Rapport n° 50 (2001-2002) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 31 octobre 2001

Disponible au format Acrobat (693 Koctets)

Tableau comparatif au format Acrobat (37 Koctets)

N° 50

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 31 octobre 2001

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, portant règlement définitif du budget de 2000 ,

Par M. Philippe MA RINI,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 e législ.) : 3218 , 3298 et T.A. 706

Sénat : 13 (2001-2002)

Lois de règlement .

AVANT-PROPOS

Ultime étape du « marathon budgétaire », le projet de loi de règlement définitif du budget est un constat fondé sur le contrôle a posteriori de l'exécution des lois de finances de l'année. Il s'agit d'un quitus comptable qui, en aucun cas, ne vaut acceptation de la politique et des pratiques budgétaires du pouvoir exécutif.

Aussi votre rapporteur ne peut-il que réitérer les critiques qu'il avait déjà émises sur le fond de la politique budgétaire suivie en 2000, estimant que le gouvernement n'avait pas suffisamment profité d'une conjoncture économique favorable pour mener les réformes de structure dont notre pays a tant besoin, en premier lieu réduire plus significativement un déficit budgétaire qui reste toujours proche des 200 milliards de francs (191,2 milliards de francs, soit 29,15 milliards d'euros) contribuant à faire de la France le « mauvais élève » de l'Europe.

On est dès lors en droit de craindre qu'au « budget des occasions manquées », celui de 2000, ne succède en 2001 le « budget des illusions perdues ».

A ce titre, votre commission ne peut que faire sien l'avertissement émis par la Cour des comptes en introduction à son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 : « en cas d'affaiblissement de la croissance économique, en particulier en raison de la conjoncture internationale, les évolutions favorables actuelles du solde budgétaire, encore lentes, et celles annoncées dans le programme pluriannuel de finances publiques, à l'horizon 2004, transmises à la Commission européenne le 20 décembre 2000, seraient remises en cause ».

Qu'il soit également permis de se féliciter des nouvelles dispositions concernant la loi de règlement figurant à l'article 41 de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001, applicables à compter du 1 er janvier 2002, qui précisent que « le projet de loi de finances de l'année ne peut être mis en discussion devant une assemblée avant le vote par celle-ci, en première lecture, sur le projet de loi de règlement afférent à l'année qui précède celle de la discussion dudit projet de loi de finances ». Ce « chaînage vertueux » entre la loi de règlement de l'année n - 1 et la loi de finances n + 1 répond en effet à un souhait pressant et constant qu'exprimait le rapporteur de ce texte au nom de la commission des finances du Sénat, le Président Alain Lambert lorsqu'il estimait « logique de prévoir un [tel ordre de] dépôt afin de faire davantage porter le contrôle parlementaire sur les résultats obtenus et les écarts éventuels avec les objectifs fixés par les lois de finances ».

En tout état de cause, les efforts entrepris par la Cour des comptes afin de publier son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2000 dès le mois de juin 2001, ont d'ores et déjà permis, de facto , d'anticiper d'une année la mise en place de cette réforme attendue car nécessaire.

CHAPITRE PREMIER :

UNE CROISSANCE EN TROMPE-L'oeIL

• La croissance a été en l'an 2000 de 3,1 %.

Ce taux élevé s'inscrit dans le contexte d'une période de forte croissance, débutant en 1998. L'économie française a connu de 1998 à 2000 une croissance annuelle soutenue, supérieure à son potentiel (qu'on estime généralement compris entre 2 % et 2,5 % en volume), comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB en France

(en points de PIB)

Source : INSEE

Cette croissance a été rendue possible par l'assainissement budgétaire effectué par les gouvernements précédents à partir de la récession de 1993 et par le desserrement de la politique monétaire à partir de 1995.

Elle s'est appuyée sur une demande intérieure dynamique. Celle-ci a en effet pris le relais de la demande extérieure, à l'origine de la reprise de l'année 1997. Le graphique ci-après permet de mettre en évidence cette évolution.

Contributions à la croissance : le dynamisme de la demande intérieure

(en points de PIB)

Source : rapport économique, social et financier

• Ce succès apparent doit être nuancé.

Tout d'abord, une aussi forte croissance n'était pas prévue par le gouvernement, qui semble donc difficilement pouvoir s'en prévaloir.

Ensuite, cette forte croissance annuelle ne doit pas masquer le ralentissement du rythme trimestriel de la croissance : loin d'avoir commencé après les attentats du 11 septembre 2001, le ralentissement de l'économie mondiale, et en particulier de l'économie française, a en fait commencé dès l'an 2000.

I. UNE CROISSANCE NON PRÉVUE PAR LE GOUVERNEMENT

Alors que la croissance a été en l'an 2000 de 3,1 %, le projet de loi de finances pour 2000 reposait sur une prévision de 2,8 %.

Cet écart vient notamment du fait que la nature de la croissance en l'an 2000 a été différente de ce que prévoyait le gouvernement, comme l'indique le tableau ci-après.

La croissance du PIB en 2000 : prévision et réalisation

Prévision

Réalisation

Croissance du PIB et de ses composantes

Croissance du PIB

2,8

3,1

Consommation des ménages

2,7

2,5

Investissement des entreprises

5,0

7,2

Demande intérieure hors stocks

2,6

3,1

Variation des stocks (contribution)

0,2

0,1

Exportations

4,7

12,6

Importations

4,9

14,2

PIB en valeur (variation en %)

4,0

4,0

Prix à la consommation (moyenne annuelle)

- hors tabac

0,9

1,6

- y compris tabac

1,0

1,7

Compte des ménages

Pouvoir d'achat du salaire moyen par tête

1,2

0,7

Pouvoir d'achat du revenu disponible

2,6

3,1

Taux d'épargne (% du revenu disponible)

15,6

15,9

Masse salariale privée

SMPT en valeur

2,3

2,4

Effectifs (évolution moyenne)

1,7

3,3

Masse salariale en valeur

4,0

5,8

Compte des sociétés non financières

Taux de marge

32,1

32,6

Taux d'investissement

19,1

19,3

Taux d'autofinancement

81,8

82,5

Balance commerciale (FAB-FAB)(Mds F)

102

3,9

Administrations publiques

Besoin de financement (% PIB)

1,8

1,4

Prélèvements obligatoires (% PIB)

44,8

45,2

Hypothèses internationales

PIB en volume

OCDE

2,0

3,4

Union européenne

2,7

3,4

Zone euro

2,7

3,4

Source : projets de loi de finances pour 2000 et 2002 (rapports économiques, sociaux et financiers)

L'écart entre la croissance prévue et la croissance constatée peut être analysé, notamment, de deux manières.

A. UNE INFLATION PLUS FAIBLE QUE PRÉVU

Tout d'abord, on peut observer que la croissance en valeur prévue a bien correspondu à celle constatée (4 %). La différence de croissance en volume provient d'une inflation inférieure aux prévisions (0,9 % au lieu de 1,2 %).

B. UNE DEMANDE INTÉRIEURE PLUS FORTE QUE PRÉVU

Ensuite, la croissance de la demande intérieure a été supérieure aux prévisions (2,8 % en prévision, 3,2 % en exécution).

Cette erreur de prévision provient notamment d'une sous-estimation de la croissance de l'investissement des entreprises. Alors que le gouvernement prévoyait une croissance de 5 %, celle-ci a été de 7,2 %.

Il convient de souligner que la consommation des ménages a été en revanche surestimée : elle a été de 2,5 %, au lieu de 2,7 % en prévision. Cet écart s'explique par le fait que si le pouvoir d'achat a plus augmenté que prévu (3,1 % au lieu de 2,6 %), le taux d'épargne a lui aussi été considérablement plus élevé (15,9 % au lieu de 15,6 %).

Enfin, on ne peut que déplorer le dérapage des prélèvements obligatoires observé en l'an 2000 : le taux de prélèvements obligatoires a en effet atteint 45,2 % du PIB, au lieu de 44,8 %.

II. UN RALENTISSEMENT DE LA CROISSANCE TRIMESTRIELLE

A. UNE CROISSANCE À RELATIVISER

Des taux de croissance quasiment identiques du PIB français en 1999 et en 2000 (respectivement 2,9 % et 3,1 %) ne doivent pas dissimuler un ralentissement de la croissance en l'an 2000, que traduit son rythme d'évolution infra-annuelle.

Alors que la croissance, mesurée de trimestre à trimestre, est passée au cours de l'année 1999 de 3,4 % à 4,4 % en rythme annuel, elle a ensuite été inférieure à ces taux.

En conséquence de ces phénomènes, la croissance trimestrielle de l'économie française a été plus faible en l'an 2000 qu'en 1999, avant de s'effondrer en 2001, comme le montre le graphique ci-après.

Croissance du PIB (France)

(en % rythme annualisé)

Source : INSEE

B. LES CAUSES DU RALENTISSEMENT

1. L'augmentation du prix du pétrole

Cette inflexion en l'an 2000 semble s'expliquer principalement par le renchérissement des produits pétroliers. En effet, celui-ci a affecté le pouvoir d'achat des ménages tout en les incitant à épargner davantage. Le prix du pétrole a atteint en septembre de l'année 2000 son maximum depuis 1991, comme l'indique le graphique ci-après :

Cours du pétrole

(prix du baril de Brent en dollars)

Source : FERI

2. Le ralentissement international du deuxième semestre de l'année 2000

Il convient également de mentionner le ralentissement international du deuxième semestre de l'année 2000, qui résulte partiellement de l'augmentation du prix du pétrole.

a) Le ralentissement américain

L'économie américaine connaît un net ralentissement depuis le dernier trimestre de l'année 2000, que le graphique ci-après permet de mettre en évidence.

Croissance du PIB (Etats-Unis)

(en % rythme annualisé)

Source : Bureau of Economic Analysis

Depuis le troisième trimestre de l'année 2000, la croissance trimestrielle de l'économie américaine a chuté, en rupture avec le rythme, de l'ordre de 5 %, observé auparavant. Ainsi, au troisième trimestre de l'année 2001, la croissance a été de - 0,4 %.

b) Le ralentissement de la zone euro

De même, en partie à cause du ralentissement américain, la croissance de la zone euro a connu un ralentissement marqué au cours de l'année 2000, avant de devenir presque nulle au deuxième trimestre de l'année 2001, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB (zone euro)

(en % rythme annualisé)

Source : Eurostat

En effet, l'atterrissage de l'économie des Etats-Unis a surpris par son ampleur et sa rapidité. Par ailleurs, une inflation plus forte qu'anticipé au sein de la zone euro a érodé le pouvoir d'achat des ménages, tout en réduisant la probabilité d'un assouplissement de la politique monétaire.

CHAPITRE II :

DU BUDGET INITIAL À LA LOI DE RÈGLEMENT

A l'occasion de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2000, votre rapporteur général avait déploré que « bénéficiant d'une conjoncture économique favorable et d'une amélioration objective des performances de la sphère privée de l'économie, le gouvernement ne réalise pas, dans le domaine des finances publiques, les indispensables réformes de structure qui permettront de préparer l'avenir et de préserver les générations futures ».

Ce sentiment avait été conforté lors de l'examen de la première loi de finances rectificative pour 2000 1 ( * ) qui consistait à tirer les conséquences budgétaires de l'affaire de la « cagnotte » et à réévaluer le niveau des recettes fiscales et non fiscales pour 2000.

En effet, les 51,4 milliards de surplus de recettes fiscales et non fiscales, avouées tardivement et « sous la contrainte », avaient été affectés à hauteur de 80 %, soit 40,6 milliards de francs, à des mesures éparses de baisse d'impôt, et pour le reliquat, soit 10 milliards de francs, à une augmentation significative de la dépense.

Votre commission avait estimé, s'agissant de ces nouvelles dépenses qu'il n'était « pas de bonne politique de financer en cours d'année des dépenses supplémentaires par un surcroît de recettes non encore perçues ».

Sur le fond, votre rapporteur général avait alors déploré que, dans le projet initial, 49 millions de francs, soit 0,098 % seulement du montant des réévaluations de recettes, soient affectés à la réduction du déficit. Aussi avait-il préconisé que le financement des 10 milliards de dépenses nettes supplémentaires soit assuré par redéploiement, comme cela devrait être la règle, afin d'amplifier l'indispensable effort de réduction du déficit budgétaire.

Examinant le second collectif budgétaire de 2000, la « traditionnelle » loi de finances rectificative de fin d'année 2 ( * ) , votre rapporteur général avait à nouveau, refusé d'en accepter tant le contenu que d'en partager les orientations. En effet, si la progression des recettes fiscales s'élevait à 40,6 milliards de francs, le gouvernement ne réduisait le déficit budgétaire que de 5,8 milliards de francs de sorte que celui-ci restait, dans le projet initial toujours supérieur en 2000 (- 209,5 milliards de francs) au niveau exécuté en 1999 (- 206 milliards de francs).

A bien des égards, le budget 2000 apparaissait donc ainsi comme celui des « occasions manquées », auxquelles ont rapidement succédées, au cours de l'année 2001, « les illusions perdues ».

I. LA LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2000

A. DES RÉSERVES SUR LE RESPECT DE LA NORME DE PROGRESSION DES DÉPENSES

L'année 2000 devait constituer une étape importante en matière d'évolution des dépenses de l'Etat.

En effet, dans la loi de finances initiale pour 2000, le gouvernement s'était fixé un objectif à la fois clair et relativement ambitieux : la stabilisation en volume des dépenses de l'Etat, soit une progression des dépenses de 15 milliards de francs (17,5 milliards de francs hors dette), égale à l'augmentation prévisionnelle des prix hors tabac (+ 0,9 %). Sa position officielle n'avait pas changé, en dépit de la présentation, dès le printemps, d'un projet de loi de finances rectificative 3 ( * ) .

Le rapport préliminaire de la Cour des comptes portant sur l'exécution des lois de finances pour 2000 semble confirmer les engagements du gouvernement, mais lui apporte néanmoins plusieurs sérieuses réserves.

Les réserves de la Cour des comptes sur la présentation par le gouvernement de la norme de progression des dépenses de l'Etat en 2000

Dans son rapport préliminaire relatif à l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour indique que « la hausse moyenne des prix ayant été de 1,6 %, la progression des dépenses brutes du budget général, soit 1,6 % en valeur, correspond à une stabilité en volume », et que « dans la présentation faite par le MINEFI 4 ( * ) , le calcul d'un montant de dépenses nettes conduit au même résultat ».

Ainsi, pour la première fois depuis 1998, le gouvernement aurait respecté la norme de progression des dépenses de l'Etat qu'il avait annoncée en loi de finances initiale.

Toutefois, la Cour des comptes, par ses trois observations, apporte de sérieux tempéraments à cette présentation faite par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie :

- elle s'interroge sur les recettes relatives à la dette, puisqu'il est procédé à une contraction entre des recettes et des dépenses, qui, le plus souvent, n'ont pas lieu au cours des mêmes exercices ;

- surtout, elle « note que c'est grâce à l'inflation que le résultat de 0 % en volume a pu être affiché », le taux d'inflation constaté en exécution, soit 1,6 %, étant « moins bon » que celui annoncé en loi de finances initiale, soit 0,9 % ;

- enfin, elle pose la question de la sincérité de la présentation retenue par le ministère : « les résultats peuvent être présentés de différentes manières, relativement techniques, avec des « ajustements » divers et variés, qui peuvent alimenter, au plan interne, le débat récurrent sur l'opacité des comptes de l'Etat, consolidés ou non », la Cour déplorant « l'absence dommageable d'un « référentiel » de normes comptables applicables à l'Etat, qu'il paraît impératif d'élaborer sans délai ».

Plus généralement, elle note que « la lenteur de l'amélioration [de la situation budgétaire] s'explique aussi par des dépenses de l'Etat qui résistent à la baisse », et souligne « la difficulté à diminuer structurellement les dépenses de l'Etat ».

B. UNE FAIBLE PROGRESSION AFFICHÉE DES RECETTES NETTES EN RAISON DE CHANGEMENTS DE PÉRIMÈTRES

La loi de finances initiale pour 2000 affichait une faible progression des recettes nettes du budget général. Les recettes totales nettes de l'Etat devaient atteindre 1.442,2 milliards de francs, soit une progression de seulement 5,5 milliards de francs par rapport au budget révisé de 1999.

Cette très faible progression s'expliquait d'abord par l'ampleur des modifications de périmètre (- 23,6 milliards de francs). En effet, la loi de finances initiale pour 2000 incorporait un grand nombre de modifications de structure, qui consistaient essentiellement à transférer 45,2 milliards de francs de recettes fiscales à la Sécurité sociale et à incorporer dans les recettes non fiscales des fonds de concours et recettes diverses qui devaient y figurer, pour 8,9 milliards de francs.

A structure constante, les recettes progressaient donc de 39,1 milliards de francs, soit + 2,7 %.

Par ailleurs, tels que retracés dans le fascicule « voies et moyens » (tome 1) les aménagements de droits concernant les recettes fiscales s'élevaient à 54,8 milliards de francs pour 2000.

Les baisses d'impôts devaient s'élever à 39 milliards de francs en 2000, dont 25 milliards de francs résultant de mesures prises dans la loi de finances, en raison du coût net de l'application du taux réduit de TVA au secteur du logement (- 19,7 milliards de francs), des mesures relatives au droit de bail (- 2,2 milliards de francs) et du relèvement à 5 % de la quote-part d'imposition des dividendes reçus dans le cadre du régime spécial des sociétés mères-filles (+ 4,2 milliards de francs), mais aussi de la compensation versée aux collectivités locales pour la diminution des droits de mutation à titre onéreux, soit 4,6 milliards de francs.

Les autres facteurs de diminution des recettes fiscales provenaient des mesures prises antérieurement, pour environ 14 milliards de francs, avec notamment l'arrivée « à terme » de la surtaxe d'impôt sur les sociétés (- 12,4 milliards de francs).

Les recettes non fiscales faisaient seulement l'objet de changements de périmètres, conduisant à une majoration « optique » de 8,4 milliards de francs.

Les prélèvements sur recettes augmentaient fortement en raison de la poursuite de la réforme de la taxe professionnelle (- 2,8 milliards de francs d'allégement net).

Votre rapporteur général avait toutefois noté que plusieurs éléments permettaient de craindre que, malgré les allégements fiscaux annoncés, les estimations de recettes pour 2000 soient sous-évaluées :

- l'expérience de 1999 avait montré que l'évaluation du coût ou du rendement des mesures fiscales n'est pas exempte d'effets « d'affichage » ;

- surtout, la situation budgétaire en 1999 laissait à penser que les suppléments de recettes en fin d'année seraient plus importants que ce qui était prévu dans les chiffres révisés du gouvernement, de l'ordre de 20 à 35 milliards de francs.

Dans ces conditions, il avait estimé que les recettes pour 2000 devaient être revues à la hausse, puisque les évaluations de recettes de la loi de finances prennent pour base les résultats de l'année précédente.

De fait, l'intervention, dès le printemps 2000, d'une loi de finances rectificative, procédure particulièrement inhabituelle, avait justifié les réserves émises par votre rapporteur général quant à la sincérité de la loi de finances initiale pour 2000.

C. L'ÉQUILIBRE FIXÉ EN LOI DE FINANCES INITIALE

L'équilibre du projet de loi de finances initiale pour 2000 était fixé de la façon suivante :

L'équilibre du projet de loi de finances initiale pour 2000

LFI 1999

PLF 2000

Variation

(en MdF)

(en %)

A. Titre I. Charges de la dette
hors dépenses et recettes d'ordre

240,7

238,2

-1,0

B. Budgets civils

Titre II. Pouvoirs publics

4,5

4,6

2,2

Titre III. Fonctionnement des services

607,3

624,5

2,8

Titre IV. Interventions de l'Etat

495,7

496,5

0,2

Titres V et VI. Investissements

78,8

78,9

0,1

Sous-total B

1186,3

1.204,5

1,5

C. Défense

Titre III. Fonctionnement

157,5

159,9

1,5

Titres V et VI. Investissements

86,0

82,9

-3,6

Sous-total C

243,5

242,8

-0,3

D. Total des dépenses du budget général
à structure constante

1.670,6

1.685,5

0,9

D'. Total des dépenses du budget général
après modifications de périmètre en 2000 (A+B+C)

1.670,6

1.660,6

-0,6

E. Solde des comptes spéciaux du Trésor

-3,1

-3,0

n.s.

F. Total des charges à structure constante
(D + E)

1.667,5

1.682,5

0,9

F'. Total des charges après modifications
de périmètre en 2000 (D'+E)

1.667,5

1.657,6

-0,6

G. Recettes nettes y compris modifications
de périmètre en 2000

1.430,9

1.442,2

0,8

H. Solde général (G - F')

-236,6

-215,40

n.s.

La loi de finances initiale pour 2000 fixait le déficit budgétaire à 215,4 milliards de francs, soit 2,4 % du produit intérieur brut (en SEC 95).

Les charges du budget général hors dégrèvements et remboursements d'impôts diminuaient de 0,6 %, pour atteindre 1.660,6 milliards de francs après prise en compte des modifications de périmètre (soit une minoration d'un montant de 24,9 milliards de francs), soit 1.685,5 milliards de francs à structure constante, en progression de 0,9 %.

Les principales variations étaient les suivantes :

•  la charge de la dette publique diminuait de 1,1 % par rapport à la loi de finances initiale pour 1999 ;

•  les moyens des services civils progressaient de 2,8 %, et les dépenses militaires de fonctionnement de 1,7 % ;

• la hausse des dépenses d'intervention publique était de 0,1 % ;

•  les dépenses civiles en capital étaient stabilisées, et les dépenses militaires en capital reculaient de 3,8 %.

Quant aux recettes fiscales nettes, elles devaient croître de 0,8 % par rapport aux recettes prévues pour 1999, et s'établir à 1.442,2 milliards de francs.

II. LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DU 13 JUILLET 2000

La loi de finances rectificative n° 2000-656 du 13 juillet 2000 est le premier des deux collectifs intervenus au cours de cette année. Elle s'est traduite à la fois par un abondement net des dépenses à hauteur de 10 milliards de francs, et par une baisse des impôts consécutive à la réévaluation à la hausse des recettes de l'Etat.

A. LE COLLECTIF DE PRINTEMPS : 10 MILLIARDS DE FRANCS DE DÉPENSES SUPPLÉMENTAIRES

Avec la loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 portant loi de finances rectificative pour 2000, le gouvernement a décidé de rompre avec son engagement d'une stabilisation des dépenses de l'Etat en volume.

Certes, la position officielle du gouvernement n'avait pas changé : le rapport qu'il avait déposé en vue du débat d'orientation budgétaire pour 2001 confirmait le « cap de la maîtrise des dépenses [de l'État] , qui seront stabilisées en volume en 2000 ».

En effet, le gouvernement avait décidé de présenter un projet de loi de finances rectificative pour 2000, dès le printemps, dont l'objet était essentiellement de procéder à des baisses d'impôts d'un montant de 40,6 milliards de francs, grâce à la réévaluation des recettes de l'Etat à hauteur de 51,4 milliards de francs au total.

Mais il consacrait le complément des surplus de recettes fiscales à de nouvelles dépenses, soit plus de 10 milliards de francs. Votre commission avait alors estimé que de telles dépenses, pour la plupart légitimes, auraient dû, comme cela devrait être la règle, être financées par redéploiement de crédits. Le Sénat, sur sa proposition, avait d'ailleurs adopté un amendement en ce sens.

Ces dépenses nouvelles se répartissaient comme suit :

- au titre du financement des réparations des dommages occasionnés par les différents sinistres ayant frappé la France au cours des derniers mois de l'année 1999 , qu'il s'agisse des inondations, du cyclone Lenny aux Antilles, de la marée noire provoquée par le naufrage de l'Erika, ou des tempêtes : 5,46 milliards de francs en dépenses ordinaires et crédits de paiement, auxquels il convient d'ajouter 2,83 milliards de francs en autorisations de programme, répartis conformément au tableau ci-après :

- au titre du financement de dépenses à caractère exceptionnel : 4,24 milliards de francs , auxquels il convient d'ajouter 1,94 milliard de francs en autorisations de programme ainsi répartis :

Enfin, les dépenses militaires ont fait l'objet d'une ouverture nette de 310 millions de francs en crédits de paiement, et d'une annulation nette de plus de 1,2 milliard de francs en autorisations de programme, alors même que l'exposé des motifs du projet de loi de finances rectificative pour 2000 mentionne la réalisation de « divers mouvements de réallocation de moyens au sein du budget de la défense ».

Seul le budget de la défense était concerné par les annulations de crédits dans le cadre du collectif de printemps, les budgets civils y échappant pour leur part totalement.

Plus précisément, les crédits de paiement ont donné lieu à une ouverture de 2,7 milliards de francs et, dans le même temps, à une annulation de 2,39 milliards de francs. Quant aux autorisations de programme, elles faisaient l'objet d'une ouverture de 6,87 milliards de francs pour assurer le financement de 27  hélicoptères NH-90, mais d'une annulation concomitante de 8,07 milliards de francs, soit près de 9 % des crédits votés en loi de finances initiale.

Une fois encore, le gouvernement privilégiait les dépenses de fonctionnement au détriment des dépenses d'investissement qui, elles, préparent l'avenir.

En effet, cette réduction importante des crédits d'équipements en cours d'exécution 2000 avait suscité de vives réserves de la part de votre commission. A l'occasion de l'examen du budget initial pour 2000, elle avait déjà souligné que, après l'embellie de 1999 consécutive à la « revue des programmes », le niveau des crédits proposés en 2000 pour les titres V et VI ne permettait pas que soient respectées les dispositions de la loi de programmation militaire.

Plus fondamentalement, le renforcement de cette tendance, désormais lourde, amène nos forces à être, aujourd'hui, dans une proportion importante, équipées d'un matériel, soit obsolète, soit hors d'état de fonctionner compte tenu de l'absence de pièces de rechange et dont l'entretien s'avérera nécessairement de plus en plus coûteux et difficile.

B. L'AVEU TARDIF DE 51,4 MILLIARDS DE FRANCS DE « SURPLUS » DE RECETTES

Suite aux nombreuses observations sur la gestion 1999 et à l'irréalisme désormais avéré des estimations de recettes de la loi de finances initiale pour 2000, la loi de finances rectificative du printemps 2000 a procédé à une réévaluation des recettes fiscales et non fiscales à hauteur de 51,4 milliards de francs. Par un heureux hasard, ce chiffre correspondait d'ailleurs exactement à l'estimation du rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale.

La loi de finances rectificative du 13 juillet 2000 a réparti ce premier surcroît de recettes en 40,6 milliards de francs d'allégements d'impôts et 10 milliards de francs de dépenses supplémentaires.

