Rapport n° 372 (2001-2002) de M. Philippe MARINI , fait au nom de la commission des finances, déposé le 24 juillet 2002

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N° 372

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2001-2002

Annexe au procès-verbal de la séance du 24 juillet 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances rectificative pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Philippe MARINI,

Sénateur,

Rapporteur général.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Roger Karoutchi, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, René Trégouët.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 29 , 56 , 57 et T.A. 3

Sénat : 367 (2001-2002)

Lois de finances rectificatives.

INTRODUCTION

Le présent projet de loi de finances rectificative pour 2002 comporte un double objet.

Il permet, en premier lieu, de constater la très nette dégradation des comptes de l'Etat qui avait été dénoncée par votre commission des finances et fut mise en évidence, tant sur le fond qu'au plan méthodologique, par les conclusions de l'audit des finances publiques mené par MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse. La responsabilité en incombe au précédent gouvernement qui avait sur-estimé la croissance, gonflé artificiellement les recettes tout en sous-évaluant un certain nombre de dépenses, notamment sociales. Au total, la dérive est de plus de 15 milliards d'euros compte tenu d'une surévaluation de recettes fiscales et non fiscales, à hauteur de 8,64 milliards d'euros, et de la sous-estimation des dépenses du budget général, pour 4,96 milliards d'euros.

Après les errements d'un budget initial pour 2002, qualifié en son temps de « grande illusion » 1 ( * ) , le gouvernement procède ici à une courageuse « opération-vérité » des comptes publics.

En second lieu, ce collectif permet de baisser l'impôt sur le revenu de 5 %. Cette mesure simple, dont bénéficieront tous les contribuables, montre qu'une autre politique économique et financière est possible et que les prélèvements excessifs qui pèsent sur les Français seront effectivement baissés conformément aux engagements du Président de la République.

Mais ce texte ne constitue qu'une première étape dans la remise en forme et sur pieds des finances publiques françaises.

Le gouvernement, utilement appuyé par le Parlement, devra en effet dans les mois à venir s'attaquer à deux chantiers essentiels pour l'avenir de notre pays. D'une part clarifier des comptes sociaux devenus d'une infinie complexité et qui constituent un « dédale inextricable », à l'image du FOREC chargé de « financer » les 35 heures. A l'évidence une meilleure coordination entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale s'impose et la « nouvelle constitution budgétaire » du 1 er août 2001 en constituera un puissant et indispensable vecteur. D'autre part, il lui appartiendra d'entamer, enfin, la réforme de l'Etat afin de le rendre plus mobilisateur pour ses agents, moins gourmand dans l'intérêt des contribuables et surtout plus efficace pour les usagers. Il est clair que l'un des leviers principaux des redéploiements à opérer consistera à tirer parti du grand nombre de fonctionnaires devant partir en retraite dans les années à venir, pour n'en remplacer qu'une partie et pour assurer une meilleure adéquation des qualifications aux missions de l'administration.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

CHAPITRE PREMIER :

LE CADRE MACRO-ÉCONOMIQUE ET JURIDIQUE

I. UNE DIMINUTION DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE EN 2002 ET UN REBOND EN 2003 ?

Il existe actuellement un consensus selon lequel la croissance du PIB français en volume serait de l'ordre de 1,4 % en 2002 et 2,8 % en 2003 , comme l'indique le tableau ci-après .

Principales prévisions de croissance du PIB (en volume) de la France en 2002 et 2003

Prévision de croissance

Organisme

2002

2003

Gouvernement

1,3*

-

Pour mémoire

Loi de finances initiale pour 2002

2,5 (2,25/2,75)

-

Prévisions du gouvernement au mois de mars 2002

1,5 (1,4/1,6)

-

Instituts

Insee

1,4

-

Conseil d'analyse économique

1,5

2,7

B.I.P.E.

1,7

2,7

Rexecode

1,3

2,4

O.F.C.E.

1,5

2,9

Caisse des Dépôts

1,0

2,1

Goldman Sachs

1,3

2,4

Organismes internationaux

OCDE

1,4

3

FMI

1,4

3

Commission européenne

1,6

2,8

Consensus Forecasts

1,4

2,8

* Selon le rapport sur l'évolution économique et budgétaire annexé au présent projet de loi de finances rectificative, les hypothèses économiques retenues pour l'élaboration de ce dernier sont celles qui l'ont été par l'audit de la situation des finances publiques.

Ainsi, la croissance du PIB, après avoir été en 2001 et 2002 inférieure à son rythme tendanciel de ces dernières années, serait de nouveau égale à celui-ci en 2003, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB (en volume) de la France

(en %)

Sources : Insee, projet de loi de finances rectificative (2002),
Consensus Forecasts (2003)

A. UNE DÉGRADATION DE L'ENVIRONNEMENT INTERNATIONAL DEPUIS LA FIN DE L'ANNÉE 2000

1. L'augmentation du prix du pétrole

Tout d'abord, le prix du pétrole a atteint en septembre de l'année 2000 son maximum depuis 1991, comme l'indique le graphique ci-après :

Cours du pétrole

(prix du baril de Brent en dollars)

Source : FERI

2. Le ralentissement de l'économie américaine

Ensuite, l'économie américaine a connu un net ralentissement au cours de l'année 2000 et la reprise observée au début de l'année 2001 a été suivie d'une chute brutale de la croissance, qui a été nulle au dernier trimestre de l'année 2001, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB (en volume) aux Etats-Unis

(en % , par rapport au trimestre précédent)

Source : Bureau of Economic Analysis

3. La décélération de l'économie de la zone euro

Enfin, en partie à cause de ces deux phénomènes, la croissance de la zone euro a connu un ralentissement marqué au cours de l'année 2000, avant de devenir négative au quatrième trimestre de l'année 2001, comme l'indique le graphique ci-après.

Croissance du PIB (en volume) dans la zone euro

(en %, par rapport au trimestre précédent)

Source : Eurostat

En effet, l'atterrissage de l'économie des Etats-Unis a surpris par son ampleur et sa rapidité. Par ailleurs, une inflation plus forte qu'anticipée au sein de la zone euro a érodé le pouvoir d'achat des ménages, tout en réduisant la probabilité d'un assouplissement de la politique monétaire.

B. UN RALENTISSEMENT TRÈS SIGNIFICATIF DE L'ÉCONOMIE FRANÇAISE DEPUIS LE DÉBUT DE L'ANNÉE 2001

En conséquence de ces phénomènes, la croissance trimestrielle de l'économie française a ralenti fortement dès le début de l'année 2001, soit dès avant les dramatiques événements du 11 septembre, la reprise observée au premier trimestre 2002 étant encore timide, comme le montre le graphique ci-après.

Croissance du PIB (en volume) en France

(en %, par rapport au trimestre précédent)

Source : Insee

1. La décélération de l'économie française en 2001

La croissance trimestrielle de l'économie française a globalement diminué en 2001, passant de 1,3 % au dernier trimestre de l'année 2000 à - 0,4 % au dernier trimestre de l'année 2001.

En moyennes annuelles, la croissance a été de 4,2 % en l'an 2000 2 ( * ) - le taux le plus élevé observé depuis 1989 -, et de seulement 1,8 % en 2001.

Ce ralentissement s'explique par une dégradation du contexte international plus marquée que prévu. Celle-ci a notamment résulté en un net ralentissement de l'investissement.

2. Des perspectives de reprise qui restent à confirmer

a) Une timide accélération au début de l'année 2002

L'accélération observée au premier trimestre de l'année 2002, avec une croissance de 0,4 %, demeure modérée. En effet, la croissance n'est pas supérieure à ce qu'elle était au troisième trimestre de l'année 2001.

Par ailleurs, la demande intérieure demeure peu dynamique, comme l'indique le graphique ci-après.

Investissement et consommation privée en France

(croissance trimestrielle, en %)

Source : Insee

Ainsi, alors que les investissements des entreprises et la consommation des ménages avaient cru à un rythme trimestriel de l'ordre de respectivement 3 % et 0,5 % en l'an 2000, au premier trimestre de l'année 2002, ces taux ont été de seulement 0,8 % et 0,2 %. Jusqu'au début de l'année 2001 l'investissement des entreprises était particulièrement faible, et on peut s'interroger sur la solidité de sa reprise au premier trimestre de l'année 2002.

b) Un consensus sur une croissance de l'ordre de 1,4 % en 2002 et 2,8 % en 2003
(1) Une reprise technique de l'investissement en 2002 ?

Le consensus selon lequel la croissance serait de l'ordre de 1,4 % 3 ( * ) en 2002 repose sur l'anticipation d'une reprise de la consommation des ménages et de l'investissement des entreprises.

La reprise de la consommation des ménages proviendrait du reflux de l'inflation et de nouvelles baisses d'impôt. A cet égard, la réduction de l'impôt sur le revenu peut sembler essentielle pour la consolidation de la reprise. Cela montre qu'une autre politique est possible : les prélèvements qui pèsent sur les Français seront baissés, conformément aux engagements du président de la République.

La reprise de l'investissement en 2002 serait quant à elle purement technique : les entreprises françaises, ayant beaucoup déstocké au cours de l'année 2001, seraient amenées à reconstituer leurs stocks dans le courant de l'année 2002.

(2) Un investissement des entreprises élevé en 2003 ?

En 2003, la croissance serait de l'ordre de 2,8 % 4 ( * ) , du fait d'un fort investissement des entreprises. Ainsi, l'OFCE 5 ( * ) table sur un taux d'investissement qui retrouverait, fin 2003, le niveau de 1999. Les besoins d'équipement des entreprises françaises en nouvelles technologies plaident pour une reprise de l'investissement.

c) De fortes incertitudes

Le consensus autour d'une croissance de l'ordre de 1,4 % en 2002 et 2,8 % en 2003 semble aujourd'hui devoir être remis en cause par la prise en considération de l'existence de fortes incertitudes.

(1) Des incertitudes relatives à l'évolution de la consommation des ménages

Ces incertitudes concernent tout d'abord la consommation des ménages (qui, si elle demeurait peu dynamique, serait défavorable à l'investissement).

Deux facteurs peuvent sembler particulièrement inquiétants :

- la tendance générale de la consommation des ménages, on l'a vu peu dynamique au premier trimestre 2002 ;

- une croissance moins riche en emplois, découlant d'une recherche par les entreprises d'une productivité plus élevée.

(2) Des incertitudes relatives à l'évolution de l'investissement

Cependant, les incertitudes généralement avancées concernent l'investissement.

La dépréciation des actifs boursiers (représentée par le graphique ci-après) peut sembler inquiétante. Les entreprises risquent de réduire leurs investissements à cause d'une diminution du « Q de Tobin » 6 ( * ) . En outre, la chute des cours fragilise l'industrie financière partout dans le monde, favorisant la diffusion de réactions en chaîne dans l'économie réelle. Nul ne peut prévoir aujourd'hui l'amplitude de ce risque « systémique ». Les principales banques vont être plus restrictives dans leurs décisions de crédit et d'investissement en fonds propres, d'autant plus qu'elles doivent se conformer à des normes prudentielles plus rigoureuses. La sphère financière, qui ne permet plus le financement des opérations sur le marché (combien d'introductions ou fusions en stand-by ?), exerce un effet fortement dépressif sur l'économie réelle. La situation est d'autant plus inquiétante que l'effet d'entraînement à la baisse des marchés boursiers pourrait être durable, en raison notamment du mouvement d'amortissement des survaleurs (« goodwills »), de l'existence d'une profonde crise de confiance à l'égard de l'information financière diffusée par les principales sociétés, de la déstabilisation des secteurs de la banque et de l'assurance, et, plus techniquement, des outils informatiques de plus en plus sophistiqués utilisés par les opérateurs et qui viennent amplifier systématiquement les tendances du marché.

Evolution des principaux indices boursiers

(base 100 en janvier 1989)

Source : FERI

L'impact de ce phénomène pourrait être aggravé par le fait que la situation financière des entreprises n'est pas optimale. La dégradation du taux d'autofinancement des entreprises, passé de 100 à 70 % depuis 1998, pourrait constituer un frein à une reprise de l'investissement aussi vigoureuse qu'elle l'a été en 1997. La dégradation du taux de marge des entreprises françaises, et leur niveau d'endettement élevé (leur taux d'endettement, mesuré par le rapport entre la dette rémunérée et la valeur ajoutée, avoisine aujourd'hui 140 %) risquent également de peser sur la reprise de l'investissement.

L'investissement des entreprises françaises pourrait, de plus, subir les conséquences d'une croissance de l'économie des Etats-Unis moins forte que prévu (3 % en 2002 selon le gouvernement et 3,5 % en 2003 selon Consensus Forecasts ) 7 ( * ) . En effet, la reprise aux Etats-Unis est encore timide. Ainsi, la croissance y a été de seulement 0,3 % au premier trimestre de l'année 2002. En particulier, le faible taux d'utilisation des capacités de production aux Etats-Unis contribue à rendre incertaine une reprise de l'investissement. En outre, les « effets de richesse » vont jouer à rebours et contrarier la consommation et les investissements des ménages américains.

Les incertitudes relatives à l'économie des Etats-Unis, conjuguées à l'absence de réduction du déficit courant de ces derniers, ont eu pour conséquence une rapide appréciation de l'euro (représentée par le graphique ci-après) , dont le taux de change est passé de 0,86 dollar fin janvier 2002 à 1 dollar le 15 juillet 2002 (soit une appréciation de 15 %). Certes, cette appréciation réduit l'inflation importée, ce qui pourrait inciter la Banque centrale européenne à maintenir de faibles taux d'intérêt. Cependant, si elle se poursuivait, elle aurait un impact négatif sur la croissance de la zone euro, par le biais du multiplicateur du commerce international 8 ( * ) .

Taux de change euro/dollar

(fin de mois)

Source : FERI

Au total, la croissance pourrait donc être de l'ordre de 2 % en 2003. Elle pourrait même être encore plus faible dans l'éventualité d'une opération américaine en Irak dans les prochains mois. Si celle-ci se produisait, ce serait un cataclysme, dont on ne peut prévoir les effets stratégiques, politiques, économiques...

Dans ces conditions, il conviendrait de ne pas handicaper davantage une reprise encore incertaine par une mise en oeuvre inappropriée du pacte de stabilité et de croissance.

II. QUELLES PERSPECTIVES  POUR LE PACTE DE STABILITÉ ?

A. LES RÈGLES COMMUNAUTAIRES EN MATIÈRE DE FINANCES PUBLIQUES

Le pacte de stabilité et de croissance (PSC) consiste, formellement, en une résolution (dépourvue de force juridique) adoptée par le Conseil européen le 17 juin 1997 à Amsterdam, et en deux règlements :

- l'un, relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi qu'à la surveillance et à la coordination des politiques économiques (1466/97), prévoit que chaque Etat membre doit rendre public chaque année un « programme de stabilité » à moyen terme, le Conseil pouvant adresser des recommandations aux pays s'écartant de ce programme ;

- l'autre (1467/97) définit les programmes de stabilité ou de convergence et précise la procédure concernant les déficits excessifs.

La résolution (dépourvue de force juridique) fixe l'objectif d'un retour à une situation proche de l'équilibre à moyen terme, sans mentionner d'échéance particulière 9 ( * ) .

1. L'interdiction d'un déficit public supérieur à 3 % du PIB et d'une dette publique supérieure à 60 % du PIB

a) L'article 104 du traité instituant la communauté européenne

Le pacte de stabilité et de croissance a pour base juridique l'article 104 (ex-104 C) du traité instituant la communauté européenne. Cet article prévoit que « les États membres évitent les déficits publics excessifs », et fixe certaines règles afin d'atteindre cet objectif :

- surveillance, par la Commission, de l'évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique dans les États membres ;

- instauration d'une procédure concernant les déficits excessifs, dont les modalités sont définies par un protocole annexé au traité de Maastricht (c'est ce protocole qui fixe la règle selon laquelle le déficit public ou la dette publique ne peut être supérieur à respectivement 3 % et 60 % du PIB).

La discipline budgétaire est censée avoir été respectée si le déficit public ne dépasse pas 3 % du PIB. Si tel n'est pas le cas, un manquement à la discipline budgétaire n'est pour autant pas nécessairement établi. Deux cas de figure alternatifs sont envisagés :

- si le rapport entre le déficit public et le PIB a diminué de manière substantielle et constante et atteint un niveau proche de 3 % du PIB ;

- si le dépassement de la valeur de référence n'est qu'exceptionnel et temporaire et que le rapport entre le déficit public et le PIB reste proche de 3 %.

Contrairement à ce qui se passe en cas de dépassement de la limite maximale autorisée pour le déficit public, dans l'hypothèse d'un dépassement de la limite maximale autorisée pour la dette publique, un Etat ne pourrait être sanctionné par le Conseil dans le cadre de l'article 104 (la Commission élaborerait cependant un rapport).

b) La procédure des déficits publics excessifs

Les modalités de mise en oeuvre de cette procédure sont définies par le règlement précité n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 10 ( * ) .

Ce règlement précise à quelles conditions un déficit peut n'être pas excessif s'il est considéré comme exceptionnel et temporaire. Il faut pour cela qu'il résulte « d'une circonstance inhabituelle indépendante de la volonté de l'Etat membre concerné et ayant des effets sensibles sur la situation financière de ses administrations publiques » ou qu'il soit « consécutif à une grave récession économique ».

Cette dernière se produit lorsque le PIB réel de l'Etat membre « enregistre une baisse annuelle d'au moins 2 % ».

Le Conseil est cependant incité à tenir compte « dans son évaluation globale, des observations éventuelles de l'Etat membre concerné, lui indiquant qu'une baisse annuelle du produit intérieur brut de moins de 2 % en termes réels est néanmoins exceptionnelle, eu égard à d'autres éléments d'information allant dans le même sens ». Ceux-ci sont, en particulier, « le caractère soudain de la récession ou la baisse cumulative de la production par rapport à l'évolution constatée dans le passé ».

Dans la résolution citée ci-avant, les Etats se sont engagés à ne pas invoquer le bénéfice de cette dernière disposition lorsque la baisse annuelle du PIB réel serait inférieure à 0,75 %. Cette résolution n'ayant pas de force juridique, cet engagement est de nature politique.

Lorsque des sanctions sont décidées contre un Etat membre, le Conseil doit, « en principe », exiger avant tout que cet Etat « effectue un dépôt non porteur d'intérêts ». Le montant du premier dépôt comprend un élément fixe égal à 0,2 % du PIB et un élément variable égal à un dixième de la différence entre le déficit exprimé en points de PIB et la valeur de référence (3 % du PIB). Les dépôts supplémentaires sont, quant à eux, égaux à cette différence. En tout état de cause, les dépôts annuels ne peuvent excéder 0,5 % du PIB de l'Etat concerné. Ces dépôts sont, « en principe » convertis en amende « dans les deux années suivant la décision d'imposer la constitution du dépôt » si le déficit excessif n'a pas été corrigé.

2. Les programmes de stabilité

a) La base juridique : l'article 99 du traité instituant la communauté européenne

L'article 99 (ex-article 103) du traité instituant la communauté européenne prévoit l'adoption de « grandes orientations de politiques économiques », selon une procédure en trois étapes :

- le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur recommandation de la Commission, en élabore le projet ;

- le Conseil européen, sur la base du rapport du Conseil, débat d'une conclusion ;

- sur la base de cette conclusion, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, adopte une recommandation.

Cet article prévoit également que lorsqu'il est constaté que les politiques économiques d'un État membre ne sont pas conformes aux grandes orientations de politique économique (GOPE) ou qu'elles risquent de compromettre le bon fonctionnement de l'Union économique et monétaire, « le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur recommandation de la Commission, peut adresser les recommandations nécessaires à l'État membre concerné. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission, peut décider de rendre publiques ses recommandations ».

Il est important de souligner que les GOPE reposent, en matière de finances publiques, sur les hypothèses de croissance retenues par les Etats membres dans le cadre des programmes de stabilité.

b) Le régime des programmes de stabilité

Selon le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil, les États membres de la zone euro doivent présenter annuellement un programme de stabilité 11 ( * ) .

Le programme de stabilité fournit les informations suivantes:

- l'objectif à moyen terme d'une position budgétaire proche de l'équilibre ou excédentaire, ainsi que la trajectoire d'ajustement qui doit conduire à la réalisation de cet objectif et l'évolution prévisible du ratio dette publique / PIB ;

- les principales hypothèses concernant l'évolution prévisible de l'économie et les variables économiques importantes qui sont susceptibles d'influer sur la réalisation du programme de stabilité ;

- une description des mesures budgétaires et des autres mesures de politique économique qui sont mises en oeuvre et/ou envisagées pour réaliser les objectifs du programme ;

- une analyse de l'incidence que tout changement des principales hypothèses économiques aurait sur la situation budgétaire et sur la dette.

Les programmes de stabilité sont examinés par le Conseil, sur la base notamment des évaluations effectuées par la Commission. Le règlement prévoit que  « s'il estime (...) que les objectifs et le contenu d'un programme devraient être renforcés, le Conseil, dans son avis, invite l'État membre concerné à adapter son programme ». Cependant, les Etats membres ont, en pratique, une liberté non négligeable pour déterminer les hypothèses sur lesquelles reposent leurs projections de solde public, leur hypothèse de croissance en particulier.

Une fois que le Conseil s'est exprimé sur le programme de stabilité, il ne peut plus adresser de recommandation que s'il « constate un dérapage significatif de la position budgétaire par rapport à l'objectif budgétaire à moyen terme ou par rapport à la trajectoire d'ajustement qui doit conduire à la réalisation de cet objectif ».

3. Les modalités d'application des programmes de stabilité

a) Juillet 2001 : la prise en compte du déficit structurel ?

Le Conseil ECOFIN a révisé en juillet 2001 le Code de conduite sur le contenu et la présentation des programmes de stabilité et de convergence (qui datait de 1998). Le code révisé 12 ( * ) prévoit que les positions budgétaires de moyen terme doivent tenir compte des risques non anticipés et des autres sources de variabilité et d'incertitude pouvant modifier les soldes publics.

Cela a pu être interprété comme l'idée que les programmes de convergence concernaient les déficits structurels et non les déficits effectifs. Ainsi, selon M. Jean Pisani-Ferry, « Depuis l'été dernier, l'ECOFIN a donné une nouvelle définition de l'objectif à moyen terme : les Etats membres doivent parvenir d'ici à 2004 au voisinage de l'équilibre budgétaire structurel et s'y tenir ensuite. En d'autres termes, le solde budgétaire peut varier en fonction des cycles économiques et des déficits sont permis en phase de ralentissement, afin que le budget joue son rôle de « stabilisateur automatique » des fluctuations, mais les gouvernements doivent s'efforcer de conserver leurs dépenses à hauteur du niveau normal de leurs recettes » 13 ( * ) .

Cette interprétation est cependant minoritaire. La plupart des observateurs considèrent, souvent pour le déplorer, que l'objectif de solde public concerne bien le solde effectif, et non le solde structurel.

b) Le Conseil européen de Barcelone : la fixation de l'échéance de l'année 2004

Les conclusions du sommet de Barcelone (mars 2002) ont fixé l'objectif d'un retour à l'équilibre en 2004 : « les Etats membres resteront fidèles ou se conformeront à l'objectif à moyen terme consistant à parvenir, d'ici 2004 au plus tard, à une situation budgétaire proche de l'équilibre ou excédentaire ».

c) Le Conseil ECOFIN de Madrid (20 juin 2002) et le Conseil européen de Séville (21-22 juin 2002) : la réaffirmation de l'échéance de l'année 2004
(1) Le Conseil ECOFIN de Madrid

A l'occasion du Conseil ECOFIN de Madrid du 20 juin 2002, ont été adoptées les « grandes orientations de politiques économiques » (GOPE) pour 2002, ensuite entérinées par le Conseil européen de Séville.

La France a obtenu qu'il soit indiqué que les comptes publics des Etats membres doivent être « proches de l'équilibre » en 2004 (contre « en équilibre » selon la version initiale du texte).

En outre, elle a fait une déclaration affirmant que la réalisation de l'équilibre en 2004 n'est possible que si la croissance française atteint 3 % en rythme annuel à la fois en 2003 et en 2004. Ainsi, la France estime que le scénario de son programme de stabilité à prendre en considération pour décider d'éventuelles recommandations est celui, qualifié de « favorable », où la croissance serait égale à 3 % par an de 2003 à 2005 (alors que selon le scénario « prudent », elle serait de 2,5 % sur cette période).

(2) Le Conseil européen de Séville

Le Conseil européen de Séville (21-22 juin 2002) a réaffirmé l'objectif d'« assainissement des finances publiques » 14 ( * ) .

Il a appelé les États membres à suivre des politiques budgétaires conformes aux recommandations contenues dans les grandes orientations des politiques économiques (et donc la France à respecter les engagements pris, si sa croissance du PIB est de 3 % en 2003 et 2004).

Ainsi, à Madrid, la France a  réaffirmé sa volonté d'atteindre l'équilibre structurel des comptes publics en 2004.

B. LES PROGRAMMES DE STABILITÉ : UN DISPOSITIF QUI DOIT FAVORISER LA CROISSANCE ET GAGNER EN CRÉDIBILITÉ

Le dispositif des programmes de stabilité, sous sa forme actuelle, doit encore gagner en crédibilité et en efficacité. Son objectif essentiel est en effet de permettre à notre pays, comme à l'ensemble de ceux de la zone euro, d'atteindre le plus rapidement possible et dans les meilleures conditions la voie d'une croissance forte et créatrice d'emplois. A l'évidence, il convient de réfléchir non seulement au rôle qui doit être celui de la Commission européenne, mais aussi, et surtout, aux instruments auxquels elle doit recourir afin d'apprécier, de façon globale et équilibrée, la situation des finances publiques des Etats membres de la zone euro. Le recours, quasi-exclusif à ce jour, au critère de déficit public, est insuffisant, partiel et, dans une certaine mesure, aléatoire. Il convient dès lors de compléter et de diversifier cette analyse en terme de déficit (référence au déficit structurel, au déficit de fonctionnement, mis aussi prise en compte de l'évolution de la dette publique, de ses ressorts et de ses composantes).

1. La prescription d'un équilibre dès 2004 ne doit pas nuire à la croissance de la zone euro

Tout d'abord, une politique visant à atteindre quoi qu'il arrive l'équilibre du solde public en 2004 aurait des conséquences néfastes sur la croissance à moyen terme de la France et de la zone euro.

Atteindre l'équilibre structurel des finances publiques en 2004 dans les pays actuellement en déficit 15 ( * ) reviendrait à réduire le déficit structurel de la zone euro de 0,7 point de PIB, comme l'indique le tableau ci-après.

Les déficits structurels des dans la zone euro

Pays

Déficit structurel en 2001

En % du PIB (1)

En milliards d'euros

En % du PIB de la zone euro

Allemagne

1,5

31,0

0,4

France

1,7

24,8

0,3

Portugal

0,9

1,1

n. s.

Total

0,7

Source : OCDE

Le multiplicateur keynésien étant, au sein de la zone euro, intermédiaire entre celui de la France (de l'ordre de 1) et celui de l'Union européenne (de l'ordre de 2), la réduction des déficits publics en son sein a un effet récessif non négligeable.

Le tableau ci-après indique quel serait l'impact, selon l'OFCE, d'une politique visant à atteindre « erga omnes » l'objectif d'équilibre public de la zone euro en 2004, en supposant que le PIB soit alors égal à son niveau potentiel.

Impact sur la zone euro d'une résorption du déficit structurel

de la France et de l'Allemagne

(en points de PIB)

Année 2004

Impact sur le déficit structurel (1)

- 1,5

Impact sur le PIB (2)

- 1,9

Impact sur le déficit conjoncturel [-(2) x 0,44] (3)

+ 0,9

Impact ex post sur le déficit global (1) + (3)

- 0,6


Source : OFCE, avec modèle MIMOSA 16 ( * )

La croissance serait encore davantage réduite dans le cas de la France et de l'Allemagne.

Ainsi, si l'on suppose une croissance française qui, sans réduction du déficit structurel, serait de 3 % en 2003 et 2004, le respect de l'objectif d'équilibre du solde public en 2004 conduirait à une croissance inférieure à 2 % en 2003 et 2004.

Il s'agirait alors du renouvellement de l'erreur de politique économique réalisée de 1981 à 1985 : si un seul Etat s'était fixé l'objectif de réduire son déficit public, il y serait parvenu relativement aisément, du fait de la faiblesse du multiplicateur keynésien au sein des différents Etats membres de la CEE ; mais comme ces derniers menaient tous une telle politique, la croissance européenne a été réduite de près de 1,5 point par an, et le déficit global a été peu réduit 17 ( * ) . Il serait paradoxal que les progrès de l'intégration européenne réalisés depuis les années quatre-vingt conduisent à répéter cette erreur de politique économique.

2. La nécessité de repousser la date fixée pour l'équilibre

Plusieurs solutions ont été proposées afin d'éviter d'handicaper la croissance européenne par une application trop rigoureuse de la politique évoquée ci-avant.

a) Repousser la date fixée pour l'équilibre

Une première possibilité consisterait à repousser la date fixée pour l'objectif d'équilibre des finances publiques.

Ainsi, un report à l'année 2007, envisagé par le Président de la République avant le Conseil européen de Séville, permettrait d'étaler l'effet récessif sur cinq années au lieu de deux. Cette solution a le mérite de la simplicité et du réalisme .

b) Remplacer l'objectif de déficit par un objectif de déficit structurel : une mise en oeuvre délicate ?

Une seconde possibilité, parfois évoquée, consisterait à conserver l'échéance de l'année 2004, mais à considérer que l'objectif est d'atteindre non l'équilibre, mais un déficit tel que les fluctuations de l'activité ne puissent pas susciter un déficit supérieur à la limite de 3 % du PIB , fixée par le pacte de stabilité et de croissance.

La détermination du taux de déficit structurel souhaitable pour atteindre cet objectif semble cependant délicate , comme l'indique l'encadré ci-après.

La difficile détermination d'un objectif de déficit structurel

1. Un objectif de déficit de 1 % du PIB en 2004 serait peut-être justifié ...

Dans le cas de la France, on pourrait peut-être convenir de fixer la norme de déficit structurel à 1 % du PIB. En effet, en supposant que la croissance potentielle est de 2,5 %, et qu'une année donnée la croissance effective est de - 1,5 %, cela signifie que celle-ci est de 4 points en-deçà de son potentiel. Compte tenu du taux de prélèvements obligatoires (de l'ordre de 50 %), l'année considérée les recettes seraient réduites, et donc le déficit accru, de l'ordre de 2 points de PIB, par rapport à la situation où le PIB serait égal à son potentiel. Ainsi, même avec une croissance de - 1,5 %, le déficit public resterait inférieur à 3 % (à condition que le ralentissement ne se prolonge pas). Si on considère qu'en 2004 le PIB sera égal à son potentiel, ceci correspond à un déficit effectif de 1 % du PIB en 2004.

Une analyse similaire a été récemment présentée par M. Patrick Artus 18 ( * ) . Retenant une hypothèse de croissance potentielle pour la France de 1,75 %, M. Artus s'interroge sur le niveau de déficit correspondant au haut de cycle 19 ( * ) souhaitable pour qu'une conjoncture fortement dégradée plusieurs années de suite, comme de 1991 à 1993 20 ( * ) , ne s'accompagne pas d'un déficit public supérieur à 3 %. Il conclut que le déficit correspondant au haut de cycle (celui de 2004 , le haut de cycle étant atteint en 2003) devrait être de l'ordre de 1 % du PIB.

Des chiffres comparables peuvent être avancés pour les autres principaux pays de la zone euro, ainsi que pour la zone euro elle-même. Dans le cas de l'Allemagne , il convient de souligner qu'elle pourrait n'atteindre le haut de son cycle actuel de croissance qu'en 2004, de sorte que si l'on retient un objectif de déficit en haut de cycle il pourrait être nécessaire de lui accorder un délai supplémentaire d'une année (ainsi que le souligne M. Artus).

2. ... mais ce chiffre est contestable

Il convient cependant de souligner la forte dépendance de ces estimations aux hypothèses retenues.

On peut en effet supposer une croissance potentielle de la France de 2,5 %, et conserver le critère de M. Artus selon lequel un déficit de croissance cumulé analogue à celui de 1991-1993 ne devrait pas susciter de déficit public supérieur à 3 % du PIB.

Ces deux hypothèses impliquent que l'on considère un scénario défavorable où le PIB serait inférieur de 6 points à son potentiel. Par conséquent, pour que le déficit public demeure inférieur à 3 % du PIB, il faudrait, selon ces hypothèses, que le solde public soit structurellement équilibré.

3. A défaut de report de l'échéance, la crédibilité du dispositif sera contestée

A cause du refus d'admettre cette situation, l'attitude adoptée par les différents Etats vis-à-vis du pacte de stabilité est ambiguë.

D'un côté, aucun Etat n'a pu ou voulu reconnaître que l'objectif d'équilibre des finances publiques ne pouvait qu'être reporté pour certains d'entre eux.

De l'autre, le Conseil s'est accommodé de déclarations de la part de certains gouvernements que l'on a pu juger optimistes, selon lesquelles l'objectif d'équilibre en 2004 serait atteint.

Selon l'OFCE, « le caractère plus ou moins contraignant de [l'engagement de retour à l'équilibre en 2004] est, à l'évidence, en contradiction avec son but affiché de crédibilité. Comment, en effet, croire en des programmes nationaux de stabilité qui n'ont, jusqu'à présent, été respectés que très occasionnellement, et qui impliqueraient, pour l'être à l'échéance de 2004, qu'au moins trois conditions, à la conjonction quasi miraculeuse, soient simultanément remplies : une croissance économique très soutenue (supérieure à 3 % pendant trois ans), des dépenses publiques sévèrement contrôlées et quasi constantes, et une élasticité des recettes fiscales à l'activité exceptionnellement élevée, incompatible avec toute baisse de prélèvements obligatoires ? » 21 ( * ) .

Une telle situation pourrait être évitée si les Etats de la zone euro se dotaient d'objectifs clairs et réalistes, c'est-à-dire reconnaissaient la nécessité de repousser l'objectif d'équilibre dans le cas de certains Etats.

C. A MOYEN TERME : FAIRE ÉVOLUER LE PACTE DE STABILITÉ VERS UN DISPOSITIF PLUS AMBITIEUX

1. Le pacte de stabilité doit faire l'objet d'une nouvelle analyse économique

Le problème n'est pas seulement l'inadaptation du pacte de stabilité à la situation actuelle. En effet, le pacte de stabilité a fait l'objet, depuis quelques mois, d'un certain nombre de remises en cause frontales, qui, pour excessives qu'elles puissent être, n'en reflètent pas moins l'existence d'un vrai et nécessaire débat quant à son contenu et à ses objectifs.

D'aucuns rappellent ainsi que l'idée lui servant de fondement est que si un Etat a un déficit public important, les autres en pâtiront du fait de taux d'intérêt plus élevés. Cela est vrai, mais ce phénomène ne doit pas être surestimé. Ainsi, selon l'OFCE, « les conséquences d'une politique budgétaire expansionniste sur le taux d'intérêt de l'euro ne peuvent être que mineures, pour ne pas dire marginales » 22 ( * ) . Il est clair que le niveau relatif des taux d'intérêt entre les Etats-Unis et l'Europe dépend davantage des anticipations comparées de croissance des économies de part et d'autre que du respect mécanique, par les Etats de la zone euro, des normes du pacte de stabilité...

En revanche, le pacte de stabilité peut présenter des inconvénients importants.

Tout d'abord, son application stricte peut accentuer une récession. La situation actuelle est à cet égard symptomatique. Il est important de souligner que ce sont tous les Etats européens qui pâtiraient, en termes de croissance, de politiques procycliques menées en France et en Allemagne.

Ensuite, s'ils laissent jouer les stabilisateurs automatiques, les grands Etats risquent de ne pas pouvoir se conformer à la règle des 3 %. Ainsi, selon la Caisse des dépôts et consignations, à déficit structurel inchangé, le risque que le déficit dépasse 3 % à moyen terme en Allemagne est de l'ordre d'une chance sur deux, comme l'indique le tableau ci-après.

Probabilité que le déficit dépasse 3 % du PIB

2002

2003

2004

2005

2006

Allemagne

0,27

0,35

0,39

0,42

0,45

France

0,12

0,23

0,31

0,36

0,40

Italie

0,08

0,016

0,23

0,29

0,34

Source : lettre économique de la CDC, janvier 2002, n°136

Selon la CDC, « le mécanisme de sanctions (...) est suffisamment dissuasif pour que le dépassement du critère de 3 % soit interprété comme une remise en cause de la volonté affichée par les douze de coordonner leur politique budgétaire pour la bonne marche de l'union monétaire. Elle aurait de ce fait des répercussions importantes sur les marchés financiers, avec un affaiblissement de l'euro, un durcissement de la politique monétaire et une hausse des spreads des pays les plus endettés ».

Enfin, l'objectif d'équilibre des finances publiques implique une diminution à long terme du poids de la dette publique dans le PIB.

2. Se fixer des règles plus souples

Dans ces conditions, plusieurs économistes éminents 23 ( * ) plaident pour une redéfinition des règles du pacte de stabilité.

Selon eux, plusieurs critères pourraient avantageusement remplacer les critères actuels :

- prise en compte du déficit structurel (et non effectif) ;

- exemption des dépenses d'investissement du calcul du solde public ;

- meilleure prise en compte du niveau de la dette publique 24 ( * ) (y compris les engagements hors bilan, en particulier ceux correspondant aux régimes de retraites), qui constitue la principale menace à long terme pour la stabilité monétaire.

a) Le consensus : prendre en compte le déficit structurel

Il semble exister un certain consensus sur la nécessité de prendre en compte le déficit structurel, et non le déficit effectif.

En effet, comme on l'a vu, une norme de déficit public effectif peut susciter, en période de croissance faible, une politique procyclique, ce qui n'est évidemment pas souhaitable.

Cependant, comme on l'a souligné ci-avant, la détermination de l'objectif de déficit structurel semble délicate.

b) Faut-il prendre en compte le taux d'endettement public et/ou ne pas prendre en compte les dépenses d'investissement ?

Le débat actuel porte essentiellement sur l'utilité de prendre en compte le taux d'endettement public et/ou ne pas prendre en compte les dépenses d'investissement.

(1) Faut-il se fixer un objectif de dette publique ?

Ainsi que votre rapporteur général l'a rappelé dans un récent rapport 25 ( * ) , le dégagement de marges de manoeuvre budgétaires passe par la diminution du poids de la dette dans le PIB. Compte tenu des échéances de retour à l'équilibre des finances publiques, le retour du poids de la dette à son niveau de 1980 (soit 20 points de PIB) ne paraît pouvoir être atteint qu'en 2030.

