Rapport n° 356 (2001-2002) de M. Louis SOUVET , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 16 juillet 2002

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N° 356

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2001-2002

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 10 juillet 2002

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 juillet 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi portant création d'un dispositif de soutien à l' emploi des jeunes en entreprise ,

(Urgence déclarée)

Par M. Louis SOUVET,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gilbert Chabroux, Jean-Louis Lorrain, Roland Muzeau, Georges Mouly, vice-présidents ; M. Paul Blanc, Mmes Annick Bocandé, Claire-Lise Campion, M. Jean-Marc Juilhard, secrétaires ; MM. Henri d'Attilio, Gilbert Barbier, Joël Billard, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Jean Chérioux, Mme Michelle Demessine, M. Gérard Dériot, Mme Sylvie Desmarescaux, MM. Claude Domeizel, Michel Esneu, Jean-Claude Étienne, Guy Fischer, Jean-Pierre Fourcade, Serge Franchis, Francis Giraud, Jean-Pierre Godefroy, Mme Françoise Henneron, MM. Alain Joyandet, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, André Lardeux, Dominique Larifla, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Valérie Létard, M. Serge Mathieu, Mmes Nelly Olin, Anne-Marie Payet, M. André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Gérard Roujas, Mmes Janine Rozier, Michèle San Vicente, MM. Bernard Seillier, André Vantomme, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vézinhet.

Voir le numéro :

Sénat : 351 (2001-2002)

Emploi. Jeunes

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est aujourd'hui appelé à examiner, en première lecture, le projet de loi portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise, présenté le 10 juillet dernier en Conseil des ministres.

Ce projet de loi répond à un engagement fort du Président de la République, pris lors de la campagne pour les élections présidentielles, réitéré lors de la campagne pour les élections législatives, et bien évidemment repris et précisé par le Premier ministre lors de sa récente déclaration de politique générale.

Ce projet de loi répond aussi à une évidente carence de nos politiques d'insertion : malgré la diversité des dispositifs proposés, il n'existe aujourd'hui aucune mesure de soutien favorisant l'accès direct des jeunes les moins qualifiés en entreprise, dès leur sortie du système éducatif, dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée, gage d'une insertion dans la durée.

Ce projet de loi répond enfin à une urgence : le chômage des jeunes, notamment peu qualifiés, a beaucoup progressé depuis un an, leur taux de chômage étant désormais deux fois plus élevé que la moyenne nationale.

Cette évolution apparaît d'autant plus préoccupante que les répercussions en sont graves : un chômage précoce et durable apparaît en effet excessivement déstructurant pour les jeunes les plus fragiles et affaiblit considérablement leurs perspectives d'insertion professionnelle ultérieure, en risquant de les enfermer dans une spirale de l'échec, faite d'une succession de périodes de chômage et de sous-emploi.

Le Gouvernement a fait le choix d'agir à la fois rapidement et fortement, en présentant un ambitieux dispositif de soutien à l'emploi en entreprise des jeunes les moins qualifiés, tendant à exonérer totalement, de manière transitoire, leurs employeurs des cotisations et contributions sociales patronales de toute nature.

Votre commission souscrit pleinement à cette démarche, conciliant insertion professionnelle durable et allégement massif du coût du travail, qu'elle appelait de ses voeux depuis de nombreuses années.

I. LE CONTEXTE : LA VIVE PROGRESSION DU CHÔMAGE DES JEUNES APPELLE AUJOURD'HUI DES RÉPONSES D'URGENCE.

A. UNE FORTE DÉGRADATION DE L'EMPLOI DES JEUNES

1. Les jeunes et l'emploi : une insertion encore difficile

a) Les spécificités de l'emploi des jeunes

Au-delà des à-coups de la conjoncture, la situation des jeunes au regard de l'emploi reste traditionnellement difficile dans notre pays.

Elle se caractérise principalement par cinq spécificités qui apparaissent comme autant d'obstacles à une insertion professionnelle durable.

• Un accès très tardif à l'emploi

De 1975 à 2001, on observe une diminution importante du taux d'activité et du taux d'emploi des jeunes, alors même qu'ils étaient déjà plutôt faibles dans notre pays.

Activité et emploi des jeunes de 16 à 25 ans

1975

2001

Population totale (1)

8.257

7.432

Taux d'activité

66,3 %

45,6 %

Population employée (1)

4.856

2.813

Taux d'emploi

58,8 %

37,8 %

(1) En milliers Source : INSEE, enquêtes emploi

Le nombre de jeunes occupant effectivement un emploi est ainsi passé de 4,8 millions à 2,8 millions entre 1975 et 2001.

Cette évolution, qui tient à la fois à l'apparition d'un chômage important et à l'augmentation de la durée de la scolarité, se traduit alors par un accès de plus en plus tardif à l'emploi.

• Une proportion toujours forte de jeunes peu qualifiés

En dépit de la tendance à la prolongation des études et du développement des formations initiales en alternance (apprentissage), de très nombreux jeunes sortent encore du système de formation initiale sans diplôme ou sans qualification.

Il importe ici de distinguer le diplôme obtenu du niveau de formation atteint.

Évolution du nombre de jeunes 1

sortant du système éducatif selon le diplôme possédé

1990

1995

1999

Aucun diplôme ou CEP

137

109

103

Brevet seul

62

52

55

CAP - BEP ou équivalent

144

132

146

Baccalauréat

115

162

177

Diplômes du « supérieur court » (Bac + 2)

97

133

125

Diplômes du « supérieur long » (Bac + 4 ou 5)

87

135

162

Total

642

723

768

1 En milliers Source : Education nationale

Évolution du nombre de jeunes 1

sortant du système éducatif selon le niveau de formation

1990

1995

1999

Sans qualification (niveau VI et V bis)

82

57

60

CAP - BEP (niveau V)

216

194

208

Niveau baccalauréat (niveau IV)

160

204

215

dont classes de terminale (niveau IV secondaire)

87

111

118

dont non diplômés supérieur (niveau IV supérieur)

73

93

97

Bac + 2 (niveau III)

97

133

125

Enseignement supérieur long ( niveau I et II ))

87

135

162

Total

642

723

768

1 En milliers Source : Education nationale

Notre système éducatif n'a donc pas atteint les objectifs fixés par la loi d'orientation sur l'éducation du 10 juillet 1989 : assurer à tous les élèves une formation ou qualification minimale de niveau V et amener 80 % d'entre eux au niveau du baccalauréat (niveau IV).

Malgré l'élévation d'ensemble des niveaux de formation, on observe ces dernières années une stabilisation du nombre de jeunes sortant du système éducatif sans qualification. Ainsi, en 1999, 103.000 jeunes ont quitté le système éducatif sans le moindre diplôme, soit 13 % du total. Parmi eux, 60.000 (soit 8 %) n'avaient aucune qualification.

Dans ces conditions, compte tenu de l'évolution du marché du travail, il n'est guère étonnant que les jeunes, en particulier ceux sans qualification, connaissent un chômage élevé.

• Un taux de chômage sensiblement supérieur à la moyenne

Alors même que les jeunes ne constituent qu'une faible part de la population active, leur taux de chômage est nettement supérieur à la moyenne.

Chômage des jeunes en 2001

16-20 ans

21-25 ans

16-25 ans

Nombre de demandeurs d'emploi 1

217

339

556

Taux de chômage

23,2 %

13,8 %

16,4 %

1 En milliers Source : INSEE, enquêtes emploi

Ainsi, en mars 2001, le taux de chômage 1 ( * ) des jeunes était près du double de la moyenne nationale (16,4 % contre 8,8 %). Et leur taux de chômage est d'autant plus élevé qu'ils sont moins âgés.

Cette exposition des jeunes au risque de chômage apparaît d'autant plus forte que leur niveau de formation et faible.

Taux de chômage 1 des jeunes
selon le diplôme en mars 2001

16 - 24 ans

Diplôme supérieur

7,3

Bac + 2

8,7

Bac, brevet professionnel

13,5

CAP - BEP

16,4

BEPC seul

24,8

Aucun diplôme ou CEP

33,1

Ensemble

18,7

1 Au sens du BIT Source : INSEE

Ainsi, en mars 2001, un tiers des jeunes non diplômés était au chômage.

• Une précarité accrue et excessive

L'accès à l'emploi ne signifie pas toujours une réelle insertion professionnelle durable pour les jeunes compte tenu du développement de ce qu'il est désormais convenu d'appeler la précarité.

Formes d'emploi des jeunes de 16 à 25 ans

1991

2001

Apprentis

7,0 %

11,2 %

CDD

8,9 %

13,7 %

Intérimaires

3,0 %

9,2 %

Contrats aidés

6,6 %

6,2 %

Total des « formes particulières d'emploi »

dans l'emploi des jeunes

25,5 %

40,3 %

Source : INSEE, enquêtes emploi

En 2001, les « formes particulières d'emploi » concernaient 40 % des jeunes de 16 à 25 ans contre 25 % seulement dix ans auparavant.

• Un recours massif aux contrats aidés, principalement dans le secteur non marchand

Le développement de cette précarité s'explique en partie par un recours massif aux contrats aidés.

Nombre de jeunes de 16 à 25 ans

bénéficiant d'une mesure de la politique de l'emploi

1996

2000

Alternance

473

607

Apprentissage

315

388

Contrats de qualification, d'orientation et d'adaptation

158

219

Emploi marchand hors alternance

188

92

Contrats initiative emploi (CIE)

74

38

Contrats de retour à l'emploi (CRE)

9

0

Aides au premier emploi des jeunes (APEJ)

50

0

Exonérations pour l'embauche d'un premier salarié

33

34

Autres mesures

22

20

Emploi non marchand

109

197

Emplois-jeunes

-

150

Contrats emploi-solidarité

96

37

Contrats emploi-consolidé

9

9

Contrats emploi-ville

4

1

Ensemble

770

896

Part de l'emploi marchand (hors alternance) dans l'ensemble des mesures (hors alternance)

63,3 %

31,8 %

En milliers (chiffres au 31 décembre) Source : MES - DARES

Le recours croissant aux contrats aidés s'accompagne, depuis 1997, d'une forte réorientation vers le secteur non marchand, sous l'effet principalement de la montée en charge des emplois-jeunes.

Cette situation est pour le moins paradoxale. Alors que les mesures d'aide à l'emploi des jeunes devraient viser en priorité à améliorer leurs conditions d'insertion professionnelle sur le marché du travail -et donc cibler en priorité le secteur marchand- elles se concentrent pourtant sur des emplois non marchands qui n'offrent que des perspectives trop limitées d'insertion ultérieure.

Ce déséquilibre des aides à l'emploi fragilise alors en profondeur les trajectoires d'insertion des jeunes, en retardant à l'excès leurs premiers contacts avec le monde de l'entreprise dans lequel ils ont pourtant vocation à évoluer à moyen terme.

b) Des trajectoires d'accès à l'emploi trop souvent lentes et heurtées

Ces spécificités soulignent, en définitive, la lenteur et les ruptures des trajectoires d'insertion des jeunes, souvent marquées par une succession de périodes plus ou moins longues de chômage, d'inactivité ou de travail précaire.

Votre rapporteur observe à ce propos que la conjoncture économique ne contribue qu'à modifier à la marge ces difficultés d'insertion.

Ainsi, une récente étude du CEREQ 2 ( * ) , qui permet de suivre les parcours des jeunes sortis de formation initiale en 1998, montre que les trajectoires d'insertion de la génération 1992 et de la génération 1998 ne sont pas fondamentalement différentes, même si les derniers ont pu mieux profiter de la reprise économique. De fait, elle souligne notamment que « leur insertion professionnelle s'est plus ou moins améliorée selon de niveau et la spécialité de leur formation ». Ainsi, au cours de leurs trois premières années de vie active, les jeunes non diplômés de la génération 98 n'ont passé que 34 % de cette période en emploi « ordinaire » pour 26 % au chômage, contre respectivement 33 % et 34 % pour les jeunes de la génération 1992.

Cette enquête montre ainsi que, sur une génération, près de 20 % des jeunes, surtout les moins qualifiés, rencontrent de graves difficultés d'insertion, même dans un contexte économique favorable, auxquelles les politiques de soutien à l'emploi des jeunes n'apportent en définitive pas de réponse adaptée.

LES TRAJECTOIRES D'ACCÈS À L'EMPLOI

« Les premiers résultats de l'enquête Génération 98 du CEREQ confirment le rôle protecteur du diplôme. Si, globalement, les jeunes qui sont sortis de formation initiale en 1998ont pu, dans le contexte récent de reprise économique, accéder plus rapidement et plus durablement à l'emploi que les générations antérieures , on observe néanmoins une accentuation des disparités dans l'insertion professionnelle selon les niveaux de formation (...).

« Les travaux du CEREQ sur la génération sortie en 98 du système scolaire permettent enfin d'identifier quatre trajectoires différenciées d'accès à l'emploi.

« - 55 % de la génération 98 a accédé immédiatement et durablement à l'emploi après la sortie du système éducatif. Cette trajectoire concerne surtout les jeunes sortant de l'enseignement supérieur. Dans cette catégorie, 47 % n'ont connu qu'un seul employeur et 53 % ont été mobiles. Parmi ceux qui sont restés dans leur première entreprise, la moitié a été recrutée d'emblée en contrat à durée indéterminée (les plus diplômés), un tiers a commencé avec un contrat temporaire, transformé ensuite en CDI, un cinquième est resté avec un statut précaire. Quant à ceux qui ont changé d'employeur au cours des trois premières années de vie active, les deux tiers ont changé d'employeur après un an -le plus souvent à la fin d'un contrat temporaire-, le tiers restant a rompu un CDI. Ces mobilités ont permis d'accéder à des emplois plus stables et à des rémunérations supérieures ;

« - un quart des jeunes a connu aussi une trajectoire convergeant vers l'emploi, mais de manière différée. Au-delà des jeunes partant effectuer leur service national, cette trajectoire concerne à la fois des jeunes qui ont travaillé quelques mois, ont connu une interruption, puis reviennent à l'emploi (bacheliers ou jeunes de niveau bac) et des jeunes qui tardent à trouver leur premier emploi (BEP et CAP tertiaire) ;

« - 17 % des jeunes ont des parcours marqués par le chômage ou l'inactivité, dont 6 % qui basculent hors de l'emploi environ deux ans et demi après leur entrée dans la vie active (niveau CAP, BEP et sortants de l'enseignement supérieur sans diplôme), 7 % des jeunes qui connaissent un chômage persistant (jeunes filles ayant un CAP ou un BEP tertiaire), 4 % de jeunes qui traversent de longues périodes d'inactivité professionnelle (retrait du marché de l'emploi) pour des motifs familiaux, une absence de motivation, des problèmes de santé ou qui ont suivi des formations hors emploi ;

« - 4 % des jeunes se distinguent par des trajectoires de retour en formation, dont la moitié (surtout des bacheliers) reprend des études et la moitié (plutôt des non diplômés) effectue des stages.»

