen des prêts aidés de l'Etat. Les logements concernés sont les logements neufs à usage locatif et affectés à l'habitation principale.

Le II bis de l'article 1385 du code général des impôts ramène à compter de 1984, la durée de l'exonération de TFPB pour les constructions nouvelles, reconstructions et additions de construction de 25 ans à 15 ans, sauf en ce qui concerne les logements à usage locatif appartenant aux organismes visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation et ceux qui, au 15 décembre 1983, appartiennent à certaines sociétés d'économie mixte.

Enfin, les derniers logements éligibles sont les logements acquis avant le 1er janvier 1998 en vue de leur location avec le concours financier de l'Etat en application de l'article L. 351-2 du code de la construction et de l'habitation, c'est-à-dire les logements qui ouvrent droit à l'aide personnalisée au logement. Les logements acquis depuis le 1er janvier 1998 bénéficient d'une exonération de plein droit en vertu d'une disposition de l'article 50 de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions.

En conclusion, on peut regretter la complexité de la rédaction proposée mais tous les logements locatifs répondant à des critère sociaux et appartenant au parc HLM ancien en zone urbaine sensible devraient être éligibles.

2. Un dispositif fiscal soumis à conditions

Le II. de l'article pose des conditions à l'abattement. L'avantage fiscal est en quelque sorte soumis à des conditions de " réciprocité ".

L'abattement est réservé aux logements faisant l'objet d'une convention passée entre le propriétaire et le représentant de l'Etat dans le département. Cette convention est relative à l'entretien et à la gestion du parc et a pour but d'améliorer la qualité du service rendu aux locataires.

A titre transitoire, pour les impositions établies en 2001, l'abattement est appliqué aux logements appartenant à des organismes ou sociétés d'économie mixte dans deux cas : lorsqu'ils ont fait l'objet d'un plan de redressement attesté par la caisse de garantie du logement social (CGLS) ou lorsque leur conseil d'administration a décidé de " geler " les loyers jusqu'au 31 décembre 2001, sur la base des loyers en vigueur au 31 décembre 2000.

Il s'agit de tenir compte d'un délai pour l'élaboration des conventions, mais également de favoriser les organismes sociaux qui continueront de geler leurs loyers. Les organismes faisant l'objet d'un redressement de la caisse de garantie du logement social sont ceux qui sont les plus en difficulté et ne peuvent, par exemple, opérer des gels de loyers, ce qui justifie leur exonération.

L'abattement s'applique au titre des impositions établies de 2001 à 2006 à compter du 1er janvier de l'année suivant la date de signature de la convention.

3. Les modalités pratiques

Le III. de l'article précise les modalités selon lesquelles les organismes de logement social peuvent bénéficier de l'abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties. Les organismes doivent adresser au service des impôts, avant le 1er janvier de l'année suivant celle de la signature de la convention, une déclaration conforme au modèle établi par l'administration accompagnée d'une copie de la convention et de justificatifs sur les modalités de financement de la construction ou de l'acquisition.

Le IV. prévoit des modalités provisoires pour 2001, à savoir une copie de l'attestation de la caisse de garantie du logement social ou de la délibération visée au III. de l'article.

B. LA NEUTRALISATION DE L'ABATTEMENT DE TAXE FONCIERE SUR L'ASSIETTE DE LA TAXE D'ENLEVEMENT DES ORDURES MENAGERES

Le II. du présent article modifie l'article 1522 du code général des impôts.

Cet article est relatif à la base d'imposition de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Il précise que la taxe est établie d'après le revenu net servant de base à la taxe foncière. Pour que l'abattement prévu au nouvel article 1388 bis ne soit pas pris en compte pour diminuer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la référence à l'article 1388, qui établit la base d'imposition sans abattement, est introduite.

C. UN DÉGRÈVEMENT DE TAXE FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES POUR LES LOGEMENTS SOCIAUX EN VOIE DE DEMOLITION

Le III. du présent article complète l'article 1389 du code général des impôts.

L'article 1389 prévoit un dégrèvement de taxe foncière en cas de vacance d'une maison normalement destinée à la location ou d'un immeuble utilisé dans un but industriel ou commercial. Le dégrèvement est subordonné à une triple condition : que la vacance ou l'inexploitation soit indépendante de la volonté du contribuable, qu'elle ait une durée de trois mois au moins et qu'elle affecte soit la totalité de l'immeuble, soit une partie susceptible de location ou d'exploitation séparée.

Le nouveau paragraphe ajouté à l'article 1389 prévoit que ce dégrèvement pourra s'appliquer aux logements à usage locatif, attribués conformément à l'article L. 441-1 du code de la construction et de l'habitation, appartenant à l'un des organismes visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ou à une société d'économie mixte. Il s'agit des logements d'habitation à loyer modéré. Les logements doivent être vacants depuis plus de trois mois et situés dans un immeuble destiné soit à être démoli, soit à faire l'objet de travaux.

Ces travaux dont définis au 1° de l'article R. 323-3 du code de la construction et de l'habitation et financés par les subventions prévues aux articles R. 323-1 à R. 323-12. Il s'agit des travaux ayant pour effet de mettre les logements et les immeubles achevés depuis au moins quinze ans en conformité avec les normes minimales d'habitabilité. Il s'agit donc de gros travaux de rénovation et non de simples travaux d'amélioration ou d'entretien.

Le dégrèvement est subordonné à la présentation par le propriétaire, soit de l'autorisation de démolir (en application de l'article L. 443-15-1 du code de la construction et de l'habitation) soit de la décision de subvention de travaux prévue à l'article R. 323-5 du même code.

Il convient de rappeler que le mécanisme du dégrèvement, s'il renforce l'Etat dans son rôle de premier contribuable local, n'a pas de conséquence sur les ressources des collectivités locales.

D. LE DISPOSITIF DE COMPENSATION POUR LES COLLECTIVITES LOCALES

Le IV. du présent article traite des compensations pour les collectivités locales.

Avant d'en détailler le contenu, votre rapporteur général observe que le présent article créé le première abattement en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties. Jusqu'au présent projet de loi de finances, l'assiette de cet impôt était restée intacte, même si des dégrèvements et des exonérations existaient. Cette " pureté ", inhabituelle en matière d'impôt locaux, constituait l'un des éléments explicatif du fort rendement de la taxe foncière sur les propriétés bâties au cours de la période récente.

1. Les modalités de la compensation

Le IV. du présent article dispose que la compensation de l'abattement de taxe foncière sur les propriétés bâties sera réalisée par la voie d'une " dotation budgétaire ", sans que l'imputation des crédits correspondants soit précisée.

Votre rapporteur général observe que les crédits de l'article 50 du chapitre 41-51 du budget du ministère de l'intérieur sont versés aux communes et aux structures intercommunales dans lesquelles les exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties prévues aux articles 1384, 1384 A et 1384 D du code général des impôts et aux I et II bis de l'article 1385 du même code entraînent une perte de recette supérieure à 10 % du produit communal total de TFPB 121 ( * ) .

2. Les bénéficiaires de la compensation

La réduction du produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties résultant de l'abattement mis en place par le présent article s'élèverait environ 800 millions de francs, selon les informations recueillies par votre rapporteur général. L'Union nationale des HLM 122 ( * ) estime pour sa part que la mesure " aurait pour effet d'alléger à hauteur de 750 millions de francs au total le compte d'exploitation des organismes qui ont en charge la gestion d'un patrimoine social situé dans les quartiers en difficulté ". Pourtant, selon les informations recueillies par votre rapporteur général, le coût pour l'Etat de la compensation aux collectivités locales de l'abattement serait de 485 millions de francs.

Cet écart s'explique par le fait que toutes les collectivités ne seraient pas bénéficiaires de la compensation.

Le IV. du présent article prévoit que la compensation de l'abattement est versée aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre, " à l'exception de ceux faisant application du II de l'article 1609 nonies C " du code général des impôts.

Il ressort de cette rédaction que ne bénéficient pas de la compensation :

- les départements ;

- les régions ;

- les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre faisant application des dispositions du II de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, c'est-à-dire les établissements publics de coopération intercommunale qui choisissent de percevoir une " fiscalité mixte " (taxe professionnelle unique + impôts ménages).

3. Le mode de calcul de la compensation

Une fois n'est pas coutume, le mode de calcul de la compensation retenu par le présent article est dynamique et tient compte de l'évolution des bases.

Les attributions versées aux communes et aux structures intercommunales seront calculées chaque année en appliquant au montant des bases abattues (30 % des bases) le taux de l'année précédente. Lorsqu'une commune perçoit un taux additionnel à son taux de TFNB destiné à financer sa contribution à une structure intercommunale sans fiscalité propre, ce taux est pris en compte pour le calcul de la compensation.

II. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

A. UN DISPOSITIF MOTIVE PAR LE SOUCI DE COMPENSER L'ACCROISSEMENT DES CHARGES DES HLM ... SUITE AUX DECISIONS GOUVERNEMENTALES

Le présent article est issu d'un amendement d'origine parlementaire. L'idée d'un allégement de taxe foncière sur les propriétés bâties avait d'ailleurs été avancée à l'Assemblée nationale lors du débat sur le projet de loi " solidarité et renouvellement urbain ".

Toutefois, il faut bien considérer que cette mesure d'allégement fiscal en faveur du logement social s'inscrit dans le contexte plus général des relations entre l'Etat et les organismes de logement social.

En 1999, le gouvernement et le mouvement HLM avaient trouvé des solutions pour alléger l'endettement du secteur. Suite à une décision ministérielle du 23 avril 1999, le gouvernement avait procédé à l'allégement de la dette du secteur HLM. La diminution de 0,75 point du taux du livret A, qui s'établissait à 2,25 % à compter du 1er août 1999 avait également permis d'abaisser le coût de l'ensemble des opérations des organismes sociaux.

Dans le même temps, les organismes de logements sociaux avaient décidé, compte tenu de ces avantages et d'autres mesures fiscales (notamment la suppression de la contribution représentative du droit de bail), de procéder à un gel des loyers sur deux ans, jusqu'au 31 décembre 2001.

Cependant, en juin 2000, le gouvernement a décidé d'augmenter le taux du livret A de 2,25 % à 3 %. L'impact d'une telle mesure peut être évaluée à 20 milliards de francs de charges supplémentaires sur la dette du logement social. Pour 2001, le coût devrait s'élever à 100 millions de francs en trésorerie et à plusieurs centaines de millions de francs en termes d'intérêts supplémentaires. Les conditions du " pacte " entre le mouvement social et le gouvernement étaient rompues.

Le gouvernement a donc été vivement incité par les organismes HLM à trouver des solutions pour compenser ces nouvelles charges.

Lors du congrès HLM de Bordeaux du 20 au 23 septembre 2000, M. Michel Delebarre, président de l'Union nationale des HLM, a indiqué que sur le gel des loyers comme la relance de la construction sociale, le débat avait pris une nouvelle dimension avec la hausse du taux du livret A. Parlant de " conditions financières dégradées ", il a demandé des gestes du gouvernement. Ainsi M. Jean-Claude Gayssot a annoncé " un effort exceptionnel de plusieurs centaines de millions de francs, près d'un milliard, correspondant à la neutralisation complète des charges nettes supplémentaires constatées en 2001 du fait de la hausse du livret A. ". Cette annonce n'a toutefois pas encore été concrétisée.

Le secrétaire d'Etat au logement, M. Louis Besson, a également abordé la question de la taxe foncière sur les propriétés bâties , qui apparaît désormais comme le second volet de la compensation de la hausse du livret A : " Je veux également revenir avec vous sur l'un des sujets qui ont fait l'objet d'un débat important lors de l'examen par le Parlement de la loi solidarité et renouvellement urbain et qui, je le sais, constitue une préoccupation pour nombre d'organismes. Il s'agit de la question de la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui pèse aujourd'hui lourdement sur le parc ancien, qui est aussi celui qui concentre les difficultés et dont le renouvellement progressif nécessite de lourds investissements. Au cours du débat à l'Assemblée nationale, le gouvernement a eu l'occasion d'indiquer par ma voix son accord de principe pour réduire substantiellement la taxe foncière payée par les organismes HLM pour ces logements. Le mécanisme devrait, à ses yeux, allier la simplicité quant à son assiette - les logements situés en zones urbaines sensibles par exemple - et quant à son calcul - un abattement uniforme à la base significatif sur la valeur foncière. Le gouvernement, pour sa part, souhaite que les économies ainsi réalisées par les organismes reviennent aux locataires, par exemple sous forme de services de proximité, bien souvent nécessaires dans ces quartiers, dans le cadre de conventions à passer au niveau local, dont le respect conditionnerait le maintien de ce nouvel avantage fiscal ".

De fait, le nouvel avantage fiscal est conditionné, pour 2001, au gel des loyers jusqu'à fin décembre 2001. Or, le mouvement social s'était déjà engagé sur ce point. C'est bien parce que les pouvoirs publics ne croient plus à cet engagement qu'ils souhaitent désormais l'inscrire dans la loi.

B. LE CHOIX DE LA TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES

Selon les projections réalisées par le secrétariat d'Etat au logement, la taxe foncière sur les propriétés bâties acquittée par les organismes d'HLM s'élèverait, en 2001, à 8,5 milliards de francs, soit 11,2 % des loyers. La TFPB acquittée en 1991 était de 2,7 milliards de francs soit 5,1 % des loyers.

La progression de la TFPB acquittée par les organismes s'explique principalement par la sortie du champ de l'exonération de deux générations de logements, bénéficiant des régimes d'exonération de la TFPB mentionnés au code général des impôts, soit 25 ans pour les logements construits avant le 1 er janvier 1973 et 15 ans ensuite, selon le régime en vigueur de 1989 à 1998.