Selon M. Jean Pisani-Ferry, « une solution serait de proposer aux Etats membres qui le voudraient l'option de souscrire à un « Pacte de maîtrise de la dette publique ». Ces pays seraient tenus 1) de publier un état complet des comptes publics sur la base de nouvelles normes comptables de l'UE permettant d'évaluer les dettes hors bilan; 2) de maintenir leur niveau d'endettement (au sens de Maastricht) au-dessous d'un certain seuil, par exemple 50 % du PIB) ; 3) de se donner une cible de dette à horizon de cinq ans, qui servirait de référence pour évaluer leur politique budgétaire. Les Etats qui rempliraient ces critères seraient automatiquement réputés satisfaire à la procédure de prévention des déficits excessifs. En revanche, si l'une de ces trois conditions n'était pas respectée, la procédure se déclencherait automatiquement et entraînerait le cas échéant des sanctions » 26 ( * ) .

(2) Faut-il exclure les dépenses d'investissement du déficit public ?

La question de l'exclusion éventuelle des dépenses d'investissement du calcul du déficit public est liée à l'objectif retenu en matière de dette publique.

Il est parfois envisagé de fixer un objectif d'équilibre à moyen terme du solde public hors dépenses d'investissement : c'est une expression de la « règle d'or », défendue par votre rapporteur général. Cet objectif permettrait d'obliger les Etats à une certaine discipline budgétaire, sans empêcher de nécessaires dépenses d'investissement. Ainsi, M. Jean-Paul Fitoussi recommande de fixer un objectif de « déficit structurel hors investissement nul » 27 ( * ) . De même, le Conseil ECOFIN a approuvé le scénario budgétaire britannique à moyen terme, qui prévoit un déficit de 1 % du PIB en 2005-2006, considérant qu'il n'y avait pas lieu d'imposer un équilibre strict à un Etat peu endetté 28 ( * ) qui investissait dans l'amélioration des services publics.

Cependant, selon M. Patrick Artus, la soustraction des dépenses d'investissement du déficit public serait injustifiée. En effet, selon lui le capital public ne serait pas suffisamment productif pour que son augmentation ne suscite pas d'augmentation du taux d'endettement public au-delà de ce qui serait souhaitable 29 ( * ) .

Il paraît simple de prendre en compte cette objection en définissant en proportion du PIB un niveau maximal d'investissements à financer par la dette. C'est dans ce sens que la « règle d'or » pourrait être adoptée. Une telle voie paraît être, pour la France, la plus raisonnable, car elle l'assurerait, en particulier, de pouvoir mener à bien la réalisation de la prochaine loi de programmation militaire.

CHAPITRE II :

UN DÉFICIT TRÈS DÉGRADÉ, À CONTENIR ABSOLUMENT

I. UNE SITUATION INITIALE EN MATIÈRE DE DÉFICIT DÉJÀ TRÈS DÉGRADÉE

Qualifié en son temps de « grande illusion », le projet de loi de finances initiale pour 2002, même s'il présentait un niveau de déficit déjà dégradé par rapport aux années précédentes, ne traduisait malheureusement qu'une partie de la réalité.

A. DE NOMBREUX SIGNES AVANT-COUREURS DE DÉTÉRIORATION DANS LE BUDGET INITIAL POUR 2002

1. Pour la première fois depuis 1996 un déficit budgétaire en augmentation dans la loi de finances initiale pour 2002

L'augmentation était de 2 milliards d'euros dans le projet de loi de finances initiale pour 2002 par rapport à la loi de finances initiale pour 2001. Cette situation traduisait une dégradation très notable : mesuré de loi de finances initiale à loi de finances initiale, le déficit prévu devait s'accroître en 2002 pour la première fois depuis 1996.

Evolution du déficit budgétaire en prévision et en exécution

(en milliards d'euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

LFI

41,94

43,87

43,42

39,32

36,05

32,82

28,45

30,44

Exécution

49,24

45,03

40,81

37,73

31,4

29,15

32,05

46 (1)

Différence

+ 7,30

+ 1,16

- 2,61

- 1,59

- 4,65

- 3,67

+ 3,60

(1) Chiffrage prévisionnel du déficit budgétaire figurant dans le présent collectif budgétaire

Evolution du déficit budgétaire depuis 1995


(en milliards d'euros)

2. Aucune amélioration du besoin de financement de l'Etat avouée entre 1999 et 2002

On constatait alors que le besoin de financement de l'Etat n'avait presque pas varié entre 1999 et 2002, passant de - 2,5 à - 2,4 points de PIB. Ce laxisme budgétaire de l'Etat avait deux conséquences :

- d'une part, le besoin de financement de l'ensemble du secteur public ne diminuait que très faiblement : sur la période 1999-2002 : il ne baissait, en prévision, que de 0,2 point, passant de - 1,6 à - 1,4 point de PIB ;

Décomposition du besoin de financement des comptes publics entre les administrations

(en points de PIB)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Ensemble des administrations

- 3,5**

- 2,7

- 1,6

- 1,3

- 1,4*

- 1,4

Etat

- 3,6

- 3,0

- 2,5

- 2,4

- 2,3

- 2,4

ASSO (régimes sociaux)

- 0,4

- 0,1

0,3

0,5

0,3

0,5

APUL (collectivités locales)

0,2

0,3

0,3

0,2

0,2

0,3

ODAC

0,2**

0,1

0,2

0,2

0,2

0,2

** hors soulte France Telecom

* hors recettes UMTS (0,6 point de PIB en 2001)

- d'autre part, le scénario retenu dans les programme pluriannuels des finances publiques qu'il s'agisse de celui pour 2002-2004 ou du programme 2003-2005 qui visaient à un retour à un excédent du secteur public d'ici 2004, paraissait obsolète dès octobre dernier à votre commission.

Le non-respect du programme pluriannuel des finances publiques

(en points de PIB)

1999

2000

2001

2002 (e)

Besoin de financement secteur public prévu

- 1,8

- 1,4

- 1

- 0,6

Besoin de financement secteur public effectif

- 1,6

- 1,4

- 1,4

- 1,4

Besoin de financement de l'Etat prévu

- 2,5

- 2,3

- 1,9

- 1,6

Besoin de financement de l'Etat effectif

- 2,5

- 2,4

- 2,4

- 2,4

3. Un déficit de fonctionnement qui s'accroissait à 4,81 milliards d'euros en 2002

Il convenait en outre de remarquer que pour la première fois depuis 1997, le déficit de fonctionnement devait s'accroître d'une année sur l'autre et passer ainsi de 2,27 milliards d'euros à 4,81 milliards d'euros, soit un quasi-doublement (une progression de 2,54 milliards d'euros), ce qui montrait bien que l'Etat continuait d'emprunter pour régler ses dépenses courantes.

Un déficit de fonctionnement qui, pour la première fois depuis 1997, ne se réduisait pas

(en milliards d'euros)

4. Les deux tiers de l'amélioration relative des déficits publics entre 1997 et 2002 dus à la conjoncture

La persistance d'un déficit structurel important est le signe que les charges de structure restent trop lourdes et que le secteur public vit « au-dessus de ses moyens ». 30 ( * ) .

Or, dans le rapport préparatoire au débat d'orientation budgétaire pour 2002, le gouvernement indiquait que l'amélioration du solde des administrations publiques entre 1997 et 2002 tenait pour « un peu moins des deux tiers au regain de croissance économique et pour un peu plus d'un tiers à des facteurs structurels ».

Cela montrait bien que l'amélioration des déficits publics résulte pour l'essentiel de causes exogènes, et non de la politique suivie par le gouvernement.

Une réduction des déficits publics due pour les 2/3 à la conjoncture

(en points de PIB)

5. En 2002, l'Etat toujours la seule collectivité publique déficitaire

Depuis 1999, l'Etat est la seule collectivité publique durablement déficitaire. Il présente ainsi toujours un besoin de financement pérenne d'un niveau très important et qui ne se réduit pas.

Capacité ou besoin de financement au sens de Maastricht

(en points de PIB)

1997

1998

1999

2000

2001

2002 ( 1 )

Etat

- 3,6

- 3,0

- 2,5

- 2,4

- 2,3

- 2,4

Sécurité sociale

- 0,4

- 0,1

+ 0,3

+ 0,5

+ 0,3

+ 0,5

ODAC

+ 0,7

+ 0,1

+ 0,3

+ 0,4

+ 0,4

+ 0,2

Collectivités locales

+ 0,2

+ 0,3

+ 0,3

+ 0,2

+ 0,2

+ 0,3

B. UNE DETTE DE L'ÉTAT MAL CERNÉE ET TOUJOURS EN PROGRESSION

Le corollaire de cette dégradation du niveau des déficits publics due pour une large part au laxisme budgétaire de l'Etat se trouve dans la progression continue de la dette publique et plus particulièrement de la dette de l'Etat ainsi qu'il ressort du rapport d'information présenté sur ce thème, par votre commission des finances 31 ( * ) .

Il en ressort que si la plupart des pays de l'Union européenne ont mis à profit la période exceptionnelle de croissance comme entre 1997 et 2000 pour réduire leur endettement public, la France s'est singularisée par un moindre effort, et donc un moindre succès, dans ce domaine . Relativement privilégiée en 1997, la France se retrouve au terme de la précédente législature dans une situation d'autant plus fragile que l'accroissement de son endettement a été mal utilisé. Il a servi à financer des dépenses courantes et non à investir.

1. La France, mauvais exemple en Europe en matière de dette publique

Le ratio d'endettement public par rapport au PIB, défini au sens du traité de Maastricht, est passé en France depuis 1995 au-dessus des 50 points de PIB, alors qu'il ne dépassait pas 20 points en 1980 et n'atteignait pas 40 points en 1990.

a) 1997-2001 : l'illusion d'une amélioration

Evolution de la dette publique de la France

(en points de PIB)


Source : rapport économique, social et financier pour 2002 et Cour des Comptes

L'amélioration constatée, pour l'essentiel entre 1996 et 2000, a été permise par une amélioration des soldes primaires 32 ( * ) . L'excédent primaire s'est ainsi élevé en 2000 à 6,54 milliards d'euros et à 4,65 milliards d'euros en 2001.

Une évidence mérite d'être d'abord rappelée : la dette n'a jamais cessé de croître durant la période 1997-2001. Les déficits, bien que réduits, n'ont cessé de s'accumuler. Dans le ratio dette/PIB, c'est en effet seulement le dénominateur qui s'est amélioré.

La forte croissance de la dette négociable de l'Etat 33 ( * )

(en milliards d'euros)

b) Des performances moindres en France que dans le reste de l'Europe

Ainsi, la législature qui vient de s'achever risque fort d'avoir été une « législature pour rien ». Ceci est d'autant plus alarmant que les autres pays européens, bénéficiant de la même conjoncture exceptionnelle, ont réalisé de réels efforts pour réduire le poids de leur endettement public alors même qu'ils partaient souvent d'une situation plus dégradée que celle de la France.

Selon les données utilisées par la Commission européenne, la dette publique de l'Union européenne a en moyenne reculé de 7,7 points de PIB entre 1996 et 2000 contre une augmentation de 0,9 point de PIB en France, conformément au graphique ci-après.

Variation de la dette publique des Etats européens entre 1996 et 2000

(en points de PIB)

2. Un Etat mauvais gestionnaire : un patrimoine dégradé et des engagements hors-bilan mal connus

a) Les engagements hors-bilan et les dettes cachées

Il convient de rappeler combien sont flous les contours de la dette publique. En particulier, la dette du secteur public est élevée et mal cernée.

La seule dette des entreprises du secteur public comptabilisée par le ministère de l'économie et des finances dépassait 130 milliards d'euros en 2000, soit environ 9 points de PIB. Cette dette n'est pas prise en compte dans la dette publique puisque le SEC 95, qui constitue la doctrine européenne en matière de déficit et de dette, considère que sont exclues du champ des administrations publiques toutes les unités marchandes, y compris celles contrôlées par l'Etat, dont les ventes couvrent plus de 50 % des coûts de production 34 ( * ) .

Surtout, les engagements « hors-bilan » auxquels la France aura à faire face pour répondre au vieillissement de sa population et éviter la crise de ses régimes de retraite n'ont pas encore trouvé de réponse. Selon la Cour des Comptes, en ce qui concerne uniquement les retraites publiques, « l'ordre de grandeur des engagements hors-bilan de l'Etat au titre des recettes des fonctionnaires peut être estimé comme s'inscrivant dans une fourchette comprise entre 595 milliards d'euros et 685 milliards d'euros ».

b) L'absence de contrepartie patrimoniale à la dette

L'endettement d'un agent peut servir à financer des dépenses courantes ou des investissements, des dépenses, des dépenses récurrentes ou des charges exceptionnelles. Le rapport précité de votre commission des finances a mis en regard de l'alourdissement de la dette publique observée entre 1996 et 2000 l'accroissement de la valeur des actifs afin de déterminer l'évolution du patrimoine net des administrations publiques durant la période.

En valeur, les actifs publics ont davantage progressé que les dettes. En volume en revanche, les flux cumulés de dettes des administrations publiques ont atteint entre 1996 et 2000 142,62 milliards d'euros tandis que le volume d'actifs 35 ( * ) n'a progressé que de 56,91 milliards d'euros.

Évolution en volume du patrimoine net des administrations publiques
entre 1996 et 2000

(en milliards d'euros)

Ainsi le patrimoine net de l'Etat s'est replié entre 1996 et 2000, passant de 26,7 points à 23,1 points de PIB, en raison de ses opérations de cessions d'actifs financiers. De plus, la baisse des marchés d'actions a fortement contribué à la diminution récente du patrimoine financier : la valeur des participations cotées de l'Etat s'est ainsi réduite de près de 60 % entre 2000 et 2001. Simultanément, l'Etat a continué à financer par emprunt, chaque année, une quote-part de ses dépenses de fonctionnement.

II. L'AVEU TARDIF PAR LE PRÉCÉDENT GOUVERNEMENT DE L'IRRÉALISME DES PRÉVISIONS DE DÉFICIT PUBLIC

A. LES DÉCLARATIONS DE LAURENT FABIUS EN FÉVRIER 2002

1. La croissance revue à la baisse : 1,4-1,6 % pour 2002

En février dernier, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie avait révisé à la baisse les prévisions de croissance pour 2002 : initialement fixée à 2,5 % en volume pour 2002, celle-ci n'était plus que de 1,4-1,6 %, ce qui contribuait à modifier à la baisse les prévisions de recettes et inévitablement à une nouvelle dégradation du niveau des déficits publics.

2. Un déficit public alors chiffré à 1,8-1,9 point de PIB

Selon le précédent gouvernement, la dérive enregistrée était pour l'essentiel imputable au budget de l'Etat, les comptes sociaux demeurant excédentaires à hauteur de 0,2-0,3 point de PIB, conformément au tableau ci-après.

La révision à la hausse des niveaux de déficits publics en février 2002

(en points de PIB )

1999

2000

2001

2002

2003

Administrations publiques

- 1,6

- 1,35

- 1,5

- 1,9/- 1,8

- 1,8/- 1,7

Etat

- 2,5

- 2,4

- 2,4

- 2,7/- 2,6

- 2,65/- 2,55

Organismes divers d'administration centrale

0,1

0,15

0,2

0,2

0,25

Administrations locales

0,3

0,3

0,3

0,3/0,4

0,3/0,4

Administrations de sécurité sociale

0,3

0,6

0,4

0,2/0,3

0,2/0,3

La dérive du déficit budgétaire avouée par le précédent gouvernement

(en points de PIB)

La dérive du déficit public avouée par le précédent gouvernement

(en points de PIB)

B. UN CHIFFRAGE ALORS FORMELLEMENT CONTESTÉ PAR VOTRE RAPPORTEUR GÉNÉRAL

Votre rapporteur général avait alors publiquement exprimé des doutes quant à la méthode retenue, estimant que le gouvernement n'avait pas tiré toutes les conséquences de ses nouvelles prévisions de croissance sur les comptes publics. En l'espèce et selon le coefficient d'élasticité au PIB retenu pour les recettes, il avait estimé qu'une diminution d'un point de la croissance du PIB se traduirait par des moins-values fiscales pour l'Etat comprises entre 3,96 milliards et 6,1 milliards d'euros. S'agissant des régimes sociaux, les moins-values pouvaient être chiffrées au minimum entre 3 et 5,5 milliards d'euros, soit au total une prévision minimale de déficit public pour 2002 de 2,2 - 2,3 points de PIB.

Une estimation de l'élasticité des recettes par rapport au PIB

Impôts sur les ménages

Impôts sur les entreprises

Cotisations sociales

Impôts indirects

France

0,6

1,8

0,5

0,5

Allemagne

1,3

0,8

1,0

1,0

Italie

0,8

1,4

0,6

1,3

Source : lettre économique de la CDC, janvier 2002, n° 13

C. UNE ESTIMATION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES CORROBORÉE PAR L'AUDIT SUR LES FINANCES PUBLIQUES

1. Une révision à la baisse de l'hypothèse de croissance

Afin d'apprécier les écarts existant entre les évaluations figurant dans la loi de finances initiale pour 2002 et la situation prévisible au 31 décembre 2002, MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse ont notamment procédé à la révision des principales hypothèses macro-économiques, qu'il s'agisse de la structure de l'emploi, de la croissance de la masse salariale, du niveau de l'inflation ou surtout de l'hypothèse de progression du PIB.

Les principales hypothèses macroéconomiques utilisées

Croissance prévue 2002 sur 2001

(en %)

Loi de finances initiale
pour 2002

Audit (consensus des économistes)

PIB en volume

2,5

1,3

Prix à la consommation

1,5

1,7

Masse salariale privée

5,0

3,9

Emploi salarié

1,7

0,9

L'audit Bonnet-Nasse :
éléments d'un « discours de la méthode » en matière de finances publiques

Par delà les jugements et appréciations chiffrées portés sur l'état comptable des finances publiques, l'audit sur les finances publiques de juin 2002 comporte une certain nombre de remarques méthodologiques de fond qu'il paraît utile de citer et de rappeler.

« Assurer la seconde cohérence, celle des transferts reçus et versés entre les comptes sociaux et ceux de l'Etat pourrait sembler aller de soi mais se heurte à une difficulté particulière : l'illisibilité des comptes sociaux .

« Une complexité excessive. Le problème n'est pas récent : les comptes sociaux ont toujours été complexes ; mais il s'aggrave. Aux multiples régimes existant s'ajoute l'inflation dans la création des « fonds » les plus divers ; trop souvent, il est crée un fonds là où un simple ligne de comptabilité analytique suffirait .

« L'obscurité de cet inextricable dédale pose un problème général d'efficacité publique. Nous ne disposons pas des moyens qui permettraient de critiquer les résultats des exercices de prévisions macro-économiques existants, ou de les reconstruire, opérations qui constitueraient le préalable nécessaire à une prévision autonome de l'équilibre des finances publiques dans le moyen terme.

« Certes, tous les pays du monde développé où ce problème se pose sont à la recherche de la « bonne » solution. L'étonnant n'est donc pas que la France n'ait pas encore trouvé cette bonne solution ; l'étonnant est qu'elle manifeste si peu d'intérêt pour sa recherche.

« Au terme de cet examen de la situation des finances publiques de notre pays, beaucoup des conclusions que nous avions tirées, il y a cinq ans, au terme d'un exercice similaire pourraient être répétées.

« Nous avions notamment constaté que le renforcement de l'efficacité de l'Etat était absolument nécessaire, la simple recherche d'économies sans modifications de l'organisation et des structures n'étant plus à la dimension du problème. Cinq ans plus tard, nous n'avons pas changé d'avis.

« Combler un vide le suivi de l'exécution de la loi de financement est un problème, lui aussi, immense. Dans le monde entier, de multiples expérimentations sont en cours sur ce thème ; il est anormal que la France y participe si peu alors même que la possibilité d'expérimenter est justement prévue par les ordonnances de 1996.

« Sans doute serait-il futile et un peu naïf de croire que l'organisation de la sécurité sociale pourrait être simple. Mais il y a des limites au delà desquelles l'excès de complexité de l'outil nuit aux fins qu'il sert : il nous faut à tout le moins une pause dans la course folle à la complexité croissante.

« La démocratie y gagnerait ».

2. Le déficit budgétaire de l'Etat estimé entre 41,9 et 44,6 milliards d'euros pour 2002

Compte tenu des évaluations de recettes retenues par le rapport d'audit, ainsi que du dérapage d'un certain nombre de postes de dépenses, le déficit budgétaire de l'Etat a été estimé entre 41,9 et 44,6 milliards d'euros, soit exprimé dans les termes de la comptabilité nationale, une fourchette de 45,8 à 48,5 milliards d'euros correspondant à 3-3,2 points de PIB.

Compte tenu de la détérioration de la situation des comptes sociaux, le déficit total des administrations publiques s'élèverait en 2002 selon les auteurs du rapport entre 2,3 et 2,6 points de PIB contre 1,4 point en loi de finances initiale et 1,4 point en 2001.

Le déficit des administrations publiques en 2002

Borne basse

Borne haute

Etat (comptabilité budgétaire)

- 41,9

- 44,6

Clé 36 ( * )

- 3,9

- 3,9

Etat

(comptabilité nationale)

- 45,8

(- 3,037)

- 48,5

(- 3,216)

ODAC

+ 9,5

(+ 0,630)

+ 9,3

(+ 0,617)

ASSO

0,0

(- 0,000)

- 1,1

(- 0,073)

APUL

+ 2,2

(+ 0,146)

+ 1,8

(+ 0,119)

Total APU

- 34,1

(- 2,261)

38,5

(- 2,553)

En milliards d'euros et, entre parenthèses, en points de PIB

PIB : 1.508 milliards d'euros

Source : audit des finances publiques, juin 2002

III. UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE DÉSORMAIS CHIFFRÉ À 46 MILLIARDS D'EUROS PAR LE PRÉSENT COLLECTIF

Le solde général du présent collectif tel qu'il figure au sein de l'article d'équilibre s'élève à - 46,005 milliards d'euros. Il résulte des mouvements suivants.

A. LA PRISE D'ACTE DE LA DÉGRADATION DES COMPTES DE L'ÉTAT À HAUTEUR DE 13 MILLIARDS D'EUROS

1. 8,64 milliards de moins-values de recettes fiscales et non fiscales

Ces révisions de recettes sont principalement dues à l'effet de la diminution du taux de croissance du PIB sur le rendement escompté de l'impôt sur les sociétés (- 2,54 milliards d'euros) ainsi que sur celui de la TVA nette (- 2,95 milliards d'euros). A cela s'ajoute, pour 3,26 milliards d'euros, la dégradation du niveau prévisionnel des recettes non fiscales qui avaient, en effet, été fixées, de façon globale, en loi de finances initiale à un niveau artificiellement élevé (35,16 milliards d'euros) afin de permettre au précédent gouvernement de « boucler son budget ».

2. Un accroissement des dépenses du budget général de 4,96 milliards d'euros

Selon le gouvernement, cet accroissement des dépenses « recouvre à la fois des insuffisances qui font l'objet d'ouvertures de crédits supplémentaires en projet de loi de finance rectificative et les dépenses liées à la consommation de crédits reportés des gestions antérieures ». Ces ouvertures de crédits correspondent, pour une très large part, à des postes de dépenses sous-évaluées en loi de finances initiale et à « l'apurement des dettes du passé » conformément à ce qui figurait dans les conclusions de l'audit précité.

3. Deux mesures techniques de réduction du déficit pour 600 millions d'euros

Il s'agit, d'une part, d'une diminution du prélèvement au profit de l'Union européenne pour 1,9 milliard d'euros « en ligne avec l'audit », qui accroît d'autant le niveau des recettes nettes du budget général, et d'autre part d'une dégradation de 1,3 milliard d'euros du solde des comptes spéciaux du Trésor.

B. UNE BAISSE OPPORTUNE DE L'IMPÔT SUR LE REVENU POUR 2,55 MILLIARDS D'EUROS

Cette mesure est la première traduction des priorités politiques du gouvernement, conformément aux orientations tracées par le Président de la République, et vient accroître le niveau du déficit budgétaire qui s'élève ainsi à 46 milliards d'euros, soit 3,06 points de PIB.

En tout état de cause, eu égard à l'importance du dérapage enregistré par rapport à la loi de finances initiale (15,56 milliards d'euros, soit une progression de 51,11 %), ce chiffre de 46 milliards d'euros constitue une borne haute qu'il importe de ne pas dépasser. De façon générale en effet, la politique budgétaire devra impérativement réduire durablement les déficits et maîtriser « sans tabou » la dépense publique.

C. LA RÉDUCTION DES DÉPENSES, UN EXERCICE INÉLUCTABLE
DÈS 2002

Il est évidemment opportun et nécessaire de prendre acte, ici, de la dégradation du solde public mise en évidence par le récent audit de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse. Ce déficit, selon leurs calculs, n'est pas supérieur à 44,6 milliards d'euros. Par commodité, votre rapporteur général considère qu'il s'agit du « déficit Jospin », résultat prévisionnel issu de la gestion de l'ancien gouvernement. Au-delà, toute dégradation supplémentaire du solde doit être absolument évitée, et donc compensée par l'annulation de dépenses à due concurrence. C'est pourquoi votre rapporteur général regrette particulièrement que la réduction de l'impôt sur le revenu n'ait pas été exactement financée par des annulations de crédits de même montant. Sans doute cette compensation sera-t-elle opérée avec de nombreux autres mouvements, dans le collectif de fin d'année, mais mieux vaut ne pas remettre au lendemain ce qu'on pourrait faire immédiatement... La réduction des dépenses de l'Etat est un exercice inéluctable, auquel le présent gouvernement devra se prêter pour ne pas relever les prélèvements obligatoires et pour demeurer en phase avec ses engagements européens !

Selon les propres termes du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie « le gouvernement s'est borné à faire en sorte que l'État puisse continuer à fonctionner normalement et payer ses dettes, en traduisant les résultats de l'audit ».

Le premier constat qu'il convient de faire sur la progression des dépenses issue de la loi de finances initiale pour 2002 est celle d'un dérapage sans précédent . Telle est en effet la conclusion de l'audit précité de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse lorsqu'ils écrivent que « cet exercice fait apparaître un indéniable dérapage de la dépense ; c'est un point marquant de notre audit ».

Tous les ingrédients du dérapage, surestimation de la croissance, sous-estimation des crédits, oubli de certaines dépenses, étaient contenus dans la loi de finances initiale pour 2002. Ils avaient été dénoncés à l'occasion du débat budgétaire par votre commission des finances. Ce dérapage était en germe dans la politique conduite par le précédent gouvernement tout au long de la législature et la rigidité de la dépense publique a joué à plein au moment du retournement de conjoncture observé en fin d'année 2001.

CHAPITRE III :

DES DÉPENSES À LA DÉRIVE

I. AU PASSIF DU PRÉCÉDENT GOUVERNEMENT : L'ABSENCE DE MAÎTRISE DES DÉPENSES

A. 1997-2001 : UN MANQUE DE DISCIPLINE SUR LES DÉPENSES

Une phrase du rapport économique, social et financier pour 2002 illustre les contradictions du précédent gouvernement en matière de dépenses, dont le présent collectif tire les enseignements : « le financement des priorités du gouvernement reste assuré dans le cadre d'une maîtrise globale des dépenses de l'Etat » . Toute la législature a été marquée par la contradiction entre la philosophie dépensière du gouvernement et ses engagements européens de stabilisation des dépenses.

1. Le relâchement de l'effort au fil de la législature

a) Un affichage : la réduction du poids des dépenses dans le PIB

Les chiffres montrent une relative réduction du poids des dépenses de l'Etat en points de PIB entre 1996 et 2001. Cette réduction est davantage due à la forte progression du PIB sur la période qu'à une forte discipline budgétaire.

Évolution des dépenses de l'Etat entre 1996 et 2000

(en points de PIB)

Source : rapport économique, social et financier pour 2002

La norme de progression en volume que le gouvernement s'est fixée entre 1997 et 2001 a en apparence été tenue. Tel ne sera pas le cas du chiffre de 0,5 % annoncé pour 2002.

Le respect du gouvernement Jospin de sa propre norme de progression en %
(en volume, à structure constante)

Source : rapport économique, social et financier pour 2002

A structure courante 37 ( * ) , le profil de progression des dépenses entre 1997 et 2001 est beaucoup plus heurté :

Progression des dépenses définitives du budget général

(en %)


Source : projet de loi de règlement pour 2001

b) La réalité : une contre-performance de la France dans l'OCDE et un relâchement progressif

Si les dépenses publiques ont connu une baisse en France depuis 1997, elles restent largement au-dessus des 50 points de PIB. L'Italie, longtemps considérée comme le « mauvais élève » de l'Union européenne en matière de finances publiques, est passée sous cette barre depuis 1997, et la majorité de nos principaux partenaires ne l'a, de toute façon, jamais franchie. De plus, la pente de la réduction des dépenses a été beaucoup moins accusée en France que dans les principaux pays de l'OCDE, comme le montre le graphique ci-après :

Évolution des dépenses publiques

(en points de PIB)

Source : OCDE (Insee pour la France)

*Estimation OCDE

La petite diminution de la dépense publique observée depuis 1997 masque donc en réalité une contre-performance de la France par rapport à ses partenaires de l'OCDE.

De plus, la précédente législature a connu un relâchement progressif dans l'objectif de progression des dépenses, surtout visible au cours des derniers mois. Le programme pluriannuel de finances publiques pour la période 2002-2004 sur lequel reposait le projet de loi de finances pour 2002 définissait un objectif de progression des dépenses de l'ensemble des administrations publiques de 4,5 % en volume sur la période, soit 1,5 % par an. Or, le programme 2001-2003 ne supposait qu'une augmentation de 1,3 % par an, et le programme 2000-2002 prévoyait une hausse de 1 % par an en volume. Il y a donc eu, au fil des programmes pluriannuels, un relâchement critiquable de l'objectif de maîtrise des dépenses.

2. La rigidité croissante de la dépense publique

La répartition de la progression des dépenses montre que deux postes ont connu une dégradation indéniable au cours des dernières années : la charge de la dette et les crédits de la fonction publique. Cette dégradation ne laisse pas d'inquiéter car il s'agit de dépenses, sauf effort volontariste, reconductibles. Leur poids a pleinement contribué à l'aggravation du déficit prévu pour l'année 2002.

a) La fonction publique plutôt que l'investissement

Tout d'abord, compte tenu de la persistance des déficits à un niveau élevé, la charge nette de la dette a fort logiquement augmenté depuis 1997.

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Néanmoins, la première « contributrice » à la progression des dépenses a été la dérive des crédits de fonction publique.

Les dépenses de fonction publique n'ont jamais cessé de croître en 1997 et 2002.

Part des dépenses de fonction publique dans le budget général de 1997 à 2002

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Outre les créations d'emplois budgétaires nouveaux réalisées essentiellement depuis deux ans, la progression des dépenses de fonction publique s'explique aussi par la hausse des rémunérations des fonctionnaires résultant de l'accord salarial du 10 février 1998.

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

L'évolution du « point » explique à lui seul un tiers de la progression des dépenses de fonction publique.

Les différents facteurs d'évolution des dépenses de fonction publique entre 1997 et 2002

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

En comparaison, les dépenses d'équipement apparaissent comme sacrifiées. L'exemple des dépenses militaires est particulièrement éclairant. En poids relatif, la part des crédits militaires a baissé au sein du budget général. Au sein des crédits militaires, ce sont les dépenses de fonctionnement qui ont été maintenues, au détriment des investissements de défense.

b) L'exécution 2001, symbole de la rigidité de la dépense

En 2001, les dépenses, hors recettes d'ordre venant en déduction des charges brutes de la dette, se sont élevées à 266 milliards d'euros. A périmètre constant, c'est-à-dire en excluant les dépenses exceptionnelles à caractère ponctuel et non reconductible, la hausse s'établit à 1,9 % en valeur et à 0,3 % en volume. Parmi les dépenses, les dépenses civiles ordinaires et les dépenses civiles en capital augmentent, à périmètre constant de 2,7 %. A l'inverse, les dépenses militaires n'enregistrent qu'une faible augmentation, de 0,8 %.

L'exécution du budget 2001 marque bien la forte rigidité des crédits engendrée par l'absence de maîtrise volontariste de la dépense. Près des deux-tiers des crédits touchent aux charges de la dette, les charges de personnel et le fonctionnement courant sur lesquelles les économies sont difficiles. Les marges de manoeuvre en terme de redéploiement de dépenses apparaissent dès lors particulièrement faibles.

Répartition des 266 milliards d'euros de dépenses du budget général en 2001

Source : projet de loi de règlement de 2001

B. UNE DÉRIVE DANS LE BUDGET INITIAL POUR 2002

1. Des prévisions de la loi de finances initiale ...

La loi de finances initiale fixait une norme de progression des dépenses de l'Etat de 0,5 % en volume (2 % en valeur, compte tenu d'une prévision d'inflation de 1,5 %), soit environ 5,2 milliards d'euros supplémentaires à structure constante, ce qui correspondait à la moitié, sur une seule année, de l'objectif triennal d'augmentation des dépenses de l'Etat en volume (+ 1 % dans la programmation 2002-2004).

Le montant brut des dépenses du budget général s'élevait à 331,4 milliards d'euros, dont il convenait de retrancher les remboursements et dégrèvements d'impôts ainsi que les recettes en atténuation des charges de la dette pour en obtenir le montant net :

Passage des dépenses brutes aux dépenses nettes
dans le projet de loi de finances pour 2002

(en milliards d'euros)

Montant brut des dépenses du budget général

A déduire :

Remboursements et dégrèvements

Recettes en atténuation des charges de la dette

331,4

62,7

2,7

Dépenses nettes du budget général

266,0

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Ce montant de 266 milliards d'euros tenait compte de changements de périmètre, toutefois limités dans le projet de loi de finances initiale pour 2002, puisqu'ils portaient sur un montant de - 99,3 millions d'euros, contre + 2,4 milliards d'euros dans le projet de loi de finances initiale pour 2001.

2. ... jugées irréalistes par votre commission des finances

Dans son rapport sur le projet de loi de finances initiale pour 2002, votre rapporteur général notait que les dépenses de 2001 évoluaient dans un sens clairement défavorable et que l'objectif de progression des dépenses ne pouvait donc être tenu qu'au prix d'importants reports sur 2002 dont le présent collectif paie le prix.

Votre rapporteur général écrivait ainsi : « il convient de s'interroger sur la crédibilité de cette norme de progression des dépenses. Elle avait, en effet, été initialement prévue à 0,3 % : l'arbitrage du Premier ministre semble tirer les conséquences de l'extrême difficulté du gouvernement à maîtriser l'évolution des dépenses, tant dans le passé que dans l'exercice en cours. Du reste, le gouvernement n'a jamais respecté, par le passé, la norme de progression des dépenses qu'il s'était fixée[...] ».

II. LE COÛT DU DÉRAPAGE DES DÉPENSES ACTÉ DANS LE PRÉSENT COLLECTIF : 4,96 MILLIARDS D'EUROS

Par lettre circulaire en date du 25 février 2002 dont l'objet était sobrement intitulé « maîtrise des dépenses en gestion 2002 » , le secrétaire d'Etat au budget écrivait aux ministères dépensiers qu'« un dispositif de régulation budgétaire apparaît indispensable pour autoriser le financement des dépenses qui apparaissent en cours d'année, qu'elles résultent d'éléments imprévus ou de réorientations de la politique gouvernementale. Conformément à la tradition républicaine, il convient non seulement de limiter prorata temporis les crédits dont peut disposer l'actuel gouvernement, mais aussi de conserver les marges de manoeuvre permettant au gouvernement qui sera constitué à l'été prochain de mettre en oeuvre la politique souhaitée par nos concitoyens, dans le respect de la norme de dépenses. A cet égard, les dernières prévisions d'inflation pour 2002 aujourd'hui disponibles, inférieures aux hypothèses sur lesquelles a été construit notre budget, conduiront à un resserrement du taux d'évolution des dépenses en valeur ».

La circulaire indiquait que la part des crédits engagés au 31 juillet ne devait pas excéder  60 % des crédits disponibles sur les chapitres du titre III hors rémunérations, sauf pour les dotations globales de fonctionnement pour lesquelles le taux pouvait atteindre 80 %, 50 % des crédits disponibles sur les chapitres du titre IV et 40 % des autorisations de programme sur les chapitres des titres V et VI.

Force est de constater que ce « gel républicain » des crédits, qui ne consistait aucunement en des annulations de crédits, n'a pas empêché le dérapage des dépenses, chiffré par l'audit précité de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse. Il correspond à des dettes des années précédentes non financées et à des insuffisances de crédits en loi de finances initiale pour 2002 afin de couvrir des besoins avérés.

A. UN MONTANT CHIFFRÉ PAR L'AUDIT SUR LES FINANCES PUBLIQUES

L'audit précité a évalué le dérapage brut de l'ensemble -tous budgets- de la dépense pour 2002 à un montant compris entre 10,3 et 10,8 milliards d'euros. En déduisant 3,4 milliards d'euros d'économies réalisables, il fait apparaître un dérapage net compris entre 6,9 et 7,4 milliards d'euros dont 5 milliards au titre du seul budget général.

1. Les raisons d'un tel dérapage

L'audit attribue ce dérapage à plusieurs causes.

La première tient à la croissance plus lente que prévu en loi de finances initiale. Si celle-ci a des répercussions immédiates en recettes, elle a aussi un effet en dépenses. En générant des difficultés sociales, notamment en matière d'emploi, elle entraîne un surcroît de dépenses qui apparaît au premier chef dans les organismes sociaux, mais qui finit, aussi, par affecter l'Etat. L'audit démontre par ailleurs que les dépenses d'aide à l'emploi, à l'emploi des jeunes notamment, à la charge de l'Etat sont plus élevées que prévu.

La deuxième raison s'explique par la montée en charge des dispositifs sociaux nouveaux, comme la couverture maladie universelle (CMU), dont le coût n'apparaît que peu à peu dans son ampleur réelle. L'audit constate également que les coûts induits par le passage aux 35 heures excèdent eux aussi la prévision. Selon MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, « l'ensemble de ces circonstances provoque une pesée diffuse sur les dépenses de l'Etat » .