Source : Rapport de la Commission nationale pour l'autonomie des jeunes, avril 2002.

2. Une progression inquiétante du chômage des jeunes

Une enquête récente 3 ( * ) a souligné la « participation accrue des jeunes à l'emploi de mars 1997 à mars 2001 » , du fait d'une « croissance soutenue de l'emploi, particulièrement favorable aux jeunes » , tout en reconnaissant que l'embellie économique ne profitait pas à tous les jeunes de manière égale.

Ce constat, qui ne démentait donc pas la persistance de difficultés spécifiques d'accès à l'emploi, n'est hélas plus d'actualité.

a) Un marché du travail qui se dégrade de mois en mois

Depuis avril 2001, l'évolution du marché du travail se caractérise par une progression soutenue du nombre de demandeurs d'emploi.

Évolution du chômage des jeunes depuis avril 2001

Avril 2001

Mai 2002

Nombre de chômeurs 1

Taux de chômage²

Nombre de chômeurs 1

Taux de chômage²

Ensemble des demandeurs d'emploi

2.063,1

8,6 %

2.232,5

9,1 %

Demandeurs d'emplois de moins de 25 ans

338,1

16,0 %

390,3

17,2 %

Source :Séries mensuelles ANPE - DARES - INSEE

1 Demandeurs d'emplois de catégorie 1 en milliers (données corrigées des variations saisonnières)

2 Au sens du BIT

Cette dégradation continue touche principalement les jeunes : alors que le nombre total de demandeurs d'emploi a augmenté de 8,2 % d'avril 2001 à mai 2002, celui des jeunes de moins de 25 ans a progressé de 15,4 %.

La dernière enquête emploi de l'INSEE 4 ( * ) , qui constitue la source statistique la plus exhaustive pour apprécier le taux de chômage, confirme cette dégradation tout en concluant à un taux de chômage des jeunes encore plus élevé que ne l'estiment les séries mensuelles disponibles : le taux de chômage des jeunes de 15 à 24 ans serait ainsi passé de 18,7 % en mars 2001 à 20,2 % en mars 2002, alors que le taux de chômage global n'évoluait sur cette même période que de 8,8 % à 8,9 %.

Cette dégradation de la situation de l'emploi des jeunes apparaît d'autant plus préoccupante qu'elle est plus importante que chez nos voisins européens, alors même que le taux de chômage des jeunes est déjà bien plus élevé dans notre pays.

Évolution du taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans

Avril 2000

Avril 2001

Avril 2002

France

20,2 %

19,1 %

21,6 %

Union européenne

15,8 %

14,9 %

15,4 %

Zone euro

17,0 %

16,0 %

16,6 %

Source : Eurostat

Ainsi, d'avril 2001 à avril 2002, le taux de chômage des jeunes a augmenté de 2,5 points en France alors qu'il ne progressait en moyenne que de 0,5 point dans l'Union européenne.

b) Une exposition très forte des jeunes les moins qualifiés au risque de chômage

Cette aggravation récente du chômage des jeunes ne dément pas l'extrême vulnérabilité des jeunes les moins qualifiés au risque de chômage, bien au contraire. En mars 2002, un jeune non diplômé avait deux fois plus de risque d'être chômeur qu'un jeune bachelier et plus de sept fois qu'un jeune diplômé de l'enseignement supérieur .

Chômage des jeunes de 16 à 22 ans

selon le niveau de formation

Mars 2002

Nombre de chômeurs

Taux de chômage

Diplôme supérieur

406

4.4 %

Bac + 2

12.046

12,8 %

Bac, Brevet professionnel

49.979

16.3 %

CAP- BEP

89.007

20,2 %

BEPC seul

43.080

22,9 %

Aucun diplôme ou CEP

113.237

31,9 %

Ensemble

307.755

22,1 %

Source INSEE, enquête emploi

Cette forte exposition des jeunes les moins qualifiés au risque de chômage dans un contexte de croissance ralentie ne saurait surprendre.

D'une part, ils sont les premiers à être victimes de la réorientation progressive, constatée ces dernières années, des mesures d'aides à l'emploi vers les publics plus qualifiés. Ainsi, le dispositif « Nouveaux services - Emplois jeunes », qui occupe désormais une place centrale dans les mesures d'insertion, a surtout profité aux jeunes les plus qualifiés 5 ( * ) : environ les trois quarts des bénéficiaires ont un niveau de formation égal ou supérieur au baccalauréat. Dès lors, et alors même que les jeunes les moins qualifiés apparaissent comme les plus vulnérables face au risque de chômage, ils ont pourtant été progressivement écartés des dispositifs d'aide à l'emploi des jeunes et deviennent alors logiquement les premières victimes d'un retournement de conjoncture.

D'autre part, le coût du travail non qualifié reste élevé en France, dans un contexte où la concurrence est de plus en plus mondialisée. Aussi toute fragilisation de la croissance avec ses inéluctables conséquences en termeS de compétitivité, touche de plein fouet l'emploi non qualifié en réduisant d'autant les perspectives d'embauche des personnes les moins qualifiées, et notamment des jeunes dont le manque d'expérience apparaît alors comme un risque supplémentaire pour l'employeur.

B. LA NÉCESSITÉ D'UN DISPOSITIF SPÉCIFIQUE D'INSERTION DANS LES ENTREPRISES FONDÉ SUR UN ALLÉGEMENT DU COÛT DU TRAVAIL

Le constat dressé précédemment souligne toute l'importance d'une mesure de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise fondée sur un allégement substantiel du coût du travail.

1. Adresser un signal fort aux jeunes et aux entreprises

La dégradation de l'emploi des jeunes impose aujourd'hui d'adresser un signal fort aux jeunes et aux entreprises, afin non seulement de concrétiser la priorité à accorder à l'emploi des jeunes mais surtout d'inciter à leur recrutement effectif par les entreprises dans une perspective d'insertion professionnelle durable.

Votre commission appelle en effet de ses voeux, depuis plusieurs années, la mise en place d'une telle mesure de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise.

Elle avait ainsi notamment déploré, en 1997, que le précédent Gouvernement, dans un contexte similaire, ait renoncé à ses engagements de créer, par un dispositif d'insertion spécifique, 350.000 emplois pour les jeunes dans le secteur marchand, parallèlement au programme « Nouveaux services - Emplois-jeunes » exclusivement ciblé sur le secteur non marchand.

Une telle mesure aurait une double vocation, à la fois conjoncturelle et structurelle.

a) Une vocation conjoncturelle : inciter les entreprises à embaucher dès maintenant dans la perspective d'un raffermissement de la croissance.

Au moment où se profile une reprise économique, il importe de l'anticiper et de l'accompagner, dans les meilleurs délais, pour lui assurer le plus grand contenu possible en emplois.

Aussi, la mise en oeuvre d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise contribuerait incontestablement, au-delà de son seul impact immédiat sur le chômage des jeunes, à rétablir la confiance en l'avenir.

En outre, alors que certains secteurs connaissent encore des difficultés de recrutement malgré l'augmentation du chômage, un tel dispositif aurait pour avantage d'attirer sur le marché du travail une main d'oeuvre supplémentaire que les employeurs sont jusqu'à présent réticents à recruter. S'agissant des jeunes non qualifiés, les employeurs considèrent fréquemment que leur coût du travail est trop élevé au regard de leur productivité et préfèrent en conséquence différer les embauches.

Dès lors, une diminution sensible des charges sur les salaires apparaît de nature à favoriser le recrutement de jeunes non qualifiés, notamment dans les secteurs qui rencontrent le plus de tensions sur le marché du travail.

Une récente étude de la DARES 6 ( * ) montre ainsi que les domaines qui pourraient le plus en profiter sont : l'agriculture et la pêche, la gestion-administration, le commerce, l'hôtellerie-restauration et le secteur de la santé et de l'action sociale.

b) Une vocation structurelle : intégrer, sur les emplois stables, les jeunes non qualifiés en leur offrant une véritable perspective d'insertion professionnelle dans un emploi durable.

La politique d'accès à l'emploi des jeunes s'est historiquement structurée autour d'un ensemble mouvant de dispositifs très diversifiés plus ou moins pérennes.

Ces dispositifs relèvent peu ou prou de trois logiques différentes , comme l'ont bien montré les récents travaux de la Commission nationale pour l'autonomie des jeunes.

LES TROIS LOGIQUES DES DISPOSITIFS D'INSERTION PROFESSIONNELLE

« Les dispositifs d'insertion professionnelle et d'aides à l'emploi, tels qu'ils existent aujourd'hui, relèvent de trois logiques distinctes, lesquelles renvoient à la diversité des analyses qui sous-tendent l'explication du chômage des jeunes :

« - la logique de formation renvoie à une explication des difficultés d'accès à l'emploi des jeunes liées à l'insuffisance ou à l'inadaptation de leur formation ;

« - la logique d'abaissement du coût du travail renvoie à l'idée que les jeunes manquent d'expérience, ont une productivité insuffisante par rapport au coût de leur travail pour l'employeur ;

« - la logique d'appui à la création d'emplois dans le secteur non marchand renvoie au constat d'une insuffisance globale d'emplois résultant du rythme et du contenu de la croissance, mais aussi pour partie au constat que certains actifs ne sont pas, dans l'état actuel du marché, en mesure d'accéder aux emplois existants. La création d'emplois dans le secteur non marchand repose par ailleurs sur l'idée que la dynamique du marché ne permet pas de solvabiliser des activités socialement utiles.

« Ces trois logiques ont été mises en avant successivement tout au long des vingt-cinq dernières années. Elles se trouvent aujourd'hui largement intriquées dans les divers dispositifs. Ainsi, les dispositifs d'alternance relèvent à la fois de la première et de la deuxième logiques, et des dispositifs d'aide au développement des emplois non marchands peuvent être interprétés également comme des formes d'abaissement du coût du travail pour les employeurs.

« L'équilibre entre ces diverses logiques a fluctué dans le temps en fonction tant de la conjoncture que des débats autour de l'explication du chômage. La politique d'insertion professionnelle a connu des inflexions successives entre des dispositifs spécifiques pour les jeunes et l'utilisation de dispositifs concernant l'ensemble des demandeurs d'emplois. De la même manière, on a assisté à des « balancements » entre des dispositifs ciblés sur une catégorie particulière de jeunes et des dispositifs concernant l'ensemble des jeunes. Enfin, qu'il s'agisse de dispositifs ciblés ou généraux, les bornes d'âge retenues ont elles-mêmes évolué. »

Source : Rapport de la Commission nationale pour l'autonomie des jeunes, avril 2002.

Cette structuration de la politique d'insertion autour de ces différentes logiques n'est pourtant pas sans faille.

Les dispositifs actuels d'aide à l'emploi des jeunes souffrent, en effet, aujourd'hui d'une triple inadaptation :

- ils ne visent pas en priorité les jeunes les moins qualifiés qui sont pourtant les plus exposés au risque de chômage ;

- ils ne proposent pas de perspectives crédibles d'insertion professionnelle durable, en se fondant pour la plupart sur les contrats à durée déterminée, qui alimentent alors la précarité et favorisent des allers-retours très déstabilisants entre emploi et chômage ;

- ils ne répondent pas aux attentes d'un certain nombre de jeunes, particulièrement rétifs à notre système de formation initiale, qui forment le « noyau dur » de l'échec scolaire mais qui souhaitent s'engager rapidement dans la vie professionnelle, sans pour autant renoncer à moyen terme à la formation et à l'obtention d'une qualification.

Il importe en conséquence d'élargir la palette actuelle des mesures d'insertion par un nouveau dispositif ciblant les jeunes les moins qualifiés souhaitant s'engager directement dans la vie active en leur garantissant une réelle perspective d'insertion par un contrat de travail à durée indéterminée.

2. Poursuivre et amplifier les politiques d'allégement des charges sociales.

Pour être réellement incitative pour les entreprises, une telle mesure doit reposer sur un substantiel allégement du coût du travail et exige en conséquence une réduction significative des charges sociales pesant sur l'employeur.

a) Un outil éprouvé au service de la politique de l'emploi

Dès la fin des « trente glorieuses », le mode de financement du système français de protection sociale, assis sur les revenus du travail, s'est révélé pénalisant pour la compétitivité des entreprises et la création d'emplois, notamment en ce qui concerne les moins qualifiés d'entre eux.

Les exonérations de cotisations sociales ont donc constitué, au cours du quart de siècle écoulé, l'instrument privilégié de la réduction du coût du travail dans notre pays.

La politique d'exonérations ainsi mise en oeuvre s'est, dans un premier temps, concentrée sur des dispositifs « ciblés » visant à inciter les entreprises à embaucher certaines catégories de la population plus vulnérables, ou se trouvant dans une situation particulièrement difficile . On peut mentionner, ainsi, les exonérations de cotisations en faveur de l'apprentissage (1977), les pactes pour l'emploi (1977-1982), le plan d'urgence pour l'embauche des jeunes (1986), le contrat de retour à l'emploi et l'exonération de cotisations sociales patronales pour l'embauche d'un premier salarié (1989), l'exo-jeunes (1991) et l'instauration, en 1992, d'un abattement de 30 % des cotisations patronales pour les contrats à temps partiel.

Au début des années 1990, la dégradation brutale de la conjoncture économique, qui s'est accompagnée d'une forte augmentation du chômage, fait apparaître la nécessité de donner une nouvelle dimension aux allégements de charges sociales.

Diverses mesures d'allégement des cotisations sociales patronales sur les bas salaires ont alors été définies.

A partir du 1 er juillet 1993 , les employeurs ont pu bénéficier d'une exonération totale des cotisations patronales d'allocations familiales pour les salaires mensuels inférieurs à 1,1 fois le SMIC (soit 5,4 points de cotisations) et une réduction de moitié pour ceux compris entre 1,1 et 1,2 fois le SMIC (soit 2,7 points de cotisations).

Au 1 er janvier 1995, ces seuils ont été relevés à 1,2 SMIC (exonération complète) et à 1,3 SMIC (exonération partielle). A compter du 1 er septembre de la même année, les employeurs ont également bénéficié d'une réduction dégressive des cotisations patronales d'assurance maladie (totale au niveau du SMIC, puis dégressive jusqu'à 1,2 SMIC).