Les conseils généraux ont, chaque année, la possibilité de prolonger l'exonération de TFPB au terme de la période d'exonération. Cette possibilité a été instituée par l'article 10 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement. Ce même article donne également la possibilité aux conseils généraux d'instaurer une exonération de la TFPB pour les logements locatifs sociaux acquis avec ou sans travaux. Cependant, pour les opérations d'acquisition-amélioration, l'article 50 de la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions du 29 juillet 1998 institue une exonération de plein droit de TFPB pendant 15 ans à compter de l'année qui suit celle de leur acquisition.

Evolution de la taxe foncière sur les propriétés bâties acquittée par les organismes HLM

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997 (*)

1998 (*)

1999 (*)

2000 (*)

2001 (*)

2002

(*)

2003 (*)

2004 (*)

2005

(*)

2006 (*)

2007 (*)

2008 (*)

Logements taxés (milliers)

TFPB

(en MF 1997)

TFPB

/LOYERS

TFPB/logements taxés (en F 1997)

1 477

2 667

5,1%

1 806

1 695

3 248

5,9%

1 916

1 906

3 883

6,7%

2 037

2 114

4 591

7,5%

2 172

2 312

5 189

8,1%

2 245

2 500

5 898

8,9%

2 359

2 703

6 570

9,6%

2 431

2 899

7 260

10,3%

2 505

2 966

7 652

10,6%

2 580

3 030

8 052

10,9%

2 657

3 087

8 447

11,2%

2 737

3 151

8 882

11,6%

2 819

3 205

9 303

11,9%

2 903

3 253

9 724

12,2%

2 989

3 297

10 147

12,5 %

3 078

3 330

10 554

12,7 %

3 169

3 330

10 865

12,8 %

3 263

3 330

11 188

13,0 %

3 260

Source : direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction

C. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN DISPOSITIF TRÈS CIBLÉ

Les deux dispositifs proposés, à savoir l'abattement et le dégrèvement de taxe foncière, sont très ciblés.

Tout d'abord, l'abattement ne vise que les logements sociaux situés dans les zones urbaines sensibles, c'est-à-dire un tiers du parc de logements HLM . Ensuite, le dispositif est limité dans le temps, puisqu'il est prévu pour la période 2001-2006.

De plus, l'avantage fiscal est conditionné, selon une forme de " réciprocité ". Ce n'est qu'à la condition qu'une convention soit passée entre les organismes HLM et le représentant de l'Etat dans le département que l'avantage fiscal s'applique.

En ce qui concerne le dégrèvement, seuls les logements soumis à démolition et les logements faisant l'objet de gros travaux seront concernés . Alors qu'il existe aujourd'hui un dégrèvement pour vacance involontaire, la jurisprudence du Conseil d'Etat est trop stricte pour inclure toutes ces opérations dans les cas de vacances involontaires. Il s'agit donc bien de cas limités, qui ne devraient porter que sur quelques milliers de logements, pour un coût de l'ordre de 25 à 50 millions de francs.

Votre rapporteur général juge essentiel que ces deux dispositifs fiscaux soient limités et qu'il n'y ait pas d'exonération systématique de taxe foncière pour le logement social. Pour les logements vacants, il rappelle que la nouvelle taxe sur les logements vacants, à laquelle la commission des finances s'était opposée, ne vise que les logements privés. Il y aurait donc une certaine " inéquité " à accroître les avantages fiscaux pour les logements vacants du parc HLM en dehors des cas de démolition ou de gros travaux.

D. UN DISPOSITIF DE COMPENSATION AUX COLLECTIVITÉS LOCALES À PARFAIRE

1. Une position de principe : le refus de la compensation budgétaire

Le présent article propose de compenser la perte de recettes pour les collectivités locales par une dotation budgétaire.

Votre commission des finances n'est d'ordinaire pas favorable au principe de compensations budgétaires car elle estime que les compensations d'allégement d'impôts locaux ne doivent pas se transformer en subventions mais doivent rester des ressources de nature fiscale.

Car, " philosophiquement ", les compensations par la voie de prélèvements sur recettes permettent de mettre en évidence que les allégements d'impôts locaux décidés par l'Etat constituent en réalité un transfert de charge du contribuable local (les recettes des collectivités sont minorées) vers le contribuable national (les recettes de l'Etat sont aussi minorées).

En outre, les compensations par prélèvements sur recettes sont plus respectueuses des droits du Parlement puisque la marge de manoeuvre des assemblées en matière financière est plus importante en recettes (les réductions de recettes de l'Etat peuvent être gagées) qu'en dépenses (l'initiative parlementaire ne peut pas gager une augmentation de dépenses).

Par conséquent, les compensations par la voie de dotations budgétaires reviennent à réserver à l'exécutif la capacité d'apprécier la pertinence des dispositifs de compensation d'allégements d'impôts locaux.

Votre rapporteur général vous proposera un amendement tendant à remplacer la compensation budgétaire de l'abattement proposé par le présent article par une compensation par prélèvement sur les recettes de l'Etat.

2. Ne pas discriminer entre les structures intercommunales

Le présent article exclut du bénéfice de la compensation les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre qui, en application des dispositions du II de l'article 1609 nonies C, perçoivent à la fois la taxe professionnelle unique et le produit de la taxe d'habitation et des taxes foncières. Ce régime est plus connu sous le nom de " fiscalité mixte ".

a) L'origine de la fiscalité mixte

La fiscalité mixte, avant la loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale, était réservée au syndicats d'agglomération nouvelle (SAN). L'autre catégorie de groupements soumise au régime de la taxe professionnelle unique, les communautés de villes, n'était pas autorisée à percevoir des " impôts ménages ".

Cette rigidité compte parmi les raisons de l'échec avant 1999 de l'intercommunalité à taxe professionnelle unique en milieu urbain. En effet, notamment dans les zones urbaines défavorisées, les recettes de la seule taxe professionnelle n'auraient pas toujours suffi à financer les compétences obligatoires des structures intercommunales, sauf à augmenter les taux dans des proportions importantes.

La loi du 12 juillet 1999 a donc accordé à toutes les structures intercommunales à taxe professionnelle unique la possibilité de mettre en place la fiscalité mixte. Cette souplesse a été introduite dans le texte par un amendement adopté par nos collègues députés en première lecture. Le Sénat avait approuvé ce choix. Le rapporteur pour avis au nom de votre commission des finances, notre collègue Michel Mercier, avait considéré que la fiscalité mixte constituait " une solution risquée ", en raison des risques d'accroissement de la pression fiscale sur les ménages, mais " pragmatique " car elle permettait de ne pas faire dépendre les ressources des groupements des fluctuations du produit d'un seul impôt, de fournir une sécurité aux structures intercommunales après le début de démantèlement de la taxe professionnelle qu'a constitué la suppression de la part " salaires ", et de permettre aux groupements faiblement dotés en bases de taxe professionnelle de répartir la pression fiscale nécessaire aux financement des compétences. En outre, le risque d'augmentation de la pression fiscale est réduit du fait de l'effet positif sur le coefficient d'intégration fiscale d'une augmentation des impôts du groupement accompagnée d'une baisse des impôts perçus par les communes membres.

b) Les EPCI à fiscalité mixte et les compensations d'exonérations au titre des taxes " ménages "

Il existe deux blocs de compensations aux collectivités locales des exonérations de taxe d'habitation et de taxes foncières :

- les compensations prévues à l'article 21 de la loi de finances pour 1992 : elles regroupent la plupart des exonérations de taxe d'habitation 123 ( * ) et des exonérations de taxes foncières sur les propriétés bâties 124 ( * ) prévues par le code général des impôts ;

- les compensations d'exonérations " longue durée " de taxe foncière sur les propriétés bâties (en applications des articles 1384, 1384 A et D, et au I et II bis du code général des impôts) qui sont versées dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales.

S'agissant des compensations prévues par l'article 21 de la loi de finances pour 1992, l'article 1609 nonies C du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 12 juillet 1999, prévoit qu'elles ne sont pas versées aux structures intercommunales à fiscalité mixte. Elles sont donc réservées aux communes, aux départements, aux régions et aux structures intercommunales à fiscalité additionnelle.

S'agissant des compensations prévues par le code général des collectivités territoriales, elles sont réservées aux communes, aux communautés urbaines et aux communautés de communes. Sont donc exclus de leur bénéfice les départements et les régions, mais également les communautés d'agglomération.

Par conséquent, les communautés urbaines et les communautés de communes à fiscalité mixte peuvent percevoir ces compensations, mais pas les communautés d'agglomération à fiscalité mixte. Il y a donc une différence de traitement entre les catégories de structures intercommunales, au détriment de la catégorie que la loi du 12 juillet 1999 est pourtant censée promouvoir.

c) La position de votre commission

Votre rapporteur général regrette les différences de traitement entre les groupements à fiscalité mixte et les groupements ayant adopté le régime fiscal de la fiscalité additionnelle.

La fiscalité mixte a été conçue comme une solution de dernier ressort à destination des groupements faiblement dotés en bases de taxe professionnelle qui souhaiteraient quand même adopter la taxe professionnelle unique. Priver ces groupement des compensations versées au titre des taxes " ménages " revient à réduire les effets positifs de la fiscalité mixte puisque les groupements pourraient être tentés de compenser le manque à gagner lié à l'absence de perception des compensations par une majoration des taux des quatre taxes.

L'absence de perception des compensations d'exonérations fiscales n'est par ailleurs pas de nature à inciter les groupements pour lesquels la taxe professionnelle unique ne serait pas viable sans le complément apporté par la fiscalité mixte à franchir le pas et à abandonner le régime traditionnel de la fiscalité additionnelle.

En conséquence, s'agissant de l'abattement de 30 % sur les bases de taxe professionnelle mis en place par le présent article, votre rapporteur général vous proposera un amendement tendant à ne pas discriminer entre les établissements publics de coopération intercommunale et à rendre les EPCI à fiscalité mixte éligibles à la compensation.

3. Ne pas accentuer la perte d'autonomie fiscale des départements et des régions

Le présent article ne prévoit pas de compensation de l'abattement prévu au I en faveur des départements et des régions. Traditionnellement, ces deux catégories de collectivités ne perçoivent pas de compensation au titre des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties dites de " longue durée " (supérieures à deux ans).

Votre rapporteur général s'interroge sur l'origine de cette coutume. Il estime qu'il est nécessaire de l'interrompre compte tenu du contexte actuel de réduction rapide de l'autonomie fiscale des collectivités locales. Il observe également que l'absence de compensation versée aux départements est contradictoire avec la préconisation formulée par le rapport demandé à notre collègue Pierre Mauroy par le Premier ministre, qui préconise, dans le cadre d'un mouvement de spécialisation des impôts locaux, d'affecter le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties aux départements.

Votre rapporteur général vous proposera un amendement tendant à rendre les régions et les départements bénéficiaires de la compensation de l'abattement prévu au I du présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 26 ter (nouveau)

Allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les redevables âgés de plus de soixante-dix ans

Commentaire : le présent article propose d'instituer un dégrèvement d'office de 500 francs de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les redevables non-imposables âgés de plus de soixante-dix ans.

I. LE DROIT ACTUEL

A. PRINCIPES GÉNÉRAUX APPLICABLES À LA TAXE FONCIÈRE SUR LES PROPRIÉTÉS BÂTIES

La taxe foncière sur les propriétés bâties est établie au nom du propriétaire au 1 er janvier de l'année d'imposition, qu'il s'agisse d'une personne physique ou d'une personne morale. Dans certains cas particuliers, elle peut être établie au nom d'une autre personne que le propriétaire (usufruit, droit d'usage, emphytéose, bail à construction ou à réhabilitation). Sont imposables les constructions fixées au sol à perpétuelle demeure, et les constructions qui présentent le caractère de véritables bâtiments.

La taxe foncière sur les propriétés bâties est assise sur le revenu net cadastral, qui est déterminé en appliquant à la valeur locative des propriétés un abattement de 50 %. Cette déduction est destinée à tenir compte des frais de gestion, d'assurance, d'amortissement, d'entretien et de réparation de la propriété imposable. Le montant de la taxe due par chaque contribuable correspond donc au produit du revenu net cadastral de la propriété par le taux de l'impôt, qui varie chaque année et d'une commune à l'autre. Les taux d'imposition sont, comme pour la taxe d'habitation, directement votés par les communes, départements, syndicats et districts.

L'Etat perçoit 8 % de la cotisation à payer en contrepartie des frais qu'il supporte pour établir ces cotisations et pour prendre en charge les éventuels dégrèvements correspondants (frais de dégrèvement et de non-valeurs au taux de 3,60 %, ainsi que frais d'assiette et de recouvrement au taux de 4,40 %).

B. LES ALLÉGEMENTS ET EXONÉRATIONS DE LA TAXE

1. Les exonérations au titre de la nature ou de l'affectation de la propriété

a) Les exonérations permanentes

L'article 1382 du code général des impôts exonère de taxe foncière les propriétés publiques si :

- elles appartiennent à l'Etat aux collectivités territoriales, aux groupements de communes ou aux établissements publics, scientifiques, d'enseignement ou d'assistance ;

- elles sont affectées à un service public ou d'utilité générale ;

- elles sont improductives de revenus.