En matière de dépenses sociales, ils relèvent également l'écart préoccupant entre l'ONDAM (objectif national des dépenses d'assurance maladie) voté et l'ONDAM réalisé, conformément au graphique ci-après :

Evolution entre 1996 et 1997 de l'ONDAM voté et de l'ONDAM réalisé

Source : audit des finances publiques, juin 2002

La troisième raison s'explique par un phénomène propre à l'exécution budgétaire, celui des reports. L'audit montre que les années récentes ont vu s'accumuler une masse importante de crédits reportés qui atteint, fin 2001, près d'un point de PIB. Selon l'audit « tout indique que, après que son gonflement a facilité l'exécution des années antérieures, ce surplomb commence à dégrader l'exécution 2002. »

2. La répartition de la hausse des dépenses

Le gouvernement, dans sa présentation de l'audit, a réparti la dérive des dépenses entre :

- les engagements antérieurs à la loi de finances initiale pour 2002 non payés, l'Etat devant rembourser aux organismes sociaux certaines dépenses dont ils ont fait l'avance (RMI, allocation adulte handicapé...) et devant également régler des arriérés de loyer de la gendarmerie nationale ;

- des dépenses sous-évaluées en loi de finances initiale pour 2002 : sans ouverture de crédits, l'Etat ne serait pas en mesure d'honorer ses engagements de l'année en cours. Ainsi plus d'un milliard d'euros manquent à ce titre dans le domaine social.

Exemples de dépenses sous-évaluées en loi de finances initiale
et d'engagements non financés

(en millions d'euros)

Dettes des années précédentes non financées :

Revenu minimum d'insertion, allocation adultes handicapés 500

Aide médicale 270

Couverture maladie universelle 130

Prestations sociales agricoles 200

Loyers de la gendarmerie nationale 30

Paiement des frais de jury et de changement de résidence par le ministère

de l'Education nationale 25

Crédits électoraux 12

Exonération de cotisations sociales dans les zones franches 300

Insuffisances de crédits en LFI 2002 pour couvrir des besoins avérés :

Prêts bonifiés et interventions agricoles 220

Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante 40

Exonération de cotisations des départements outre-mer et zones franches 170

Aide médicale 180

Couverture maladie universelle 90

Revenu minimum d'insertion 240

Subvention au budget annexe des prestations sociales agricoles 530

Source : dossier de presse du gouvernement de présentation des résultats de l'audit

B. UN COLLECTIF QUI N'EST QUE LA TRADUCTION DE L'AUDIT

1. Un effort de sincérité budgétaire

Selon le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie dans sa présentation du présent collectif devant l'Assemblée nationale, « ce collectif reconstitue ce qui nous semble être la réalité de la loi de finances 2002 et cette reconstitution nous fournit des résultats conformes à ceux de l'audit. S'agissant des dépenses, le projet ouvre des crédits pour un montant proche de 5 milliards d'euros. A défaut, l'Etat n'aurait pas pu honorer ses engagements au titre de l'année 2002 en raison des sous-budgétisations de la loi de finances initiale, ni solder ses dettes antérieures à 2002. Cela concerne particulièrement le domaine social. Certes, ces phénomènes sont classiques. Les technocrates parlent de « reports de charges » : chaque fin d'année, lorsque les crédits sont insuffisants, il arrive qu'on range les factures dans un tiroir et qu'on attende les crédits de l'année suivante pour les payer. Ce qui n'est pas classique, c'est l'ampleur du phénomène ».

Le présent collectif vise donc avant tout à la sincérité budgétaire.

2. 4,96 milliards d'euros d'ouvertures de crédits sur le budget général

Les 4,96 milliards d'euros de crédits ouverts au budget général et se répartissent, selon le gouvernement, comme suit :

Évaluation du collectif juillet 2002

(en millions d'euros)

Dettes des années précédentes non financées

1.808

Insuffisances de crédits en LFI 2002 pour couvrir des besoins avérés

2.497

Accroissement charge de la dette

657

Total

4.962

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Les ouvertures de crédits s'élèvent, pour les dépenses ordinaires civiles, à 3.845 millions d'euros, répartis comme suit :

- mesures sociales : 1.981 millions d'euros ;

- mesures économiques : 810 millions d'euros ;

- interventions internationales, administratives et culturelles : 136 millions d'euros ;

- fonctionnement des administrations et des pouvoirs publics : 217 millions d'euros ;

- dette publique : 701 millions d'euros.

Les ouvertures de crédit pour les dépenses en capital civiles s'établissent à 124 millions d'euros en autorisations de programme et à 265 millions d'euros en crédits de paiement. Elles touchent :

- les mesures économiques : 79 millions d'euros de crédits de paiement ;

- les interventions internationales et environnementales : 110 millions d'euros d'autorisations de programme et 173 millions d'euros de crédits de paiement ;

- les équipements administratifs : 13 millions d'autorisations de programme et 13 millions de crédits de paiement.

En outre, 908 millions d'euros de dépenses militaires se répartissent entre les dépenses ordinaires (opérations extérieures, revalorisation de la condition militaire, loyers de la gendarmerie...) pour 808 millions d'euros, et les dépenses en capital (maintien en condition opérationnelle de l'armée de l'air) pour 100 millions d'euros.

Budget général

Ouvertures de crédits nets associées au présent projet

(en millions d'euros)

DEPENSES CIVILES

Titres I

& II

Titre III

Titre IV

Total

DO

Titre V

Titre VI

Total CP

Total

DO + CP

Affaires étrangères et coopération

27,7

110,0

137,7

137,0

137,0

274,7

Agriculture et pêche

5,6

244,0

249,6

249,6

I. Aménagement du territoire

II. Environnement

Anciens combattants

Charges communes

699,0

48,2

388,1

1.135,2

1.135,2

Culture et communication

7,7

7,7

3,9

3,9

11,6

Economie, finances et industrie

23,5

16,9

40,3

43,2

43,2

83,5

Education nationale

I. Enseignement scolaire

20,0

II. Enseignement supérieur

20,0

Emploi et solidarité

495,0

495,0

495,0

Santé et solidarité

8,0

1.620,0

1.628,0

1.628,0

Ville

Equipement, transports et logement

I. Services communs

8,8

8,8

8,8

II. Urbanisme et logement

III. Transports

11,0

11,0

66,6

66,6

77,6

IV. Mer

2,3

2,3

2,3

V. Tourisme

Total Equipement, transports et logement

8,8

13,3

22,2

66,6

66,6

88,8

Intérieur et décentralisation

100,8

100,89

9,3

9,3

110,1

Jeunesse et sports

Justice

Outre-mer

0,5

0,3

0,8

5,5

5,5

6,3

Recherche

7,0

7,0

7,0

Services du Premier Ministre

I. Services généraux

0,4

0,4

0,4

II. Secrétariat général de la Défense nationale

III. Conseil économique et social

IV. Plan

TOTAL DES BUDGETS CIVILS

699,0

251,1

2.894,5

3.844,6

75,9

189,5

265,4

4.110,0

II. DEFENSE

808,0

808,0

100,0

908,0

TOTAL DU BUDGET GENERAL

699,0

1.059,1

2.894,5

4.652,3

175,9

189,5

365,4

5.018,0

Par ailleurs, 490,9 millions d'euros sont ouverts au titre du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) en raison de l'évolution des dépenses d'assurance maladie et des prestations vieillesse.

Enfin, 1,3 milliard d'euros de charges supplémentaires sont inscrits aux comptes spéciaux du trésor, dégradant d'autant leur solde. Cette dégradation est imputable au compte d'émission des monnaies métalliques n° 906-04.

D'une « cagnotte » de 533 millions d'euros en prévision à un déficit prévisionnel de 767 millions d'euros sur le compte n° 906-04

Le compte d'émission des monnaies métalliques n° 906-04 créé par la loi de finances rectificative pour 1960 retrace les opérations auxquelles donnent lieu l'émission et le retrait des monnaies métalliques. Ce compte, géré par la direction du trésor, a pris une importance toute particulière à l'occasion du passage à l'euro.

En prévision, le compte d'émission des monnaies métalliques faisait état, après des déficits marqués les années précédentes en raison de la prise en compte des coûts de frappe des nouveaux euros, d'un excédent en 2002 en raison d'une demande de pièces en euros supérieure au retour des pièces en francs.

Evolution du compte spécial du trésor

(en millions d'euros)

1997
(réalisé)

1998
(réalisé)

1999
(réalisé)

2000
(réalisé)

2001

2002

2002

prévu

réalisé*

(LFI)

(collectif)

+ 18,03

- 25,12

- 36,42

- 72,51

- 59,61

- 325,17

+ 533

- 767

Pour 2002, la prévision d'un bénéfice exceptionnel lors du passage à l'euro s'expliquait par l'écart entre le nombre de pièces en euros qui devaient être émises et le nombre de pièces en francs qui devaient être retournées.

Détails du compte n° 906-04 pour 2002

En millions d'euros

PLF 2002

Prix de cession facturé au Trésor :

Monnaies courantes

-121,38

Monnaies de collection

- 13,57

Compensation de frais de stockage

- 9,15

Frais de démonétisation des francs

-1,52

Retour des francs

- 1875,12

Emission des euros (primo-émission)

2376,3

Emission des euros (programme 2002)

65,8

Recettes (variation de la circulation monétaire)

66

Solde des opérations diverses

0,46

Remboursement avance

45,73

SOLDE

+ 533

L'exécution budgétaire aura un tout autre visage que ce que la prévision, fondée sur les analyses de la Banque de France, prévoyait. L'exécution 2001 avait déjà enregistré un très fort écart avec la prévision : de - 59,61 millions d'euros à - 325,17 millions d'euros en raison d'un écart sur les coûts de fabrication et d'une forte remontée des pièces en francs au cours des quatre derniers mois de l'année 2001.

Pour 2002, le fort déficit s'expliquerait selon le gouvernement par une moindre utilisation des pièces en euros que prévu. Le passage à l'euro se serait accompagné d'un changement de comportement économique des consommateurs difficile prévisible.

Enfin, en parallèle de ces ouvertures de crédits doit être pris en compte le décret d'annulation du 12 juillet 2002 portant sur un montant de 2.205 millions d'euros de crédits du budget des charges communes. Pour 2.149 millions d'euros, ces annulations portent sur des dégrèvements et remboursements d'impôts et sont selon les informations communiqués à votre rapporteur général la conséquence « mécanique » des baisses de recettes fiscales constatées au cours des premiers mois de l'année. Pour le reliquat, soit 56 millions d'euros, il s'agit d'économies effectives réalisées dans la gestion de la dette.

III. POUR DES DÉPENSES MAÎTRISÉES SUR LA LÉGISLATURE

A. EVITER TOUT DÉRAPAGE SUPPLÉMENTAIRE DANS L'EXÉCUTION 2002

Selon les termes mêmes du dossier de presse du gouvernement, « le collectif n'intègre pas l'impact des mesures conservatoires que le gouvernement mettra en oeuvre dans les prochaines semaines pour éviter la dégradation du déficit au-delà de la situation qu'il a trouvée ».

Comme l'a indiqué le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie devant la commission des finances du Sénat « le collectif n'a pas pu, par construction, prendre en compte tous les facteurs de dérapage de la dépense. Pour éviter d'aggraver le déficit, nous allons prendre des mesures de mise en réserve de certains crédits et de stabilisation du niveau des crédits de report. Conformément à la loi organique du 1 er août 2001, nous communiquerons aux commissions des finances des deux assemblées la totalité de ces mesures, car nous souhaitons une transparence totale vis-à-vis de vous ».

Ces mesures de régulation budgétaire devraient permettre de contenir les dépenses de l'Etat et éviter, en fin d'exercice, tout nouveau dérapage qui dégraderait inévitablement le niveau du déficit budgétaire.

B. UNE PRÉPARATION DE LA LOI DE FINANCES POUR 2003 D'ORES ET DÉJÀ MARQUÉE PAR LA MAITRISE DES DÉPENSES

La lettre de cadrage du Premier ministre M. Jean-Pierre Raffarin adressée le 5 juillet 2002 à tous les ministres constitue le premier et indispensable jalon d'une possible maîtrise des dépenses.

Elle établit tout d'abord un constat : « en 2002, les dépenses relatives à la fonction publique et à la dette représentent 58 % des dépenses du budget général contre 51 % en 1990. En un peu plus de dix ans, la part des dépenses d'intervention et d'investissement dans les dépenses de l'Etat a donc chuté de 7 points. »

Elle établit ensuite un objectif : « cette évolution doit s'inverser pour que l'Etat puisse durablement disposer des marges de manoeuvre nécessaires pour assumer ses responsabilités. »

Elle détermine enfin des principes :

« S'agissant des dépenses de personnel :

« 1° Le recentrage de l'action de votre ministère sur ses missions essentielles est nécessaire [...]

« Pour atteindre cet objectif de réforme de l'Etat et contribuer ainsi au respect de la norme de dépense, vous tirerez pleinement profit, dès 2003, des marges de manoeuvre qu'offrent les progrès technologiques, le départ en retraite d'un nombre croissant d'agents dans les prochaines années, la simplification des procédures et la réorganisation de vos services. Vous devez affecter vos effectifs à la satisfaction des besoins prioritaires des Français ce qui doit vous conduire à ne pas systématiquement remplacer tous les emplois au fur et à mesure des départs.

[...]

« 3° Je vous demande enfin de ne pas proposer de mesures catégorielles.

« S'agissant des autres dépenses :

« 1° Les crédits destinés au fonctionnement courant de l'État, aux établissements publics et à l'équipement immobilier des administrations devront au plus être stabilisés en valeur, au niveau de chaque département ministériel [...].

« 2° Les interventions discrétionnaires de l'État seront systématiquement réexaminées dans une perspective de recentrage sur les priorités du gouvernement et de diminution des autres dépenses. »

Les dépenses du budget général devraient donc progresser en 2003 de 0,2 % en volume par rapport à la loi de finances initiale pour 2002 augmentées des 2,6 milliards d'euros de dépenses récurrentes nouvelles inscrites par le présent collectif. Par rapport à la seule loi de finances initiale pour 2002, la hausse s'établira ainsi à 1,2 % en volume en raison du dérapage des dépenses constaté par le présent collectif.

Votre commission des finances se félicite de l'attention portée par le gouvernement à la maîtrise des dépenses. Celui-ci, au vu du graphique qu'il a présenté à l'occasion de l'audit sur la situation des finances publiques a en effet pris la mesure de la situation si aucune mesure structurelle n'était prise : ainsi le seul poids des dépenses de fonction publique et des charges d'intérêt qui représente déjà 58 % des dépenses du budget général, représenterait 64 % de celui-ci en 2010 et 96 % en 2040 conformément au graphique ci-dessous.

Part des dépenses de fonction publique et des charges de la dette
dans le total des dépenses de l'Etat

Source : dossier de presse du gouvernement de présentation des résultats de l'audit

C. L'AVENIR : TIRER PARTI DU DÉPART À LA RETRAITE D'UN NOMBRE CROISSANT DE FONCTIONNAIRES POUR RÉDUIRE LES DÉPENSES

Le départ à la retraite d'un nombre croissant de fonctionnaires offre une occasion unique d'un redimensionnement de l'État et d'une maîtrise des dépenses de fonctionnement. Le non-remplacement d'une partie d'entre eux, offre, outre de possibles économies budgétaires, la possibilité de tirer enfin profit des gains de productivité enregistrés depuis de nombreuses années grâce aux simplifications administratives et aux nouvelles technologies.

Ces gains de productivité ont longtemps été occultés par le maintien en poste des agents et par l'absence des réformes de structure permettant d'en tirer le meilleur parti. Les départs en retraite prévus dans les prochaines années offrent en outre la possibilité de recruter de nouvelles qualifications, plus adaptées aux missions d'une administration moderne.

1. Un phénomène démographique : la moitié des fonctionnaires va partir à la retraite d'ici 10 ans

Le tableau ci-après présente les prévisions de départs à la retraite d'ici 2015 pour les fonctionnaires civils (hors PTT) des principaux ministères.

Source : rapport spécial de M. Gérard Braun au nom de la commission des finances du Sénat pour le budget 2002 - fonction publique et réforme de l'Etat

Selon le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, « ces données sont à considérer avec prudence car établies sur la base d'un modèle de répartition par ministère relativement grossier, supposant un maintien des comportements de départ actuels sans changement de la réglementation ». Le rythme des départs est fonction de la pyramide des âges de chaque ministère, qui reflète les politiques de recrutement intervenues depuis 30 ans.

On observe globalement une croissance probable du nombre de nouveaux retraités de 47.000 à 69.000 par an d'ici 2008 pour les seuls fonctionnaires civils (hors PTT). Les flux diminueraient ensuite progressivement jusqu'à 60.000 par an en 2015.

Ainsi, les départs de fonctionnaires du ministère de l'éducation nationale, qui représentent actuellement entre 67 et 68 % des sorties de fonctionnaires civils (hors PTT), devraient progresser jusqu'en 2008, pour atteindre un niveau de près de 45.000 sorties puis régresser sensiblement. Pour la plupart des autres ministères, le nombre de départs s'accroît également jusqu'en 2008-2009, mais moins rapidement, puis se stabilise. Vers 2015, les départs de l'éducation nationale ne devraient représenter qu'un peu plus de la moitié des départs de fonctionnaires civils.

L'exemple du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie offre, lui aussi, la perspective d'un nouveau calibrage et d'une nouvelle répartition des emplois et des qualifications. Le nombre de départs à la retraite des agents de ce ministère devrait passer de 5.034 en 2001 à 35.390 en 2006 puis à 82.061 en 2012, les agents de catégorie B et C étant davantage concernés que ceux de catégorie A.

Evolution des départs par catégorie au sein du ministère de l'économie (2001-2012)

Ces évolutions démographiques doivent permettre une redéfinition des effectifs de l'ensemble des ministères plus conforme à leurs missions : réduction des effectifs dans certaines directions s'il y a lieu, redéploiement d'emplois de catégorie B ou C vers des emplois plus qualifiés A ou A+, mise à plat des organigrammes et des organisations.

2. Des économies budgétaires possibles et indispensables

a) 619.200 départs à la retraite sur 2001-2010

De 2001 à 2010, 619 200 fonctionnaires civils devraient partir à la retraite. Le nombre de départs en retraite, en passant de 50.500 en 2001 à 67.000 en 2010, entraînera ainsi, toutes choses égales par ailleurs, un coût cumulé supplémentaire, au titre des pensions de retraite, estimé à 2,42 milliards d'euros en 2010.

A titre de comparaison, le remplacement de 95 % de ces départs nécessiterait 588.200 nouveaux recrutements et engendrerait, hors évolution du point fonction publique , une économie estimée à 980 millions d'euros en 2010 par rapport à une évolution tendancielle basée sur un remplacement à 100 %.

b) Quel taux de remplacement retenir ?

En abaissant le taux de remplacement de 95 % à 75 %, le nombre de fonctionnaires recrutés durant la même période ne serait plus que de 464.000. Par rapport à une stabilisation des effectifs, l'économie annuelle générée en 2010 serait alors, toujours hors évolution du point fonction publique , de 4,8 milliards d'euros.

Économies budgétaires en fonction du taux de remplacement

Modérées sur une année budgétaire, les économies réalisées cumulées sur l'ensemble de la législature seraient plus que substantielles.

Le non-remplacement total des départs en retraite en 2002 permettrait de dégager une économie de l'ordre de 1,8 milliard d'euros en 2002 (pour une réduction d'effectifs d'environ 55.000 fonctionnaires civils). En 2007, hors évolution du point fonction publique, cette économie, estimée à 2,2 milliards d'euros pour le flux des départs de l'année (68.000 départs non remplacés), permettrait d'obtenir une économie annuelle cumulée de 11,6 milliards d'euros, ce qui correspondrait à 365.000 agents non remplacés de 2002 à 2007, soit près de 22 % des effectifs budgétaires de fonctionnaires des ministères civils.

Le remplacement d'un départ sur deux induirait le recrutement de l'ordre de 27.500 fonctionnaires en 2003, soit une économie de 0,9 milliard d'euros, par rapport à une situation de stabilisation des effectifs. En 2007, hors évolution du point fonction publique, cette économie permettrait d'obtenir une économie annuelle cumulée de 5,8 milliards d'euros.

Le non remplacement de 5 % des départs à la retraite nécessiterait 347.000 nouveaux recrutements et engendrerait, hors évolution du point fonction publique, une économie annuelle estimée à 0,6 milliard d'euros en 2007 par rapport à une évolution tendancielle basée sur un remplacement de 100 %.

Par contre, la stabilisation des effectifs de 2001 à 2007 se traduirait, hors évolution de la valeur du point fonction publique, par une progression des dépenses de rémunération au seul rythme des mesures catégorielles et des effets dus au GVT solde 38 ( * ) . Elle ne se traduit donc pas par une économie.

CHAPITRE IV :

LA NÉCESSITÉ D'UNE BAISSE DES PRÉLÈVEMENTS

MALGRÉ DES RECETTES EN DIMINUTION

I. DES ÉVALUATIONS DE RECETTES SURESTIMÉES VOLONTAIREMENT DANS LE BUDGET INITIAL POUR 2002

A. DES PRÉVISIONS REPOSANT SUR UNE HYPOTHÈSE DE CROISSANCE IRRÉALISTE

Pour 2002, le précédent gouvernement avait retenu une hypothèse de croissance du PIB en volume de 2,5 % (4,2 % en valeur). Les recettes nettes du budget général devaient progresser de 2,3 % à structure constante, avec une hausse spontanée de 2,5 % pour les recettes fiscales nettes et un « bond » presque sans précédent de 13,4 % pour les recettes non fiscales. Les recettes du budget général hors recettes d'ordre devaient s'élever ainsi à 233,6 milliards d'euros, soit 5 milliards d'euros de plus que l'exécution prévue pour 2001.

1. Une augmentation des recettes fiscales reposant sur le seul dynamisme de la TVA

Dans la loi de finances initiale pour 2002 les recettes fiscales nettes de l'Etat devaient progresser de 2,2 %, soit 5,4 milliards d'euros en valeur, pour atteindre 250,37 milliards d'euros.

La hausse des recettes fiscales nettes devait s'expliquer presque entièrement par le dynamisme de la TVA avec une hypothèse de 5 % de croissance de la TVA nette des remboursements en 2002 : son produit devait s'établir à 111,3 milliards d'euros, soit un gain de 5,3 milliards d'euros.

Par ailleurs, mais pour des montants plus faibles, la TIPP devait progresser de 4 % soit un gain de 918 millions d'euros. Cette prévision s'appuyait sur l'hypothèse d'un abandon, courant 2002, de la réduction des tarifs consécutive à la mise en place du mécanisme dit de « TIPP flottante » par la loi de finances pour 2001 39 ( * ) .

Concernant les impôts directs, l'impôt sur le revenu devait progresser de 1,1 % en 2002 , pour atteindre 53,97 milliards d'euros malgré la réduction des taux d'imposition décidée par l'article 2 de la loi de finances pour 2001 dont le coût fiscal était estimé à 1,98 milliard d'euros et les mesures de la loi de finances pour 2002 dont le coût s'élevait à 1,348 milliard d'euros, soit au total 3,3 milliards d'euros d'aménagements.

Le précédent gouvernement avait annoncé que la progression tendancielle attendue de l'impôt sur le revenu en 2002 s'établissait à 5,6 %, ce qui reflétait le maintien d'une progression dynamique des revenus des ménages en 2001 et notamment de la masse salariale.

S'agissant de l'impôt sur les sociétés , le produit net devait diminuer de 1,2 milliard d'euros en 2002 (-2,9 %), pour s'établir à 39,96 milliards d'euros sous l'effet du ralentissement de la croissance du bénéfice fiscal des entreprises en 2001 qui se traduisait, en raison du jeu des soldes et acomptes, par une stabilité des recouvrements prévisionnels en 2002, et sous l'effet des conséquences de la suppression progressive de la majoration de 10 % instaurée en 1995.

Les recettes fiscales dans la loi de finances initiale pour 2002

(en millions d'euros)

Désignation des recettes

Résultats 2000

LFI 2001

Evaluations révisées pour 2001

LFI 2002

Evolution 2002/2001

Impôt sur le revenu

52.253

52.445

53.388

53.970

+1,1 %

Impôt sur les sociétés (net des restitutions)

37.702

42.814

41.161

39.960

- 2,9 %

Taxe intérieure sur les produits pétroliers

24.271

25.305

23.172

24.090

4,0 %

Taxe sur la valeur ajoutée (nette des remboursements)

104.750

108.967

105.952

111.254

5,0 %

Recettes fiscales nettes

240.046

248.822

244.970

250.371

2,2 %

Source : loi de finances initiale pour 2002

2. Des prévisions de recettes non fiscales à un niveau jamais atteint

Les recettes non fiscales devaient progresser fortement en 2002, avec une hausse attendue de 14,6 % par rapport au révisé 2001, soit 4,7 milliards d'euros en valeur. Compte tenu de la révision à la hausse des recettes non fiscales en 2001, la hausse par rapport à la loi de finances initiale 2001 s'élevait dans la loi de finances initiale pour 2002 à 5,9 milliards d'euros (+ 18,7 %).

Les ressources provenant des entreprises industrielles et commerciales et des établissements publics à caractère financier devaient ainsi s'élever à 5,67 milliards d'euros contre 3,42 milliards d'euros prévus dans la loi de finances pour 2001. Il y avait donc un quasi-doublement des prélèvements avec une hausse importante des produits des participations de l'Etat dans les entreprises financières (de 815 millions d'euros à 1,4 milliard d'euros) et encore plus significative dans les entreprises non financières (de 1 milliard d'euros à 2,6 milliards d'euros).

Les entreprises plus particulièrement touchées par l'augmentation du produit des participations étaient celles appartenant au secteur de l'énergie (EDF-GDF). Votre rapporteur général avait longuement détaillé ces versements « exceptionnels » dans ses rapports sur le projet de loi de finances pour 2002 et le projet de loi de finances rectificative pour 2001 40 ( * ) .

Produit des participations de l'Etat dans EDF et GDF

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

LFI 2002

EDF

212,0

232,0

217,8

1.219,5

GDF

203,7

5,6

93,8

398

Source : rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2001

La rubrique « divers » servait enfin de variable d'ajustement. Elle passait de 10,8 à 12 milliards d'euros, soit une hausse de 11 %. La hausse essentielle se situait sur le prélèvement de la CADES pour 3 milliards d'euros soit 1,1 milliard d'euros de plus que 2001 suite à un raccourcissement du calendrier des versements de la CADES de 2008 à 2005.

Les recettes non fiscales dans la loi de finances initiale pour 2002

(en millions d'euros)

Désignation des recettes

Résultats 2000

LFI 2001

Evaluations révisées pour 2001

LFI 2002

Evolution 2002/2001

Recettes non fiscales (hors fonds de stabilisation des charges)

30.487

31.897

33.039

37.878

14,6 %

Dont recettes d'ordre

3.039

2.820

2.613

2.716

3,9 %

Dont autres recettes non fiscales (hors fonds de stabilisation des charges)

27.448

29.077

30.426

35.162

15,6 %

Source : loi de finances initiale pour 2002

3. Des prélèvements sur recettes à un niveau élevé

Dans la loi de finances initiale pour 2002, les prélèvements sur recettes étaient évalués à 51,6 milliards d'euros, dont 34,7 milliards d'euros au profit des collectivités locales (+ 9,8 %) et 16,87 milliards d'euros au profit de l'Union européenne (+ 14,8 %).

S'agissant des prélèvements sur recettes au profit des collectivités locales , qui devaient représenter 65,1 % des dotations de l'Etat aux collectivités locales en 2002, l'augmentation s'expliquait essentiellement par le fait que l'Etat devait consacrer 16,49 milliards d'euros à remplacer des ressources locales fiscales par des ressources budgétaires en 2002 soit une augmentation de 23,3 % par rapport à 2001, sous l'effet de la réforme de la taxe professionnelle 41 ( * ) .

S'agissant du prélèvement européen, la progression de la contribution française résultait :

- de la forte croissance du budget communautaire : après un doublement au cours de la dernière décennie, les perspectives financières définies en 1999 à Berlin prévoyaient une hausse de 16 % en termes réels du plafond des crédits de paiement sur la période 2000-2006 ;

- de l'entrée en vigueur de la nouvelle décision ressources propres adoptée par le Conseil le 29 septembre 2000 conformément aux accords de Berlin. Cet aménagement des modalités de calcul des contributions des Etats membres a pris effet au 1er janvier 2002 42 ( * ) .

Les prélèvements sur recettes dans la loi de finances initiale pour 2002

(en millions d'euros)

Désignation des recettes

Résultats 2000

LFI 2001

Evaluations révisées pour 2001

LFI 2002

Evolution 2002/2001

Prélèvements sur les recettes de l'Etat

- 43.512

- 46.838

- 46.339

- 51.607

11,4 %

Au profit des collectivités locales

- 28.852

- 31.669

- 31.643

- 34.737

9,8 %

Au profit des communautés européennes

- 14.660

- 15.169

- 14.696

- 16.870

14,8 %

Source : loi de finances initiale pour 2002

B. DES PRÉVISIONS DE RECETTES INFIRMÉES PAR LA RÉALITÉ

1. Des prévisions critiquées en leur temps par votre rapporteur général

Lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2002, votre rapporteur général avait critiqué tant les évaluations de recettes fiscales que le « formidable bond » des recettes non fiscales.

Votre rapporteur général avait tout d'abord jugé que la « hausse des recettes fiscales pour 2002 témoigne d'un grand optimisme ».

Le précédent gouvernement arguait du fait que la prévision d'élasticité des recettes à la croissance était « prudente » (élasticité = 1), mais votre rapporteur général avait mis en valeur deux éléments :

- d'une part, le précédent gouvernement avait fait le choix d'une croissance « volontariste » si bien que le coefficient d'élasticité, même modéré, s'appliquait à un taux de croissance par définition élevé ;

- d'autre part, si l'élasticité en volume des recettes fiscales s'était révélée bien supérieure à 1 depuis 1999, elle était comprise entre 0,4 et 0,6 de 1994 à 1996 et en 1998. Ainsi, l'affaiblissement de la croissance s'était souvent accompagné d'une diminution sensible de l'élasticité des recettes fiscales alors que la période de forte croissance en 1999 et 2000 avait vu au contraire une « explosion » du coefficient d'élasticité fiscale.

Parmi les évaluations de recettes fiscales, votre rapporteur général s'était plus particulièrement interrogé sur les chiffres de la TVA. La progression attendue de la TVA devait suivre la prévision de consommation des ménages en 2002 (+ 4,3 %), malgré la dégradation de l'indice de confiance de ces ménages au cours du dernier trimestre 2001.

De fait, comme le souligne la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2001, le montant total brut de la TVA collectée en 2001 a été de 136,5 milliards d'euros soit une augmentation de seulement 2,4 % par rapport à l'exercice 2000. La croissance du montant de la TVA nette, soit 105,2 milliards d'euros a continué de se réduire, puisque entre 1998 et 1999 elle a augmenté de 4,6 %, de 2,4 % entre 1999 et 2000 et simplement de 0,4 % entre 2000 et 2001. Les résultats de l'exécution 2001 ont donc été légèrement moins élevés que prévus pour la TVA, si bien qu'il faudrait que la TVA nette fasse un bond de 5,8 % en 2002 pour atteindre le chiffre prévu dans la loi de finances initiale.

S'agissant des recettes non fiscales , votre rapporteur général avait souligné que celles-ci seraient utilisées dès 2002 pour « boucler » le volet recettes du budget de l'Etat, alors même que les hypothèses de croissance retenues par le gouvernement (+ 2,5 % en volume) étaient supérieures pour 2002 à l'exécution 2001 (+ 2,1 %).

Il avait adressé cette mise en garde : « il y a donc là un signe inquiétant de l'utilisation des « marges de manoeuvre » que l'on pourrait justifier en temps de crise mais qui s'explique difficilement alors que le projet de loi de finances pour 2002 anticipe une bonne tenue des recettes fiscales tendancielles en 2002. L'utilisation massive des recettes non fiscales montre que les allégements d'impôts promis par le gouvernement ne sont financés que par le recours à des recettes non pérennes. Il en résultera inéluctablement de graves problèmes d'équilibre budgétaire dans les années à venir » 43 ( * ) .

Evolution des recettes non fiscales 1997-2002

(en millions d'euros)

De fait, les opérations exceptionnelles de l'année 2002 (modifications des versements d'EDF et de GDF, versement exceptionnel de la Caisse des dépôts et consignations, ouverture du capital d'Autoroutes du Sud de la France) ne pourront être reconduites en 2003 dans les mêmes conditions.

2. Des critiques confirmées par l'audit des finances publiques

Au terme de l'audit réalisé par MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, les recettes fiscales nettes estimées à 250,4 milliards d'euros dans la loi de finances initiale subiraient une moins-value de 3,7 à 5,4 milliards d'euros , la fourchette d'estimation s'expliquant par une incertitude sur les rentrées d'impôt sur les sociétés. Seules les rentrées de juin permettent d'obtenir des informations significatives et l'audit n'a pu prendre en compte ces informations.

Cette estimation ne surprend pas votre rapporteur général, qui avait annoncé des moins-values du même ordre, et il est évident que le précédent gouvernement, en retenant une « prévision volontariste » de la croissance, savait très bien ses estimations de recettes surévaluées.

L'audit révèle d'ailleurs que, dès la « réunion d'arbitrage » entre les directions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, en février 2002 , la moins-value était estimée à 3,6 milliards d'euros.

L'audit relève également que les recettes non fiscales , fixées en loi de finances initiale à 35,2 milliards d'euros subiraient une moins-value de - 2,8 à - 3,3 milliards d'euros (dont 1,2 milliard d'euros en raison du report du versement de l'UNEDIC) 44 ( * ) .

Au total, la moins-value sur les recettes fiscales et non fiscales peut donc être estimée entre 6,5 et 8,7 milliards d'euros, soit en moyenne 0,55 point de PIB, avec une marge d'incertitude de l'ordre de - 0,15 point de PIB à la hausse ou à la baisse.

Les incertitudes de l'audit : les perturbations de l'administration fiscale et le niveau de l'impôt sur les sociétés

« La prévision d'évolution des recettes fiscales s'est révélée, en effet, particulièrement difficile en raison de circonstances particulières. Comme on le sait, l'administration fiscale a connu, fin 2001, quelques perturbations informatiques, source de décalages dans le recouvrement de l'impôt, notamment de l'impôt sur le revenu. D'autre part, l'indéniable progrès que constitue la création de la direction des grandes entreprises au sein de la direction générale des impôts induit une perturbation, limitée dans le temps mais réelle, qui modifie, par exemple, les rythmes des remboursements de TVA et d'imputation des recettes. Enfin, le renversement favorable de conjoncture observé au début de 2002 génère, entre les directions du ministère des finances, des différences d'appréciation sur le rythme du recouvrement de l'impôt, dont l'incidence est forte sur le résultat final.

« L'incertitude est particulièrement élevée en ce qui concerne l'IS (il pèse une quarantaine de milliards d'euros), car la détermination de la masse imposable obéit non seulement à la conjoncture de l'année antérieure, mais encore à de nombreux facteurs de prise en compte délicate, comme les anticipations et la politique spécifiques de l'entreprise notamment. Dans ce domaine de la prévision, les surprises - bonnes ou mauvaises - sont fréquentes. Or, en l'espèce, le risque est aggravé d'un effet de calendrier : l'échéance de notre audit - fin juin - nous empêche de disposer des recouvrements de ce même mois, alors que ces recouvrements constitueront les premières données réellement significatives du futur versement global de l'IS 2002. Ces données seront disponibles à la mi-juillet.

« Bien que large, la fourchette retenue ne nous met pas à l'abri d'une surprise ; nous sommes conscients de ce que notre appréciation du besoin de financement de l'Etat s'en trouve fragilisé ».

Source : audit des finances publiques, juin 2002

A contrario, l'audit note de moindres prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne soit une minoration des moins-values de recettes pour environ 0,15 point de PIB .

3. Des estimations en phase avec la dernière situation budgétaire au 31 mai 2002

Au 31 mai 2002, dernière situation mensuelle budgétaire connue, les recettes du budget général sont en retrait (-1,4 %) alors qu'elles devraient progresser de 1,8 % sur l'année. L'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés sont en recul de 3,5 % et 4,3 %, alors que la TVA ne progresse que de 2,2 % contre une hausse prévue de 5,8 %.

Cette situation confirme la surévaluation de la TVA, clairement identifiée par votre rapporteur général, de même que celle de l'impôt sur les sociétés, dont le produit est, il est vrai, plus difficile à appréhender.

Recettes (hors FSC et recettes d'ordre relatives à la dette ; nettes des remboursements & dégrèvements)

Niveau à la fin mai

Variation

en millions d'euros (1)

EXE
2001

LFI
2002

2001

2002

LFI 2002 /
EXE 2001

mai 2002
/ mai 2001

Recettes fiscales (2)

244 850

250 370

104 450

104 280

2,3%

-0,2%

Impôt sur le revenu

53 460

53 970

26 300

25 380

1,0%

-3,5%

Impôt sur les sociétés - net (2)

40 700

39 960

15 050

14 410

-1,8%

-4,3%

Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP)

23 410

24 090

9 240

9 380

2,9%

1,5%

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) - nette (2)

105 160

111 250

44 500

45 500

5,8%

2,2%

Autres recettes fiscales - nettes (2)

22 120

21 100

9 360

9 610

-4,6%

2,7%

Recettes non fiscales (hors FSC et recettes d'ordre relatives à la dette)

31 210

35 160

11 040

11 260

12,7%

2,0%

Prélèvements sur recettes (3)

-46 210

-51 620

-19 240

-20 610

11,7%

7,1%

Recettes du budget général (hors fonds de concours)

229 850

233 910

96 250

94 930

1,8%

-1,4%

Fonds de concours

4 560

--

1 780

1 740

--

-2,2%

Recettes du budget général (y compris fonds de concours)

234 410

--

98 030

96 670

--

-1,4%

(1) chiffres arrondis à la dizaine de millions d'euros, après conversion des résultats en francs pour 2001.

(2) recettes nettes des remboursements et des dégrèvements.

(3) prélèvements au profit des collectivités territoriales et des communautés européennes.

II. LES RÉVISIONS DE RECETTES ASSOCIÉES AU PRÉSENT COLLECTIF

A. DES RÉVISIONS EN LIGNE AVEC L'HYPOTHÈSE « HAUTE » DE L'AUDIT SUR LES FINANCES PUBLIQUES

1. Les moins-values de recettes fiscales : 5,37 milliards d'euros

Le présent projet de loi de finances rectificative retient les hypothèses « hautes » de l'audit en termes de pertes de recettes, soit une moins-value de 5,37 milliards d'euros pour les recettes fiscales et de 3,27 milliards d'euros pour les recettes non fiscales, ce qui fait au total - 8,64 milliards d'euros. Retenir l'hypothèse basse aurait conduit à enregistrer une moins-value de 6,5 milliards d'euros.