Le 1 er octobre 1996, les deux exonérations sont fusionnées en une ristourne dégressive unique pour les salaires mensuels inférieurs à 1,33 fois le SMIC (« ristourne Juppé ») . Au 1 er janvier 1998, ce seuil est abaissé de 1,33 à 1,3 SMIC.

Enfin, au cours de ces dernières années, les allégements de charges sociales sont devenus « l'auxiliaire » de la politique de réduction du temps de travail, que ce soit dans le cadre :

- des aides incitatives « de Robien » (1996) ou « Aubry I » (1998) ;

- de l'abaissement, à compter du 1 er janvier 2000, de la durée légale du travail à 35 heures hebdomadaires. Les allégements de cotisations patronales (loi « Aubry II ») définis à cette occasion se composent, d'une part, en une remise forfaitaire (aide structurelle) versée quel que soit le montant du salaire et, d'autre part, en une réduction dégressive pour les salaires dont le montant mensuel est inférieur à 1,8 SMIC (SMIC 35 heures).

Parallèlement à ces dispositifs généraux, visant essentiellement les bas salaires, il convient de souligner que la voie des allégements « ciblés » sur certaines populations spécifiques n'a pas été, pour autant, abandonnée (contrat emploi-solidarité, contrat emploi-consolidé notamment).

Les allégements de charges sociales représentent ainsi un instrument éprouvé de la politique de l'emploi dont l'efficacité est aujourd'hui démontrée.

b) Un outil dont l'efficacité, en termes de création d'emplois, est aujourd'hui démontrée

Les allégements en vigueur se traduisent déjà, pour certains d'entre eux, par une diminution significative du montant des cotisations sociales exigibles.

Appliquée au niveau du SMIC (39 heures), la réduction dégressive des cotisations sociales sur les bas salaires (« ristourne Juppé ») équivaut ainsi, par exemple, à un abattement de 18,2 points de cotisations (sur un total d'environ 30 points). L'allégement « 35 heures », défini dans un cadre général plus contraignant pour les entreprises, se traduit, quant à lui, et dans le cas le plus favorable 7 ( * ) , par une réduction d'environ 26 points de cotisations.

Une étude récente de l'INSEE 8 ( * ) confirme d'ailleurs l'efficacité des allégements de charges sociales en termes de création d'emplois et, plus particulièrement, met en évidence l'effet significatif des allégements définis entre 1994 et 1997 sur le niveau de l'emploi non qualifié.

Ces allégements correspondraient à une baisse du coût du travail moyen de 1,7 % dans l'ensemble de l'échantillon retenu. Cette baisse expliquerait une progression sur l'emploi de 2,6 % dans l'industrie (en 1997 par rapport à 1994) et de 3,4 % dans les services. En appliquant ces données aux nombres d'emplois recensés au niveau national, les auteurs de l'étude en ont donc conclu que ce dispositif aurait permis la création de 460.000 emplois dont 150.000 dans l'industrie et 310.000 dans les services .

Evaluation du nombre d'emplois créés à la faveur de l'allégement des cotisations sociales sur les bas salaires (1994-1997)

Industries

Services

Total

Emploi non qualifié (1)

70.000

150.000

220.000

Emploi qualifié

80.000

160.000

240.000

Emploi total

150.000

310.000

460.000

Source : INSEE

(1) Ouvriers et employés non qualifiés, apprentis et stagiaires

On notera que, par « effet de contagion », ce dispositif a également favorisé la création d'emplois qualifiés. Néanmoins, il ne faudrait pas en conclure, suite à une lecture rapide du tableau ci-dessus, que l'allégement des charges sociales sur les bas salaires a, paradoxalement, davantage favorisé la création d'emplois qualifiés que celle d'emplois non qualifiés. En effet, en proportion (nombre d'emplois créés/effectifs totaux de chaque catégorie), les emplois non qualifiés ont bien été les véritables bénéficiaires de cette mesure : représentant 25 % de la main-d'oeuvre totale, ils constituent ainsi près de 50 % du nombre d'emplois créés .

Un outil éprouvé, une efficacité démontrée : il convient donc, aujourd'hui, de donner une nouvelle impulsion à la politique d'allégement des charges sociales en faveur de l'emploi.

c) La première étape d'une nouvelle politique de l'emploi

Comme l'a déclaré M. le Premier ministre à l'occasion de sa déclaration de politique générale : « les baisses de charges constituent la clé de voûte de notre stratégie. Non par idéologie, mais tout simplement parce que cela marche. »

La mesure de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise prévue par le présent projet de loi s'inscrit dans la continuité des dispositifs ciblés d'allégement de charges tout en s'attachant à amplifier leur portée.

Mais elle constitue aussi, sans aucun doute, la première étape d'une politique plus globale visant à un abaissement significatif des charges sociales et, parallèlement, à une simplification des multiples procédures ou contraintes, qui, en ce domaine, pénalisent l'emploi, et compliquent à l'excès la vie des entreprises.

L'exemple positif des allégements mis en oeuvre entre 1994 et 1997 a démontré la pertinence d'une politique de réduction des charges sociales, tout à la fois ambitieuse dans ses objectifs et simple dans les conditions de sa mise en oeuvre.

Le présent projet de loi s'inscrit, aujourd'hui, dans cette logique.

II. LE PROJET DE LOI : UN DISPOSITIF CIBLÉ, INCITATIF ET SIMPLE

S'appuyant sur ce constat, le présent projet de loi met en place un dispositif simple et pragmatique, dont l'économie générale est claire : favoriser l'embauche dans le secteur privé, des jeunes les moins qualifiés, sur des emplois durables de droit commun, par une exonération de charges sociales patronales.

A. UN DISPOSITIF CIBLÉ

L'expérience montre que l'efficacité d'un dispositif d'aide à l'emploi repose avant tout sur le ciblage de la mesure, faute de quoi son impact risque d'être dilué soit par des effets d'aubaine (l'embauche aurait eu lieu, même en l'absence de mesure de soutien), soit par des effets de concurrence (l'embauche aurait eu lieu mais dans le cadre d'un autre dispositif d'insertion) et n'aurait alors guère d'effets en termes d'emploi.

Dans le cas présent, le ciblage de la mesure présente suffisamment de garanties pour escompter une réelle efficacité :

- elle cible les jeunes les plus en difficulté ;

- elle offre de réelles perspectives d'insertion.

1. Il vise les jeunes les plus en difficulté

Le dispositif s'adresse aux jeunes de 16 à 22 ans, les moins qualifiés. La conjonction de ces critères permet de cibler les jeunes les plus en difficulté qui sont les moins susceptibles de bénéficier d'une mesure d'insertion alternative.

Selon le Gouvernement, le dispositif pourrait concerner environ 200.000 jeunes lorsqu'il atteindra sa « phase de maturité », c'est-à-dire en 2004-2005.

a) Le critère d'âge

Le choix retenu répond à une double justification.

En fixant un âge d'entrée précoce (16 ans), âge de la fin de la scolarité obligatoire, le projet de loi vise explicitement les jeunes en situation d'échec scolaire. Il permet alors de leur offrir immédiatement une solution d'insertion dans le monde du travail et de prévenir très en amont les conséquences de l'échec scolaire.

En fixant une limite supérieure à 22 ans révolus, il permet de prendre en compte la plus large partie des jeunes demandeurs d'emploi. Ainsi, en mars 2002, les jeunes chômeurs de 16 à 22 ans représentent les deux tiers des jeunes de 16 à 25 ans au chômage. On observera d'ailleurs que les jeunes de 21 et 22 ans forment les cohortes numériquement les plus importantes dans le chômage des moins de 25 ans (environ 40 % du total).

b) Le critère du niveau de formation

Ne peuvent bénéficier de la mesure que les jeunes qui n'ont pas le niveau du baccalauréat.

Là encore, ce choix répond à une double logique.

Il s'agit d'abord, bien évidemment, de cibler les jeunes les moins qualifiés qui sont le plus exposés au risque de chômage. Cela touche non seulement les jeunes sans diplôme (taux de chômage de 31,9 % en mars 2002), mais aussi les jeunes titulaires d'un CAP ou d'un BEP. Certes, leur taux de chômage peut être très hétérogène d'une spécialité à l'autre, mais il demeure élevé (taux de chômage moyen de 20,2 % en mars 2002) et surtout a augmenté de 3 points en un an.

Il vise également à limiter la concurrence avec d'autres dispositifs d'insertion et notamment les formations en alternance qui touchent le plus souvent des jeunes ayant un niveau de formation légèrement supérieur. Ainsi, en 2000, 60 % des jeunes signant un contrat de qualification étaient au moins de niveau IV (niveau baccalauréat).

2. Il offre de réelles perspectives d'insertion

L'efficacité d'un dispositif d'insertion repose sur une double exigence : la nécessité d'un contrat stable et l'existence de perspectives de qualification.

Là encore, le dispositif proposé correspond à ces deux exigences d'efficacité.

a) Un contrat stable

Le projet de loi prévoit que le bénéfice du soutien de l'Etat est subordonné à la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) soit à temps plein, soit à temps partiel.

Votre rapporteur se félicite d'un tel choix. L'embauche en CDI constitue en effet, comme le soulignait le ministre lors de son audition par votre commission, « un engagement de long terme » et représente ainsi un « choix stratégique » pour l'entreprise qui ne peut être exclusivement motivée par le bénéfice de l'exonération de charges.

Une fois recruté, le jeune devient donc un salarié « à part entière » , bénéficiant du même régime que tous les autres salariés, notamment en matière de rémunération. C'est incontestablement un point positif car, au-delà des garanties en termes de stabilité de l'emploi, cette formule permet d'éviter toute stigmatisation du jeune, comme cela a pu être le cas pour le dispositif « Nouveaux services-Emplois-jeunes . On sait en effet que ces jeunes, recrutés pour la plupart il est vrai sur un contrat de cinq ans, ont souffert d'être labellisés comme « emplois-jeunes » et de ne pas être considérés comme des salariés de droit commun, ce qui, à l'évidence, fragilise d'autant leurs possibilités d'intégration effective.

Votre rapporteur se félicite donc que le dispositif prévoie un contrat de travail de droit commun et ne soit pas, loin s'en faut, un simple « contrat-jeune » .

La stabilité du contrat est en outre renforcée par la durée de l'aide de l'Etat , fixée à trois ans par le projet de loi. Une telle durée offre ainsi aux jeunes, même à ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi, la durée suffisante pour s'adapter au monde du travail et pour y faire la preuve de leurs capacités. En cela, le dispositif offre également le gage d'une insertion durable 9 ( * ) .

b) Des perspectives de qualification

Le projet de loi ne prévoit aucune obligation de formation professionnelle pour le jeune, mais offre tout de même de réelles perspectives de qualification.

M. François Fillon a largement justifié ce choix lors de son audition devant votre commission :

« Le dispositif envisagé par le Gouvernement ne comporte pas de formation obligatoire. C'est un paramètre important qui mérite d'être expliqué.

« En effet, les jeunes auxquels le dispositif s'adresse ne souhaitent pas ou ne peuvent s'engager immédiatement dans une démarche de formation. Ils sont très souvent en situation d'échec scolaire et ne veulent pas revenir en formation. L'insertion dans l'entreprise est donc un moyen d'assurer leur socialisation et leur entrée dans la vie active. Ils auront un contrat de travail et une rémunération au moins égale au SMIC.

« Une fois cette insertion réalisée, ils pourront ensuite revenir dans une démarche de formation continue au sein de leur entreprise ou, le cas échéant, de formation en alternance. Ils pourront à tout moment faire ce choix, sans préavis. Le projet de loi en prévoit explicitement la possibilité ».

Votre rapporteur considère qu'un tel choix est raisonnable.

D'une part, l'introduction d'une formation obligatoire aurait été largement inadaptée pour de nombreux jeunes, fortement déstructurés, profondément marqués par l'expérience de l'échec scolaire et devenus rétifs à toute forme de formation. Dès lors, on peut craindre que ces jeunes ne souhaitent pas accéder à l'emploi si celui-ci est, dès l'origine, assorti d'une obligation de formation. La logique du dispositif est tout autre : c'est une logique d'accès à l'emploi, finalement assez proche des logiques de l'insertion par l'économique mais ici en milieu de travail « ordinaire ». En cela, le dispositif apparaît adapté au public ciblé.

D'autre part, on peut craindre que l'introduction immédiate d'une obligation de formation n'ait un effet dissuasif pour l'employeur.

Enfin, une telle absence de contenu en formation est une condition nécessaire pour éviter que le dispositif ne concurrence les formations en alternance. Les formations en alternance prévoient en effet une durée élevée de formation : plus de 80 % des contrats de qualification avaient plus de 500 heures de formation en 1999.

Votre rapporteur observe toutefois que l'absence de contenu obligatoire en formation ne signifie pas pour autant l'inexistence de toute perspective de qualification.

Ainsi, le projet de loi, à son article 2, renvoie aux partenaires sociaux la tâche de négocier, par accord de branche, les modalités de validation des acquis de l'expérience du jeune. Dès lors, en application de cette disposition, mais aussi du droit commun tel que défini par la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, les jeunes pourront valoriser leur expérience professionnelle et acquérir ainsi une qualification concrétisée par un titre ou un diplôme reconnu sur le marché du travail.

B. UN DISPOSITIF INCITATIF

Le dispositif défini par le présent projet de loi s'avère particulièrement incitatif, tant en ce qui concerne :

- ses modalités, le soutien de l'Etat prenant la forme d'une exonération forfaitaire ;

- que l'importance de la réduction des charges patronales qui en résulte.

1. Un soutien de l'Etat équivalent à une exonération forfaitaire

Répondant à une double exigence de simplicité et d'efficacité, le dispositif proposé s'apparente à une exonération forfaitaire de charges sociales patronales dont le montant mensuel (soit 225 euros en 2002) sera fixé par décret pour les salariés au SMIC.

Selon les informations communiquées à votre commission, et afin d'éviter la « trappe à bas salaires » 10 ( * ) , le maintien, en proportion, d'un niveau identique d'exonération sera également garanti, par voie réglementaire, pour les salaires compris entre 1 et 1,3 fois le SMIC, le soutien étant, au-delà, plafonné en valeur et donc dégressif par rapport au salaire.

Pourront bénéficier de ce soutien l'ensemble des employeurs du secteur privé (entreprises et associations) pour leurs établissements comptant 250 salariés au moins, à l'exception des particuliers employeurs.