Cet article détaille également les différentes exonérations particulières prévues pour des bâtiments spécifiquement mentionnés par lui 125 ( * ) .

b) Les exonérations temporaires

Les constructions nouvelles ou réhabilitées, quelle que soit leur nature, bénéficient d'une exonération temporaire de la taxe foncière sur les propriétés bâties, limitée cependant à la part prélevée au profit du département ou de la région. Pour la part de taxe foncière sur les propriétés bâties perçue au profit des communes et de leurs groupements, l'exonération est maintenue pour les seuls logements à usage d'habitation, sauf délibération contraire des collectivités et groupements concernés.

Des exonérations de longue durée s'appliquent exclusivement aux logements affectés à l'habitation principale de leurs occupants. Elles concernent les logements sociaux. Ces exonérations peuvent être prolongées par décision du département, pour la part perçue à son profit.

L'article 36 de la loi de finances pour 2000 a institué, à compter du 1 er janvier 2000, une exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties pendant quinze ans pour les locaux acquis ou aménagés avec l'aide de l'Etat en vue de la création d'hébergements d'urgence destinés aux personnes défavorisées au sens de la loi n° 99-449 du 31 mai 1999. Les pertes de ressources induites pour les collectivités territoriales sont compensées par l'Etat.

Enfin, les constructions neuves de logements locatifs sociaux sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties pendant une durée de quinze ans à compter de l'année qui suit celle de leur achèvement. Par ailleurs, les départements et les communes peuvent, par délibération, exonérer totalement ou partiellement de la taxe foncière sur les propriétés bâties, pour la part perçue à leur profit, pendant la durée qu'ils déterminent, les logements sociaux acquis en vue de leur location avec le concours financier de l'Etat.

Tableau récapitulatif des exonérations temporaires

Habitations principales

Autres locaux

Achevées au plus tard le
31 décembre 1972

Achevés depuis le
1 er janvier 1973

25 ans à la condition que les ¾ au moins de l'immeuble soient affectés à l'habitation pour les :

- logements HLM à usage locatif appartenant aux organismes d'HLM ;

- logements, à usage locatif, appartenant, à la date du 15 décembre 1983, à des sociétés d'économie mixte à participation majoritaire des collectivités locales et financés à l'aide du Crédit foncier de France ou de la Caisse centrale de coopération économique.

15 ans pour :

- les logements HLM ;

- les logements à usage locatif financés à l'aide de PLA.

10 ans pour les logements en accession à la propriété financés à l'aide de PAP avant le 1 er octobre 1995, date de la suppression du PAP*.

2 ans pour les autres logements pour la part départementale et régionale, et pour la part communale, sauf délibération contraire

2 ans pour les seules parts départe-mentales et régio-nales

*Si la demande de prêt a été déposée avant le 1 er janvier 1984, la durée de l'exonération est de 15 ans.

2. Les allégements et exonérations prévues au titre de la qualité du propriétaire

Les dispositifs d'allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont peu nombreuxen comparaison des très nombreuses mesures d'exonération et de dégrèvement relatifs à la taxe d'habitation.

Le bénéfice de l' exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties est accordé, pour leur résidence principale, aux contribuables âgés de plus de soixante-quinze ans , aux titulaires de l'allocation supplémentaire du fonds national de solidarité ainsi qu'aux invalides percevant l'allocation aux adultes handicapés dès lors qu'ils ne sont pas imposables sur le revenu , vivent seuls, ou avec leur conjoint ou avec des personnes elles-mêmes non passibles de l'impôt sur le revenu :

- l'article 1390 du code général des impôts prévoit que " les titulaires de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-2 ou à l'article L. 815-3 du code de la sécurité sociale sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés bâties dont ils sont passibles à raison de leur habitation principale ", sous réserve qu'ils occupent l'habitation : " soit seuls ou avec leur conjoint ; soit avec des personnes qui sont à leur charge au sens des dispositions applicables en matière d'impôt sur le revenu ; soit avec d'autres personnes titulaires de la même allocation ".

- l'article 1391 du code général des impôts prévoit que " les redevables âgés de plus de soixante-quinze ans au 1 er janvier de l'année de l'imposition sont exonérés de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour l'immeuble habité exclusivement par eux ", à condition qu'ils ne soient pas redevables à l'impôt sur le revenu.

S'agissant des personnes âgées résidant en maisons de retraite, elles ne peuvent pas, en principe, bénéficier de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties prévue à l'article 1391 du code général des impôts à raison du logement qui ne constitue plus leur résidence principale au regard des impôts directs locaux. Toutefois, ces personnes peuvent obtenir, sur réclamation adressée au service des impôts compétent, la remise gracieuse du montant de leurs impositions afférentes au logement qu'elles occupaient auparavant à titre de résidence principale.

En réponse à une question écrite de notre collègue Serge Mathieu 126 ( * ) , le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie indique que, par ailleurs, " des consignes permanentes sont données aux services des impôts afin que les demandes gracieuses émanant des redevables de la taxe foncière sur les propriétés bâties en situation difficile soient examinées avec bienveillance ".

Ces exonérations constituent une exception aux principes qui régissent les taxes foncières puisque celles-ci sont des impôts réels qui sont dus, quels que soient l'utilisation de la propriété et les revenus du propriétaire.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Le présent article est issu d'un amendement présenté par le groupe communiste à l'Assemblée nationale. Il insère un article 1391 B dans le code général des impôts, visant à faire bénéficier d'un dégrèvement d'office de 500 francs au titre de la taxe foncière sur les propriétés bâties, les redevables âgés de plus de soixante-dix ans.

Le 1 du I pose deux conditions à l'octroi de ce dégrèvement :

- d'une part, les redevables doivent occuper leur habitation principale dans les conditions prévues à l'article 1390 du code général des impôts. Cet article dispose que les redevables doivent occuper leur habitation soit seuls ou avec leur conjoint, soit avec des personnes qui sont à leur charge au sens des dispositions applicables en matière d'impôt sur le revenu, soit avec d'autres personnes titulaires de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-2 ou à l'article L. 815-3 du code de la sécurité sociale.

- d'autre part, le montant du revenu des redevables ne doit pas excéder la limite prévue à l'article 1417 du code général des impôts, soit, pour les impositions établies au titre de 2000, 44.110 francs pour la première part de quotient familial, majorée de 11.530 francs pour chaque demi-part supplémentaire retenues pour le calcul de l'impôt sur le revenu 127 ( * ) .

Le 2 du I du présent article prévoit que le dégrèvement entrera en vigueur à compter des impositions établies au titre de l'année 2001.

Le II du présent article complète un renvoi effectué au I de l'article 1417 du code général des impôts.

Votre rapporteur général tient à relever que la rédaction de ce II n'est pas exacte. En effet, le I de l'article 1417 du code général des impôts ne mentionne que l'article 1414 bis , relatif à la taxe d'habitation. L'article 1391 du code général des impôts est mentionné dans la première phrase du I bis de l'article 1417. Par conséquent, il vous proposera un amendement rédactionnel visant à corriger le renvoi proposé par le présent article.

La mesure proposée par le présent article concernera environ 300.000 personnes et représentera un coût supplémentaire de 150 millions de francs à la charge de l'Etat.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre rapporteur général constate que cet article, issu d'un amendement déposé par le groupe communiste à l'Assemblée nationale, a été accepté par le gouvernement comme un " gage " donné à cette composante de la " majorité plurielle ", après les réserves exprimées par cette dernière quant au projet de budget, à son contenu et ses orientations.

En effet, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, M. Laurent Fabius, a indiqué, lors de la discussion du présent article à l'Assemblée nationale : " ... je saisis l'occasion de cet amendement déposé par le groupe communiste et apparentés pour dresser un rapide bilan des mesures prises à la demande ou à l'inspiration des collègues de M. Brard. (...) Il y a un certain nombre de dispositions pour lesquelles votre groupe, monsieur Brard, a plaidé et pour lesquelles il a, soit totalement, soit en partie, satisfaction, ayant été associé à leur inspiration [le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie énumère ensuite les mesures proposées par le groupe communiste et acceptées par le gouvernement] . Enfin, le dernier point, c'est la question que vous soulevez à l'instant, celle du dégrèvement d'office , sous conditions de ressources, de 500 francs sur le foncier bâti pour les personnes veuves - on parle des veuves, mais sont aussi concernées des personnes qui vivent en couple, ou des hommes - qui sont âgées de plus de soixante-dix ans. Cela représente 300.000 personnes et un coût de 150 millions supplémentaires. Dans l'esprit de dialogue et de dialogue positif, que vous avez vous-même bien voulu souligner, le gouvernement tient à dire qu'il donne son accord à cette disposition " 128 ( * ) .

Le faible coût de cette mesure, presque symbolique pourrait-on dire, permet en effet au gouvernement de satisfaire " à moindre frais " les demandes émanant du groupe communiste.

Votre rapporteur général considère cependant que la mesure proposée par le présent article est une mesure de solidarité justifiée à l'égard des personnes âgées . De plus, il n'apparaît pas que sa mise en oeuvre emporte des effets pervers, dès lors que la méthode du dégrèvement ne porte pas atteinte aux recettes des collectivités locales .

A l'occasion de la présentation de son amendement, notre collègue député Jean-Pierre Brard a ainsi indiqué que le groupe communiste souhaitait " évidemment qu'il marque une première avancée dans un processus de prise en compte, sans tomber dans les trappes à pauvreté, de la réalité des revenus les plus modestes, afin de traiter la taxe sur le foncier bâti dans le même esprit que la taxe d'habitation .".

Votre rapporteur général s'accorde en effet à penser qu'aucune raison particulière ne justifie le fait que les dégrèvements et exonérations existants en matière de taxe d'habitation ne soient pas transposés en partie à la taxe foncière sur les propriétés bâties. Elle considère en particulier qu'il convient de mieux prendre en compte la situation des redevables de la taxe foncière sur les propriétés bâties disposant de faibles revenus.

Ainsi, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2000, votre commission avait donné un avis favorable à plusieurs amendements présentés par le groupe communiste républicain et citoyen (CRC) et votés par le Sénat, visant à étendre le champ des allégements en matière de taxe foncière sur les propriétés bâties.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 27

Majoration de la dotation de solidarité urbaine

Commentaire : le présent article a pour objet de majorer de 350 millions de francs le montant de la dotation de solidarité urbaine (DSU) qui sera répartie en 2001, et procéder à une majoration de 150 millions de francs de la fraction " bourgs-centres " de la dotation de solidarité rurale répartie en 2001.

Depuis 1999, les lois de finances procèdent à des abondements des dotations de solidarité qui composent la DGF, car l'augmentation de leur montant qui résulte de la répartition " spontanée " de la DGF n'est pas jugée suffisante.

Avant d'examiner les mesures proposées pour 2001, il est nécessaire de rappeler les raisons pour lesquelles les règles de répartition de la DGF ne sont pas favorables à l'augmentation du montant des dotations de solidarité et à l'augmentation de la part des crédits destinés à la péréquation dans le total des crédits de la DGF.

I. LES CARACTÉRISTIQUES DE LA RÉPARTITION DE LA DGF

A. LA DGF DES COMMUNES EST REPARTIE SELON DES RÈGLES FIXÉES PAR LE CODE GENERAL DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

1. La détermination du montant de la DGF

L'article L. 1613-3 du code général des collectivités territoriales prévoit que " le montant prévisionnel de la dotation globale de fonctionnement est arrêté, pour être inscrit dans le projet de loi de finances, après avis du comité des finances locales (...) qui est saisi des éléments d'évaluation fournis par le ministre chargé du budget ".

Pour la DGF de 2001, le comité des finances locales a donné, au cours de sa séance du 19 septembre 2000, un avis favorable au montant figurant dans le projet de loi de finances, qui a été présenté en Conseil des ministres le 20 septembre 2000.

Le montant proposé par le secrétaire d'Etat chargé du budget est déterminé en application des articles L. 1613-1 et L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales.

L'article L. 1613-1 dispose que " la dotation globale de fonctionnement évolue chaque année en fonction d'un indice égal à la somme du taux prévisionnel d'évolution de la moyenne annuelle du prix à la consommation des ménages (hors tabac) de l'année de versement et de la moitié du taux d'évolution du produit intérieur brut en volume de l'année en cours, sous réserve que celui-ci soit positif.

La dotation inscrite dans le projet de loi de finances initial est arrêtée dans les conditions suivantes :

1° L'indice afférent à la dotation globale de fonctionnement de l'année en cours, ajusté le cas échéant afin de prendre en compte les derniers taux d'évolution connus sans toutefois que le taux d'évolution du produit intérieur brut puisse être négatif, est appliqué au montant définitif de la dotation globale de fonctionnement de l'année précédente ;

2° L'indice prévisionnel défini au premier alinéa du présent article est appliqué au montant ainsi obtenu ".

Pour obtenir le montant de la DGF de 2001, le secrétaire d'Etat chargé du budget a donc procédé aux opérations suivantes :

- il a ajusté l'indice afférent à la DGF de 2000 en fonction des derniers indicateurs connus. Cette opération est mieux connue sous le nom de " recalage " . L'indice de 2000 était initialement de 2,05 %, correspondant à une prévision de prix 2000 de 0,9 % et de PIB 1999 de 2,3 %. L'indice révisé prend en compte une hypothèse d'inflation de 1,4 % et de croissance du PIB de 2,9 %, ce qui permet d'aboutir à un indice de 2,85 % . En 2000, pour la première fois, le recalage joue à la hausse.

- il a appliqué l'indice de 2,85 % au montant définitif de la DGF de 1999, soit 108,5 milliards de francs. Le montant révisé de la DGF 2000 ainsi obtenu s'élève à 111,6 milliards de francs.