Les moins-values fiscales concernent presque exclusivement deux impôts : la TVA (- 2,95 milliards d'euros) et l'impôt sur les sociétés (- 2,54 milliards d'euros).

Les autres modifications portent sur des montants beaucoup plus modestes et concernent essentiellement l'impôt de solidarité sur la fortune (- 180 millions d'euros), les retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes (+ 118 millions d'euros), les mutations à titre gratuit entre vifs (- 110 millions d'euros), les droits d'importation (- 134 millions d'euros) et la cotisation à la production sur les sucres (- 132 millions d'euros).

Les moins-values de recettes fiscales

(en millions d'euros)

Exécution 2001

LFI 2002

PLFR 2002

Ecart

Impôt sur le revenu

52.818

53.528

53.528

-

Impôt sur les sociétés

40.524

39.838

37.300

-2.538

TVA nette

105.164

111.254

108.300

-2.954

TIPP

23.409

24.090

24.090

-

Autres recettes nettes

22.933

21.662

21.784

122

Recettes fiscales nettes

244.848

250.371

245.002

-5.370

Rappel audit

244.970/246.670

-3.700/-5.400

Source : projet de loi de finances rectificative pour 2002

2. Les moins-values de recettes non fiscales : 3,27 milliards d'euros

Les moins-values en recettes non fiscales sont estimées à 3,27 milliards d'euros, soit également la valeur « haute » de l'audit.

Les moins-values viennent essentiellement du report du versement de l'UNEDIC (1,22 milliard d'euros) et de la diminution du dividende versé par les entreprises publiques (- 1,6 milliard d'euros, dont - 0,9 milliard d'euros pour EDF). Par ailleurs, France Telecom versera son dividende sous forme d'actions et non de numéraire, d'où une incidence de 640 millions d'euros.

Pour France Telecom, selon les informations du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le paiement du dividende en actions a fait l'objet d'un point à l'ordre du jour du conseil d'administration du 28 mai dernier. L'attribution des actions remises en paiement du dividende a été réalisée sur la base d'un cours moyen du titre sur les vingt dernières séances, déduction faite d'un euro de dividende et minoré de 10 %, soit 19,66 euros par action. L'Etat a souhaité par cette solution préserver les intérêts de l'entreprise en lui évitant de mobiliser des liquidités aujourd'hui précieuses.

S'agissant du dividende d'EDF, on ne peut parler d'erreur. Mais on doit véritablement s'interroger sur la sincérité du précédent gouvernement lors de la préparation de la loi de finances initiale pour 2002. En effet, sur 1,2 milliard d'euros de recettes inscrites, 900 millions d'euros ne seraient pas, en définitive, perçus soit les trois-quarts du dividende attendu.

Dividende versé par EDF

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

LFI 2002

PLFR 2002

PLFR 2002/LFI 2002

EDF

212,0

232,0

217,9

1.219,5

315,3

- 74,1 %

Votre rapporteur général a obtenu du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, des informations complémentaires sur la très forte diminution du dividende d'EDF. Celle-ci s'expliquerait pour l'essentiel par l'inscription sur la ligne réservée au dividende d'EDF de recettes normalement comptabilisées au titre de l'impôt sur les sociétés.


La révision à la baisse du dividende d'EDF

Le niveau des dividendes retenu en PLF 2002 (1.220 millions d'euros) correspondait à

- 220 millions d'euros équivalant à 37,5 % du résultat net prévu pour le groupe ;

- l'impact sur le dividende, évalué de manière forfaitaire à 1 milliard d'euros, d'une importante reprise de provision au titre de la révision de contrats d'enrichissement avec COGEMA (prévue à plus de 1,5 milliard d'euros) dont les négociations étaient en cours.

Le dividende réalisé est seulement de 315 millions d'euros.

L'écart s'explique par les raisons suivantes :

- tout le bénéfice attendu de la reprise de provision a été présenté en dividende, alors qu'il convenait de distinguer une part dividende (410 millions d'euros) et une part IS (590 millions d'euros) ;

- la reprise de provision a finalement été de 1,3 milliard d'euros (au lieu de 1,5 milliard d'euros) ;

- les résultats de EDF ont été impactés défavorablement par différents événements (moindre revalorisation des tarifs par rapport au contrat, hausse supplémentaire des charges de service public avec notamment la cogénération, pertes sur les filiales en Argentine et au Brésil par provisionnement des risques de change,...).

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Les réponses faites par l'ancien gouvernement aux questions de votre commission relatives aux recettes affichées en provenance d'EDF traduisent une désinvolture particulièrement critiquable. De plus, votre rapporteur général relève que cette entreprise publique sollicite à présent un relèvement substantiel de ses tarifs appliqués aux usagers domestiques, et qui gardent un certain caractère de prélèvement obligatoire. Tout se passe comme si l'Etat, heureux de prélever des ressources budgétaires sur EDF, lui concède en retour la faculté de les récupérer sur ses clients . Une telle méthode n'est pas excellente pour la crédibilité de l'entreprise publique et, là aussi, ne témoigne pas d'une grande volonté de transparence ! Votre rapporteur général espère que le nouveau gouvernement y mettra fin.

Il convient à ce titre de rappeler que lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2002, votre rapporteur général avait eu le plus grand mal à obtenir le détail de la ligne 116 (produit des exploitations industrielles et commerciales et établissements publics à caractère financier) , au motif que « l'estimation des recettes attendues par l'Etat au titre de ses participations dans les entreprises non financières ne devait plus faire l'objet que d'une estimation globale en loi de finances afin d'éviter la divulgation d'informations individuelles non publiques » 45 ( * ) .

En réalité, la ligne 116 aura été grossièrement surévaluée, comme en témoigne le tableau suivant.

Produit des participations de l'Etat dans les entreprises non financières

2001

LFI 2002

PLFR 2002

PLFR/LFI 2002

EDF

217,95

1.219,5

315,3

-74,1%

ERAP

91,47

38,10

0

-100,0%

Française des Jeux

33,54

33,5

57,20

+ 70,7%

France Telecom

640,66

640,6

(1)

-

GDF

93,76

398,2

311,6

-21,7%

Renault

96,99

96,00

69,9

-27,2%

Snecma

93,41

64,20

94,53

+ 47,2%

Air France

27,05

26,00

5,00

-80,8%

Autres

248,21

76,80

77,87

1,4%

Total

1.543,04

2.592,9

931,4

-64,1%

(1) Dividende versé en actions.

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Ainsi, à hauteur d'un milliard d'euros environ, la recette inscrite par l'ancien gouvernement était purement et simplement fictive !

A contrario, une légère plus-value est attendue sur la ligne de contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l'impôt sur les sociétés (+ 114 millions d'euros). Cette plus-value résulte essentiellement d'une opération de régularisation au titre de l'exercice 2001 de 176 millions d'euros, non prévue par la loi de finances initiale.

La ligne 110 (produit des participations de l'Etat dans les entreprises financières), qui doit recevoir les contributions de la Banque de France (450 millions d'euros) et de la Caisse des dépôts et consignations (915 millions d'euros) n'est globalement révisée par le gouvernement que pour 7,3 millions d'euros à la hausse 46 ( * ) .

Par ailleurs, les conséquences de l'adoption probable du projet de loi d'amnistie sur le produit des amendes sont enregistrées pour 270 millions d'euros, dont 65 millions d'euros pour le produit des amendes forfaitaires de la police de la circulation et 205 millions d'euros pour le produit des autres amendes et condamnations pécuniaires.

Conformément aux résultats de l'audit exposés plus haut, le prélèvement au profit de l'Union européenne serait réduit de 1,9 milliard d'euros.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a donné des explications complémentaires sur la réduction du prélèvement européen : « Cette révision résulte de diverses corrections en sens opposés et notamment, la restitution aux Etats membres d'un excédent de l'exercice 2001 du budget des communautés européennes supérieur à la prévision faite en loi de finances initiale, la révision à la baisse des reversements de ressources propres traditionnelles (droits d'importation et droits sur les sucres révisés à la baisse dans le cadre de la révision des recettes fiscales), la révision à la hausse du montant de la correction britannique pour 2001 et la révision des assiettes TVA et PNB de 2002 pour tenir compte de l'évolution de la conjoncture économique ».

B. LES PRIORITÉS NOUVELLES DU GOUVERNEMENT

1. Une baisse de l'impôt sur le revenu très attendue...

Comme le souligne l'exposé des motifs, « le projet de loi de finances rectificative soumis au Parlement concrétise, en premier lieu, l'engagement pris par le gouvernement d'opérer, dès 2002, une diminution de 5 % de l'impôt sur le revenu des Français ».

La baisse de 5 % de l'impôt sur le revenu bénéficiera à 16 millions de foyers dès l'automne, puisqu'elle sera imputée sur le solde de l'impôt 2002. Le coût de cette baisse d'impôt sera de 2,55 milliards d'euros. Il s'agit à l'évidence de montrer à tous les contribuables qu'une autre politique économique est possible : les prélèvements qui pèsent sur les Français seront baissés conformément aux engagements du Président de la République.

Cet allègement s'ajoute aux moins-values fiscales et non fiscales de 8,7 milliards d'euros et à la plus-value de 1,9 milliard d'euros réalisée sur le prélèvement européen. Au total, le collectif affiche donc une diminution des recettes nettes du budget général de 9,3 milliards d'euros.

(en millions d'euros)

Loi de finances initiale

Modifications proposées par le projet de loi de finances rectificative

Situation nouvelle

Ressources du budget général (nettes des remboursements et dégrèvements)

236.632

- 9.298

227.334

2. ... après cinq années d'augmentation des charges pesant sur le travail

Première étape d'une réforme ambitieuse de nos prélèvements obligatoires, la baisse de l'impôt sur le revenu dès cette année est d'abord une mesure symbolique, qui à ce titre ne peut que satisfaire pleinement votre rapporteur général.

Lors de son rapport sur le projet de loi de finances initiale pour 2002, il avait en effet souligné le point suivant : « L'évolution de l'impôt sur le revenu entre 1997 et 2000, même s'il ne mesure qu'une partie de la fiscalité pesant sur les revenus du travail, montre combien les prélèvements sur les revenus d'activité des français ont été un élément important de la hausse formidable des rentrées fiscales de l'Etat pendant cette période. Après une hausse en 1999 qualifiée par la Cour des comptes elle-même « d'exceptionnellement rapide » (+9,8%) l'augmentation de l'impôt sur le revenu est resté dynamique en 2000 avec une progression de 4,7 %, malgré les aménagements de droits.

« Au total, et malgré les allégements en 2000 et 2001, l'impôt sur le revenu aura progressé de 19 % sur la période 1997-2001, soit 8,7 milliards d'euros en valeur ».

Evolution de l'impôt sur le revenu 1997-2001

(en milliards d'euros)

1997

1998

1999

2000

Révisé 2001

2001/1997

2001/1997 en %

Impôt sur le revenu

44,73

46,34

50,86

53,25

53,39

+ 8,66

+ 19,4%

Rappel de l'évolution de l'impôt sur le revenu 1997-2001

(en milliards d'euros)

La diminution de 5 % de l'impôt sur le revenu dès l'automne permettra donc d'enclencher un cycle vertueux de réforme de nos prélèvements obligatoires.

C. QUELQUES PISTES DE RÉFORME DES PRÉLÈVEMENTS OBLIGATOIRES...

Dans son rapport sur le projet de loi de finances initiale pour 2002, votre rapporteur général avait exploré les très nombreuses pistes de réforme de nos prélèvements obligatoires. Il avait détaillé ses propositions dans un chapitre intitulé : « Favoriser davantage l'emploi et l'initiative : les propositions fiscales » 47 ( * ) .

Il apparaît nécessaire, à ce stade, et dans la perspective des prochains débats budgétaires de l'automne 2002, de rappeler les sages préconisations émises au nom de votre commission des finances.

1. L'impact favorable sur la croissance de la combinaison « baisse de l'IR-baisse des cotisations sociales employeurs »

Votre rapporteur général avait mis en valeur le « coin social » qui pèse sur le travail peu qualifié en raison du niveau très important des cotisations sociales en France.

Il avait relevé qu'aucune action d'envergure n'avait été prise par le précédent gouvernement pour réduire ce « coin social » alors que les allègements de charges accordés dans le cadre de la réduction du temps de travail n'étaient décidés que pour compenser de manière tout à fait insuffisante le poids extraordinairement lourd pour les entreprises de la nouvelle législation sur la durée du travail et que le rapport économique, social et financier (joint au projet de loi de finances initiale 2002) rappelait à juste titre que le taux implicite d'imposition du travail avait progressé de 37 % en 1980 à 42 % en 1990 jusqu'à près de 46 % en 2000.

Dans ce cadre, votre commission des finances avait demandé au Centre d'observation économique (COE) de simuler trois modalités de baisse des prélèvements obligatoires :

- une baisse de 1 point de TVA accompagnée d'une baisse de l'impôt sur le revenu de 8 % environ ;

- une baisse de l'impôt sur le revenu de 8 % associée à une baisse des cotisations sociales employeurs de l'ordre de 6,10 milliards d'euros (40 milliards de francs) ;

- une baisse de 1,5 point de TVA combinée à une réduction de l'impôt sur les bénéfices de 5 %.

Il était ressorti de cette étude que l'impact favorable sur la croissance de la combinaison « baisse de l'impôt sur le revenu + baisse des cotisations sociales employeurs » était nettement supérieur à celui des deux autres combinaisons . Une réduction des prélèvements obligatoires est donc extrêmement favorable en termes de croissance et d'emploi dès lors qu'on y intègre une baisse des cotisations sociales employeurs. Celle-ci a en effet un impact direct sur l'emploi et le chômage (grâce à une diminution du coût du travail), un impact désinflationniste qui permet d'améliorer la compétitivité et un effet accélérateur sur l'investissement des entreprises

2. Rendre la France plus attractive

Relevant qu'aucune mesure n'avait été prise pour améliorer l'attractivité fiscale de la France ou pour changer « la nature de notre système fiscal qui décourage l'initiative, le travail, et l'investissement des entreprises », votre rapporteur général avait proposé de s'appuyer sur les propositions du rapport de nos collègues Denis Badré et André Ferrand.

Dans leur rapport sur l'expatriation des compétences, des capitaux et des entreprises 48 ( * ) , nos collègues André Ferrand et Denis Badré ont parfaitement souligné en trois volets les archaïsmes de notre système fiscal :

- une fiscalité des personnes et du patrimoine qui pénalise l'initiative : un impôt sur le revenu très progressif, un impôt sur la fortune arbitraire, des droits de mutation relativement lourds, une imposition des stocks-options instable et illisible etc.

- une fiscalité des entreprises globalement renforcée par une floraison de taxes additionnelles : les moyennes et grandes entreprises sont surtaxées, la France est mal placée par rapport au reste de l'Union européenne avec des impôts spécifiques sur le secteur financier et une fiscalité pénalisante pour les restructurations ;

- un coût du travail globalement accru au détriment de l'image du « site France » : il faut citer le poids écrasant des charges sociales sur les salaires des cadres et l'impact des trente-cinq heures sur le coût du travail.

Ces archaïsmes sont de nature à « disqualifier » la France dans sa compétition avec les autres pays de l'Union européenne.

Votre rapporteur général rappelle en particulier les positions exprimées avec continuité par le Sénat, sur la proposition de votre commission des finances, depuis 1996, en faveur du retour au plafonnement de la cotisation d'ISF par rapport aux revenus. Il lui semble indispensable de donner enfin une suite concrète à ces démarches répétées, et dont le bien-fondé n'est pas contestable.

CHAPITRE V :

L'APPRÉCIATION GLOBALE DES FINANCES PUBLIQUES

Conformément à la démarche initiée lors de l'examen des derniers projets de loi de finances, votre rapporteur général estime qu'il est indispensable de porter un regard d'ensemble sur la gestion des finances publiques françaises.

I. UNE DÉGRADATION DES COMPTES SOCIAUX EN 2002

A. LES CONCLUSIONS DE L'AUDIT SUR LES FINANCES PUBLIQUES

1. La conjonction de deux phénomènes : un « effet de ciseaux »

La dégradation des comptes sociaux en 2002 résulte de deux principaux facteurs d'évolution agissant dans le même sens : le ralentissement de la croissance des recettes d'une part, la très forte augmentation des dépenses d'assurance maladie d'autre part.

a) Le ralentissement de la croissance des recettes

Le rapport d'audit sur la situation des finances publiques rédigé par MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, rendu public le 27 juin 2002, tient compte de la révision des perspectives macro-économiques et fait état d'une révision à la baisse, par rapport à l'année 2001, de la croissance de la masse salariale privée entraînant, de facto , une révision à la baisse des recettes de cotisations et de CSG assises sur cette masse salariale.

Cette croissance passerait des 5 % prévus pour 2002 à 3,9 %, correspondant à une détérioration globale des comptes sociaux de l'ordre de 2,9 milliards d'euros en 2002.

b) La forte augmentation des dépenses d'assurance maladie

Le rapport d'audit précité révèle qu'une nouvelle fois, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM) a été sous-estimé dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.

Voté à + 3,8 % en loi de financement pour 2002, il devrait vraisemblablement s'établir à + 6 %, correspondant à un accroissement des dépenses d'environ 2,9 milliards d'euros.

Ce dépassement porte essentiellement sur les soins de ville, puisque le coût des honoraires et des prescriptions devrait augmenter de 7,4 % au lieu des 3 % fixé au sein de l'ONDAM. En outre, l'évaluation de ce dépassement par le rapport d'audit ne tient pas compte des effets des accords récents portant notamment sur le prix de la consultation à 20 euros.

Taux d'augmentation en %

1999

2000

2001

2002 (p)

Dépenses du champ de l'ONDAM

2,6 %

5,6 %

5,6 %

7,0 %

Dont :

- Soins de ville

- Établissements

3,7 %

7,8 %

3,5 %

7,3 %

4,0 %

8,0 %

6,3 %

Données de remboursements jusqu'en 2001, droits constatés en 2002

Source : rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2002)

Ce rapport retient également un léger dépassement de la dotation globale hospitalière, du fait notamment de la mise en oeuvre des 35 heures dans les établissements hospitaliers, augmentant ainsi les charges de l'assurance maladie. En outre, le risque de report de charge dans ce secteur sur les années ultérieures est souligné, ainsi que celui d'un alourdissement prévisionnel des plans de modernisation en raison de l'expansion des dépenses de santé au sein de l'hôpital. Enfin, il rappelle que le coût croissant des médicaments nouveaux s'observe à l'hôpital comme à la ville.

Outre cette très forte augmentation des dépenses d'assurance maladie, le rapport d'audit précise également, qu'en raison de la dégradation de la situation du marché du travail, l'UNEDIC a du revoir à la hausse ses dépenses en 2002.

2. Le retour du déficit des administrations de sécurité sociale

Le rapport d'audit, compte tenu du reclassement en ODAC du Fonds de réserve des retraites (FRR), fournit les chiffres suivants :

- un déficit d'ensemble du régime général compris entre 3,5 et 3,9 milliards d'euros en comptabilité nationale, correspondant, dans la comptabilité des caisses, à un déficit compris entre 2 et 2,4 milliards d'euros . La dégradation est principalement imputable à la branche maladie, la branche famille reste en excédent tandis que la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) verse, en 2002, au FRR l'excédent de 1,5 milliard d'euros qui solde les comptes de 2001, ce qui met cette caisse en léger déficit en 2002 ;

- un déficit des régimes d'indemnisation du chômage (UNEDIC et AGS) compris entre 1,9 et 2,1 milliards d'euros ;

- un déficit global des fonds spéciaux (FOREC, FSV, FAPA, FCAATA, FCATA) compris entre 0,9 et 1,4 milliard d'euros ;

- un excédent des régimes complémentaires (AGIRC, ARRCO, IRCANTEC, AGFF) de l'ordre de 6,3 milliards d'euros ;

- enfin une situation proche de l'équilibre pour les régimes indépendants et particuliers ainsi que les organismes divers d'administration sociale (hôpitaux).

Au total, le déficit des administrations de sécurité sociale en 2002, selon les définitions de la comptabilité nationale, s'établirait à un montant compris entre 0 et 1,1 milliard de francs, soit - 0,1 point de PIB contre un excédent qui était estimé par le programme pluriannuel 2002-2004 à + 0,6 point de PIB.

B. ... CONFIRMÉES PAR LES PRÉVISIONS DE LA COMMISSION DES COMPTES DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2002

Le 11 juillet 2002, la Commission des comptes de la sécurité sociale a rendu public son rapport sur les résultats en 2001 et les prévisions pour 2002 des comptes de la sécurité sociale.

Dans l'avant-propos de ce rapport, le secrétaire général de la Commission des comptes de la sécurité sociale (CCSS) précise qu'ont été retenues les mêmes hypothèses économiques que l'audit sur la situation des finances publiques mais que les comptes présentés constituent le développement, sur un champ restreint et dans un cadre comptable différent, d'une partie des administrations de sécurité sociale. En outre, ce rapport prend en compte les effets sur la seconde moitié de 2002 des mesures décidées ou approuvées par le nouveau gouvernement dans le domaine de l'assurance maladie, à la différence des conclusions du rapport d'audit.

Dans cet avant-propos, le secrétaire général de la CCSS rappelle également que le régime général de la sécurité sociale avait renoué avec des résultats positifs depuis 1999, bénéficiant d'un contexte économique très favorable, marqué par une forte croissance et surtout par une progression de la masse salariale nettement plus rapide que celle du PIB : « le supplément de recettes généré par cette conjoncture salariale exceptionnelle a permis au régime général de financer de nouvelles dépenses, de prendre part au financement du FOREC et d'abonder le Fonds de réserve des retraites, sans remettre en cause son équilibre financier. Cependant, les charges nouvelles ainsi créées, et les réaffectations de recettes opérées au détriment du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse, ont limité l'ampleur de leurs excédents, leur laissant peu de marge, au sommet du cycle économique, pour affronter des temps moins favorables. La période d'aisance financière du régime général prend fin en 2002 ».

Après trois années d'excédent, le régime général de la sécurité sociale redevient en effet déficitaire en 2002. Ce déficit est estimé par la Commission des comptes de la sécurité sociale à 2,4 milliards d'euros et se concentre sur l'assurance maladie.

1. Un rythme de croissance des recettes sensiblement ralenti en 2002

D'après le rapport de la CCSS, la décélération de la masse salariale du secteur privé, dont dépendent 70 % des recettes du régime général, est de l'ordre de 2,5 points : 3,9 % en 2002 au lieu de 6,4 % en 2001. Cet écart ne se retrouve pas intégralement sur les recettes du régime général, qui avaient progressé moins vite que la masse salariale au cours de deux dernières années en raison de la réaffectation de certaines recettes.

En 2002, les recettes du régime général augmenteraient de 4 %, ce qui représente un supplément de l'ordre de 8,9 milliards d'euros.

En outre, pour assurer le financement du FOREC et l'abondement du FRR, certains impôts et taxes affectés au régime général ont été transférés au FOREC, au FSV et au FRR en 2002. Ces transferts auraient, d'après la CCSS, un impact net négatif sur les comptes du régime général de près de 650 millions d'euros en 2002 par rapport à 2001.

Le rapport de la CCSS rappelle ainsi que le financement des exonérations de charges, dans le cadre de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail, a été assuré en partie par le régime général et le Fonds de solidarité vieillesse : « si l'on tient compte du transfert des droits alcool du FSV au FOREC, la sphère sociale a supporté plus du tiers du financement des allégements FOREC en 2000. En 2001, le FOREC a pu prendre en charge l'intégralité des exonérations et dégager un excédent en partie grâce à des recettes transférées du régime général et du FSV. La part du financement des exonérations ainsi mise à la charge de la sphère sociale est évaluée à 27 %. Elle serait de 29 % en 2002, soit 4,5 milliards d'euros, dont 1,4 milliard en provenance de la CNAM et 3,1 milliards du FSV ».

Enfin, le régime général participe également au financement du Fonds de réserve des retraites (FRR). Les transferts vers le FRR ont pris partiellement la forme d'une affectation de recettes. Les pertes de recettes correspondantes sont de l'ordre de 300 millions d'euros en 2002 pour le régime général. A ces transferts de recettes s'ajoute l'affectation au FRR des excédents en droits constatés de la CNAV et du FSV. Les excédents de 2000 ont permis d'abonder le FRR de 770 millions d'euros en 2001. L'excédent de la CNAV en 2001 permettra d'abonder le fonds de 1,5 milliard d'euros en 2002.

A cet égard, le rapport de la CCSS relève le paradoxe suivant : « tant que la CNAV dégage un excédent, le régime général est tenu de le verser au Fonds de réserve des retraites même s'il est globalement déficitaire. Cette configuration - excédent de la CNAV mais déficit du régime général - qui devrait être celle de 2002, a pour conséquence de dégrader le déficit de trésorerie du régime par rapport à son déficit comptable ».

2. Une nouvelle accélération des dépenses du régime général en 2002

En 2002, les dépenses du régime général connaissent des taux de croissance très élevés, notamment les dépenses entrant dans le champ de l'ONDAM.

La branche maladie supporte en effet en 2002 des dépenses supplémentaires qui s'ajoutent à une tendance en accélération depuis trois ans. L'ONDAM 2002 devrait être largement dépassé. Son montant, tous régimes, avait été fixé à 112,8 milliards d'euros dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, ce qui correspondait à une augmentation de 4 % par rapport à la base 2001 retenue. La croissance des dépenses du champ de l'ONDAM est aujourd'hui estimée à 7 % pour 2002, ce qui constitue le taux le plus élevé enregistré depuis la mise en place de l'objectif.

Les soins de ville connaissent l'augmentation la plus vive, au sein des dépenses d'assurance maladie, et expliquent l'essentiel de l'évolution de l'ONDAM, dont ils représentent à peu près la moitié des dépenses. A l'intérieur de cette enveloppe, les dépenses de médicaments sont celles qui croissent le plus rapidement. En outre, les dépenses relatives aux honoraires des professionnels libéraux s'accélèrent fortement en 2002 sous l'effet des revalorisations tarifaires négociées au début de l'année puis en juin 2002 : le coût pour l'assurance maladie des mesures nouvelles est estimé à 790 millions d'euros en 2002. Elles contribuent pour 1,6 point à l'augmentation des soins de ville et pour 0,7 point à celle de l'ONDAM.

Les dépenses au titre des établissements de santé (principalement la dotation globale hospitalière) progressent vivement en 2002 en raison notamment du passage aux 35 heures dans les hôpitaux et dans les établissements médico-sociaux.

S'agissant des dépenses des autres branches du régime général, on peut noter que le rythme d'augmentation des prestations vieillesse est temporairement ralenti en raison du creux démographique de la seconde guerre mondiale, que les prestations familiales s'accélèrent en raison des mesures nouvelles de 2001 et 2002, qu'enfin les dépenses de la branche accidents du travail au titre de l'amiante connaissent depuis 2001 une croissance soutenue qui devrait se poursuivre dans les années à venir.

À cet égard, le rapport de la CCSS rappelle l'existence de charges futures certaines pour le régime général du fait du financement de nouvelles dépenses d'indemnisation, notamment pour les victimes de l'amiante ou pour les victimes d'accidents thérapeutiques.

Variation des recettes et des dépenses du régime général en %

2000

2001

2002

Recettes = produits

Dépenses = charges

4,0 %

3,9 %

5,0 %

4,7 % *

3,9 %

5,6 %

* la provision passée dans les comptes 2001 au titre de la créance FOREC pour 2000 réduit d'un point la progression des produits en 2001 ; hors provision, celle-ci aurait été de 6 % (et de 2,9 %en 2002).

Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2002)

3. Des comptes du régime général à nouveau déficitaires en 2002

Après trois années excédentaires, le régime général de la sécurité sociale serait déficitaire en 2002 de 2,4 milliards d'euros d'après les prévisions de la CCSS.

Ce déficit serait concentré sur la branche maladie, seule branche déficitaire en 2002 avec un déficit de 5,6 milliards d'euros. La branche vieillesse ainsi que la branche famille continueraient de dégager des excédents substantiels, supérieurs à 1 milliard d'euros, tandis que la branche accidents du travail présenterait un léger excédent de 400 millions d'euros.

Résultats du régime général de la sécurité sociale

(en milliards d'euros)

Résultats de la branche maladie de la sécurité sociale

(en milliards d'euros)

D'après le secrétaire général de la CCSS dans son avant-propos, « ces écarts traduisent des divergences bien connues dans la tendance des prestations - lente pour la famille, temporairement modérée pour les retraites, vive pour la maladie - mais ils ont parfois été accentués par des décisions d'affectation de recettes, comme le transfert de droits sur les tabacs et les alcools de la CNAM au FOREC en 2001, qui introduisent une part d'arbitraire dans l'évolution des soldes par branche ».

Le FOREC devrait, quant à lui, être déficitaire de 360 millions d'euros en 2002 tandis que le déficit du FSV atteindrait 1,3 milliard d'euros en 2002, soit un ordre de grandeur voisin des réserves accumulées par le Fonds à la fin de 2001.

Le rapport de la CCSS en conclut donc que, « au total, c'est l'ensemble régime général - FSV - FOREC qui se trouve dans une situation fortement déficitaire en 2002 ».

Résultats du régime général

(en milliards d'euros)

1999

2000

2001

2002 (p)

Maladie

Accidents du travail

Vieillesse

Famille

- 0,7

0,2

0,8

0,2

- 1,6

0,4

0,5

1,4

- 2,1

0

1,5

1,7

- 5,6

0,4

1,7

1,1

Total

0,5

0,7

1,1

- 2,4

Source : rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2002)

II. LA COMPLEXITÉ CROISSANTE DES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LA SÉCURITÉ SOCIALE

A. LA COMPLEXITÉ DES COMPTES SOCIAUX

Le rapport d'audit sur la situation des finances publiques a souligné « l'illisibilité croissante des comptes sociaux ».

Si la complexité de la lecture des comptes sociaux n'est pas un phénomène récent, c'est son aggravation au cours de la dernière législature qui inquiète. Cette complexité résulte à la fois de la création de multiples fonds, « là où une simple ligne de comptabilité analytique suffirait », et de la substitution aux cotisations, clairement affectées aux régimes, de ressources de nature fiscale.

Le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de juillet 2002 explicite cette réforme du financement de la sécurité sociale : « la double nécessité de financer le FOREC et d'abonder le Fonds de réserve des retraites a conduit depuis 2000 à des transferts de recettes de nature fiscale entre le régime général, le Fonds de solidarité vieillesse et ces deux fonds. Ces mouvements sont apparus d'autant plus complexes qu'ils ont donné lieu à des transferts internes à la sphère sociale (régime général et FSV), tant de recettes que de charges ».

En outre, l'apport de recettes à la sécurité sociale, sous la forme de transfert ou de création d'impôts et taxes, n'a pas compensé intégralement le coût des exonérations de charges. Une partie de leur financement s'est reportée sur les régimes de sécurité sociale et le FSV. Le bilan de l'ensemble de ces mouvements pèse sur l'équilibre financier de la sphère régime général - FSV depuis 2000, à hauteur de 2,2 milliards d'euros en 2000 et de 4,5 milliards d'euros en 2002.

Le rapport d'audit rappelle également que l'enregistrement de ces flux financiers entre l'Etat et les organismes de sécurité sociale obéit à des règles différentes selon qu'il s'agit de l'Etat ou d'un organisme social de sorte qu'une même somme peut ne pas être comptabilisée sur la même année par celui qui la paye et celui qui la reçoit. En outre, ces règles d'affectation de ressources changent substantiellement tous les ans, si bien que, au final, « l'obscurité de cet inextricable dédale pose un problème général d'efficacité publique ».

Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2001, la Cour des comptes a également souligné l'extrême complexité des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale en rappelant notamment que la frontière entre les dépenses à la charge de l'Etat et celles financées par la sécurité sociale reste mouvante et parfois en contradiction avec l'objet de ces dépenses. Par ailleurs, la Cour des comptes fait état de l'absence de solution définitive quant au sort des créances de l'ACOSS sur l'Etat au titre du FOREC au 31 décembre 2000. Ces créances sont provisionnées dans les comptes des organismes de sécurité sociale, dans l'attente d'une loi de finances, qui seule pourrait annuler cette dette de l'Etat, afin de permettre aux organismes créanciers de les passer en non valeur.

A l'évidence, il appartiendra au gouvernement actuel de lancer, sans tarder, le chantier destiné à clarifier ce dédale inextricable, peu conforme à l'exigence démocratique de transparence. Plus précisément, votre rapporteur général souhaite :

- qu'un effort méthodologique soit conduit, avec les commissions parlementaires compétentes, pour définir de manière stable le partage des ressources et des dépenses entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale ;

- que soit envisagée la suppression des outils inutilement complexes, facteurs de confusion des responsabilités, qui se sont multipliés ces dernières années ;

- que la présentation, à l'ouverture de la prochaine session et conformément à la loi organique, d'un document consolidé faisant apparaître l'évolution globale des prélèvements obligatoires et leur répartition par grandes masses, soit un premier pas vers plus de transparence.

La complexité croissante des relations financières entre l'Etat et les organismes de sécurité sociale

Etat Affectation de ressources

FOREC

Transferts de recettes

Compensation des

exonérations Compensations

Transferts de recettes

de prestations des exonérations

de RTT

REGIME GENERAL

Transferts de recettes

transferts remboursement

recettes des prestations et

excédents transferts chômage

CNAVTS

Transferts de recettes FSV

transferts

CSG

FRR excédent du FSV si résultat positif

Chômage APA

AGIRC ARRCO

Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2002)

B. LA NÉCESSAIRE SINCÉRITÉ DES OBJECTIFS DE DÉPENSES FIXÉS EN LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE

À cette complexité croissante des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale, s'ajoute un manque flagrant de réalisme dans la fixation des objectifs de dépenses en loi de financement de la sécurité sociale et notamment de l'objectif de dépenses d'assurance maladie.

La sous-estimation récurrente de l'ONDAM en loi de financement nuit à la transparence des comptes sociaux et entraîne in fine un sentiment de découragement et d'incompréhension chez les professionnels de la santé.

Votre rapporteur général souhaite donc qu'à l'avenir les objectifs de dépenses soient fixés sur la base d'hypothèses économiques réalistes et non volontaristes et hors d'atteinte.


Les écarts par rapport à la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002

Les comptes du régime général en 2001 se sont révélés bien meilleurs que prévus dans les comptes associés à la LFSS pour 2002. Le résultat net du régime général est supérieur de 700 millions d'euros à celui prévu à la rentrée 2001. Si on neutralise la dotation aux provisions au titre de la créance sur les exonérations « bas salaires et RTT » non prise en compte dans les comptes associés à la loi, l'écart est plus important et atteint 2,9 milliards d'euros. Cette amélioration est largement due à la non prise en compte de l'erreur sur les produits à recevoir sur l'exercice 2000 (sous-estimation des produits 2000 qui servaient de référence au calcul des produits 2001) et à une prévision de croissance de la masse salariale sous-estimée de 0,6 point dans la LFSS. Les recettes supplémentaires (+ 3,7 milliards d'euros) sont largement supérieures au surcroît de dépenses qui s'est avéré être de l'ordre de 0,8 milliard d'euros (essentiellement sur les dépenses d'assurance maladie).

Les comptes du régime général pour 2002 seraient dégradés de 3,2 milliards d'euros par rapport à la prévision associée à la LFSS. La révision à la baisse des hypothèses macro-économiques (masse salariale de 3,9 % contre 5 %) est en partie compensée par des recettes 2001 bien supérieures à celles prévues (« effet de base »). Les prévisions actuelles de recettes sont en retrait de 800 millions d'euros par rapport à la LFSS. Ce sont les charges qui expliquent alors l'essentiel de l'écart (2,4 milliards d'euros). Les prestations maladie, revues à la hausse de 2 milliards d'euros, expliquent l'essentiel de l'écart entre la prévision actuelle et celle retenue dans le cadre de la FLSS 2002.

Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale (juillet 2002)

III. LES COLLECTIVITÉS LOCALES ET LE SOLDE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES EN 2002

A. UNE CONTRIBUTION POSITIVE MAIS EN BAISSE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES LOCALES

1. Les conclusions de l'audit

L'audit de la situation des finances publiques rendu public le 27 juin 2002 confirme que, cette année encore, les administrations publiques locales 49 ( * ) devraient dégager un excédent budgétaire, réduisant par là le déficit global des administrations publiques. La capacité de financement des administrations publiques locales en 2002 est évaluée entre 1,8 milliard d'euros et 2,2 milliards d'euros, soit 0,1 point de PIB. L'excédent dégagé en 2001 représentait 0,2 point de PIB.

Evolution du solde de l'Etat et des administrations publiques locales

(en points de PIB)

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002 (hypothèse basse)

2002 (hypothèse haute)

Etat

- 3,7

- 3,6

-3,0

- 2,5

-2,4

-2,3

-3,0

-3,2

Administrations publiques locales

+ 0,1

+ 0,2

+ 0,3

+ 0,3

+ 0,2

+ 0,2

+ 0,1

+ 0,1

Source : audit des finances publiques, juin 2002

Pour les seules collectivités locales, le rapport de notre collègue Joël Bourdin au nom de l'observatoire des finances locales évalue la capacité de financement à 1,1 milliard d'euros en 2001 contre 1,8 milliard d'euros en 2000 et 2,9 milliards d'euros en 1999.

2. Un excédent menacé

L'audit explique la capacité de financement des administrations publiques locales par le fait que « les ressources des collectivités territoriales - ressources fiscales, autres ressources propres (comme les ventes de biens et service par exemple) et transferts en provenance de l'Etat - sont supérieures à l'ensemble des dépenses courantes et d'investissement : globalement, les collectivités territoriales, prises comme un tout, se désendettent ».

Le désendettement n'est d'ailleurs pas la conséquence d'un excès de recettes par rapport aux dépenses mais un choix de gestion des collectivités locales. Depuis 1997, le montant des remboursements est supérieur à celui des emprunts nouveaux. Les remboursements d'emprunt, après avoir marqué le pas en 2001 par rapport à 2000 en passant, selon la direction générale de la comptabilité publique, de 1,9 milliard d'euros à 1,4 milliard d'euros, pourraient retrouver une nouvelle vigueur en 2002. La note de conjoncture de Dexia-Crédit local de France de juillet 2002 évalue leur montant à 2,1 milliards d'euros. Par ailleurs, selon la même étude, l'année 2002 marquerait la fin de la tendance progressive au redémarrage des emprunts.