Ce soutien sera :

- accordé pour une durée de trois années consécutives à partir de la date d'embauche , puis un abattement de 50 % est appliqué à son montant au titre de la troisième année du contrat ;

- cumulable avec d'autres allégements de charges sociales existants , à savoir :

• l'exonération de cotisations d'allocations familiales visée à l'article L. 241-6-4 du code de la sécurité sociale ;

• la réduction unique de cotisations sociales (patronales) sur les bas salaires (« ristourne Juppé ») visée à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ;

• l'allégement de charges sociales (patronales) lié à la réduction de la durée hebdomadaire du travail à 35 heures (« allégements Aubry II ») visée à l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale ;

• la réduction de cotisations (patronales) de sécurité sociale , visée à l'article L. 241-14 du code de la sécurité sociale, et liée à l'obligation de nourriture dans le secteur professionnel des hôtels, cafés, bars et restaurants.

Le dispositif ainsi défini, à savoir le versement direct , à l'employeur, d'un montant forfaitaire , présente donc l'avantage de la simplicité et de la « lisibilité » , surtout si on le compare avec la complexité toute technocratique des allégements liés à la réduction du temps de travail (« Aubry II »), dont le montant :

- résulte de l'application d'une formule de calcul pour le moins ésotérique ;

- et ne peut donc être aisément déterminé qu'à l'aide d'un barème « simplifié » de plusieurs pages publiées au journal officiel.

2. Un soutien à l'emploi se traduisant par une réduction significative des charges sociales patronales

Outre sa simplicité, le dispositif proposé dans le présent projet de loi est calculé « par référence aux cotisations et contributions sociales patronales obligatoires de toute nature, dont le paiement est exigé à raison du versement du salaire de l'intéressé ».

Appliqué aux valeurs en vigueur depuis le 1 er juillet 2002 et cumulé avec les allégements déjà existants, le soutien à l'emploi des jeunes en entreprises se traduit donc par une exonération (quasi) intégrale de la totalité des charges sociales patronales dues au niveau du SMIC, comme l'illustrent les exemples fournis dans le tableau ci-après :

Réduction des charges sociales patronales
résultant du cumul des « allégements 35 heures Aubry II »
et du soutien à l'emploi des jeunes en entreprises
(
au 1 er juillet 2002)

(en euros)

Salaires mensuels bruts

Cotisations patronales dues

(1)

Allégement «Aubry II»

(2)

Cotisations patronales après réduction

(1) - (2)

Soutien à l'emploi des jeunes

(3)

Solde des cotisations

(1)-(2)-(3)

SMIC 35 heures

1035,91

469,68

290,13

179,55

225

-45,45

GMR1 1

1100,67

499,04

290,13

208,91

225

-16,09

GMR2

1114,35

505,25

290,13

215,12

225

-9,88

GMR3

1133,49

513,93

280,67

233,26

225

8,26

GMR4

1147,52

520,29

273,94

246,35

225

21,35

GMR5

(SMIC 39 heures)

1154,27

523,35

270,76

252,59

225

27,59

11

« Garanties mensuelles de rémunération» visant à garantir leur niveau antérieur de salaire aux personnels des entreprises passées aux 35 heures : GMR1 : entre le 15/06/98 et le 30/06/99 ; GMR2 : entre le 1/07/99 et le 30/06/00 ; GMR3 : entre le 1/07/00 et le 30/06/01 ; GMR4 : entre le 1/07/01 et le 30/06/02 ; GMR5 : depuis le 1/07/02.

S'agissant des entreprises bénéficiant ainsi des « allégements Aubry II », il convient de noter que, pour les salaires bruts inférieurs à la « GMR2 » et sur la base d'un versement forfaitaire de 225  euros, l'application de la mesure se traduit par un (modeste) gain net pour l'employeur.

Simplicité, exonération (quasi) totale des charges patronales au niveau du SMIC : le dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise se révèle donc particulièrement incitatif.

C. UN DISPOSITIF SIMPLE

Le projet de loi institue un dispositif à la fois ciblé et incitatif. Mais, pour être efficace, encore faut-il qu'il soit également simple et lisible pour que les employeurs se l'approprient effectivement.

Tel semble être ici le cas.

1. Des formalités réduites

a) Les modalités de gestion du soutien

L'exigence de simplicité se traduit d'abord dans la nature du soutien.

Celui-ci tient en effet plus d'une prise en charge directe par l'Etat des charges sociales patronales de l'employeur que d'une exonération de charges stricto sensu . L'employeur continue de verser normalement ses charges sociales aux différents organismes de recouvrement, mais celles-ci sont ensuite compensées, de manière forfaitaire, selon le niveau de salaire du jeune, par l'Etat.

Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les « avances » engagées par l'employeur seraient remboursées par l'Etat trimestriellement, à terme échu, l'UNEDIC étant chargée d'assurer la gestion du dispositif pour le compte de l'Etat dans des conditions fixées par convention.

Un tel mécanisme a -on l'a vu- le mérite de la simplicité tant pour l'Etat que pour l'employeur.

Pour l'employeur, rien ne change dans ses formalités de versement des charges sociales et d'établissement des bulletins de salaires.

Pour l'Etat, le mécanisme est également simple. Car, si le mécanisme d'une exonération strico sensu avait été retenu, celui-ci aurait été dans l'obligation de rembourser, pour chaque salarié, les cotisations et contributions sociales ainsi exonérées à chacun des organismes bénéficiaires. Or, on peut estimer qu'il en existe au moins une cinquantaine. On imagine alors aisément la complexité et l'opacité des flux financiers qui en auraient résulté.

b) Un régime déclaratif

Traditionnellement, les mesures d'aide à l'emploi se traduisent par des formalités à la fois longues et complexes.

Généralement, une convention cadre doit être passée entre l'Etat et l'employeur pour autoriser ce dernier à bénéficier de la mesure. Ces conventions doivent le plus souvent être soumises pour avis aux institutions représentatives du personnel et ne sont valables que pour une durée limitée (souvent un an). Ensuite, le recrutement, qui doit souvent être prescrit par l'ANPE, exige à son tour la conclusion d'une nouvelle convention particulière.

La complexité des procédures, la multiplicité des intervenants et les délais nécessaires constituent alors autant de freins à la mise en oeuvre de la mesure.

Le présent projet de loi a fait, à l'inverse, le choix de la simplicité.

Selon les informations fournies par l'étude d'impact (voir en annexe) , l'octroi du soutien relève ici du seul régime déclaratif, simplifiant de la sorte les formalités demandées à l'employeur.

Celui-ci n'aura qu'à remplir un formulaire pré-établi, contresigné par le salarié, et à l'envoyer à l'organisme gestionnaire (l'ASSEDIC en l'occurrence) et à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle. Si les conditions requises sont respectées, l'octroi de l'aide est accordée pour trois ans.

La simplicité n'est pas pour autant ici synonyme de laxisme. Le décret d'application de la loi devra en effet déterminer les modalités de contrôle et les conditions de suspension ou de remboursement de l'aide.

2. Une vraie lisibilité

a) Un financement transparent

La transparence du financement est incontestablement la première condition de la lisibilité d'une mesure.

Dans le cas présent, le dispositif ne souffre d'aucune ambiguïté comme l'ont confirmé les précisions apportées par le ministre lors de son audition par votre commission. La prise en charge financière reposera exclusivement sur l'Etat et les dépenses correspondantes seront en intégralité inscrites au budget de l'Etat.

Ainsi, en 2002, la mesure sera financée par les redéploiements de crédits et, à partir de 2003, des crédits budgétaires seront inscrits sur une ligne budgétaire spécifique. Son coût est évalué à 25 millions d'euros en 2002 (application à compter du 1 er juillet), à 190 millions d'euros en 2003 (année pleine) et à 500 millions d'euros en 2005.

b) Une application immédiate

La lisibilité d'une mesure dépend aussi des conditions d'application de la loi.

En l'espèce, les mesures d'application devraient être peu nombreuses et devraient donc être publiées rapidement.

L'étude d'impact ne prévoit en effet qu'un seul décret d'application et une simple circulaire.

Le décret définira les conditions d'attribution et le montant du soutien, et les modalités de son versement. Il précisera également les engagements de l'employeur et les contrôles et les soutiens applicables.

La circulaire devrait se borner à déterminer la procédure d'octroi et les conditions d'application de l'attribution et du retrait de l'aide.

Votre rapporteur souhaite que ces mesures d'application soient publiées très rapidement et s'accompagnent d'une information conséquente des employeurs. Cela semble d'autant plus indispensable que l'entrée en vigueur du dispositif est rétroactive à compter du 1 er juillet dernier.

III. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Votre commission approuve très largement le dispositif proposé, tant dans son objectif -il répond à un réel besoin- que dans ses modalités -son économie générale favorise son efficacité. Elle le soutient d'autant plus qu'il correspond en grande partie aux propositions qu'elle défend depuis plusieurs années 11 ( * ) : un meilleur accès des jeunes, et notamment des jeunes les moins qualifiés, à l'emploi en entreprise exige un allégement substantiel du coût du travail.

Votre commission n'a donc pas souhaité modifier en profondeur ce texte.

Pour autant, il lui a semblé utile de le compléter afin de renforcer la portée du dispositif et de favoriser plus encore les perspectives d'insertion durable des jeunes.

A. RENFORCER LA PORTÉE DU DISPOSITIF

Votre commission vous proposera d'abord quelques amendements visant à renforcer la portée du projet de loi, afin que ses effets sur l'emploi soient les plus importants possibles.

1. Consolider la sécurité juridique du dispositif

La première condition pour garantir la portée de la mesure tient, à l'évidence, au fait que son application corresponde effectivement aux conditions prévues par la loi.

Or, sur ce point, il n'est sans doute pas inutile de mieux préciser la nature juridique du dispositif pour assurer sa lisibilité.

Si la mesure proposée vise effectivement à exonérer l'employeur de ses charges sociales patronales obligatoires, la solution retenue par le projet de loi n'est pas, au sens strict, une exonération : il s'agit en réalité d'un soutien de l'Etat équivalent, pour l'employeur, à une exonération de charges. En pratique, l'employeur sera toujours tenu de payer ces charges. Mais elles lui seront remboursées, sur une base forfaitaire, par l'Etat. Dès lors, dans un souci de cohérence et de sécurité juridiques, il devient nécessaire d'apporter cette précision dans la loi.

2. Etendre la mesure à toutes les entreprises

Le projet de loi restreint le champ d'application du dispositif aux seuls établissements employant au plus 250 salariés.

Votre commission craint qu'une telle limite se révèle inutilement restrictive.

D'abord, les moyennes et grandes entreprises sont bien armées pour accueillir dans les meilleures conditions les jeunes les moins qualifiés. Elles sont en effet à même de leur offrir de vraies perspectives d'insertion professionnelle car elles peuvent plus facilement organiser un accompagnement du jeune dans l'entreprise (tutorat, accompagnement social...). Elles peuvent aussi aisément renforcer le contenu en formation du contrat. On sait en effet que les possibilités d'accès à la formation sont plus fortes dans les grandes entreprises.

Ensuite, ces entreprises recourent moins aux formations en alternance et à l'apprentissage que les PME. Ainsi, les entreprises de plus de 200 salariés n'employaient en 2000 que moins de 15 % des jeunes sous contrat de qualification. De même, toujours en 2000, plus de 85 % des apprentis étaient employés dans des entreprises de moins de 50 salariés. Dès lors, élargir le champ d'application du dispositif aux entreprises de plus de 250 salariés permettrait d'assurer une meilleure complémentarité entre le dispositif et les formations en alternance.

Enfin, les difficultés de recrutement ont tendance à croître avec la taille de l'entreprise. Alors que, parmi les entreprises de moins de 100 salariés, moins de la moitié déclaraient connaître des difficultés de recrutement en 2001, cette proportion atteignait 75 % dès que l'on dépassait le seuil de 250 salariés 12 ( * ) .

Dans ces conditions, votre commission estime souhaitable de supprimer ce seuil.

3. Atténuer les effets des seuils d'effectifs

Votre commission a également souhaité desserrer un possible frein à son développement dans les PME.

Comme toujours en matière de droit du travail, votre commission craint que l'existence des seuils d'effectifs déterminés par le code du travail 13 ( * ) ne limite l'attractivité de la mesure pour les entreprises dont les effectifs sont juste en dessous desdits seuils.

Il ne faudrait pas, en effet, qu'un employeur soit dissuadé d'embaucher un jeune sous prétexte que cela ferait franchir un seuil à l'effectif de l'entreprise, et que cela se traduirait par un alourdissement des charges ou par l'apparition de nouvelles contraintes.

Votre commission craint en effet que, dans certains cas, le franchissement d'un seuil d'effectif lié à l'embauche d'un jeune, ait des répercussions financières telles, sur la masse salariale, qu'elles absorberaient -et au-delà- le soutien apporté par le projet de loi.

En conséquence, votre commission suggère de neutraliser cet effet de seuil en prévoyant que le salarié ne soit pas, pour une durée limitée, pris en compte pour le calcul des effectifs de l'entreprise.

B. FAVORISER PLUS ENCORE L'INSERTION PROFESSIONNELLE DURABLE

Votre commission vous proposera également des amendements visant à favoriser plus encore l'insertion professionnelle du jeune dans le monde du travail.

1. Encadrer le temps partiel

Le projet de loi ouvre le bénéfice du soutien de l'Etat aux jeunes recrutés en CDI, qu'il s'agisse d'un temps plein ou d'un temps partiel.

Votre commission considère qu'il est nécessaire de mieux encadrer les possibilités de recrutement à temps partiel.

Dans la mesure où le dispositif vise explicitement l'insertion durable des jeunes, il est souhaitable de ne pas favoriser le travail à temps partiel au-dessous d'un certain volume d'heures. La philosophie du dispositif n'est bien évidemment pas d'encourager la multiplication des « petits boulots », deux heures par ci, trois heures par là.

En revanche, compte tenu des difficultés propres aux publics visés, il n'est pas non plus souhaitable d'interdire toute possibilité de temps partiel. Il n'est pas évident que tous les jeunes, et surtout ceux en grande difficulté, puissent directement entrer dans la vie active à temps plein.

Une limitation du temps partiel à au moins un mi-temps apparaît alors raisonnable.

2. Mettre en place un accompagnement du jeune dans l'entreprise

Votre commission considère qu'il faut être particulièrement attentif aux conditions d'entrée du jeune dans l'entreprise afin que l'accès à l'emploi se traduise réellement par une insertion non seulement professionnelle, mais aussi plus largement sociale.

Aussi juge-t-elle souhaitable de favoriser l'accompagnement du jeune dès son entrée dans l'entreprise.

