2. Assouplir le statut des collections publiques

L'exception au principe d'inaliénabilité des collections publiques prévue par l'Assemblée nationale pour les oeuvres d'art contemporain est sans doute une des dispositions les plus controversées du texte qui nous est transmis.

Suivant les propositions de sa commission des affaires culturelles, familiales et sociales et de M. Michel Herbillon, mais contre l'avis du gouvernement, l'Assemblée nationale a complété l'article 8 du projet de loi afin de préciser que « les oeuvres des artistes vivants (entrées dans les collections publiques) ne deviennent inaliénables qu'à l'issue d'un délai de trente ans à compter de l'acquisition ».

Selon les auteurs de l'amendement, cette disposition vise, d'une part, à remédier « au problème de l'encombrement des réserves des musées » et, d'autre part, à « f avoriser la création contemporaine en permettant aux oeuvres de « tourner » plus aisément et aux musées d'en acquérir davantage plutôt que de se voir pénalisés par un encombrement interdisant l'achat de nouvelles oeuvres d'autres artistes contemporains ».

Cette disposition présente incontestablement le mérite d'avoir ouvert un débat jusque là occulté par les services de l'Etat et le corps des conservateurs au nom de l'intégrité des collections muséographiques.

Votre rapporteur estime souhaitable pour sa part de remettre en cause le principe d'infaillibilité des décisions d'acquisition.

Sans préconiser une révolution et un changement brutal des règles du jeu, il convient de réfléchir à une alternative à l'inaliénabilité des collections publiques, qui conduit à les figer pour l'éternité. Quelles que soient les garanties dont elles sont entourées, l'erreur est indissociable des décisions d'acquisition.

Certes, certains arguent que ces cessions conduiraient les conservateurs à peser sur le marché mais leurs acquisitions ont le même effet, et personne n'y trouve à redire, surtout s'agissant de la création contemporaine.

Par ailleurs, comme l'a déjà souligné plus haut votre rapporteur, pour certaines collections à vocation technique ou scientifique, l'inaliénabilité constitue une réelle entrave à leur gestion.

Toutefois, l'exception prévue par l'Assemblée nationale ne semble guère satisfaisante car c'est peut être dans le domaine contemporain que l'inaliénabilité se justifie le plus.

En effet, les revirements du goût, déjà fréquents pour des oeuvres plus anciennes, sont la règle pour l'art contemporain. Le risque est donc de voir les musées se défaire d'oeuvres qui n'auraient plus la faveur du public à des prix forcément bas, ce qui aurait une incidence négative sur la cote des artistes alors qu'elles sont susceptibles, quelques années plus tard, de connaître une nouvelle appréciation.

Par ailleurs, l'argument fondé sur l'encombrement des réserves ne tient guère car, s'il est valable pour les fonds régionaux d'art contemporain (FRAC), qui ne sont pas visés par le projet de loi, il ne l'est pas pour les musées qui, malheureusement, ne possèdent que peu d'oeuvres contemporaines.

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