La dégradation en 2002 du solde des administrations publiques locales pourrait s'expliquer par la poursuite du mouvement esquissé en 2001 et se traduisant, schématiquement, par une progression des dépenses de fonctionnement plus rapide que celle des recettes de fonctionnement, cependant que les investissements continuent d'être réalisés à un rythme soutenu, quoique variable selon les années.

L'analyse des budgets primitifs pour 2002 des départements et des régions à laquelle se livre notre collègue Joël Bourdin illustre cette situation : les dépenses de fonctionnement devraient progresser de 11,5 % contre 8,1 % pour les recettes de fonctionnement, tandis que les dépenses d'investissement augmenteraient de 6,8 %, un taux inférieur à celui de 2001 mais pratiquement deux fois supérieur à celui de 2000. L'augmentation des dépenses d'investissement serait de 1,1 milliard d'euros contre une progression de 0,4 milliard d'euros pour les recettes d'investissement hors emprunt.

La principale cause d'augmentation des dépenses de fonctionnement reste, comme les années précédente, les frais de personnel en raison d'une nouvelle hausse du point d'indice, du coût de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail et des recrutements prévus, pour résorber par exemple une partie des emplois-jeunes, mais aussi par les départements qui assurent la gestion de la nouvelle allocation personnalisée d'autonomie.

Les conseils généraux devront de surcroît assurer, en régime de croisière, le financement d'environ les trois-quarts du coût de cette allocation, ainsi que la prise en charge de l'augmentation toujours croissante du coût des services départementaux d'incendie et de secours. Les régions, pour leur part, assurent pour la première année l'exercice de la compétence en matière de transport ferroviaire, pour lequel elle bénéficient d'une compensation financière (dont le montant serait inférieur à celui des dépenses inscrites dans leurs budgets primitifs).

L'investissement est pour sa part, comme c'est souvent le cas dans l'année qui suit les élections municipales, tiré principalement par les régions et les départements et s'explique par la mise en oeuvre des contrats de plan Etat-régions ainsi que par l'application des normes environnementales et de sécurité.

Les recettes évoluent de manière moins dynamique que les dépenses. S'agissant des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales, l'année 2002 est marquée par taux de progression historiquement élevé de la dotation globale de fonctionnement (DGF), qui représente les deux tiers de l'enveloppe normée des concours de l'Etat aux collectivités locales. Le taux de progression de 4,67 % permet à la DGF d'augmenter de 827 millions d'euros 50 ( * ) . Ce montant est à comparer avec celui du coût supplémentaire en 2002 des dispositions du protocole du 10 février 1998 relatif à la rémunération des agents de la fonction publique, qui s'élève à 440,58 millions d'euros, soit la moitié de la progression de la DGF.

Pour faire face à leurs dépenses nouvelles, les collectivités locales, et en particulier les départements, ont donc choisi en 2002, pour la première fois depuis 1996, d'augmenter les taux de leur fiscalité directe dans une proportion plus importante que l'année précédente.

L'évolution esquissée en 2001 et confirmée en 2002 conduit à modifier le diagnostic porté sur la situation des finances locales depuis le milieu des années 90. Les conséquences de la politique de transferts de charges menée par le gouvernement précédent étaient ces dernières années partiellement masquées par les bienfaits du « cercle vertueux » enclenché au milieu des années 90, caractérisé par la maîtrise des dépenses de fonctionnement et le désendettement et qui permettaient aux collectivités locales de réaliser « des performances unanimement saluées ».

Dans le tome I de son rapport sur le projet de loi de finances pour 2000, votre rapporteur général insistait cependant sur le « fragile excédent des collectivités locales », menacé par « l'asphyxie financière » et le « poids des charges nouvelles ». En 2001, il relevait déjà « une progression des dépenses plus rapide que celle des recettes », constat renouvelé lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2002.

Aujourd'hui, l'optimisme recule car, malgré une rigueur de gestion globalement intacte, les collectivités locales, pour faire face à leurs charges nouvelles qui constituent autant de dépenses obligatoires, semblent n'avoir comme seules perspectives que la réduction de leur excédent, l'augmentation des taux de leurs impôts 51 ( * ) , la baisse de leurs dépenses d'investissement, le recours accru à leurs réserves financières, la réduction de leur désendettement ou l'augmentation de leurs emprunts. L'Etat risque de ne bientôt pouvoir compter que sur lui-même sur le chemin sinueux et pentu du retour à l'équilibre des finances publiques.

B. LES RELATIONS FINANCIÈRES ETAT-COLLECTIVITÉS LOCALES MINÉES PAR LE POIDS DES COMPENSATIONS D'EXONÉRATIONS FISCALES

1. Le résultat de la politique de recentralisation financière menée depuis cinq ans

Entre la loi de finances pour 1998 et la loi de finances pour 2002, le coût pour l'Etat des compensations d'exonérations fiscales versées aux collectivités locales a été multiplié par 3,6, soit une progression de 264 %. Il s'établit à 16,5 milliards d'euros en 2002 52 ( * ) contre 4,5 milliards d'euros en 1998.

Cette progression de 12 milliards d'euros du coût des compensations est le résultat de la politique de recentralisation financière menée depuis 1998, et consistant à supprimer certains pans de la fiscalité locale afin d'en rendre les imperfections plus supportables pour les contribuables tout en faisant l'économie d'une réforme en profondeur.

Les principales mesures prises dans ce cadre sont tout d'abord la suppression de la fraction de l'assiette de la taxe professionnelle assise sur les salaires, qui se traduit par un coût de 7,8 milliards d'euros dans la loi de finances pour 2002 (le coût net pour l'Etat étant cependant limité à 4,8 milliards d'euros en raison des différentes mesures d'accompagnement et des conséquences sur le produit de l'impôt sur les sociétés) mais aussi l'uniformisation du taux des droits de mutation perçus par les départements, la suppression de la taxe additionnelle régionale sur les droits de mutation à titre onéreux, la suppression de la part régionale de la taxe d'habitation et la suppression presque intégrale de la taxe différentielle sur les véhicules à moteur (« vignette »).

Le coût des compensations des principales mesures fiscales intervenues au cours de la précédente législature

(en millions d'euros)

Crédits consommés

1999

2000

2001

Total

TP

1.975

3.466

5.389

10.829

DMTO région

776

783

809

2368

DMTO département

541

1.248

1.291

3.080

TH

0

0

927

927

Vignette automobile

0

0

1.888

1.888

Total

3.292

5.496

10.304

19.093

Source : rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour 2001

Votre commission souligne depuis quatre ans les conséquences dommageable d'une telle politique pour le budget de l'Etat. En effet, les compensations sont des dépenses de transfert passives et particulièrement rigides puisque, sauf à revenir sur la parole donnée, l'Etat ne peut en moduler le montant au gré des fluctuation de sa situation financière 53 ( * ) .

2. Quel avenir pour l'enveloppe normée des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales ?

Les relations financières entre l'Etat et les collectivités locales, ou du moins la partie de ces relations consacrées aux concours dits « actifs » aux collectivités locales, sont régies depuis 1996 par le système dit de l' « enveloppe normée ».

En 2002, le périmètre de l'enveloppe normée englobe des dotations dont le montant s'élève à 28,1 milliards d'euros.


Le fonctionnement de l'enveloppe normée

L'ensemble des dotations actives de l'Etat 54 ( * ) , auquel s'ajoute la dotation de compensation de la taxe professionnelle (DCTP), est regroupé dans une enveloppe dite « normée ». Le montant total de l'enveloppe évolue chaque année en fonction d'un indice prévu par la loi. Pour les années 1996, 1997 et 1998, l'indice résultait des dispositions de l'article 32 de la loi de finances pour 1996 dans le cadre du « pacte de stabilité et de croissance ». Pour les années 1999, 2000 et 2001, l'indice était prévu par les dispositions de l'article 57 de la loi de finances pour 1999 relatives au « contrat de croissance et de solidarité ». En 2002, le gouvernement a renoncé au principe d'une enveloppe triennale et a reconduit le régime applicable en 2001.

Au sein de l'enveloppe, chacune des dotations « actives » évolue chaque année en fonction de son taux d'indexation prévu par la loi. La DCTP joue le rôle de variable d'ajustement, son montant correspondant à la différence entre le montant total de l'enveloppe et celui de la somme des montants des dotations « actives ».

Entre 1996 et 1998, le taux d'indexation de l'enveloppe normée était le taux d'évolution des prix à la consommation hors tabac. Entre 1999 et 2002, l'enveloppe normée progressait en fonction d'un indice comprenant à la fois le taux d'évolution des prix et une fraction du taux de croissance du produit intérieur brut (20 % en 1999, 25 % en 2000 et 33 % en 2001 et en 2002). En pratique, le taux d'évolution de l'enveloppe a toujours été inférieur a celui de la somme des montants des dotations « actives », si bien que le montant de la variable d'ajustement décroît d'année en année.

L'objectif de ce système de plafonnement sur trois ans de l'évolution d'une partie des concours financiers de l'Etat, aux collectivités locales est de fournir aux élus locaux des indications s'agissant de l' évolution pluriannuelle de leurs ressources versées par l'Etat, tout en associant les collectivités locales à l'effort de maîtrise des dépenses publiques .

Entre 1999 et 2002, le système de l'enveloppe normée s'est accompagné de mesures en faveur des collectivités « défavorisées » , d'une part en exonérant en tout ou partie les collectivités « défavorisées » des conséquences négatives de l'existence de l'enveloppe normée sur le montant des attributions versées au titre de la DCTP, et, d'autre part, en accroissant le montant de la dotation de solidarité urbaine (DSU), de la dotation de solidarité rurale (DSR) et du fonds national de péréquation (FNP). Par ailleurs, à compter de 2000, la dotation globale de fonctionnement a bénéficié d'abondements destinés à compenser l'augmentation du coût de la DGF des structures intercommunales à la suite de la création de la catégorie des communautés d'agglomération 55 ( * ) .

Dans la loi de finances pour 2002, le coût pour l'Etat de ces « mesures d'accompagnement » du contrat de croissance s'élevait à 121,96 millions d'euros, pour la majoration du montant de la DSU, 22,87 millions d'euros pour la majoration du montant de la DSR, 22,87 millions d'euros pour celle du montant du FNP et 183 millions d'euros pour l'abondement de la dotation d'intercommunalité 56 ( * ) , soit au total un effort supplémentaire de l'Etat de 350 millions d'euros . Cet effort supplémentaire est dit « hors enveloppe », c'est à dire qu'il n'est pas pris en compte dans le calcul de l'enveloppe normée, de manière à ne pas peser sur le montant de la DCTP.

Le projet de loi de finances pour 2003 devra aborder la question de la reconduction du système de l'enveloppe normée et tirer les leçons de six années d'application de ce régime :

- la première leçon est que la pratique des abondements exceptionnels, dont la reconduction pour l'année suivante était parfois garantie par la loi, mais pas toujours, a permis de limiter les conséquences de la baisse continue de la DCTP mais a, dans le même temps, réduit considérablement la lisibilité de l'évolution des concours financiers de l'Etat que l'enveloppe normée était censée procurer ;

- en revanche , l'enveloppe a joué son rôle de plafonnement du montant des concours de l'Etat aux collectivités locales puisqu'elle est construite de telle façon que le montant de la DCTP ne peut que baisser d'une année sur l'autre, la baisse étant d'autant plus élevée que les autres dotations composant l'enveloppe progressent fortement. Les économies réalisées sur la DCTP ont permis à l'Etat de financer tout ou partie, selon les années, des abondements exceptionnels consentis aux collectivités défavorisées.

En réalité, le système de l'enveloppe normée apparaît moins comme un régulateur des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales que comme le mode de calcul du taux d'indexation d'une année sur l'autre de la DCTP.

Dans les mois qui viennent, la question se posera de l' utilité de proroger un tel système sachant que, d'une part, les économies sur la DCTP permises par le contrat de croissance semblent désormais de portée limitée en comparaison de l'augmentation annuelle du coût pour l'Etat de la compensation des exonérations d'exonérations d'impôts locaux et que, d'autre part, l'incorporation à la DGF de la compensation de la suppression de la part « salaires » de l'assiette de la taxe professionnelle à compter de 2004 provoquera une augmentation d'environ 50 % du montant de cette dotation, donc de la masse de l'enveloppe et que, dans ces conditions, la DCTP, rapidement menacée d'extinction, ne pourra plus assumer longtemps son rôle de variable d'ajustement.

IV. LA NÉCESSAIRE MODIFICATION DES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE LES COLLECTIVITÉS LOCALES ET L'ÉTAT

A. LES IMPLICATIONS FINANCIÈRES DU PRINCIPE DE LIBRE ADMINISTRATION DES COLLECTIVITÉS LOCALES

La Constitution de la Vème République est peu explicite s'agissant du principe de libre administration des collectivités territoriales, issu des dispositions de l'article 72 selon lesquelles « les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseil élus ». La portée de ce principe est limitée par une autre disposition de valeur constitutionnelle, le caractère unitaire de l'Etat. Son contenu n'est pas défini précisément mais son respect est garanti par le renvoi au domaine de la loi de la détermination des principes fondamentaux « de la libre administration des collectivités locales, de leurs compétences et de leurs ressources ».

La liste des principes fondamentaux dégagés par le législateur n'a pas été arrêtée mais l'histoire institutionnelle et politique de notre pays ainsi que, depuis vingt ans, la pratique de la décentralisation, permettent de dégager les implications financières du principe de libre administration.

1. En recettes : la fiscalité locale, élément essentiel de la décentralisation à la française

Contrairement à la plupart des pays européens, la France se caractérise par la part importante des recettes fiscales dont elles votent les taux dans les budgets des collectivités locales 57 ( * ) . Si le degré de décentralisation d'un Etat ne se mesure pas nécessairement à l'importance des ressources fiscales locales, la fiscalité constitue, dans le contexte jacobin français, un « rempart » contre le centralisme étatique. De ce point de vue, il n'est pas anodin que, dans le processus de décentralisation engagé en France au début des années 80, la première grande loi ait eu pour objet la consécration du pouvoir fiscal des collectivités locales, à travers la faculté de voter les taux des impôts directs locaux en application des dispositions de la loi du 10 janvier 1980 relative à la fiscalité directe locale.

Le Conseil constitutionnel a par la suite établi à plusieurs reprises un lien de causalité entre l'existence de ressources fiscales locales et le principe constitutionnel de libre administration en estimant que la loi pouvait restreindre la part des recettes fiscales dans les budgets locaux, mais dans une proportion qui ne serait pas de nature à limiter l'exercice du principe de libre administration 58 ( * ) .

L'analyse du Conseil constitutionnel revient à considérer que le principe de libre administration ne se limite pas à la faculté de dépenser librement, mais comporte celle de mener une politique fiscale propre , soit pour ajuster l'évolution des recettes à celle des dépenses, soit pour arbitrer entre le recours à la fiscalité et le recours à l'emprunt, soit pour répartir la charge fiscale entre les différentes catégories de contribuables.

Par ailleurs, dans le contexte français dans lequel l'évolution des dépenses locales dépend non seulement des décisions des exécutifs locaux mais également de l'application de mesures législatives ou réglementaires qui s'imposent aux autorités locales, une fiscalité dont les taux sont votés par les assemblées locales constitue une souplesse indispensable pour assurer l'équilibre des budgets locaux. Elle est également source de responsabilisation des gestionnaires, les dépenses nouvelles devant être assumées politiquement devant les contribuables.

Il faut donc souhaiter que la part des ressources des collectivités locales issue des impôts locaux représente plus de 50 % du total.

2. En dépenses : l'absence de tutelle de l'Etat sur les dépenses décidées par les exécutifs locaux

La loi du 2 mars 1982 a supprimé la tutelle a priori de l'Etat sur les dépenses des collectivités locales. Désormais, il appartient aux exécutifs locaux de déterminer comme ils l'entendent la manière d'élaborer leurs budgets de manière à exercer leurs compétences, à s'acquitter des dépenses obligatoires déterminées par le législateur et à mener leurs politiques propres. L'Etat exerce un contrôle de légalité a posteriori et les chambres régionales des comptes un contrôle financier, également a posteriori , corollaire indispensable de la décentralisation.

La suppression de la tutelle financière s'est accompagnée du transfert aux collectivités locales de compétences antérieurement exercées par l'Etat. Le transfert de compétence s'est accompagné du transfert concomitant des ressources auparavant consacrées par l'Etat à leur exercice. Les principes qui régissent les transferts de ressources en cas de transferts de compétence ont été définis par les lois de décentralisation et ont été codifiés aux articles L. 1614-1 à L. 1614-7 du code général des collectivités territoriales.

Cependant, les lois de décentralisation n'ont pas prévu de transfert de ressources lorsque des textes législatifs ou réglementaires créent des charges pour les collectivités locales qui ne correspondent pas à des transferts de compétence. De telles charges surviennent lorsque :

- le législateur, le pouvoir réglementaire ou le droit communautaire édictent de nouvelles règles dans le domaine de compétence des collectivités locales , par exemple en matière de normes environnementales ou de sécurité des infrastructures. Elles existent également en matière de rémunération des agents, puisque les décisions de l'Etat dans ce domaine sont automatiquement étendues aux collectivités territoriales, sans que les collectivités soient pour autant associées aux négociations. La gestion des services départementaux d'incendie et de secours constitue l'exemple le plus parlant de domaine dans lequel l'ensemble de ces sources potentielles de charges supplémentaires a trouvé une traduction concrète ;

- le législateur met à la charge des collectivités locales des compétences nouvelles 59 ( * ) , l'Etat conservant la maîtrise de l'élaboration des règles dont les collectivités doivent assurer l'application. Il en est allé ainsi lorsque les départements ont été chargés du volet « insertion » du revenu minimum d'insertion en 1988 ou de la gestion de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) en 2001 ;

- l'Etat incite les collectivités locales à financer ou à cofinancer des actions ou des investissements dans des domaines, parfois régaliens, qui sont de la compétence de l'Etat.

Lorsque des dépenses nouvelles sont mises à la charge des collectivités locales sans être accompagnées de ressources supplémentaires, elles se traduisent dans les budgets locaux soit par une augmentation de la pression fiscale, soit par le recours à l'emprunt, soit par l'éviction de dépenses correspondant non pas à l'application d'une politique décidée par l'Etat mais à des choix politiques effectués par les conseils élus des collectivités locales.

A cet égard, l'analyse des budgets primitifs des collectivités locales pour 2002 est révélatrice. Dans les départements, qui ne perçoivent aucune compensation financière pour le financement des services d'incendie et de secours et seulement une compensation très partielle pour la gestion de l'APA, les taux des impôts directs locaux augmentent. Dans certains départements, on constate par surcroît une diminution des dépenses d'investissement afin de faire face aux charges nouvelles. A l'inverse, les régions, dont l'augmentation forte des dépenses à la suite du transfert de la compétence en matière de transport ferroviaire s'accompagne du transfert concomitant de ressources, ont pu stabiliser leurs taux d'impositions en 2002.

Les transferts de charges non compensés, en réduisant les marges de manoeuvre des exécutifs locaux sur le niveau et la nature de leurs dépenses, s'apparentent à une nouvelle forme de tutelle de l'Etat sur les budgets locaux et érodent indéniablement la portée du principe de libre administration des collectivités locales.

Au total, on peut se demander quelle a été la portée concrète de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui, dans sa décision n° 90-274 DC du 29 mai 1990, a considéré que « si le législateur est compétent pour définir les catégories de dépenses qui revêtent un caractère obligatoire (...) , toutefois les obligations ainsi mises à la charge d'une collectivité territoriale doivent être définies avec précision quant à leur objet et à leur portée et ne sauraient méconnaître la compétence propre des collectivités territoriales ni entraver leur libre administration ».

B. LES VOIES DE LA RÉFORME

La proposition de loi constitutionnelle relative à la libre administration des collectivités territoriales et à ses implications fiscales et financières, adoptée par le Sénat le 26 octobre 2000 à l'initiative du président Christian Poncelet, propose de protéger le principe de libre administration des collectivités territoriales en inscrivant dans la Constitution deux garde-fous : le principe de la compensation des compétences et des charges transférées et l'obligation pour l'Etat d'assurer aux collectivités locales qu'une part majoritaire de leurs recettes totale leur soit apportée par la fiscalité dont elles disposent.

1. La compensation des transferts de charges

L'article 2 de la proposition de loi adoptée par le Sénat le 26 octobre 2000 prévoit que « tout transfert de compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales et toute charge imposée aux collectivités territoriales par des décisions de l'Etat sont accompagnés du transfert concomitant des ressources permanentes, stables et évolutives nécessaires ».

S'agissant des transferts de compétence , cette rédaction s'inspire de celle du code général des collectivités territoriales selon lequel le transfert de compétences donne lieu au transfert des ressources consacrées par l'Etat 60 ( * ) , à la date du transfert, à l'exercice de ces compétences. La précision selon laquelle ce montant est calculé à la date du transfert (puis indexé sur le taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement) a pour conséquence d'aboutir rapidement à une divergence entre le montant de la compensation et celui des dépenses réellement consacrées par les collectivités à l'exercice de la compétence, le premier montant étant trop souvent inférieur au second.

Ce mode de calcul de la compensation est cependant inévitable car il est le seul qui soit respectueux de la libre administration des collectivités locales. Il appartient aux exécutifs locaux de décider s'ils souhaitent consacrer à l'exercice de la compétence le montant exact de la compensation, un montant supérieur ou un montant inférieur. Cependant, la prochaine loi sur les transferts de compétence, annoncée par le Premier ministre M. Jean-Pierre Raffarin dans sa déclaration de politique générale, pourrait utilement prévoir un dispositif d'évaluation périodique de l'évolution du coût de l'exercice normal d'une compétence transférée afin, au minimum, de pouvoir distinguer dans l'analyse des budgets locaux quelle part de l'évolution de la dépense relève de la volonté des organes délibérants, et quelle part résulte des conditions d'exercice d'une compétence.

Aujourd'hui, il est très difficile de savoir si le montant de la dotation générale de décentralisation est encore en relation avec celui des compétences dont elle est censée compenser le coût de l'exercice, à tel point que beaucoup oublient que cette dotation constitue l'expression du principe de compensation financière des transferts de compétences, et que le rapport sur les finances locales remis au Parlement en mars 2002 envisageait l'hypothèse de « fondre » la DGD dans une grande dotation de fonctionnement.

S'agissant des « charges imposées aux collectivités territoriales par des décisions de l'Etat », autant il est évident qu'elles constituent une atteinte au principe de libre administration, autant les modalités pratiques de la mise en oeuvre d'une éventuelle compensation sont délicates à envisager.

Par exemple, comment contraindre l'Etat à compenser le coût des revalorisations du traitement des fonctionnaires qu'il impose aux collectivités locales, dès lors que la détermination des effectifs de la fonction publique territoriale appartient aux seules collectivités employeurs ? Comment distinguer, dans les investissements des collectivités locales en matière environnementale, ceux qui relèvent de décisions politiques des organes délibérants et ceux qui résultent de mises aux normes nécessaires compte tenu des décisions de l'Etat ?

Les lois de décentralisation ont affirmé le principe du transfert des ressources correspondant à l'exercice des compétences transférées, la nouvelle étape de la décentralisation devra ouvrir la voie à la compensation des transferts de charges.

2. La fiscalité locale doit être le mode normal de financement des collectivités locales

L'article premier de la proposition de loi constitutionnelle adoptée par le Sénat le 26 octobre 2000 dispose que « la libre administration des collectivités territoriales est garantie par la perception de recettes fiscales dont elles votent les taux dans les conditions prévues par la loi » et que « les ressources hors emprunt de chacune des catégories de collectivités territoriales sont constituées pour la moitié au moins de recettes fiscales et autres ressources propres ».

Au-delà du détail de cette disposition, l'affirmation selon laquelle une part importante, voire prépondérante, des ressources doit être d'origine fiscale reflète une philosophie de la décentralisation reposant sur la souplesse (la possibilité d'ajuster les recettes et les dépenses), la responsabilité (assumer les choix de dépenses devant le contribuable électeur) et le dynamisme (les collectivités locales ont intérêt au dynamisme économique car il se traduit par une augmentation des bases).

Cette philosophie contraste avec celle, qui a eu cours au cours de la précédente législature, selon laquelle la libre administration se résumerait à autoriser les élus locaux à dépenser des crédits octroyés par l'Etat pour appliquer des politiques de moins en moins décidées par eux et de plus en plus par l'Etat central.

3. La nécessaire combinaison des deux volets

Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 2001, la Cour des comptes établit un lien entre le degré d'autonomie fiscale des collectivités locales, l'importance des transferts de charges non compensés (elle ne vise cependant que les charges d'investissement) et la capacité des collectivités locales à s'administrer librement.

La Cour des comptes considère en effet que, en l'absence de marges de manoeuvres fiscales, les transferts de charges non compensés sont de nature non seulement à altérer la capacité à s'administrer librement, mais aussi à déséquilibrer la régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales.

Elle juge que « certes, la Constitution n'établit aucun lien entre le principe de libre administration et celui de l'autonomie fiscale locale. Toutefois, les dépenses d'investissement sont en priorité imputées aux collectivités locales, soit par le transfert de compétences nouvelles, soit par l'effet de la publication de nouvelles normes (directive relative à la qualité de l'eau). La limitation des ressources fiscales propres des collectivités locales pourrait à terme menacer la capacité de ces dernières à opérer des arbitrages impôts/emprunt pour le financement de leurs investissements. La réduction de la marge de manoeuvre des collectivités locales pourrait ainsi déséquilibrer la régulation des relations financières entre l'Etat et les collectivités locales ».

S'agissant des transferts de compétences à venir, le principe établi par les lois de décentralisation selon lequel les ressources correspondantes faisant l'objet d'un transfert doivent être majoritairement des ressources fiscales, qui a été perdu de vue, doit être réaffirmé. Ces ressources fiscales doivent correspondre à de nouvelles bases d'imposition dont les élus locaux maîtriseraient les taux.

En revanche, ces bases fiscales nouvelles , « calibrées » pour financer des compétences précisément identifiées, ne doivent pas être comprises comme un encouragement pour l'Etat à multiplier les transferts de charges non compensées . De même, l'éventuelle obtention par les élus locaux d'une plus grande marge de manoeuvre dans la détermination des taux de leurs impôts directs ne devrait pas être la contrepartie de transferts de nouvelles dépenses. Le contribuable local n'a pas vocation à supporter une pression fiscale accrue pour financer des dépenses décidées par une autorité autre que celle qui vote le taux de l'impôt local.

EXAMEN DES ARTICLES
PREMIÈRE PARTIE :

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

ARTICLE PREMIER

Réduction de 5 % de l'impôt sur le revenu à acquitter en 2002

Commentaire : le présent article a pour objet de diminuer de 5 % l'impôt sur le revenu dû au titre des revenus de 2001. Le coût de la mesure est de 2,55 milliards d'euros, ce qui ramène le produit prévu de l'impôt sur le revenu pour 2002 à 51,42 milliards d'euros.

Conformément aux engagements pris par le Président de la République et confirmés par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 3 juillet dernier, le présent collectif comporte la réduction de 5 % de l'impôt sur le revenu exigible en 2002.

Il s'agit d'une mesure simple, d'effet immédiat, mais qui ne prend tout son sens que dans une perspective à moyen terme de réforme de la structure même de notre imposition des revenus.

I. UNE MESURE SIMPLE

L'allégement de l'impôt sur le revenu est une mesure attendue. Même le précédent gouvernement avait fini par en faire un point important de son programme. A la différence de nombre de ses prédécesseurs qui se sont placés dans une perspective pluriannuelle, le présent gouvernement a délibérément choisi de répondre à l'impatience d'un grand nombre de contribuables en prenant une mesure d'application immédiate.

Le laconisme du texte du présent article correspond tout à fait à la volonté de rapidité et de simplicité affichée par le gouvernement : à des objectifs lisibles, correspondent des modalités claires.

A. DES OBJECTIFS LISIBLES

1. La France connaît un réel problème d'attractivité, notamment fiscale

L'analyse qui sous-tend la mesure d'allégement proposée dans le présent collectif, repose sur un constat qui n'est pas propre à la nouvelle majorité, puisqu'il a été partagé, dans une large mesure, par des ministres des finances de la précédente législature.

Le rapport de M. Michel Charzat remis à M. Laurent Fabius en juillet 2001, qui reprenait lui-même largement les analyses de M. Frédéric Lavenir dans un rapport commandé par M. Christian Sautter, aboutit à des conclusions finalement assez voisines de celles du rapport de la mission du Sénat sur l'expatriation des capitaux, des compétences et des entreprises présenté par nos collègues Denis Badré et André Ferrand : la France doit faire face à un grave problème d'attractivité .

Au-delà de l'image « désastreuse » de la France auprès d'un grand nombre de chefs d'entreprises étrangères, qui explique le recul relatif de la France dans l'investissement direct international, comme en témoigne le fait que la France n'arrive plus qu'au cinquième rang européen en termes de montants investi en 2000 selon le baromètre 2002 de Ernst&Young pour 2002 61 ( * ) , il était indispensable d'amorcer une évolution visible de notre système fiscal.

Même si l'attractivité dépend aussi d'autres facteurs, les charges constituent un handicap tel - avec d'autres éléments diffus comme l'instabilité des règles mais qui lui sont intimement liés - qu'elles tendent à neutraliser nos atouts notamment en matière d'infrastructures.

Eu égard à son caractère symbolique, il est normal de commencer par l'impôt sur le revenu dont les caractéristiques en font un frein à l'initiative et à la création de richesses tout en alimentant une certaine fuite des cerveaux.

Avec l'article premier du présent projet de loi de finances rectificative, il s'agit, comme l'a souligné le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, de « soutenir l'activité et l'initiative », avec la volonté d'un « partage plus équilibré des fruits de la croissance ». Les propos du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ne font que confirmer cette orientation dans la mesure où il s'agit de « mieux reconnaître la valeur du travail ».

2. Une mesure de moyen terme pour favoriser l'offre

A cet égard, il convient de dissiper d'emblée un risque de malentendu . Pour votre commission des finances, il ne s'agit pas d'une mesure de court terme tendant à stimuler la demande , mais au contraire, d'une mesure de moyen terme destinée à favoriser l'offre .

Certes, une telle baisse devrait engendrer un supplément de croissance de 0,1 % en 2003, assortie d'augmentations de la consommation des ménages et de l'emploi, respectivement égales à 0,2 et 0,1 %. Cela n'est pas négligeable, d'autant plus que les modèles économétriques font espérer, à terme, la création de 40.000 emplois.

Mais la réduction d'impôt tend essentiellement à rehausser le potentiel d'offre de l'économie . D'une part, elle permet de réduire l'écart entre le coût du travail supporté par les entreprises et la rémunération nette perçue par les salariés ; d'autre part, elle devrait alléger l'impôt payé par les agents qui innovent ou font preuve d'initiative.

Dans les deux cas, on favorise les créations d'emplois, tout en luttant contre une tendance à l'expatriation des compétences qui ne laissait pas d'inquiéter, même au sein du précédent gouvernement.

3. Réduire la concentration excessive de l'impôt sur le revenu

On peut rappeler que depuis le printemps 2000, celui-ci avait mis en oeuvre une stratégie de baisse de l'impôt sur le revenu. Par référence au taux applicable pour les revenus de 1998, la baisse cumulée des taux en nombre de points était de - 3 points pour les deux premières tranches, de - 2 points pour les deux suivantes et - 1,25 point pour les deux dernières.

Mais, comme le reconnaissait lui-même notre collègue député Didier Migaud, alors rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, « la baisse des taux a été plus forte, en valeur absolue, c'est-à-dire au nombre de points, et également en valeur relative, pour les premières tranches de l'impôt sur le revenu que pour les tranches les plus élevées du barème, ce qui a renforcé le caractère progressif de l'impôt sur le revenu ».

Dans le même rapport sur le projet de loi de finances pour 2002, Didier Migaud poursuit son analyse en reconnaissant que « la part de l'impôt sur le revenu acquitté par les foyers fiscaux du dernier décile, c'est-à-dire par les 10 % des foyers les plus imposés, augmente de 64,5 à 73,2 %, ce qui traduit un renforcement significatif de la concentration de l'impôt sur le revenu en France » entre la loi de finances initiale pour 2000 et la situation en 2002.

On note que, même en tenant compte de l'allégement décidé l'année dernière, la part de l'impôt acquitté par les ménages du dernier décile se serait encore accrue, ainsi que le reconnaît le rapport précité. Ainsi a-t-on assisté à une concentration de l'impôt sur le revenu - qui n'est déjà acquitté que par la moitié des foyers fiscaux - sur les ménages aux revenus moyens et élevés , non par le jeu de majoration des taux des tranches du haut du barème comme au début des années 1980, mais par celui de la diminution systématique de la contribution des contribuables imposés dans les premières tranches du barème .

Alléger continûment la cotisation des plus modestes - que cela soit obtenu par la diminution des taux ou le relèvement des seuils des tranches les plus basses - est, depuis un certain nombre d'années, un objectif constant de tous les gouvernements de quelque sensibilité politique qu'ils soient. Pourtant, il faut bien constater que, dans un système qui favorise les « prélèvements rampants » du simple fait que l'on indexe les seuils des tranches non sur les revenus mais sur les prix, cela aboutit à faire peser l'essentiel de la charge de l'impôt sur une part toujours plus réduite des foyers fiscaux .

Ne pas s'inquiéter de cette tendance parce qu'il serait juste de « faire payer les riches », et estimer, en conséquence, qu'un barème n'est jamais trop progressif et un prélèvement trop concentré, est une politique à courte vue, qui revient à méconnaître certaines évolutions structurelles .

4. Prendre en compte la mobilité des facteurs de production, et notamment du travail

La France fait partie du grand marché intérieur européen et participe du processus de mondialisation des grandes économies mondiales, deux phénomènes qui se traduisent, dans un contexte de concurrence exacerbée, par une mobilité croissante des facteurs de production , capital mais aussi travail . Les talents sont aujourd'hui d'autant plus mobiles, qu'une carrière, pour un jeune Français, comporte naturellement un certain nombre d'années passées à l'étranger et qu'un état-major bien constitué, se doit d'être composé de cadres de toutes nationalités.

Dans des marchés de plus en plus intégrés, le cadre, l'ingénieur, le chercheur sont amenés à choisir leur lieu d'installation à la façon dont une entreprise détermine une implantation, c'est-à-dire en fonction de critères parmi lesquelles les rémunérations nettes sont des critères si ce n'est déterminants, du moins discriminants .

Il est vain d'espérer le renforcement de la place financière de Paris tant que, pour certaines spécialités très pointues, une banque installée à Paris devra pour un même salaire net supporter un coût de plus de deux fois supérieur ; il est illusoire d'espérer attirer à Paris - et même retenir - des sièges sociaux de firmes multinationales, dès lors que, indépendamment même de questions liées à la fiscalité des groupes, il devient de plus en plus difficile de faire venir à Paris des cadres de très haut niveau auxquels on ne peut raisonnablement offrir la même rémunération nette qu'à Londres ou qu'à Bruxelles.

On peut certes, mettre en place un régime spécial pour les impatriés comme le préconisait le rapport Lavenir précité, ce qui, au moins sur le plan social, est d'autant plus justifié que des cadres étrangers qui ne passent que peu d'années dans notre pays, ne bénéficient pas à long terme des avantages sociaux propres à notre pays.

Mais, en ce qui concerne l'impôt sur le revenu, il est plus cohérent de faire évoluer le droit commun pour le rapprocher des moyennes européennes, étant entendu qu' un différentiel de taux d'imposition pour les hauts revenus reste soutenable, dès lors qu'il s'accompagne de services collectifs supplémentaires notamment en matière d'éducation.

La compétition fiscale en Europe est un fait durable . Et on aurait tort d'espérer des résultats immédiats de la volonté affichée à Bruxelles de mettre fin à certaines pratiques considérées comme dommageables.

Car le problème doit être apprécié dans une perspective comparative . Certes, la France a diminué les taux du « haut du barème », mais est-ce suffisant quand tous nos concurrents ont ces dernières années, abaissé de façon parfois considérable le taux de la dernière tranche du barème ? Est-il réaliste de penser que la France pourra, au nom de principes égalitaires et de la lutte contre le moins-disant fiscal, durablement résister à cette tendance et maintenir ses taux au niveau actuel ? La France peut-elle raisonnablement soutenir un différentiel de taux marginal d'imposition qui, pour l'Allemagne, ne devrait jamais, quelle que soit la façon dont on le calcule, être inférieur de dix points, pour ne rien dire du Royaume-Uni ?

Bref, il fallait agir et inverser la tendance. C'est ce que nous propose le gouvernement avec le présent article qui tend à atténuer, avant toute réforme de structure, les effets des réformes intervenues sous la précédente législature et qui ont conduit à une augmentation de la concentration de l'impôt sur les revenus de tous ces Français qui créent des richesses par leur travail et leur esprit d'innovation.

B. DES MODALITÉS CLAIRES

1. Une baisse immédiate pour tous les contribuables

L'exposé des motifs indique que la baisse de 5 % des impôts sur le revenu va bénéficier immédiatement à tous les contribuables, soit 16 millions de foyers.

Le solde de l'impôt 2002 payé à l'automne sera réduit en conséquence à hauteur de 5 % du montant total de l'impôt dû au titre des revenus de 2001.

La réduction, qui prend donc la forme d'un « rabais sur facture », sera opérée directement sur le montant de l'impôt dû et sera prise en compte dans les avis d'imposition. C'est ce qui explique que le solde de l'impôt sera exigible avec un mois de retard par rapport aux échéances normales, le 15 octobre . Pour les contribuables mensualisés, leur contribution sera régularisée au plus tard à l'occasion du prélèvement du mois d'octobre 62 ( * ) .

2. Une réduction de l'impôt brut

La réduction vient en déduction de l'impôt brut , tel qu'il résulte de l'application du quotient familial au revenu net global - calculé par déduction du revenu brut global, des charges déductibles, des reports déficitaires et des abattements.

Elle porte sur les revenus soumis au barème et, en particulier sur ceux des revenus du travail et non sur les revenus bénéficiant de taux réduits, prélèvement libératoires ou taux d'imposition forfaitaires .

Elle s'applique après la décote - qui n'est pas une réduction d'impôt mais un mécanisme d'atténuation de la cotisation d'impôt à l'entrée du barème et donc un élément de calcul de l'impôt - mais avant application des réductions d'impôt comme celles résultant des dons aux oeuvres et des crédits d'impôt comme la prime pour l'emploi.

3. La nécessité d'éviter toute complexité

On ne pouvait faire plus simple. Mais pouvait-on faire plus juste ?