Les allégements d'impôts prévus par la première loi de finances rectificative pour 2000 étaient essentiellement au nombre de trois :

- une réduction de la taxe d'habitation pour un coût de 11 milliards de francs ;

- un allégement de l'impôt sur le revenu à hauteur de 11 milliards de francs (diminution d'un point de chacun des deux premiers taux d'imposition) ;

- la baisse d'un point du taux normal de la TVA pour 18,45 milliards de francs en 2000.

Par ailleurs, hors recettes d'ordre, le produit des recettes non fiscales attendu en 2000 était évalué à 183,3 milliards de francs en loi de finances initiale pour 2000. Ce montant était porté à 198,5 milliards de francs en loi de finances rectificative par intégration du potentiel de 15 milliards de francs de prélèvements votés en 1999 mais non effectués (fonds d'épargne et COFACE) et du report sur le début 2000 du versement de 5 milliards de francs de la CADES attendu fin 1999.

Malgré un discours de transparence, votre rapporteur avait estimé que, compte tenu des effets de reports et de la croissance attendue, cette loi de finances rectificative procédait, concernant les recettes de l'Etat, à une révision a minima .

La seconde loi de finances rectificative pour 2000 allait lui donner raison.

III. LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DU 30 DÉCEMBRE 2000

Les prévisions initiales de 2000 ont une seconde fois été modifiées par la loi de finances rectificative n° 2000-1353 du 30 décembre 2000.

A. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS INTERVENUS AU COURS DE L'ANNÉE 2000

Le décret n° 2000-760 du 1 er août 2000, publié au Journal Officiel du 6 août 2000, portant ouverture de crédits à titre d'avance a procédé à une ouverture de crédits d'un montant limité, soit 152,5 millions de francs.

Cette dotation devait permettre de couvrir le coût de l'organisation du référendum du 24 septembre 2000 portant sur l'élection du Président de la République pour un mandat de cinq ans.

En conséquence, ces crédits ont été affectés au chapitre 20-51 « Conseil constitutionnel » du budget des charges communes, à hauteur de 2,7 millions de francs, et au chapitre 37-61 « Dépenses relatives aux élections » du budget de l'intérieur et de la décentralisation, pour un montant de 149,8 millions de francs.

Dans l'exposé des motifs du projet de collectif d'hiver, le gouvernement indiquait que « cette ouverture a été équilibrée par la constatation de recettes non fiscales supplémentaires ».

B. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS ASSOCIÉS AU COLLECTIF D'HIVER

Le gouvernement indiquait, dans l'exposé des motifs du projet de loi de finances rectificative, que « les dépenses nettes du budget général s'établissent à 1.674 milliards de francs, soit un niveau inchangé par rapport au collectif de printemps. Cette stabilité des dépenses témoigne de la volonté du gouvernement de maîtriser les dépenses de l'Etat en 2000 et de respecter la norme de progression de 0 % en volume qu'il s'est fixée ».

Il insistait ainsi sur le fait que les ouvertures de crédits réalisées par ce projet de loi étaient entièrement gagées par des annulations d'un même montant, soit 22,2 milliards de francs.

Les dépenses dans le collectif d'hiver :

stabilisation ou augmentation de 2,6 milliards de francs ?

La présentation que le gouvernement avait fait des mouvements de crédits opérés dans le projet de loi de finances rectificative, c'est-à-dire la stabilisation du niveau des dépenses permise par des ouvertures et des annulations de crédits d'un même montant, n'avait pas été reprise par le rapporteur général du budget de l'Assemblée nationale, notre collègue député Didier Migaud 5 ( * ) .

Il avait en effet estimé que les ouvertures de crédits nets du budget général s'établissaient à 24,4 milliards de francs, tandis que les annulations associées s'élevaient à 21,8 milliards de francs, soit une augmentation nette des dépenses de 2,6 milliards de francs.

La direction du budget du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, alors interrogée par votre rapporteur général sur cette interprétation divergente, avait indiqué que cette dernière résultait uniquement d'une différence de méthode dans la prise en compte des ajustements au titre des charges de la dette, mais qu'elle ne changeait rien au fond.

Votre commission avait estimé que cette différence d'appréciation revêtait, en réalité, une importance beaucoup plus grande que ne le laissaient penser ces considérations techniques sur le périmètre des dépenses qu'il convient ou non de comptabiliser : il s'agissait en effet de savoir si les dépenses de l'Etat étaient stabilisées ou si elles progressaient.

Il semble bien que la commission des finances de l'Assemblée nationale ait opté pour la seconde branche de l'alternative, en dépit des déclarations du gouvernement.

1. Les ouvertures de crédits

a) Présentation générale des ouvertures de crédits

Le montant total des ouvertures de dépenses ordinaires et crédits de paiement s'élevait, dans le projet de collectif, à 42,73 milliards de francs, dont il convient de retrancher 18,38 milliards de francs au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts, soit 24,35 milliards de francs nets.

Ces ouvertures se répartissaient ainsi :

• + 19,55 milliards de francs au titre des dépenses ordinaires civiles, hors remboursements et dégrèvements ;

• + 3,89 milliards de francs au titre des dépenses civiles en capital ;

• + 910 millions de francs au titre des dépenses en capital.

Par ailleurs, étaient ouvertes des autorisations de programme d'un montant de 12,81 milliards de francs au titre des dépenses en capital civiles, et de 18,34 milliards de francs au titre des dépenses militaires.

Enfin, trois budgets annexes bénéficiaient d'ouvertures de crédits, pour un montant total de 813,2 millions de francs : 800 millions de francs sur le budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) au titre de l'ajustement des prévisions de versement des prestations d'assurance maladie et des prestations familiales ; 9,8 millions de francs sur le budget annexe des monnaies et médailles, et 3,4 millions de francs en dépenses en capital sur le budget annexe de la Légion d'Honneur.

Ces ouvertures de crédits concernaient également les comptes spéciaux du Trésor, soit 3,32 milliards de francs répartis entre :

- 3,3 milliards de francs pour les autorisations temporaires, dont 2,9 milliards de francs au titre du compte spécial du Trésor n° 903-54 « Avances sur le montant des impositions revenant aux départements, communes, établissements et divers organismes », et 400 millions de francs au titre du compte de prêts n° 903-07 « Prêts du Trésor à des Etats étrangers et à l'Agence française de développement en vue de favoriser le développement économique et social » ;

- 17,5 millions de francs pour les opérations définitives, au titre du compte d'affectation spéciale n° 902-00 « Fonds national de l'eau » (section Fonds national de solidarité pour l'eau).

b) Les principales ouvertures de crédits

Les ouvertures de crédits étaient très nombreuses, et avaient un objet extrêmement varié, portant sur des montants parfois réduits.

Il est toutefois possible de présenter les principales d'entre elles.

La majeure partie de ces ouvertures, soit 25,52 milliards de francs (67,3 % du total), portait sur le budget des charges communes :

- 20,69 milliards de francs sur son titre I, dont 2,3 milliards de francs au titre des charges de la dette publique, qui résultent de la remontée des taux d'intérêt et qui mettent en évidence le poids croissant de ce poste de dépenses , et 18,38 milliards de francs au titre des dépenses en atténuation de recettes (9,11 milliards de francs en raison de la révision du tendanciel et de la réforme du barème de l'impôt sur le revenu, et 9,27 milliards de francs, suite à la révision du tendanciel, à la mise en conformité du régime de TVA applicable aux exploitants d'ouvrages de circulation à péages et à l'anticipation de la baisse du tarif du fioul domestique pour les agriculteurs) ;

Les conséquences de la remontée des taux d'intérêt

Une dotation de 1,6 milliard de francs était ouverte sur le chapitre 11-06 du budget des charges communes (bons du Trésor à court et moyen terme) suite à l'augmentation sensible des taux d'intérêt à trois mois constatée depuis un an et qui, selon le gouvernement, « n'avait pas été anticipée », la loi de finances initiale pour 2000 prévoyant des taux à court terme à 2,9 % alors qu'ils étaient alors proches de 5 %.

- 4,83 milliards de francs sur son titre IV : 700 millions de francs représentant l'ajustement de la dotation aux dépenses anticipées au titre de l'épargne logement ; 3,58 milliards de francs pour la majoration de l'allocation de rentrée scolaire (1,72 milliard de francs) et pour le versement au BAPSA (1,86 milliard de francs) ; et 550 millions de francs au titre du versement du complément de l'indemnité allouée aux malades du SIDA.

L'ajustement de la subvention au BAPSA

La hausse de la subvention au BAPSA supportée par le budget des charges communes résultait de plusieurs facteurs :

- les prévisions de dépenses de prestations sociales avaient excédé les évaluations arrêtées en loi de finances initiale pour 2000 : elles ont été supérieures de 800 millions de francs par rapport aux estimations initiales, dont 700 millions de francs au titre des prestations d'assurance-maladie et maternité et 100 millions de francs au titre des prestations familiales ;

- les prévisions de recettes, en revanche, étaient inférieures de 1,41 milliard de francs par rapport aux évaluations initiales (détérioration du résultat agricole liée à des crises sectorielles comme celle de la filière bovine, revalorisation des petites retraites agricoles, baisse des versements d'acomptes de la compensation démographique...).

Parmi les autres ouvertures de crédits les plus conséquentes, il convient de citer :

- 4,12 milliards de francs sur le budget de l'emploi , dont 4,04 milliards de francs pour la compensation d'exonérations de cotisations sociales ;

L'insuffisance des dotations allouées à la compensation

de l'exonération de cotisations sociales

Selon les informations alors communiquées par le gouvernement, « la consommation du chapitre 44-77 [du budget de l'emploi] s'établit à 10,81 milliards de francs fin octobre, pour des crédits ouverts à hauteur de 11,40 milliards de francs, soit un taux de consommation de 95 % pour les dix premiers mois de l'année.

Ce déficit prévisionnel s'explique par le dynamisme économique des années 1999 et 2000, qui se traduit par un accroissement général des dépenses d'exonérations de charges sociales consécutives à la hausse de l'effectif salarié [...] .

En particulier, le dispositif des exonérations dans les zones franches connaît un succès croissant, après un démarrage très lent. On estime les dépenses à 1,5 milliard de francs en 2000, à comparer aux 900 millions inscrits en loi de finances initiale. On peut également citer la baisse moins forte que prévu dans la loi de finances initiale des dépenses consécutives à la loi du 11 juin 1996 dite « loi de Robien ». En effet, le nombre des salariés des entreprises bénéficiant de ce dispositif aujourd'hui fermé s'accroît, compte tenu du dynamisme des recrutements.

Par ailleurs, des crédits sont ouverts pour payer l'ACOSS 6 ( * ) et la MSA 7 ( * ) , au titre d'exonérations relatives à la loi du 13 juin 1998 dite « loi Aubry I » et de la ristourne générale sur les bas salaires payées en 1999. Les modalités de paiement en vigueur avec ces organismes expliquent le décalage des versements, l'apurement des comptes étant effectué en juin de l'année suivant l'exercice comptable. Cependant, le niveau pourtant élevé des reports de 1999 sur 2000 (1 milliard de francs) prévu à cet effet est insuffisant cette année ».

- 3,29 milliards de francs sur le budget de l'agriculture et de la pêche , dont 3,17 milliards de francs en dépenses ordinaires ; il convenait notamment de relever une ouverture de 2,37 milliards de francs au chapitre 44 -53 « Interventions en faveur de l'orientation et de la valorisation de la production agricole » ainsi répartis : 1,73 milliard de francs au titre de l'apurement FEOGA 8 ( * ) et du préfinancement des aides communautaires, 379 millions de francs pour le soutien des filières agricoles, 175 millions de francs afin de réparer les conséquences de la tempête, et 92,7 millions de francs représentant l'avenant aux contrats de plan Etat-régions pour la prise en charge des conséquences de ladite tempête ;

- 948 millions de francs au budget des affaires étrangères , au titre des contributions à divers organismes internationaux ;

Le budget des affaires étrangères :

l'analyse de la commission des finances du Sénat confirmée

939,6 millions de francs ont été ouverts au chapitre 42-31 « Participation de la France à des dépenses internationales - contributions obligatoires », pour acquitter les arriérés et retards de contributions obligatoires françaises essentiellement liés à la hausse du dollar. Les crédits ont été affectés pour un peu plus de la moitié (567 millions de francs) aux opérations de maintien de la paix (Sierra Leone, Kosovo et République démocratique du Congo), et pour 436 millions de francs aux organisations internationales.

Par ailleurs, étaient également ouverts 8,5 millions de francs au chapitre 42-32 « Participation de la France à des dépenses internationales - contributions volontaires » pour financer la contribution française à l'Office de secours et de travaux des Nations-Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (OSTNU) et à la force de protection du Kosovo.

L'importance des abondements nécessaires sur le chapitre 42-31 des contributions volontaires - 939,6 millions de francs au collectif de fin d'année, s'ajoutant à 147 millions de francs en collectif de juin, soit 1.086,6 millions de francs, représentant plus du tiers (34,6 %) de la dotation initiale - confirmait ainsi l'analyse de la commission des finances au cours de l'examen des crédits de la défense.

Certes inscrit à l'état H, ce chapitre fait l'objet d'une sous-évaluation quasi-systématique en loi de finances initiale, notamment liée à des hypothèses de parité irréalistes. De fait, il était à craindre que l'abondement de 723 millions de francs en projet de loi de finances 2001, d'ores et déjà inférieurs au réajustement 2000, se révélât encore insuffisant.

En tout état de cause, les évaluations initiales ne correspondent pas à la réalité, pourtant assez bien mesurée, de la progression des opérations de maintien de la paix et de l'évolution du cours du dollar.

- 947 millions de francs au budget de la santé et de la solidarité au titre du remboursement à la CNAF de sa contribution au fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles (FASTIF).

2. Les annulations de crédits

L'arrêté du 15 novembre 2000 associé au projet de loi de finances rectificative annulait des crédits d'un montant total de 21,82 milliards de francs en crédits de paiement et 5,68 milliards de francs en autorisations de programme.

Par ailleurs, il annulait 9,8 millions de francs sur le budget annexe des monnaies et médailles, et 17,5 millions de francs sur le compte spécial du Trésor n° 902-00 « Fonds national de l'eau ».

Le montant de ces annulations était réparti de la manière suivante :

- 17,83 milliards de francs au titre des crédits de paiement des budgets civils (81,7 % du total des annulations) , dont 5,61 milliards de francs sur le budget de l'emploi, les annulations sur ce budget étant désormais récurrentes, 3,63 milliards de francs sur le budget des charges communes, 1,85 milliard de francs sur le budget de l'agriculture et de la pêche, 1,04 milliard de francs sur le budget de la santé et de la solidarité, 926 millions de francs sur le budget de l'urbanisme et du logement, et 815 millions de francs au titre des transports terrestres ;

- 3,98 milliards de francs au titre des crédits de paiement du budget de la défense (18,3 % du total) , dont 3,73 milliards de francs sur le seul titre V, le gouvernement ayant désormais pris l'habitude de considérer ce dernier comme la variable d'ajustement de ses choix budgétaires.

Les crédits militaires, éternelle variable d'ajustement du budget

Seules les dépenses d'équipement militaires supportaient, dans le projet de collectif, des annulations de crédits, pour un montant global de 3,98 milliards de francs, ce qui portait à 6,37 milliards de francs le total des crédits d'équipement militaire annulés en 2000, soit 7,7 % de la dotation initiale.

De fait, le collectif d'hiver a confirmé une évolution récurrente et constamment dénoncée par la commission des finances du Sénat : d'une part, le rééquilibrage récurrent du titre III, au détriment du titre V, à hauteur de 3,61 milliards de francs sur l'ensemble de l'exercice, d'autre part, une contribution nette du budget militaire à la réduction des dépenses publiques de l'Etat, à hauteur de 2,76 milliards de francs, soit 1,5 % des dotations initiales de la défense (hors pensions).

Les annulations de crédits d'équipement s'inscrivent en fait dans une tendance durable :

Or, le montant de ces annulations correspond lui-même assez généralement au montant des crédits non dépensés en fin d'exercice, ce qui amène à s'interroger à nouveau sur les modalités de conduite et de gestion de la dépense , et surtout sur les facteurs de cette sous-consommation chronique, et toujours aussi peu argumentée, pour des montants considérables au regard de la norme budgétaire moyenne.

3. Des annulations de crédits instructives

Au-delà de cette présentation générale, trois enseignements au moins peuvent être tirés des annulations de crédits réalisées par la loi de finances rectificative du 30 décembre 2000.

a) Des économies de constatation résultant de la bonne tenue de la conjoncture

Chaque année depuis trois ans, votre commission note que le gouvernement est en mesure de réaliser des « économies » grâce à la bonne tenue de la conjoncture qui permet de constater la non-consommation de crédits d'un montant substantiel.

Elle rappelle toutefois qu'une économie se définit comme « l'art de réduire les dépenses », et non comme le moyen de financer des économies : une économie n'est pas un redéploiement et doit se traduire par une diminution du niveau des dépenses, ce que n'a pas fait le collectif. Les redéploiements auxquels avait procédés le gouvernement étaient consécutifs à la constatation de crédits disponibles, en aucun cas à la conduite de réformes structurelles. Des exemples d'annulations de crédits le démontrent amplement.

Toutefois, votre commission avait alors considéré que le gouvernement ne pouvait se satisfaire de cette situation conjoncturelle favorable pour mener sa politique budgétaire, car il prenait le risque considérable de voir l'évolution des dépenses publiques lui échapper en cas de retournement de la conjoncture et de dégradation de la situation de l'emploi.

La situation actuelle confirme malheureusement cette analyse.

b) Des économies réalisées sur des dispositifs prioritaires du gouvernement

Le gouvernement avait réalisé d'importantes économies sur des dispositifs qu'il présentait comme les priorités de son action, ce qui ne laissait pas d'étonner et conduisait à s'interroger sur la sincérité du niveau des crédits inscrits en loi de finances initiale. Ne faut-il dès lors pas, en effet, voir dans la surévaluation des crédits initiaux sur certains chapitres la recherche d'un affichage budgétaire ?

Tel est le cas du budget de l'emploi , sur lequel ont été annulés 5,61 milliards de francs, dont 5,60 milliards de francs en dépenses d'intervention (titre IV).

• Le gouvernement réalisait ainsi des économies d'un montant de 3,51 milliards de francs sur les emplois-jeunes, soit environ 16 % des dotations initiales du chapitre 44-01, indiquant que, « bien que ce dispositif ait contribué à se développer et que de nouveaux postes aient été créés, les crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2000 et les reports de 1999 dégagent un excédent qui ne sera pas consommé d'ici la fin de l'année ».

Les arguments auxquels il recourait pour justifier ces annulations n'ont alors guère paru pertinents à votre commission :

- il évoquait d'abord « un décalage entre les dates de création de postes et les embauches subventionnées, tout particulièrement dans le secteur public, ainsi qu'un taux de rotation des jeunes sur les postes entraînant des périodes de vacance et permettant de réaliser les ajustements proposés » ;

- ensuite, il expliquait que, « à ce phénomène s'ajoute la bonne tenue de l'économie, avec pour conséquence une raréfaction des candidats au dispositif ».

Dans les deux cas, il convenait de s'interroger sur le réalisme d'un objectif de 350.000 emplois-jeunes embauchés à la fin de l'année 2001, à moins que la question se pose plutôt sur la sincérité de cet objectif.

Cette interrogation était d'ailleurs confirmée par un constat similaire établi sur d'autres sections budgétaires supportant le financement d'emplois-jeunes, celle de l'enseignement scolaire par exemple.

Un nombre important de postes d'aides éducateurs ne sont pas pourvus

Le chapitre 36-71, doté de 2.184 millions de francs pour 2000, a connu l'annulation de 71,5 millions de francs et le virement de 154,3 millions de francs vers d'autres chapitres.

Ces montants, qui sont à rapprocher des crédits de rémunération des aides-éducateurs prévus pour l'an 2000 (1.193,4 millions de francs), suggèrent qu' un nombre important de postes d'aides-éducateurs ne sont pas pourvus .

Dans ces conditions, on peut s'interroger sur la pertinence de la hausse des crédits de rémunération des aides-éducateurs prévue dans le projet de loi de finances pour 2001 (+ 5,6 %, à 1.250,8 millions de francs).

Les dispositifs d'insertion des publics en difficulté permettaient également au gouvernement de réaliser d' importantes économies, d'un montant de 1,69 milliard de francs.

Ces économies résultaient, selon le gouvernement, « de l'amélioration de la conjoncture et du recul de l'exclusion », se manifestant par des flux d'entrées dans les dispositifs moindres que prévu.

Le budget de la santé et de la solidarité donnait également lieu à la réalisation de surprenants arbitrages de la part du gouvernement au regard des priorités qu'il affiche par ailleurs, les crédits qui devaient financer la couverture maladie universelle (CMU) venant finalement abonder les dépenses de RMI. Cette évolution montre bien, du reste, que l'amélioration de la situation du marché du travail s'accompagne d'une hausse des crédits destinés à « l'insertion par l'assistance ».

Les « surprenants » arbitrages du gouvernement sur le budget de la santé : financer le RMI avec les crédits de la couverture maladie universelle.

Le décret de virement du 8 novembre 2000 a annulé 749,5 millions de francs de crédits destinés à la couverture maladie universelle ce qui a permis de majorer de 200 millions de francs les crédits de l'allocation adultes handicapés (AAH), et de 520,7 millions de francs ceux du RMI et de l'allocation de parents isolés (API), ainsi que de dégager 5 millions de francs pour les bourses d'enseignement des professions sociales, et d'affecter 23,8 millions de francs au groupement d'intérêt public « Carte professionnel de santé » (6,4 millions de francs) et au contrat de développement de Wallis et Futuna (17,4 millions de francs).

Par ailleurs, l'arrêté du 15 novembre 2000 a annulé 1,037 milliard de francs de crédits, dont un milliard de francs au titre de la couverture maladie universelle.

Le jeu cumulé du décret de virement, de l'arrêté d'annulation et du collectif budgétaire a ainsi permis de réaliser 1,75 milliard de francs d'économies sur la couverture maladie universelle.

A l'inverse, les crédits de l'AAH ont progressé de 850 millions de francs (permettant d'apurer pour 400 millions de francs de dettes et de couvrir pour 450 millions les besoins apparus en cours d'exercice), ceux du RMI de 520 millions de francs (400 millions pour les dettes, 120 millions pour les besoins qui ne sont cependant pas soldés) et 400 millions pour l'API permettant de solder les dettes même si un doute subsiste sur les besoins réels pour 2000.

c) La médiocre qualité de la budgétisation initiale des crédits

Les annulations de crédits alors demandées peuvent également résulter de la médiocre qualité de la budgétisation initiale des dotations , qui amène, en fin d'exercice, à procéder à la révision du niveau de ces dernières.

Il n'est donc pas possible de parler d'économies, puisqu'un meilleur calibrage de ces dotations aurait permis d'inscrire un montant moins élevé de dépenses en loi de finances initiale.

Ce phénomène a d'ailleurs été reconnu par l'Assemblée nationale. Dans son rapport précité sur le projet de collectif, le rapporteur général du budget écrivait, à propos des économies réalisées par le gouvernement, qu'elles « sont incontestablement facilitées par les contrats de gestion avec les ministères, associés à un souci de rigueur qui commande de résorber les « trésoreries dormantes » et de réduire les crédits non consommés qui ne correspondent manifestement à aucun besoin ». Il reconnaissait ainsi que sont inscrits au budget de l'Etat « des crédits qui ne correspondent manifestement à aucun besoin ».

Les incertitudes des méthodes de prévision et de calcul du montant des dotations budgétaires peuvent également expliquer l'existence de crédits non consommés.

La question se pose avec d'autant plus d'acuité lorsque les annulations sont récurrentes comme c'est le cas, par exemple, des aides au logement.

Les aides au logement ont fait l'objet d'annulations de crédits récurrentes

Les annulations de crédits réalisées sur le budget de l'urbanisme et du logement étaient élevées puisqu'elles atteignaient 926 millions de francs, dont 404 millions de francs pour les aides personnelles et 497 millions de francs pour le chapitre construction et amélioration de l'habitat.

Il s'agit de chapitres qui font l'objet d'annulations récurrentes depuis quelques années. Les crédits nécessaires pour les aides personnelles diminuent du fait de l'amélioration de la conjoncture économique et de la baisse des allocataires et les crédits destinés à la construction sociale sont annulés du fait des mauvais résultats de la construction sociale.

Tel aurait également été le cas, si l'on en croit le gouvernement, de certains crédits militaires.

En effet, dans son rapport précité, notre collègue député Didier Migaud, rapporteur général du budget, faisait état d'une réponse apportée par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie concernant les annulations intervenues sur les crédits de paiement du budget de la défense. La réponse du ministère permettait de tirer deux conclusions des annulations réalisées :

- il était notamment indiqué que « le niveau des annulations décidé par le gouvernement constitue une condition de l'équilibre de la loi de finances rectificative », ce qui signifie non seulement que l'amputation des crédits militaires est une nécessité, mais aussi que le niveau desdits crédits est surévalué en loi de finances initiale de façon à pouvoir gager des ouvertures de crédits traduisant l'apparition, presque inévitable en collectif, de besoins à financer ;

- cette hypothèse était du reste confirmée par la suite de la réponse du ministère, qui précisait que « la répartition par chapitre de ces annulations a été déterminée [...] en fonction des besoins réels en moyens de paiement au titre des actions et programmes financés [...] . Les annulations opérées sur les chapitres 51-61, 53-81 et 55-11 ne remettent pas en cause le bon déroulement de ces programmes ». Si cette dernière assertion est exacte, pourquoi, dès lors, avoir inscrit ce montant de crédits en loi de finances initiale ?

Les dotations initiales sont ainsi souvent éloignées de la réalité des besoins.

Votre commission peut d'ailleurs citer d'autres exemples, concernant certes des montants plus faibles, mais illustrant tout aussi bien ce phénomène, tel le budget de l'éducation nationale.

Budget de l'enseignement scolaire

L'annulation de 74,5 millions de francs sur le chapitre 43-71 « Bourses, secours d'études » et le virement de 32,5 millions de francs de ce chapitre vers d'autres chapitres confirmaient les observations du rapporteur spécial de la commission des finances, selon lesquelles ces crédits sont sous-consommés, faute notamment de modalités d'allocation efficaces pour les fonds sociaux (fonds social collégien, fonds social lycéen, fonds cantines).

Budget de l'enseignement supérieur

L'annulation de 100 millions de francs sur le chapitre 43-71 « Bourses, secours d'études » témoignait de la sous-consommation de certaines bourses, en raison notamment d'un défaut d'information des étudiants, comme l'avait relevé le rapporteur spécial de la commission des finances. Par exemple, seules 5.368 allocations d'études ont été allouées en 1999-2000, alors que 7.000 étaient prévues.

