EXAMENS EN COMMISSION

I. EXAMEN DES CRÉDITS DE LA SANTÉ ET DE LA SOLIDARITÉ

Réunie le 22 novembre 2000 sous la présidence de M. Bernard Angels, vice-président, la commission a procédé, sur le rapport de M. Jacques Oudin, rapporteur spécial à l'examen des crédits de l'emploi et de la solidarité - II. Santé et solidarité et des articles 54 à 56.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a indiqué qu'avec 94,7 milliards de francs, le budget de la santé et de la solidarité constituait le 6e budget civil de l'Etat ; il se compose du budget de la solidarité pour 85 milliards de francs et de celui de la santé pour 9,7 milliards de francs. Il a expliqué que le budget augmentait de 3,9 milliards de francs, soit 2,5 milliards à structure constante, le solde étant constitué de transferts.

Il a exposé que cet argent supplémentaire serait utilisé aux trois quarts à couvrir la hausse des minima sociaux, et pour les 600 millions de francs restants à augmenter les moyens humains du ministère (avec 216 emplois en plus) et les moyens en faveur de l'action sociale. Sans vouloir détailler les grandes masses des crédits, il a souligné qu'il s'agissait essentiellement d'un budget d'interventions sociales.

Il a rapidement évoqué chaque agrégat :

- les crédits en faveur des politiques de santé publique (2,4 % du budget) diminuent de 146 millions de francs en raison du transfert de certaines responsabilités à l'assurance maladie, les différentes agences sanitaires voyant leur subvention réduite, le reste des moyens étant globalement préservé ;

- les dépenses en faveur de l'offre de soins diminuent à 1,6 % du budget du ministère, avec un renforcement des moyens des formations des professions paramédicales, et une forte réduction des crédits de paiement affectés aux opérations de modernisation et de rénovation hospitalières ;

- les crédits du développement social augmenteront de 3,8 % à 37,9 milliards de francs, en raison principalement de la progression des dépenses liées à l'allocation pour adulte handicapé (AAH) ; il a noté également la forte progression des crédits de l'économie solidaire et la diminution de ceux consacrés aux rapatriés et à la modernisation des établissements pour personnes âgées :

- les dépenses liées à l'intégration et à la lutte contre les exclusions augmentent de 5 % et représenteront la moitié du budget de la santé et de la solidarité, cette hausse recouvrant la nouvelle subvention au fonds d'action sociale des travailleurs immigrés et de leurs familles (FASTIF) est la contrepartie du transfert à la branche famille de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire,

- la hausse des crédits du revenu minimum d'insertion (RMI) (30 milliards, + 3,3 %), celle de l'allocation de parent isolé (API) (4,7 milliards, + 7,1 %), et la baisse de ceux de la couverture maladie universelle (CMU) pour 400 millions de francs ; il a expliqué que ceux-ci devraient être augmentés par des reports en provenance de 2000 et dans le second collectif pour 2001 pour augmenter au total de 500 à un milliard de francs ;

- enfin, les crédits de l'administration centrale et les services communs, rebaptisés " crédits de la gestion des politiques de santé et de solidarité ", bénéficieront, à structure constante, de 340 millions de francs supplémentaires leur permettant de financer la création de 216 emplois, de revaloriser les régimes indemnitaires, d'entamer un plan de résorption des mises à disposition, et d'augmenter de 12 % les moyens des services.

Puis M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a formulé cinq observations.

S'agissant de l'augmentation des dépenses de minima sociaux, il a constaté qu'en 2001, comme les années précédentes, les augmentations de crédits les plus importantes en volume du budget de la santé et de la solidarité résulteraient de la croissance non maîtrisée de dépenses sociales obligatoires. Il a rappelé que le total des crédits consacrés à la CMU, à l'API, à l'AAH et au RMI s'élèvera en 2001 à 67,6 milliards de francs, soit 72,2 % du budget de la santé et de la solidarité, marquant une hausse (+ 2,85 %) plus rapide que la revalorisation des prestations (+ 0,9 %) ce qui signifie que le contexte de forte croissance économique n'est probablement pas partagé par tous. Il a indiqué que cette hausse n'avait pas cessé, les crédits pour le RMI étant passés de 25 à 30 milliards de francs depuis 1997 et ceux pour l'AAH de 22 à 26,5 milliards de francs sur la même période. Il en a conclu que les trois quarts de la progression des crédits du ministère en 2001 sont absorbés par celle non maîtrisée des minima sociaux, et s'est demandé pourquoi la France avait de plus en plus d'handicapés et de parents isolés.