- il appliqué l'indice pour 2001 au montant révisé de la DGF 2000. Cet indice prend en compte une hypothèse de prix de 1,2 % et une hypothèse de croissance du PIB de 3,4 %, et s'établit à 2,9 % (1,2 + ½ de 3,4). Le montant de la DGF pour 2001 qui résulte de cette opération s'élève à 114,9 milliards de francs.

Cependant, pour obtenir le montant de la DGF inscrit dans le projet de loi de finances pour 2001, le secrétaire d'Etat au budget doit également appliquer l'article L. 1613-2 du code général des collectivités territoriales, selon lequel " il est procédé, au plus tard le 31 juillet, à la régularisation du montant de la dotation afférente à l'exercice précédent lorsque l'indice, calculé sur la base du taux d'évolution de la moyenne annuelle du prix à la consommation des ménages (hors tabac) relatif à cet exercice et, le cas échéant, sur la base du taux d'évolution du produit intérieur brut total en volume relatif au pénultième exercice tels qu'ils ont été constatés à cette date, appliqué au montant de la dernière dotation définitive connue, entraîne un produit différent du montant prévisionnel de la dotation inscrite en loi de finances.

Si ce produit est supérieur, il est réparti entre les bénéficiaires de la dotation globale de fonctionnement. S'il est inférieur, la différence est imputée sur la dotation globale du plus prochain exercice ".

Les dispositions de cet article sont plus connues sous le nom de " régularisation " . La DGF de 2001 doit prendre en compte la régularisation de la DGF de l'année 1999. Ce montant a été arrêté par le comité des finances locales lors de sa séance du 11 juillet 2000. Il s'établit à 959,8 millions de francs.

Par conséquent, le montant de la DGF pour 2001 s'établit à :

114.918 - 959 = 113.958 millions de francs.

Ce montant est supérieur de 3,42 % à celui de la DGF répartie en 2000.

Il convient de souligner que ce montant n'est pas non plus celui qui figure dans le projet de loi de finances car, depuis 1999, une habitude a été prise de procéder à des " abondements " exceptionnels du montant de la DGF 129 ( * ) , dont le montant prévu par le projet de loi de finances pour 2001 est de 1.850 millions de francs.

Par conséquent, le montant du prélèvement sur les recettes de l'Etat au titre de la dotation globale de fonctionnement inscrit dans le projet de loi de finances pour 2001 s'établit à :

113.958 + 1.850 = 115.808 millions de francs

L'article L. 2334-1 du code général des collectivités territoriales prévoit que le montant de la DGF des communes et des structures intercommunales est égal à la différence entre le montant ci-dessus (hors abondements) et le montant de la DGF des départements, qui résulte pour sa part des dispositions de l'article L. 3334-1 du même code.

2. La répartition de la DGF des communes et des structures intercommunales

L'article L. 2334-1 précité dispose qu'une " dotation globale de fonctionnement est instituée en faveur des communes et de certains de leurs groupements. Elle se compose d'une dotation forfaitaire et d'une dotation d'aménagement ".

Le graphique de la page suivante " résume " le processus de répartition des crédits de la DGF des communes entre ses différentes composantes.

a) La détermination du montant de la dotation forfaitaire

La dotation forfaitaire n'est versée qu'aux communes. Les structures intercommunales ne la perçoivent pas. L'article L. 2334-7 prévoit que c'est le comité des finances locales qui fixe la progression de la dotation forfaitaire versée chaque année aux communes en lui affectant " entre 50 p. 100 et 55 p. 100 " du taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement des communes.

Pour 2001, la DGF progresse de 3,42 % par rapport à 2000. Par conséquent, le comité des finances locales pourra choisir de faire progresser la dotation forfaitaire à l'intérieur d'une fourchette comprise entre 1,71 % (50 % de 3,42 %) et 1,88 % (55 % de 3,42).

Le ministère de l'intérieur a indiqué à votre rapporteur général que si le comité des finances locales retenait un taux de progression de 1,71 %, le montant de la dotation forfaitaire s'établirait à 82.725 millions de francs en 2001. Il en résulte que si le comité choisissait de retenir le taux de 1,88 %, le montant de la dotation forfaitaire s'établirait à 82.863 millions de francs. La marge de décision du comité des finances locales portera donc en 2001 sur 138 millions de francs.

Architecture de la dotation globale de fonctionnement

Evolution

DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT

Taux de la DGF :
Inflation + ½ PIB

DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT DES DEPARTEMENTS

Taux de la DGF :
Inflation + ½ PIB

DOTATION GLOBALE DE FONCTIONNEMENT DES COMMUNES ET GROUPEMENTS

Taux de la DGF :
Inflation + ½ PIB

DOTATION FORFAITAIRE DES COMMUNES

Taux : de 50 % à 55 % du taux de la DGF


DOTATION D'AMENAGEMENT

Différence entre DGF des communes et groupements et dotation forfaitaire


DOTATION DES GROUPEMENTS

En fonction de la population regroupée et de la dotation par habitant


SOLDE DSU/DSR

Différence entre dotation d'aménagement et dotation des groupements


DSU


DSR

Croissance de la DSU et de la DSR entre 45 % et 55 % du solde

QUOTE-PART
outre-mer

QUOTE-PART
outre-mer

Montants de la DSU et de la DSR pondérés par le rapport entre la population outre-mer et la population nationale

DSU METROPOLE

DSR METROPOLE

DSU et DSR diminuées des quotes-parts

Le montant de la dotation forfaitaire versée en 2001 sera également affecté par la prise en compte du nombre des habitants issu du recensement général de population de 1999. L'article L. 2334-9 prévoit en effet que la moitié des variations de populations, à la hausse comme à la baisse, sont prises en compte pour le calcul des attributions versées au titre de la dotation forfaitaire. Un dispositif spécifique existe s'agissant des communes dont la population a baissé dans des proportions très faibles. En 2001, la prise en compte des habitants issus du recensement de 1999 se traduira par une majoration de 226 millions de francs de la dotation forfaitaire.

En outre, l'article 33 du projet de loi d'orientation relatif à l'outre-mer (PLOUM) prévoit que la dotation forfaitaire sera majorée de 40 millions de francs destinés aux communes d'outre-mer.

Par conséquent, si le comité des finances locales retient en 2001 une indexation de la dotation forfaitaire de 1,71 %, le montant de celle-ci devrait s'établir à 82.991 millions de francs.

b) La détermination du montant de la dotation d'aménagement

L'article L. 2334-13 prévoit qu'il " est institué une dotation d'aménagement qui regroupe une dotation au bénéfice des groupements de communes, une dotation de solidarité urbaine et une dotation de solidarité rurale ".

Les sommes disponibles pour les trois composantes de la dotation d'aménagement sont constituées, aux termes de l'article L. 2334-13, de " la différence entre l'ensemble des ressources affectées à la dotation globale de fonctionnement des communes et la dotation forfaitaire ".

La dotation d'aménagement est donc un solde. Plus la dotation forfaitaire augmente, plus les crédits disponibles pour la dotation d'aménagement sont réduits. Ainsi, du fait de l'augmentation de la dotation forfaitaire résultant de la prise en compte des résultats du recensement, la dotation d'aménagement de 2001 sera inférieure de 226 millions de francs à ce qu'elle aurait été en l'absence de recensement.

En 2000, les effets de la prise en compte des résultats du recensement sur la dotation d'aménagement avaient été neutralisés partiellement par un abondement exceptionnel de 200 millions de francs de la dotation d'aménagement. Le projet de loi de finances pour 2001 ne prévoit pas de reconduction de cet abondement.

En outre, la majoration de 40 millions de francs de la dotation forfaitaire des communes d'outre-mer prévue par le PLOUM pénalisera également la dotation d'aménagement en 2001 puisque ces 40 millions de francs sont financés par un prélèvement sur la dotation d'aménagement.

c) La répartition de la dotation d'aménagement

La dotation d'aménagement est répartie entre ses trois composantes en fonction des dispositions de l'article L. 2334-13 : " Après prélèvement de la part de la dotation d'intercommunalité prélevée sur la dotation d'aménagement dans les conditions fixées à l'article L. 5211-28, et de la quote-part destinée aux départements d'outre-mer, le solde de la dotation d'aménagement est réparti entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale ".

Il résulte de cette rédaction que les sommes disponibles pour la péréquation en faveur des communes constituent le solde de la dotation d'aménagement, une fois financées les structures intercommunales .

Le montant de la dotation d'intercommunalité est fixé chaque année par le comité des finances locales. Il est déterminé en tenant compte de la population regroupée au sein de chacune des catégories d'établissements publics de coopération intercommunale et du montant de l'attribution moyenne par habitant de chacune de ces catégories, qui est également fixée par le comité des finances locales (à l'exception des communautés d'agglomération et des communautés de communes à DGF " bonifiées " dont le montant est fixé par la loi).

En 2001, le ministère de l'intérieur estime que 7.000 millions de francs seront nécessaires au financement des structures intercommunales.

Le solde disponible après financement de l'intercommunalité est affecté à la dotation de solidarité urbaine et à la dotation de solidarité rurale. La variation annuelle " de ce solde est répartie par le comité des finances locales entre la dotation de solidarité urbaine et la dotation de solidarité rurale de manière à ce que chacune en reçoive 45 p. 100 au moins et 55 p. 100 au plus ".

Le comité des finances locales attribue habituellement 55 % de la variation du solde à la dotation de solidarité urbaine et 45 % de la variation du solde à la dotation de solidarité rurale.

En 2001, toujours dans l'hypothèse d'une progression de 1,71 % de la dotation forfaitaire, le montant de la dotation de solidarité urbaine s'établirait à 2.927 millions de francs et celui de la dotation de solidarité rurale à 2.326 millions de francs 130 ( * ) .

B. LE RESULTAT DE LA REPARTITION NE PERMET PAS D'ACCROITRE LA PART DES DOTATIONS DE SOLIDARITÉ DANS LE TOTAL DES CRÉDITS

Les règles de répartition de la DGF conduisent à privilégier la dotation forfaitaire , versée à toute les communes, au détriment des dotations de solidarité qui composent la dotation d'aménagement, la DSU et la DSR, mais aussi la dotation d'intercommunalité qui est également péréquatrice puisque 85 % de ses crédits sont attribués en tenant compte du potentiel fiscal (plus un groupement est " pauvre ", plus sa DGF est élevée).

En 2000, la dotation forfaitaire a bénéficié de 87 % des crédits de la DGF.

La répartition de la DGF 2000 dans le graphique ci-dessus est une répartition qui tient compte des différents abondements dont bénéficient les dotations de solidarité. Hors abondements, les crédits de la DSU et de la DSR issus de la répartition " spontanée " de la DGF plafonnent à environ 5% du montant total de la DGF des communes.

Part de la DSU et de la DSR dans le total de la DGF

(en millions de francs)

* Montants hors abondements

L'origine de ce " plafonnement " tient essentiellement à trois facteurs :

- l'augmentation forte des crédits consacrés à l'intercommunalité , qui absorbent une part importante de l'augmentation annuelle de la dotation d'aménagement ;

- le fait que la dotation forfaitaire, déjà plus importante en volume, bénéficie au minimum de la moitié des augmentations annuelles de DGF.

- l'obligation pour le comité des finances locales de permettre une progression convenable du montant de la dotation forfaitaire , qui est la principale dotation de fonctionnement des communes et dont le rythme annuel de progression est la plupart du temps inférieur à celui des charges des collectivités locales. Il convient également de garder à l'esprit que les communes doivent supporter chaque année des baisses de leurs attributions de dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), qui sont parfois supérieures à l'augmentation en volume de leur DGF. Par conséquent, si le comité des finances locales choisissait de faire évoluer chaque année la dotation forfaitaire au taux le plus bas possible, la situation de ces communes serait encore plus défavorable.

Depuis 1996, le comité des finances locales a privilégié la dotation forfaitaire au détriment de la dotation d'intercommunalité :

Evolution de la part de l'augmentation de la DGF consacrée à la dotation forfaitaire par le comité des finances locales

1996

1997

1998

1999

2000

2001

50 %

52 %

53 %

54 %

55 %

50 % ?

Pour 2001, le taux de progression élevé de la DGF permet de laisser penser que le comité choisira d'accorder à la dotation forfaitaire seulement 50 % de la progression totale de la DGF.

C. LE DÉVELOPPEMENT DE LA PRATIQUE DES " ABONDEMENTS EXTÉRIEURS " EN FAVEUR DES DOTATIONS DE SOLIDARITÉ

Depuis 1999, l'Etat consent un effort budgétaire en faveur des dotations de solidarité de manière à accroître leur montant et leur part dans le montant total des crédits de la DGF.

L'article 58 de la loi de finances pour 1999 prévoit que, pendant les trois années d'application du contrat de croissance et de solidarité (1999, 2000, 2001), le montant de la DSU est majoré de 500 millions de francs.

La loi de finances pour 2000 a majoré de 500 millions de francs supplémentaires la DSU. Elle a par ailleurs prévu que la masse de la dotation d'aménagement serait majorée de 200 millions de francs pour neutraliser les conséquences sur cette dotation de la progression de la dotation forfaitaire liée à la prise en compte des résultats du recensement général de population de 1999.

En outre, en 2000, les crédits de la fraction " bourgs-centres " de la DSR ont été majorés de 150 millions de francs. Cette majoration ne doit cependant pas être considérée comme un effort financier supplémentaire du gouvernement car les 150 millions de francs ont été ponctionnés sur les ressources destinées à alimenter le fonds national de péréquation (FNP), qui est un autre dispositif péréquateur en faveur des communes rurales.