Enfin, l'annulation de 56,1 millions de francs d'autorisations de programme et de crédits de paiement au chapitre 56-11 était préoccupante pour la mise en place du plan Université du troisième millénaire (U3M), puisque les investissements de construction sous maîtrise d'ouvrage Etat se trouvent ainsi amputés de 12 %.

C. UNE PROGRESSION DES RECETTES FISCALES TENDANCIELLES DE 40,6 MILLIARDS DE FRANCS

Dans la seconde loi de finances rectificative, les réévaluations de recettes fiscales tendancielles inscrites ont été très élevées, 40,6 milliards de francs de plus que les estimations de la première loi de finances rectificative . Ces fortes réévaluations traduisaient les très bons résultats enregistrés dans les situations budgétaires mensuelles.

Les plus fortes réévaluations portaient sur la TVA (+ 20 milliards de francs), l'impôt sur les sociétés (+ 12 milliards de francs) et l'impôt sur le revenu (+ 7,6 milliards de francs).

Cependant les évaluations étaient légèrement modifiées, en raison de la prise en compte de l'impact en 2000 des mesures fiscales du projet de loi de finances initiale pour 2001 et de plusieurs mesures fiscales contenues dans le collectif budgétaire. Ces mesures ont eu pour effet de réduire les surplus de TVA de 20 milliards de francs à 15,3 milliards de francs et de diminuer les recettes de TIPP de 3,3 milliards de francs.

Effet des mesures du PLF 2001 sur les recettes en 2000

(en milliards de francs)

Effet sur 2000

Mesures fiscales du PLF 2001

- 1,8

Attribution au FOREC des droits sur les tabacs

- 3

Décision de la CJCE sur la soumission des sociétés d'autoroutes à la TVA

- 4,2

Mise en oeuvre à compter du 1er octobre 2000 du mécanisme stabilisateur de la fiscalité pétrolière

- 3

Abaissement de la fiscalité sur le fioul dès le 1er janvier 2000

- 0,2

TOTAL

- 12,2

Au total, l'écart à la loi de finances rectificative de juillet pour les recettes fiscales nettes se réduisait donc de 40,6 milliards de francs à environ 28,5 milliards de francs.

Les révisions de recettes pour 2000 associées aux deux collectifs budgétaires

(en milliards de francs)

1999

LFI 2000

LFR 2000 (juillet)

PLFR 2000 (décembre)

Ecart

1999/2000

Recettes fiscales nettes

1565,6

1551,2

1546,4

1574,8

28,5

0,6 %

IR

333,6

337,8

338,7

346,3

7,6

3,8%

IS

229,7

229,3

243,7

255,7

12

11,3%

TIPP

161,7

167,1

167,1

163,8

-3,3

1,3%

TVA

671,1

681,2

672,1

687,4

15,3

2,4%

Recettes non fiscales*

168,4

183,3

198,5

180,3

-18,42

7,1%

Prélèvements sur recettes

-267,7

-288

-288,3

-284

4,3

6,1%

Recettes nettes du budget général**

1466,4

1446,5

1456,6

1471,1

14,3

0,3%

* Hors recettes d'ordre

** Hors fonds de concours

Votre rapporteur général avait estimé que ces réévaluations démontraient une nouvelle fois combien la loi de finances initiale pour 2000 était fondée sur des chiffres irréalistes .

Les recettes tendancielles du budget général, c'est-à-dire hors prise en compte des mesures d'aménagements de droit, auront été réévaluées successivement de 51,4 milliards de francs dans la première loi de finances rectificative et de 40,6 milliards de francs dans second collectif budgétaire, soit au total 92 milliards de francs d'écart avec les évaluations de la loi de finances initiale.

Dans le second collectif budgétaire, le gouvernement a par ailleurs revu très fortement à la baisse les recettes non fiscales pour 2000 (- 18 milliards de francs), pour aboutir au chiffre révisé de 180 milliards de francs.

Ainsi, la plus-value enregistrée finalement en recettes nettes était encore réduite de 28,5 milliards de francs à 10 milliards de francs. Compte tenu de la diminution des prélèvements sur recettes au profit du budget européen, la hausse des recettes nettes du budget général s'élèverait à 14,3 milliards de francs par rapport au premier collectif budgétaire.

Le mouvement sur les recettes fiscales marquait un retour en arrière après la réévaluation de la loi de finances rectificative et traduisait le choix de mettre en réserve des recettes pour l'exercice 2001, dont l'exécution s'annonçait donc plus incertaine.

Les prévisions de recettes non fiscales, variable éminemment politique, ont donc varié en 2000 au gré des hésitations gouvernementales.

RECETTES DU BUDGET GENERAL
de la prévision à l'exécution de 2000

(en millions de francs)

Désignation des recettes

Loi

de finances

initiale

Loi
de finances
rectificative
du 13-07-00

Loi
de finances
rectificative
du 30-12-00

Total
des prévisions
au
31-12-00

Projet

de loi
de
règlement

Écart PLR-
Loi
de finances
initiale
rectifiée

(I)

(II)

(IV)

V=(III+IV)

(VI)

(VI-V)

A. Recettes fiscales

Impôt sur le revenu

337 790

+ 890

+ 7 620

346 300

349 318

3 018

Autres impôts directs perçus par voie d'émission de rôles

55 300

- 1 340

- 460

53 500

37 653

- 15 847

Impôt sur les sociétés (1)

267 350

17 350

+ 15 000

299 700

312 736

13 036

Autres impôts directs et taxes assimilées

90 615

- 115

+ 3 500

94 000

95 403

1 403

Taxe intérieure sur les produits pétroliers

167 140

»

- 3 383

163 757

159 205

- 4 552

Taxe sur la valeur ajoutée

858 246

- 8 199

+ 23 323

873 370

874 164

794

Enregistrement, timbre, autres contributions taxes indirectes

106 011

+ 1 659

+ 1 230

108 900

114 334

5 434

TOTAL A.

1 882 452

+ 10 245

46 830

1 939 527

1 942 813

3 286

A déduire : dégrèvements et remboursements d'impôts (2)

331 230

+ 15 110

+ 18 380

364 720

368 208

3 488

TOTAL A (net)

1 551 222

- 4 865

28 450

1 574 807

1 574 605

- 202

B. Recettes non fiscales

200 512

+ 15 210

- 15 469

200 253

200 148

- 105

C. Fonds de concours et recettes assimilées

Mémoire

Mémoire

»

»

39 209

39 209

TOTAL A à C (net)

1 751 734

10 345

12 981

1 775 060

1 813 962

38 902

D. Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des Collectivités locales

- 189 536

- 250

- 27

- 189 813

- 189 254

559

E. Prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des Communautés européennes

- 98 500

»

+ 4 300

- 94 200

- 96 162

- 1 962

TOTAL DES PRELEVEMENTS

- 288 036

- 250

+ 4 273

- 284 013

- 285 416

- 1 403

TOTAL GENERAL NET ( hors fonds de concours)

1 463 698

+ 10 095

+ 17 254

1 491 047

1 489 337

(3)

- 1 710

(1) Y compris, en exécution, l'impôt sur les sociétés perçu par voie de rôle, suivi en prévisions budgétaires de la loi de finances à la ligne de recettes :« 0002 - Autres impôts directs perçus par voie d'émissions de rôles ».

(2) Les dégrèvements et remboursements d'impôts s'entendent hors art.50 du chapitre 15-02.

(3) Pour mémoire total des recettes y compris fonds de concours 1 528 546 millions de F.

IV. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS OPÉRÉS PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE

A. LES REPORTS DE CRÉDITS

Au sein du budget général, les crédits reportés de 1999 sur 2000 s'élèvent à 73,10 milliards de francs, soit une progression importante de 15,1 % par rapport aux reports de 1998 sur 1999, qui avaient déjà augmenté de 16,5 % par rapport aux reports précédents.

Ces reports se répartissent en :

- 64,78 milliards de francs au titre des budgets civils (+ 13,6 %), dont 40,69 milliards de francs en dépenses en capital ;

- et 8,33 milliards de francs au titre du budget militaire (+ 26,2 %).

Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour des comptes note que, « comme au cours de l'exercice précédent, mais avec une intensité accrue, cette évolution est principalement imputable à la consolidation délibérée et systématique des reports au niveau atteint au cours de l'exercice antérieur, recherchée par la régulation budgétaire mise en oeuvre en 1999 sous la formule des contrats de gestion, ainsi qu'à l'extension des possibilités de reports de crédits de fonctionnement. Il s'y ajoute le fait que, dans de nombreux cas, les mêmes chapitres supportent, d'une année sur l'autre des reports de montant élevé, dus à un désajustement chronique entre le niveau des dotations en loi de finances et celui des consommations prévisibles ».

B. LES FONDS DE CONCOURS

Le volume des fonds de concours rattachés au budget général s'est élevé à 39,02 milliards de francs en 2000, contre 44,94 milliards de francs en 1999, soit un recul de 13,2 %.

C. LES ANNULATIONS DE CRÉDITS

Pour 2000, au sein du budget général, 24,41 milliards de francs de crédits ont été annulés, dont 2,57 milliards de francs par le collectif de printemps, et 21,83 milliards de francs par celui d'hiver.

Ces annulations sont en recul très net de 29,2 % par rapport à 1999 (34,5 milliards de francs) et un peu supérieures au niveau atteint en 1998 (21,1 milliards de francs).

Elles ont porté :

- pour 15,51 milliards de francs sur les dépenses civiles ordinaires ;

- pour 91 millions de francs sur les dépenses civiles en capital ;

- pour 6,37 milliards de francs sur les dépenses militaires.

V. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE RÈGLEMENT

A. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS CONTENUS DANS LA LOI DE RÈGLEMENT

Le présent projet de loi portant règlement définitif du budget de 2000 demande, au titre du budget général, l'ouverture de crédits à hauteur de 7,77 milliards de francs, et l'annulation de crédits non consommés de 7,09 milliards de francs, contre, respectivement, 16,4 milliards de francs et 10,1 milliards de francs en 1999.

Les cinq principales ouvertures de crédits sont les suivantes :

- 3,85 milliards de francs au titre des dépenses en atténuation de recettes ;

- 1,22 milliard de francs au titre d'encouragements à la construction immobilière ;

- 831 millions de francs au titre du Fonds national chômage ;

- 663 millions de francs au titre de la dette publique ;

- 489 millions de francs au titre des cotisations et prestations sociales.

Quant aux annulations de crédits non consommés, elles s'imputent sur les dépenses ordinaires civiles à hauteur de 6,63 milliards de francs, dont 4,29 milliards de francs sur le titre III, et sur les dépenses militaires ordinaires à hauteur de 453 millions de francs.

B. LES RECETTES FIGURANT DANS LA LOI DE RÈGLEMENT

Les données de la loi de règlement sont très proches de celles du second collectif budgétaire pour 2000.

Les recettes nettes du budget général, hors fonds de concours, atteignent 1.489,3 milliards de francs (1.491 milliards en seconde loi de finances rectificative), les recettes fiscales nettes s'élèvent à 1.574,6 milliards de francs (1.574,8 en seconde loi de finances rectificative) après déduction des remboursements et dégrèvements (368,2 milliards de francs contre 364,7 milliards de francs prévus en seconde loi de finances rectificative).

Les recettes non fiscales atteignent 200,1 milliards de francs, soit l'équivalent de la prévision en seconde loi de finances rectificative.

Enfin, les prélèvements sur recettes au profit des collectivités locales et de l'Union européenne s'élèvent à 285,4 milliards de francs (284 milliards de francs en seconde loi de finances rectificative).

CHAPITRE III :

LES RECETTES ET LES DÉPENSES

I. LES RECETTES

En 2000, les recettes totales du budget général ont augmenté en exécution de 0,9 % contre 6,4 % en 1999. Les recettes fiscales nettes n'ont augmenté que de 0,6 % alors que les recettes non fiscales ont fait un bond de 18,8 % conformément aux chiffres figurant dans le tableau ci-dessous.

Evolution des recettes globales du budget général entre 1999 et 2000.

Exécution 2000

Exécution 1999

Ecart 2000/1999 en milliards de francs

Ecart 2000/1999 en %


Ecart 99/98 en %

Recettes fiscales brutes

1.942,8

1.894,8

48,0

2,5

7,1

Remboursements et dégrèvements

- 368,2

- 329,1

- 39

11,9

3,8

Produit fiscal net dont :

1.574,6

1.565,6

9,0

0,6

7,8

Impôt sur le revenu

349,3

333,6

15,7

4,7

9,7

Impôt sur les sociétés (net)

263,9

229,8

34,1

14,8

24,4

TIPP

159,2

161,7

-2,5

-1,5

5,1

TVA (nette)

687,1

671,1

10,0

2,3

4,5

Recettes non fiscales (hors FSC)

200,1

168,4

31,7

18,8

6,8

Prélèvements sur recettes

-285,4

- 267,7

-17,7

6,6

5,2

au profit des collectivités territoriales

-189,3

- 176,6

-12,7

7,2

8,5

au profit de l'Union européenne

-96,2

- 91,1

-5,0

5,5

- 0,5

Total des recettes nettes

1.528,5

1511,5

17

6,6

8,2

Fonds de concours

39,2

45,2

-6,0

-13,2

- 30,5

Total des recettes du budget général

1.508,4

1.494,5

13,9

0,9

6,4

A. UNE FAIBLE PROGRESSION DES PRINCIPALES RECETTES FISCALES

Les recettes fiscales brutes (1.942,8 milliards de francs) ont augmenté de 2,5 % en 2000 (48 milliards de francs en valeur) c'est-à-dire bien moins qu'en 1999 (+ 7,1 % ) et encore en dessous de la progression moyenne observée sur la période 1996-2000 (+ 4,6 % par an). Les recettes fiscales représentent donc 89 % des recettes brutes du budget général en 2000, contre 89,9 % en 1999.

L'augmentation du produit fiscal net est encore plus faible puisque après déduction des remboursements et dégrèvements, il n'est que de 0,6 % contre 7,8 % en 1999.

Cette faible progression s'explique à la fois par une pause dans l'augmentation des prélèvements constatée en 1999 et par le transfert d'importantes recettes fiscales à la Sécurité sociale (pour 45,2 milliards de francs).

1. Les impôts perçus par voie de rôle

Après une augmentation jugée « exceptionnellement rapide » par la Cour des comptes en 1999 (+ 9,8 %) l'impôt sur le revenu croît encore de 4,7 % en 2000, malgré la baisse d'un point des taux des deux premières tranches du barème décidée par la première loi de finances rectificative du 13 juillet 2000.

Son produit s'élève ainsi à 349,3 milliards de francs soit 15,8 milliards de francs d'augmentation par rapport à 1999, résultant d'une croissance spontanée de 30,2 milliards de francs et d'aménagements de droit de 13,7 milliards de francs.

Compte tenu des allègements décidés en cours d'année, l'écart par rapport à la prévision de la loi de finances initiale est seulement de 11,5 milliards de francs, soit 3,4 % et de 3 milliards de francs par rapport à la seconde loi de finances rectificative. Mais en l'absence des mesures de correction prises en cours d'année, l'écart entre l'évolution spontanée de l'impôt et les prévisions de la loi de finances initiale aurait été très important, soit 25,2 milliards de francs (7 % de l'impôt).

Concernant l'impôt sur les sociétés , malgré l'effet supposé de la suppression de la majoration exceptionnelle de 10 %, les recettes ont été très dynamiques en 2000 : l'impôt brut a progressé de 8,7 % à 296,2 milliards de francs et l'impôt net a atteint 263,9 milliards de francs soit une hausse de 7,3 %.

En 1999 l'impôt sur les sociétés avait connu une progression exceptionnelle de 27,4 %, ce qui fait dire au gouvernement que « la croissance continue du produit net de l'impôt sur les sociétés se modère en 2000 ».

Les imprécisions dans l'évaluation de l'impôt sur les sociétés ont été importantes en 2000 comme en 1999. En 1999, l'écart était de 14,4 % (237,3 milliards de francs en loi de finances initiale, 271,4 milliards de francs en exécution). En 2000, la loi de finances initiale prévoyait 267,35 milliards de francs contre 296,2 milliards de francs en exécution (+ 10,8 %).

Le produit de l'impôt de solidarité sur la fortune s'élève à 15,9 milliards de francs contre 12,7 milliards de francs en 1999, soit un montant sensiblement plus élevés que les prévisions de la loi de finances initiale (13,6 milliards de francs). L'impôt de solidarité sur la fortune a progressé de 25 % en un an, ce qui résulte de l'accroissement de la valorisation du patrimoine net imposable de 23,1 % entre le 31 décembre 1998 et le 31 décembre 1999.

2. Les autres impôts

Concernant les impôts indirects, la TVA nette a nettement ralenti puisqu'elle n'a progressé que de 2,4 % (+ 4,5 % en 1999) soit 687 milliards de francs. La baisse d'un point du taux normal de la TVA au 1er avril 2000 a pesé sur ces résultats.

De même, la TIPP diminue de 1,5 % par rapport à 1999 en raison du mécanisme dit de « TIPP flottante ».

B. DES RECETTES NON FISCALES TOUJOURS AUSSI « FLUCTUANTES »

Comme votre commission l'a souligné à plusieurs reprises, les recettes non fiscales font régulièrement l'objet d'un « pilotage politique » et obéissent donc à des « spécificités fortes ».

En 1999, un montant important de recettes non fiscales n'avait pas été prélevé, afin de diminuer d'autant les recettes de l'Etat en fin d'année. Comme le souligne le rapport de la Cour des Comptes, « certains reports de fin d'exercice ou certains retards de comptabilisation ont eu pour effet d'imputer sur l'exercice 2000 des créances constatées en 1999 ». Elle chiffre le montant des reports à 6,5 % du résultat présenté en 1999.

En 2000, les recettes non fiscales progressent donc de 18,8 %, soit une augmentation de 32 milliards de francs par rapport à l'exécution 1999. Cette progression s'explique par les reports, par des opérations de rebudgétisation et par l'augmentation de presque tous les titres (produits des participations, taxes, revenus du domaine...).

Enfin, en 2000, les recettes des fonds de concours ont diminué de 13,1 %, en raison d'opérations de rebudgétisation de rémunérations de personnel et de dépenses de fonctionnement et les prélèvements sur recettes ont augmenté de 6,6 %. Cette dernière augmentation s'explique par le remplacement par des prélèvements de certaines taxes prélevées au profit des collectivités locales et par l'augmentation de 4,5 % des dépenses communautaires.

II. LES DÉPENSES

A. LE BUDGET GÉNÉRAL

Les dépenses du budget général pour 2000 se sont élevées à 2.089,05 milliards de francs, soit une progression de 1,6 % par rapport à 1999, qui est de moitié inférieure à celle de l'année précédente (+ 3,2 %).

Les dépenses ordinaires ont progressé de 1,5 %, après + 3,4 % en 1999, pour s'établir à 1.915,78 milliards de francs, et les dépenses en capital ont crû de 2,9 %, après n'avoir progressé que de 1,3 % l'année précédente, s'élevant à 173,27 milliards de francs. Toutefois, l'augmentation des dépenses militaires en capital a été moins importante que celle de l'ensemble de ce type de dépenses, soit + 1,6 %, à 70,11 milliards de francs.

L'appréciation critique de la Cour des comptes sur les contrats de gestion

Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000, la Cour des comptes consacre des développements spécifiques aux « contrats de gestion », que votre commission avait fort opportunément qualifiés de « version politiquement correcte du gel de crédits ».

La Cour estime que les contrats de gestion constituent une « nouvelle forme de régulation budgétaire », et rappelle que, en 2000, ils « ont été reconduits avec l'objectif annoncé de s'assurer d'une stricte maîtrise des dépenses publiques ».

Elle se montre en réalité extrêmement réservée sur cette procédure nouvelle : « la préoccupation de parvenir à une maîtrise accrue de la progression des dépenses de l'Etat, qui sous-tend ce dispositif, est légitime en soi, de même que la méthode employée qui se propose d'arrêter de manière conjointe avec les ministères dépensiers les principes et les modalités pratiques d'exécution des crédits. Il reste que le recours systématique à la mise en réserve de crédits, suivie d'annulations et, plus encore, la stabilisation des reports à l'exercice suivant au niveau des reports de l'exercice précédent faussent singulièrement la portée de l'autorisation parlementaire budgétaire délivrée dans le cadre de la loi de finances initiale ».

La Cour des comptes considère que « la régularité du dispositif des contrats de gestion au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959 est discutable à plusieurs titres » :

- la « mise en réserve » de crédits n'est pas prévue par l'ordonnance, tandis que la régulation est confiée aux contrôleurs financiers centraux dont ce n'est pas la mission ;

- le concept des annulations de crédits est dénaturé, l'ordonnance ne prévoyant que des annulations consécutives au non-emploi des crédits ;

- la pratique des contrats de gestion s'inscrit dans un cadre pluriannuel qui « n'est pas compatible avec le respect du principe du respect de l'annualité budgétaire » ;

- les contrats de gestion sont parfois conclus trop tardivement.

1. Les dépenses du titre I

Les dépenses du titre I s'établissent, en 2000, à 625,69 milliards de francs, soit une augmentation de 5,9 % par rapport à 1999, après une progression de 3,2 % cette année-là.

a) La dette publique

La charge brute de la dette s'élève à 254,04 milliards de francs en 2000, en hausse de 3,8 % par rapport à 1999, où elle avait diminué de 2,7 %, « fait sans précédent depuis plus de 15 ans » selon la Cour des comptes. En 1998, elle s'était accrue de 4,4 %. Il semble donc bien que la situation observée en 1999 constitue une exception au sein d'une tendance haussière.

« Après le recul exceptionnel de 1999 », selon l'expression de la Cour des comptes, le service de la dette négociable s'établit à 244,35 milliards de francs en 2000, contre 232,50 milliards de francs en 1999, soit une augmentation de 5,1 % (après une baisse de 2,4 % en 1999), c'est-à-dire « une progression jamais atteinte depuis 1996 ».

La Cour des comptes explique que « outre l'effet taux résultant de la hausse des taux d'intérêt, l'impact des rachats de dette vient tempérer l'effet volume, variable selon les maturités des titres rachetés. Les rachats de valeur 2000 ont dégagé une économie, en termes budgétaires, de 400 millions de francs. En revanche, les opérations de rachat effectuées sur des valeurs de maturité supérieure ont alourdi la charge de la dette 2000 à hauteur de 1,9 milliard de francs ».

La charge de la dette négociable comprend deux parties :

- le service des rentes amortissables, des emprunts d'Etat et des obligations du trésor à moyen et long terme : le montant des dépenses d'intérêts sur obligations assimilables du Trésor (OAT) s'élève à 180,03 milliards de francs, en hausse de 6,2 % par rapport à 1999, et représente 73,7 % de la charge de la dette négociable ; les charges d'intérêts sur OAT à taux fixe, avec 168,41 milliards de francs (+ 4,4 %), constituent l'essentiel de ces dépenses ;

- les intérêts des bons du Trésor à court et moyen terme et les valeurs assimilées : leur montant s'établit à 64,31 milliards de francs, soit une progression de 2,1 % par rapport à 1999, où il avait diminué de 13,4 % ; la part principale concerne les bons du Trésor à intérêts annuels (BTAN), dont la charge d'intérêts s'élève à 51,97 milliards de francs (- 6,8 % du fait de la baisse des taux de 1995 à 1999) ; quant à la charge d'intérêts afférente aux bons du Trésor à taux fixe (BTF), qui s'établit à 12,35 milliards de francs, elle progresse fortement de 70,8 %, en raison d'un surcroît d'émissions nettes et de l'effet de la hausse des taux en 2000.

En revanche, la charge de la dette non négociable diminue, puisque la dépense s'établit à 9,4 milliards de francs, après 10,35 milliards de francs en 1999, soit un recul de 9,2 %. La Cour des comptes note que « la tendance structurelle à la baisse du service de la dette non négociable, du fait de la réduction des encours, s'est accentuée en raison du transfert des comptes courants postaux ». La rémunération servie à La Poste en est restée l'élément principal, avec 7,3 milliards de francs.

Enfin, la très forte diminution (- 98,7 %) des charges diverses résultant de la gestion de la dette s'explique par la « mise en sommeil » du fonds de stabilisation des rentes (FSR) et par la suppression des commissions de services financiers pour les emprunts et obligations. Les dépenses passent ainsi de 1,8 milliard de francs en 1999 à 24,2 millions de francs.

Quant à la charge nette de la dette, elle s'établit à 234,1 milliards de francs, soit une reprise à la hausse de 2,8 % par rapport à 1999 (227,7 milliards de francs), année au cours de laquelle elle avait été stabilisée. En 2000, les émissions ont en effet connu un niveau élevé.

b) Les dépenses de garantie

Les dépenses liées à la garantie de l'Etat poursuivent leur évolution erratique, observée depuis 1993 : elles s'établissent à 920 millions de francs en 2000, après 14,6 milliards de francs en 1999, 1,2 milliard de francs en 1998, 6,5 milliards de francs en 1997, 1,5 milliard de francs en 1996 et 10 milliards de francs en 1995.

La Cour des comptes note que « les opérations effectuées par la COFACE pour le compte de l'Etat n'apparaissent toujours distinctement ni dans les comptes de l'Etat [...] ni dans les comptes de la COFACE ». Elle ajoute : « contrairement aux autres remises de dettes, celles des dettes gérées par la COFACE (2,8 milliards de francs) ne sont pas retracées dans le budget de l'Etat et dans sa comptabilité ».

c) Les dépenses en atténuation de recettes

Les dépenses en atténuation de recettes ont atteint 370,7 milliards de francs en 2000, dont 368,21 milliards de francs au titre des remboursements et dégrèvements d'impôts, contre 329,14 milliards de francs en 1999, soit une forte progression de 11,9 %, nettement supérieure à celle de 1998, + 3,8 %.

Les remboursements, dégrèvements et restitutions sur impôts directs progressent de 13,9 % (+ 5,4 % en 1999), pour s'établir à 177,1 milliards de francs en 2000 après 155,5 milliards de francs en 1999. Les remboursements et dégrèvements d'impôts locaux représentent le poste le plus important, soit 70,5 milliards de francs, cette forte progression de 19,2 % résultant essentiellement de la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation. Au sein des dégrèvements et remboursements sur contributions directes revenant à l'Etat, deux postes connaissent une vive augmentation : d'une part, les admissions en non-valeur, avec 15,9 milliards de francs (+ 23,5 %), et, d'autre part, les restitutions d'impôts sur les sociétés, soit 48,8 milliards de francs (+ 17,1 %).

Ceux sur produits indirects comprennent essentiellement les remboursements de TVA, qui s'établissent à 187 milliards de francs, soit une progression de 9,7 %, après celle de 2,5 % en 1999. Cette évolution résulte de l'incidence de l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 12 septembre 2000 qui a conduit à modifier le régime de TVA applicable aux sociétés autoroutières, mais aussi de l'impact de diverses mesures nouvelles adoptées en matière de TVA.