Pour des jeunes souvent très en difficulté, un tel accompagnement pourrait passer par le soutien d'un salarié référent, voire d'un organisme spécialisé (mission locale par exemple). Cet accompagnement permettrait d'accueillir le jeune, de l'aider, de l'informer et de le guider dans l'entreprise. Il lui permettrait aussi, le cas échéant, de participer à sa resocialisation.

La nature de cet accompagnement est bien évidemment fonction de la situation personnelle du jeune. Voilà pourquoi votre commission n'a pas souhaité le rendre obligatoire. Il lui paraît, sur ce point, plus opportun de laisser aux partenaires sociaux, dans chaque branche, voire dans chaque entreprise, le soin d'en déterminer les modalités.

3. Faciliter l'accès aux bilans de compétences

Le projet de loi souligne toute l'importance que peut jouer la validation des acquis de l'expérience professionnelle dans le processus d'insertion du jeune et la nécessité de valoriser au mieux les compétences qu'il aura acquises.

Dans ce contexte, votre commission juge nécessaire de faciliter l'accès des salariés recrutés, dans le cadre du dispositif, au bilan de compétences.

Pour des jeunes sans qualification, il semble en effet souhaitable de leur permettre d'accéder rapidement à un bilan de compétences. C'est un moyen pour eux de faire le point sur les compétences acquises et sur leur projet professionnel. Il participe donc de la démarche d'insertion dans la durée.

Dès lors, votre commission suggère de renvoyer à un accord de branche le soin de déterminer les modalités d'accès au bilan de compétences : financement du bilan et du congé, définition de la durée minimale d'ancienneté pour y accéder. Votre commission observe que la loi prévoit actuellement une ancienneté minimale de cinq ans avant de bénéficier d'un congé pour bilan de compétences. Il serait sans doute souhaitable, dans la mesure du possible, de permettre au jeune d'y accéder dès la troisième année de son contrat.

LE BILAN DE COMPETENCES

La loi du 31 décembre 1991, précédée de l'accord interprofessionnel du 3 juillet 1991, donne au bilan de compétences une base légale et précise son régime juridique. Les actions permettant de réaliser un bilan de compétences entrent dans le champ d'application des dispositions relatives à la formation professionnelle continue (article L. 900-2 du code du travail). Le code du travail reconnaît à tout travailleur, qu'il soit salarié, non salarié, demandeur d'emploi, agent public, le droit de réaliser un bilan de compétences. Le bilan de compétences ne constitue par pour autant une obligation du salarié qui peut le refuser.

Le bilan peut être réalisé à l'initiative de l'employeur, dans le cadre du plan de formation. Il est alors conçu comme un outil de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, et comme un outil de gestion des carrières et de la mobilité professionnelle. Le bilan peut être également réalisé à la demande du salarié dans le cadre du congé-bilan de compétences sous réserve d'une ancienneté de cinq ans dont douze mois dans l'entreprise. Dans les deux cas, le bilan est assimilé à une période de travail effectif, dans la limite de 24 heures.

Le bilan repose sur un contrat tripartite entre le bénéficiaire, le prestataire et le financeur.

Il a pour objet « de permettre à des travailleurs d'analyser leurs compétences professionnelles et personnelles ainsi que leurs aptitudes et leurs motivations, afin de définir un projet professionnel et, le cas échéant, un projet de formation ». Il s'articule autour d'une démarche en trois phases :

- une phase préliminaire (information, engagement et définition des besoins du

salarié) ;

- une phase d'investigation (des acquis, des souhaits et du possible) ;

- une phase de conclusion (plan d'action).

En 2000, 78.788 bilans de compétences ont été réalisés.

Source : DARES

4. Veiller aux possibilités de formation

Le projet de loi repose -on l'a vu- sur un choix clair : l'absence de contenu spécifique en formation, hormis bien entendu la possibilité d'accéder normalement aux formations de droit commun.

Votre commission partage ce choix, mais demeure convaincue qu'il n'exonère pas d'une réflexion approfondie sur l'effort de formation.

Le projet de loi prévoit certes des possibilités de retour vers l'apprentissage ou vers les formations en alternance. Mais, compte tenu des niveaux de rémunérations proposées, ces retours risquent d'être peu nombreux.

De même, la perspective d'une validation des acquis de l'expérience ne peut en effet suffire à elle seule à faire l'impasse sur la question de la formation. Si la validation doit en effet permettre au jeune d'acquérir plusieurs des « modules » constituant la qualification professionnelle visée, il n'en devra sans doute pas moins passer par un cursus de formation complémentaire pour acquérir les autres « modules » nécessaires à l'obtention totale du titre ou du diplôme.

Dès lors, cette exigence de formation pose en définitive moins la question du contenu en formation du dispositif que celle, plus globale, de la réforme de notre système de formation professionnelle. Chacun en connaît les limites, notamment pour les jeunes les moins qualifiés qui n'accèdent encore que trop rarement aux dispositifs de formation de droit commun.

Taux d'accès à la formation continue en 2000 selon l'ancienneté de sortie du système scolaire et le niveau de formation initiale

En pourcentage

Ensemble

Ancienneté

2 à 5 ans

6 à 9 ans

10 à 33 ans

Supérieur (I à III)

48,9

53,1

52,4

50,1

Secondaire (IV, V)

27,6

31,6

29,2

29,7

Non qualifiés (V bis, VI)

11,3

24,0

18,9

15,2

Ensemble

27,7

40,1

37,6

31,2

Source : enquête « Formation continue 2000 » ; MES-DARES

Votre commission appelle alors de ses voeux une reprise rapide de la négociation interprofessionnelle sur l'adaptation de la formation professionnelle, suspendue depuis le 23 octobre dernier.

C'est dans ce cadre que devra être examinée la question de la formation des jeunes en entreprise, même s'il est déjà possible d'explorer certaines passerelles avec les dispositifs actuels de formation.

Mais votre commission invite également le Gouvernement à explorer dès à présent les voies et moyens pour favoriser le développement des formations en alternance, considérablement fragilisées ces cinq dernières années 14 ( * ) , qui demeurent les compléments indispensables du présent dispositif pour l'insertion professionnelle des jeunes.

Pour autant, votre Commission considère qu'il est d'ores et déjà possible de prévoir, dans le projet de loi, que des négociations entre partenaires sociaux, au niveau de la branche, puissent immédiatement déterminer les conditions d'accès à la formation des salariés visés par le présent dispositif, à l'image de ce qui est déjà prévu par la validation des acquis de l'expérience.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier
(art. L. 322-4-6 et art. L. 322-4-6-1 à L. 322-4-6-3 nouveaux
du code du travail)
Institution d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise

L'article premier rétablit l'article L. 322-4-6 du code du travail, supprimé par la loi de finances pour 2002 15 ( * ) , et introduit trois nouveaux articles L. 322-4-6-1 dans le code du travail. Il constitue le coeur du projet de loi, en définissant les caractéristiques du nouveau dispositif : publics visés, régime du soutien, employeurs bénéficiaires, gestion du dispositif.

Art. L. 322-4-6 du code du travail
Public visé et nature du soutien

I - Le dispositif proposé

Le présent article prévoit qu'une exonération de charges peut être accordée aux employeurs recrutant des jeunes peu qualifiés en CDI.

Il détermine d'abord les publics visés. Deux critères sont ici définis :

- un critère d'âge : de 16 à 22 ans révolus,

- un critère de niveau de formation : le jeune doit avoir un niveau de formation inférieur au baccalauréat.

On observera que ce sont près de 400.000 jeunes qui sortent du système éducatif chaque année (386.000 en 1999) qui correspondent à ces critères. On observera aussi qu'en mars 2002, environ 245.000 jeunes répondant à ces critères étaient au chômage.

Il fixe également les conditions de recrutement du jeune. L'aide n'est ainsi accordée que si le contrat de travail est un CDI, à temps plein ou à temps partiel.

C'est l'une des principales spécificités de ce dispositif, la plupart des autres mesures d'insertion professionnelle des jeunes reposant le plus souvent sur des contrats de travail à durée déterminée (CES, CEC, CIE, emplois-jeunes...).

Il précise en outre la nature du soutien. Il s'agit d'une « exonération de charges » , calculée par référence aux « cotisations et contributions sociales patronales obligatoires de toutes natures, dont le paiement est exigé à raison du versement du salaire de l'intéressé ».

A défaut de précision supplémentaire, et compte tenu des éclaircissements apportés par le ministre lors de son audition par votre commission, il convient de considérer que les « cotisations et contributions sociales » visées par le présent article sont celles qui figurent dans le tableau ci-dessous.

Cotisations et contributions sociales patronales de toutes natures
(exigibles pour un salaire égal au SMIC au 1 er juillet 2002)

Charges

Taux employeur

1. Cotisations sociales

- Assurance maladie

12,80 %

- Assurance vieillesse

8,20 %

- Allocations familiales

5,40 %

- Accidents du travail

variable

2. Retraite complémentaire (ARRCO)

4,50 %

3. AGFF

1,20 %

4. ASSEDIC

- Assurance chômage

3,70 %

- Fonds de garantie des salaires

0,30 %

5. Construction-logement

- Fonds national d'aide au logement

. contribution de toutes les entreprises

0,10 %

. contribution des entreprises de plus de 9 salariés

0,40 %

- Participation des employeurs à l'effort de construction (pour les entreprises de 10 salariés et plus)

0,45 %

6. Taxe d'apprentissage

0,50 %

7. Formation professionnelle

- Entreprises de 10 salariés et plus

1,50 %

- Entreprises de moins de 10 salariés (1)

0,25 %

8. Taxe pour les transports (2)

variable

(1) Le taux n'est que de 0,10 % pour les employeurs non soumis à la taxe d'apprentissage.

(2) Ce taux est de 2,50 % en région parisienne.

On observera que certaines de ces « cotisations et contributions sociales » sont variables selon la taille, la nature ou la localisation de l'entreprise et que l'employeur peut parfois s'exonérer de certaines d'entre elles en justifiant de dépenses appropriées (ex. : taxe d'apprentissage, contribution à la formation professionnelle, participation à l'effort de construction).

Comme il a été précisé dans l'exposé général, le soutien s'apparente plus à une aide directe de l'Etat versée directement à l'employeur qu'à une exonération au sens strict. Il est toutefois prévu que le montant de l'aide soit équivalent à une exonération de charges, mais que celle-ci soit calculée de manière forfaitaire.

Le montant de cette aide sera déterminé par décret. Il devrait être égal à 225 euros au niveau du SMIC et serait proportionnel au salaire jusqu'à 1,3 SMIC et constant au-delà.

Le présent article détermine également les conditions de cumul avec les autres aides de l'Etat. Cette aide n'est pas cumulable avec une autre aide à l'emploi de l'Etat, mais elle est cumulable avec quatre mesures de réduction et d'allégement des cotisations :

- l'exonération de cotisations d'allocations familiales visée à l'article L. 241-6-4 du code de la sécurité sociale ;

- la réduction unique de cotisations sociales (patronales) sur les bas salaires (« ristourne Juppé ») visée à l'article L. 241-13 du code de la sécurité sociale ;

- l'allégement de charges sociales (patronales) lié à la réduction de la durée hebdomadaire du travail à 35 heures (« allégements Aubry II ») visée à l'article L. 241-13-1 du code de la sécurité sociale ;

- la réduction de cotisations (patronales) de sécurité sociale, visée à l'article L. 241-14 du code de la sécurité sociale, et liée à l'obligation de nourriture dans le secteur professionnel des hôtels, cafés, bars et restaurants.

Le présent article fixe aussi la date d'entrée en vigueur du dispositif : celui-ci est applicable à tous les contrats conclus à compter du 1 er juillet 2002.

L'entrée en vigueur rétroactive du dispositif, fréquente en la matière, s'explique par le souci de ne pas inciter les employeurs à différer leurs embauches, dans l'attente de la publication de la loi, afin de pouvoir bénéficier de la mesure d'exonération.

Le présent article renvoie enfin à un décret d'application le soin de fixer le montant et les modalités d'attribution de l'exonération et, plus généralement, les conditions d'application du présent article.

II - La position de votre commission

Votre commission partage très largement l'économie générale du dispositif, qu'il s'agisse du public visé ou des modalités de l'aide.

Néanmoins, outre quelques amendements de cohérence, elle vous propose d'apporter trois précisions .

La première vise à indiquer dans le code du travail, comme il est d'usage pour les dispositifs d'aide à l'emploi, l'objet de la mesure : favoriser l'accès des jeunes à l'emploi et faciliter leur insertion professionnelle.

La deuxième vise à consolider la sécurité juridique du dispositif en modifiant l'appellation de l'exonération. Comme il ne s'agit pas d'une exonération au sens strict du terme, il convient de retenir une autre appellation. Votre commission propose donc de substituer le terme « soutien » à celui d'« exonération », comme c'est du reste déjà le cas dans l'intitulé du projet de loi.

La troisième vise à encadrer les possibilités de recrutement à temps partiel dans le souci de favoriser une insertion professionnelle durable. En conséquence, pour recruter à temps partiel, la durée du travail doit être au moins égale à un mi-temps.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. L. 322-4-6-1 du code du travail
Employeurs concernés et durée du soutien

I - Le dispositif proposé

Cet article précise le champ des employeurs pouvant bénéficier de l'exonération prévue à l'article précédent. Il s'agit de l'ensemble des employeurs assujettis à l'obligation d'affiliation à l'assurance chômage, telle que visée à l'article L. 351-4 du code du travail. Il s'agit donc de l'ensemble du secteur privé : entreprises et associations, à l'exception des entreprises publiques dans lesquelles l'Etat est majoritaire.

Il prévoit cependant explicitement deux limitations à ce champ :

- sont exclus les particuliers, au motif qu'ils bénéficient déjà de mesures d'allégement du coût du travail d'ordre fiscal notamment ;

- l'exonération ne s'applique qu'aux seuls établissements employant au plus 250 salariés.

Il prévoit en outre que les employeurs de pêche maritime bénéficient également de l'exonération, sans que les deux limites citées précédemment leur soient applicables.

Cet article détermine également la durée de l'aide . Elle ne peut excéder trois années. Le Gouvernement a d'ores et déjà annoncé que l'aide serait à taux plein les deux premières années et diminuée de moitié la troisième.

Cet article pose enfin trois conditions à l'octroi de l'aide.

La première condition, traditionnelle pour les aides à l'emploi dans le secteur marchand, est relative à la situation de l'employeur au regard de l'emploi : il ne doit avoir procédé à aucun licenciement pour motif économique dans les six mois précédant l'embauche du salarié.