Un rapide examen des précédents montre que toute tentative de modulation de la baisse de l'impôt était à la fois contraire aux objectifs recherchés et d'une complexité de nature à créer des incohérences critiquables, et en tout cas incompatible avec la volonté de lisibilité de la mesure.

Des mécanismes de correction différenciés ont existé dans les années 80. C'est ainsi qu'a été instauré en 1987 - manoeuvre faisant suite à un système complexe de minorations combiné à des majorations - un ensemble de minorations allant de 0 à 11 %. La minoration s'est traduite par une concentration de l'impôt payé par le dernier décile qui a augmenté de près d'un point, comme le remarque le Conseil des impôts dans son rapport de 1990. En tout état de cause, différencier la réduction d'impôt aurait conduit à recréer une forme de « barème aval » de nature à dénaturer encore un peu plus le barème lui-même.

Impôt sans réduction de 5 %

Impôt avec réduction de 5 %

Application d'un barème dont tous les taux seraient diminués de 5 %

Réduction

Salaire déclaré : 40.000 €

1.839 €

1.747 €

1.747 €

92 €

4. Un gain lié à la progressivité même de l'impôt sur le revenu

Comme permet de le constater le tableau ci-dessous sur un exemple concret, le fait d'avoir exclu du bénéfice de la mesure les revenus bénéficiant de taux réduits, prélèvement libératoires ou taux d'imposition forfaitaires, aboutit mécaniquement à conférer aux hauts revenus un avantage inférieur à leur part dans les revenus soumis à l'impôt dans la mesure où les contribuables aisés ont en général plus de revenus de cette nature.

Impôt sans réduction de 5 %

Impôt après réduction de 5 % sur l'impôt brut

Réduction

Salaire déclaré : 40.000 €

1.839 €

1.747 €

92 €

Plus value : 10.000 €

1.600 €

1.600 €

0 €

Total

3.439 €

3.347 €

92 €

D'un montant moyen de 169 euros , l'avantage résultant de la réduction est évidemment très variable selon le niveau du revenu . S'il se monte par exemple à 14 euros, le gain moyen des titulaires de la prime pour l'emploi devenant non imposables du fait de la réduction d'impôt, est très logiquement beaucoup plus faible que celui des contribuables imposés à la tranche marginale. A ceux qui ne manquent pas de dénoncer cette disproportion, on doit faire remarquer qu'elle est à la mesure de l'inégalité des cotisations fiscales des foyers .

Dire qu'un contribuable va bénéficier d'une réduction d'impôt plus importante que tel autre contribuable, signifie simplement qu'il payait plus d'impôt ! En d'autres termes, on a simplement multiplié par 0,95 le taux des tranches du barème, sans qu'il en résulte aucun effet sur la progressivité de l'impôt.

La disproportion des gains dont bénéficient les contribuables situés aux extrémités du barème n'est que l'effet et le reflet de la progressivité de l'impôt sur le revenu en France.

Prendre une autre règle aurait supposé la mise en place de mécanismes complexes pour éviter les ressauts d'imposition comme cela était le cas dans le « barème aval » valable pour 1989 63 ( * ) .

Au surplus, s'engager dans la voie d'une redistribution fortement non proportionnelle au barème de l'allégement d'impôt, c'était ouvrir la voie à des discussions sur ce qu'il fallait donner aux foyers fiscaux non imposables. Une telle approche deviendrait rapidement « surréaliste », puisqu'elle reviendrait à ce que le Parlement se demande chaque fois qu'il décide une réduction d'un impôt, ce qu'il faut faire pour ceux qui ne le paient pas... ce que l'on s'est bien gardé de faire, il n'y a pas si longtemps, lorsqu'il s'est agi de supprimer certains impôts, par ailleurs non dénués de progressivité.

Il convient de préciser dans cette perspective qu'il n'y a pas de lien entre la baisse des impôts et une éventuelle hausse de la prime pour l'emploi.

Comme le précise expressément la loi, la prime pour l'emploi a pour objet de favoriser l'emploi pour les titulaires de bas salaires. Elle vise donc un objectif spécifique et concerne les seules personnes concernées par cet objectif. Ce n'est donc pas un impôt négatif mais un crédit d'impôt qui a sa propre logique économique.

La réduction d'impôt de 5 % poursuit, quant à elle, un objectif différent qui est d'alléger le poids des prélèvements obligatoires afin de soutenir l'initiative.

Faire évoluer la prime pour l'emploi en proportion de la baisse des impôts apparaît d'autant moins nécessaire que les bénéficiaires de cette prime devraient bénéficier du doublement de la part variable de la prime pour l'emploi décidé par le précédent gouvernement.

En réalité, si la mesure-phare du présent projet de loi de finances rectificative est aussi une mesure-cible, c'est sans doute parce que ceux qui en critiquent le caractère injuste, ne veulent pas voir que , dans un monde ouvert, il est des limites à la redistribution par l'impôt sur le revenu et que la lutte contre les inégalités passe surtout par des prestations sociales qui représentent près d'un tiers des revenus des Français.

Depuis une vingtaine d'années, la plupart des gouvernements n'ont pas cessé d'augmenter et d'élargir des prestations sociales, souvent sous conditions de ressources. Cette action en faveur des plus défavorisés s'est en fait accompagnée, en toute conjoncture, par l'alourdissement et la concentration des prélèvements sur un relativement petit nombre de foyers fiscaux : peut-on vraiment accroître fortement la pression fiscale sur les plus aisés dans les périodes de tension budgétaire pour ne l'alléger substantiellement en période de relâchement que pour les tranches les plus basses ? Il y a là une asymétrie, qui vient accroître le déséquilibre de notre régime de l'impôt sur le revenu, au moins relativement dès lors que nos principaux partenaires font évoluer leur système fiscal en sens inverse.

Pays

Taux d'imposition marginal supérieur
(imposition des revenus de 2001)

Allemagne

48,5 %

Espagne

48 %

États-Unis

39,1 % (1)

Italie

45,5 %

Royaume-uni

40 %

(1) Non compris l'impôt sur le revenu prélevé par les États fédérés.

Ainsi, la réduction de 5% qui constitue un coup d'arrêt à la distorsion du régime de l'impôt sur le revenu, marque-t-elle un courageux changement de cap de notre politique fiscale.

II. LE SIGNAL D'ÉVOLUTIONS STRUCTURELLES INÉLUCTABLES

Dans la présentation générale du présent projet de loi de finances rectificative, il est bien précisé que cette réduction de 5 % n'est qu'une « première étape ». Elle s'inscrit dans la perspective de la baisse générale de la pression fiscale voulue et confirmée par le Président de la République dans le but de maintenir à la France sa compétitivité et qui devrait se traduire notamment par une baisse d'un tiers de l'impôt sur le revenu sur l'ensemble de la législature .

Sans entrer dans le détail d'un cheminement et tout en rappelant qu'il est évident que la longue marche vers la réduction des prélèvements obligatoires dépend dans une large mesure du taux de croissance de ces prochaines années, votre commission des finances estime que l'on doit se préparer à entamer un processus de réforme de structure.

Comme l'a souligné M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, il s'agit « d'adresser un signal fort de confiance aux Français, à leurs capacités de travail et d'initiatives, à leur sens de l'effort et de la responsabilité ».

A cet égard, votre commission des finances estime que la question de la réforme fiscale se pose dans des conditions assez différentes de celles dans lesquelles elle avait été envisagée lorsque, il y a plus de cinq ans, avait été mis en oeuvre le plan de M. Alain Juppé.

Aujourd'hui, on se situe dans un contexte de réforme de l'État et, s'il convient toujours d'alléger l'impôt, il ne s'agit pas d'une fin en soi. La diminution des impôts doit trouver sa place dans un plan global de stimulation de toutes les initiatives, où l'on prend en compte, également, la question des modalités de perception de l'impôt .

Ainsi, si le diagnostic que l'on peut faire sur l'état de notre régime d'impôt sur le revenu est finalement assez proche de celui fait depuis un certain nombre d'années déjà, les mesures à mettre en oeuvre apparaissent différentes et devoir procéder d'une volonté nette de simplifications et de transparence.

A. LE DIAGNOSTIC : UNE CONVERGENCE DANS L'ANALYSE

L'impôt sur le revenu est une matière sensible, propice aux polémiques. Pourtant, un examen rétrospectif des principaux rapports administratifs qui lui ont été consacrés, témoignent, en dépit des changements des contextes politiques, d'une relative convergence dans l'analyse.

Certes, son niveau était jugé excessif mais c'était surtout sa structure qui était considérée comme déséquilibrée et peu cohérente.

Notre système fiscal, et tout particulièrement notre régime d'imposition des revenus, souffre d'un mal très français , le perfectionnisme fiscal . Comme le remarque le Conseil des impôts dans son rapport précitéde 1990, notre système d'imposition pâtit d'une excessive personnalisation de l'impôt avec pour corollaires, la complexité et l'instabilité des règles fiscales.

Le dernier rapport en date de 2000, du même Conseil, consacré à l'impôt sur le revenu, souligne ainsi, à titre d'exemple, l' augmentation du volume des circulaires de l'administration, qui s'était accru à l'époque, de plus de 57 % en dix ans . On ne dispose pas de chiffres récents, mais il y a tout lieu de penser que cette tendance s'est poursuivie.

Cette complexité de la règle fiscale est directement liée au niveau des prélèvements. Comme le souligne la Commission d'étude des prélèvements obligatoires de 1995, présidée par M. Ducamin, « le niveau jugé élevé des taux d'imposition a entraîné la floraison de mécanismes en tous genres [...] qui entachent gravement la progressivité, provoquent des ruptures d'égalité entre les contribuables car seuls les plus avertis bénéficient de ces mécanismes, et peuvent avoir des effets pervers sur le fonctionnement de l'économie ».

Mais, la multiplication des régimes spécifiques affecte non seulement la lisibilité des règles, mais leur stabilité .

L'autre caractéristique du système fiscal dénoncée régulièrement est le perpétuel changement des règles du jeu fiscal. En certaines matières, on ne compte pas moins d'un nouveau régime tous les deux ans, quand ce n'est pas tous les ans, dans le cadre d'un processus qui n'est pas sans rappeler la course de la lance et de la cuirasse : un nouveau régime est mis en place dont certains contribuables trouvent rapidement les failles, ce qui conduit à son adaptation, et ainsi de suite...

Bref, la plupart des experts s'accordent à considérer qu' il est urgent de simplifier notre système d'imposition des revenus . C'est aujourd'hui d'autant plus nécessaire qu' il ne s'agit pas simplement de faciliter la compréhension, et donc l'acceptation du prélèvement par les contribuables ; il faut aussi rendre plus efficace le prélèvement de la ressource , dont on a encore récemment rappelé que le coût en était en France particulièrement élevé.

B. LES PRINCIPES D'UNE RÉFORME : SIMPLIFICATION ET TRANSPARENCE

A la différence des réformes fiscales précédentes, qu'il s'agisse du plan de M. Alain Juppé ou de celui de M. Lionel Jospin, il convient de situer les mesures qui devront être mises en oeuvre au cours de la présente législature dans le cadre d'une réforme de l'État et, en l'occurrence, du mode de collecte de l'impôt.

On ne peut plus, aujourd'hui, penser notre système d'imposition des revenus indépendamment de la question du prélèvement de l'impôt à la source. Tous les pays européens, ou presque, le pratiquent, les Français y sont, d'après les sondages, favorables.

Le rapport du Conseil des impôts de 1990 se livre à une analyse très approfondie des obstacles qui empêchent la France de passer à un régime de prélèvement à la source. Ils tiennent tous à la complexité et à l'excessive personnalisation de l'impôt sur le revenu et il conviendrait donc, à ce titre, que la mise en place du prélèvement à la source ne consiste pas simplement à transférer les difficultés techniques de l'administration fiscale vers les entreprises !

Nul doute qu'un tel système s'accommode en effet mal de l'imposition conjointe, qu'il rend plus complexes, sauf à priver la réforme de la plupart de ses avantages, les multiples possibilités de réduction d'impôt ou de déduction du revenu global ouvertes par la législation actuelle et qu'il suppose une limitation drastique du nombre des tranches qui ne peut guère dépasser trois ou quatre, y compris la tranche à taux zéro.

Une telle remise à plat suppose que l'on règle un certain nombre d'anomalies, qu'il s'agisse du régime fiscal de la CSG, actuellement partiellement déductible sans raison évidente, du mécanisme de la décote qui accroît, en dépit de tous les aménagements, la progressivité à l'entrée du barème ou de l'abattement de 20 % dont bénéficient les salariés et les adhérents à un centre de gestion agréé, dont on remarque que, s'il était intégré au barème, il ferait apparaître un taux de la tranche marginale beaucoup plus raisonnable, de l'ordre de 42 %, très proche de celui que s'est fixé comme objectif la réforme fiscale allemande.

La mesure de la baisse de 5 % n'est donc pas une fin en soi. Elle est l'amorce d'une nouvelle politique, le signe adressé à tous ceux qui innovent et qui créent de la valeur par leur travail, que leurs efforts seront récompensés. Elle doit s'insérer dans le cadre d'une politique, à moyen terme, diversifiée de réductions des prélèvements obligatoires. Comme l'a rappelé le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, la mesure s'inscrit dans un ensemble qui concernera également d'autres impôts, qu'il s'agisse de l'impôt sur les sociétés, de la baisse sélective de la TVA et, enfin et surtout, de la baisse des charges qui est favorable à l'emploi.

En tout état de cause, la réduction qu'il est proposé de mettre en oeuvre avec le présent article n'a de sens que si elle est financée , c'est-à-dire que si elle s'accompagne d'une rupture avec la pratique usuelle du « toujours plus ». Comme l'affirme M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, la baisse des impôts et des charges signifie que « l'État entend prendre, enfin, toute sa part au travail d'assainissement nécessaire. Il n'est pas des réductions des impôts durables sans stabilisation de la dépense ».

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 2

Prélèvements institués au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA)

Commentaire : le présent article vise à instituer, pour 2002, trois prélèvements sur des organismes agricoles pour un montant total de 456 millions d'euros, afin de financer une partie du déséquilibre financier du budget annexe des prestations sociales agricoles en 2002.

I. LA RÉALITÉ DU BESOIN DE FINANCEMENT DU RÉGIME DE PROTECTION SOCIALE DES NON-SALARIÉS AGRICOLES

A. LE BAPSA EN CONSTANT DÉFICIT D'EXÉCUTION DEPUIS 1997

Depuis 1997, tous les exercices du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA) se sont soldés par un déficit d'exécution mettant en évidence les difficultés d'une réelle gestion budgétaire de ce budget annexe. Dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2001, la Cour des comptes rappelle que « ce régime quel que soit son périmètre est structurellement déficitaire. Au total, les cotisants actifs représentent le tiers des personnes protégées et (...) les cotisations couvrent moins du cinquième des dépenses ».

Les déficits constatés depuis 1997 ont eu, avant tout, pour origine une sous-estimation récurrente des dépenses prévisionnelles du BAPSA, notamment des dépenses d'assurance-maladie, ainsi qu'une constante sur-estimation des recettes de cotisations sociales.

Financement du résultat du BAPSA

(en millions d'euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

LFI

Crédits

Recettes

13.978

13.978

13.954

13.954

13.930

13.930

14.184

14.184

14.383

14.383

14.436

14.436

14.683

14.683

Exécution

Dépenses

Recettes

13.905

13.712

13.766

13.845

13.947

13.868

14.312

14.306

14.597

14.462

14.906

14.827

15.331

15.306

Résultat

- 193

78

- 80

- 6

- 134

- 80

- 25

Fonds de roulement

253

331

252

246

112

32

7

En %

1,82 %

2,38 %

1,80 %

1,72 %

0,76 %

0,21 %

0,04 %

Source : rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2001

Au cours de la législature précédente, le gouvernement privilégiait le recours à une imposition affectée à la sécurité sociale, la contribution sociale de solidarité sur les sociétés (C3S) comme variable d'ajustement du déséquilibre budgétaire du BAPSA. Le présent article vise à mettre fin à cette pratique tout en ne faisant pas peser l'intégralité du financement de ce déséquilibre sur le budget de l'Etat.

Le déficit du BAPSA est, de droit, financé par son fonds de roulement dont les réserves se sont cependant drastiquement réduites depuis 1996.

Cette diminution du fonds de roulement a eu pour conséquence d'obliger le régime des non-salariés agricoles à recourir davantage à l'emprunt. Le plafond d'avances de trésorerie consenti au régime agricole, qui était de 8,5 milliards de francs (1,3 milliard d'euros) en 1997 et 1998, s'est élevé à 10,5 milliards de francs (1,6 milliard d'euros) en 1999 et 2000, puis à 13,5 milliards de francs (2,06 milliards d'euros) en 2001. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 a porté ce plafond à 2,21 milliards d'euros. Cette évolution à la hausse du plafond d'avances a eu pour conséquence une augmentation exponentielle des charges d'emprunt et notamment une brusque montée des frais financiers du BAPSA entre 1999 et 2000.

Comme le précise la Cour des comptes dans son rapport sur l'exécution des lois de finances pour l'année 2001, « le besoin de financement complémentaire est actuellement pris en charge à hauteur d'un peu moins de 50 % par la collectivité nationale à travers l'affectation directe de taxes ou bien le versement de contributions du budget général et d'un peu moins de 40 % par la solidarité entre les régimes ».

Toutefois, depuis 1997, la contribution de l'Etat au financement du BAPSA, via notamment la subvention d'équilibre du budget général, est en forte diminution.

Les contributions de l'Etat au BAPSA depuis 1997

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Parallèlement à cette diminution de la contribution de l'Etat au financement du BAPSA, on peut noter que les recettes du BAPSA ont bénéficié d'une augmentation du produit de la TVA qui lui a été affecté ainsi que de l'affectation d'une part croissante de C3S. Ainsi, l'article 12 de la loi de finances rectificative pour 2001 prévoit l'affectation d'un montant supplémentaire de C3S de 1,542 milliard de francs (235,08 millions d'euros) censé permettre de financer intégralement le déséquilibre budgétaire du BAPSA en 2001. Toutefois cette affectation supplémentaire de C3S au BAPSA n'a pas permis de couvrir intégralement le déficit d'exécution pour 2001 et ce sont plus de 200 millions d'euros de charges qui ont dû être reportés sur l'année 2002 comme l'ont révélé le rapport de la Cour des comptes sur l'exécution des lois de finances pour 2001 ainsi que l'audit de la situation des finances publiques réalisé par MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse en juin 2002.

A cet égard, la Cour des comptes a souligné dans son rapport précité, à propos de l'exécution du budget annexe des prestations sociales agricoles, que « l'année 2001 a été marquée par l'impossibilité d'ajuster, en fin de gestion, les recettes au niveau des charges du budget annexe qui, de ce fait, a du reporter sur 2002 le paiement de certaines dépenses ».

L'exécution budgétaire pour 2001 s'est ainsi traduite par un report de charges de 218,1 millions d'euros sur 2002, correspondant à :

- 166,93 millions d'euros au titre de l'acompte mensuel de dotation globale hospitalière de décembre 2001 qui n'a pu être payé que sur la gestion 2002 ;

- 26,47 millions d'euros au titre de la régularisation de la compensation démographique vieillesse pour 2000 ;

- 24,65 millions d'euros au titre des dépenses d'assurance maladie des professionnels de santé et des étudiants.

La Cour des comptes précise qu' « en dépit de ces reports de charges, l'exécution de 2001 s'est traduite par une insuffisance de recettes de 31,9 millions d'euros prélevées sur le fonds de roulement du budget annexe. Celui-ci s'établit à la clôture de la gestion 2001 à 6,7 millions d'euros ».

En définitive, la Cour des comptes est très pessimiste quant aux perspectives d'exécution du BAPSA en 2002 : « la situation de la fin de l'exercice 2001 ne laisse pas d'inquiéter. En effet, l'incapacité dans laquelle s'est trouvé le BAPSA d'honorer toutes les charges relevant de la gestion courante a conduit à les faire peser sur la gestion 2002, alors même que les crédits ouverts permettent seulement de faire face à la reconduction de la dépense 2001. Les dépenses 2001 ont atteint 15.331,2 millions d'euros, les crédits ouverts pour 2002 s'élèvent à 15.368 millions d'euros. Toutes choses égales par ailleurs, le déficit prévisionnel devrait s'élever au montant des reports de charges, majoré des facteurs internes d'évolution de la dépense, c'est-à-dire avant tout de la dérive de l'assurance maladie et minorée des éléments exceptionnels enregistrés en 2001, notamment en matière de régularisation de la compensation démographique qui a atteint un niveau très élevé et vraisemblablement non reconductible ».

B. UN BESOIN DE FINANCEMENT DU BAPSA SANS PRÉCÉDENT EN 2002

Les projections relatives à l'exécution budgétaire du budget annexe des prestations sociales agricoles pour l'exercice 2002, réalisées notamment par l'audit précité de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, laissent prévoir un solde déficitaire du BAPSA, par rapport aux estimations retenues en loi de finances initiale pour 2002, de l'ordre de 750 millions d'euros.

Ce solde déficitaire est le résultat, à la fois, d'une dérive des dépenses de protection sociale, non seulement sur l'année 2002, avec notamment un dérapage des dépenses d'assurance maladie, mais aussi sur l'année 2001 ce qui entraîne des reports de charges de l'exercice 2001 sur la gestion 2002, et d'une moins-value de recettes, notamment des recettes de TVA et de cotisations sociales.

1. Un surcroît de dépenses de 490,9 millions d'euros en 2002

Pour 2002, le présent projet de loi de finances rectificative fait état d'un surcroît de dépenses du budget annexe des prestations sociales agricoles de 490,9 millions d'euros 64 ( * ) qui se décompose ainsi :

- 22 millions d'euros supplémentaires au titre de la dette ;

- 372 millions d'euros supplémentaires au titre des dépenses de prestations maladie maternité, dont 166,93 millions d'euros correspondent à un report de charges de l'exercice 2001 sur la gestion 2002 au titre de l'acompte mensuel de la dotation globale hospitalière ;

- 5 millions d'euros supplémentaires au titre des dépenses de prestations invalidité ;

- 67,9 millions d'euros supplémentaires au titre des dépenses de prestations vieillesse, dont 26,47 millions d'euros de reports de charges de l'exercice 2001 sur la gestion 2002 au titre de la régularisation de la compensation démographique vieillesse pour 2000 ;

- 24 millions d'euros de reports de charges au titre de la participation du BAPSA aux dépenses de protection sociale des étudiants et des professionnels de santé.

2. Des moins-values de recettes de 256 millions d'euros en 2002

L'état A du présent projet de loi de finances rectificative donne le détail de la révision des évaluations de recettes du BAPSA pour 2002 :

- les recettes de cotisations sociales seront inférieures de 45 millions d'euros aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2002, avec une moins-value de 7,75 millions d'euros des recettes de cotisations familiales, de 22,83 millions d'euros des recettes de cotisations vieillesse et de 14,42 millions d'euros des recettes de cotisations maladie ;

- la cotisation incluse dans la taxe sur la valeur ajoutée rapportera 183 millions d'euros de moins que le montant prévu en loi de finances initiale pour 2002 ;

- enfin, la contribution de la Caisse nationale des allocations familiales au financement des prestations sera inférieure de 28 millions d'euros au montant prévu en loi de finances initiale pour 2002.

Au total les moins-values de recettes du BAPSA s'élèvent donc en 2002 à 256 millions d'euros.

Le BAPSA ayant été voté en léger suréquilibre de 900.000 euros au moment de l'adoption de la loi de finances initiale pour 2002 65 ( * ) , l'insuffisance à couvrir au titre du budget annexe des prestations sociales agricoles pour 2002 est donc de 746 millions d'euros , comme le confirment les données du tableau suivant, fourni par le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

BAPSA

PREVISIONS D'EXECUTION

( EXERCICE 2002 )

DEPENSES (en M€)

RECETTES (en M€)

INTITULES

LFI 2002

Prévision Exécution

Ecart Exécution/LFI

Collectif

INTITULES

LFI 2002

Prévision Exécution

Ecart Exécution/LFI

Collectif

Titre I

Dette

45,73

68,00

+ 22,27

+ 22

Cotisations sociales

1.727,99

1.683,00

- 44,99

- 45

Titre III

TVA ( nette de restitutions)

4.454,26

4.271,00

- 183,26

- 183

Taxes sur produits

264,35

264,35

-

Restitutions (Taxes)

mémoire

mémoire

mémoire

mémoire

FSV

155,35

155,35

-

Titre IV

FSI

13,31

13,31

-

Maladie, maternité

5.463,11

5.834,92

+ 371,81

+ 372

Invalidité

63,88

68,87

+ 4,99

+ 5

Contribution CNAF

242,85

215,16

- 27,69

- 28

Allocation remplacement

15,24

15,24

-

Compensation démographique

5.735,74

5.735,74

-

Assurance veuvage

1,83

1,83

-

Etalement cotisations

12,20

12,20

-

CSG

807,98

807,98

-

Prestations Familiales

590,13

590,13

-

CSSS

520,00

520,00

-

Prestations vieillesse

7.945,03

8.012,93

+ 67,90

+ 67,9

Recettes diverses

12,20

12,20

-

+ 456

Sésam-Vitale

7,62

7,62

-

AAH

55,80

55,80

-

PAM et étudiants

114,34

138,34

+ 24,00

+ 24

Subvention d'équilibre

270,20

270,20

-

+ 290

Total Général

14.259,11

14.750,08 (A)

+ 491,0

+ 490,9

Total Général

14.260,01

14.004,08 (B)

- 255,93

+ 490

Insuffisance à couvrir :

- 746,00

(B) - (A)

II. LES MODALITÉS DE LA RÉDUCTION DU BESOIN GLOBAL DE FINANCEMENT DU RÉGIME DE PROTECTION SOCIALE DES NON-SALARIÉS AGRICOLES

Le présent article vise à permettre une réduction du besoin global de financement du régime de protection sociale des non-salariés agricoles, chiffré par le présent projet de loi de finances rectificative à 746 millions d'euros en 2002.

Le présent article instaure ainsi des prélèvements sur trois organismes agricoles, au profit du BAPSA, pour un montant total de 456 millions d'euros, les 290 millions d'euros restant étant financés par une majoration de la subvention d'équilibre du budget général.

A. LE PRÉLÈVEMENT INSTITUÉ SUR LA SOCIÉTÉ ANONYME « UNIGRAINS »

Le I du présent article vise à instituer, pour 2002, au profit du BAPSA, un prélèvement de 165 millions d'euros sur la société anonyme « Union financière pour le développement de l'économie céréalière », également appelée UNIGRAINS.

Il est précisé que l'assiette de ce prélèvement est constituée par une fraction du produit du recouvrement et du placement de la taxe pour le financement des actions du secteur céréalier.

1. Statut d'UNIGRAINS et perception d'une taxe parafiscale

UNIGRAINS est une société anonyme ayant le statut de société financière au sens de la loi bancaire de 1984 66 ( * ) . Elle développe depuis sa création deux types d'activités de nature distincte, d'une part, une activité propre d'établissement financier pour le compte de ses actionnaires privés, d'autre part, une activité de gestion de fonds sans personnalité juridique, dont les ressources sont affectées à des missions spécifiques et dont les bénéfices ne sont pas distribuables aux actionnaires.

Majoritairement détenue par les organisations professionnelles et les banques, elle a été constituée en 1963 en vue de gérer un fonds de garantie à l'exportation des céréales résultant d'un accord passé entre l'Etat et les organismes professionnels représentant les producteurs de céréales. Ce fonds a fait l'objet d'une convention passée le 24 juillet 1964 entre UNIGRAINS et l'Office national interprofessionnel des céréales (ONIC). La convention prévoyait le reversement à UNIGRAINS d'une partie de la redevance dite « hors quantum » perçue sur le prix des céréales à l'exportation.

Entre 1964 et 1982 trois autres fonds, sans personnalité juridique, ont été constitués :

- le Fonds de solidarité des céréaliculteurs et des éleveurs (FSCE) ;

- le Fonds de dotation à l'élevage ;

- le Fonds d'utilisation réglementée (FUR).

Ces fonds, qui interviennent principalement par prises de participation, apports de quasi-fonds propres, prêts et subventions dans les entreprises des différentes filières agricoles, représentent l'essentiel de l'activité d'UNIGRAINS. Ils sont régis par une convention conclue entre l'Etat et UNIGRAINS le 7 juillet 1983 (modifiée par quatre avenants entre 1993 et 1997) qui en fixe les conditions de fonctionnement. Ils sont soumis au contrôle économique et financier de l'Etat.

Le Fonds de garantie à l'exportation des céréales ainsi que le Fonds de solidarité des céréaliculteurs et des éleveurs ont été constitués à partir de versements de l'ONIC correspondant, d'une part, aux prélèvements opérés sur le prix des céréales à la production, accessoirement aux charges hors quantum, et, d'autre part, à une partie de la taxe dite de « statistique ».

Puis le décret n° 82-723 du 23 août 1982 relatif à la taxe parafiscale perçue pour le financement des actions du secteur céréalier (taxe FASC) a disposé que la partie du produit de cette taxe qui reviendrait au FSCE lui serait affectée directement, sans passer par le canal de l'ONIC. Cette affectation directe de la taxe FASC à UNIGRAINS a précisément fait l'objet de la convention passée entre l'Etat et UNIGRAINS le 7 juillet 1983.

De 1993 à 1996, le FSCE, toujours géré par UNIGRAINS, a reçu des concours financiers provenant de l'Institut technique des céréales et des fourrages (ITCF). Ce transfert s'est fait sur la base d'une convention de « mandat » prévoyant qu'UNIGRAINS mettait en oeuvre pour le compte de l'ITCF un programme quinquennal d'actions concourant au développement des débouchés des céréales et produits dérivés et à l'exploration de nouveaux débouchés.

Enfin, les décrets successifs relatifs à la taxe FASC pris entre le 1 er juillet 1997 et le 30 juin 2000, ont à nouveau prévu l'affectation directe au FSCE d'une partie de cette taxe.

L'affectation de la FASC au FSCE a été définitivement supprimée à compter de la campagne 2000/2001, par anticipation sur les dispositions de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 prévoyant la disparition définitive de toutes les taxes parafiscales en 2004.

Principales ressources externes dont a bénéficié UNIGRAINS depuis sa création

Période d'affectation des ressources


Nom de la ressource

Texte l'établissant

% d'affectation à Unigrains


Autres bénéficiaires

Modalités à versement à Unigrains

Montant
perçu par Unigrains

(en )

1964 -1969

Redevance
hors quantum

Nd

Nd

Nd

Indirect (via l'ONIC)

6 M €

1970 - 1982

Taxe
statistique

Loi n° 50-928 du 08/08/50 modifiée et avenant du 20/10/70 à la convention du 24/07/64

Variable selon les céréales

ONTC & ITCF

Indirect (via l'ONIC)

202 M €

1982 - 1992

Taxe
FASC

Décrets n° 82-733 du 23/08/82 et n° 87-677 du 17/08/87

UNIGRAINS  40 %

ONIC 48 %

ITCF 12 %

Direct

FSCE 1 :
51 M €

FSCE 2 A :
44 M €

FSCE 2B :
51 M €

1993-1996

Reversement par l'ITCF d'une partie de la taxe FASC

Décret n° 92-1122 du 02/10/92 et convention ITCF

Montant forfaitaire annuel fixé dans la convention de mandat

ONIC
et ITCF

Indirect

(via l'ITCF)

17 M €

1997 - 2001

Taxe
FASC

Décret n° 97-174 du 25/02/97 et n° 97-1265 du 29/12/97

49, 0 % (96/97) puis 8,5 %

ONIC
et ITCF

Direct

48 M €

Désormais, le décret n° 2000-1296 du 26 décembre 2000, instituant une taxe parafiscale pour le financement des actions du secteur céréalier, précise que le produit de cette taxe est affecté pour partie à l'ONIC, pour partie à l'ITCF, jusqu'à la fin de la campagne 2002/2003.

2. La justification juridique du prélèvement de 165 millions d'euros sur UNIGRAINS

L'article 13 du décret n° 80-854 du 30 octobre 1980 relatif aux taxes parafiscales dispose que, « en application de l'article 9 de la loi susvisée du 25 juillet 1953, en cas de suppression ou de suspension d'une taxe parafiscale ou de dissolution de l'organisme bénéficiaire, un arrêté conjoint des ministres de tutelle détermine les conditions dans lesquelles sera poursuivi le recouvrement des états exécutoires et seront apurés les comptes relatifs aux opérations en cours. Le même arrêté décide, s'il y a lieu, la liquidation du patrimoine acquis au moyen du produit de la taxe et fixe les modalités de cette liquidation. Les boni de liquidation sont versés au Trésor. Toutefois, ils peuvent, par décret en Conseil d'Etat, pris sur le rapport des ministres de tutelle, être dévolus en tout ou partie soit à l'organisme lui-même, soit à des organismes poursuivant un objet semblable à celui en vue duquel les taxes supprimées avaient été instituées ».

En outre, l'article 11 de la convention du 7 juillet 1983 entre l'Etat et UNIGRAINS précise que, « en cas de suppression du FSCE ou du FUR ou de transfert des Fonds, ou en cas de dénonciation de l'actuelle convention, la dévolution des actifs, des droits et des obligations des différents Fonds se fera par voie conventionnelle ou, à défaut, dans les conditions prévues à l'article 13 du décret de 30 octobre 1980 ».

Dès lors, dans la mesure où depuis la campagne 2000/2001, UNGRAINS n'est plus affectataire direct de la taxe FASC, se pose la question de la liquidation du patrimoine acquis au moyen du produit de cette taxe parafiscale et de l'identification de la part du patrimoine au bilan d'UNIGRAINS issue des ressources provenant de cette taxe.

Cette question a fait l'objet d'un rapport d'audit sur la valorisation du patrimoine et la situation fiscale de la société UNIGRAINS établi conjointement par l'inspection générale des finances et l'inspection générale de l'agriculture en avril 2002, à la demande du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ainsi que du ministre de l'agriculture.

a) Un imbroglio juridique

(1) L'analyse très critique de la Cour des comptes en 1998

Dans son rapport public de 1998, la Cour des comptes avait consacré un chapitre à l'utilisation du produit de taxes parafiscales par la société UNIGRAINS et l'Institut technique des céréales et des fourrages. À cet égard, elle soulignait notamment que « l'importance de leurs ressources les a conduits à constituer une trésorerie abondante et à accorder des aides qui ne correspondent ni à leur objet ni à celui des taxes qui les financent. En outre, la société UNIGRAINS, mal contrôlée par ses tutelles, se caractérise par une structure et une comptabilité particulièrement complexes, ainsi que par des avantages fiscaux qui posent problème au regard des règles de la concurrence ».

S'agissant du montant des ressources parafiscales perçues par UNIGRAINS, la Cour des comptes indiquait que « mise à part certains cas particuliers, UNIGRAINS utilise ses ressources d'origine publique, non seulement pour accorder des prêts et des prises de participations, mais aussi pour réaliser des placements de trésorerie. En conséquence, UNIGRAINS réalise une véritable accumulation de ressources parafiscales, d'autant plus rapide que les placements génèrent des produits qui viennent à leur tour augmenter ces ressources. (...) rien ne justifie l'importance d'une trésorerie qui représente fin 1997 plus de 5 ans d'interventions financières nouvelles en moyenne ».

S'agissant de la comptabilité de la société UNIGRAINS, la Cour des comptes a relevé son extrême complexité, qui « ne garantit même pas l'absence de transferts financiers en direction de l'activité privée ». En outre, elle estime que « ces pratiques comptables affectent la sincérité des comptes dans la mesure où, s'agissant des produits de placements de trésorerie, elles minorent le résultat de l'activité de gestion des ressources parafiscales (...); s'agissant des subventions elles majorent ce résultat ».

Enfin, s'agissant du régime fiscal de la société UNIGRAINS, la Cour rappelle que depuis sa création, UNIGRAINS n'est assujettie à l'impôt sur les sociétés qu'au titre de son activité privée. De ce fait, l'impôt versé représente un montant faible. Elle précise que « dans l'hypothèse d'un assujettissement de son activité de gestion des ressources parafiscales, UNIGRAINS serait au contraire amenée à verser au Trésor au cours des derniers exercices plus de 50 millions de francs par an. (...) le régime fiscal d'UNIGRAINS ne trouve pas de justification satisfaisante. UNIGRAINS est le propriétaire des concours financiers reçus de l'ONIC entre 1963 et 1982, et de l'ITCF entre 1993 et 1996, et qui atteignent 1,44 milliard de francs, et près de 2 milliards de francs si l'on prend en compte leurs produits financiers accumulés, soit 50 % du total du bilan d'UNIGRAINS. S'agissant des taxes parafiscales qui ont été affectées par décret à UNIGRAINS, l'idée que l'Etat en ait conservé la propriété est difficile à étayer ».

(2) Une mission d'audit sur la valorisation du patrimoine et la situation fiscale de la société UNIGRAINS en 2002

L'objectif de cet audit, mené conjointement par l'Inspection générale des finances et l'Inspection générale de l'agriculture, était notamment d'établir le montant des fonds gérés par UNIGRAINS attribués, d'une part, par affectation directe de taxes parafiscales, d'autre part, par attributions de subventions par des organismes tiers, et de déterminer une méthodologie équitable de répartition des produits financiers générés par l'activité d'UNIGRAINS, dans le respect des intérêts de l'Etat.

Le contenu de ce rapport confidentiel d'audit a été confié par le ministre, à sa demande, à votre rapporteur général. Les débats parlementaires à l'Assemblée nationale ont déjà pu faire état d'une partie du contenu de ce rapport. Dès lors, et dans le respect des règles relatives à la confidentialité des rapports d'inspection, votre rapporteur général souhaiterait s'arrêter ici sur les difficultés juridiques liées à l'identification de la part du patrimoine au bilan d'UNIGRAINS issue des ressources provenant de la taxe parafiscale.

L'incertitude juridique porte notamment sur les ressources d'UNIGRAINS susceptibles d'être concernées par le décret susvisé du 30 octobre 1980.

Selon une analyse de la direction des affaires juridiques du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, datant de septembre 1999, seule la part de la taxe FASC affectée directement à UNIGRAINS et le produit de son placement seraient susceptibles d'être concernés par les dispositions du décret du 30 octobre 1980. La Cour des comptes, dans les observations de son rapport public de 1998, notait que « s'agissant des taxes parafiscales qui ont été affectées par décret à UNIGRAINS, l'idée que l'Etat en ait conservé la propriété est difficile à étayer ». Sur le plan comptable, il faut cependant souligner que les fonds gérés avaient fait l'objet d'un traitement particulier et homogène, n'opérant aucune distinction entre les différents types de ressources externes perçues.