2. Les dépenses de fonctionnement

Les dépenses nettes du titre III s'établissent à 800,30 milliards de francs en 2000, contre 780,60 milliards de francs en 1999, soit une progression « soutenue » de 2,5 %, après + 1,8 % en 1999. En glissement annuel sur la période 1997-2000, la progression des crédits du titre III est de 2,6 %.

Ces dépenses se répartissent comme suit :

- 689,18 milliards de francs pour les budgets civils, soit + 2,7 % au lieu de + 2,1 % en 1999 (+ 2,8 % en glissement annuel sur la période sous revue) ;

- 111,11 milliards de francs pour les services militaires, en progression de 1,6 % par rapport à 1999, où ils avaient crû de 0,2 % (+ 1,5 % en glissement annuel depuis 1997).

a) Les dépenses de personnel

Les dépenses de personnel représentent environ 84 % des crédits inscrits au titre III. Elles s'établissent, en 2000, à 671,76 milliards de francs, et progressent de 2,4 %, soit près de 16 milliards de francs supplémentaires, par rapport à 1998, où elles avaient augmenté de façon quasi-similaire (+ 2,6 %).

Elles se répartissent en 585,99 milliards de francs au titre des dépenses civiles de personnel (+ 2,6 %, et + 2,9 % en glissement annuel depuis 1997), et en 85,77 milliards de francs au titre des dépenses militaires de personnel (+ 1,1 %, mais + 2,8 % par an sur la période).

Les dépenses de personnel civil et militaire, qui recouvrent les trois premières parties du titre III, comportent :

- les rémunérations d'activité : 402,20 milliards de francs (+ 3,0 %) ;

- les pensions et allocations : 192,41 milliards de francs (+ 4,8 %, après + 3,4 % en 1999) ;

- les charges sociales : 77,15 milliards de francs (- 5,5 %).

Le coût des rémunérations d'activité et des pensions évolue nettement plus rapidement que l'ensemble des dépenses du titre III. Une telle évolution ne peut que susciter de vives inquiétudes quant à la capacité du gouvernement à maîtriser la progression des « frais de fonctionnement » de l'Etat.

Plusieurs facteurs expliquent cette augmentation.

La valeur de l'indice de la fonction publique a été revalorisée une seule fois en 2000, alors qu'elle l'avait été à deux reprises en 1999, soit le 1 er décembre pour 0,5 %. Cela a engendré une augmentation des rémunérations d'activité de 3,5 milliards de francs, et des pensions de 1,8 milliard de francs.

En outre, l'augmentation des rémunérations d'activité résulte également des effets du glissement-vieillesse-technicité (GVT), de l'extension en année pleine des mesures 1999 en faveur de l'ensemble des agents de la fonction publique - et non plus des seuls bas salaires comme en 1999 -, c'est-à-dire l'attribution d'un point d'indice nouveau majoré au 1 er avril et au 1 er décembre, aux mesures nouvelles portant créations de nouvelles indemnités au profit de certaines catégories d'agents de l'Etat, ainsi qu'au solde des diverses transformations d'emplois.

L'augmentation du nombre de bénéficiaires explique essentiellement la progression des dépenses liées aux pensions, de telle sorte que les dépenses brutes de pensions augmentent plus vite que celles résultant des rémunérations d'activité. Cette évolution est particulièrement préoccupante, car elle annonce, faute de véritables réformes, une explosion programmée du coût des pensions. Or, la Cour des comptes, dans son rapport précité, rappelle que « cette tendance devrait se maintenir par simple effet démographique ». en glissement annuel depuis 1997, ces dotations ont très vivement augmenté, de 4,1 %.

Enfin, en ce qui concerne les charges sociales, il convient de souligner leur recul, qui, selon la Cour des comptes, est « conjoncturel », malgré la hausse des dépenses liées à la mise en oeuvre du congé de fin d'activité (CFA).

Or, cette évolution engendre une détérioration de la structure de la dépense publique, qui devient de plus en plus rigide.

La Cour des comptes rappelle d'ailleurs que cinq ministères 9 ( * ) représentent 89,9 % de l'ensemble des rémunérations d'activité versées par l'Etat en 2000, comme en 1999, mais plus qu'en 1998 (89,4 %). A eux seuls, les budgets de l'enseignement scolaire et de l'enseignement supérieur regroupent plus de 50 % des dépenses salariales du budget général et 64,3 % de celles des ministères civils.

b) Les autres dépenses

Le total des autres dépenses, qui recouvrent les crédits inscrits aux parties 4 à 7 du titre III, s'élève à 128,55 milliards de francs en 2000, contre 124,73 milliards de francs en 1999, soit une hausse de 3,1 %, après une diminution de 2,7 % en 1999.

Elles se répartissent en :

- 103,20 milliards de francs pour les services civils, soit une progression de 3,0 %, alors qu'elles avaient diminué de 2,2 % en 1999 ;

- 25,35 milliards de francs pour les services militaires (+ 3,3 %, après une baisse de 4,2 % l'année précédente).

Les dépenses de matériel et de fonctionnement des services, qui correspondent à la 4 ème partie du titre III, s'élèvent à 45,45 milliards de francs, en diminution de 7,3 % par rapport à 1999, quoique cette diminution « n'est pour l'essentiel que technique, dans la mesure où elle est imputable à des transferts vers la 7 ème partie du titre III constatés à la justice et au budget économie, finances et industrie ».

Les dépenses de la 5 ème partie du titre III couvrent les travaux d'entretien : elles s'établissent à 1,91 milliard de francs, en forte progression de 23,5 %. Bien que les crédits de la culture inscrits sur cette partie connaissent la progression la plus vive, soit + 36,0 %, les crédits des routes, qui eux-mêmes augmentent de 26,6 % suite aux travaux d'entretien courant consécutifs aux intempéries de la fin 1999 et au passage du « cyclone Lenny », représentent 86 % des dotations de la 5 ème partie.

Les subventions de fonctionnement, qui font l'objet de la 6 ème partie du titre III, s'élèvent à 56,33 milliards de francs, dont 55,31 milliards de francs au titre des budgets civils, en hausse de 3,8 %. Les sections budgétaires bénéficiant des subventions de fonctionnement les plus importantes sont la recherche - 18,28 milliards de francs (+ 0,6 %) - et l'enseignement scolaire avec 10,89 milliards de francs (+ 8,5 %).

Enfin, les dépenses diverses, soit la 7 ème partie du titre III, s'établissent à 24,85 milliards de francs, dont 22,38 milliards au titre des budgets civils, en hausse de 25,3 %. La Cour des comptes indique que les évolutions erratiques des crédits de cette partie sont liées à son contenu hétérogène, mais aussi, pour 2000, « à des transferts en provenance de la justice et de l'économie, des finances et de l'industrie ».

3. Les dépenses d'interventions publiques

Les dépenses du titre IV 10 ( * ) s'élèvent, en 2000, à près de 484,98 milliards de francs, contre 511,28 milliards de francs en 1999. Toutefois, le total du titre IV s'établirait à 524,48 milliards de francs en neutralisant l'effet du transfert de dépenses au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale (FOREC), soit une baisse apparente de 5,1 % mais une progression réelle de 2,6 %, après une augmentation de 6,3 % en 1999.

Votre commission insistait déjà sur ce point dans son rapport portant sur le projet de loi de règlement 1999 : le transfert des crédits finançant la « ristourne » dégressive sur les bas salaires, soit près de 40 milliards de francs, vers le FOREC, destiné à financer les 35 heures, ne peut que rendre plus complexe l'analyse de l'évolution des dépenses d'intervention, et moins lisible le budget de l'Etat.

Comme le montre le tableau ci-dessous, cette évolution d'ensemble

des crédits du titre IV recoupe des situations contrastées :

Trois parties voient leurs crédits diminuer :

- la partie 4  « Action économique, encouragements et interventions économiques » : - 21,6 % ; ces crédits avaient déjà diminué de 4,1 % en 1999 et de 4,7 % en 1998 ; la forte baisse constatée est liée au transfert des crédits de la « ristourne dégressive » vers le FOREC ;

- la partie 1 « Interventions politiques et administratives » : - 20,1 % (après + 37,1 % en 1999), en raison de la diminution de 5 milliards de francs de la dotation générale de décentralisation du ministère de l'intérieur, consécutive à la diminution des droits de mutation à titre onéreux et de la recentralisation des dépenses médicales des dépenses médicales vers l'Etat ;

- la partie 7 « Action sociale, prévoyance » : - 3,0 % (après - 3,7 % en 1999), essentiellement pour des raisons liées à des changements de nomenclature.

Les quatre autres parties connaissent une augmentation de leurs dotations budgétaires, à l'intérieur d'un éventail assez important, quoique de moindre ampleur que l'année précédente : de + 1,4 % pour la partie 3 « Action éducative et culturelle » à + 12,5 % pour la partie 2 « Action internationale ».

4. Les dépenses en capital

Dans son rapport précité sur l'exécution des lois de finances en 2000, la Cour des comptes note que « les moyens accordés aux services civils et militaires ont augmenté tant en autorisations de programme qu'en crédits de paiement. Un volume élevé d'autorisations de programme a été ouvert dans les deux lois de finances rectificatives. Les crédits de paiement disponibles ont été supérieurs à leur niveau 1999 malgré la diminution des crédits ouverts en loi de finances, en raison de l'augmentation des reports mais également d'un niveau d'annulations particulièrement faible. la progression des dépenses n'a toutefois pas suivi celle des moyens ».

L'augmentation globale des dépenses en capital s'établit à 2,9 % (après + 1,3 % en 1999), soit 173,27 milliards de francs, dont 103,16 milliards de francs pour les services civils (+ 3,7 %, après + 2,1 % en 1999) et 70,11 milliards de francs pour les services militaires (+ 1,6 %, après + 0,1 % en 1999). En glissement annuel depuis 1996, les dépenses en capital ont toutefois fortement diminué, de 7,1 %, cette diminution étant deux fois plus importante pour les services militaires que pour les services civils, respectivement - 10,1 % et - 5,0 %.

Les crédits du titre V connaissent une très légère progression de 0,4 %, après une forte diminution, de 9,1 %, en 1999, tandis que ceux du titre VI, en revanche, présentent une hausse de 5,6 %, après une augmentation de 5,8 % l'année précédente.

Mais, globalement, la part des dépenses en capital au sein des dépenses du budget de l'Etat ne cesse de reculer : elle représente 8,1 % en 2000, contre 8,2 % en 1999, 8,4 % en 1998 et 9,1 % en 1997.

a) Les autorisations de programme

La loi de finances initiale pour 2000 a ouvert 171,7 milliards de francs en autorisations de programme, soit une augmentation de 2,9 % par rapport à 1999, année où elles avaient sensiblement progressé de 9,2 %.

Elles se répartissent de la façon suivante :

- 84,2 milliards de francs au titre des budgets civils, en progression de 4,2 %, moins importante cependant qu'en 1999 (+ 12,7 %), soit 49,1 % du total ; cette hausse sensible résulte essentiellement de la rebudgétisation de comptes d'affectation spéciale, en particulier le fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France (FARIF), et de la budgétisation du fonds de concours du programme de sûreté nucléaire dont bénéficiait la direction de la sûreté des installations nucléaires, mais aussi du lancement des contrats de plan Etat-régions ;

- 87,5 milliards de francs au titre du budget militaire, en hausse de 1,7 % (après + 6,1 % en 1999), en raison de la programmation des équipements militaires, de la restructuration des sites et des aides à la Polynésie française consécutives à la fin des essais nucléaires.

b) Les crédits de paiement

En 2000, les crédits de paiement, civils et militaires, s'établissent à 173,27 milliards de francs, contre 168,47 milliards de francs en 1999, soit une progression de 2,9 %.

Cette amélioration de l'effort d'investissement concerne toutefois en 2000 davantage les budgets civils, à 103,16 milliards de francs, soit + 3,7 %, que le budget militaire, à 70,11 milliards de francs, soit + 1,6 %.

La Cour des comptes note que, « en 2000, les évolutions sont différenciées pour les crédits votés en loi de finances entre le titre V et le titre VI » :

- pour le titre V, « les crédits votés diminuent, tant pour les services civils (- 1,2 %) que pour les services militaires (- 4,5 %). En 2000, ces crédits poursuivent donc leur tendance historique à la baisse après la progression constatée en 1999 » ;

- pour le titre VI, « la progression continue constatée depuis 1997 se poursuit en 2000 pour les services civils (+ 3,9 %) comme pour les services militaires (+ 27,7 %) ».

La Cour des comptes a insisté sur la faiblesse du taux de consommation de ces crédits, qui « continue de baisser » : 80,3 % en 1998, 78,0 % en 1999 et 75,1 % en 2000. Ce phénomène concerne surtout les services civils, puisque le taux de consommation, pour le titre V, est passé de 62,4 % en 1999 à 58,4 % en 2000, et, pour le titre VI, de 73,9 % en 1999 à 69,6 % en 2000. Il reste stable pour les services militaires, entre 91 et 92 %.

B. LES BUDGETS ANNEXES

La loi de finances initiale avait ouvert aux budgets annexes des crédits d'un montant total de 106,16 milliards de francs. Compte tenu des modifications intervenues en cours d'année, le total net des crédits ouverts s'est élevé à 108,59 milliards de francs.

Les opérations définitives, hors virement de section à section et dépenses d'ordre, se sont établies à 109,35 milliards de francs en 2000.

Ces dépenses s'élevaient à 107,20 milliards de francs en 1999 : elles ont donc progressé de 2 % de 1999 à 2000. L'année précédente, elles avaient crû de 2,4 %.

Au sein de cet ensemble, le poids de chacun des six budgets annexes est contrasté à l'extrême. En effet, le BAPSA 11 ( * ) représente à lui seul 89,4 % du total des dotations allouées aux budgets annexes, alors que celui de l'Ordre de la Libération n'en représente que 0,004 %.

L'évolution de chacun des budgets annexes est extrêmement différenciée. Deux de ces budgets voient leurs dotations reculer, celui de l'aviation civile de 1,6 % et celui de l'Ordre de la Libération de 2,0 %.

Les budgets annexes qui présentent une évolution à la hausse voient leurs crédits osciller entre + 2,1 % pour le BAPSA et + 19,0 % pour le budget annexe des monnaies et médailles (après + 16,2 % en 1999).

La situation de ces budgets annexes est également très contrastée. La Cour des comptes note ainsi que « la situation financière du BAPSA continue à se détériorer lentement », « les recettes ne permettant plus de couvrir les dépenses de l'exercice » depuis 1997, tandis que le budget annexe de l'aviation civile voit ses recettes nettes d'exploitation régulièrement augmenter.

C. LES COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

En 2000, le solde global des comptes spéciaux du Trésor (hors FSC 12 ( * ) et hors FMI 13 ( * ) ) fait apparaître un solde positif de 1,24 milliard de francs, contre 9,25 milliards de francs en 1999. Les comptes spéciaux du Trésor ont donc contribué à l'amélioration du solde budgétaire, dans des proportions toutefois bien moindres qu'en 1999, et alors que la loi de finances initiale prévoyait un solde positif d'environ 3 milliards de francs.

Cette différence réside principalement dans les résultats des comptes d'avances, dont le solde négatif s'établit à 3,93 milliards de francs en raison des décisions prises sur la « vignette », et dans ceux des comptes d'opérations monétaires, dont le solde s'est établi à - 2,49 milliards de francs.

Les comptes de commerce (solde de 2,80 milliards de francs), les comptes de prêts (solde de 2,71 milliards de francs) et les comptes d'affectation spéciale (solde de 2,15 milliards de francs) contribuent à l'excédent global.

En 2000, le nombre des comptes spéciaux du Trésor a diminué, passant de 41 à 37.

Cinq comptes ont été fermés :

- le compte n° 902-01 « Fonds forestier national » ;

- le compte n° 902-13 « Fonds de secours aux victimes de sinistres et calamités » 14 ( * ) ;

- le compte n° 902-16 « Fonds national du livre » ;

- le compte n° 902-22 « Fonds pour l'aménagement de l'Ile-de-France » ;

- le compte n° 902-30 « Fonds pour le financement de l'accession à la propriété ».

En revanche, la loi de finances rectificative pour 2000 du 30 décembre 2000 a ouvert un nouveau compte, le compte de commerce n° 904-22 « Gestion active de la dette et de la trésorerie de l'Etat ».

Les trois principales catégories sont les comptes d'affectation spéciale, les comptes de commerce et les comptes d'avances, qui représentent 75 % du nombre de comptes spéciaux du Trésor et 96 % des montants.

Ces comptes représentent, en exécution, un volume financier (y compris FMI et FSC) de 589,82 milliards de francs en dépenses et 578,57 milliards de francs en recettes. A lui seul, le compte d'avances aux collectivités locales représente 365,04 milliards de francs, soit 62 % des dépenses de l'ensemble des comptes spéciaux du Trésor.

La Cour des comptes a fait plusieurs observations assez sévères sur la gestion de certains comptes spéciaux du Trésor.

Concernant le compte d'affectation spéciale n° 902-00 « Fonds national de l'eau » , elle a estimé que, pour sa première section « Fonds national de développement des adductions d'eau », les évolutions du produit de la redevance sur les consommations d'eau « rendent nécessaire un examen approfondi des conditions de prélèvement » de ladite redevance. La Cour est également critique à l'égard de sa seconde section « Fonds national de solidarité pour l'eau », puisqu'elle « constate que la distinction entre les dépenses qui relèvent respectivement du budget général et du FNSE n'est pas claire », ajoutant même : « on peut se demander, plus généralement, si les actions de solidarité dans le domaine de l'eau [...] ne devraient pas plutôt toutes relever du budget général ».

Elle a renouvelé ses critiques sur la gestion du compte n° 902-17 « Fonds national pour le développement du sport » , estimant que « les objectifs poursuivis dans le cadre du FNDS ne se différencient ainsi guère de la politique d'aide au sport financée sur le budget de la jeunesse et des sports, tout particulièrement en matière d'équipement, où se juxtaposent les deux sources de financement » 15 ( * ) .

La Cour des comptes s'est une nouvelle fois montrée sévère sur la gestion du compte d'affectation spéciale n° 902-24 « Produits de cessions de titres, parts et droit de société ». Elle note en effet « des problèmes de transparence » sur la question des dépenses de ce compte, précisant que « les différentes catégories de dépenses n'ont jamais été formalisées ; ainsi la pratique fait que les dépenses sont imputées soit sur ce compte soit sur le budget général, et peuvent concerner à la fois des commissions, des études, des frais de publicité et aussi des montages financiers ». Elle conclut : « il y a là un manque de lisibilité regrettable » .

Concernant le compte d'affectation spéciale n° 902-25 « Fonds d'intervention pour les aéroports et le transport aérien », la Cour des comptes relève que « la répartition des charges afférentes aux missions régaliennes entre le FIATA et le budget annexe de l'aviation civile n'est pas sans poser problème ». Elle va même plus loin, considérant qu'il paraît indispensable de « s'interroger sur la légitimité du dispositif mis en place et sur l'existence même d'un compte spécial du Trésor qui tend de plus en plus nettement à couvrir des dépenses relevant par nature du budget de l'État, les autres missions se trouvant de fait marginalisées au sein du FIATA ».

III. LE SOLDE D'EXÉCUTION DES LOIS DE FINANCES EN 2000

Fixé à - 215,3 milliards de francs par la loi de finances initiale amélioré de façon extrêmement marginale (+ 64 millions de francs) par le premier collectif budgétaire, réduit à seulement - 209,5 milliards de francs en seconde loi de finances rectificative, le solde général (hors FMI) s'élève pour 2000 en exécution à - 191,05 milliards de francs, soit une amélioration significative de 24,27 milliards de francs par rapport à la prévision.

Il représente 2,07 % du PIB contre 2,3 % en 1999 et 2,9 % en 1998.

Au sens de la comptabilité nationale, l'Etat connaît en 2000 un besoin de financement de - 221 milliards de francs, en légère progression par rapport à celui enregistré en 1999 (- 219,6 milliards de francs). Eu égard à l'excédent des collectivités locales (24,9 milliards de francs), à celui des administrations de Sécurité sociale (54 milliards de francs) et des ODAC (15,9 milliards de francs), le déficit des administrations publiques est passé entre 1999 et 2000 de - 1,61 % à - 1,37 % du PIB.

Capacité ou besoin de financement par sous-secteur

(en milliards de francs)

1996

1997

1998

1999

2000

Etat

- 296,0

- 293,1

- 255,5

- 219,6

- 221,0

Organismes divers d'administration centrale

2,0

60,6

10,1

20,8

15,9

Administrations publiques locales

4,6

19,0

26,0

31,5

24,9

Administrations de sécurité sociale

- 34,9

- 35,7

- 9,5

24,7

54,0

Besoin de financement total des APU

- 324,3

- 249,2

- 228,9

- 142,6

- 125,6

Besoin de financement total des APU (Md€)

- 49,4

- 38,0

- 34,9

- 21,7

- 19,1

(en points de PIB)

1996

1997

1998

1999

2000

Etat

- 3,72

- 3,57

- 2,99

- 2,49

- 2,41

Organismes divers d'administration centrale

0,03

0,74

0,12

0,24

0,18

Administrations publiques locales

0,06

0,23

0,30

0,36

0,27

Administrations de sécurité sociale

- 0,44

- 0,43

- 0,11

0,28

0,60

Total

- 4,08

- 3,04

- 2,68

- 1,61

- 1,37

Source : Cour des comptes

En tout état de cause, eu égard à un déficit budgétaire légèrement inférieur à 200 milliards de francs, l'Etat reste en 2000 la seule collectivité publique lourdement déficitaire.

Cette situation déjà dénoncée par votre rapporteur général fait l'objet de la part de la Cour des comptes de remarques très critiques. Celle-ci prend effectivement acte du fait que en 2000, pour la cinquième année consécutive, le déficit d'exécution du budget de l'Etat diminue. Elle tient malgré tout à relever que « toutefois, le redressement est moins rapide que par le passé, et au sein de l'Union européenne, la France rétablit ses comptes moins vite que les autres Etats. Le besoin de financement des administrations publiques (1,3 % du PIB) de la France se compare à des résultats souvent meilleurs chez nos partenaires de la zone euro qui affichent un besoin de financement de 0,7 % ou de l'Union européenne dont le besoin est de 0,2 % (s'il est tenu compte des ventes de licences UMTS, importantes notamment en Allemagne, au Royaume-Uni et en Italie, l'écart se creuse) ».

On relève en effet, comme le montre le graphique ci-après, un « décrochage » très net par rapport à la moyenne de nos principaux partenaires et cela à partir de 1997.

Capacité de financement des administrations publiques dans l'Union européenne

(en points de PIB)

1996

1997

1998

1999

2000
(hors UMTS)

2000
(y.c. UMTS)

Allemagne

- 3,4

- 2,7

- 2,2

- 1,6

- 1,3

+ 1,2

Espagne

- 5,0

- 3,2

- 2,6

- 1,1

- 0,3

-

France

- 4,2

- 3,0

- 2,7

- 1,6

- 1,3

-

Italie

- 7,1

- 2,7

- 2,8

- 1,8

- 1,5

- 0,3

Luxembourg

2,7

3,4

3,5

3,7

6,1

-

Pays-Bas

- 1,8

- 1,1

- 0,8

0,4

1,5

2,2

Royaume-Uni

- 4,4

- 2,0

0,4

1,3

1,9

4,3

Zone euro (EUR-11)

- 4,2

- 2,6

- 2,2

- 1,3

- 0,8

+ 0,3

UE (EUR-15)

- 4,2

- 2,4

- 1,6

- 0,7

- 0,1

+ 1,2

Source : Eurostat - septembre 2001

Evolution comparée du besoin de financement (hors UMTS)

Le changement de présentation du rapport de la Cour des comptes
sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2000

Ce rapport présente de « nouveaux développements concernant les résultats de l'exécution qui sont traités dans un chapitre spécifique avec les problèmes de financements et de dette, et la comptabilité de l'Etat ».

Il étudie tout d'abord les résultats de l'exécution et détaille les trois types de solde budgétaire : celui dit en exercice (qui permet de rapprocher utilement les prévisions de l'exécution), celui calculé en gestion (qui est représentatif d'une réalité financière puisqu'il constitue le montant net issu de l'exécution budgétaire devant être financé par emprunt indépendamment des échéanciers de remboursement des dettes), et celui figurant en loi de règlement.

Puis il détaille la « clef de passage » du solde d'exécution budgétaire au besoin de financement : ainsi en 2000, l'écart entre les deux notions a atteint 30 milliards de francs, le besoin de financement de l'Etat (- 221 milliards de francs) se dégradant légèrement par rapport à 1999 tandis que le solde d'exécution budgétaire diminuait (- 191 milliards de francs). On aboutit ainsi au « besoin de financement notifié » qui est l'indicateur retenu pour les procédures de surveillance multilatérale mises en oeuvre au niveau communautaire.

S'agissant du financement de l'Etat en 2000 et de l'évolution de la dette, la Cour des comptes rappelle que « la dette de l'Etat a continué de se situer, en 2000, dans une dynamique d'accroissement certes ralentie, mais ininterrompue ». Largement prépondérante au sein de la dette publique, la part de l'Etat ne cesse de s'accroître. Elle représentait 79,4 % du total en 2000 contre 78,8 % en 1999.

Après avoir relevé que le renchérissement des taux d'intérêt pourtant manifeste à compter du 4 ème trimestre 1999, n'avait été pris en compte par le gouvernement que lors du second collectif budgétaire « d'automne 2000 », la Cour des comptes fait état des améliorations apportées à la gestion active de la trésorerie et de la dette de l'Etat en 2000. Elle relève toutefois que « le dispositif particulier de suivi comptable et extracomptable de la dette est mal articulé et aujourd'hui inadapté » et détaille les différentes définitions de la dette de l'Etat qui coexistent.

En tout état de cause, la dette de l'Etat, dans la définition retenue par la Cour des comptes, a augmenté de 4,3 % en 2000 : elle représente à fin 2000 4.586 milliards de francs, contre 4.395 milliards de francs à fin 1999. La charge budgétaire de la dette publique a augmenté de 3,8 % en 2000 et s'élève à 254 milliards de francs.

EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE PREMIER

Résultats généraux de l'exécution des lois de finances pour 2000

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter les résultats définitifs de l'exécution des lois de finances pour 2000.

Le présent article a pour objet de présenter, sous forme de tableau synthétique, les résultats définitifs de l'exécution de 2000 conformément à l'article 35 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 qui dispose que « le projet annuel de loi de règlement constate le montant définitif des encaissements de recettes et des ordonnancements de dépenses se rapportant à une même année ».

Le présent article fixe, d'une part, le résultat des opérations à caractère définitif du budget général ainsi que des budgets annexes et des comptes d'affectation spéciale, et d'autre part, le résultat des opérations à caractère temporaire en le présentant par catégorie de comptes spéciaux.