La deuxième est relative à sa situation vis-à-vis des organismes sociaux : il doit être à jour de ses cotisations et contributions sociales.

La troisième vise à limiter les éventuels effets de substitution visant à faire bénéficier de l'aide un salarié déjà présent dans l'entreprise. En conséquence, ne peuvent bénéficier les personnes déjà employées dans l'entreprise dans les douze mois précédant l'embauche.

Il est toutefois prévu une notable exception : un salarié en CDD travaillant déjà dans l'entreprise peut être recruté dans le cadre du dispositif à l'échéance de son contrat de travail. Une telle exception permet ainsi d'offrir une opportunité d'emploi stable à un jeune en CDD. On observera qu'elle permet également à l'employeur de recruter en contrat de travail à durée indéterminée, avec l'aide de l'Etat, un apprenti ou un jeune en contrat de qualification, qui travaillait déjà dans l'entreprise, à l'issue de sa période de formation.

II - La position de votre commission

Outre quelques amendements de précision et de coordination, votre commission vous propose d'adopter trois amendements.

Le premier vise à élargir le champ des employeurs concernés en supprimant le seuil limitant la mesure aux seuls établissements de 250 salariés et moins.

Un tel seuil présente en effet deux lacunes.

D'une part, il restreint considérablement le champ de la mesure alors même que les grandes entreprises sont souvent bien placées pour offrir aux jeunes de vraies perspectives d'insertion professionnelle.

D'autre part, le seuil retenu soulève une difficulté d'ordre juridique. Il risque en effet d'introduire une rupture d'égalité entre les entreprises, selon qu'elles sont organisées ou non en établissements. La suppression du seuil lève alors cette difficulté.

Le second amendement étend explicitement aux travailleurs intérimaires déjà employés dans l'entreprise la possibilité accordée aux salariés en CDD d'être recrutés, dans le cadre du présent dispositif, à l'échéance normale de leur contrat.

Le texte du projet de loi entretient une certaine confusion sur ce point. Or, on voit mal pourquoi cette possibilité serait ouverte pour les seuls CDD et non pour les contrats de travail temporaire. Si l'objectif du texte est de lutter contre la « précarité », il est logique d'autoriser les intérimaires à entrer dans le dispositif.

Le troisième amendement est relatif à la durée du versement du soutien. Il est en effet prévu que celui-ci sera accordé pour une durée de trois ans et sera diminué de moitié la troisième année. Or le projet de loi n'évoque pas cette dégressivité. Par souci de sécurité juridique, il semble nécessaire de prévoir dans la loi une telle possibilité de dégressivité.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. L. 322-4-6-2 du code du travail
Conditions particulières de rupture du contrat de travail

I - Le dispositif proposé

Cet article introduit une dérogation au droit commun de la rupture des contrats de travail pour les contrats bénéficiant de l'exonération.

Il prévoit que le jeune peut rompre unilatéralement son contrat, sans préavis (c'est-à-dire sans avoir à respecter le délai-congé visé à l'article L. 122-5 du code du travail), s'il s'engage dans un processus de formation qualifiante. Seuls deux cas sont ici visés :

- les formations en alternance, à savoir le contrat d'apprentissage ou le contrat de qualification ;

- les actions de formation professionnelle continue reconnues comme telles par le code du travail.

II - La position de votre commission

Votre commission comprend volontiers les motivations d'une telle disposition et s'en tiendra ici à un simple amendement de précision. Il s'agit à l'évidence d'inciter, ou plutôt de ne pas décourager, le salarié à s'engager dans un processus de formation qualifiante.

Elle craint toutefois que sa portée demeure en pratique modeste. Ainsi, pour s'en tenir aux seules formations en alternance, la durée des contrats 16 ( * ) et le montant des rémunérations 17 ( * ) apparaissent comme autant d'obstacles pratiques à l'engagement des jeunes dans ces processus de qualification.

Elle regrette également qu'une telle disposition introduise une brèche dans la nature même du contrat. La logique et la force du dispositif reposent en effet sur le fait que le salarié recruté avec le soutien de l'Etat est soumis au droit commun du travail et est donc un salarié « à part entière ». Il n'était donc pas forcément souhaitable d'établir ici une première discrimination, dont la portée est finalement incertaine.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Art. L. 322-4-6-3 du code du travail
Gestion du dispositif

I - Le dispositif proposé

Cet article prévoit que la gestion du dispositif peut être confiée à l'UNEDIC ou à une personne morale de droit public.

Le Gouvernement a déjà annoncé que ce serait l'UNEDIC qui serait chargée de cette gestion. Une convention devrait être conclue à cet effet.

II - La position de votre commission

Votre commission, qui n'aura ici qu'un simple amendement rédactionnel à vous présenter, considère qu'une telle délégation de la gestion du dispositif devrait permettre au mieux son application, dans la mesure où l'UNEDIC est sans doute l'organisme le plus adapté pour mettre en oeuvre la mesure compte tenu de son champ d'application.

Elle souhaite néanmoins que la future convention prévoie une exacte compensation par l'Etat du coût de la gestion du dispositif par l'UNEDIC.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Articles additionnels après l'article L. 322-4-6-3 du code du travail

Votre commission vous propose de compléter le présent article premier du projet de loi par trois nouvelles dispositions qui feront l'objet de trois nouveaux articles du code du travail (art. L. 322-4-6-4 à L. 322-4-6-6).

Le premier article additionnel vise à améliorer les possibilités d'insertion pour les jeunes. Il prévoit de renvoyer à un accord de branche le soin de définir les conditions dans lesquelles le salarié peut bénéficier d'un accompagnement et peut réaliser un bilan de compétences.

Le deuxième article additionnel vise à desserrer un frein au développement de la mesure dans les PME, en neutralisant de manière temporaire les effets de seuil d'effectifs pour l'employeur. A cette fin, il prévoit de ne pas comptabiliser le jeune dans l'effectif de l'entreprise, pendant deux ans, sauf pour l'application de deux législations bien spécifiques qu'il convient à l'évidence d'exclure d'une telle neutralisation :

- celle relative à la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, afin de maintenir le caractère préventif de cette tarification ;

- celle relative au financement de la formation professionnelle, afin de ne pas limiter les possibilités pour le jeune d'accéder à la formation.

Le dernier article additionnel vise à mieux prendre en compte les spécificités de certaines professions pour garantir la portée de la mesure dans ces secteurs.

Certaines professions (le BTP notamment) ont constitué des caisses de congés payés qui sont chargées de rémunérer le salarié pendant sa période légale de congés. Ces professions ne bénéficieraient alors, en l'absence de toute précision dans la loi, du soutien que onze mois sur douze.

Cet article additionnel renvoie donc au décret le soin de déterminer les conditions dans lesquelles le soutien est accordé pour les professions ayant mis en place de telles caisses de congés payés.

Votre commission vous propose d'insérer ces trois articles additionnels par voie d'amendements. Elle vous propose d'adopter l'ensemble du présent article premier ainsi amendé.

Art. 2
Validation des acquis de l'expérience et formation professionnelle

I - Le dispositif proposé

Cet article apporte certaines précisions sur les conditions dans lesquelles les salariés entrés dans le dispositif peuvent bénéficier d'une validation des acquis professionnels et accéder à la formation professionnelle dans le cadre du plan de formation de l'entreprise.

Le premier alinéa est relatif à la validation des acquis de l'expérience (VAE). Il renvoie aux branches professionnelles le soin de déterminer, par convention ou accord collectif, les conditions dans lesquelles le salarié peut voir son expérience validée.

La validation des acquis de l'expérience

La validation des acquis de l'expérience (VAE) permet à toute personne engagée dans la vie active depuis au moins trois ans, de faire reconnaître ses compétences professionnelles par un titre ou un diplôme à finalité professionnelle.

Les articles 133 à 146 de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale ont inscrit ce dispositif dans le livre IX du code du travail et dans le code de l'éducation.

Le champ d'application de la VAE est plus étendu que celui de la validation des acquis professionnels (VAP) issue des lois du 26 janvier 1984 et du 20 juillet 1992 à laquelle elle se substitue :

- elle est étendue à l'ensemble des titres et diplômes inscrits au répertoire national des certifications professionnelles ;

- elle prend en compte les compétences professionnelles acquises au travers d'activités salariées, non salariées et bénévoles, en rapport direct avec le contenu du titre ou diplôme ;

- le jury de validation peut accorder la totalité de la certification ;

- la durée minimale de l'expérience considérée est ramenée de cinq à trois ans, mais c'est l'autorité qui délivre la certification qui détermine cette durée en fonction des spécificités de chaque titre ou diplôme ;

- un congé de validation est institué selon les mêmes modalités d'accès que celles du congé bilan de compétences ;

- les actions de validation des acquis entrent désormais dans le champ des actions de formation et, en conséquence, peuvent être imputées par les employeurs sur leur participation au financement de la formation continue.

La procédure de validation accorde une place centrale aux autorités qui délivrent le titre ou le diplôme.

Celles-ci mettent en place des jurys de validation, conformément au règlement et aux dispositions régissant la certification visée.

Les jurys sont souverains pour accorder tout ou partie de la certification demandée. Ils sont chargés d'apprécier le caractère professionnel des compétences acquises et leur lien avec celles exigées par le référentiel de la certification. La décision intervient au vu d'un dossier constitué par le candidat à l'issue d'un entretien, ainsi, le cas échéant, qu'après une « mise en situation professionnelle ».

De fait, comme le précise l'exposé des motifs du projet de loi, le Gouvernement souhaite « favoriser la reconnaissance de l'expérience acquise par le travail, en invitant les partenaires sociaux à organiser la validation de ces acquis au terme des trois ans prescrits par la loi ».

Le second alinéa précise que l'employeur doit mettre en oeuvre les « conditions nécessaires à la participation effective des intéressés » aux actions prévues par le plan de formation de l'entreprise.

II - La position de votre commission

Votre commission partage largement l'option choisie par le projet de loi en matière de VAE : la validation peut être un moyen approprié pour les jeunes d'accéder à la qualification, qui reste à l'évidence la condition indispensable pour assurer de réelles possibilités d'évolution de carrière.

Elle s'interroge toutefois sur la portée effective des dispositions du présent article. Il se contente en effet d'inciter les branches professionnelles à négocier sur le thème de la VAE. Or, en application de la loi du 17 janvier 2002, celles-ci ne semblent avoir guère de marge de manoeuvre en la matière puisque la loi accorde logiquement un rôle central aux autorités qui délivrent les titres ou les diplômes. Ce sont elles qui déterminent très largement les modalités de la validation. Mais, le champ de la négociation pourra porter sur les conditions d'accès des salariés au congé pour VAE et sur les modalités d'acquisition des titres délivrés par les branches professionnelles 18 ( * ) , à savoir les certificats de qualification professionnelle 19 ( * ) (CQP).

Il n'en reste pas moins que ces dispositions inciteront sans doute les branches professionnelles à mieux s'approprier les nouvelles dispositions relatives à la VAE, qui restent pour le moment encore très largement en attente d'application.

De même, votre commission considère qu'il est d'ores et déjà possible de prévoir que des négociations de branche entre partenaires sociaux puissent immédiatement déterminer les conditions d'accès à la formation professionnelle des salariés visés par ce dispositif.

Elle estime, en effet, qu'une telle disposition aura une incidence bien supérieure à la rédaction actuelle prévue par le second alinéa, qui se contente en définitive de rappeler le droit commun, et n'a pas de portée normative.

Aussi, votre commission vous propose d'adopter, outre un amendement rédactionnel, un amendement en ce sens.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

*

* *

Sous réserve des observations et des amendements qu'elle vous a présentés, votre commission des Affaires sociales vous demande d'adopter le présent projet de loi.

TRAVAUX DE COMMISSION

I. AUDITION DU MINISTRE

Réunie le jeudi 11 juillet 2002, sous la présidence de M. Nicolas About, président, la commission a procédé à l'audition de M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité sur le projet de loi n° 351 (2001-2002) portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise .

Après avoir rappelé que le projet de loi correspondait à un engagement du Président de la République et de la nouvelle majorité parlementaire, M. François Fillon a souligné les fortes difficultés rencontrées, par les jeunes, pour accéder à l'emploi : leur taux de chômage est anormalement élevé, notamment pour les moins qualifiés, et a fortement augmenté depuis un an.

Il a considéré que cette situation devait s'apprécier au regard d'un triple constat : les entreprises n'embauchent pas naturellement les jeunes sans qualification qui sont systématiquement en bout de file d'attente, les dispositifs existants ne touchent pas les moins qualifiés, leur entrée dans la vie active se caractérise par des trajectoires précaires et discontinues.

Précisant que le nouveau dispositif présenté par le Gouvernement se fondait sur ces constats, il a indiqué qu'il répondait, avant tout, à un souci pragmatique d'efficacité : favoriser l'embauche des jeunes les plus vulnérables sur des emplois de droit commun dans le secteur privé par une exonération de charges sociales patronales.

Revenant sur le public visé, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a estimé qu'en s'adressant aux jeunes de 16 à 22 ans sans qualification ou avec une qualification de niveau V, le projet de loi cherchait à prendre en compte les jeunes sortant précocement du système éducatif en situation d'échec scolaire, mais aussi la classe d'âge de 21-22 ans, qui constitue la cohorte la plus importante parmi les chômeurs de moins de 25 ans. Ainsi délimité, le dispositif pourrait concerner environ 200.000 jeunes dans sa phase de maturité en 2004-2005, tout en limitant les risques éventuels de détournement de l'aide.

Il a également estimé que, pour être réellement incitatif, le dispositif devait compenser le surcoût lié à l'embauche d'un jeune non qualifié par une compensation des charges patronales. Il a précisé que le soutien de l'Etat serait de 2.700 euros par an en plus des allégements généraux de charges existants, ce qui constituerait une incitation forte pour les entreprises, contribuerait parallèlement à rajeunir l'âge moyen de leurs effectifs et à prévenir, le cas échéant, des difficultés de recrutement.

M. François Fillon a ensuite souligné que le recrutement en contrat à durée indéterminée (CDI) représentait un engagement de long terme pour l'entreprise et que, dès lors, une telle embauche devait constituer pour elle un choix stratégique et ne pouvait donc pas seulement être motivée par le seul bénéfice de l'exonération de charges.

Signalant que le dispositif était dépourvu de toute formation obligatoire, il a justifié ce choix en indiquant que le projet de loi visait les jeunes, souvent en situation d'échec scolaire, qui ne voulaient pas ou ne souhaitaient pas s'engager dans un nouveau parcours de formation. Il a indiqué que l'objectif du dispositif était d'abord de leur permettre de rentrer dans la vie active, même si, par la suite, ils pouvaient revenir, sans préavis, dans une démarche de formation soit au sein de l'entreprise, soit en alternance. Il a en outre précisé que le dispositif pouvait déboucher sur une validation des acquis de l'expérience dans des conditions définies par les branches professionnelles.