Il convient également de rappeler que la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995 a organisé la mise en extinction de la DGF de la région Ile-de-France au profit notamment de la DSU et de la DSR. Ainsi, ces deux dotations ont chacune été majorées de 220 millions de francs en 1999 et de 260 millions de francs en 2000.

Les différents abondements et contributions dont bénéficient la DSU et la DSR permettent de modifier substantiellement les taux de progression de ces dotations d'une année sur l'autre, voire de transformer des baisses en hausses :

L'évolution de la DGF et de ses composantes avant et après prise en compte des contributions et abondements budgétaires

(en %)

1999

2000

DGF totale

Avant abondements et contributions

+ 2,7

+ 0,8

Après abondements et contributions

+ 3,2

+ 2

Dotation de solidarité urbaine

Avant abondements et contributions

+ 23

- 2,6

Après abondements et contributions

+ 44,9

+ 14,0

Dotation de solidarité rurale

Avant abondements et contributions

+ 24,5

- 2,7

Après abondements et contributions

+ 24,8

+ 6,1

Données chiffrées : Lois de finances, Comité des finances locales

La pratique des abondements et contributions a pour effet de " brouiller " la lisibilité de la répartition de la DGF, comme l'illustre la complexité du tableau de la page suivante, qui reproduit la répartition de la DGF pour l'année 2000.

Il en ressort par exemple que le montant de la dotation d'aménagement qui résulte des mécanismes de répartition de la DGF s'élève à 10.215 millions de francs en 2000 alors que la somme du montant des dotations qui la composent s'établit à 12.084 millions de francs.

Tableau de répartition de la DGF en 2000

DGF 1999

DGF 2000

Variation 00/99

MASSE LFI (avec la franchise postale)

109.288.660.000

110.185.919.000

0,82100 %

Permanents syndicaux

13.893.105

14.018.143

0,9 %

Budget du CFL

2.591.824

2.673.212

3,14018 %

Rectifications

16.285.678

Masse à répartir

199.255.889.393

118.169.227.645

0,83596 %

DEPARTEMENTS

18.461.827.226

18.616.155.025

0,83596 %

COMMUNES ET GROUPEMENTS

90.795.068.26

91.553.072.620

0,83596 %

DOTATION FORFAITAIRE

80.659.403.398

81.337.722.317

0,84097 %

Base dotation forfaitaire des communes

80.659.403.398

81.337.722.317

0,45155 %

Métropole

77.854.964.445

78.206.518.185

0,45155 %

DOM TOM

2.804.438.953

2.817.102.384

0,45155 %

Total recensement général 1999

308.558.084

dont recensement général

348.781.282

métropole

320.649.448

outre-mer

28.131.834

dont recalage lié aux RCI 1997 et 1998

40.223.198

Recensements complémentaires (communes membres de SAN)

5.543.664

CCAS : transfert de DGF des communes vers les départements

11.205.933.841

Dotation forfaitaire après prélèvement

70.131.788.476

DOTATION D'AMENAGEMENT

10.135.595.369

10.215.350.303

0,78688 %

DGF des groupements

5.604.157.119

5.974.990.828

6,61712 %

dont reliquat des groupements

30.887.229

solde pour la DSU et la DSR

4.562.325.479

4.240.359.475

abondement recensement général LFI 2000

200.000.000

solde DSU DSR

4.440.359.475

DSU 55 % DSR 45 %

DOTATION DE SOLIDARITE URBAINE

3.297.371.568

3.770.290.266

14,34229 %

DSU avant contributions

2.577.371.568

2.510.290.266

- 2,60270 %

Contribution de la région Ile de France de 1995 à 1999

220.000.000

220.000.000

Contribution de la région Ile de France en 2000

40.000.000

Abondement LFI 1999

500.000.000

500.000.000

Abondement LFI 2000

500.000.000

Répartition de la DSU

quote-part outre-mer

125.841.377

152.224.435

20,96533 %

métropole

3.171.530.191

3.618.065.831

14,07950 %

DSR bourgs centres 5 %

DOTATION DE SOLIDARITE RURALE

2.204.953.911

2.190.069.209

- 0,67506 %

DSR avant contributions

1.984.953.911

1.950.069.209

- 2,76504 %

Contribution de la région Ile de France de 1995 à 1999

220.000.000

220.000.000

Contribution de la région Ile de France en 2000

40.000.000

Répartition de la DSR

quote-part outre-mer

84.150.187

88.423.443

5,07813 %

Métropole

2.120.803.724

2.101.645.766

- 0,99333 %

Bourgs centres

616.457.672

615.713.437

- 0,12073 %

métropole

592.931.090

590.854.176

- 0,35028 %

abondement métropole LFI 2000

150.000.000

total métropole

1.588.496.239

1.574.355.772

- 0,89018 %

Péréquation

1.588.496.239

1.574.355.772

- 0,89018 %

métropole

1.527.872.633

1.510.791.590

- 1,11796 %

Total DSR

2.340.069.209

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : STABILISER LA DOTATION DE SOLIDARITÉ URBAINE ET FAIRE PROGRESSER LA DOTATION DE SOLIDARITÉ RURALE

Le présent article propose, comme chaque année depuis 1999, de procéder à des abondements exceptionnels de la DGF qui sera répartie en 2001.

Il est proposé de ne pas reconduire la majoration de 500 millions de francs du montant de la DSU accordée en 2000, et de la limiter en 2001 à 350 millions de francs. Ce montant a été " calibré " de sorte que le montant de cette dotation ne soit pas inférieur un 2001 à ce qu'il était en 2000.

Lors de son examen du présent article en première lecture, l'Assemblée nationale a décidé de reconduire le prélèvement de 150 millions de francs sur le fonds national de péréquation de la taxe professionnelle (FNPTP) destiné à abonder la fraction " bourgs-centres " de la DSR .

Récapitulatif des abondements de la DGF en faveur des dotations de solidarité depuis 1999

(en millions de francs)

LFI 1999

LFI 2000

PLF 2001

Dotation d'aménagement

200

Dotation de solidarité urbaine

500

500+500

500+350

Dotation de solidarité rurale

150

150

Total des abondements de la DGF

500

1.350

1.000

Total des crédits supplémentaires en faveur de la péréquation

500

1.200

850

Le tableau ci-dessous retrace quelle pourrait être l'évolution en 2001 des différentes composantes de la DGF une fois pris en compte les différents abondements dont elles font l'objet, dans l'hypothèse où le comité des finances locales déciderait d'accorder à la dotation forfaitaire seulement 50 % de la progression des crédits de la DGF :

Evolution des composantes de la DGF en 2001

(en millions de francs)

Chiffres : ministère de l'intérieur

Il ressort de tableau que, en 2001 :

- la fraction " péréquation " de la DSR progresserait de 6,9 %, après avoir baissé de 0,8 % en 2000 ;

- la fraction " bourgs-centres " de la DSR augmenterait de 3,5 % en raison de la reconduction par l'Assemblée nationale du prélèvement sur le FNPTP. Dans la rédaction initiale du projet de loi de finances pour 2001, les crédits de cette dotation étaient en baisse de 16 % par rapport à 2000 ;

- la dotation de solidarité urbaine serait stabilisée (+ 0,18 %) ;

- la dotation d'intercommunalité augmenterait de 17 % 131 ( * ) .

Au total, les crédits de la DSU et de la DSR seraient supérieurs de 143 millions de francs à leur montant de 2000 (109 millions de francs pour la DSR " péréquation ", 27 millions de francs pour la DSR " bourgs-centres " et 7 millions de francs pour la DSU).

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : PERMETTRE UNE PROGRESSION DE LA DOTATION DE SOLIDARITÉ URBAINE

A. ACCROÎTRE LA PART DE LA PÉRÉQUATION DANS LES CRÉDITS DE LA DGF

Votre rapporteur général partage totalement le constat formulé par notre collègue Michel Mercier dans son rapport au nom de la mission d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation : " la politique consistant à vouloir opérer une redistribution des richesses fiscales entre les collectivités trahit l'incapacité de l'Etat à introduire plus de péréquation dans les critères de répartition des dotations qu'il verse aux collectivités locales " 132 ( * ) .

En d'autres termes, pour que les ressources des collectivités locales continuent d'être assises à la fois sur la fiscalité et sur des dotations, il faut que les dotations soient péréquatrices de manière à corriger les inégalités de richesses qui résultent de la dispersion non-uniforme des bases fiscales sur le territoire.

Le ministre de l'intérieur a semblé partager ce point de vue lorsque, à l'occasion de l'examen par le Sénat le 26 octobre 2000 de la proposition de loi constitutionnelle présentée par le président Christian Poncelet tendant à renforcer l'autonomie fiscale des collectivités locales, il s'est demandé : " Comment remédier à la mauvaise localisation des bases d'imposition actuelles, si ce n'est par la péréquation et donc par une répartition générale des recettes nationales - donc par des dotations ? ".

Il est urgent d'accroître la part des crédits de la dotation d'aménagement dans la DGF des communes. Ceci suppose une réforme en profondeur des mécanismes de répartition de la DGF, que le présent projet de loi de finances n'est pas en mesure de réaliser.

Cependant, il est important de ne pas envoyer de signaux négatifs en matière de péréquation . Il importe que la part des dotations de solidarité dans le total de la DGF progresse chaque année, ou du moins ne recule pas.

Or, dans le présent projet de loi de finances, les crédits de la DSU enregistrent une stagnation, qui ne paraît pas compatible avec les difficultés sociales auxquelles sont confrontées les communes éligibles à cette dotation, et qui se situe en contradiction avec le sentiment exprimé par le ministre de l'intérieur au Sénat le 26 octobre dernier lorsqu'il déclarait que " la péréquation des dotations existantes [est] l'orientation principale qu'il nous faut prendre ".

Votre rapporteur général vous proposera un amendement tendant à maintenir constant l'effort financier supplémentaire en faveur de la DSU par rapport à 2000 (500 millions de francs contre 350 millions de francs dans le présent article), ce qui permettra une progression de la DSU de 4,1 % (contre 0,19 % dans le présent article).

LFI 2000

Article 27 du PLF 2001

Proposition de la commission pour 2001

Effort supplémentaire en faveur de la DSU (en millions de francs)

500 + 500

500 + 350

500 + 500

Taux de progression de la DSU par rapport à l'année précédente

14,3 %

0,19 %

4,1 %

B. EVITER QUE " LA PÉRÉQUATION NE FINANCE LA PÉRÉQUATION "

Votre rapporteur général comprend mal le décalage entre les appels du gouvernement à un renforcement de la péréquation et sa politique en la matière, qui consiste à faire financer une partie de ses actions en faveur de la péréquation par prélèvement sur les crédits d'autres dispositifs péréquateurs. En ce domaine, comme dans d'autres, les intentions ne sont pas toujours traduites dans les faits...

A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2000, le Sénat a adopté, à l'initiative de votre rapporteur général, un amendement tendant à prévoir que la majoration de 150 millions de francs de la DSR " bourgs-centres " serait financée non par un prélèvement sur les ressources du fonds national de péréquation, mais par un effort budgétaire supplémentaire de l'Etat, de manière à accroître le montant total des crédits consacrés par l'Etat à la péréquation.

Il vous proposera cette année un amendement de même nature.

Les conséquences pour le FNP du financement par le FNPTP d'autres dispositifs péréquateurs

Dans son rapport au nom de la mission d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation, notre collègue Michel Mercier relève que " le financement par le FNPTP et le FNP d'autres dispositifs péréquateurs ne s'est pas accompagné d'une augmentation symétrique de leurs moyens. Il en résulte deux conséquences :

- l'Etat peut mettre en oeuvre de nouvelles mesures péréquatrices (exonérations dans les zonages d'aménagement du territoire, compensations de baisse de DCTP, compensations à un FDPTP, majoration de la dotation de solidarité rurale) sans accroître le montant total de son effort financier en faveur de la péréquation ;

- une réduction des crédits disponibles pour le FNP.

Le FNP est dépendant financièrement du FNPTP. Sa principale ressource est constituée du " solde " du FNPTP, c'est-à-dire de la différence entre les ressources du FNPTP et ses dépenses. Plus les dépenses du FNPTP sont élevées, moins le solde reversé au FNP est important.

En 1999, la décision de financer par le FNPTP la compensation des pertes de DCTP s'est traduite par une dépense supplémentaire de 569 millions de francs, donc une baisse d'autant du solde reversé au FNP. En 2000, la compensation des baisses de DCTP coûte 892 millions de francs, auxquels il convient d'ajouter les 150 millions de francs prélevés pour financer la dotation de solidarité rurale.

Cette baisse des ressources du FNP n'a été que partiellement compensée puisque les ressources de ce fonds n'ont été majorées que de 150 millions de francs. Le manque à gagner pour 1999 s'élève donc à 419 millions de francs en 1999 et à 892 millions de francs en 2000 ".

Au total, l'adoption des deux amendements de votre rapporteur général conduirait à accroître les crédits attribués à la DSU et à la DSR de 293 millions de francs par rapport à l'année dernière, contre 143 millions de francs dans la rédaction du présent projet de loi de finances issue de sa première lecture par l'Assemblée nationale. En outre, les ressources du FNP en 2001 seraient supérieures de 150 millions de francs à ce qu'elles seraient si la rédaction issue de l'Assemblée nationale restait inchangée.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 28

Evaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes

Commentaire : le présent article vise à préciser l'évaluation de la contribution française au budget des Communautés européennes, fixée à 99,5 milliards de francs.

Le prélèvement sur recettes représentatif de la contribution française au budget européen est évalué à 99,5 milliards de francs en 2001. Il s'accroîtrait d'1 % par rapport à l'estimation de la loi de finances initiale pour 2000 (98,5 milliards de francs).