Le choix le plus restrictif retenu par les pouvoirs publics en cas de décision de liquidation du patrimoine d'UNIGRAINS issu des ressources provenant de la taxe FASC serait de ne retenir, au sein du patrimoine correspondant à chacune des cinq catégories de ressources versées à UNIGRAINS, que la part issue des ressources provenant de la taxe FASC affectée directement à UNIGRAINS et non par un canal indirect.

En effet, les dispositions de l'article 13 du décret susvisé du 30 octobre 1980 s'appliqueraient, en cas de décision par les pouvoirs publics de liquidation du patrimoine acquis au moyen du produit de la taxe, aux taxes parafiscales dont UNIGRAINS a été directement affectataire, à savoir la seule taxe FASC, et à la fraction du patrimoine acquise par UNIGRAINS au moyen de leur produit.

S'agissant de l'applicabilité de cet article aux autres ressources parafiscales reçues par UNIGRAINS, une incertitude juridique demeure. La fraction du patrimoine d'UNIGRAINS acquise au moyen de subventions ou de dons versés par des tiers tels que l'ONIC ou l'ITCF doit-elle être prise en compte ?

En outre, il faut rappeler que, dans la mesure où le patrimoine d'UNIGRAINS est composé de titres de placement, de titres de participation et d'obligations ainsi que de créances sur les entreprises auxquelles la société accorde des prêts, c'est la valeur de marché du patrimoine d'UNIGRAINS, acquis au moyen du produit de la taxe parafiscale, qui doit être prise en compte.

b) Les modalités du prélèvement de 165 millions d'euros institué par le présent article sur UNIGRAINS en 2002

Le présent article institue pour 2002, au profit du BAPSA, un prélèvement de 165 millions d'euros sur UNIGRAINS, en précisant que l'assiette de ce prélèvement est constituée par une fraction du produit de recouvrement et du placement de la taxe pour le financement des actions du secteur céréalier.

Par le présent article, le gouvernement décide donc, dans le but de faire face à un besoin de financement exceptionnel du BAPSA en 2002, de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 13 du décret n° 80-854 du 30 octobre 1980 sur les taxes parafiscales et de liquider le patrimoine acquis par UNIGRAINS au moyen du produit de la taxe FASC. De manière dérogatoire, ces boni de liquidation seront versés directement au BAPSA et non au Trésor, comme mentionné dans ce même article 13.

En outre, la précision selon laquelle l'assiette de ce prélèvement est constituée par une fraction du produit du recouvrement et du placement de la taxe FASC laisse à penser que le prélèvement de 165 millions d'euros sur UNIGRAINS ne constitue qu'une partie des boni de liquidation devant être versés par la société anonyme.

Dans le cas présent, le prélèvement prend la forme d'un impôt sur UNIGRAINS puisque le présent article en définit à la fois le montant et l'assiette.

La question se pose de savoir si ce prélèvement de 165 millions d'euros en 2002 ne risque pas de déséquilibrer durablement la trésorerie d'UNIGRAINS. D'après les informations recueillies par votre rapporteur général auprès des services compétents, le montant de la trésorerie d'UNIGRAINS s'élevait, au bilan de clôture 2001, à près de 333 millions d'euros. S'agissant de la trésorerie disponible, les chiffres présentés par UNIGRAINS font état de 172,3 millions d'euros, en déduisant les engagements restant à exécuter.

En outre, les informations fournies à votre rapporteur général s'agissant de l'évaluation de la valeur économique du patrimoine attribuable à la perception directe par UNIGRAINS de la taxe FASC font état d'un montant de l'ordre de 220 à 230 millions d'euros.

Votre rapporteur général estime donc que, dans la mesure où le gouvernement a décidé de mettre en oeuvre les dispositions de l'article 13 du décret du 30 octobre 1980 susvisé, sans tenir compte de la convention de 1983 qui liait l'Etat et UNIGRAINS, pour faire face à un déficit exceptionnel du BAPSA et à une situation d'urgence en matière de protection sociale des exploitants agricoles, le prélèvement de 165 millions d'euros institué en 2002 sur UNIGRAINS est acceptable dans le seul cadre juridique de cette liquidation du patrimoine acquis au moyen du produit d'une taxe parafiscale. Il souhaite toutefois préciser que ce cadre juridique reste encore très incertain et que le présent article ne contribue pas à le clarifier.

S'agissant, en outre, de la quasi-totalité de la trésorerie disponible de la société, un tel prélèvement ne saurait à l'évidence être répété.

B. LE PRÉLÈVEMENT INSTITUÉ SUR LES RÉSERVES DU FONDS NATIONAL DE GARANTIE DES CALAMITÉS AGRICOLES

Le II du présent article institue, pour 2002, au profit du BAPSA, un prélèvement de 130 millions d'euros sur les réserves du Fonds national de garantie des calamités agricoles dont les avoirs disponibles sont placés auprès de la Caisse centrale de réassurance.

1. Le régime juridique et la situation financière du Fonds national de garantie des calamités agricoles

L'article L. 361-1 du code rural dispose que le fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA) est chargé d'indemniser les dommages matériels causés aux exploitations agricoles par les calamités agricoles ainsi que de favoriser le développement de l'assurance contre les risques agricoles. En outre, l'article L. 361-5 du même code précise que les ressources du FNGCA affectées aux indemnisations sont constituées par :

- des contributions additionnelles aux primes ou cotisations afférentes aux conventions d'assurance souscrites par les exploitants agricoles ;

- une subvention inscrite dans le budget de l'Etat et dont le montant sera au moins égal au produit des contributions additionnelles ci-dessus mentionnées.

En outre, il est précisé, conformément aux dispositions de l'article L. 431-11 du code des assurances, que la gestion comptable et financière du FNGCA est assurée par la Caisse centrale de réassurance dans un compte distinct de ceux qui retracent les autres opérations pratiquées par cet établissement. Les frais exposés par la Caisse centrale de réassurance pour la gestion du fonds lui sont remboursés dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. Enfin, l'article R. 361-3 du code rural dispose que les avoirs disponibles du FNGCA sont placés par la Caisse centrale de réassurance en valeurs.

Au 31 décembre 2001, les réserves de trésorerie du FNGCA s'élevaient à 273 millions d'euros. Il faut noter que depuis 1993 et notamment depuis 1999, le montant de la subvention de l'Etat au FNGCA s'est drastiquement réduite, ne respectant donc pas le principe de financement du fonds à parité entre l'Etat et les exploitants agricoles posé par l'article L. 361-5 du code rural. Toutefois, sur le long terme, le principe de parité a été globalement respecté du fait des fortes contributions de l'Etat au Fonds de garantie suite à des sinistres d'ampleur exceptionnelle, en 1978 (gel et inondations de 1977), en 1985 et 1986 (sécheresse et gel), ainsi qu'en 1989 et 1990 (sécheresse).

2. Les modalités du prélèvement institué sur le FNGCA au profit du BAPSA en 2002

Un prélèvement de 130 millions d'euros est institué, pour 2002, sur les réserves du FNGCA dont les avoirs disponibles sont placés auprès de la Caisse centrale de réassurance.

La question se pose de savoir si les ressources en trésorerie du FNGCA disponibles au 31 décembre 2002 lui permettront d'assumer pleinement ses fonctions, définies aux articles L. 361-1 et suivants du code rural, notamment ses fonctions d'indemnisations, une fois le prélèvement de 130 millions d'euros, prévu par le présent article, effectué.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur général auprès des services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, le niveau prévisionnel des recettes et des dépenses du FNGCA pour 2002 fait apparaître un solde de trésorerie disponible à la fin de l'exercice 2002 de l'ordre de 120 à 140 millions d'euros, en tenant compte du prélèvement exceptionnel de 130 millions d'euros institué par le présent article.

Les recettes attendues pour 2002 sont évaluées à 101 millions d'euros et se décomposent comme suit :

- 86 millions d'euros au titre des contributions additionnelles ;

- 10 millions d'euros au titre de la subvention de l'Etat ;

- 5 millions d'euros au titre des ressources diverses, notamment les produits financiers.

Les dépenses prévisionnelles pour 2002 sont globalement estimées à 110 millions d'euros.

Toutes les projections de dépenses du FNGCA sont cependant susceptibles de varier en fonction du taux de souscription des agriculteurs à l'assurance récolte mise en place récemment et dont la prise en charge repose sur le financement d'une fraction des primes ou cotisations émises au titre des contrats d'assurance. Les prévisions de dépenses à ce titre sont de l'ordre de 5 à 8 millions d'euros pour 2002 et près de 10 millions d'euros pour 2003.

Les autres dépenses du fonds, notamment les reliquats d'indemnisations dues au titre des années antérieures et au titre de l'année en cours, devraient s'élever à 100 millions d'euros en 2002.

Il faut en effet garder à l'esprit qu'au cours de l'exercice 2002, le FNGCA devra non seulement solder une partie des indemnisations des principaux sinistres traités en 1999, 2000 et 2001, à savoir les sinistres intervenus suite aux tempêtes de décembre 1999 ainsi que les inondations de la Somme datant du printemps 2001, pour un montant de l'ordre de 46 millions d'euros, mais aussi les sinistres intervenus en 2002.

En outre, le risque de sécheresse agricole pour l'année 2002 semble se confirmer mais son intensité et sa durée ne sont toutefois pas encore connues avec certitude. S'il se confirme, il impliquera nécessairement une intervention exceptionnelle du FNGCA, au titre de l'année 2003, sans doute, dans la mesure où les dossiers liés à la sécheresse devraient parvenir à la Commission nationale des calamités agricoles et être instruits au cours de l'exercice 2003 et des exercices futurs, compte tenu des délais de constitution et d'instruction des dossiers de demande d'indemnisation. Ces instructions différées auront sans doute un effet de lissage sur la dépense du fonds dans les années à venir.

Les réserves actuelles de trésorerie du FNGCA autorisent donc aujourd'hui un prélèvement exceptionnel de 130 millions d'euros en 2002, tout en gardant à l'esprit le poids des possibles dépenses futures d'indemnisation, par nature difficilement prévisibles puisque liées à l'occurrence de calamités agricoles. Votre rapporteur général estime que la marge de manoeuvre du fonds, telle qu'elle subsiste à l'issue du prélèvement envisagé, ne devra pas être réduite à l'avenir.

Évolution comparée du montant des dépenses et de la trésorerie du FNGCA (1992-2002)

(en millions d'euros)

C. LE PRÉLÈVEMENT INSTITUÉ SUR LES RÉSERVES ET REPORTS À NOUVEAU DES CAISSES DE MUTUALITÉ SOCIALE AGRICOLE

1. Le dispositif proposé par le gouvernement

a) L'existence de réserves excédentaires des caisses de MSA

Le III du présent article institue pour 2002, au profit du BAPSA, un prélèvement de 161 millions d'euros sur les réserves et reports à nouveau des caisses de mutualité sociale agricole, au prorata de ces réserves et reports à nouveau disponibles inscrits à leurs comptes financiers au 31 décembre 2001.

Le recouvrement de ce prélèvement est assuré par la Caisse centrale de mutualité sociale agricole par compensation sur les financements qu'elle alloue aux caisses de mutualité sociale agricole.

Un rapport conjoint de l'inspection générale des finances, de l'inspection générale de l'agriculture et de l'inspection générale des affaires sociales, datant de janvier 2002 et consacré à la centralisation de la trésorerie de la Mutualité sociale agricole, a mis en évidence la constitution d'importantes réserves de trésorerie par la majorité des caisses départementales de mutualité sociale agricole.

C'est le système du financement à l'émission qui a conduit les caisses à constituer des réserves afin de couvrir le risque de non-recouvrement. Le décret n° 550 du 21 juin 1971, relatif à la gestion financière des caisses de mutualité sociale agricole, encadre ces réserves entre un minimum et un maximum et prévoit d'abonder la réserve par les résultats de gestion des caisses.

Les caisses de MSA sont ainsi tenues de constituer, d'après l'article 2 du décret du 21 juin 1971 susvisé, par affectation des excédents de gestion enregistrés à leurs comptes de pertes et profits, les réserves suivantes, qui sont seules autorisées :

- une réserve d'immobilisation en contrepartie des investissements effectués nécessaires au fonctionnement de la caisse, au financement des oeuvres sociales et à l'octroi de prêts aux ressortissants dans le cadre de l'action sanitaire et sociale ;

- une réserve générale destinée à couvrir les restes à recouvrer des cotisations techniques et de gestion ;

- des réserves spécifiques pour partie affectées à des activités complémentaires (médecine du travail, assurance complémentaire, accidents du travail des exploitants agricoles).

Ce système est à la base de l'autonomie financière des caisses de MSA. Selon les décisions du conseil d'administration, l'excédent de gestion peut donc être affecté à la constitution de marges de manoeuvre futures mais également au bénéfice des adhérents de façon indirecte (développement de l'action sociale et services de proximité) ou directe (baisse des cotisations de gestion, date et taux provisionnel d'appel des cotisations des exploitants, financement des reports d'échéance).

Le rapport d'inspection précité a mis en évidence, en bilan 2000, un montant total des réserves de MSA de 1,84 milliard d'euros, dont 1,64 milliard d'euros provenant des réserves des caisses départementales et près de 200 millions d'euros provenant des réserves de la caisse centrale. Le rapport souligne que l'accumulation de ces réserves a été peu maîtrisée par les caisses de MSA et que ces dernières « peuvent toujours agir sur leur excédent de gestion pour enrayer la croissance des réserves. Cette action passe notamment par le développement de l'action sanitaire et sociale envisageable après plusieurs années de gel des budgets, la modulation à la baisse des cotisations de gestion des exploitants et salariés mais également le report des dates d'appel des cotisations exploitants. Force est toutefois de constater que ces actions qui mobilisent les réserves en soutien de trésorerie et affectent les produits financiers, ne sont que très marginalement mises en oeuvre même au niveau des caisses les plus dotées de réserves ».

b) Les modalités du prélèvement de 161 millions d'euros sur les caisses de MSA prévues par le gouvernement

Le présent article vise à utiliser les réserves et reports à nouveau des caisses de mutualité sociale agricole pour financer le déséquilibre financier du BAPSA en 2002, à hauteur de 161 millions d'euros.

L'article 2 du décret du 21 juin 1971 précité définit la nature des réserves constituées par les caisses de MSA tandis que son article 4 précise les modalités d'affectation des résultats excédentaires de chaque exercice aux différents types de réserves. Lorsque les réserves ont atteint les plafonds fixés par le décret, les résultats excédentaires, quelle que soit leur origine, sont reportés en recettes sur l'exercice suivant et viennent en déduction des cotisations à mettre en recouvrement.

C'est à la lumière de ces deux articles du décret de 1971 qu'il faut analyser les dispositions du présent article selon lesquelles un prélèvement de 161 millions d'euros est institué pour 2002 sur les réserves et reports à nouveau des caisses de mutualité sociale agricole, au prorata de ces réserves et reports à nouveau disponibles inscrits à leurs comptes financiers au 31 décembre 2001.

Les informations fournies à votre rapporteur général n'ont pas permis de connaître avec exactitude la ventilation des différents prélèvements effectués sur les 78 caisses départementales de MSA.

Votre rapporteur général est toutefois en mesure d'indiquer que dans le texte initial du gouvernement, avant son examen à l'Assemblée nationale :

- les caisses n'ayant pas constitué de réserves ou ayant des réserves négatives ne devaient pas être mises à contribution ;

- le calcul des réserves disponibles a été effectué en retranchant du montant des réserves hors immobilisation, le montant de la réserve technique et celui de la mobilisation du fonds de solidarité, et en ne tenant compte que des résultats des caisses ayant constitué des réserves positives.

Dès lors, une fraction de l'ordre de 35 % des réserves disponibles des 65 caisses départementales disposant de réserves disponibles positives, sera prélevée sur ces dernières afin de contribuer au financement du déséquilibre du BAPSA.

Total des réserves des caisses de la Mutualité sociale agricole
au 31 décembre 2001

(en millions d'euros)

Réserves hors immobilisation (1)

1.091

Réserve technique (2)

620,8

Mobilisation des réserves destinées au Fonds de solidarité (3)

106,4

Solde [1 - (2 + 3)]

364

Réserves disponibles des caisses ayant un solde positif

445,6

Prélèvement en 2002

161

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Le présent article dispose en outre que le recouvrement de ce prélèvement est assuré par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, par compensation sur les financements qu'elle alloue aux caisses de mutualité sociale agricole.

Il revient donc à la Caisse centrale de MSA de collecter l'ensemble des prélèvements sur chacune des caisses concernées, par compensation sur les financements qu'elle leur alloue, c'est-à-dire concrètement que la Caisse centrale minorera du prélèvement prévu sur chaque caisse départementale concernée le versement de dotations effectué aux dites caisses. Cette procédure de recouvrement a pour objet de réduire les flux financiers de sens contraire. La Caisse centrale de MSA effectuera ensuite le transfert du montant total du prélèvement (161 millions d'euros) au BAPSA.

2. Le dispositif adopté à l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement à l'initiative de notre collègue député Yves Censi, rapporteur spécial du BAPSA, modifiant les modalités du prélèvement de 161 millions d'euros institué en 2002 sur les caisses de mutualité sociale agricole.

Il est précisé que ce prélèvement est effectué selon les modalités suivantes :

- 16 millions d'euros sur les allocations de gestion versées aux caisses en vertu de l'article 723-11 du code rural, répartis au prorata du montant de l'assiette des cotisations mentionnées à l'article 731-10 du même code émises au titre de l'année 2001 ;

- 145 millions d'euros sur les réserves et reports à nouveau des caisses de mutualité sociale agricole, au prorata de ces réserves et reports à nouveau disponibles inscrits à leurs comptes financiers au 31 décembre 2001.

Ainsi, 10 % du montant total du prélèvement institué pour 2002 sur les caisses de MSA seront prélevés sur les allocations de gestion versées aux caisses de MSA en proportion du montant de l'assiette des cotisations techniques levées par chaque caisse. Cette forme de prélèvement doit permettre de faire participer toutes les caisses, même symboliquement, au financement de ce prélèvement en retenant une contribution minimale calculée au prorata de l'assiette des cotisations sociales des non-salariés agricoles émises au titre de l'année 2002, cette assiette sociale étant représentative de leur poids respectif dans le financement total de la gestion administrative de la MSA.

Le reste du prélèvement, soit 145 millions d'euros, demeure réparti, comme initialement proposé par le gouvernement, au prorata des réserves et reports à nouveau disponibles des caisses de MSA.

La modification ainsi adoptée à l'Assemblée nationale a pour but de faire participer toutes les caisses de MSA, ne serait-ce que de façon symbolique, au prélèvement de 161 millions d'euros institué au profit du BAPSA. Les modalités initialement retenues par le gouvernement avaient en effet pour conséquence de faire porter un effort relatif plus substantiel sur les caisses ayant su gérer leurs dépenses de fonctionnement. Toutefois, il faut garder à l'esprit que le dispositif adopté à l'Assemblée nationale, reposant sur l'assiette des contributions émises, conduira à réduire les moyens de fonctionnement des caisses, y compris de celles qui ne sont pas concernées par la deuxième partie du prélèvement car ne disposant pas de réserves positives.

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Conscient du caractère exceptionnellement grave de la situation financière du BAPSA en 2002, votre rapporteur général ne peut désapprouver la volonté du gouvernement de trouver des solutions pour y remédier.

Ces solutions ont consisté pour 2002, outre à doubler la subvention d'équilibre du budget général versée au BAPSA, à instituer trois prélèvements exceptionnels sur des organismes agricoles à hauteur de 456 millions d'euros.

Votre rapporteur général souhaiterait toutefois exprimer son inquiétude quant à l'évolution future de la situation financière du BAPSA et son souci de voir mettre en place un cadre comptable et financier stable du BAPSA.

A. LA DISPARITION À TERME DU BAPSA

Il convient ici de rappeler que, si la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances n'a pas supprimé les budgets annexes, la rédaction de son article 18 rend encore plus rigoureuses les conditions qui autorisent d'y recourir. Ainsi, il ressort du texte adopté et des travaux préparatoires, que le législateur organique a estimé nécessaire de conserver le seul budget annexe de l'aviation civile. Le BAPSA sera donc amené à disparaître au plus tard d'ici le premier exercice d'entrée en vigueur des dispositions budgétaires de la nouvelle loi organique, à savoir d'ici 2006.

La suppression à terme du BAPSA devrait entraîner son intégration dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ainsi, l'ensemble du régime social agricole devrait être examiné par le Parlement au moment de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, comme l'ensemble des autres régimes sociaux des non-salariés. En outre, il faut rappeler que le BAPSA ne recouvre à l'heure actuelle qu'une partie du régime social des exploitants agricoles puisqu'il exclut, de fait, les salariés agricoles, le régime des accidents du travail des exploitants agricoles ainsi que les dépenses de gestion, d'action sanitaire et sociale en faveur des agriculteurs.

B. LA NÉCESSITÉ D'UNE GESTION BUDGÉTAIRE RÉALISTE DU BAPSA

Comme votre rapporteur général l'a souligné précédemment, le déséquilibre financier du BAPSA en 2002 résulte notamment d'une dérive des dépenses du budget annexe, notamment de ses dépenses d'assurance maladie, et d'une surévaluation, en loi de finances initiale, du montant attendu de certaines recettes en 2002.

Ce double phénomène agissant dans le même sens sur le résultat du BAPSA n'est pas nouveau puisqu'il s'est répété tous les ans depuis 1997 provoquant chaque année un creusement du déficit d'exécution du BAPSA pour parvenir en 2002 à une situation extrême et à un besoin de financement de l'ordre de 750 millions d'euros.

Votre rapporteur général estime donc à l'avenir indispensable de faire reposer la préparation du BAPSA sur des prévisions de recettes et de dépenses réalistes, tenant compte de la tendance effective des années antérieures et des prévisions économiques.

C. « AUX GRANDS MAUX LES GRANDS REMÈDES ... »

Dans son analyse des modalités des trois prélèvements institués sur des organismes agricoles au profit du BAPSA, votre rapporteur général a déjà eu l'occasion d'exprimer certaines de ses réserves tout en reconnaissant le caractère incontournable de la situation et, donc, la nécessité de trouver des solutions de financement immédiates.

Votre rapporteur général tient toutefois à rappeler que, de façon générale, la concertation et la négociation valent mieux que la pratique de ponctions autoritaires. Il estime en outre que le besoin de financement du BAPSA risque de perdurer au delà de 2002 du fait, par exemple, de la mise en oeuvre de la loi n° 2002-308 du 4 mars 2002 tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire pour les non-salariés agricoles, dont les premières manifestations financières devraient être constatées en 2003, du fait également de la dérive des dépenses d'assurance maladie qui ne devraient sans doute pas être maîtrisées d'ici 2003.

Tout cela rend indispensable de trouver des sources de financement pérennes au BAPSA et de faire reposer le BAPSA sur des prévisions de dépenses et de recettes réalistes, afin de garantir à terme l'équilibre du budget annexe sans avoir recours à de tels prélèvements exceptionnels. Des propositions claires sont attendues du gouvernement, d'ici à la prochaine loi de finances initiale, en vue de redéfinir les conditions d'un équilibre durable de ce régime social.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 3

Equilibre général

Commentaire : le présent article chiffre le montant du déficit budgétaire pour 2002 à 46 milliards d'euros.

I. UN ALOURDISSEMENT DU DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE 15,55 MILIARDS D'EURO

Le solde général du présent collectif tel qu'il figure au sein du présent article s'élève à - 46,005 milliards d'euros.

A. LA PRISE D'ACTE DE LA DÉGRADATION DES COMPTES DE L'ÉTAT À HAUTEUR DE 13 MILLIARDS D'EUROS

1. 8,64 milliards de moins-values de recettes fiscales et non fiscales

Ces révisions de recettes sont principalement dues à l'effet de la diminution du taux de croissance du PIB sur le rendement escompté de l'impôt sur les sociétés (- 2,54 milliards d'euros) ainsi que sur celui de la TVA nette (- 2,95 milliards d'euros). A cela s'ajoute, pour 3,26 milliards d'euros, la dégradation du niveau prévisionnel des recettes non fiscales.

2. Un accroissement des dépenses du budget général de 4,96 milliards d'euros

Ces ouvertures de crédits correspondent, pour une très large part, à des postes de dépenses sous-évaluées en loi de finances initiale et à « l'apurement des dettes du passé » conformément à ce qui figurait dans les conclusions de l'audit de MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse.

3. Deux mesures techniques de réduction du déficit pour 600 millions d'euros

Il s'agit, d'une part, d'une diminution du prélèvement au profit de l'Union européenne pour 1,9 milliard d'euros « en ligne avec l'audit », qui accroît d'autant le niveau des recettes nettes du budget général, et d'autre part d'une dégradation de 1,3 milliard d'euros du solde des comptes spéciaux du Trésor.

B UNE BAISSE OPPORTUNE DE L'IMPÔT SUR LE REVENU POUR 2,55 MILLIARDS D'EUROS

Cette mesure vient accroître le niveau du déficit budgétaire qui s'élève ainsi à 46 milliards d'euros, soit 3,06 points de PIB.

II. LA MODIFICATION INTRODUITE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de sa commission des finances unanime, et contre l'avis du gouvernement, un amendement majorant de 800.000 euros le produit des participations de l'Etat dans des entreprises financières (ligne 110 des recettes non fiscales), cette majoration étant, selon les termes mêmes de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, « un appel à une meilleure gestion et à une recherche d'économies au sein de la Banque de France et des organismes qui en dépendent ».

La majoration de 800.000 euros du dividende versé par la Banque de France, dividende estimé à 450 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2002, serait la traduction « symbolique » de l'économie qui pourrait être réalisée en cas de suppression du Conseil de la politique monétaire. L'Assemblée nationale estime, en effet, que la maîtrise des dépenses publiques doit commencer par une remise en cause des crédits accordés à cet organisme.

Tout en reconnaissant la nécessité d'un débat sur un sujet cher au coeur de la commission des finances de l'Assemblée nationale, puisque déjà évoqué lors de l'examen du projet de loi de finances initiale pour 2002, M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, a émis, à juste raison, des réserves sur la portée réelle de cette disposition dans la mesure où la suppression dudit Conseil, si elle intervenait, ne pourrait avoir d'effet sur les dividendes versés par la Banque de France en 2002, ceux-ci étant assis sur les comptes 2001 déjà arrêtés.

La majoration pour 800.000 euros de la ligne 110 des recettes non fiscales est donc purement indicative, s'agissant de simples prévisions de recettes non fiscales qui sont malheureusement trop souvent éloignées des réalités de l'exécution budgétaire, comme en témoigne l'évaluation volontairement biaisée, en loi de finances initiale, des dividendes versés par Électricité de France. C'est pourquoi votre rapporteur général ne vous propose pas de revenir sur le vote de l'Assemblée nationale, tout en formulant les remarques suivantes :

1) la question du devenir du Conseil de la politique monétaire et de son articulation avec le Conseil général de la Banque de France ne peut être sérieusement traitée de façon émotionnelle et au détour d'un amendement indicatif ;

2) il appartient au gouvernement de proposer les adaptations structurelles de la Banque de France qui peuvent lui paraître nécessaires, dans le nouveau contexte du Système européen des banques centrales (SEBC) et de préférence dès le prochain projet de loi sur la sécurité financière ;

3) tout effort d'économies et toute remise en cause de structures obsolètes vont dans le sens des principes qui inspirent votre commission des finances.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

DEUXIÈME PARTIE :

MOYENS DES SERVICES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE PREMIER :

DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 2002
I. - OPÉRATIONS À CARACTÈRE DÉFINITIF
A. - Budget général

ARTICLE 4

Dépenses ordinaires des services civils. Ouvertures

Commentaire : le présent article ouvre au titre des dépenses ordinaires des services civils pour 2002 des crédits supplémentaires s'élevant à 3.844.604.696 euros. La répartition des crédits est donnée à l'état B annexé au présent collectif.

Les principales ouvertures de crédits concernent :

- le ministère des affaires étrangères : 137.702.799 euros ;

- le ministère de l'agriculture : 249.570.000 euros ;

- le budget des charges communes : 1.135.210.000 euros ;

- le ministère de l'emploi : 495.000.000 euros ;

- le ministère de la santé et de la solidarité : 1.628.000.000 euros ;

- le ministère de l'intérieur et de la décentralisation : 100.750.000 euros.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 5

Dépenses en capital des services civils. Ouvertures

Commentaire : le présent article ouvre au titre des dépenses en capital des services civils pour 2002 des autorisations de programme et des crédits de paiement supplémentaires s'élevant respectivement à 124.565.239 euros et à 265.415.015 euros dont la répartition figure à l'état C annexé au présent collectif.

Les principales ouvertures de crédits concernent :

- le ministère des affaires étrangères avec 137 millions d'euros de crédits de paiement ouverts au titre VI ;

- le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie avec 109.940.000 euros d'autorisations de programme et 43.1600.000 euros de crédits de paiement ouverts au titre VI ;

- le ministère de l'équipement, des transports et du logement avec 66.600.000 euros inscrits au titre V.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 6

Dépenses ordinaires des services militaires. Ouvertures

Commentaire : le présent article ouvre des crédits supplémentaires au titre des dépenses ordinaires des services militaires pour 2002 s'élevant à 808.000.000 euros.

Ces crédits se répartissent comme suit :

- opérations extérieures (OPEX) : 380 millions d'euros ;

- revalorisation de la condition militaire : 189 millions d'euros ;

- rémunérations des personnels civils et militaires, hors OPEX : 105 millions d'euros ;

- loyers de la gendarmerie : 68 millions d'euros ;

- apurement de dettes envers la SNCF : 66 millions d'euros.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7

Dépenses en capital des services militaires. Ouvertures

Commentaire : le présent article ouvre au titre des dépenses en capital des services militaires pour 2002 des crédits de paiement supplémentaires s'élevant à 100 millions d'euros.

Ces crédits correspondent à un ajustement aux besoins des crédits d'entretien des matériels de l'armée de l'air.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

B. - Budgets annexes

ARTICLE 8

Dépenses des budgets annexes

Commentaire : le présent article tend à ouvrir au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, au titre des dépenses du budget annexe des prestations sociales agricoles pour 2002, un crédit supplémentaire s'élevant à la somme de 490,9 millions d'euros.

En 2002, le budget annexe des prestations sociales agricoles présente un déficit d'exécution de 746 millions d'euros, résultant à la fois d'une sous-estimation des dépenses et d'une surévaluation du produit des recettes en loi de finances initiale.

Le présent article a pour objet de couvrir l'augmentation des dépenses du BAPSA constatée en 2002, à hauteur de 490,9 millions d'euros et qui correspondent aux éléments suivants :

- 22 millions d'euros supplémentaires au titre de la dette ;

- 372 millions d'euros supplémentaires au titre des dépenses de prestations maladie maternité, dont 166,93 millions d'euros correspondent à un report de charges de l'exercice 2001 sur la gestion 2002 au titre de l'acompte mensuel de la dotation globale hospitalière ;

- 5 millions d'euros supplémentaires au titre des dépenses de prestations invalidité ;

- 67,9 millions d'euros supplémentaires au titre des dépenses de prestations vieillesse, dont 26,47 millions d'euros de reports de charges de l'exercice 2001 sur la gestion 2002 au titre de la régularisation de la compensation démographique vieillesse pour 2000 ;

- 24 millions d'euros de reports de charges au titre de la participation du BAPSA aux dépenses de protection sociale des étudiants et des professionnels de santé.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

II. - AUTRES DISPOSITIONS

ARTICLE 9

Ratification de décret d'avance

Commentaire : le présent article ratifie le décret d'avance n° 2000-143 du 7 février 2002.

I. UNE PROCÉDURE DISSOCIÉE ENTRE LE DÉCRET D'AVANCE ET LE DÉCRET D'ANNULATION

A. LE DÉCRET D'AVANCE RESTE ENCORE SOUS LE RÉGIME DE « L'ANCIENNE ORDONNANCE »

La procédure du décret d'avance est régie par l'article 11 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances.

L'ouverture de crédits doit être justifiée par une condition d'urgence ; l'équilibre défini par la dernière loi de finances ne doit pas être modifié et la ratification du décret d'avance est demandée dans la plus prochaine loi de finances.

A compter de 2006 entrera en vigueur le nouveau régime mis en place par l'article 13 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances 67 ( * ) : les décrets d'avances seront transmis sept jours avant publication aux commissions des finances du Parlement et pourront faire l'objet au préalable d'un avis transmis au Premier ministre.

B. LE DÉCRET D'ANNULATION EST, LUI, DÉJÀ RÉGI PAR LA NOUVELLE LOI ORGANIQUE

Depuis le 1 er janvier 2002, le décret d'annulation, qui remplace l'ancien arrêté d'annulation, est régi par le I de l'article 14 de la loi organique précitée. Des crédits peuvent être ainsi annulés soit en cas de détérioration de l'équilibre budgétaire défini par la précédente loi de finances, soit parce qu'ils sont devenus sans objet. Les projets de décrets d'annulation sont communiqués aux commissions des finances et aux commissions compétentes du Parlement avant leur publication au Journal officiel . Ils sont proposés à la ratification dans le plus prochain projet de loi de finances.

II. LE CONTENU DES MESURES FIGURANT DANS LE DÉCRET DU 7 FÉVRIER 2002

L'enjeu financier est modeste, il ne porte que sur 13,8 millions d'euros, mais il concerne un dossier symbolique. Il s'agit d'une aide de court terme pour Air Lib.

Ce décret d'avance a vocation à majorer de 13,8 millions d'euros les crédits du compte de prêt n° 903-05 « Prêts du Fonds de développement économique et social » 68 ( * ) , afin d'accorder un prêt de 30,5 millions d'euros à la compagnie aérienne Air Lib. Le compte spécial, sur le chapitre « prêts de restructuration industrielle », avait déjà été abondé à hauteur de 16,7 millions d'euros par arrêté de report de crédits en date du 4  janvier 2002.

Il s'agit d'accorder à la compagnie Air Lib un prêt permettant sa survie à court terme, compte tenu des dettes non acquittées par la compagnie Swissair, ancien actionnaire majoritaire.

Le prêt a été effectué par la banque Natexis au nom de l'Etat, et aux conditions du marché. Afin de répondre aux conditions posées par la Commission européenne (aide de court terme), il s'agit d'un prêt de 6 mois, renouvelable une seule fois.


Le décret d'annulation associé au décret d'avance

Les sommes annulées qui s'élèvent à 13,8 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations de programme concernent le seul budget « Equipement, transports et logement »

Urbanisme et logement

7,6 millions d'euros en AP et CP sur le chapitre 65-48 (article 30) : il s'agit des crédits du prêt à taux zéro.

Transports et sécurité routière

4,7 millions d'euros en AP et CP sur le chapitre 53-47 (article 30) : il s'agit des crédits d'investissement sur le réseau routier national hors Ile-de-France.

On observera donc que les 12,3 millions d'euros annulés portent uniquement sur des crédits d'investissement, destinés d'une part aux aides à la pierre dans le secteur privé (prêt à taux zéro) et d'autre part aux infrastructures routières qui contribuent à l'aménagement du territoire.

Tourisme

Les crédits annulés au budget du tourisme, 1,5 million d'euros en AP et en CP, sont prélevés sur le chapitre 66-03 « développement territorial du tourisme » du titre VI « Subventions d'investissement accordées par l'Etat ». Seront ponctionnés :

- l'article 10 « Contrat de plan Etat-régions » à hauteur de 900.000 euros , et au sein de cet article, l'avenant « tempête » ;

- l'article 20 « Programmes d'aménagements touristiques » et en son sein, la réserve parlementaire à hauteur de 150.000 euros ;

- l'article 30 « Programme de consolidation des hébergements de tourisme social » (le « plan patrimoine ») à hauteur de 450.000 euros .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE II :

DISPOSITIONS PERMANENTES

ARTICLE 10

Transfert par l'Etat du réseau de transport du gaz et exonération des droits de mutation dus à raison de ces opérations

Commentaire : le présent article complète sur deux points les dispositions de l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001. Il précise que les transferts, prévus par ce texte, aux opérateurs, de la propriété des réseaux de transport du gaz naturel, seront exonérés de droits de mutation. Il ordonne, d'autre part, la remise aux collectivités locales concernées, en pleine propriété, des ouvrages de transport relevant normalement du régime de la distribution publique de gaz.

I. LES DISPOSITIONS DE LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE POUR 2001 ET LEURS LACUNES

A. LA PROGRAMMATION DE LA VENTE AUX OPÉRATEURS DU RÉSEAU DE TRANSPORT GAZIER

1. Les intentions de la loi de finances rectificatives pour 2001

Dans la perspective de l'ouverture à la concurrence de l'ensemble des activités considérées, l'article 81 de la loi de finances rectificatives pour 2001 69 ( * ) a programmé, selon un calendrier assez serré, le transfert aux opérateurs intéressés (anciens concessionnaires ou nouveaux exploitants) de la propriété des ouvrages de transport du gaz naturel 70 ( * ) .

Cette mesure, précédée d'une résiliation des concessions en vigueur, devait présenter l'avantage pour les prestataires concernées d'améliorer :

- la structure de leur bilan,

- l'identification par eux-mêmes des coûts correspondants,

- et, partant, leur compétitivité globale.

Un processus comportant les principales étapes suivantes était prévu :

- dans l'hypothèse où l'opérateur ne serait pas candidat à l'achat du réseau qu'il utilisait, sa concession serait maintenue jusqu'à la publication d'un décret en Conseil d'Etat précisant les obligations qui s'imposent à tout exploitant, ancien ou nouveau ;

- dans le cas contraire, la concession de l'exploitant serait résiliée dès publication de la loi (qui a eu lieu le 28 décembre 2001) et ce dernier devrait verser, dans les trois mois suivants, un acompte égal à la valeur de ses droits tels que constatés dans ses comptes au 31 décembre 2000.

En tout état ce cause, une commission spéciale, mise en place dans les 5 mois, serait chargée de déterminer le montant de l'indemnité de résiliation anticipée et le prix de cession des biens transférés (le solde entre les deux devant être versé au plus tard le 30 septembre 2002).

2. Un calendrier respecté

Les trois principaux opérateurs de transport du gaz, Gaz de France (GDF), Gaz du Sud-Ouest (GSO) 71 ( * ) et la Société Elf-Aquitaine de réseau (SEAR) se sont portés candidats à l'achat des infrastructures de réseaux qu'ils exploitaient. Ils ont versé à ce titre, conformément aux dispositions ci-dessus rappelées, un acompte de 188 millions d'euros 72 ( * ) .