Le solde des opérations définitives de l'Etat est arrêté à - 190,15 milliards de francs (il était de - 212,05 milliards de francs en 1999).

Le solde des opérations temporaires est de + 902,7 millions de francs (+ 6,05 milliards de francs en 1999).

Le solde général hors opérations avec le FMI est de - 191,05 milliards de francs (- 206 milliards de francs en 1999).

Le solde général hors opérations avec le FMI et hors Fonds de stabilisation des changes (FSC) est de - 191,22 milliards de francs (- 206 milliards de francs en 1999).

Ce solde représente 2,07 % du PIB de 2000 (en 1999, ce pourcentage était de 2,3 % et s'élevait à 2,9 % en 1998).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2

Recettes du budget général

Commentaire : le présent article a pour objet de fixer le montant définitif des recettes brutes du budget général pour 2000.

Les recettes brutes du budget général s'établissent à 1.896,75 milliards de francs en 2000, soit une hausse de 3 % par rapport à 1999.

Les recettes fiscales brutes s'élèvent à 1.942,8 milliards de francs, en hausse de 2,5 % par rapport à 1999.

Les recettes non fiscales hors Fonds de stabilisation des changes (FSC) et recettes d'ordre venant en déduction des charges de la dette représentent 200,15 milliards de francs, en hausse de 18,8 % par rapport à 1999.

Les recettes de fonds de concours s'élèvent à 39,2 milliards de francs sont en diminution de 13,2 % par rapport à 1999.

Enfin, les prélèvements sur recettes s'établissent à 285,5 milliards de francs, en progression de 6,6 % par rapport à 1999.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Dépenses ordinaires civiles du budget général

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter le montant définitif des dépenses ordinaires civiles du budget général de 2000.

Le montant définitif des dépenses ordinaires civiles du budget général s'établit, en 2000, à 1.804,66 milliards de francs , contre 1.778,09 milliards de francs en 1999, soit une progression de 1,5 % , après une hausse de 3,7 % en 1999. Ces dépenses ont donc crû de 26,57 milliards de francs de 1999 à 2000.

Par titre, ces dépenses s'établissent comme suit :

- titre I : 625,69 milliards de francs, contre 590,88 milliards de francs en 1999, soit une hausse de 5,9 % ; en 1999, cette progression était de 3,2 % ;

- titre II : 4,80 milliards de francs, au lieu de 4,66 milliards de francs en 1999, en progression de 3,0 %, après + 4,5 % en 1999 ;

- titre III : 689,18 milliards de francs, contre 671,27 milliards de francs en 1999, soit une progression de 2,7 %, après celle de 1999 qui était de 2,1 % ;

- titre IV : 484,98 milliards de francs, contre 511,28 milliards de francs en 1999, en diminution de 5,1 %, suite à une hausse de 6,3 % en 1999. La baisse constatée en 2000 s'explique essentiellement par le transfert du financement de la ristourne dégressive sur les bas salaires, dite « ristourne Juppé », au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale, le FOREC.

Nettes des dégrèvements et remboursements d'impôts, les dépenses ordinaires civiles du budget général en 2000 s'élèvent à 1.436,45 milliards de francs, contre 1.448,95 milliards de francs en 1999, en recul de 0,9 % (+ 3,6 % en 1999).

Par ailleurs, le présent article demande l'ouverture de 7,61 milliards de francs de crédits complémentaires, dont 4,51 milliards de francs sur le titre I, soit près de 60 % du total. Il convient également de noter une ouverture d'un montant de 2,11 milliards de francs au titre des interventions publiques, soit 28 % du total, en particulier 1,22 milliard de francs au budget des charges communes (chapitre 44-91 Encouragements à la construction immobilière - Primes à la construction), et 831,49 millions de francs au budget de l'emploi (chapitre 46-71 Fonds national de chômage). De telles ouvertures s'établissaient à 16,36 milliards de francs en 1999.

Il demande également l'annulation de 6,63 milliards de francs de crédits non consommés, dont 4,29 milliards de francs sur le titre III, soit près de 65 % du total (60 % en 1999).

Les dépenses ordinaires civiles du budget général sont donc majorées de 980 millions de francs. Ce solde était de + 7,83 milliards de francs en 1999.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

ARTICLE 4

Dépenses civiles en capital du budget général

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter le montant définitif des dépenses civiles en capital du budget général de 2000.

Les dépenses civiles en capital du budget général représentent en 2000 un montant définitif de 103,16 milliards de francs , contre 99,47  milliards de francs en 1999, soit une progression de 3,7 % , après une augmentation de 2,1 % en 1999. Ces dépenses ont donc augmenté de 3,7 milliards de francs de 1999 à 2000.

Par titre, ces dépenses connaissent une évolution différenciée, et s'établissent comme suit :

- titre V : 22,03 milliards de francs, contre 22,40 milliards de francs en 1999, en diminution de 1,7 % (après - 9,1 % en 1999) ;

- titre VI : 81,13 milliards de francs, au lieu de 77,07 milliards de francs en 1999, en progression de 5,3 % ;

- titre VII : 270.802,90 francs, après 143.065,92 francs en 1999, soit une augmentation de 89,3 %.

Par ailleurs, le présent article demande l'annulation de 57,21 francs de crédits non consommés, ainsi répartis : 24,30  francs sur le titre V ; 32,81 francs sur le titre VI et 0,10 franc sur le titre VII. De telles annulations s'établissaient à 80,56 millions de francs en 1999.

Aucune ouverture de crédits n'est proposée par le présent article.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5

Dépenses ordinaires militaires du budget général

Commentaire : le présent article arrête à 111,11 milliards de francs le montant définitif des dépenses ordinaires militaires pour 2000.

Ce montant correspond à une augmentation des dépenses définitives de 1,8 milliard de francs, par rapport au précédent exercice.

La forte diminution enregistrée en exécution par rapport aux crédits totaux votés initialement en loi de finances initiale, soit 159,9 milliards de francs, s'explique pour l'essentiel par les transferts liés aux pensions : - 54,9 milliards de francs.

De fait, hors pensions, les dépenses nettes du titre III ont été majorées, en exécution 2000, de 6,1 milliards de francs par rapport aux crédits votés en loi de finances initiale.

En cours d'exécution, les crédits du titre III ont d'abord bénéficié de 3,61 milliards de francs supplémentaires ouverts en lois de finances rectificative 16 ( * ) .

Ces ouvertures ont été affectées pour la majeure part (2,22 milliards de francs) au financement des dépenses engagées au titre de la participation de la France à des engagements extérieurs.

A nouveau, votre rapporteur général estime que ces dépenses, connues, répertoriées et récurrentes, au moins pour l'essentiel, doivent faire l'objet d'une inscription de crédits en loi de finances initiale, au lieu d'être systématiquement financées en exécution par ponction sur les crédits d'équipement militaire.

Le renchérissement des produits pétroliers (liés à la fois à l'augmentation du baril de pétrole et à celle du cours du dollar 17 ( * ) ) a dû par ailleurs être financé à hauteur de 850 millions de francs.

Les autres ouvertures ont pallié l'insuffisance des loyers de la gendarmerie - en partie seulement (10 millions de francs), le déficit du chapitre de soldes des appelés (7 millions de francs), les besoins immédiats consécutifs aux tempêtes de fin 1999 (4 millions de francs), et des besoins incompressibles de fonctionnement des armées et de la gendarmerie (27 millions de francs).

Le montant des fonds de concours rattachés à la gestion 2000 s'est élevé à 2,6 milliards de francs pour le titre III.

Deux services, à eux seuls, perçoivent plus de 90 % des fonds de concours :

- le Service de Santé des Armées (SSA) à hauteur de 2,2 milliards de francs, au titre du remboursement, pour moitié 18 ( * ) , par les organismes de Sécurité sociale, les mutuelles et éventuels divers débiteurs 19 ( * ) , pour les prestations médicales effectuées au bénéfice des civils ;

- la Délégation Générale pour l'Armement (DGA), à hauteur de 0,3 milliard de francs, pour des prestations diverses réalisées pour des tiers dans le cadre de ses missions (essais ou contrôles sur les commandes exécutées par l'industrie française pour les gouvernements étrangers).

Quarante-sept autres fonds de concours de nature diverse sont par ailleurs rattachés au titre III, pour des montants allant, pour l'exercice 2000, de 7.906 francs (remboursement des dépenses engagées par les armées-Services communs à l'occasion de leur participation à des missions non spécifiques) à 27 millions de francs (produit de cessions de matériels divers bénéficiant aux forces terrestres).

Les crédits 2000 bénéficient par ailleurs de 1,75 milliard de francs de reports de l'exercice 1999, tandis que les reports autorisés sur la gestion suivante s'élèveront à 1,73 milliard de francs, soit une balance nette positive de 20 millions de francs. Au total, pour le titre III, le montant des reports est de l'ordre de 1,1 % des crédits initiaux.

Enfin, le montant total des rétablissements de crédits s'élève à - 8,8 milliards de francs. On rappellera ici que les rétablissements de crédits liés aux opérations imputées sur les comptes de commerce gérés par le ministère de la défense représentent l'essentiel (63,5 %) du total des rétablissements de crédits au sein du budget de l'Etat. L'année 2000 est marquée par une nouvelle progression de ces mouvements au titre III, à partir du point bas de 1998.

Le solde net des transferts s'élève à 200 millions de francs 20 ( * ) .

Diverses insuffisances en crédits de rémunération, notamment les indemnités des militaires, ont enfin été couvertes par redéploiement de crédits à l'intérieur du budget de la défense (910 millions de francs par décret de virement et arrêté de répartition).

Le présent projet de loi de règlement demande en outre les ajustements suivants au titre III du budget militaire :

- Pour les ouvertures : 161,4 millions de francs au titre des charges sociales (crédits évaluatifs inscrits à l'état F de la loi de finances pour 2000). Cette progression sensible par rapport à l'exercice précédent, pour lequel il avait été seulement demandé 5,7 millions de francs supplémentaires, est partiellement liée à un calibrage insuffisant en loi de finances initiale, compte tenu de l'évolution de la professionnalisation.

Ce montant important représente 1,87 % des crédits ouverts et la moitié environ du montant total demandé à ce titre pour l'ensemble des budgets civils.

- Les annulations demandées s'élèvent à 452,52 millions de francs, soit 446,1 millions de francs pour les dépenses de personnel, et 6,43 millions de francs sur les crédits « frais de contentieux - règlement des dommages et accidents du travail ». Ce montant est nettement inférieur à celui de l'exercice précédent (1 485,5 millions de francs).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6

Dépenses en capital militaires du budget général

Commentaire : le présent article vise à arrêter à 70,11 milliards de francs le montant définitif des dépenses militaires en capital (équipement militaire du titre V et subventions d'investissement du titre VI).

La tendance à la baisse des dépenses exécutées constatée au cours des exercices précédents se confirme, avec une baisse de 2,1 milliards de francs par rapport à l'exercice précédent.

Suivant une évolution inverse à celle du titre III, le passage des crédits d'équipement initiaux (79,7 milliards de francs) aux dépenses nettes (68 milliards de francs) se traduit par un « déficit » de 11,15 milliards de francs, soit près de 14 % des crédits votés en loi de finances initiale .

Les deux lois de finances rectificatives se sont traduites par une diminution nette des crédits de 6,4 milliards de francs, pour financer partiellement les dépenses de fonctionnement des opérations extérieures (OPEX), et partiellement les ouvertures de crédits sur les budgets civils.

A nouveau, votre rapporteur général déplore vivement cette méthode qui consiste à ponctionner en cours d'exécution des crédits d'équipement militaire, inscrits en principe conformément aux objectifs fixés par la loi de programmation, pour financer des dépenses de fonctionnement qui n'ont plus rien d'imprévisible ou d'exceptionnel, s'agissant des OPEX, ou pire encore, les dérives des dépenses ordinaires des budgets civils.

Les crédits reportés de l'exercice 1999 se sont élevés à 6,64 milliards de francs, tandis que les reports autorisés sur 2001 atteignent 6,22 milliards de francs, soit une balance nette négative de 415 millions de francs. Au total, pour le titre V, le montant des reports représente environ 7,5 % du montant des crédits votés en loi de finances initiale.

Votre rapporteur général tient ici à saluer l'ampleur de l'effort qui a conduit la défense à diviser par deux le montant de ses reports : de 1990 à 1995, les reports des crédits d'équipement militaire étaient en moyenne de 12,5 milliards de francs, soit 15 % des crédits ouverts en loi de finances initiales, tandis qu'ils ne sont plus que 6 milliards de francs en moyenne annuelle entre 1996 et 2000, soit 7 % des crédits initiaux.

A 8 % du total des crédits initiaux en 2000, le montant des reports sur le budget militaire se compare avantageusement au niveau moyen de 33 % péniblement atteint par les budgets civils.

Il convient de souligner toutefois que cet effort méritoire se traduit, et se traduira encore plus à l'avenir, par une réduction, voire une disparition de la « marge de manoeuvre » dont le ministère des finances à jusqu'à présent cru pouvoir disposer pour ajuster ses besoins (militaires et civils) en gestion.

Le montant des fonds de concours s'établit à 1,63 milliard de francs, répartis sur de nombreux fonds : participation de gouvernements étrangers aux frais d'études et de fabrication dans le cadre de programmes de coopération (près de 456 millions de francs répartis dans quatre fonds, soit un montant stable par rapport à 1999), produits des ventes de véhicules, d'aéronefs, de munitions, de matériels divers et d'approvisionnement (plus de 350 millions de francs 21 ( * ) répartis entre douze fonds différents), produits de ventes d'immeubles et de terrains (près de 256 millions de francs), soit un montant sensiblement équivalent à celui de l'année précédente), rattachement de l'autre moitié des remboursements des soins assurés par le Service de santé des armées (239,5 millions de francs).

Le solde net des transferts s'établit à - 8,5 milliards de francs, soit le dixième des crédits inscrits en loi de finances initiale.

Le principal transfert est celui réalisé au profit de la direction des applications militaires (DAM) du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), pour un montant voisin de 7 milliards de francs, reconduit chaque année conformément à la loi de programmation militaire 1997-2002.

Est également comprise parmi les transferts la contribution de la défense au BCRD à hauteur de 1,5 milliard de francs.

Or, celle-ci a été explicitement exclue par la loi de programmation militaire. Son inscription sur le budget de la défense fausse donc la réalité des montants consacrés à l'équipement militaire, et de leur cohérence avec les niveaux de la programmation.

Le montant des rétablissements de crédits s'élève à - 737 millions de francs.

Le présent projet de loi demande en outre des ajustements de centimes : 0,83 franc en ouvertures et 0,98 franc en annulations.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7

Résultat du budget général de 2000

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter, compte tenu des montants de recettes et de dépenses fixés aux articles précédents, le solde du budget général en 2000.

L'excédent des dépenses (2.089,05 milliards de francs) sur les recettes (1.896,75 milliards de francs) est arrêté par le présent article à 192,29 milliards de francs .

Ce résultat représente une diminution de 10,7 % par rapport à 1999 (215,24 milliards de francs).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 8

Résultats des budgets annexes

Commentaire : le présent article a pour objet d'arrêter les résultats des budgets annexes et d'autoriser des ajustements de crédits sur ces budgets.

Les résultats des six budgets annexes pour 2000 sont arrêtés, en recettes et en dépenses, à 109,35 milliards de francs. Ils augmentent de 2 % par rapport à 1999 (107,20 milliards de francs).

Les ajustements demandés s'élèvent à :

- 2.776,5 millions de francs en ouvertures de crédits complémentaires dont l'essentiel concerne comme pour les exercices précédents, le budget annexe des prestations agricoles (BAPSA), 2.459,25 millions de francs, soit 88,6 % ; par ailleurs 165 millions de francs sont ouverts au titre du budget annexe de l'aviation civile (BAAC) soit 5,9 % contre 29,4  % en 1999 ;

- 662,93 millions de francs en annulations de crédits non consommés, dont :

. 271,7 millions de francs au BAPSA (40,9 %) ;

. 263,3  millions de francs au budget annexe des Monnaies et médailles (39,7 %), contre 415,1 millions de francs en 1999 ;

. 99,5 millions de francs au BAAC (15 %) ;

. 24,2 millions de francs au budget annexe des Journaux officiels (3,7 %).

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 9

Comptes spéciaux du Trésor dont les opérations se poursuivent en 2001

Commentaire : le présent article fixe les résultats des comptes spéciaux du Trésor dont les opérations sont appelées à se poursuivre en 2001, ouvre des crédits complémentaires, annule des crédits non consommés et modifie les autorisations de découverts. Il arrête par ailleurs les soldes des comptes spéciaux du Trésor dont les opérations sont appelées à se poursuivre en 2001 et en distribue l'affectation.

I. RÉSULTATS DES COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR

A. LES OPÉRATIONS ÉFFECTUÉES EN 2000

En 2000, les opérations sur les comptes spéciaux du Trésor se sont élevées à 585,5 milliards de francs en dépenses et à 573,9 milliards de francs en recettes. Par rapport à 1999, année marquée par une forte hausse des dépenses et une augmentation sensible des recettes, les dépenses et les recettes sont respectivement en hausse de 1,9 % et 2,3 %.

Opérations sur les comptes spéciaux du Trésor
dont les opérations se poursuivent l'année suivante

(en milliards de francs)

1997

Var 97/98

1998

Var 98/99

1999

Var 99/2000

2000

Dépenses

539,2

-2,40%

526,5

9,20%

574,7

1,90%

585,5

Recettes

542,0

-1,30%

535,3

4,80%

561,2

2,30%

573,9

Les résultats des opérations transitant par les comptes spéciaux du Trésor sont marqués par une charge de 11,5 milliards de francs. Toutefois, le résultat finalement retenu pour déterminer la contribution des comptes spéciaux se calcule hors FMI et FSC et s'élève à 1,239 milliard de francs en 2000. La loi de finances initiale pour l'année 2000 prévoyait un solde positif supérieur, égal à 2,999 milliards de francs. La différence s'explique principalement par les mesures de suppression de la vignette et leurs répercussions sur le compte d'avance n° 903-52. Les comptes d'avance connaissant ainsi un solde négatif de 3,929 milliards de francs. Elle s'explique également pour partie par le solde de - 2,490 milliards de francs des comptes d'opérations monétaires (hors FMI et FSC).

L'ensemble de ces résultats témoigne du dynamisme de la catégorie des comptes spéciaux du Trésor dont la pérennité est établie par la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001. Parmi les comptes spéciaux du Trésor, la catégorie des comptes d'affectation spéciale connaît néanmoins une forte réduction du montant de ces opérations. Les dépenses et les recettes de l'ensemble des comptes d'affectation spéciale baissent en effet de 40,5 % par rapport à l'année précédente, bien au-delà de la baisse prévue en loi de finances initiale. Cette forte baisse ne s'explique que partiellement par la suppression de certains comptes l'année précédente. Elle trouve avant tout sa cause dans la baisse d'activité du compte spécial n° 902-24, compte d'affectation des produits de cessions, titre, parts et droits de sociétés, dont les recettes diminuent de 66 % et les dépenses de 64 %.

B. ANNULATIONS ET OUVERTURES DE CRÉDITS

L'ouverture de 38,6 milliards de francs de crédits est demandée dans le présent projet de loi de règlement. Le montant des crédits non consommés à annuler s'élève à 8,4 milliards de francs.

Les annulations de crédits concernent pour l'essentiel le compte n° 902-24, compte d'affectation des produits de cessions, titre, parts et droits de sociétés, à hauteur de 5,6 milliards de francs. Les ouvertures de crédits se rapportent surtout au compte n° 903-58, compte d'avances à divers services de l'Etat ou organismes gérant des services publics, pour 38,5 milliards de francs et de manière plus marginale au compte n° 902-24 pour 0,032 milliard de francs.

- Contrairement aux années précédentes où elles étaient largement sous-estimées, les recettes du compte n° 902-24 relatif aux produits de cessions, titres, parts et droits de sociétés ont été surévaluées en loi de finances initiale. Estimées à 16,945 milliards de francs en loi de finances initiale, elles n'ont atteint en exécution que 11,336 milliards de francs. Il est certes compréhensible que l'activité de ce compte soit amenée à se réduire au fur et à mesure de la restriction du périmètre des entreprises publiques et parapubliques. Néanmoins, l'écart entre recettes prévues et recettes effectivement perçues s'explique plutôt par le report de certaines cessions ou la constatation de moindres plus-values dans un marché financier déprimé. Le report de ces cessions paraît dans ce cas prudent et participe sans doute d'une meilleure gestion des actifs de l'Etat. Il n'apporte en revanche pas de réponse satisfaisante aux besoins de financement d'entreprises publiques en l'absence d'un abondement direct par le budget général.

- Le projet de loi de règlement propose par ailleurs d'ouvrir de nouveaux crédits au compte d'affectation spéciale n° 902-24, à hauteur de 32,398 millions de francs au titre des « dépenses afférentes aux ventes de titres, de parts, ou de droits de sociétés », ligne dotée en loi de finances initiale de 150 millions de francs. La sous-estimation de ces dépenses est manifeste et se reproduit chaque année. La Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 constate de plus que :

« Les dépenses afférentes aux ventes de titres se sont élevées à 182,398 millions de francs dont 142,762 au titre de EADS soit 78 % du total. Par ailleurs dans le cadre des opérations de privatisation de la Banque Hervet, un montant de 2,392 millions de francs a été imputé sur l'article 81 du chapitre 37-75 du budget des finances.

En 2000, aucune convention de répartition de frais n'a été conclue entre l'État et une entreprise faisant l'objet d'une cession. En effet, dans le cadre de la constitution d'EADS, l'ensemble des frais a été pris en charge par l'entreprise. S'agissant de TMM, l'État n'étant pas directement actionnaire de cette entreprise, aucun frais n'a été supporté par l'État. La Cour constate que cette partie des dépenses du compte n° 902-24 continue de poser des problèmes de transparence. Les différentes catégories de dépenses n'ont jamais été formalisées ; ainsi la pratique fait que les dépenses sont imputées soit sur ce compte soit sur le budget général, et peuvent concerner à la fois des commissions, des frais de publicité et aussi des montages financiers. Il y a là un manque de lisibilité regrettable ».

L'absence de règle claire d'imputation des frais de cessions de titres remet en cause la lisibilité des opérations concernées. Il paraît indispensable que le compte n° 902-24, au nom du principe de sincérité budgétaire, retrace l'ensemble des opérations concourrant à la cession de titres ou de participations et que les frais d'études, de publicité ou de montages financiers puissent être distingués au sein des dépenses du compte, ce qui n'est aujourd'hui pas le cas.

- Enfin, 38,5 milliards de crédits complémentaires sont demandés sur le compte n° 903-58 pour faire face aux avances versées à l'agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole au titre des besoins temporaires de préfinancement des dépenses communautaires. Ces avances ont été recouvrées en cours d'année 2000. Le compte d'avances n° 903-58 n'avait pas fait l'objet en loi de finances initiale, comme chaque année, d'une ouverture de crédits. Si ses crédits sont considérés comme évaluatifs, il n'empêche que l'article 28 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 dispose : « Les comptes d'avances décrivent les avances que le ministre des finances est autorisé à consentir dans les limites des crédits ouverts à cet effet ».

La nouvelle loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 devrait mettre fin à des pratiques que la commission des finances avait déjà critiquées dans son rapport sur le projet de loi de règlement pour l'année 1998. L'article 24 de la nouvelle loi dispose en effet que « les comptes de concours financiers (qui retracent les prêts et avances consentis par l'Etat) sont dotés de crédits limitatifs, à l'exception des comptes ouverts au profit des Etats étrangers et des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international, qui sont dotés de crédits évaluatifs ».

II. LES SOLDES DES COMPTES SPÉCIAUX DU TRÉSOR AU 31 DÉCEMBRE 2000

Le paragraphe II du présent article arrête les soldes des comptes spéciaux du Trésor dont les opérations se poursuivent en 2001. Par rapport à la fin de l'exercice antérieur, le solde global de ces comptes se dégrade encore de 13 milliards de francs.

Solde des opérations des comptes spéciaux du Trésor

(en milliards de francs)

1997

1998

1999

2000

Soldes créditeurs

31,8

35,6

30,4

30,7

Soldes débiteurs

279,2

274

286,9

300,1

Solde global

- 247,4

- 238,4

- 256,5

- 269,4

La situation des comptes dont les soldes sont débiteurs est contrastée. Certains comptes voient leur solde s'améliorer nettement. Tel est le cas du compte n° 903-54 relatif aux avances sur le montant des impositions revenant aux départements, communes, établissements et divers organismes dont le solde s'améliore de 7,1 milliards de francs.

III. REPORT ET RÉPARTITION DES SOLDES

Le paragraphe III du présent article reporte les soldes arrêtés au II à la gestion suivante, en application de l'article 24 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 à l'exception d'un solde débiteur de 2,014 milliards de francs concernant les comptes d'opérations monétaires et d'un solde débiteur de 11,03 milliards de francs relatif aux comptes d'avances qui font l'objet d'une affectation par l'article de transport aux découverts du Trésor.

Le présent projet de loi de règlement propose également d'affecter un solde débiteur de 629 millions de francs concernant les comptes de prêts aux découverts du Trésor :

- Remises de dettes aux pays les moins avancés : 526.798.658,02 francs ;

- Abandon de créances détenues sur la société nouvelle du journal l'Humanité : 13.000.000 francs ;

- Abandon de créances détenues sur l'Agence France-Presse : 90.000.000 francs.

Total : 629.798.658,02 francs.

Les deux derniers abandons de créances ont été autorisés par l'article 2 de la loi de finances rectificative pour 1999 et par l'article 6 de la loi de finances rectificative pour 2000. Votre commission avait rejeté ces articles en indiquant que l'aide à l'Humanité ne faisait l'objet de la part de l'actionnaire principal d'aucun effort financier du même ordre et que l'aide à l'Agence France-Presse ressemblait à une « recapitalisation masquée » alors qu'aucun accord d'entreprise n'avait défini de stratégie à la hauteur des enjeux.

De la portée des autorisations données en loi de règlement

Le Parlement avait déjà adopté le même transfert aux découverts du Trésor correspondant à l'abandon de créance de 45.000.000 de francs institué par l'article 2 de la loi de finances rectificative pour 1999 dans la loi de règlement pour 1999 . Pour des raisons inexplicables, ce transfert n'a pas eu lieu sur le plan comptable en 1999. Il a eu lieu en 2000, en infraction avec le principe d'annualité budgétaire.