L'analyse détaillée de cette contribution fait l'objet du fascicule 2 du présent tome II du rapport généra, intitulé : " Participation de la France au budget des Communautés européennes (article 28 du projet de loi de finances) " . Ce rapport est établi par notre collègue Denis Badré, rapporteur spécial ..

Décision de la commission : sous le bénéfice des observations de son rapporteur spécial, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES A L'EQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES

ARTICLE 29

Équilibre général du budget

Commentaire : le présent article fixe l'équilibre général du budget en évaluant d'abord les recettes en fonction de leur évolution spontanée et des aménagements de droits proposés, en fixant ensuite un plafond de dépenses autorisées, en déduisant enfin le solde budgétaire. Tout en ayant voté des modifications à la première partie, l'Assemblée nationale a maintenu le déficit à son niveau initialement proposé de 186 milliards de francs.

I. L'ÉQUILIBRE RÉSULTANT DES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN PREMIÈRE PARTIE

L'équilibre général proposé par le gouvernement fait l'objet du tome I du présent rapport. Comme à l'accoutumée, il a été modifié par l'Assemblée nationale.

L'effet des mesures adoptées par l'Assemblée nationale en première partie sur le solde budgétaire est quasiment nul, puisque le déficit n'a été réduit que d'un million de francs passant de 186,002 milliards de francs à 186,001 milliards de francs :

- les ressources nettes du budget général sont accrues de 1,468  milliard de francs et les dépenses ordinaires civiles sont rehaussées de 1,467 milliard de francs ;

- les opérations à caractère temporaire des comptes d'avances sont réduites en recettes et en dépenses de 329 millions de francs.

II. L'ÉQUILIBRE PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION

Les amendements proposés par votre commission aux articles précédents de la première partie vont affecter le niveau des recettes du budget général. Ils visent en effet, dans le respect des dispositions de l'ordonnance organique de 1959, à oeuvrer en faveur de la réduction du poids de la pression fiscale et partant, des prélèvements obligatoires.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article et l'état A qui lui est annexé compte tenu des modifications qu'elle a apportées aux articles de la première partie.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue dans la matinée du mercredi 15 novembre 2000 sous la présidence de M. Alain Lambert, président, la commission a procédé à l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2001, sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général.

La commission a adopté, sans modification, l'article premier relatif à l'autorisation de percevoir les impôts existants.

Elle a adopté un amendement portant article additionnel avant l'article 2 instituant un mécanisme de crédit d'impôt proposé en remplacement de la ristourne dégressive de contribution sociale généralisée (CSG) et de contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) sur les salaires inférieurs à 1,4 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC). M. Philippe Marini, rapporteur général , a en effet expliqué qu'en raison des nombreux inconvénients du dispositif proposé par le Gouvernement, il convenait de refuser une évolution de la CSG la transformant en " un doublon de l'impôt sur le revenu ". Cette solution, élaborée en concertation avec la commission des affaires sociales, constitue une forte incitation au retour à l'activité.

A l'article 2 , relatif à l'aménagement du barème de l'impôt sur le revenu, la commission a adopté trois amendements tendant, pour le premier, à actualiser le barème non seulement en fonction de l'évolution des prix, mais également en fonction de la croissance par la prise en compte de la moitié du taux de croissance prévue pour 2000, soit 1,7 %, et, pour les deux suivants, à instituer des mesures favorables aux familles.

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article 2 bis (nouveau) , qui supprime l'abattement annuel sur certains revenus de valeurs mobilières pour les foyers imposés au taux supérieur de l'impôt sur le revenu.

Elle a ensuite adopté un amendement insérant un article additionnel après l'article 2 bis (nouveau) , visant à permettre l'extension du nouveau régime fiscal en faveur de l'investissement locatif, régime dit " Besson ", à la location aux ascendants ou descendants de l'investisseur.

Elle a adopté, sans modification, l'article 3 favorisant le don par les entreprises de matériel informatique à leurs salariés.

La commission a ensuite adopté un amendement rétablissant l'article 4 , relatif à l'actualisation du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

Elle a ensuite adopté un amendement tendant à ajouter un article additionnel après l'article 4 afin de rétablir le plafonnement de la cotisation de l'ISF.

Elle a adopté un amendement portant article additionnel avant l'article 4 bis (nouveau) , dont l'objet est d'actualiser le barème de conversion de l'usufruit et de la nue-propriété en pleine propriété. M. Alain Lambert, président, rappelant que le barème en vigueur était sous-évalué, a précisé qu'il était favorable à cette disposition tout en souhaitant l'application du nouveau barème en 2002.

La commission a ensuite adopté un amendement à l'article 4 bis (nouveau) , relatif à l'incitation, à la constitution et au maintien à long terme d'un actionnariat stratégique de l'entreprise, tendant à réduire la durée de l'engagement individuel à trois ans et à assouplir les règles de pénalité en cas de rupture des engagements pris par les héritiers.

Puis elle a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 4 bis (nouveau) , de façon à étendre le régime des biens professionnels, au regard de l'ISF, aux parts et actions détenues par des associés liés par une convention de vote.

A l'article 5 , qui supprime la taxe différentielle sur les véhicules à moteur (vignette) due par les personnes physiques pour leurs voitures particulières, la commission a d'abord adopté un amendement supprimant la vignette pour tous les redevables. Elle a adopté un deuxième amendement ayant pour objet de supprimer la compensation aux départements de la suppression de la vignette par la voie de la dotation générale de décentralisation (DGD). Puis elle a examiné deux amendements supprimant la taxe sur les véhicules de société, le droit d'enregistrement sur les cessions de fonds de commerce et les mutations à titre gratuit entre vifs, et à rétablir ces trois impositions au profit des départements, afin de compenser les charges résultant pour ces derniers des compétences transférées par les lois de décentralisation. Ces deux amendements permettent donc de neutraliser les transferts de richesse entre les départements, puisque la répartition géographique du produit des trois nouveaux impôts sera nécessairement différente de celle de la vignette. Après les interventions de MM. Jean-Philippe Lachenaud, Paul Loridant, Michel Mercier, Michel Moreigne et Philippe Marini, rapporteur général , la commission a adopté ces amendements. Puis elle a ensuite adopté l'article 5 ainsi amendé.

A l'article 6 , relatif à la baisse du taux de l'impôt sur les sociétés pour les petites entreprises, la commission a adopté un amendement visant à éviter un surcroît d'imposition pour les entreprises qui avaient précédemment opté pour le dispositif d'imposition à taux réduit des bénéfices incorporés au capital.

A l'article 6 bis (nouveau) , modifiant le statut des sociétés de capital risque, la commission a adopté un amendement neutralisant la détention de titres par ce type de société par rapport à une détention en direct.

A l'article 7 , relatif à l'aménagement de l'impôt sur les sociétés, la commission a adopté quatre amendements : le premier tend à prolonger la baisse de la contribution additionnelle sur les bénéfices ; le deuxième vise à supprimer la réforme du régime mère-fille, le troisième propose de supprimer la baisse prévue du taux de l'avoir fiscal ; et le dernier tend à supprimer la baisse du taux de l'amortissement dégressif.

Après les interventions de MM. Paul Loridant et Jacques Oudin , elle a adopté trois amendements portant articles additionnels après l'article 7 , le premier imputant l'imposition forfaitaire annuelle sur l'impôt sur les sociétés sur cinq ans, le deuxième créant un crédit d'impôt-brevet et le troisième modifiant la règle de calcul du taux d'intérêt de retard.

A l'article 8 , relatif à la simplification de la taxe sur les salaires et allégements pour les petites entreprises, la commission a adopté un amendement maintenant l'exonération de taxe sur les salaires pour les stock-options.

A l'article 9 , relatif à l'aménagement de la fiscalité des entreprises pétrolières, la commission a adopté cinq amendements. Le premier amendement vise à permettre le réemploi de la provision de reconstitution de gisements d'hydrocarbures dans les territoires et les collectivités territoriales d'outre-mer. Le deuxième propose de maintenir l'article 39 ter du code général des impôts dans sa rédaction actuelle afin d'éviter un effet de rétroactivité, et à prévoir que le nouveau dispositif s'applique aux provisions constituées à partir de l'exercice 2001. Le troisième amendement tend à supprimer les dispositions manifestement rétroactives de l'article 9. Le quatrième propose de fermer le dispositif actuel de provision pour reconstitution de gisements à partir du premier exercice ouvert à compter du 1 er janvier 2001. Le dernier amendement tend à permettre que la taxe exceptionnelle sur la provision pour hausse de prix soit non seulement imputable au titre de l'exercice de réintégration de la provision, mais aussi remboursable le cas échéant pour les sociétés déficitaires. La commission a alors adopté cet article ainsi amendé.

A l'article 10 , portant modification du tarif de la taxe intérieure de consommation sur le fuel domestique, amélioration de remboursement pour le transport routier de marchandises, mise en oeuvre d'un remboursement aux exploitants de transports publics routiers en commun de voyageurs, et mise en place d'un mécanisme de régulation des taux, la commission a adopté un amendement rédactionnel.

Puis elle a adopté, sans modification, l'article 10 bis (nouveau) relatif à la modification de l'assiette et du taux de la taxe sur les titulaires d'ouvrages hydroélectriques concédés.

A l'article 11 , concernant des mesures d'adaptation de la fiscalité agricole, la commission a adopté six amendements. Le premier a pour objet de mettre en place un système de réserve spéciale d'autofinancement au profit des exploitants agricoles. Le deuxième permet la libre réintégration de la déduction pour investissement dont bénéficient les exploitants agricoles. Le troisième amendement tend à proroger l'application de l'abattement de 50 % sur les bénéfices des jeunes agriculteurs aux installations effectuées jusqu'au 31 décembre 2004. Le quatrième précise que les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole sont exonérées en cas de transmission d'exploitation à un jeune agriculteur. Le cinquième amendement propose d'avancer au premier janvier 2000 la date d'entrée en vigueur de l'autorisation donnée aux exploitants agricoles de constituer des provisions. Le dernier amendement vise à faire bénéficier les exploitants agricoles de la liberté complète de choix de la date de clôture de leur exercice comptable. La commission a ensuite adopté cet article ainsi modifié.

Après les interventions de MM. Paul Loridant, Alain Lambert, président, et Philippe Marini, rapporteur général, elle a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 11 ayant pour objet de prendre en compte, pour le calcul des plus-values résultant de la vente d'un fonds de commerce possédé depuis plus de cinq ans, l'inflation constatée sur la durée de l'exploitation.

La commission a ensuite adopté, sans modification, l'article 11 bis (nouveau) relatif à l'harmonisation des droits d'enregistrement pour les cessions de parts des sociétés agricoles, et l'article 11 ter (nouveau) concernant les autorisations temporaires de vente de boissons alcoolisées sur les stades, ainsi que lors des manifestations publiques organisées par des associations.

A l'article 12 , qui propose de créer un nouveau dispositif d'aide à l'investissement outre-mer, la commission a adopté un amendement de précision.

Elle a ensuite adopté un amendement portant article additionnel après l'article 12 , proposant un système d'allégement progressif de la taxe professionnelle des bénéfices non commerciaux de moins de cinq salariés.

A l'article 12 bis (nouveau) , concernant l'extension du bénéfice de l'amortissement dégressif aux équipements de production d'énergies renouvelables, elle a adopté un amendement ouvrant ledit dispositif à tous les matériels quelle que soit leur date d'acquisition ou de fabrication.

Puis la commission a adopté, sans modification, l'article 12 ter (nouveau) , relatif à l'extension aux bénéfices de l'amortissement exceptionnel sur douze mois aux équipements de production d'énergies renouvelables, l'article 12 quater (nouveau) relevant le plafond sous lequel la contribution de l'employeur à l'acquisition d'un titre-restaurant est exonérée de l'impôt sur le revenu, l'article 12 quinquies (nouveau) , relatif au dégrèvement de moitié de la cotisation de taxe professionnelle des entreprises de transport sanitaire, l'article 13 , portant suppression de la taxe sur les passagers, l'article 14 , concernant l'allégement, la simplification et l'unification des taxes afférentes à l'exercice d'une activité dans le secteur des télécommunications, l'article 15 , concernant le taux et les conditions de versement par les organismes collecteurs de la participation des employeurs à l'effort de construction, et l'article 16 , comportant des dispositions relatives aux affectations.

Elle a ensuite adopté un amendement de suppression de l'article 17 , relatif aux modalités d'affectation de la taxe sur les conventions d'assurances, de la taxe sur les véhicules des sociétés et du droit de consommation sur les tabacs.

Après l'intervention de M. Paul Loridant, elle a également adopté un amendement de suppression de l'article 18 , déterminant le montant du prélèvement de solidarité pour l'eau affecté au compte d'affectation spéciale n° 902-00 " fonds national de l'eau ".

La commission a adopté un amendement de suppression de l'article 19 , portant modification des quotités de répartition de la taxe d'aviation civile entre le budget annexe de l'aviation civile et le compte spécial n° 902-25 " fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien ".

Elle a adopté un amendement de suppression de l'article 19 bis (nouveau), relatif à l'aménagement du régime de la redevance.

Elle a adopté, sans modification, l'article 20 , qui supprime le financement par voie de fonds de concours des frais de gestion du service chargé de la perception de la redevance pour droit d'usage des appareils récepteurs de télévision.

La commission a ensuite adopté un amendement de suppression de l'article 21 , relatif à la clôture du compte d'affectation spéciale n° 902-23 " actions en faveur du développement des départements, des territoires et des collectivités territoriales d'outre-mer ".