Soulignant les dissemblances entre le dispositif et les formations en alternance (publics différents, coût horaire pour l'entreprise également différent), il a considéré que ces deux instruments n'entraient pas en concurrence et que le projet de loi ne portait pas préjudice aux initiatives que pourraient prendre les partenaires sociaux afin de rénover les formations en alternance.

Il a enfin estimé que le dispositif pouvait sans doute encore être complété, dans les entreprises, par des initiatives des partenaires sociaux, notamment en matière de tutorat ou d'accompagnement.

Après avoir rappelé que la commission appelait de ses voeux depuis plusieurs années la création d'une mesure d'insertion durable des jeunes les moins qualifiés en entreprise par une réduction du coût du travail, M. Louis Souvet, rapporteur, a estimé que le dispositif correspondait à un vrai besoin.

Il a alors interrogé le ministre sur le champ des cotisations et charges sociales visées et le montant du soutien de l'Etat. Il s'est également interrogé sur le seuil de 250 salariés, sur l'opportunité de prévoir un tutorat ou un accompagnement social et sur le positionnement du dispositif par rapport aux formations en alternance et à la validation des acquis.

En réponse, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que le dispositif visait l'ensemble des charges patronales pesant sur le salaire et se traduirait par une aide de l'Etat de 225 euros par mois au niveau du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), puis proportionnelle dans des conditions fixées par décret jusqu'à 1,3 SMIC. Il a estimé qu'un tel soutien était plus favorable qu'un dispositif d'exonération qui aurait été nécessairement plus restreint.

Indiquant que la question du seuil de 250 salariés avait fait l'objet d'un très large débat, il a avancé l'hypothèse que les effets d'aubaine puissent aller croissant avec la taille de l'entreprise.

S'agissant d'un éventuel accompagnement et de la validation des acquis, il a fait part de son souhait que les partenaires sociaux se mettent d'accord pour proposer des formules adéquates.

Rappelant que le dispositif ne visait pas les mêmes publics que ceux s'orientant vers l'alternance, il a estimé que la mesure permettrait une première insertion, pouvant déboucher par la suite sur une formation en alternance.

M. Guy Fischer s'est interrogé sur le financement du dispositif.

M. Alain Gournac a fait part de sa satisfaction que les associations soient concernées par la mesure et de son attachement à l'accompagnement et à la validation des acquis. Il s'est interrogé sur la possibilité, pour les jeunes, de bénéficier de la mutuelle de l'entreprise. Il a, en outre, souhaité que soient étudiées des passerelles entre le nouveau dispositif et le programme « nouveaux services-emplois-jeunes ».

M. Bernard Seillier s'est félicité du calibrage de la mesure, qu'il s'agisse des publics visés ou de la priorité accordée à la validation. Il a jugé nécessaire de renforcer la portée de la mesure en sensibilisant au mieux les chefs d'entreprises et, le cas échéant, en mobilisant les moyens d'accompagnement des missions locales et de certaines agences locales pour l'emploi.

M. Gilbert Chabroux a insisté sur la nécessité d'examiner le projet de loi avec la plus grande attention, compte tenu des difficultés persistantes d'insertion des jeunes, malgré les bons résultats du précédent Gouvernement en la matière. Il a souligné l'importance du programme « nouveaux services-emplois-jeunes » et s'est interrogé sur son avenir. Relevant les aspects positifs du projet de loi, et notamment la durée indéterminée du contrat et son ciblage sur les petites et moyennes entreprises (PME), il a, en revanche, fait part de ses réserves sur deux points : l'articulation avec les dispositifs existants (programme trajet d'accès à l'emploi (TRACE), apprentissage et formation en lycée professionnel) et l'absence de formation.

Mme Janine Rozier s'est interrogée sur les possibilités, pour les jeunes les plus en difficulté, très éloignés du monde du travail, d'entrer dans le dispositif.

M. Roland Muzeau , après avoir regretté l'absence de concertation avec les partenaires sociaux, a déclaré ne pas partager l'analyse du Gouvernement, qui fait du coût du travail non qualifié la cause principale du chômage des jeunes. Il a regretté que le projet de loi ne prévoie pas de tutorat et a considéré que la possibilité de temps partiel était une erreur.

M. Jean Chérioux s'est demandé s'il ne serait pas souhaitable d'ouvrir la mesure de soutien aux entreprises de plus de 250 salariés à condition de prévoir des contreparties spécifiques, notamment en matière de formation et de tutorat, dans le cadre d'un accord de branche.

M. Paul Blanc a souligné l'intérêt qu'il y aurait à ouvrir la mesure aux entreprises à caractère saisonnier et aux travailleurs handicapés reconnus comme tel par les commissions techniques d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP). Il s'est également interrogé sur les raisons des refus rencontrés actuellement par les collectivités locales pour passer de nouvelles conventions de recrutement d'emplois-jeunes avec l'Etat.

Mme Nelly Olin , après avoir souligné les mérites du dispositif, s'est inquiétée de l'avenir des emplois-jeunes dans les associations et des difficultés rencontrées par les missions locales, difficultés notamment liées à la complexité des dispositifs d'insertion et à l'enchevêtrement des financements croisés.

M. Jean-Pierre Godefroy a critiqué la possibilité ouverte de conclure des contrats à temps partiel. Il s'est interrogé sur les conditions de cumul de la mesure avec les aides des régions et sur les types d'entreprise de pêche maritime susceptible d'en bénéficier.

Mme Françoise Henneron s'est interrogée sur l'opportunité d'ouvrir la mesure aux jeunes de 22 à 24 ans.

M. Jean-Louis Lorrain a souhaité la mise en place d'un accompagnement spécifique des chefs d'entreprises recrutant par ce dispositif les jeunes les plus en difficulté.

M. Alain Vasselle a souhaité des précisions sur le financement de la mesure et s'est demandé s'il n'était pas souhaitable d'offrir, dans ce cadre, des portes de sortie aux emplois-jeunes de plus de 22 ans.

En réponse aux différents intervenants, M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité , a précisé que la mesure serait financée en totalité par le budget de l'Etat : en 2002 par des redéploiements de crédits et, par la suite, par l'ouverture d'une ligne budgétaire spécifique. Elle n'aura donc aucun impact sur les comptes de la sécurité sociale ou de l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC).

S'agissant de l'accès des jeunes à la formation, il a rappelé que le texte prévoyait explicitement une possibilité de formation dans le cadre du plan de formation de l'entreprise. Il s'est déclaré favorable à une incitation à la formation, mais s'est refusé à en faire une condition ouvrant droit au bénéfice du soutien de l'Etat. Il s'est également déclaré prêt à favoriser au mieux le tutorat.

Il a insisté, à nouveau, sur l'importance de l'obligation d'un recours au contrat à durée indéterminée (CDI) et a considéré qu'elle inciterait les employeurs à former et à accompagner les jeunes dans les meilleures conditions. Il a souligné, à cet égard, que le dispositif proposé ne saurait être qualifié de « contrat-jeune », car il était un contrat de droit commun.

Revenant sur l'articulation de la mesure avec les dispositifs déjà existants, il a estimé que le projet de loi ne pouvait pas constituer, à lui seul, la « solution miracle » pour en finir avec le chômage des jeunes. Il a jugé que l'addition et la complémentarité des dispositifs devaient permettre de régler, dans la durée, une grande part du problème. Il a alors précisé qu'il ne comptait pas revenir sur les dispositifs existants, mais qu'il préférait les encourager plus encore, comme l'apprentissage et l'alternance, ou les compléter pour accroître leur efficacité. A cet égard, il a considéré que le programme TRACE devait se concentrer sur les jeunes les plus en difficulté et qu'il serait dans l'avenir prolongé par le contrat d'insertion dans la vie sociale (CIVIS) annoncé par le président de la République et le Premier ministre.

Abordant les emplois-jeunes, il a indiqué que le présent dispositif ne se substituait pas à ce programme. Mais soulignant les limites du programme « nouveaux services-emplois jeunes », notamment en matière de coût budgétaire, de ciblage des publics et d'incertitude quant à l'insertion, il a fait part de son souci d'organiser la sortie progressive de ce dispositif. Il a toutefois jugé nécessaire de maintenir un soutien spécifique pour une partie des emplois-jeunes du secteur éducatif et pour ceux du secteur associatif. Il a indiqué, en outre, que les quotas budgétaires pour 2002 étant, d'ores et déjà, atteints pour ce programme, il avait donné des instructions à ses services à effet de ne plus conclure de nouvelles conventions.

S'agissant des jeunes les plus en difficulté, il a estimé, notamment au regard d'expériences locales et des réactions favorables de certaines fédérations professionnelles, que les entreprises « joueraient le jeu ». Il a plus globalement considéré que le succès du dispositif reposait en définitive sur sa simplicité, sur l'implication des entreprises et sur l'information des employeurs.

Il a rappelé que la concertation avec les partenaires sociaux avait bien eu lieu, même si elle avait dû être accélérée compte tenu des délais d'examen du texte. Il a, en outre, indiqué que plusieurs de leurs observations avaient été intégrées dans le texte soumis au Parlement.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a précisé que des études récentes avaient montré que les allégements de charges créaient des emplois et que les autres pays européens connaissaient un coût du travail moins élevé à l'embauche.

Il a estimé que la question du temps partiel pourrait être utilement évoquée lors des débats parlementaires.

S'agissant des publics particuliers, il a indiqué que les travailleurs saisonniers ne pourraient pas bénéficier de la mesure, car leur contrat n'est pas à durée indéterminée et que les travailleurs handicapés seraient éligibles s'ils répondaient aux conditions d'âge et de qualification.

S'agissant des entreprises de pêche maritime, il a précisé que la mesure concernait à la fois les armateurs, les coopératives et les patrons de pêche.

A propos d'un éventuel cumul avec des aides des collectivités locales, il a fait part de ses réserves à un encadrement, par l'Etat, de celles-ci, estimant qu'il revenait aux collectivités locales de redimensionner, le cas échéant, leur intervention.

M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, a indiqué que le projet de loi ne visait pas les jeunes de 22 à 24 ans, car cette tranche d'âge recourt plutôt aux contrats en alternance.

Il a enfin jugé qu'un accompagnement spécifique des employeurs pouvait se révéler utile dans certains bassins d'emplois.

II. EXAMEN DU RAPPORT

Réunie le mardi 16 juillet 2002 sous la présidence de M. Nicolas About, président , la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Louis Souvet sur le projet de loi n° 351 (2001-2002) portant création d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise .

M. Louis Souvet, rapporteur, a présenté les grandes lignes de son rapport (cf. exposé général du présent rapport).

M. Gilbert Chabroux s'est déclaré en accord avec le constat dressé par le Gouvernement et le rapporteur sur la gravité du chômage des jeunes. Il a toutefois souligné que le taux de chômage des jeunes avait fortement baissé entre 1997 et 2001 grâce notamment au rôle très important des emplois-jeunes, mais aussi du programme trajet d'accès à l'emploi (TRACE). Revenant sur le projet de loi, il a souligné qu'il incluait des propositions intéressantes, en particulier la nécessité d'une embauche en contrat à durée indéterminée (CDI). Mais il s'est interrogé sur les contreparties de tels allégements de charges et a déploré l'absence de contenu en formation du dispositif.

Mme Valérie Letard a observé que le projet de loi visait des jeunes en très grande difficulté qui exigeaient le plus souvent un tutorat, mais aussi une resocialisation préalable. Considérant que l'embauche de tels jeunes représentait une charge lourde pour les entreprises, elle a souhaité que le projet de loi prévoie l'existence d'un accompagnement social de ces jeunes, le cas échéant par des structures professionnalisées comme les missions locales.

M. Roland Muzeau a observé que le projet de loi allait conduire à une déréglementation accélérée du droit du travail et a regretté que la commission soit saisie de ce texte en urgence et n'ait pu organiser une consultation approfondie des partenaires sociaux. S'agissant des propositions du rapporteur, il a considéré que la neutralisation du seuil d'effectifs dans l'entreprise malmenait gravement le code du travail et que l'extension de la mesure à l'ensemble des entreprises allait entraîner des effets d'aubaine massifs. Il a estimé que les jeunes recrutés dans le cadre de ce dispositif devaient se voir reconnaître un accès à la formation identique au droit commun.

M. Jean-Pierre Fourcade a considéré que l'importance du chômage des jeunes en France s'expliquait avant tout par l'inadaptation de notre système éducatif et par le poids trop élevé des charges sociales pesant sur le travail non qualifié. Il a estimé que le projet de loi apportait des éléments de réponse. Il a notamment souligné trois éléments forts de ce texte : l'embauche en CDI, synonyme de la fin de la précarité, le soutien sous une forme de remboursement des charges, garantie de la simplicité, et la confiance faite aux entreprises en matière de formation. Il a à cet égard considéré qu'introduire une obligation de formation aurait sans doute entravé le développement du dispositif. Il a également souligné que la proposition du rapporteur de neutraliser les effets de seuil d'effectifs était tout particulièrement raisonnable et relevait plus du bon sens que d'une quelconque déréglementation du droit du travail. Il s'est interrogé sur la possibilité de renvoyer à un décret le soin de fixer le champ des entreprises concernées par le dispositif, observant que le texte du Gouvernement introduisait un traitement différent entre entreprises selon qu'elles sont organisées ou non en établissements. Il a enfin demandé des précisions sur le montant de l'aide pour les salaires supérieurs à 1,3 fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC).

M. Alain Gournac s'est en particulier félicité de trois aspects du projet de loi : son application dans le secteur privé à la différence des emplois-jeunes, son extension aux associations et l'exigence d'une embauche en CDI. Il a déclaré partager la proposition du rapporteur d'étendre la mesure à toutes les entreprises quel que soit leur effectif, ainsi que son souci d'encadrer le temps partiel, de développer le tutorat et de favoriser l'accès au bilan de compétences. S'agissant de la formation, il a jugé souhaitable de renvoyer aux branches professionnelles le soin de déterminer ses modalités. Il a également insisté sur la nécessité d'un droit à expérimentation et a souligné l'importance d'une évaluation régulière du dispositif.