Cette absence de prise en compte du vote du Parlement oblige le gouvernement à demander une nouvelle autorisation, sur le même transfert , mais pour 2000 cette fois. Comme le transfert a de toute façon déjà eu lieu sur le plan comptable, le projet de loi de règlement oblige à une certaine gymnastique. L'article 9 du présent projet de règlement autorise le transfert sur le plan juridique, l'article 13 en annule les conséquences sur le plan comptable.

IV. PLAFOND DE REMISE DE DETTES

Enfin, le paragraphe IV propose de ramener le montant du plafond de remise de dettes concernant le Fonds de conversion de Libreville autorisé à hauteur de 2,366 milliards de francs. Ce fonds n'est en effet plus utilisé depuis 1998 en raison notamment du lancement de l'initiative sur la dette des pays pauvres très endettés et il est proposé de limiter son montant aux sommes déjà engagées.

L'Assemblée Nationale a adopté à ce paragraphe un amendement rédactionnel.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 10

Comptes spéciaux du Trésor définitivement clos au titre de l'année 2000

Commentaire : le présent article vise à arrêter les résultats d'un compte d'affectation spéciale définitivement clos au 31 décembre 2000.

Un seul compte d'affectation spéciale a été définitivement clos à la fin de l'exercice 2000 contre six à la fin de l'exercice 1999 . Il faut voir dans le ralentissement du rythme de suppression des comptes d'affectation spéciale la reconnaissance de l'utilité de cette formule d'affectation de recettes quand elle est strictement encadrée et respecte tant la lettre que l'esprit de l'ordonnance organique relative aux lois de finances.

Le compte clos à la fin de l'exercice 2000 est le compte n° 902-26 FITTVN « Fonds d'investissement des transports terrestres et des voies navigables » créé à l'initiative du Sénat par l'article 47 de la loi n° 94-1162 du 29 décembre 1994. La gestion de ce compte n'a pas donné toute satisfaction. L'objectif initial d'accroître les moyens disponibles dans la politique des transports n'a pas été atteint. Le total des dépenses concernées au budget général et au compte d'affectation spéciale a en effet diminué de 1 milliard de francs entre 1996 et 2000.

La Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 a de plus déploré le financement croisé d'opérations par le budget général et le compte d'affectation spéciale.

La formule du compte d'affectation spéciale ne lui paraît pas adaptée pour financer des investissements pluriannuels. La Cour des comptes constate ainsi que « l'obligation d'ouvrir des montants d'AP et de CP égaux, puisque les AP comme les CP ne peuvent dépasser la recette prévue conduit à un phénomène d'accumulation des CP » et à de très importants reports de crédits.

Toutefois, le dynamisme des recettes du FITTVN aurait permis d'abonder régulièrement le fonds en crédits de paiement. Si celui-ci a été mal utilisé, il faut en trouver la cause dans les choix d'investissements, l'absence de politique cohérente de financement des infrastructures et surtout les méthodes de travail du ministère de l'équipement et des échelons déconcentrés.

L'ensemble des crédits de paiement disponibles au terme de l'exercice 2000 devraient être reportés sur les différents chapitres d'accueil du budget général. Il y aura lieu de juger de la réalité de ces reports lors de l'examen de la loi de règlement pour 2001.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11

Pertes et profits sur emprunts et engagements de l'Etat

Commentaire : le présent article arrête le solde des pertes et profits sur emprunts et engagements de l'Etat à la somme de - 4,42 milliards de francs au 31 décembre 2000.

En vertu des dispositions du cinquième alinéa de l'article 35 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959, le projet de loi de règlement établit le compte de résultat de l'année au sein duquel figurent les profits ou les pertes résultant de la gestion des opérations de trésorerie.

Ces opérations de trésorerie ont dégagé un solde négatif de - 4,42 milliards de francs en 2000 contre - 4,83 milliards de francs en 1999, -3,42 milliards de francs en 1998, - 2,53 milliards de francs en 1997 et - 1,99 milliard de francs en 1996.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 12

Reconnaissance d'utilité publique des dépenses comprises dans une gestion de fait

Commentaire : le présent article vise à reconnaître d'utilité publique une série de dépenses relevant de la gestion de fait.

La gestion de fait consiste dans le maniement irrégulier de deniers publics par des personnes qui ne sont pas comptables publics ou qui n'agissent pas sous le contrôle ou pour le compte de comptables publics.

Comme les comptables de droit, les comptables de fait doivent rendre compte de leur gestion au juge des comptes. S'agissant des deniers de l'Etat, le juge des comptes est la Cour des comptes.

I. LA PROCÉDURE DE RECONNAISSANCE D'UTILITÉ PUBLIQUE

Dans les affaires qui lui sont soumises, la Cour des comptes est tout d'abord conduite à déterminer les éléments constitutifs de la gestion de fait en séparant, au sein des masses financières concernées, celles répondant à l'objet qui leur avait initialement été assigné et celles affectées, en-dehors du circuit comptable de l'Etat, à des dépenses à caractère budgétaire. Ces dernières sont seules constitutives de la gestion de fait.

Conformément aux dispositions de l'article L. 131-2 du code des juridictions financières, la Cour des comptes juge alors les comptes que lui avaient rendus les personnes qu'elle avait déclarées comptables de fait.

Elle est ainsi conduite à établir la ligne de compte de la gestion de fait et à enjoindre au comptable de fait de reverser auprès d'un comptable public l'excédent éventuel des recettes sur les dépenses.

Ensuite, la Cour des comptes fait application du troisième alinéa de l'article 60-XI de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 qui dispose que « les gestions irrégulières entraînent, pour leurs auteurs, déclarés comptables de fait par la Cour des comptes, les mêmes obligations et responsabilités que les gestions patentes pour les comptables publics ». Il s'agit alors de rendre le comptable de fait responsable sur ses propres deniers de la régularité des opérations auxquelles il a procédé.

Le Parlement doit ensuite statuer sur l'utilité publique des dépenses de la gestion de fait. En effet, lui seul est habilité, dans le cadre d'une loi de finances, à déterminer la nature, le montant et l'affectation des charges de l'Etat.

Ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 60-XI de la loi du 23 février 1963, la Cour enjoint les comptables de fait « de produire une décision du Parlement, prise en la forme constitutionnellement requise pour le vote des lois de finances, statuant sur l'utilité publique des dépenses de la gestion de fait ».

Le comptable de fait, muni de cette décision du Parlement peut alors se retourner vers la Cour des comptes afin d'être définitivement déchargé de l'obligation de restituer les sommes correspondantes.

La reconnaissance d'utilité publique des dépenses comprises dans les gestions de fait se fonde sur les arrêts de la Cour des comptes qui, après enquête, est en mesure de définir le montant exact des sommes qui, bien que n'ayant pas été manipulées selon les règles de la comptabilité publique, ont toutefois le caractère d'utilité publique par leur destination.

Quant aux sommes auxquelles la Cour a dénié le caractère d'utilité publique, elles sont soumises à une procédure de recouvrement parallèle qui peut conduire à une procédure contentieuse.

II. LA GESTION DE FAIT DU CENTRE NATIONAL DE COOPÉRATION DES BIBLIOTHÈQUES PUBLIQUES

Le Centre national de coopération des bibliothèques publiques (CNCBP) est la nouvelle appellation qui a été donnée, par arrêté ministériel du 10 janvier 1986, à la bibliothèque publique de Massy, antérieurement rattachée par arrêté ministériel du 12 janvier 1984 au ministère de la culture et de la communication en tant que service extérieur de la direction du livre et de la lecture.

Enfin, par arrêté ministériel du 5 mai 1987, le ministère de la culture a reçu l'autorisation d'encaisser le prix des prestations fournies par le CNCBP.

En outre, sur le plan financier, le CNCBP a été pourvu d'une régie d'avances par arrêté du 2 septembre 1986 et d'une régie de recettes par arrêté du 29 janvier 1990.

Toutefois, avant la mise en place effective d'une régie de recettes, des recettes relatives à l'activité du CNCBP ont été encaissées par l'intermédiaire de deux associations :

- l'association pour la promotion et l'extension de la lecture (APPEL) à partir d'avril 1988 : les recettes encaissées ont consisté en des droits d'inscription à des stages, des participations aux journées d'études et des produits de ventes de périodiques ou encore des produits des locations d'expositions et de cassettes ;

- l'association « Bibliothèques en coopération » à partir d'août 1989 : les recettes encaissées ont consisté dans des frais pédagogiques de stages et dans des produits provenant des journées d'études et opérations de formation sur place, des publications, de la location de films documentaires et des expositions itinérantes, etc.

La Cour des comptes a estimé que ces deux associations n'étaient pas en droit de percevoir des recettes directement afférentes à l'activité du CNCBP, qui auraient donc du être encaissées par un comptable public ou un régisseur de recettes. La Cour a ainsi jugé que les deux associations s'étaient immiscées sans titre dans l'encaissement de recettes de l'Etat et devaient rendre compte de l'emploi de ces recettes au juge financier.

Dans un premier arrêt du 11 septembre 1992, elle a déclaré provisoirement comptables de fait les deux anciens directeur du CNCBP, de même que les représentants des associations APPEL et « Bibliothèques en coopération ».

Dans un deuxième arrêt du 5 janvier 1994, la Cour a statué définitivement sur la qualité de comptable de fait des deniers de l'Etat des personnes précédemment évoquées et fixé provisoirement la ligne de compte des opérations réalisées dans le cadre de la gestion de fait, tout en demandant des justifications supplémentaires.

Dans un troisième arrêt en date du 22 mai 1995, la Cour a fixé provisoirement la ligne de compte suivante :

- s'agissant des dépenses pour lesquelles est intervenue l'association APPEL : la recette a été admise pour 273.190,95 francs ; la dépense a été allouée pour 212.763,73 francs. Le reliquat de recettes, soit 60.427,22 francs correspond à une somme de 50.000 francs reversée à l'association « Bibliothèques en coopération » et une somme de 10.427,22 francs reversée au Trésor public. Les dépenses ont essentiellement consisté en frais de déplacement, de restauration, de location et décoration de salles de sport, cotisations à des associations professionnelles et inscriptions à des journées d'études ;

- s'agissant des dépenses pour lesquelles l'association « Bibliothèques en coopération » est intervenue : la recette a été admise pour 560.045,47 francs (y compris les 50.000 francs versés par APPEL) ; la dépense a été allouée pour 340.863, 75 francs. Le reliquat de recettes, soit 219.181,72 francs correspond à une somme reversée au Trésor public de 216.257,56 francs et à une somme de 2.924,16 francs qu'il a été enjoint à l'un des deux anciens directeurs du CNCBP et, solidairement avec lui, à l'association « Bibliothèques en coopération » de reverser dans la caisse d'un comptable du Trésor. Les dépenses recouvraient essentiellement, outre le reversement de la TVA, les salaires du bibliothécaire, les frais de mission et de transport des enseignants et des stagiaires, les indemnités aux vacataires, les voyages d'études, congrès et travaux photographiques.

Les gestionnaires de fait n'ont été soumis à aucune amende et les dépenses n'ont été admises que sous réserve de la reconnaissance de leur utilité publique par le Parlement, en la forme constitutionnellement requise par les lois de finances.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Dans le cadre du régime des gestions de fait, la Cour des comptes est appelée à faire reconnaître par le Parlement l'utilité publique de tout ou partie des dépenses concernées, afin, qu'en conséquence, les découverts du Trésor soient augmentés à due concurrence.

Traditionnellement, sauf erreur matérielle, le Parlement adopte sans modification les articles du projet de loi portant règlement du budget relatifs à la reconnaissance d'utilité publique de dépenses comprises dans des gestions de fait.

Votre commission suit ainsi au cas présent les recommandations de la Cour des Comptes.

Décision de votre commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 13

Transport aux découverts du Trésor des résultats définitifs de 2000

Commentaire : conformément à l'article 35 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, le présent article récapitule le compte de résultat de l'année et autorise son transfert au compte permanent des découverts du Trésor.

Le paragraphe I porte en augmentation des découverts du Trésor les sommes mentionnées aux articles 7, 9 (III) et 11 soit :

l'excédent des dépenses sur les recettes du budget général de 2000


192,29 milliards de francs

le résultat net du compte spécial du Trésor « Pertes et bénéfices de change » soldé chaque année


2.014,67 millions de francs

les remises de dettes aux pays les moins avancés


526,79 millions de francs

les abandons de créance

103 millions de francs

les pertes et profits sur emprunts et engagements

4.418,30 millions de francs

la perte sur le compte d'avances « Avances aux départements sur le produit de la taxe différentielle sur les véhicules à moteurs »


11,03 milliards de francs

pour un total de 210,39 milliards de francs.

Le paragraphe II porte en atténuation des découverts du Trésor la somme mentionnée à l'article 10 correspondant aux résultats nets du compte spécial du Trésor clos au 31 décembre 2000 pour un montant de 4,20 milliards de francs, ainsi que la régularisation d'une opération de 1999 ayant une incidence sur les découverts du Trésor pour la somme de 45 millions de francs 22 ( * ) .

Un seul compte spécial du Trésor a en effet été clos au 31 décembre 2000 ; il s'agit du « Fonds d'investissement des transports terrestres et voies navigables ».

Le montant net des découverts du Trésor après inscription du résultat de 2000 (206,139 milliards de francs) devrait s'élever à 4.197,87 milliards de francs.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Alain Lambert, président, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur général , sur le projet de loi n° 13 (2001-2002), adopté par l'Assemblée nationale, portant règlement définitif du budget de 2000 .

En introduction, M. Alain Lambert, président , a indiqué qu'un projet de loi de règlement était toujours un constat fondé sur le contrôle a posteriori de l'exécution des lois de finances de l'année, c'est-à-dire un quitus comptable qui en aucun cas ne valait acceptation de la politique et des pratiques budgétaires du gouvernement, notamment pour l'année 2000, qu'il a qualifiée d'année des « occasions budgétaires manquées ».

S'agissant de la politique budgétaire mise en oeuvre en 2000, il a rappelé que la loi de finances initiale avait été modifiée, de manière assez exceptionnelle, par deux collectifs budgétaires. Il a d'abord évoqué le premier collectif budgétaire, en juin, qui consistait à tirer les conséquences de l'affaire de la « cagnotte » et à réévaluer avec retard le niveau des recettes fiscales et non fiscales, sans baisser pour autant le niveau du déficit - sur les 51,4 milliards de francs de recettes supplémentaires seulement 49 millions de francs, soit 0,098 % du total, avaient été affectés à la réduction du déficit budgétaire. Puis, il a indiqué que le second et traditionnel collectif de fin d'année avait réévalué le niveau des recettes fiscales de 40,6 milliards de francs et avait reporté 15 milliards de francs de recettes non fiscales sur 2001. Au total, le second collectif se traduisait donc par une nouvelle progression de la dépense et une réduction du déficit budgétaire de seulement 5,8 milliards de francs.

M. Alain Lambert, président, a ensuite évoqué la loi organique du 1er août 2001 modifiant l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 qui revalorise la portée concrète des projets de loi de règlement et, à travers elle, le nécessaire contrôle de l'exécution du budget. Il a parlé de « chaînage vertueux » entre la discussion de la loi de règlement n-1 et l'examen de la loi de finances n+1, en estimant que les débats pourraient ainsi gagner en cohérence, en efficacité et donc en intérêt.

Avant de revenir sur les principales évolutions des recettes, des dépenses et du solde d'ensemble du budget de l'Etat en 2000, il a rappelé les principales caractéristiques de la croissance économique ayant accompagné l'exécution budgétaire.

Alors que la croissance 2001 devrait être de l'ordre de 2 %, il a fait observer que l'année 2000 pouvait être considérée comme une année idéale, avec une croissance de 3,1 %. Cependant, il a estimé que 2000 était, d'une certaine façon, une croissance en trompe-l'oeil : si l'économie française a connu en 2000 une croissance soutenue, supérieure à son potentiel de 2 % à 2,5 % et à la prévision du Gouvernement en loi de finances initiale qui s'élevait à 2,8 %, il a observé que le rythme d'évolution infra-annuelle de la croissance s'était ralenti de 1999 à 2000, ce ralentissement semblant s'expliquer par le renchérissement des produits pétroliers, le prix du baril de pétrole ayant atteint en septembre 2000 son maximum depuis 1991.

M. Alain Lambert, président a donc estimé que les ressorts de la croissance n'avaient pas reposé sur les enchaînements imaginés par le gouvernement, qui avait notamment sous-estimé la progression de l'investissement des entreprises et surestimé la consommation des ménages. Il en a conclu que le gouvernement avait eu la chance de profiter d'une bonne conjoncture économique dont il s'était attribué la paternité, alors même que ses différentes composantes ne correspondaient pas à ce qu'il avait envisagé.

Dans le second volet de sa présentation, le président a indiqué que le budget de 2000 s'était caractérisé, comme au cours des deux années précédentes, par l'absence de volonté de maîtrise de la dépense publique et par le maintien d'une forte pression fiscale, dont témoignait le niveau toujours historiquement élevé des prélèvements obligatoires.

Il a rappelé que les recettes nettes du budget général avait augmenté de 1,1 % en 2000, soit un niveau plus faible que la moyenne sur 1996-2000 mais que l'évolution était très contrastée entre une faible progression des recettes fiscales nettes (+ 0,6 %) et un fort dynamisme des recettes non fiscales (+ 18,8 %).

Concernant les impôts directs, il a souligné que le dynamisme des recettes tendancielles avait été si fort en 2000 que l'impact des quelques aménagements de droits - baisse du taux des premières tranches du barème de l'impôt sur le revenu pour l'essentiel - s'était trouvé largement absorbé. Ainsi, l'augmentation de l'impôt sur le revenu jugée « exceptionnellement rapide » par la Cour des comptes en 1999 était restée dynamique en 2000, avec une hausse de 4,7 %. L'impôt sur les sociétés a également augmenté de 7,3 %, après une progression de 27,4 % en 1999. Les impôts directs ont en revanche ralenti, la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) nette n'ayant progressé que de 2,4 % en raison principalement de la baisse d'un point du taux normal de la TVA au 1er avril 2000. De même, la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) a diminué de 1,5 % par rapport à 1999, en raison du mécanisme dit de « TIPP flottante ».

Au total, il a noté qu'après le niveau exceptionnellement élevé de prélèvements fiscaux en 1999, dénoncé par le Sénat - 70 % de l'augmentation de la richesse nationale avaient été captés par la sphère publique - l'année 2000 avait marqué une pause dans l'augmentation régulière des prélèvements. Mais il a fait observer que la très faible progression des recettes fiscales nettes s'expliquait surtout par le transfert de 45,2 milliards de francs de recettes fiscales, soit la quasi-totalité des droits sur les tabacs, à la sécurité sociale pour alimenter le fonds pour la réduction des charges salariales (FOREC) et donc essayer de « boucler » le financement des « 35 heures ».

Par ailleurs en 2000, il a fait observer que les recettes non fiscales ont progressé de 18,8 %, soit une augmentation de 32 milliards de francs, cette progression s'expliquant par les reports des opérations de rebudgétisation et par l'augmentation de presque toutes les rubriques desdites recettes. Le gouvernement a cependant choisi de reporter 18 milliards de francs de recettes non fiscales sur 2001, soit un montant légèrement supérieur à celui déjà non prélevé en 1999.

Au total, M. Alain Lambert , président, a déploré la modicité de la réduction du taux de prélèvements obligatoires, celui-ci restant le plus élevé jamais connu en France après celui de 1999 (respectivement 45,6 % et 45,2 % du PIB). Il a relevé que la triste exception fiscale française se perpétuait donc, au détriment de la compétitivité des entreprises et donc du pays.

Concernant les dépenses, le président a noté que le gouvernement avait atteint en l'an 2000 son objectif de quasi-stabilité des dépenses en volume mais que cet objectif n'avait été atteint que grâce à l'inflation, celle-ci ayant été de 1,6 %, annulant l'augmentation, identique, des dépenses nominales. Il a par ailleurs souligné que le gouvernement avait pris des libertés avec le principe de la permanence des méthodes budgétaires afin d'afficher le respect des engagements initiaux en excluant de son calcul le transfert de 39,5 milliards de francs de dépenses du budget de l'emploi vers le FOREC. Il en a conclu que la permanence des règles et méthodes comptables de l'Etat était nécessaire.

Ensuite, il a rappelé que la dépense budgétaire demeurait rigide en 2000.

Il ainsi indiqué que les dépenses du titre I « Dette publique et dépenses en atténuation de recettes » s'élevaient à 625,69 milliards de francs, en augmentation de 5,9 % par rapport à 1999. De même, les dépenses de fonctionnement progressent de 2,5 % et le poids des dépenses de fonction publique dans le budget général était passé de 41,6 % en 1999 à 42,2 % en 2000.

Dans le dernier volet de sa présentation, M. Alain Lambert, président, a indiqué que le déficit budgétaire en 2000 était toujours proche de 200 milliards de francs : fixé à - 215,3 milliards de francs par la loi de finances initiale, réduit à seulement - 209,7 milliards de francs par la seconde loi de finances rectificative, le solde général s'est élevé pour 2000 en exécution à - 191,2 milliards de francs, soit une diminution de près de 15 milliards de francs par rapport au solde exécuté en 1999. Exprimé au sens de la comptabilité nationale, l'Etat connaît cependant en 2000 un besoin de financement de 221 milliards de francs en très légère progression par rapport à celui de 1999, ce qui représente 2,41 % du PIB.

Le président a conclu que l'Etat restait en 2000 la seule collectivité publique déficitaire, en rappelant que les collectivités locales avaient dégagé une capacité de financement de 24,9 milliards de francs, la sécurité sociale de 54 milliards de francs et les organismes divers d'administration centrale de 15,9 milliards de francs. Il a cité les propos de la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances en 2000 : le niveau du déficit des administrations publiques est toujours trop important par rapport à celui de nos principaux partenaires européens. Enfin, il a ajouté que l'effort de réduction des déficits publics, et en premier lieu celui de l'Etat, devait incontestablement être amplifié et qu'il était regrettable que le gouvernement n'ait pas profité des surplus de recettes fiscales enregistrés en 2000 pour réduire le déficit budgétaire et donc l'endettement. La réduction des déficits est une question élémentaire de bonne gestion budgétaire, de compétitivité par rapport à nos principaux partenaires, mais aussi et surtout de solidarité inter-générationnelle.

En conclusion de cette présentation, le président a proposé, conformément à la tradition, de prendre acte de la traduction comptable de la gestion 2000 en adoptant le projet de loi de règlement pour 2000.

Un débat s'est alors ouvert.

M. Yves Fréville a évoqué la notion de déficit invisible en prenant l'exemple de la suppression de la vignette automobile, dont le coût, de 12 milliards de francs, était imputé sur le compte d'avances des collectivités locales et non pas sur le budget général. Il a par ailleurs regretté la faible consommation des crédits d'investissement de plusieurs ministères, dont les ministères de l'intérieur et de l'enseignement supérieur.

M. Jacques Oudin a souscrit aux observations de M. Yves Fréville sur le rythme de consommation des dépenses d'investissement et il a souhaité une plus grande transparence du budget de l'Etat.

M. Jacques Pelletier a regretté que les ministères dits « dépensiers » voient leurs crédits gelés et soient, dès le début de l'exercice budgétaire, dans l'incapacité de dépenser des crédits pourtant autorisés par la représentation nationale.

M. François Trucy a interrogé le président sur l'évolution du compte spécial du Trésor recevant les recettes de privatisations.

M. Alain Lambert, président, a remercié les intervenants en soulignant tout l'intérêt d'examiner le projet de loi de règlement 2000 avant l'examen du projet de loi de finances pour 2002. Il a rappelé à M. Yves Fréville que le besoin de financement de l'Etat s'élevait à 221 milliards de francs et constituait le seul indicateur reconnu par la Commission européenne.

En réponse à M. Jacques Oudin, il a souligné l'importance de faire apparaître plus clairement le taux de consommation des crédits d'investissement votés par le Parlement.

Il a ensuite répondu à M. Jacques Pelletier que les crédits d'investissement étaient trop souvent gelés puis annulés en raison du volume toujours plus important des crédits de fonctionnement et de la rigidité de ce type de dépense.

Enfin, il a rappelé que M. Paul Loridant, rapporteur spécial des comptes spéciaux du Trésor, établirait l'évolution du compte d'affectation spéciale des privatisations, répondant ainsi au souhait de M. François Trucy.

A l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'ensemble des articles puis le projet de loi de règlement du budget de 2000 sans modification .

TABLEAU COMPARATIF
RÉPONSES DE LA COUR DES COMPTES AUX QUESTIONS POSÉES PAR LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT SUR LE PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT DU BUDGET
DE 2000

__________

QUESTION 1

De façon générale, la prise en compte des engagements « hors bilan » de l'Etat est fragmentaire et insuffisante. Afin de remédier à cet état de fait, comment la Cour des Comptes estime-t-elle possible d'approfondir l'analyse des engagements de l'Etat au titre des pensions des fonctionnaires ?

Réponse

1 . Le cadre des engagements hors-bilan de l'Etat doit continuer à être précisé.

La Cour a consacré un chapitre de son dernier rapport sur l'exécution des lois de finances aux engagements hors-bilan de l'Etat et au traitement comptable des engagements au titre des retraites des fonctionnaires. Ses observations portaient tant sur le suivi comptable des garanties d'emprunt et des risques financiers associés aux garanties de nature très diverse accordées par l'Etat que sur les lacunes du rapport de présentation du compte général de l'administration des finances 23 ( * ) .

La direction du Trésor a informé la Cour des dispositions qui avaient été prises au sein du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie en vue de mettre en oeuvre les recommandations dudit rapport.

Ainsi, s'agissant de la dette garantie, la mission de conseil en gestion publique créée au sein du contrôle d'Etat va être chargée de réaliser un audit en organisation sur le suivi des garanties et de rédiger un guide des procédures. Un système de remontée et de centralisation systématique de l'information devrait permettre le recensement exhaustif des engagements accordés. Une réflexion méthodologique va être conduite sur la manière la plus appropriée de retracer dans les comptes de l'Etat les différents risques afférents à ces engagements.

A cet effet, des groupes de travail inter-directionnels vont être mis en place. Le projet de loi des finances pour 2002, dans son article 7, crée le comité des normes de comptabilité publique prévu à l'article 30 de la loi organique 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

Pour sa part, la Cour poursuivra ses investigations sur les engagements hors-bilan de l'Etat dans le cadre de la préparation du prochain rapport sur l'exécution des lois de finances.

2 . L'analyse des engagements de l'Etat au titre des pensions des fonctionnaires doit être approfondie

Le problème des engagements de l'Etat au titre des pensions des fonctionnaires est plus délicat et l'analyse doit être approfondie.

Dans son dernier rapport sur l'exécution des lois de finances, la Cour a cité de larges extraits (pages 176 et 177) de la lettre, en date du 6 juin 2000, que le Premier Président a reçue de la secrétaire d'Etat au budget. Cette lettre souligne les difficultés méthodologiques d'un tel chiffrage et présente une fourchette d'évaluation comprise entre 3 900 MdF et 4 500 MdF, fondée sur un taux d'actualisation de 6% ou de 5% et sur la méthode des droits acquis, qui est l'une des méthodes recommandées aux entreprises par les normes comptables internationales.