Elle a également proposé de supprimer l'article 22 , relatif à la clôture du compte d'affection spéciale n° 902-26 " fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables ", après que MM. Paul Loridant et Philippe Marini, rapporteur général, se furent exprimés.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a rappelé que l'article 23 , créant un compte d'affectation spéciale n° 902-23 " fonds de provisionnement des charges de retraites et de désendettement de l'Etat ", tendait à affecter une part du produit de la vente des licences " UMTS " (Universal Mobil Telecommunication Systems), ou téléphonie mobile de troisième génération, à la constitution d'une provision destinée aux charges de retraites futures. Il a précisé que des enchères auraient rapporté davantage comme l'avaient montré de nombreux exemples étrangers. Par ailleurs, il a ajouté que le Parlement avait été exclu de toute consultation sur le dispositif retenu par le Gouvernement, n'ayant à connaître que des modalités de versement et d'affectation du produit de cette vente. Enfin, il a considéré que l'affectation prévue n'était pas satisfaisante, lui préférant une affectation exclusive au désendettement de l'Etat, et ajoutant que l'avenir de nos retraites dépendait en réalité de l'instauration d'un régime complémentaire de capitalisation. Après les interventions de MM. Paul Loridant, Roland du Luart, Alain Lambert, président , et Michel Sergent , la commission a adopté un amendement de suppression de cet article.

A l'article 24 , concernant le financement de la revalorisation des retraites agricoles et de diverses mesures d'ordre social en faveur des non-salariés agricoles, elle a adopté un amendement proposant une solution de financement alternative consistant dans le relèvement du taux de la cotisation incluse dans les taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA).

Puis elle a adopté, sans modification, l'article 25 portant mesures diverses relatives aux charges sociales des non-salariés agricoles.

La commission a adopté un amendement portant article additionnel avant l'article 26 relatif à l'indexation du contrat de croissance et de solidarité.

A l'article 26 , concernant le financement des communautés d'agglomération, la commission a adopté un amendement ayant pour objet d'éviter qu'en 2001 il soit nécessaire d'opérer un nouveau prélèvement sur la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP) pour financer les communautés d'agglomération, en portant à 1,6 milliard de francs le montant du financement hors dotation globale de fonctionnement desdites communautés, après les interventions de MM. Joël Bourdin, Philippe Adnot, Alain Lambert, président, Paul Loridant et Philippe Marini, rapporteur général .

Elle a ensuite adopté un amendement insérant un article additionnel après l'article 26 concernant la reconduction du mécanisme de compensation des pertes de DCTP subies par les collectivités défavorisées.

A l'article 26 bis (nouveau) , relatif à l'allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour certains logements sociaux à usage locatif, la commission a adopté trois amendements, le premier prévoyant une compensation par la voie d'un prélèvement sur les recettes de l'Etat, le deuxième ayant pour objet de prévoir une compensation de l'abattement proposé aux départements et aux régions, et le troisième faisant bénéficier les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité mixte, de la compensation de l'abattement sur les bases de la taxe foncière sur les propriétés bâties.

A l'article 26 ter (nouveau) , concernant l'allégement de la taxe foncière sur les propriétés bâties pour les redevables âgés de plus de 70 ans, elle a adopté un amendement rédactionnel.

A l'article 27 , proposant de majorer la dotation de solidarité urbaine (DSU), la commission a adopté deux amendements : le premier amendement permet de reconduire l'effort consenti l'année dernière par l'Etat en faveur de la DSU, soit 1 milliard de francs, le second amendement tend à éviter que la majoration de 150 millions de francs de la dotation de solidarité rurale ne soit financée par un prélèvement sur les ressources du fonds national de péréquation.

Puis la commission a adopté, sans modification, l'article 28 , relatif à l'évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l'Etat au titre de la participation de la France au budget des Communautés européennes, et l'article 29 , déterminant l'équilibre général du budget.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2001 ainsi modifiée.

* 1 Sur l'ensemble de cette question on se reportera très utilement à l'avis de notre collègue Jacques Oudin n° 68 (2000-2001).

* 2 Cité par le XVIIIème rapport du Conseil des impôts au Président de la République, L'impôt sur le revenu , juin 2000, page 13.

* 3 Dossier de presse du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le 31 août 2000.

* 4 Propos de Mme Elisabeth Guigou, le 25 octobre 2000, JO Débats, Assemblée nationale, 3 ème séance, page 7503.

* 5 Rapport pour avis de M. Jérôme Cahuzac, n° 2361 (XIème législature), page 27.

* 6 Espace social européen , numéro du 3 novembre 2000.

* 7 Interview au quotidien Les Echos, 27-28 octobre 2000.

* 8 XIVème rapport au Président de la République, octobre 1995, page 11.

* 9 Op. Cit. Page 30.

* 10 Proposition de loi n° 317 (1999-2000).

* 11 Op. cit., page 169.

* 12 Voir le rapport de M. Jacques Barrot au nom de la commission des finances de l'Assemblée nationale, Article 40 de la Constitution, n° 1273 (Xème législature), pages 79 à 81.

* 13 L'OFCE a dressé un bilan pour l'ensemble des ménages. En intégrant aux réformes de l'impôt sur le revenu les allégements de CSG-CRDS pour les bas salaires, la baisse du taux normal de TVA et l'application du taux réduit aux travaux du logement, il apparaît à nouveau que les Français les plus riches sont les principaux bénéficiaires de mesures fiscales, allégeant les impôts de 141 milliards de francs au total. Le quart des foyers les plus aisés voit le total de ses gains nets croître de 79 milliards de francs à l'horizon 2003, alors que le quart le plus pauvre de la population se " contente " de 19 milliards.

* 14 Les tableaux ci-après sont extraits du rapport précité n° 2624 du rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale.

* 15 On se reportera sur ce point utilement au commentaire de l'article additionnel avant l'article 2.

* 16 Proposition de loi n° 317 (1999-2000).

* 17 Ce point est par ailleurs confirmé par l'étude d'avril 2000 réalisée par les services du ministère de l'économie qui notent que, " c'est en effet dans le total constitué par l'ISF, l'IR et la taxation des plus-values (y compris prélèvement social) qu'il faut rechercher le déclencheur éventuel de la délocalisation ".

* 18 Ainsi, le Conseil des impôts envisage-t-il un certain nombre de possibilités que votre commission des finances mentionne comme autant de pistes à examiner sans pour autant les reprendre à son compte. Il s'agirait :

- de créer une tranche d'imposition supplémentaire dont le taux pourrait être compris entre 45 et 50 % et s'appliquerait à partir d'un revenu imposable de 711.OOO francs ;

- de réviser pour les revenus de capitaux mobiliers soumis au barème - les dividendes essentiellement - le mécanisme de l'avoir fiscal en l'alignant sur celui des dividendes perçus par les personnes morales (40 %.), ce qui permettrait selon le Conseil des impôts de rééquilibrer la taxation de l'épargne à risque par rapport à l'épargne placée en titres de taux ou exonérée, ainsi que de réduire les restitutions d'avoir fiscal versées aux non-résidents et aux titulaires de PEA ;

- de réduire pour les revenus fonciers, les taux de déduction forfaitaire des charges pour prendre en compte l'effet de l'octroi de l'abattement de 20 %, tout en posant la question de la nature des charges déductibles des revenus fonciers pour en exclure les dépenses qui correspondent en réalité à des investissements ;

- d'exiger pour les revenus des non-salariés qui n'ont pas adhéré à un organisme de gestion agréé, un visa obligatoire d'un expert comptable sur les déclarations fiscales, au-delà d'un certain seuil de chiffre d'affaires.

* 19 Le Conseil des impôts observe que ces demi-parts supplémentaires déterminent quatre plafonds différents. Le plafond actuel de la demi-part de droit commun est de 11.000 francs. Pour les invalides, anciens combattants, veuves de guerre, et contribuables célibataires, divorcés et veufs avant eu au moins un enfant à charge, mais n'en ayant plus, il est de 16.380 francs. Pour les célibataires, veufs ou divorcés ayant eu des enfants à charge, mais n'en ayant plus, le plafond n'est que de 6.100 francs, au-delà de l'année du vingt-sixième anniversaire du dernier-né. Quant à l'avantage des deux premières demi-parts des contribuables vivant seul avec leur(s) enfant(s), il est de 20.270 francs, donc légèrement inférieur au plafond qui correspondrait à deux demi-parts, à savoir 22.000 francs.

* 20 Le même mode de calcul conduit à prévoir un relèvement (hors indexation) de 12.440 francs à 13.020 francs du plafond pour l'imposition, en 2002, des revenus de l'année 2001, soit une augmentation de 580 francs.

* 21 Une petite moitié des contribuables, et la très grande majorité des contribuables effectivement imposables, atteignent ou dépassent la deuxième tranche de l'impôt sur le revenu, imposée à 23 % en 2000, et à 21,75 % en 2001 selon le PLF, ce qui correspond, après déductions, à un taux marginal effectif minimum de 15,66 % ( 21,75 x 0,8 x 0,9).

* 22 Environ 6.500 francs de cotisations sociales salariales et employeurs + un peu moins de 1.000 francs de CSG et de CRDS (respectivement 7,5 % et 0,5 % du salaire brut) + 1.566 francs d'impôt sur le revenu.

* 23 Réponse à la question n° 27104 du 3 août 2000 de M. René Tregouët, in JO Questions Sénat du 12 octobre 2000.

* 24 Il s'agit du montant de l'impôt correspondant à un patrimoine taxable égal à la limite supérieure de la troisième tranche du barème.

* 25 Direction générale des impôts  les délocalisations de contribuables, personnes physiques, Rapport remis à la demande de la commission de l'Assemblée nationale en avril 2000, page 7.

* 26 Eric Pichet : Le véritable coût de l'ISF, Connaissance Action, 10 décembre 1999.

* 27 Voir Marc et Denis Chicha, " Démembrement de propriété et stratégies transmissives : abus de droit ou abus de pouvoir ? ", Droit et Patrimoine, n °72, juin 1999.

* 28 Dans son 16 ème rapport au Président de la République (1998), le Conseil des impôts constatait que " le barème d'évaluation de l'usufruit et de la nue-propriété prévoit que les valeurs respectives des deux droits dépendent de l'âge de l'usufruitier. Or, ce barème a été élaboré au début du siècle et est actuellement obsolète en raison de l'allongement de la durée de la vie : en sous-estimant l'espérance de vie de l'usufruitier, il surestime par voie de conséquence la valeur de la nue-propriété ".

* 29 Rapport n° 2624,volume 1 page 202.

* 30 Philippe Marini : proposition de loi relative aux pactes d'actionnaires, n ° 379 (1996-1997).

* 31 L'Assemblée nationale a réduit la durée à six ans et votre rapporteur général propose de l'abaisser à deux ans.

* 32 L'Assemblée nationale a réduit la durée à six ans et votre rapporteur général propose de l'abaisser à deux ans.

* 33 Ces ajustements sont réalisés dans les conditions décrites dans les rapports au Parlement de la commission consultative sur l'évaluation des charges.

* 34 In JO Questions Sénat, 24 août 2000, page 2920.

* 35 In JO Questions Sénat 29 avril 1999, page 1404.

* 36 In JO Question Sénat 14 mai 1992, page 1125.

* 37 In JO Débats Sénat, 4 mars 1998, page 1071.

* 38 On rappelera, pour mémoire, que l'article 1010 du code général des impôts dispose que " les véhicules immatriculés dans la catégorie des voitures particulières possédées ou utilisés par les sociétés, sont soumis à une taxe annuelle non déductible pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés, dont le montant est fixé à : 7.400 francs pour les véhicules dont la puissance fiscale n'excède pas 7 CV ; 16.000 francs pour les autres véhicules. La taxe n'est toutefois pas applicable aux véhicules destinés exclusivement soit à la vente, soit à la location de courte durée, soit à l'exécution d'un service de transport à la disposition du public, lorsque ces opértions correspondent à l'activité normale de la société propriétaire. (...) Lorsqu'elle est exigible en raison des véhicules pris en location, la taxe est à la charge de la société locataire ".

* 39 In rapport général sur le projet de loi de finances pour 1997, n° 861 (1996-1997), tome II, fascicule 1, pages 70-71.

* 40 Le point avait été développé dans le rapport de votre commission " En finir avec le mensonge budgétaire " n° 485 (1999-2000), Tome 1, pages 83 à 87.

* 41 Le risque d'une réforme " trop laxiste " du statut serait de permettre à des particuliers d'utiliser la société de capital-risque à des fins uniquement fiscales, pour gérer des participations majoritaires.

* 42 Dépôt de l'amendement par votre rapporteur général au nom de la commission des finances le 31 mai 2000. Cf. rapport du Sénat n° 371 (1999-2000) pages 94 et suivantes.

* 43 Réponse de Mme Florence Parly, secrétaire d'Etat au budget : " Nous sommes favorables à cet amendement, qui procède à une très utile clarification du régime fiscal des sociétés de capital-risque et qui permet de faire aboutir un dispositif dont M. Loridant avait été l'initiateur, mais qui n'avait pas pu arriver jusqu'à son terme lors de la discussion de la précédente loi de finances ", in JO Débats Sénat, jeudi 8 juin 2000, page 3769.

* 44 In JO Débats Assemblée nationale mardi 20 juin 2000, page 5649. Cf. également rapport de la commission des finances de l'Assemblée nationale, n° 2474 (XI° législature), pages 27 et suivantes.

* 45 Source : Perspectives économiques de l'OCDE, juin 2000.

* 46 Hors Italie : la réforme de 1997, qui a transféré certains prélèvements sur les sociétés aux collectivités locales ne permet pas de comparaison intertemporelle satisfaisante.