M. Claude Domeizel a regretté l'absence de dialogue préalable avec les partenaires sociaux pour la préparation du projet de loi. Observant que le chômage concernait également des jeunes de plus de 22 ans avec le baccalauréat, il s'est interrogé sur le champ des jeunes visés par le dispositif et s'est demandé s'il n'aurait pas été souhaitable de l'étendre. Il a fait part de son scepticisme sur l'impact du projet de loi, estimant que les entreprises n'embauchaient pas pour bénéficier d'une aide mais pour répondre à une demande.

M. André Lardeux a considéré que le projet de loi constituait une chance pour les jeunes et leur famille. Il a souligné l'inanité des critiques fondées sur l'effet d'aubaine soulignant qu'au contraire les entreprises embauchant des jeunes non qualifiés faisaient preuve d'esprit civique. Il a observé que, certes, le projet de loi ne prévoyait pas de formation obligatoire mais que, pour les jeunes les plus éloignés de l'emploi, le travail était en lui-même déjà un élément formateur. Il a également souligné que la lourdeur des charges pénalisait fortement le développement de l'emploi des non qualifiés. Il s'est enfin interrogé sur le risque éventuel d'une réorientation des projets scolaires des jeunes au regard des dispositions de la loi et sur la situation des jeunes titulaires de baccalauréats ne bénéficiant d'aucune perspective en matière d'emploi.

M. Bernard Cazeau a regretté que le projet de loi autorise l'embauche à temps partiel et se caractérise avant tout par la faiblesse de son volet de formation. Il s'est interrogé sur les effets d'une éventuelle extension de la mesure à toutes les entreprises.

M. Alain Vasselle , après avoir déclaré partager l'analyse du rapporteur, s'est demandé si le présent dispositif ne pourrait pas constituer une voie de sortie honorable pour les emplois-jeunes sans perspective professionnelle. Il a également considéré que, pour les jeunes les plus en difficulté, le travail constituait la première des formations. S'agissant d'une éventuelle suppression du seuil de 250 salariés, il s'est interrogé sur ses conséquences en termes d'effet d'aubaine et sur son coût budgétaire. Il s'est alors demandé s'il n'était pas souhaitable de moduler le niveau de l'aide selon la taille de l'entreprise.

M. Jean Chérioux a estimé que le projet de loi proposait une mesure simple et réaliste pour répondre à un problème grave. Il a considéré qu'elle ne serait sans doute pas à même de régler entièrement le problème mais qu'elle pourrait utilement y contribuer et qu'il fallait pour cela faire confiance aux entreprises mais aussi aux jeunes.

Mme Gisèle Printz a souhaité que les jeunes en situation d'échec scolaire ne soient pas stigmatisés.

M. Guy Fischer a observé que le projet de loi visait prioritairement les jeunes les plus en difficulté venant souvent des quartiers populaires. Il a considéré qu'il était nécessaire de prévenir très en amont l'apparition des difficultés en offrant plus de moyens au système éducatif.

Mme Annick Bocandé a estimé que le débat sur la formation nécessitait un changement de regard sur la formation professionnelle. Elle a ainsi observé que la formation n'était pas le seul capital du salarié mais qu'il s'agissait aussi de l'intérêt de l'entreprise. Elle a alors considéré que les entreprises qui embaucheraient des jeunes grâce au présent dispositif investiraient nécessairement dans la formation.

M. Gérard Roujas a fait part de sa conviction que le seuil de 250 salariés prévu par le projet de loi était déjà trop élevé et se traduirait par d'importants effets d'aubaine.

M. Bernard Seillier a déclaré partager le souci du rapporteur d'éviter tout effet de seuil d'effectifs. Mais il s'est interrogé sur la possibilité d'étendre la proposition du rapporteur à tout nouveau salarié embauché et non pas seulement aux jeunes visés par le présent dispositif afin de ne pas introduire de traitement particulier pour ces jeunes.

M. Nicolas About, président , a estimé que le principal effet d'aubaine de ce projet de loi concernait en définitive le jeune qui, grâce à lui, trouverait un emploi stable, sous la forme d'un CDI. Il a considéré que le projet de loi n'entraînerait pas d'effet d'aubaine pour deux raisons : le montant modéré du soutien de l'Etat et l'implication nécessaire de l'entreprise dans l'embauche et le suivi des jeunes visés par le dispositif. Il a enfin jugé que les entreprises formeront ces jeunes puisqu'il en ira de leur intérêt.

En réponse aux différents intervenants, M. Louis Souvet, rapporteur, a tout d'abord rappelé que l'objet du projet de loi n'était pas l'entreprise mais le jeune. Il a considéré à cet égard que le texte apportait de très solides éléments d'insertion. Il a notamment souligné toute l'importance de l'embauche en CDI. Il a également estimé que les effets d'aubaine devraient être minimes compte tenu du nécessaire effort d'intégration que devront produire les employeurs pour accueillir les jeunes.

Revenant sur les autres dispositifs d'insertion professionnelle des jeunes, il a indiqué que ceux-ci avaient certes leurs mérites mais présentaient aussi de graves insuffisances : les emplois-jeunes n'ont eu aucun contenu en formation et leur pérennisation est très problématique, le programme TRACE ne concerne qu'un nombre réduit de jeunes et environ un tiers des jeunes qui sortent de ce programme se retrouvent au chômage.

Il a précisé que ses propositions visaient avant tout à renforcer la portée du projet de loi. Il a ainsi insisté sur la nécessité d'étendre le champ des employeurs concernés, considérant qu'une telle extension était réaliste compte tenu justement de la faiblesse des effets d'aubaine. Il a également souligné la nécessité de neutraliser les effets de seuil pour permettre l'appropriation de la mesure par les petites et moyennes entreprises (PME).

Il a également observé que ses propositions visaient aussi à favoriser l'insertion du jeune, rappelant qu'il proposait d'encadrer le temps partiel mais aussi d'organiser, par le dialogue social, ses possibilités d'accès à la formation.

Il a enfin constaté que les suggestions formulées par ses collègues correspondaient largement à l'esprit de ses propositions.

Puis la commission a abordé l'examen des articles.

A l'article premier (institution d'un dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprise), elle a adopté, sur proposition de M. Louis Souvet, rapporteur , outre deux amendements rédactionnels, dix-huit amendements :

- à l'article L. 322-4-6 du code du travail (public visé et nature du soutien), un amendement précisant dans le code du travail l'objet du dispositif, un amendement modifiant l'appellation de l'aide en substituant le terme « soutien » à celui d'« exonération », un amendement encadrant les possibilités de recours au temps partiel et trois amendements rédactionnels ou de précision ;

- à l'article L. 322-4-6-1 du code du travail (employeurs concernés et durée du soutien), un amendement prévoyant explicitement la possibilité d'une dégressivité du soutien dans le temps, un amendement étendant la mesure à tous les employeurs du secteur privé, hors particuliers, quel que soit le nombre de salariés, un amendement permettant à l'employeur de recruter dans le cadre du dispositif les intérimaires qui travaillaient chez lui à l'échéance de leur contrat et quatre amendements rédactionnels ou de précision ;

- à l'article L. 322-4-6-2 du code du travail (conditions particulières de rupture du contrat), un amendement de précision ;

- à l'article L. 322-4-6-3 du code du travail (gestion du dispositif), un amendement rédactionnel ;

- un amendement insérant un article L. 322-4-6-4 nouveau dans le code du travail tendant à renvoyer à un accord collectif de branche le soin de préciser les modalités dans lesquelles les jeunes bénéficient d'un accompagnement et du bilan de compétences ;

- un amendement insérant un article L. 322-4-6-5 nouveau dans le code du travail visant à neutraliser les effets de seuils d'effectifs en permettant de ne pas comptabiliser, pendant deux ans, le jeune pour le calcul de l'effectif de l'entreprise ;

- un amendement insérant un article L. 322-4-6-6 nouveau dans le code du travail visant à prendre en compte la spécificité des professions affiliées à une caisse de congés payés.

A l'article 2 (validation des acquis de l'expérience et formation professionnelle), la commission a adopté, à l'initiative de son rapporteur, un amendement de précision et un amendement renvoyant à un accord de branche le soin de définir les conditions d'accès à la formation des salariés visés par le dispositif prévu à l'article premier.

La commission a alors adopté l'ensemble du projet de loi ainsi amendé.

ANNEXE
FICHE D'IMPACT

I. IMPACT JURIDIQUE ET ADMINISTRATIF

1. OBJECTIFS DE LA DISPOSITION PROPOSÉE ET AVANTAGES ATTENDUS

Mettre en place une mesure d'allégement du coût du travail permettant aux jeunes peu ou pas diplômés d'accéder à l'emploi dans l'entreprise et d'acquérir une première expérience professionnelle durable.

2. DISPOSITIF JURIDIQUE

Loi : création d'une exonération forfaitaire et dégressive, sous forme de prime, dont peuvent bénéficier les employeurs qui embauchent des jeunes dans la cible.

Décret d'application : définition des conditions d'attribution, le montant et les modalités du versement. Il précise également les engagements de l'employeur et les contrôles et sanctions encourues en cas de manoeuvres frauduleuses.

Circulaire : Procédure d'octroi, application des conditions d'attribution et de retrait de l'exonération forfaitaire.

3. IMPACT EN TERMES DE FORMALITÉS ADMINISTRATIVES

Pour l'employeur : demande sous forme d'une déclaration sur l'honneur à partir d'un formulaire pré-établi.

Pour le jeune : signature du formulaire de demande, attestant des renseignements le concernant : son identité, son âge et son niveau de formation.

Un exemplaire de ce formulaire est envoyé à l'organisme gestionnaire du dispositif (ASSEDIC).

L'octroi de la prime est subordonné à la concordance des informations déclarées avec le champ d'application de l'aide. L'employeur doit être à jour des versements de ses cotisations et contributions sociales.

Un deuxième exemplaire de ce formulaire est envoyé à la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, aux fins de vérification sur les éventuels licenciements récents effectués par l'employeur demandeur.

L'organisme gestionnaire prend la décision d'octroi de l'exonération forfaitaire pour trois années.

II. IMPACT SOCIAL, ÉCONOMIQUE ET BUDGÉTAIRE

1. IMPACT SOCIAL OU SUR D'AUTRES INTÉRÊTS GÉNÉRAUX

Il s'agit de mettre en place un dispositif particulièrement simple dont le support est un contrat de travail de droit commun qui permet d'octroi d'une prime dès lors que la personne embauchée correspond aux critères définis : à savoir les jeunes de 16 à 22 ans dont le niveau de formation est inférieur au baccalauréat et qui souhaitent entrer dans la vie active rapidement.

Les employeurs visés sont ceux du secteur privé, champ de l'UNEDIC (L. 351-4 du code du travail) à l'exception des particuliers.

La prime est calculée par référence aux cotisations et contributions sociales patronales de toutes natures, dont le paiement est exigé à raison du versement du salaire du jeune, dans la limite du SMIC. Cette prime est cumulable avec les exonérations de charges sociales sur les bas salaires, et les exonérations attribuées dans le cadre des aménagements pour la réduction du temps de travail.

2. EFFETS MICRO ET MACRO-ÉCONOMIQUES, NOTAMMENT SUR L'EMPLOI

La création de l'exonération forfaitaire facilite l'accès à un premier emploi et une expérience professionnelle des jeunes sortant de formation initiale et sans qualification professionnelle. Elle permet de réduire la durée du temps de latence entre la sortie du système éducatif et l'insertion dans la vie active. Elle diminue le coût du travail qui pèse sur l'embauche par les entreprises des jeunes salariés sans qualification.

3. EFFETS SUR LES BUDGETS PUBLICS

La prime correspondant à l'exonération de l'ensemble des charges sociales patronales coûterait en 2003 (1 ère année) 120 M € et en 2005 (coût maximum) 500 M €, correspondant à 220 000 jeunes environ.

BILAN COÛTS - AVANTAGES :

Diminution sensible du taux de chômage des jeunes, pour le ramener à la moyenne nationale.

Augmentation du niveau de qualification des jeunes pouvant déboucher sur une validation de leurs acquis professionnels.

TABLEAU COMPARATIF

* 1 Au sens du BIT

* 2 « Génération 98 : à qui a profité l'embellie économique ? », Bref n° 181, décembre 2001.

* 3 Enquête INSEE - DARES, janvier 2002.

* 4 Les premiers résultats sont publiés dans INSEE Première, N° 857, juillet 2002.

* 5 Comme l'a excellemment souligné notre collègue Alain Gournac, au nom de votre commission, dans son rapport d'information d'octobre 2000 « Bilan à mi-parcours des emplois-jeunes : pour une sortie en bon ordre » (Sénat, n° 25, 2000-2001).

* 6 Premières informations et premières synthèses, juillet 2002, n° 28-2.

* 7 Allégement « maximum » accordé dans le cadre du barème publié au J.O.

* 8 B. Cupon et R. Desplatz - Une nouvelle évaluation des effets des allégements de charges sociales sur les bas salaires -INSEE- Economie et statistiques n° 348, 2001-8.

* 9 A la différence par exemple de « l'exo-jeunes » de 1991 pour laquelle l'aide, d'ailleurs dégressive, ne durait que 18 mois.

* 10 De crainte de perdre le bénéfice des exonérations de charges accordées en dessous d'un certain plafond de salaires, certains employeurs peuvent hésiter à revaloriser les rémunérations des salariés concernés. Dès lors, ces derniers sont condamnés au « gel » de leurs salaires et deviennent, ainsi, prisonniers de la « trappe à bas salaires ».

* 11 Voir par exemple ses propositions à l'occasion de l'examen de la loi quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.

* 12 Cf enquête de la DARES dans Premières informations et premières synthèses, juin 2002, n° 23.2

* 13 On songe notamment aux seuils d'effectifs relatifs à la mise en place des différentes institutions représentatives du personnel ou à l'application de la réduction du temps de travail.

* 14 Votre rapporteur renvoie sur ce point à l'excellent avis budgétaire de notre collègue Annick Bocandé sur les crédits de la formation professionnelle (n° 91, tome V, 2001-2002).

* 15 Cet article était relatif à l'exonération spécifique de cotisations sociales pour les contrats initiative-emploi (CIE).

* 16 De un à trois ans pour le contrat d'apprentissage, de six mois à deux ans pour le contrat de qualification.

* 17 De 25 à 78 % du SMIC pour le contrat d'apprentissage, de 30 à 75 % du SMIC pour le contrat de qualification.

* 18 Les branches professionnelles ne délivrent qu'environ 1 % de l'ensemble des certifications délivrées chaque année.

* 19 Il existe actuellement environ de 300 à 400 CQP, mais ceux-ci sont concentrés dans quelques branches et ne sont généralement pas reconnus dans les autres branches.

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