Au-delà de cette première tentative de chiffrage dont il convient de souligner qu'elle n'est pas fondée sur la différence entre les cotisations actualisées et les prestations actualisées, puisqu'il n'existe pas de cotisation employeur sauf pour La Poste, France Telecom et les offices et établissements publics de l'Etat dotés de l'autonomie financière, mais sur les charges brutes de pensions des fonctionnaires actifs ou retraités et de leurs ayants droit, plusieurs points méritent d'être éclairés : la notion d'engagement, la finalité d'un chiffrage et le cadre comptable.

2.1 . La notion d'engagement de l'Etat

La notion d'engagement de l'Etat ne peut pas être inférée littéralement de la situation comptable des entreprises qui ont contracté des engagements de retraite complémentaires ou supplémentaires vis-à-vis de leurs salariés.

Au-delà des disciplines du traité sur la Communauté européenne qui encadrent plus strictement les déficits publics excessifs des Etats membres, le régime de retraite des fonctionnaires à la fois se rapproche des autres régimes obligatoires, de base ou complémentaires et en diffère. Il s'en rapproche en ce qu'il ne fait pas naître d'autres engagements vis-à-vis des assurés que ceux de garantir le paiement des pensions liquidées. Mais il en diffère profondément. En effet, la pension de retraite est un droit direct, inscrit au « Grand livre », sur l'Etat qui joue à la fois le rôle d'employeur et de caisse de retraite. En outre, le cotisant est en dernier ressort le contribuable.

L'estimation chiffrée d'un stock d'engagements de l'Etat en valeur actuelle selon la réglementation en vigueur ne saurait refléter exactement la réalité juridique particulière sous-jacente où les actifs n'ont pas de droit au maintien de la législation existante et où les retraités disposent d'un droit à pension sur l'Etat sans pour autant que le montant de la créance soit précisément fixé, l'évolution du montant de la pension relevant d'une décision largement discrétionnaire de l'Etat. Au lieu d'aider à clarifier les enjeux, cette approche risquerait de constituer un facteur de rigidité.

Il convient donc de bien préciser la notion d'engagement en matière de retraite en évitant de donner aux divers chiffrages une portée insuffisamment définie.

2.2. La finalité d'un chiffrage

La finalité d'un chiffrage en comptabilité générale est de rendre compte de la réalité économique et de fournir des informations significatives sur le niveau des engagements. Les comparaisons internationales montrent d'ailleurs que l'approche strictement comptable tendant à assimiler l'Etat à une entreprise est loin d'être dominante dans les pays de l'OCDE.

Le coût à long terme du régime des pensions civiles et militaires de retraite (PCMR) doit être calculé, porté à la connaissance du Parlement, commenté et utilisé dans les négociations sociales de la fonction publique. Il ne peut se réduire à un seul chiffre, mais doit être accompagné de variantes et bien faire ressortir les évolutions de long terme, tant rétrospectives que prospectives. A cet égard, il sera souhaitable de bien faire apparaître la très grande sensibilité des résultats aux hypothèses retenues dans le calcul des différentes variantes.

Cet effort de chiffrage économique et prospectif ne sera réellement utile que s'il permet de mieux appréhender le caractère soutenable des engagements de retraite pour les finances publiques, les marges de manoeuvre budgétaires et les interrelations entre le taux de croissance, l'emploi dans la fonction publique et l'évolution des traitements.

Dans ce contexte, la connaissance plus précise des données démographiques est essentielle. Elle doit porter à la fois sur les prévisions de départ à la retraite des fonctionnaires et sur l'établissement d'une table de mortalité spécifique.

S'agissant des données démographiques, la Cour n'a connaissance que des éléments d'analyse issus du rapport du commissariat général du Plan « Enjeux et stratégie pour le renouvellement », établi par un groupe de travail « Gestion de l'emploi public » présidé par M. Bernard Cieutat, conseiller maître (mars 2000).

Il en ressort notamment que pour les agents de l'Etat civils et militaires, la croissance des départs à la retraite s'accélère. Au creux de la bosse démographique, le nombre annuel des départs était d'environ 40 000 ; il dépassera 80 000 à partir de 2004, atteindra son maximum de 96 000 en 2009, puis se stabilisera à plus de 90 000 jusqu'en 2015.

Dans les administrations civiles de l'Etat, le nombre de départs supplémentaires à enregistrer d'ici 2012 par rapport au niveau atteint en 1999 sera de 286 000, et 1 018 000 personnes, soit environ 57% des agents en fonction en 1999, seront partis à la retraite.

Ces données doivent être affinées, car elles conditionnent à la fois la stratégie de recrutement dans la fonction publique et le rythme d'évolution en valeur actuelle des charges nettes de retraites des fonctionnaires.

Mais il est aussi urgent d'établir, comme la secrétaire d'Etat au budget en reconnaissait la nécessité dans sa lettre du 6 juin 2001, une table de mortalité spécifique aux fonctionnaires, mise à jour périodiquement, afin de prendre en compte une espérance de vie à soixante ans plus élevée que dans le secteur privé.

2.3 Le cadre comptable

La perspective de la certification des comptes de l'Etat rend la Cour particulièrement attentive à la définition de normes comptables précises d'autant qu'elles sont susceptibles d'être transposées aux organismes de sécurité sociale et d'être étendues aux mutuelles et aux organismes de retraite complémentaire, dans le prolongement du nouveau plan comptable applicable aux organismes de sécurité sociale.

A cet égard, deux questions se posent.

La première concerne la place des informations sur les engagements de retraite dans la comptabilité de l'Etat. Il appartiendra au comité des normes de comptabilité publique de trancher cette question. L'analyse qui précède conduirait à privilégier la solution d'une annexe, à l'instar des dispositions de l'article L 123-13 du nouveau code de commerce, plutôt qu'une comptabilisation en classe 8 qui impliquerait une notion d'engagement ferme et irrévocable sur un montant cerné avec précision, ce qui n'est pas le cas des engagements de retraites sauf pour les pensions liquidées.

La seconde concerne l'identification du compte du régime PCMR. Comme la Cour l'a souligné dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2000 (p. 48), les explications données dans le rapport de présentation du compte général de l'administration des finances sur les charges et les ressources du régime PCMR sont insuffisantes. Seule la création d'un compte d'affectation spéciale, prévue par l'article 21 de la loi organique 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances pour retracer « les opérations relatives aux pensions et avantages accessoires » , permettra de définir avec précision les différents paramètres comptables du régime PCMR et de la charge nette pour le budget de l'Etat.

C'est à la lumière des progrès accomplis par l'Etat pour appréhender de manière plus précise ses engagements au titre des pensions des fonctionnaires que la Cour pourra elle-même approfondir son analyse dans le cadre des missions qui sont les siennes.

QUESTION 2

Quelle définition comptable de la dette de l'Etat est, selon la Cour des Comptes, la plus opportune pour apprécier complètement le montant des engagements souscrits par l'Etat ainsi que leur évolution ?

Réponse

La « dette de l'Etat » ne figure pas, aujourd'hui, parmi les notions, rubriques ou postes définis dans les documents, de diverses natures, fixant ou expliquant les règles de présentation des comptes de l'Etat.

Pour autant, une information chiffrée relative à la « dette de l'Etat », évaluée en valeur nominale, est fournie dans trois documents de caractère comptable ou quasi-comptable, élaborés et diffusés par le ministère des finances :

- le rapport de présentation du compte général de l'administration des finances (CGAF) : par exemple, dans le rapport relatif au compte général pour 2000, le montant et la structure de la « dette de l'Etat » sont analysés dans les pages 60 et suivantes ;

- les situations périodiques des opérations du Trésor, dont la situation résumé mensuelle - la SROT, en réalité, la plus détaillée - est le pivot : par exemple, le tableau mensuel synthétique des opérations du Trésor (TSOT) détaille « la dette de l'Etat inscrite au bilan » dans la rubrique «dette publique - encours» ;

- le « compte de la dette publique », établi chaque année par la direction générale de la comptabilité publique : par exemple, dans ses pages 8 à 11, le tome 1 de l'édition de 2000 relative à 1999 comprend une série de tableaux intitulés « dette de l'Etat » et « évolution de la dette de l'Etat 1986-1999 » .

Le tableau présentant la « dette de l'Etat » dans le bulletin mensuel de l'Agence France-Trésor reprend les données de la SROT au 31 décembre de chaque année.

Mais, comme l'a fait observer la Cour dans son rapport sur l'exécution du budget de 2000 (pages 148 et 149), les trois documents de référence précités donnent trois montants différents.

Ainsi, au 31 décembre 2000, la « dette de l'Etat s'élevait :

- à 4 765,4 MdF (726,48 Md€)  selon le CGAF ;

- à 4 585,8 MdF (699,11 Md€) selon la SROT ;

- à 4 483,2 MdF (683,45 Md€) selon la méthode de calcul utilisée dans le compte de la dette publique 24 ( * ) .

Ces discordances tiennent, en première analyse, à des différences de définition, mais l'harmonisation nécessaire pour y remédier est aussi liée à des réformes plus profondes du système comptable de l'Etat.

Le choix de la définition la plus adéquate devrait relever de la démarche de normalisation dont l'urgente mise en place, pour les comptes de l'Etat, semble désormais amorcée, notamment avec la création, prévue à l'article 67 du projet de loi de finances pour 2002, d'un « comité des normes de comptabilité publique ». Le travail d'analyse devra porter en particulier sur les normes et pratiques existantes, à la fois comptables et extra-comptables, européennes (Eurostat), internationales (IASC, IFAC, FMI, OCDE, etc.) ou d'autres pays comparables au nôtre.

S'il revient à la Cour d'être partie prenante à ce processus de normalisation, son avis, exposé ci-après, ne reflète, à ce stade, que les préoccupations tirées des contrôles opérés. Etape essentielle de la normalisation, la confrontation des avis reste à conduire.

1 - L'utilité d'un indicateur comptable de la dette globale de l'Etat :

Il ne fait naturellement aucun doute que les comptes de l'Etat doivent recenser exhaustivement toutes ses dettes. Mais faut-il, pour autant, dans les états de synthèse, et notamment le bilan, identifier une rubrique spécifique, et donc un montant, caractéristiques de la globalité des dettes ?

Cette question préalable n'est pas superflue, dès lors que l'indicateur le plus utilisé aujourd'hui pour mesurer l'endettement public - la dette publique au sens du traité de Maastricht - est de nature plus économique que comptable. Répondant à des conventions spécifiques, cet agrégat ressortit plus aux techniques et, dans une certaine mesure, aux finalités de la comptabilité nationale qu'il ne s'apparente à une rubrique d'un état de synthèse de comptabilité générale.

Pour compléter cet indicateur macro-économique, les besoins de la communication financière, notamment à destination des marchés obligataires des dettes souveraines, tendent, de leur côté, à favoriser d'autres indicateurs extra-comptables, ceux-là spécialisés. La notion de dette « nette » - c'est à dire excluant certains éléments de passif et déduisant certains éléments d'actif, liés à la gestion de la trésorerie à court terme (par exemple, les prises et mises en pension) - est ainsi souvent jugée plus significative que celle de dette « brute » telle qu'elle ressort du seul passif du bilan de l'Etat.

Mais quatre arguments contraires, au moins, militent, à l'inverse et de façon plus déterminante, en faveur de l'indicateur comptable.

En premier lieu, la dette publique au sens de Maastricht est un agrégat global couvrant l'endettement de l'ensemble des administrations publiques (Etat, autres administrations centrales - ODAC -, administrations publiques locales, administrations de sécurité sociale, avec élimination des actifs et passifs réciproques). Certes, pour calculer l'agrégat global, l'endettement de l'Etat stricto sensu, qui représente près de 80 % du total, fait l'objet d'une évaluation spécifique, à partir de la comptabilité générale de l'Etat 25 ( * ) , mais ce chiffre n'est pas notifié.

En second lieu, la comptabilité nationale ne dégage pas actuellement d'agrégat reflétant spécifiquement l'endettement de l'Etat. Le passif du compte de patrimoine de l'Etat en donne une mesure, mais encore peu utilisée et intégrant les instruments financiers pour leur valeur de marché.

En troisième lieu, alors que la nouvelle loi organique relative aux lois de finances prévoit que le droit commun comptable doit s'appliquer, sauf exception dûment justifiée, aux comptes de l'Etat, la structure du bilan-type retenue par le plan comptable général (PCG) doit être transposée à l'Etat. Or, le modèle de référence subdivise le passif en quatre groupes d'éléments - I : situation nette, subventions d'investissement et provisions réglementées ; II : provisions pour risques et charges ; III : dettes ; IV : écarts de conversion passif -, dont le troisième, « les dettes », recouvre la notion de dette globale de l'Etat.

La dernière raison concerne le contrôle exercé par le Parlement sur l'exécution des autorisations données dans les lois de finances. Dès lors que la corrélation entre le cumul des soldes budgétaires et l'évolution de l'endettement de l'Etat peut souffrir des entorses (par exemple, sous forme de débudgétisations par extension abusive du champ des opérations de trésorerie), un suivi étroit de la dette s'impose, en particulier pour identifier clairement les variations d'endettement d'origine extra-budgétaire.

2 - Le passif du bilan du CGAF, référence principale :

De ce constat d'ensemble, il résulte aussi que l'indicateur comptable représentatif de la dette de l'Etat dans sa globalité doit être non seulement fondé directement sur les données de la comptabilité générale, tenue selon les normes du PCG, mais également sur une présentation de ces données elle-même conforme aux prescriptions du PCG.

Or, des deux bilans publiés de l'Etat au 31 décembre de chaque année coexistant aujourd'hui, seul celui du CGAF répond, du moins pour l'essentiel, aux normes des états de synthèse prévues par le PCG. Le bilan figurant dans les situations périodiques des opérations du Trésor (SROT, SMOT, TSOT) est le produit de retraitements, non-explicités mais notoirement dérogatoires.

Contrairement à la situation actuelle où la communication financière de l'Etat reprend principalement les données retraitées de la SROT, y compris pour le chiffrage de la « dette de l'Etat », le CGAF et notamment ses états de synthèse devraient être à la fois le cadre et la base de données comptables de référence.

3 - Le besoin de véritables comptes intermédiaires :

Une difficulté pratique ne saurait, toutefois, être sous-estimée : l'information financière infra-annuelle relative à l'Etat - situation de l'exécution budgétaire et situations des opérations du Trésor -, essentiellement mensuelle pour la partie publiée, s'appuie, non pas sur la présentation du CGAF, mais sur la présentation et les données retraitées de la SROT.

La présentation du CGAF a l'inconvénient de n'être utilisée que pour le compte annuel, même si les données de base sont centralisées continûment, et, du reste, servent à l'établissement des situations périodiques des opérations du Trésor.

Justifiés par le souci d'améliorer la signification économique et financière des informations fournies, les retraitements opérés dans la présentation de la SROT consistent, dans certains cas, en des contractions de postes d'actif et de passif. Ils sont souvent liés à l'importance inhabituelle, dans la comptabilité de l'Etat, des comptes d'imputation provisoire et des comptes créditeurs ou débiteurs « divers ». De fait, la présentation de la SROT a été aussi un moyen de pallier cette insuffisance chronique de la comptabilité de l'Etat.

De même que les efforts déjà engagés pour réduire les comptes d'imputation provisoire doivent être accentués, l'Etat aurait avantage à rapidement se doter de véritables comptes intermédiaires infra-annuels, transposition de ceux qui ont fait l'objet, pour les entreprises, de la recommandation n° 99-R-01 du 18 mars 1999 du conseil national de la comptabilité. Les travaux nécessaires pourraient être reliés à ceux à engager pour satisfaire à la nouvelle prescription européenne, actuellement en cours d'approbation, requérant de fournir, à horizon 2005, un compte trimestriel complet des actifs et passifs financiers du secteur des administrations publiques au format de la comptabilité nationale.

Dans son principe, la production d'informations retraitées n'est pas critiquable, du moins à la condition - non remplie aujourd'hui - d'être assortie de renseignements précis sur les retraitements effectués et de tableaux de passage des données comptables de base aux données retraitées. Mais la diffusion des données comptables de base, dans la présentation normalisée de droit commun, est un préalable, y compris pour les situations périodiques infra-annuelles.

4 - Les dettes prises en compte :

Conformément à la structure-type du bilan prévue par le PCG, la « dette de l'Etat » peut être définie comme l'ensemble des dettes inscrites au passif du bilan du CGAF. Ces dettes sont nécessairement comptabilisées en droits constatés. Par ailleurs, l'annexe doit répertorier, également selon les règles du droit commun comptable, les engagements hors-bilan.

Il n'apparaît pas anormal, en revanche, que le classement des dettes soit spécifique à l'Etat. Actuellement, deux catégories sont distinguées : les dettes financières et les dettes non-financières. Classiquement, les dettes financières sont elles-mêmes subdivisées en trois : les dettes financières négociables, les dettes financières non négociables et les concours de la Banque de France.

Sous réserve des aménagements susceptibles d'être apportés à l'issue des futurs travaux de normalisation, on voit mal pourquoi le bilan de la SROT comporte une ventilation des postes différentes du CGAF, avec des intitulés souvent différents, même quand les contenus des rubriques et des postes sont identiques.

L'exhaustivité de la prise en compte des dettes est aujourd'hui loin d'être acquise. L'apparition d'un poste de charges à payer dans les comptes de 2000 (29,6 MdF [4,51 Md€]) a constitué un notable progrès, mais ne concernant que les remboursements de TVA. Les améliorations à venir s'inscrivent dans la généralisation effective de la comptabilisation en droits constatés.

L'importance des comptes de régularisation (72,3 MdF [11,02 Md€]) et des « comptes transitoires ou d'attente créditeurs » (73,0 MdF [11,13 Md€]), tous exclus du montant de 4 765,4 MdF (726,48 Md€) donné pour la « dette de l'Etat » dans le CGAF de 2000, témoigne d'un autre progrès indispensable : l'ampleur des sommes en cause est excessive ; l'existence même de certains comptes pose question ; le contenu et l'intégration ou non dans la « dette de l'Etat » de la plupart des comptes concernés devront être examinés attentivement au titre de la normalisation.

Il convient avant tout de clarifier la ligne de partage entre les dettes correspondant à des emprunts et celles résultant du décalage entre la constatation d'une obligation et son règlement monétaire, seules les premières ayant vocation à figurer dans la « dette de l'Etat ».

5 - Le compte de la dette publique :

Le cas du « compte de la dette publique » ne relève pas de la même problématique d'harmonisation de définitions. Il n'y a pas de raison d'y procéder à des retraitements. Il n'y a pas de raison non plus que les informations et la présentation comptables y diffèrent du CGAF.

Dans la ligne de sa vocation originelle, ce compte est destiné à fournir un inventaire détaillé, constitué d'informations à la fois comptables et extra-comptables, de l'ensemble des engagements souscrits par l'Etat et recensés dans sa comptabilité générale, soit dans des comptes de passif, soit en engagements hors-bilan.

Il devrait donc s'agir d'un développement du CGAF, auquel il gagnerait d'ailleurs à être annexé

6 - Le compte de commerce relatif à la trésorerie et à la dette de l'Etat :

Le compte de commerce n° 904-22 « de gestion active de la dette et de la trésorerie de l'Etat », créé par la loi de finances rectificatives du 30 décembre 2000, va ajouter une pièce supplémentaire à l'information sur la dette. Par son article 22 instituant « un compte de commerce déterminé » retraçant « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l'Etat », la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances consacre l'existence d'un compte spécial dédié, dans la catégorie des comptes de commerce.

Le compte de commerce actuel n'a vocation qu'à retracer certaines opérations de gestion active - aujourd'hui, les contrats d'échanges de taux d'intérêt. Tenue selon les règles du plan comptable général, conformément aux dispositions de l'article 26 de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances, sa comptabilité va faire, chaque année, l'objet « d'un audit contractuel » en application des dispositions législatives précitées créant le compte. Cet audit portera également sur un « rapport d'activité » couvrant non seulement les opérations du compte de commerce mais aussi celles imputées dans le budget général et celles ayant le caractère d'opérations de trésorerie. Selon l'Agence France Trésor, la comptabilité mise en place pour suivre l'ensemble de la gestion de la dette et de la trésorerie s'inspirera des principes comptables bancaires.

Le périmètre du compte de commerce prévu par la nouvelle loi organique pourra être plus large. Les règles définissant la comptabilité patrimoniale associée devront être fixées par une loi de finances. On doit les souhaiter proches des normes comptables applicables aux établissements de crédits. Par ailleurs, cette comptabilité ne saurait être, elle aussi, que soigneusement articulée au CGAF.

QUESTION 3

S'agissant du chapitre 37-91 du budget des Services généraux du Premier ministre (« fonds spéciaux »), comment est-il possible de remédier au décalage significatif entre le montant initial des crédits et celui effectivement réalisé ?

Réponse

Les crédits du chapitre 37-91 du budget des services généraux du Premier ministre (« Fonds spéciaux ») sont abondés chaque année par des ouvertures de crédits réalisées en cours d'année, sous la forme de décrets de répartition, à partir du chapitre 37-95 « dépenses accidentelles » du budget des charges communes. Ces décrets ne sont pas publiés, en application de l'article 20 de la loi du 3 juillet 1978 portant règlement définitif du budget de 1976 disposant que les textes réglementaires intervenant pour l'exécution des lois de finances sont publiés « à l'exception de ceux portant sur des sujets de caractère secret concernant la défense nationale, les affaires étrangères et la sécurité intérieure ou extérieure de l'Etat ».

Au cours des cinq dernières années, ces ouvertures de crédits traduites dans les lois de règlement ont représenté entre 15 % (1998) et 29 % (1997) des crédits votés ; en 2000, elles ont porté sur 75,2 MF, soit 19,1 % des crédits inscrits en loi de finances initiale (393,8 MF). De 1996 à 1998, elles ont bénéficié pour 80 à 90 % à l'article 20 § 10 « dépenses de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) », et pour le reste aux deux autres lignes budgétaires du chapitre ; en 1999 et 2000, elles ont concerné uniquement la ligne DGSE, et les annulations de crédits transcrites dans le collectif de fin d'année n'ont affecté que les deux autres lignes.

Ces affectations de crédits supplémentaires sont décidées par le Premier ministre, responsable de l'emploi des fonds spéciaux en vertu de l'article 42 de la loi du 27 avril 1946, en fonction des besoins apparaissant en cours d'année. La Cour des comptes n'exerçant pas de contrôle sur l'utilisation des fonds spéciaux, elle ne peut pas porter d'appréciation sur la possibilité de remédier au décalage apparaissant entre crédits initiaux et ouvertures nettes de crédits au chapitre 37-91.

QUESTION 4

Quelles améliorations la Cour des comptes estime-t-elle indispensable d'apporter au dispositif des contrats de gestion afin de rendre leur régularité, au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959, moins « discutable » ?

Réponse

Dans le cadre de l'exécution de la loi de finances 2000, le Gouvernement a eu recours au dispositif des « contrats de gestion », nouvelle forme de régulation introduite en 1999 pour ajuster en gestion la consommation des crédits ouverts par le Parlement.

La Cour considère comme légitime la préoccupation de parvenir à une maîtrise accrue des dépenses publiques. La méthode contractuelle employée, qui associe les ministères dépensiers à l'élaboration et à la mise en oeuvre des contrats de gestion, constitue par ailleurs un progrès par rapport aux précédentes formes de régulation budgétaire. Il n'en reste pas moins que le recours aux contrats de gestion fausse la portée de l'autorisation budgétaire délivrée par le Parlement dans le cadre de la loi de finances initiale, la régularité de ce mécanisme au regard des dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959 apparaissant discutable à plusieurs titres :

- la « mise en réserve » de crédits n'est pas prévue par l'ordonnance ;

- les annulations de crédits, pratiquées dans le cadre de la régulation budgétaire le sont en vue de se conformer à un objectif prédéterminé de limitation de la dépense publique et non en raison de leur défaut d'emploi, seul cas prévu par l'ordonnance ;

- la stabilisation des reports à l'exercice suivant au niveau des reports sur l'exercice courant dénature les choix parlementaires dès lors que l'autorisation délivrée en loi de finances initiale ne prend pas en considération le montant de ces reports ; elle inscrit de plus cette autorisation dans un cadre pluriannuel qui n'est pas celui prévu par les textes pour les crédits de paiement .

La régulation budgétaire, c'est à dire l'ajustement par voie réglementaire de la consommation de crédits, afin de prévenir une dégradation de l'équilibre budgétaire, n'étant pas prévue par l'ordonnance du 2 janvier 1959, il est difficile de préciser les modalités de mise en oeuvre qui permettraient de mieux respecter les dispositions de cette même ordonnance.

La perspective de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi organique (loi n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances) apporte cependant un nouvel éclairage à ce débat, le législateur ayant choisi de reconnaître le principe de la régulation budgétaire dans son article 14 et d'en encadrer la mise en oeuvre. Les dispositions de l'article 14 de la nouvelle loi organique étant applicables à compter du 1 er janvier 2002, la régulation budgétaire disposera dès le prochain exercice du fondement juridique qui lui faisait jusqu'alors défaut.

Dans ce nouveau cadre, la régulation budgétaire devra toujours être appréciée au regard de l'impératif premier que constitue la sincérité de la prévision budgétaire, et plus particulièrement des prévisions de recettes, qui conditionne l'équilibre ultérieur de l'exécution budgétaire. A cet égard, et de manière à limiter autant que possible le recours à un dispositif de régulation, il est indispensable que le projet de loi de finances soumis au Parlement soit fondé sur des prévisions de croissance et d'inflation à la fois récentes et réalistes.

Si la régulation budgétaire apparaît néanmoins indispensable en cours d'exécution, sa mise en oeuvre devrait différer sur plusieurs points des mécanismes utilisés avant l'adoption de la nouvelle loi organique :

- la régulation pourra être mise en oeuvre par décret. La nouvelle loi organique dispose en effet à son article 14 que  « afin de prévenir une détérioration de l'équilibre budgétaire défini par la dernière loi de finances afférente à l'année concernée, un  crédit peut être annulé par décret pris sur rapport du ministre chargé des finances». Avant sa publication, tout décret d'annulation devra être transmis pour information aux commissions de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances et aux autres commissions concernées. La loi précise par ailleurs que le montant cumulé des crédits annulés par décret dans le cadre de la régulation et des annulations consécutives à des ouvertures de crédit par décrets d'avance ne peut excéder 1,5% des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à l'année en cours.