* 47 Sociétés cotées à la bourse d'Athènes pour la Grèce.

* 48 Pour les bénéfices non distribués.

* 49 En tenant compte des réformes fiscales allemande et irlandaise.

* 50 Décision n° 97-395 du 30 décembre 1997.

* 51 Cf. entretien au journal Le Monde du 16 novembre 2000.

* 52 Cf. JO Débats A.N. du 20 octobre 2000, p. 7153.

* 53 Article 51 de l'annexe III du code général des impôts.

* 54 Pour les DOM, la taxe sur les salaires s'applique au taux unique de 2,95 % en Guadeloupe, Martinique et Réunion et 2,55 % en Guyane.

* 55 Modifiant l'ordonnance n° 82-283 du 26 mars 1982 portant création des chèques-vacances.

* 56 Cf. notamment rapports " Banques : votre santé nous intéresse ", n° 52 (1996-97) et " Assurons l'avenir de l'assurance ", n° 45 (1998-99), par Alain Lambert, commission des finances du Sénat.

* 57 Ce délai fut de cinq ans jusqu'en 1979, puis d'un an pour les exercices clos entre le 31 décembre 1980 et le 31 décembre 1994.

* 58 Les deux arrêtés de 1976 et 1993 définissant ces zones n'ont pas été publiés. L'arrêté de 1993 retenait ainsi plus de quatre-vingt pays supplémentaires, parmi lesquels tous les Etats africains disposant d'un accès direct à la mer, la quasi-totalité des Etats européens (à l'exception notamment de l'Albanie, de la Bulgarie, de Chypre, de Malte, du Monténégro, de la Slovénie et de la Suisse), et la plupart des grands pays producteurs (y compris l'Irak), aux exceptions notables de Bahreïn, de la Birmanie, de l'Equateur, des Etats-Unis, de l'Iran, du Koweït, du Mexique et du Qatar.

* 59 La dépense fiscale afférente est évaluée à 10 millions de francs par le fascicule budgétaire d'évaluation des voies et moyens.

* 60 S'agissant de la PHP, le fait d'avancer de six ans le prélèvement d'un milliard de francs d'impôt représente pour l'entreprise concernée un coût actualisé d'environ 300 millions de francs, sous l'hypothèse d'un taux d'actualisation de 6 %.

* 61 Patrick Artus et Moncef Kaabi, " Flash " n° 2000-179 du 3 octobre 2000, Caisse des dépôts et consignations Marchés.

* 62 Il s'agit essentiellement de véhicules circulant hors routes : engins de chantier BTP, tracteurs agricoles, engins forestiers, navires des transporteurs fluviaux, etc.

* 63 Vraisemblablement, dans ce cas de figure, les compagnies pétrolières devront verser la TIPP manquante et ensuite intenter des actions en recouvrement forcé à l'égard des bénéficiaires indus.

* 64 Dont 3 milliards de francs de TIPP et 0,42 milliard de francs de TVA.

* 65 Dont 764 millions de francs de TIPP et 100 millions de francs de TVA.

* 66 Cf. commentaire de l'article 9 du présent projet de loi de finances.

* 67 Loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 de finances pour 1999 et décret n° 99-723 du 3 août 1999. Le dispositif a par ailleurs été modifié par l'article 39 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000.

* 68 La " période de remboursement " demeure annuelle, du 11 janvier de l'année n au 10 janvier de l'année n+1, le taux spécifique du " carburant professionnel " demeurant calculé annuellement.

* 69 Les hypothèses de ce tableau sont les suivantes : pause dans le rattrapage pour 2001 mais reprise du rattrapage en 2002 (+ 7 francs par hectolitre pour le gazole et stabilité du supercaburant) ; stabilité des volumes maximaux de remboursement.

* 70 Depuis le 1 er avril 2000.

* 71 Supercarburant sans plomb et supercarburant plombé contenant un additif spécifique améliorant les caractéristiques anti-récession de soupape (dit " supercarburant ARS ").

* 72 Sur ce point on se reportera très utilement au commentaire de l'article 22 du présent projet de loi.

* 73 L'ordonnance n° 2000-0548 du 15 juin 2000 a abrogé le code des débits de boissons.

* 74 Les modifications apparaissent en gras.

* 75 Cf. article 12 ter.

* 76 Loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998 de finances pour 1999, article 97-I.

* 77 En particulier, dans le cas général, il est plus incitatif que le dispositif d'amortissement dégressif prévu à l'article 12 bis du présent projet de loi.

* 78 Les articles du code des postes et télécommunications visés sont les suivants :

- art. L. 33-1 (réseaux de télécommunications ouverts au public) ;

- art. L. 33-2 (réseaux indépendants) ;

- art. L. 34-1 (fournisseurs de services téléphoniques au public).

* 79 Du fait du statut mono-départemental des régions d'outre-mer, les DOM sont soumis au tarif d'une région métropolitaine (plus élevé que celui d'un département).

* 80 Cf. le V de l'article 45 modifié de la loi de finances pour 1987 et l'article L. 34-9 du code des postes et télécommunications.

* 81 Estimation 1999.

* 82 Les 3,2 % restants sont répartis de la façon suivante : 2,81 % sont affectés à la caisse nationale d'assurance-maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), et 0,39 % sont affectés au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

* 83 Les 45 % restants demeurent affectés à la CNAMTS. Les présentes dispositions sont également sans incidence sur les prélèvements sur le produit de ce droit spécifiques aux départements corses et au budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA).

* 84 Cette mesure serait prévue par le prochain projet de loi de finances rectificative.

* 85 Avis n° 2631, Assemblée nationale, XI ème législature.

* 86 Rapport n° 356 (1999-2000).

* 87 Au cours de sa dernière audition devant votre commission, le gouverneur de la Banque de France, M. Jean-Claude Trichet, a rappelé que 51 % des entreprises éprouvaient des difficultés à recruter, alors qu'elles n'étaient que 20 % un an auparavant.

* 88 Article " La politique économique de l'emploi ", paru dans le quotidien Libération du 16 octobre 2000.

* 89 N° 99-1172 du 30 décembre 1999.

* 90 Sur cette question on se reportera utilement au commentaire de l'article 31 dans le rapport général de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2000, n° 89, tome II (1999-2000).

* 91 Décret n° 2000-953 du 22 septembre 2000.

* 92 Les résultats du dernier référendum ont été pris en compte tant pour 2000 que pour 2001.

* 93 Cette répartition est fixée pour 2/3 en fonction de la part de chaque bassin dans le montant total des redevances autorisées pendant la durée du programme quinquennal d'intervention des agences et pour 1/3 en fonction de la population recensée dans le bassin.

* 94 Le budget global des six agences atteint 12,3 milliards de francs en 1999, hors primes pour épuration industrielle.

* 95 Réponse à la question n° 35 de M. Philippe Adnot, rapporteur spécial de la commission des finances pour les crédits de l'environnement.

* 96 Encore que cet adjectif soit trompeur : une agence " riche " (au plan budgétaire) est une agence qui a de gros besoins, soit qu'elle couvre une population nombreuse, soit qu'elle soit " riche " en pollution ...

* 97 Voir les différents rapports spéciaux consacrés chaque année au BAAC par notre collègue Yvon Collin.

* 98 1,2 milliard de francs de produit attendu en 2001.

* 99 Décision n° 60-8 DC du 11 août 1960.

* 100 Institut d'émission d'outre-mer.

* 101 Rapport n° 388 (1997-1998). Projet de loi modifiant le statut de la Banque de France en vue de sa participation au système européen de banques centrales.

* 102 Banque centrale nationale.

* 103 Ces travaux ont fait l'objet d'une communication devant votre commission des finances le jeudi 19 octobre 2000. Bulletin des commissions n° 3 (2000-2001), pages 435-442.

* 104 Cette dotation négative s'explique par le fait que les dotations budgétaires en 2001 intégrant les crédits du FITTVN seront inférieures aux seules dotations budgétaires de 2000.

* 105 Analyses de Dresdner-Kleinwort Benson.

* 106 Edition du 20-26 mai 2000.

* 107 A un supplément de recettes de 70 milliards correspond une minoration d'environ 4 milliards de la charge nette supportée chaque année par le budget de l'Etat (pour un coût apparent de la dette chiffré à 5,8 % par le gouvernement).

* 108 Selon le numéro précité d'INSEE première n° 700 de février 2000.

* 109 Arrêt CE ville de Marseille 28 septembre 1984.

* 110 Avis n° 10 (1999-2000) sur les propositions de loi de MM. Charles Descours et plusieurs de se scollègues et Jean Arthuis visant à instituer des plans d'épargne retraite.

* 111 Créé en 1953 dans le cadre de la CECA, Eurostat qui est l'Office statistique des communautés européennes, est devenu en 1958 une direction générale de la Commission européenne. L'importance de la statistique européenne a été ensuite consacrée en 1997 par le traité d'Amsterdam (en son article 285) et par l'adoption par le Conseil de l'Union européenne, en février, d'une loi statistique répartissant les rôles entre les autorités statistiques nationales et communautaires qui, ensemble, constituent le " système statistique européen ". Le comité du programme statistique de ce dernier a établi, en 1995, un système européen de comptes (SEC 95). Le rôle principal d'Eurostat consiste à établir et publier des informations statistiques fiables et comparables au niveau européen.

* 112 L'objectif réclamé par la profession agricole demeure 75 % du SMIC net (environ 3.900 francs par mois).

* 113 Loi n° 99-574 du 9 juillet 1999.

* 114 Loi n° 98-1266 du 30 décembre 1998.

* 115 Le présent article est relatif au financement de cette mesure ; le dispositif juridique a été introduit par quatre articles additionnels avant l'article 64, rattachés au budget de l'agriculture et de la pêche.

* 116 Le taux d'indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pris en compte dans l'enveloppe normée est l'indice de la DGF, la dotation spéciale instituteurs, la dotation élu local, la dotation générale de décentralisation (DGD), la DGD de Corse et la DGD formation professionnelle sont indexées sur le taux progression de la DGF (après recalage et régularisation), les dotations au fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et au fonds national de péréquation sont indexées sur l'évolution des recettes fiscales nettes de l'Etat, la dotation globale d'équipement, la dotation départementale d'équipement des collèges et la dotation régionale d'équipement scolaire sont indexées sur l'évolution de la formation brute de capital fixe des administrations publiques.

* 117 Dotation de fonctionnement minimale.

* 118 Fonds de compensation des déséquilibres régionaux.

* 119 Il s'agit effectivement d'une hypothèse très basse puisque cela suppose que les communautés d'agglomération créées en 2000 auront en moyenne 50.000 habitants alors que celles créées en 1999 ont en moyenne 119.343 habitants.

* 120 En réalité, le manque à gagner a été encore plus élevé car, outre la compensation des baisses de DCTP, le FNPTP a également pris en charge la majoration de 150 millions de francs du montant de la fraction " bourgs-centres " de la dotation de solidarité rurale.

* 121 Cette compensation est versée aux communes en application de l'article L. 2335-3 du code général des impôts dont la rédaction laisse une grande marge d'appréciation à l'administration : " Lorsque les exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties (...) entraînent pour les communes une perte de recette substantielle, ces collectivités ont droit à une compensation par l'Etat dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ".

* 122 Actualités, bimensuel d'information édité par l'union HLM, n° 691 du 30 octobre 2000.

* 123 Prévues à l'article 1414 du code général des impôts, c'est-à-dire la totalité des exonérations de taxe d'habitation en faveur des titulaires des minima sociaux.

* 124 Prévus aux articles 1390 et 1391, c'est-à-dire les exonérations en faveur des personnes défavorisées et des personnes âgées (qui sont les deux seules exonérations prévues par le code général des impôts).

* 125 On relèvera ainsi qu'y figurent " les palais, châteaux et bâtiments nationaux, le Palais-Bourbon et le Palais du Luxembourg ".

* 126 Question écrite n° 21576 du 30/12/1999 - réponse in JO Questions Sénat du 8 juin 2000, page 2069.

* 127 Pour la Martinique, la Guadeloupe et la Réunion, les montants des revenus sont fixés, pour les impositions établies au titre de 2000, à 52.200 francs pour la première part, majorée de 12.470 francs pour la première demi-part et de 11.790 francs pour chaque demi-part supplémentaire à compter de la deuxième. Enfin, pour la Guyane, ces montants sont fixés respectivement à 54.570 francs, 15.020 francs et 11.790 francs pour les impositions établies au titre de 2000.

* 128 Il précisait par ailleurs : " Lorsqu'on fait la liste de tous ces éléments, on constate qu'il y a des modifications significatives, qui vont dans le sens de vos préoccupations traditionnelles, renouvelées cette année. C'est la preuve que la majorité est une majorité de dialogue. Et je suis sûr que cela permettra, tout en gardant les spécificités qui sont les vôtres, d'affirmer la solidarité majoritaire nécessaire au bon fonctionnement du travail que nous faisons ensemble ".

* 129 Ces abondements font l'objet du C. du présent paragraphe et du commentaire de l'article 26 du présent projet de loi de finances.

* 130 Ces montants tiennent compte des majorations dont font l'objet ces deux dotations à partir des crédits provenant de la mise en extinction de la DGF de la région Ile-de-France.

* 131 Ce taux de progression (ainsi que les montant figurant dans le tableau) ne tiennent pas compte du financement des communautés d'agglomération par une voie extérieure à la DGF, dont les modalités sont décrites dans le commentaire de l'article 26 du présent projet de loi de finances.

* 132 Rapport n° 447 (1999-2000).

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