Abordant la question de la santé publique et de l'offre de soins, il les a considérées comme les victimes de ce projet de budget. Il a expliqué que, pour financer des prestations sociales aux dépenses croissantes, le ministère coupait dans les crédits consacré à la politique de santé publique et à la conception et à la maîtrise du système de santé. Il a donc regretté qu'alors que les crédits d'ensemble du ministère augmentent, ceux de ces deux agrégats essentiels pour l'avenir de notre système de santé et le bien-être de nos concitoyens diminuent : ils représenteront seulement 4 % du budget de la santé et de la solidarité, contre 4,4 % en 2000. Il a rappelé que les besoins et attentes existent pourtant : sécurité sanitaire, cancer, Sida, retour des fléaux sanitaires, par exemple. Il s'est indigné de ce que le Gouvernement, transférant 164 millions de francs de dépenses de santé publique à l'assurance maladie, n'utilise pas les économies ainsi réalisées pour améliorer tel ou tel programme de santé publique. Il a fortement critiqué également la diminution de moitié des crédits de paiement pour la modernisation des hôpitaux.

M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a ensuite dénoncé la persistance de problèmes non résolus. Il a souhaité insister sur la question des mises à disposition : le ministère jouit en 2000 de plus de 600 mises à disposition. Celles-ci sont telles que le personnel des hôpitaux fait fonctionner la direction des hôpitaux chargée de les contrôler, ou que le personnel des caisses de sécurité sociale fait fonctionner la direction de la sécurité sociale chargée de les contrôler. Il a critiqué cette situation, qui revient à faire rémunérer les agents de l'Etat par la sécurité sociale, le tout dans des conditions réglementaires, déontologiques et financières souvent très douteuses. Il a salué l'effort réalisé en 2001 pour résoudre cette question, puisque 24,4 millions de francs viendront rembourser certains organismes mettant à disposition des personnels, mais aussi puisque est engagée une démarche de conventionnement systématique au cas par cas et de suppression des situations illégales. Il s'est félicité d'avoir été un peu écouté, mais a reconnu qu'il restait beaucoup de chemin à accomplir.

Il a ensuite soulevé deux autres questions : pourquoi augmenter emplois et moyens de fonctionnement alors que l'Etat délègue de plus en plus de pouvoirs en matière sanitaire à des agences autonomes aux moyens eux aussi croissants ? pourquoi doter de 42,5 millions de francs supplémentaires les crédits de l'économie solidaire quand presque tous les postes autres que le personnel et les minima sociaux diminuent ?

Puis M. Jacques Oudin, rapporteur spécial, a critiqué la chute libre des crédits de paiement. Il a considéré que le ministère tentait de bercer le Parlement d'illusions par une hausse des autorisations de programme de 500 millions de francs, alors que la réalité est une baisse de 44 % des crédits de paiement en 2001 après des baisses de 20,6 % en 2000 et 26,7 % en 1999. Il en a conclu qu'il n'y a plus d'investissement dans le domaine sanitaire et social.

Enfin, il a estimé que le budget comportait un grand absent : les 500 millions de francs promis par l'Etat pour doter le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

En conséquence de ces remarques, le rapporteur spécial a invité la commission à rejeter les crédits de la santé et de la solidarité pour 2001.

Puis la commission est passée à l'examen des articles rattachés.

Elle a adopté conforme l'article 54 (prolongation de deux ans des aides au logement pour les harkis).

Examinant les articles 55 (création d'une redevance au profit de l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé -AFSSAPS- et d'une contribution au profit de l'agence nationale de l'accréditation et de l'évaluation en santé -ANAES-) et 55 bis (création d'une taxe sur le chiffre d'affaires des fabricants de dispositifs médicaux au profit de l'AFSSAPS), elle a adopté trois amendements :

- qualifiant de taxe la redevance créée à l'article 55 ;

- supprimant la contribution au profit de l'ANAES proposée par le II de l'article 55 ;

- de précision rédactionnelle à l'article 55 bis .

Puis elle a adopté conforme l'article 56 (transfert de la branche famille vers l'Etat de la subvention au FASTIF).

A l'issue de cette présentation, la commission a décidé de proposer au Sénat de rejeter les crédits de la santé et de la solidarité pour 2001.

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