- les reports sur les crédits de paiement ne devront pas dépasser à terme 3% des crédits initiaux d'un programme donné. La nouvelle loi organique dispose en effet dans son article 15, applicable aux crédits de l'exercice 2005, que «  les crédits de paiement disponibles sur un programme à la fin de l'année peuvent être reportés sur le même programme ou, à défaut, sur un programme poursuivant les mêmes objectifs », et que les crédits bénéficiant du report « peuvent être majorés dans la limite de 3% des crédits initiaux » inscrits sur le même titre (pour les dépenses de personnel) ou sur les mêmes titres (pour les autres dépenses) du programme à partir duquel les crédits sont reportés.

Le principe d'une association des ministères dépensiers à la mise en oeuvre de la régulation budgétaire, et plus particulièrement à la préparation des décrets d'annulation devrait être préservé.

QUESTION 5

Dans son rapport, la Cour des comptes souligne les difficultés de recouvrement de certaines recettes fiscales (comme la TIPP ou les droits sur les tabacs) et non fiscales (produite des amendes et condamnations pécuniaires, retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat etc.).

Peut-elle retracer, pour ces cinq dernières années l'évolution du taux de recouvrement des principales recettes fiscales et non fiscales ? Par ailleurs, elle précise que « la diligence des services n'est pas en cause » : peut-elle donner les raisons des difficultés de recouvrement qu'elle constate ? A-t-elle des propositions pour améliorer les taux de recouvrement ?

Réponse

Evolution des taux de recouvrement des principales recettes fiscales
et non fiscales

Les taux de recouvrement donnent lieu, de la part de l'administration fiscale elle-même, à autant de calculs que de définitions 26 ( * ) .

S'agissant des recettes fiscales , la Cour a souhaité, à partir du RELF 1999, établir son propre référentiel de calcul des taux de recouvrement, à partir des chiffres retracés dans le compte général de l'administration des finances, dans le fascicule fournissant le développement des recettes budgétaires.

Les taux établis par la Cour sont définis de manière analogue aux taux bruts de l'administration fiscale : il s'agit des sommes recouvrées par rapport aux sommes à recouvrer. La convention a été prise de ne pas défalquer les sommes à recouvrer des sommes ayant donné lieu à un abandon de droits au cours de l'année. Ces taux présentent plusieurs avantages :

- leur calcul est effectué sur les chiffres disponibles dans le CGAF, avant tout retraitement par l'administration. Ils offrent ainsi une garantie de cohérence entière avec les recettes retracées au budget,

- Dès lors, ce calcul peut intervenir rapidement, et être présenté en même temps que les éléments relatifs aux recettes dans le rapport sur l'exécution des lois de finances. Les taux calculés par l'administration fiscale sont produits plus tardivement par celle-ci,

- Le mode de calcul permet d'isoler les performances du recouvrement sur les cotes antérieures à l'exercice, mettant en lumière les difficultés des services sur les cotes délicates

Ainsi, le tableau annexé présente deux taux : le taux de recouvrement sur les créances nées au cours de l'exercice, et le taux de recouvrement sur les créances nées au cours d'exercices précédents :

Le taux de recouvrement sur les créances de l'exercice est obtenu en faisant le rapport des sommes recouvrées sur les créances nées en 2000 (ce dernier chiffre étant obtenu par différence entre l'ensemble des sommes recouvrées en 2000, et le recouvrement sur créances antérieures à 2000) et des droits prises en charge en 2000.

Le taux de recouvrement sur les créances antérieures à l'exercice est obtenu en faisant le rapport des sommes recouvrées en 2000 sur les créances antérieures à cet exercice, sur les restes à recouvrer en début d'année 2000.

Les taux ainsi calculés sont fournis dans leur intégralité dans le tableau annexé, pour les années 1999 et 2000. La Cour ne dispose pas du calcul pour les années antérieures, ne l'ayant introduit qu'en 1999. En outre, cette démarche n'a pas, pour l'heure, été étendue aux recettes non fiscales.

Le tableau annexé retrace pour chaque année la mécanique du recouvrement : aux restes à recouvrer sur les créances des années antérieures s'ajoutent les droits pris en charge au cours de l'année, et sont retranchés les annulations de prise en charge. Sont ensuite fournies les sommes recouvrées au cours de l'année considérée, d'abord sans tenir compte de l'exercice où elles sont nées, puis en individualisant le recouvrement sur les créances antérieures à l'exercice courant.

Ce tableau appelle les commentaires suivants :

- on constate les difficultés de recouvrement sur les créances antérieures à l'exercice. Tant en 2000 qu'en 1999, les créances antérieures à l'exercice sont nettement moins bien recouvrées que les créances de l'exercice courant. A titre d'exemple, en 2000, seuls 36,5% des créances d'impôt sur le revenu qui n'avaient pas été recouvrées lors de l'exercice où elles sont nées ont pu finalement l'être, alors que les créances nées pendant l'exercice ont été recouvrées à 93,1%.

- le constat fait par la Cour sur les difficultés de recouvrement de la fraction recouvrée par émission de rôles de certains impôts est illustré. Ainsi, s'agissant par exemple des droits sur les tabacs, par rapport à 438 millions de francs de restes à recouvrer en début d'année 2000, pratiquement aucun recouvrement n'a eu lieu en 2000.

- il est possible de suivre les taux de recouvrement d'une année sur l'autre : l'évolution défavorable constatée sur certains taux a donné lieu à des questions aux administrations compétentes : ainsi, l'évolution constatée sur le recouvrement des créances de l'année courante ayant donné lieu à émission de rôles en matière de retenue à la source sur les bénéfices non commerciaux, semblait marquée par le passage d'un taux de recouvrement de 51,6% à 10,8%. Ceci a permis de mettre en lumière une erreur de saisie (confusion francs / euros ayant conduit à la prise en charge artificielle d'un milliard de francs de créances).

- le tableau permet de suivre la performance globale du recouvrement sur l'ensemble des recettes fiscales. On constate au niveau agrégé que l'amélioration en 2000 du recouvrement sur les créances des années antérieures à l'exercice (+1,6 point) a eu pour contrepartie une baisse des taux de recouvrement sur les créances de l'exercice (-1,5 point).

Raisons des difficultés de recouvrement constatées
sur certaines recettes.

Le travail effectué par la Cour en 2000 se situe dans le prolongement de celui conduit en 1999 (RELF 1999, pp 33-34). A l'occasion de la mise en place d'un calcul systématique des taux de recouvrement sur prises en charge, la Cour avait relevé que certains impôts, (TIPP ou droits sur les tabacs par exemple) dont le recouvrement se fait pour l'essentiel au comptant, mais dont une faible partie est recouvrée par émission de rôles, présentaient pour cette partie seulement des taux de recouvrement très bas. (Le recouvrement du solde de ces impôts, qui s'effectue au comptant, n'est pas en cause, et ne peut par nature se prêter à une analyse en termes de taux de recouvrement).

Les délais de production du RELF n'avaient pas permis, en 1999, de recueillir d'éléments d'explication de ces faibles taux de recouvrement. En particulier, la Cour n'avait pas déterminé si ces taux tenaient à des difficultés particulières de recouvrement sur ces créances, ou si la diligence des services devait être mise en cause. Aussi, la Cour a repris ses investigations sur ce point en 2000.

La partie des recettes donnant lieu à prise en charge (pour la TIPP, les droits sur les tabacs et les autres impôts mentionnés) est en réalité la partie résultant de redressements fiscaux à la suite de fraudes, le cas échéant dans le cadre d'actes de délinquance. C'est la raison pour laquelle les taux de recouvrement sont si faibles. Ce n'est pas seulement le fait que ces créances soient issues de redressements (ainsi, l'IS recouvré par voie de rôle, c'est-à-dire après redressement fiscal, est tout de même recouvré à 30%), mais leur contexte délictueux qui conduit à de très faibles taux de recouvrement.

A titre d'exemple, s'agissant de la TIPP ou des droits sur les tabacs, les sommes en cause sont le plus souvent celles réclamées aux contrebandiers dont la marchandise a été saisie lors de contrôles douaniers. Ceux-ci ne disposent pas, d'une manière qui pourrait être appréhendée aisément par les services fiscaux, des sommes considérables qui leur sont réclamées à l'occasion des redressements et les perspectives de recouvrement sont infimes. Les créances ne peuvent pourtant être admises en non-valeur qu'à l'expiration de procédures judiciaires, d'autant plus complexes et aléatoires qu'elles font appel à la coopération internationale en matière de justice.

Ces taux de recouvrement sont donc voués à atteindre de faibles niveaux, sujets en outre à de brusques variations selon l'issue de telle ou telle affaire de grande ampleur. La Cour approfondira dans les années à venir l'examen des difficultés et des modes de suivi du recouvrement propres à chacune de ces lignes de recettes particulières, de manière à formuler éventuellement des recommandations à cet égard.

Tableau n° 1 :  Taux de recouvrement sur prises en charge

Restes à recouvrer début 2000

(MF)

Droits pris en charge en 2000 (MF)

Annulations de prise en charge en 2000 (MF)

Recouvrement en 2000, toutes créances (MF)

Recouvrement en 2000, créances antérieures à 2000 (MF)

Taux de recouvrement en 2000 sur prise en charge de l'exercice

Taux de recouvrement en 1999 sur prise en charge de l'exercice

Taux de recouvrement en 2000 sur créances antérieures à l'exercice

Taux de recouvrement en 1999 sur créances antérieures à l'exercice

Impôt sur le revenu

69.527

348.026

0

349.318

25.351

93,1%

93,6%

36,5%

34,0%

Impôt sur les sociétés recouvré par voie de rôle

24.196

27.876

0

16.590

8.150

30,3%

37,4%

33,7%

43,8%

Autres impôts directs recouvrés par voie de rôle

34.758

32.568

8

37.653

17.707

61,2%

62,9%

50,9%

42,9%

Retenue à la source sur sur certains bénéfices non commerciaux

189

42

80

31

8

54,8%

36,4%

4,2%

16,3%

Retenue à la source sur les revenus des capitaux mobiliers

2.188

1 . 158

628

165

40

10,8%

51,6%

1,8%

0,1%

ISF

262

485

36

419

49

76,3%

82,0%

18,7%

20,8%

Taxe d'apprentissage

572

91

113

47

29

19,8%

6,6%

5,1%

8,3%

TIPP

227

24

6

8

3

20,8%

20,9%

1,3%

2,3%

TVA

65.983

38 . 895

13.622

27.557

7.526

51,5%

65,4%

11,4%

9,6%

Droits d'enregistrement

3.124

2 . 446

566

1.738

485

51,2%

63,3%

15,5%

15,9%

Taxes sur les véhicules des sociétés

285

192

53

149

36

58,9%

61,9%

12,6%

10,1%

Droits d'importation

841

210

69

65

31

16,2%

20,7%

3,7%

4,3%

Prélèvements et droits compensa -toires institués sur divers produits

193

0

13

1

1

7,0%

0,5%

1,2%

Droits de consommation sur les tabacs

438

80

63

1

1

0,0%

7,7%

0,2%

0,5%

Autres

2.132

3 . 222

558

3.093

481

81,1%

44,1%

22,5%

27,1%

Ensemble des recettes fiscales

204.915

455.315

15 . 815

436.835

59 . 898

82,8%

84,3%

29,2%

27,6%

Les recettes non fiscales :

Dans le rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2000, la Cour a souligné l'importance des restes à recouvrer sur recettes non fiscales. Celles-ci ont en effet représenté 23,40 milliards de francs (3,57 milliards d'euros) soit 11,7% des recettes totales encaissées dans l'année. Les recettes non fiscales sont perçues selon deux modalités :

- au comptant, pour 103,9 milliards de francs (15,84 milliards d'euros) en 2000, soit 52% du total : les droits sont pris en charge par les comptables publics lors du paiement du débiteur ;

- sur droits constatés, par suite de l'émission préalable d'un titre de recette : entre 1996 et 2000, leur volume augmente de 10%, alors que le total des recettes non fiscales croît de 25%.

Les restes à recouvrer s'appliquent à cette dernière catégorie et en représentent 20% en fin 2000. Ils ont augmenté de 90% entre le 1° janvier 1996 et le 31 décembre 2000, passant de 12,30 milliards de francs (1,88 milliard d'euros) à 23,40 milliards de francs (3,57 milliards d'euros). Cette croissance a été particulièrement marquée entre 1996 et 1998 (en moyenne 15% par an ) puis s'est ralentie durant les deux derniers exercices (respectivement 9% et 7%).

Evolution des restes à recouvrer sur recettes non fiscales (1996-2000)

Source : comptes généraux de l'administration des finances

Les principaux restes à recouvrer sont concentrés sur cinq lignes des recettes non fiscales, figurant dans le graphique suivant. Avec 14,1 milliards de francs (2,15 milliards d'euros), ceux des produits des autres amendes et condamnations pécuniaires (ligne 313) en représentent la part la plus importante (60% en 2000) et contribuent fortement à la croissance de l'ensemble. Les restes à recouvrer des autres lignes passent globalement de 7,7 milliards de francs (1,17 milliard d'euros) à 9,3 milliards de francs  (1,42 milliard d'euros) sur la période, la baisse de ceux des retenues et cotisations sociales au profit de l'Etat (ligne 501) compensant partiellement la hausse des autres lignes.

Principales lignes de restes à recouvrer en fin d'année

1/Produit des amendes et des condamnations pécuniaires

Les restes à recouvrer de la ligne 313 ont été multipliés par 2,4 entre le 1° janvier 1996 et le 31 décembre 2000 : bien qu'étant en hausse de 68% sur cette période, les recouvrements sont chaque année inférieurs aux droits pris en charge et ce, malgré l'augmentation de 56% des annulations qui résultent de décisions de justice.

Ces restes à recouvrer proviennent, pour 13,80 milliards de francs (2,10 milliards d'euros) en 2000, des amendes forfaitaires majorées de la police de la circulation (spécification 313-01 amendes et condamnations recouvrées par les comptables du Trésor). Pour la moitié de leur montant, ils sont concentrés sur Paris (18,7%), les autres départements d'Ile de France (23,5%) et les Bouches du Rhône (7,4%).

Restes à recouvrer de la ligne 313 de 1994 à 2000

La variation cyclique des montants de restes à recouvrer correspond aux échéances de l'élection présidentielle : leur baisse en 1995 résulte de la loi 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ; dans la perspective d'une loi prochaine, les redevables usent, selon le ministère de l'économie des finances et de l'industrie, de moyens dilatoires pour se soustraire au paiement de leurs contraventions.

Dans le courant des années 1990, la direction générale de comptabilité publique s'est attachée d'une part à spécialiser certains postes comptables dans le recouvrement des amendes (24 départements), d'autre part à automatiser la procédure dans les 107 trésoreries, le déploiement des applications informatiques ayant entraîné certains retards en 1999 27 ( * )

De manière générale, le recouvrement des titres est rendu difficile par la transmission de mauvaises adresses, extraites du fichier national des immatriculations (FNI) qui n'est pas toujours fiable. Toutefois, par les articles L322-1 et L322-2 du code de la Route, a été introduite la procédure de l'opposition au transfert du certificat d'immatriculation (OTCI) par laquelle un comptable du Trésor, constatant l'inexactitude de l'adresse d'un contrevenant, peut demander au procureur de la République d'interdire la délivrance du certificat de non gage et de non opposition du Trésor remis par le vendeur d'une voiture d'occasion et empêcher toute nouvelle immatriculation du véhicule. La procédure de l'OTCI ayant été généralisée en juillet 2000, il est prématuré d'en mesurer les effets.

2/ Les retenues et cotisations au profit de l'Etat.

Le montant des restes à recouvrer de la ligne 501, qui ressort à 1,3 MdF (0,20 Md€), a diminué de près de 30% entre fin 1995 et fin 2000.

Cette ligne regroupe deux spécifications qui connaissent des évolutions contraires :

- avec un montant de 338 milliards de francs (51,53 milliards d'euros) en 2000, ceux des retenues pour pensions civiles et militaires - part agent (spécification 501-01) ont diminué de 872 milliards de francs (132,94 milliards d'euros) sur la période ce qui traduit une amélioration du recouvrement.

- ils ont en revanche augmenté en ce qui concerne les retenues rétroactives pour validation des services auxiliaires (spécification 501-21 : 938 millions de francs (143,00 milliards d'euros en fin 2000). Selon l'article D4 du code des pensions civiles, celles-ci font l'objet de précomptes mensuels calculés à raison de 5% du traitement mensuel net de l'agent ce qui permet d'assurer un recouvrement régulier mais entraîne son étalement sur plusieurs années.

3/ Les restes à recouvrer sur recettes diverses

La difficulté de recouvrement des créances auprès de débiteurs en situation financière précaire, voire en surendettement, explique l'importance des restes à recouvrer des trois lignes du titre 8 (lignes 805, 811 et 899).

Tel est le cas de ceux de la ligne 805 - recettes accidentelles à différents titres (2,7 milliards de francs (0,41 Md€) en 2000) dont 89% proviennent de la régularisation de chèques impayés et de la récupération auprès des locataires défaillants des sommes versées par l'Etat au titre des indemnités d'expulsions locatives. De même, la spécification 805-81 (278 milliards de francs (42,38 milliards d'euros) en 2000) vise-t-elle le reversement de créances garanties par l'Etat qui, en vertu d'une convention de 1969, est subrogé dans les droits du Crédit foncier de France à l'égard des emprunteurs défaillants de prêts complémentaires à la construction.

La ligne 811- récupération d'indus - a été créée en 1997 par décomposition de la 805 : pour près de 60% du volume total (1,30 milliards de francs (0,20 milliards d'euros en 2000) les restes à recouvrer concernent des populations en situation d'emploi très précaire : indus sur RMI pour 41%, sur allocations diverses dont principalement allocation de solidarité spécifique pour 16%. Par ailleurs 34% des restes à recouvrer de la ligne portent sur des rémunérations et pensions de fonctionnaires ; leur récupération est probable mais peut exiger plusieurs années, selon les règles de quotité saisissable.

Enfin, le volume des restes à recouvrer de la ligne 899 -Recettes diverses- varie fortement d'une année sur l'autre : 330 millions de francs (50,31 milliards d'euros en 1996 et 1997, 1,9 milliards de francs (0,29 milliard d'euros) en 1998 et 1999 ; le solde de l'année 2000 (1,2 milliard de francs  (0,18 milliard d'euros)) provient pour 900 millions de francs (137,20 millions d'euros d'une créance née au cours de cet exercice.

QUESTION 6

La Cour des comptes consacre une monographie au budget du ministère de l'équipement et des transports en soulignant notamment que « le domaine équipement et transports représente un bon exemple de ce qu'il est convenu d'appeler l'effet d'affichage : alors que l'évolution des crédits votés peut donner l'illusion d'un maintien des moyens consacrés à ces politiques publiques, en revanche, l'examen des dépenses réelles montre, d'une part, que la période s'est avérée clairement défavorable à ce domaine budgétaire, et d'autre part, que la part des dépenses de personnel augmente dans cet ensemble en diminution ».

Peut-elle expliquer par quels moyens a été obtenu cet effet d'affichage, en distinguant les dépenses d'investissement et les dépenses de fonctionnement et de personnel ? A-t-elle des propositions à faire pour améliorer la présentation du budget des services communs ?

Réponse

1) Ce que la Cour a appelé « effet d'affichage », dans la monographie qu'elle a consacrée à la partie « équipement et transports » du budget du ministère de l'équipement, des transports et du logement de 1996 à 2000, résulte du décalage sensible qu'elle a constaté entre les crédits votés par le Parlement en loi de finances et la dépense réelle.

En effet, comme le montrent les tableaux des pages 297 et 298, à périmètre constant et en francs constants, le montant total des crédits initiaux a augmenté de 5,5 % en quatre ans, et celui des crédits ouverts de 5,7 %, tandis que les dépenses exécutées progressaient seulement de 3,2 %, c'est-à-dire près de deux fois moins vite.

Pour chacune des années 1996 à 2000, la dépense exécutée a été inférieure de 5 à 8 % aux crédits ouverts.

Si l'on ne considère que le budget général, hors budget annexe de l'aviation civile et comptes spéciaux du Trésor, le décalage est encore plus marqué : + 3,3 % pour les crédits des lois de finances initiales, - 0,5 % pour les dépenses.

Cette analyse globale ne peut malheureusement être affinée au niveau des titres et chapitres budgétaires. Compte tenu de la diversité des supports budgétaires et de la complexité des calculs induits par la méthode de « rétropolation » utilisée pour reconstituer un périmètre constant, la Cour, comme elle l'indique page 301, n'a procédé que pour le total des crédits à l'analyse comparative des crédits initiaux, des crédits ouverts et des dépenses réelles. Cette remarque faite, il est néanmoins possible de préciser que, à périmètre constant et en francs constants, les dépenses réelles de fonctionnement ont augmenté de 9 % au cours de la période (11,5 % pour les seules dépenses de personnel) et les dépenses d'intervention (titre IV) de 4,1 %, tandis que les dépenses d'investissement diminuaient de 10 %.

En définitive, si l'évolution des crédits votés peut donner l'apparence d'une légère croissance des moyens du domaine « équipement et transports », l'examen des dépenses réalisées montre au contraire que ce secteur a été plutôt défavorisé par rapport aux autres actions inscrites dans le budget de l'Etat dans cette période.

2) En ce qui concerne la présentation du budget des services communs, la Cour souhaite que se poursuive le mouvement engagé par le ministère de l'équipement depuis cinq ans pour améliorer l'homogénéité et la lisibilité de ce document.

La Cour a déjà relevé une tendance positive, quoique trop lente et encore incomplète, à la suppression des lignes inutiles ou obsolètes, ainsi qu'au regroupement et à la globalisation des crédits de fonctionnement. Dans le même esprit, les crédits « urbanisme » ont été transférés à la section « urbanisme et logement » en loi de finances pour 1999, tandis que les rémunérations accessoires étaient enfin budgétisées en LFI 2000, sur le fascicule « services communs ».

Mais si la vocation de cette section est bien de regrouper l'ensemble des moyens de fonctionnement des services centraux et déconcentrés du ministère de l'équipement, il apparaît souhaitable que les crédits des quatre premières parties du titre III et de la 7 ème partie du titre V de la section budgétaire « Mer », concernant les emplois, crédits de fonctionnement et investissements administratifs des services déconcentrés des affaires maritimes, soient intégrés dans le fascicule « services communs », comme cela a déjà été fait en LFI 1997 pour les emplois d'administration centrale de la mer. Le maintien de ce particularisme est d'autant moins justifié que l'essentiel des crédits en cause (c'est-à-dire les dépenses de personnel) est transféré en gestion en cours d'année à la section « services communs ».

Au-delà de ces remarques ponctuelles, se pose et se posera de plus en plus le problème de l'identification des crédits par destination, alors que les bénéficiaires sont structurellement différents : équipement, transports, ville, etc. La nomenclature actuelle ne donne, sauf exception, aucune indication sûre et complète dans ce domaine. Dans sa monographie, la Cour a esquissé ce que pourrait être une démarche visant à reconstituer, en partant des données budgétaires, une répartition des emplois par mode de transport. La réforme de l'ordonnance du 2 janvier 1959 devrait inciter le ministère de l'équipement, des transports et du logement à poursuivre activement ses travaux en ce sens.

* 1 Loi de finances rectificative n° 2000-656 du 13 juillet 2000.

* 2 Loi de finances rectificative n° 2000-1353 du 30 décembre 2000.

* 3 Loi n° 2000-656 du 13 juillet 2000 précitée.

* 4 Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

* 5 Rapport n° 2775 (XI ème législature), tome I, pages 12 et suivantes.

* 6 Agence centrale des organismes de sécurité sociale.

* 7 Mutualité sociale agricole.

* 8 Fonds européen d'orientation et de garantie agricole.

* 9 Il s'agit de l'enseignement scolaire, des services financiers, de l'intérieur et de la décentralisation, de l'enseignement supérieur, et des services communs de l'équipement.

* 10 Il ne s'agit que des dépenses inscrites sur des budgets civils, le budget de la défense ne comportant pas de titre IV.

* 11 Budget annexe des prestations sociales agricoles.

* 12 Fonds de stabilisation des changes.

* 13 Fonds monétaire international.

* 14 Ce compte d'affectation spéciale n'avait plus d'activité, et a continué de fonctionner jusqu'à la clôture des sections ouvertes.

* 15 Ces critiques avaient déjà été émises par les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, nos collègues Paul Loridant et Michel Sergent, dans leur rapport n° 27 (1999-2000).

* 16 2,7 milliards de francs par la loi du 13 juillet 2000 et 0,91 milliard de francs par le collectif de fin d'année.

* 17 Pourtant largement inscrites dans les faits au moment de l'établissement des hypothèses de cadrage du projet de loi de finances initiale.

* 18 L'autre moitié est affectée au titre V.

* 19 Hautes personnalités étrangères, par exemple, soignées au Val de Grâce.

* 20 Notamment 40 millions de francs vers le budget de l'intérieur au titre de la professionnalisation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris et 230 millions de francs en provenance de ce même budget au titre de l'entretien des aéronefs de la sécurité civile dans le cadre de la lutte contre les incendies de forêts.

* 21 Dont 54 millions de francs au titre de la vente du porte-avions Foch au Brésil.

* 22 Cette atténuation aux découverts du Trésor correspond à l'abandon d'une créance détenue sur l'Agence France-Presse pour 45 millions de francs autorisé par l'article 2 de la loi de finances rectificative pour 1999. La loi de règlement pour 1999 avait autorisé le transport aux découverts du trésor de cette somme. L'apurement comptable n'a pu intervenir qu'en 2000. A des fins de régularisation, une nouvelle autorisation de transport aux découverts du Trésor a donc dû être demandée à l'article 9 du présent projet, l'article 13 en neutralisant les effets sur le plan comptable.

* 23 Outre le domaine financier, celles-ci concernent la compensation du coût des allégements de charges sociales aux régimes de sécurité sociale, certaines charges futures d'une importance majeure qui sont comptabilisées dans les engagements hors-bilan d'entreprises publiques (Charbonnages de France, CEA) et qui comportent un risque pour l'Etat et devraient, à ce titre, figurer dans les engagements hors-bilan de l'Etat.

* 24 Montant calculé selon les normes utilisées dans le compte relatif à l'année 1999, le compte de la dette publique pour 2000 n'étant, fin octobre 2001, pas encore disponible.

* 25 La publication du tableau de passage du CGAF à la dette de l'Etat au sens du traité de Maastricht apparaît souhaitable.

* 26 Pour mémoire :

taux brut : recouvrement par rapport aux sommes à recouvrer.

taux net : idem sans tenir compte des cotes dont le recouvrement est légalement suspendu (dépôts de bilan, sursis légal de paiement).

taux super net : idem sans tenir compte des cotes dont le recouvrement est affecté par des suspensions administratives de poursuites.

* 27 Rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1999, p 56.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page