En cessation d'activité depuis mars 2002, et ne fournissant à quelques entreprises, dans le Nord-Pas-de-Calais, que du gaz de cokerie (issu de la combustion, après extraction, du charbon) la société Cokes de Drocourt, seule, n'a pas pu profiter de l'opportunité ainsi offerte par l'Etat à l'ensemble des concessionnaires. Elle n'exploite cependant que 74 kilomètres de réseau contre 29.870 kilomètres pour GDF, 3.660 kilomètres pour GSO, et 644 kilomètres pour la SEAR.

La commission spéciale prévue a bien été constituée le 3 janvier 2002 73 ( * ) . Dans le rapport qu'elle a remis, le 28 mai 2002, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, elle a évalué à :

- 5,44 milliards d'euros le montant des indemnités de résiliation anticipée de concession ;

- 5,56 milliards d'euros, celui du prix de cession des biens transférables 74 ( * ) .

Le solde de l'opération pour l'Etat est donc légèrement positif (5,56 - 5,54 = 0,12 milliard d'euros).

Contrairement à ce qui s'était passé en 1997 pour le transfert du réseau électrique 75 ( * ) , la loi de finances rectificative pour 2001 a donc prévu que le transfert du réseau de transport de gaz aux opérateurs concernés s'effectue à titre onéreux et non gratuit.

Le contexte est cependant différent, compte tenu du caractère de service public plus marqué du réseau électrique et, concernant ses ouvrages 76 ( * ) , de la difficulté, plus grande, d'en fixer le prix ainsi que de leur régime juridique beaucoup plus flou (la propriété pouvant en être parfois considérée, comme revenant déjà plutôt à EDF qu'à l'Etat).

La charge nette d'acquisition des infrastructures gazières par les concessionnaires intéressés apparaît, en tout état de cause, comme étant modérée, compte tenu de l'indemnité qu'ils doivent percevoir de l'Etat pour rupture anticipée de leur contrat. L'amélioration de leur compétitivité ne s'en trouvera donc pas amoindrie, ce dont votre rapporteur général ne peut que se féliciter, d'autant que les opérations de transferts prévues seront exonérées de droits de mutation.

B. LES LACUNES DU PRÉCÉDENT DISPOSITIF

Le dispositif prévu par l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 comportait deux principales omissions, concernant :

- le traitement fiscal des opérations de transfert envisagées ;

- l'inclusion éventuelle, par erreur, dans les biens transférés, de parties de réseau relevant non pas du transport mais de la distribution du gaz 77 ( * ) qui devraient, de ce fait, appartenir aux communes plutôt qu'à l'Etat.

1. Les imprécisions fiscales

Dans son commentaire de l'article 81 précité, votre rapporteur général avait évoqué « le manque de clarté » de ce texte concernant le régime fiscal des opérations considérées. Craignant que de lourds droits d'enregistrement et de mutation soient exigés des intéressés, et s'ajoutent, pour eux, à la charge résultant de l'achat des réseaux, il s'était interrogé sur l'opportunité de prévoir un étalement des divers versements dont ils auraient pu être ainsi redevables.

L'exonération prévue par le présent article vient, sur ce point, apaiser ses craintes d'alors.

2. Le problème de la distinction entre réseau de transport et de distribution

A l'occasion de l'examen par le Sénat du collectif de 2001, nos collègues Jean Pépin et François Trucy avaient déposé un amendement à l'article 81 tendant à ce que la commission spéciale prévue « contrôle que les biens à transférer n'appartiennent pas à des collectivités locales organisatrices de la distribution du gaz ».

Notre collègue François Trucy, se fondant sur le précédent du transfert du réseau de transport d'électricité à EDF, avait évoqué lors de la discussion en séance publique de possibles erreurs ou incertitudes. S'exprimant à son tour, au cours de cette même discussion, sur l'article en cause, notre collègue Jean-Pierre Demerliat, avait lui aussi, rappelé que la mise en oeuvre de l'article 4 de la loi du 10 novembre 1997 attribuant à EDF la propriété du réseau d'alimentation générale n'avait pas été sans difficultés d'application : « Comment se fera le partage entre, d'une part, le réseau de transport, qui pour l'heure, appartient à l'Etat, et, d'autre part, le réseau de distribution, qui appartient aux collectivités locales ? ».

En vue de rassurer ces différents intervenants, dont le présent article montre que les interrogations étaient fondées, M. Christian Pierret, alors secrétaire d'Etat à l'industrie s'était engagé à ce que la réponse apportée par la commission spéciale soit « claire et incontestable ». Tel est l'objet du dispositif figurant dans le présent article.

II. LES COMPLÉMENTS APPORTÉS PAR LE PRÉSENT ARTICLE

A. UNE EXONÉRATION GÉNÉRALE DE DROITS DE MUTATION

1. Portée de l'exemption

Le présent article vient spécifier que les transferts visés par l'article 81 précité sont exonérés :

- de droits d'enregistrement,

- de la taxe de publicité foncière,

- des salaires habituellement payés aux conservateurs des hypothèques au titre de l'accomplissement des formalités relatives aux mutations concernées (article 879 du CGI).

En revanche, resteraient dus les droits de timbre, assez peu élevés, qui frappent les actes notariés relatifs aux transferts de propriété en cause (articles 899 à 901 du même code).

Des droits d'enregistrement ou la taxe de publicité foncière sont normalement exigibles sur les mutations à titre onéreux au profit des départements (au taux de 3,60 %) ou des communes de plus de 5 000 habitants (1,20 %), en ce qui concerne des immeubles ou droits immobiliers situés sur leur territoire 78 ( * ) .

A ces impositions de base, peut s'ajouter une taxe additionnelle départementale (de 0,60 à 1,40 %) sur les opérations dont le montant excède 23.000 euros (article 1595 du CGI).

2. Le « manque à gagner » pour les collectivités territoriales concernées

Le prix total des cessions envisagées ayant été évalué à 5,56 milliards d'euros par la commission spéciale, c'est une « manne » de près de 270 millions d'euros (hors taxes additionnelles) qui va ainsi échapper aux collectivités territoriales concernées (dont 200 millions d'euros pour les départements).

En revanche, certaines communes bénéficieront des « rectifications de frontière » entre transport et distribution. Leur patrimoine s'en trouvera enrichi des actifs correspondants (canalisations et ouvrages annexes) et elles percevront, à ce titre, un supplément de redevances au titre de l'article L. 2333-84 du code générale des collectivités territoriales pour occupation de leur domaine public. Toutefois, ceci, dans l'ensemble, est loin de compenser cela, et l'on conçoit dès lors la déception éprouvée par les départements et les communes.

3. Une mesure, tout compte fait, justifiée

L'exonération prévue par le présent article apparaît cependant dans l'ensemble justifiée dans la mesure où la perception des droits de mutation normalement exigibles aurait :

- créé des inégalités entre collectivités (une partie importante du territoire n'est pas traversée par le réseau national de transport de gaz naturel) au profit de certaines d'entre elles qui auraient pu bénéficier, en quelque sorte, d'un enrichissement sans cause ;

- aggravé les charges des opérateurs qui doivent assumer par ailleurs l'achat de leurs réseaux ;

- enfin, dérogé à de nombreux précédents.

En effet, comme le souligne le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, notre collègue député Gilles Carrez, le législateur a coutume d'exonérer de droits de mutations les opérations d'intérêt général revêtant un caractère exceptionnel. Trois opérations, à la fois relativement similaires et récentes, se sont ainsi vues appliquer une telle mesure « dérogatoire » :

- le transfert à la Poste et à France Telecom de l'ensemble des biens immobiliers et mobiliers du domaine public et privé de l'Etat, attachés aux services relevant des anciennes directions de la poste et des télécommunications (article 22 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications) ;

- celui au nouvel établissement public « Réseau Ferré de France » (RFF) de l'ensemble du réseau de voies ferrées et installation connexes (article 8 de la loi n° 97-135 du 13 février 1997) ;

- enfin, les opérations de transfert aux UGECAM (Unions pour la gestion des établissements des caisses d'assurance maladie) de la gestion et de la propriété d'établissements sanitaires et médico-sociaux des caisses d'assurance maladie (article 70 de la loi de finances rectificative pour 2001 n° 2001-1276).

On pourrait ajouter à ces trois exemples celui des transferts visés par l'article 26 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000) consécutifs à la dissolution des établissements publics d'aménagement des villes nouvelles ou à la création de l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (auquel ont été dévolus des biens, droits et obligations du CEA et de l'Office de protection contre les rayonnements ionisants).

Toutes ces mutations ont, en effet, été effectuées en franchise d'impôts.

B. LE DÉCLASSEMENT ET LE TRANSFERT AUX COMMUNES CONCERNÉES D'UNE PARTIE MARGINALE DU RÉSEAU DE TRANSPORT RELEVANT DU RÉGIME DE LA DISTRIBUTION PUBLIQUE DE GAZ

1. Une partie marginale du réseau de transport relève du régime de la distribution

Comme le gouvernement s'y était engagé en réponse aux inquiétudes émises par le Sénat, la commission spéciale s'est montrée attentive, dans l'inventaire auquel elle a procédé, à d'éventuelles confusions entre infrastructures de transport et de distribution. Mais ce ne sont finalement que 934 kilomètres de canalisations (sur 34.174 kilomètres) et 400 communes (sur environ 8.000 desservies) qui devraient faire l'objet d'un déclassement et d'un transfert de propriété.

Toutefois, cela prouve que, contrairement à ce qu'affirmait devant le Sénat, le secrétaire d'Etat à l'industrie, le 17 décembre 2001, l'identification des canalisations considérées et la distinction avec la distribution n'étaient pas « parfaitement » effectuées par les contrats de concession de transport en vigueur.

2. Le transfert aux collectivités territoriales concernées des infrastrutures correspondantes

Les parties du réseau de transport relevant, du fait d'un changement d'usage (souvent lié à l'urbanisation croissante du territoire), du régime de la distribution publique de gaz doivent être, aux termes du présent article, déclassées et transférées, en pleine propriété, à titre gratuit aux communes et à leurs groupements, responsables de ce type d'infrastructures en vertu de la loi n° 46-628 du 28 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz.

Il n'est, en effet, actuellement pas envisagé de vendre aussi aux concessionnaires -comme cela a été prévu pour le transport - les réseaux de distribution de gaz naturel (moyenne et basse pression) qui appartiennent aux collectivités territoriales.

3. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

A la suite du vote d'un amendement de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a modifié, dans le I du présent article, le texte proposé pour modifier l'article 81 précité.

Le terme de « déclassement » a été notamment substitué à l'adjectif « reclassé » ce qui laisse à l'Etat la responsabilité de l'opération et évite aux collectivités territoriales concernées d'avoir à prendre, dans chaque cas, un arrêté spécifique.

Mais on peut dès lors s'interroger sur la nécessité pour l'autorité concédante (la commune) d'avoir à faire la demande du déclassement et du transfert en question. Ces opérations ne doivent-elles pas être effectuées ipso facto par l'Etat dès lors qu'il est avéré qu'il s'agit de distribution et non pas de transport de gaz ?

Certes, les concessionnaires qui désirent acheter le réseau qui leur était concédé par l'Etat doivent faire acte de candidature. Mais le transfert entre l'Etat et les communes qui est ici en cause est tout à fait différent : il s'effectue entre concédants et, non pas entre concédant et concessionnaire, et aucune vente du réseau de distribution n'est envisagée. Le déclassement et le transfert ne devraient-ils pas avoir un caractère automatique sans que la commune ait à en faire la demande ?

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Votre commission des finances juge opportunes les deux précisions apportées par le présent article au dispositif prévu l'année dernière pour le transfert aux opérateurs de la propriété des réseaux de transport de gaz.

Ces mesures étaient effectivement urgentes et avaient donc bien leur place dans la présente loi de finances rectificative car la date-butoir fixée pour le paiement du solde du prix de cession, qui est en même temps celle de la résiliation des concessions, est le 30 septembre 2002.

L'exonération de droits de mutation proposée, si elle peut paraître léser les intérêts des collectivités territoriales qui auraient pu en bénéficier, est conforme à la foi aux usages concernant des transferts de ce type et à la préservation de la compétitivité des opérateurs. Or, ces derniers, avant de se trouver exposés davantage à la concurrence, doivent assumer la charge de l'achat des infrastructures qu'ils exploitent.

Le déclassement et le transfert aux communes concernées de la partie marginale des réseaux de transport qui relève de la distribution sont également bienvenus. Ils mettent le fait en harmonie avec le droit, dans l'intérêt des collectivités concernées. Votre commission des finances approuve donc la précision rédactionnelle apportée à l'Assemblée nationale. La nécessité d'une demande des communes, préalable au déclassement et au transfert de propriété prévus, lui semble toutefois inutile en première analyse. Elle en propose donc la suppression par un amendement destiné à obtenir des éclaircissements sur ce point de la part du gouvernement.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ARTICLE 11 (nouveau)

Contenu du « jaune budgétaire » énumérant les organismes consultatifs ou délibératifs placés auprès du Premier ministre et des ministres

Commentaire : le présent article prévoit d'améliorer l'information contenue dans le « jaune budgétaire » énumérant les organismes consultatifs ou délibératifs placés auprès du Premier ministre et des ministres, et d'y inclure les organismes consultatifs ou délibératifs placés auprès de la Banque de France.

Le présent article résulte d'un amendement présenté par notre collègue député le président Pierre Méhaignerie, le gouvernement s'en étant remis à la sagesse de l'Assemblée.

Il prévoit d'inclure des informations complémentaires dans le « jaune » qui énumère les commissions et instances consultatives ou délibératives placées auprès du Premier Ministre et des ministres (instauré par l'article 112 de la loi de finances pour 1996) :

- prise en compte des organismes placés auprès de la Banque de France ;

- indication du coût de fonctionnement, du nombre de membres et du nombre de réunions de chacun des organismes indiqués dans le « jaune ».

I. LES ORGANISMES PLACÉS AUPRÈS DE LA BANQUE DE FRANCE

Tout d'abord, le présent article tend à ce que ce « jaune » contienne la liste des commissions et instances consultatives ou délibératives placées auprès de la Banque de France. On peut s'interroger sur les organismes concernés.

Tel serait semble-t-il le cas :

- du conseil consultatif et des conseils des succursales 79 ( * ) ;

- de l'observatoire de sécurité des cartes de paiement (créé par la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, dite « loi MURCEF ») 80 ( * ) .

La situation semble plus incertaine dans le cas du Conseil de la politique monétaire 81 ( * ) .

- D'une part, ce Conseil est un organe de direction de la Banque de France. En effet, ses membres siègent au conseil général (qui peut être considéré comme le « conseil d'administration » de la Banque de France) 82 ( * ) , et il est chargé de prendre certaines décisions en matière d'application de la politique monétaire. Selon l'article L. 142-2 du code monétaire et financier, « dans le cadre des orientations et instructions de la Banque centrale européenne », il « précise les modalités d'achat ou de vente, de prêt ou d'emprunt, d'escompte, de prise en gage, de prise ou de mise en pension de créances et d'émission de bons portant intérêt, ainsi que la nature et l'étendue des garanties dont sont assortis les prêts consentis par la Banque de France », et l'article L. 142-8 de ce même code prévoit que le gouverneur « prépare et met en oeuvre » les décisions du Conseil de la politique monétaire.

- D'autre part, le Conseil de la politique monétaire est également un organe consultatif , peut-être soumis en tant que tel aux dispositions du présent article. En effet, selon l'article L. 142-2 du code monétaire et financier, « le Conseil de la politique monétaire examine les évolutions monétaires et analyse les implications de la politique monétaire élaborée dans le cadre du système européen de banques centrales ».

En revanche, ne seraient vraisemblablement pas concernés la commission bancaire et le comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI), qualifiés par le rapport public 2001 du Conseil d'Etat d'autorités administratives indépendantes.

II. DES INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES SUR LES ORGANISMES ÉNUMÉRÉS PAR LE JAUNE

Le présent article tend également à ce que ce « jaune » apporte des informations sur le coût de fonctionnement des organismes ou instances placés directement auprès du Premier ministre, des ministres et de la Banque de France, ainsi que le nombre de leurs membres et le nombre des réunions tenues en leur sein lors des trois années précédentes.

D'après le dernier « jaune », les organismes actuellement concernés (donc à l'exclusion de ceux rattachés à la Banque de France) sont au nombre de 576 , placés auprès des ministres de l'économie, des finances et de l'industrie (99), de l'emploi et de la solidarité (98), de l'agriculture et de la pêche (78), de la culture et de la communication (55), du Premier ministre (40), des ministres des anciens combattants (40), de la justice (33), de la jeunesse et des sports (32), de l'aménagement du territoire et de l'environnement (31), de l'équipement et des transports (26), des affaires étrangères (15), de l'éducation nationale (12), de l'intérieur et de la décentralisation (12) et de l'outre-mer (5).

Cela fait plusieurs années que le rapporteur spécial des crédits des services généraux du premier ministre, successivement nos collègues Roland du Luart puis François Marc, critique le manque de transparence de la nébuleuse des organismes rattachés au Premier ministre. Votre commission des finances se réjouit donc de l'importance ici accordée à ce problème récurrent.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours d'une séance tenue dans la matinée du mercredi 24 juillet 2002, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du projet de loi n° 367 (2001-2002) de finances rectificative pour 2002 , sur le rapport de M. Philippe Marini, rapporteur général .

Procédant à l'aide d'une vidéoprojection, M. Philippe Marini, rapporteur général, a souhaité illustrer la dégradation des comptes de l'Etat, montrer qu'une nouvelle politique fiscale était possible notamment en matière d'impôt sur le revenu, et établir que le « collectif » devait constituer une première étape dans la remise en ordre des finances publiques.

Il a rappelé que la croissance, qui est le premier déterminant lors de l'élaboration du budget, encore limitée à 1,3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2002, est prévue par le consensus des économistes au niveau de 2,8 % du PIB en 2003. Il a expliqué que si le début de reprise observé au premier trimestre 2002 était conforté par une reprise simultanée de l'investissement, de nombreuses hypothèques pèsent à présent sur ce dernier, principalement la situation financière des entreprises en liaison avec la crise boursière, les conséquences prévisibles de l'appréciation de l'euro ainsi que les incertitudes qui pèsent sur la croissance aux Etats-Unis. Il a insisté sur la nouvelle fragilité des anticipations de croissance et d'investissement en raison de l'aggravation récente de la crise boursière, de son impact sur la solvabilité de l'ensemble des agents économiques, dont les comportements évoluent parfois au-delà de toute rationalité.

Il a ensuite indiqué qu'une mise en oeuvre trop stricte du pacte de stabilité, qui constitue un système de surveillance multilatérale en matière de politique budgétaire, et qui a été actualisé à Barcelone en mars 2002 et confirmé à Séville en juin 2002 pour l'échéance de 2004, sous réserve d'un taux de croissance de 3 % en 2003 et 2004, risquerait de trop porter préjudice à la croissance. Il a suggéré les pistes de réflexion suivantes, de nature à permettre de remédier à ces inconvénients : il s'agirait de redéfinir le rôle de la Commission européenne, de prendre en compte le seul déficit structurel, d'appliquer la « règle d'or » interdisant de financer les dépenses courantes par l'emprunt, et enfin de fixer un objectif en termes de dette publique.

M. Philippe Marini, rapporteur général, a ensuite rappelé le caractère trompeur du budget initial pour 2002 mis en lumière par l'audit rédigé par MM. Bonnet et Nasse, qui se concrétisait par le fait que le déficit de 30,45 milliards d'euros initialement prévu a du être porté à 46 milliards d'euros dans le présent collectif .  Il a d'abord expliqué cette dérive tant par les moins-values fiscales qui s'élèvent à 5,37 milliards d'euros, principalement observées en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, que par les moins-values sur les recettes non fiscales à hauteur de 3,27 milliards d'euros résultant notamment de la surévaluation du dividende d'EDF, et par, enfin, les ouvertures nettes de crédit, à hauteur de 4,96 milliards d'euros. Il a ensuite ajouté que la baisse de l'impôt sur le revenu, opportune après cinq années de hausse continue de son produit -d'ailleurs prélevé sur une population toujours plus concentrée-, engendrerait une diminution des recettes fiscales de l'Etat de 2,55 milliards d'euros, dont il a considéré qu'elle sera finalement gagée par des annulations de crédit.

Puis M. Philippe Marini, rapporteur général , a évoqué l'absence de discipline sur les dépenses durant la période 1997-2001 qui avait accru la rigidité de la dépense publique puisque 44 % du budget étaient consacrés aux dépenses de fonction publique, et 14 % à couvrir les charges d'intérêt de la dette. A ce titre, il a estimé que la norme de progression des dépenses retenue par le précédent gouvernement lors de la préparation du budget initial pour 2002 (0,5 % en volume) semblait irréaliste. Il a noté qu'au surplus, la France se retrouvait devant ses principaux partenaires en terme de dépense publique, qui était encore supérieure à 50 % du PIB.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a, en effet, analysé les causes du dérapage des dépenses : une croissance plus lente que prévue, la montée en charge des dispositifs sociaux nouveaux -couverture maladie universelle et 35 heures-, ainsi qu'une accumulation de reports de crédit pour l'exécution du budget de 2002.

M. Philippe Marini, rapporteur général , a estimé nécessaire de retrouver des marges de manoeuvre, tant en maîtrisant, dans l'absolu, le niveau des dépenses par des mesures de régulation budgétaire qui devraient intervenir dès le second semestre 2002, que par une progression des dépenses limitée à 0,2 % en volume en 2003, afin d'entrer dans un cercle vertueux de diminution de la charge de la dette. A ce titre, il a souhaité que le gouvernement tire parti du départ à la retraite de la moitié des fonctionnaires durant les dix prochaines années, afin de diminuer l'emprise budgétaire du coût des fonctionnaires, et souligné qu'il s'agissait là d'une chance historique qu'il convenait de saisir. Il a chiffré l'économie réalisée, sur la base du remplacement de 75 % des fonctionnaires partant les 10 prochaines années, à environ 5 milliards d'euros en fin de période. Il a précisé que ce chiffre, faible en considération du montant total du budget, devenait appréciable en regard des marges de manoeuvre dont dispose réellement l'Etat lors de l'élaboration du budget. Il a conclu que deux chantiers restaient à ouvrir, d'abord celui de la clarification des comptes publics afin de mettre fin à leur « inextricable dédale » dénoncé par l'audit de MM. Bonnet et Nasse, ensuite celui de la réforme de l'Etat, qui n'a toujours pas été réellement entamée.

A la suite de l'exposé du rapporteur général, M. Jacques Pelletier s'est inquiété de l'opportunité des ponctions que le gouvernement a décidé d'opérer sur les réserves de certains organismes para-agricoles afin de contribuer à l'équilibre du budget annexe des prestations agricoles (BAPSA), pénalisant ainsi ceux dont la gestion était la plus rigoureuse.

M. Bernard Angels a incité à la tenue de propos plus nuancés sur les progrès enregistrés en matière de politique budgétaire, et contesté qu'on applique la norme de progression des dépenses de 0,2 % au budget résultant du présent collectif.

M. François Marc a trouvé encore trop optimiste la prévision d'un taux de croissance du PIB de 2,8 % en 2003, et dès lors s'est inquiété du bien fondé du maintien de la baisse de l'impôt sur le revenu.

M. Maurice Blin a en particulier estimé que la norme, fixée à 0,2 %, de progression des dépenses, était très sévère et il a redouté qu'elle ne se traduise par un recours massif aux gels de crédit.

M. Joël Bourdin, après avoir souligné le danger d'une nouvelle surévaluation de la croissance, s'est également interrogé sur le procédé consistant à financer le BAPSA par des prélèvements opérés sur les caisses de mutualité sociale agricole (MSA), la société Unigrains et le fonds national de gestion des calamités agricoles (FNGCA).

M. Adrien Gouteyron a confirmé l'intérêt du gain de marges de manoeuvre pour l'Etat, qui résulterait de la baisse des effectifs de la fonction publique, puis il a insisté sur l'utilité de l'existence d'excédents au sein des caisses départementales de MSA.

M. Paul Loridant a souligné l'incohérence du procédé consistant à baisser des impôts en présence de forts déficits et de lourdes incertitudes sur la croissance, et a redouté, en conséquence, la pratique de nombreuses annulations de crédit. Concernant la réforme de l'Etat, il a déploré que la gestion privée constituât un horizon indépassable. Il a enfin signalé que le marasme boursier hypothéquait gravement les perspectives de privatisations et de mise en place de fonds de pension.

M. Thierry Foucaud a pour sa part souligné l'importance du soutien au pouvoir d'achat à la consommation en tant que déterminant de la croissance, et il a fait remarquer que les conditions de vie ne s'amélioraient généralement pas avec la réduction des déficits.

M. Jacques Oudin est revenu sur les prélèvements opérés sur la mutualité agricole, qu'il a précisé s'être élevé environ à un tiers des réserves existantes, puis il a insisté sur la nécessité de rassurer le monde agricole pour l'avenir.

M. Jean Arthuis, président, a posé la question de la fiabilité de l'évaluation du rendement de l'impôt sur les sociétés, particulièrement sensible aux variations de conjoncture économique. Il a rapproché le problème du dividende versé par EDF de celui du dividende « fictif » versé par France Telecom. Il a enfin insisté sur la disparité, selon les départements, des prélèvements opérés sur les caisses de MSA, et a posé la question de la succession du BAPSA dont la suppression en tant que budget annexe devrait intervenir en application de la loi organique relative aux lois de finances.

En réponse à ces diverses questions et observations , M. Philippe Marini, rapporteur général , a alors apporté une série de précisions.

S'agissant de la question des prélèvements opérés au profit du BAPSA, il a d'abord rappelé le caractère inéluctable du déséquilibre de ce budget annexe, en raison de la hausse continue des dépenses et de la baisse parallèle de la contribution de l'Etat. Il a ensuite souligné que des rapports de l'Inspection générale de l'agriculture et de l'Inspection générale des finances avaient déjà déterminé les droits de l'Etat sur les organismes ponctionnés, qui ne peuvent donc pas en être surpris. Puis il a noté que le FNGCA ne pouvait plus être, sans réel danger, ponctionné davantage. Quant à la question du devenir du BAPSA, il a préconisé son inclusion dans le domaine de la loi de financement de la sécurité sociale.

A l'intention de M. François Marc, M. Philippe Marini, rapporteur général , a expliqué que le taux de 2,8 % d'augmentation du PIB constituait une moyenne de diverses évaluations et que la baisse de l'impôt sur le revenu devait, de toute façon, être maintenue car il s'agissait de rétablir l'initiative et la confiance.

A l'intention de M. Paul Loridant, M. Philippe Marini, rapporteur général , a évalué le montant des annulations de crédits à intervenir jusqu'à fin 2002, à environ 1,5 milliard d'euros.

Il a accordé à M. Jean Arthuis qu'il est difficile d'évaluer précisément le produit de l'impôt sur les sociétés en présence de fortes fluctuations économiques, mais il a estimé que sa baisse probable n'en changerait pas l'ordre de grandeur.

Il a ajouté que le pacte de stabilité et de croissance ne pourrait être desserré qu'à condition de prendre les mesures nécessaires à la réforme de l'État.

M. Jean Arthuis, président , a alors souligné qu'un consensus devrait nécessairement s'établir pour sortir du dédale inextricable des finances publiques et réformer l'État.

La commission a ensuite procédé à l'examen des articles.

Elle a adopté sans modification l' article 1 er relatif à la réduction de 5 % de l'impôt sur le revenu à acquitter en 2002, l' article 2 concernant les prélèvements institués au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles (BAPSA), et l' article 3 concernant l'équilibre général.

La commission a ensuite adopté sans modification l' article 4 relatif aux dépenses ordinaires des services civils, l' article 5 relatif aux dépenses en capital des services civils, l' article 6 relatif aux dépenses ordinaires des services militaires, l' article 7 relatif aux dépenses en capital des services militaires, ainsi que l' article 8 traitant des dépenses des budgets annexes, et que l' article 9 portant ratification du décret d'avance du 7 février 2002.

A l'article 10 relatif au transfert par l'État du réseau de transport du gaz et à l'exonération des droits de mutations dus à raison de ces opérations, la commission a adopté un amendement présenté par le rapporteur général tendant à supprimer la nécessité d'une demande des communes, préalable au déclassement et au transfert de propriété prévus.

La commission a adopté l' article 11 (nouveau), relatif au contenu du « jaune budgétaire » énumérant les organismes consultatifs placés auprès du Premier ministre.

A l'issue de cet examen, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter le projet de loi de finances rectificative ainsi amendé.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

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Texte du projet de loi

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Texte adopté par l'Assemblée nationale

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Propositions de la Commission

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PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

Article 1 er

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

Article 1 er

PREMIÈRE PARTIE

CONDITIONS GÉNÉRALES DE L'ÉQUILIBRE FINANCIER

Article 1 er

Code général des impôts

Article 197

I. - En ce qui concerne les contribuables visés à l'article 4 B, il est fait application des règles suivantes pour le calcul de l'impôt sur le revenu :

Pour l'imposition des revenus de l'année 2001, le montant de l'impôt résultant de l'application des dispositions des 1 à 4 du I de l'article 197 du code général des impôts est réduit de 5 %.

Sans modification.

Sans modification.

1. L'impôt est calculé en appliquant à la fraction de chaque part de revenu qui excède 4121 euros le taux de :

7,5 % pour la fraction supérieure à 4 121 euros et inférieure ou égale à 8 104 euros ;

21 % pour la fraction supérieure à 8 104 euros et inférieure ou égale à 14 264 euros ;

31 % pour la fraction supérieure à 14 264 euros et inférieure ou égale à 23 096 euros ;

41 % pour la fraction supérieure à 23 096 euros et inférieure ou égale à 37 579 euros ;

46,75 % pour la fraction supérieure à 37 579 euros et inférieure ou égale à 46 343 euros ;

52,75 % pour la fraction supérieure à 46 343 euros.

2. La réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial ne peut excéder 2 017 euros par demi-part s'ajoutant à une part pour les contribuables célibataires, divorcés, veufs ou soumis à l'imposition distincte prévue au 4 de l'article 6 et à deux parts pour les contribuables mariés soumis à une imposition commune.

Toutefois, pour les contribuables célibataires, divorcés, ou soumis à l'imposition distincte prévue au 4 de l'article 6, qui répondent aux conditions fixées au II de l'article 194, la réduction d'impôt correspondant à la part accordée au titre du premier enfant à charge est limitée à 3 490 euros.

Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, la réduction d'impôt résultant de l'application du quotient familial, accordée aux contribuables qui bénéficient des dispositions des a, b et e du 1 de l'article 195, ne peut excéder 964 euros pour l'imposition des années postérieures à l'année du vingt-sixième anniversaire de la naissance du dernier enfant.

Les contribuables qui bénéficient d'une demi-part au titre des a, b, c, d, d bis , e et f du 1 ainsi que des 2 à 6 de l'article 195 ont droit à une réduction d'impôt égale à 570 euros pour chacune de ces demi-parts lorsque la réduction de leur cotisation d'impôt est plafonnée en application du premier alinéa. Cette réduction d'impôt ne peut toutefois excéder l'augmentation de la cotisation d'impôt résultant du plafonnement.

3. Le montant de l'impôt résultant de l'application des dispositions précédentes est réduit de 30 %, dans la limite de 5 100 euros, pour les contribuables domiciliés dans les départements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la Réunion ; cette réduction est égale à 40 %, dans la limite de 6 700 euros, pour les contribuables domiciliés dans le département de la Guyane.

4. Le montant de l'impôt résultant de l'application des dispositions précédentes est diminué, dans la limite de son montant, de la différence entre 380 euros et la moitié de son montant.

Article 2

Article 2

Article 2

I. - Il est institué, pour 2002, au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles, un prélèvement de 165 millions d'euros sur la société anonyme Union financière pour le développement de l'économie céréalière (UNIGRAINS).

I. - Sans modification

Sans modification .

L'assiette de ce prélèvement est constituée par une fraction du produit du recouvrement et du placement de la taxe pour le financement des actions du secteur céréalier.

II. - Il est institué, pour 2002, au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles, un prélèvement de 130 millions d'euros sur les réserves du Fonds national de garantie des calamités agricoles, institué par le décret n° 79-823 du 21 septembre 1979, dont les avoirs disponibles sont placés auprès de la Caisse centrale de réassurance.

II. - Sans modification

III. - Il est institué, pour 2002, au profit du budget annexe des prestations sociales agricoles, un prélèvement de 161 millions d'euros sur les réserves et reports à nouveau des caisses de mutualité sociale agricole, au prorata de ces réserves et reports à nouveau disponibles inscrits à leurs comptes financiers au 31 décembre 2001.

III. - Il est institué, pour 2002, ...

..., un prélèvement de 161 millions d'euros selon les modalités suivantes :

- 16 millions d'euros sur les allocations de gestion versées aux caisses départementales ou pluridépartementales de mutualité sociale agricole en vertu de l'article L. 723-11 du code rural, répartis au prorata du montant de l'assiette des cotisations mentionnées à l'article L. 731-10 du même code émises au titre de l'année 2001 ;

- 145 millions d'euros sur les réserves et reports à nouveau des caisses de mutualité sociale, au prorata de ces réserves et reports à nouveau disponibles inscrits à leurs comptes financiers au 31 décembre 2001.

Le recouvrement de ce prélèvement est assuré par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, par compensation sur les financements qu'elle alloue aux caisses de mutualité sociale agricole.

Alinéa sans modification

Texte du projet de loi

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Article 3

L'ajustement des recettes tel qu'il résulte des évaluations révisées figurant à l'état A annexé à la présente loi et le supplément de charges du budget de l'État pour 2002 sont fixés ainsi qu'il suit :

(En millions d'euros)

Ressources

Dépenses ordinaires civiles

Dépenses civiles
en capital

Dépenses militaires

Dépenses totales
ou plafonds des charges

Soldes

A. - Opérations à caractère définitif

Budget général

Montants bruts

- 11.447

1.640

A déduire : Remboursements et dégrèvements d'impôts

- 2.149

- 2.149

Montants nets du budget général

- 9.298

3.789

251

908

4.948

Comptes d'affectation spéciale

Totaux pour le budget général et les comptes d'affectation spéciale

- 9.298

3.789

251

908

4.948

Budgets annexes

Aviation civile

Journaux officiels

Légion d'honneur

Ordre de la Libération

Monnaies et médailles

Prestations sociales agricoles

490

490

490

Totaux des budgets annexes

490

490

490

Solde des opérations définitives (A)

- 14.246

B.- Opérations à caractère temporaire

Comptes spéciaux du Trésor

Comptes d'affectation spéciale

Comptes de prêts

14

Comptes d'avances

Comptes de commerce (solde)

Comptes d'opérations monétaires

(solde)

1.300

Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers (solde)

Solde des opérations temporaires (B)

- 1.314

Solde général (A+B)

- 15.560

Texte adopté par l'Assemblée nationale

___

Article 3

Alinéa sans modification.

(En millions d'euros)

Ressources

Dépenses ordinaires civiles

Dépenses civiles
en capital

Dépenses militaires

Dépenses totales
ou plafonds des charges

Soldes

A.- Opérations à caractère définitif

Budget général

Montants bruts

- 11.446

1.640

A déduire : Remboursements et dégrèvements d'impôts

- 2.149

- 2.149

Montants nets du budget général

- 9.297

3.789

251

908

4.948

Comptes d'affectation spéciale

Totaux pour le budget général et les comptes d'affectation spéciale

- 9.297

3.789

251

908

4.948

Budgets annexes

Aviation civile

Journaux officiels

Légion d'honneur

Ordre de la Libération

Monnaies et médailles

Prestations sociales agricoles

490

490

490

Totaux des budgets annexes

490

490

490

Solde des opérations définitives (A)

- 14.245

B.- Opérations à caractère temporaire

Comptes spéciaux du Trésor

Comptes d'affectation spéciale

Comptes de prêts

14

Comptes d'avances

Comptes de commerce (solde)

Comptes d'opérations monétaires (solde)

1.300

Comptes de règlement avec les gouvernements étrangers (solde)

Solde des opérations temporaires (B)

- 1.314

Solde général (A+B)

- 15.559

Propositions de la Commission

___

Article 3

Sans modification.

Texte en vigueur

___

Texte du projet de loi

___

Texte adopté par l'Assemblée

___

Propositions de la Commission

___

DEUXIÈME PARTIE

MOYENS DES SERVICES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE I ER

DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 2002

I.- OPÉRATIONS À CARACTÈRE DÉFINITIF

A.- Budget général

DEUXIÈME PARTIE

MOYENS DES SERVICES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE I ER

DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 2002

I.- OPÉRATIONS À CARACTÈRE DÉFINITIF

A.- Budget général

DEUXIÈME PARTIE

MOYENS DES SERVICES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

TITRE I ER

DISPOSITIONS APPLICABLES À L'ANNÉE 2002

I.-OPÉRATIONS À CARACTÈRE DÉFINITIF

A.- Budget général

Article 4

Article 4

Article 4

Il est ouvert aux ministres, au titre des dépenses ordinaires des services civils pour 2002, des crédits supplémentaires s'élevant à la somme totale de 3.844.604.696 €, conformé-ment à la répartition par titre et par ministère qui est donnée à l'état B annexé à la présente loi.

Sans modification.

Sans modification .

Article 5

Article 5

Article 5

Il est ouvert aux ministres, au titre des dépenses en capital des services civils pour 2002, des autorisations de programme et des crédits de paiement supplémentaires s'élevant respectivement aux sommes de 124.565.239 € et de 265.415.015 €, conformément à la répartition par titre et par ministère qui est donnée à l'état C annexé à la présente loi.

Sans modification.

Sans modification .

Article 6

Article 6

Article 6

Il est ouvert à la ministre de la défense, au titre des dépenses ordinaires des services militaires pour 2002, des crédits supplémentaires s'élevant à la somme de 808.000.000 €.

Sans modification.

Sans modification.

Article 7

Article7

Article 7

Il est ouvert à la ministre de la défense, au titre des dépenses en capital des services militaires pour 2002, un crédit de paiement supplémentaire s'élevant à la somme de 100.000.000 €.

Sans modification.

Sans modification.

B.- Budgets annexes

B.- Budgets annexes

B.- Budgets annexes

Article 8

Article 8

Article 8

Il est ouvert au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, au titre des dépenses du budget annexe des prestations sociales agricoles pour 2002, un crédit supplémentaire s'élevant à la somme de 490.900.000 €.

Sans modification.

Sans modification.

II.- AUTRES DISPOSITIONS

II.- AUTRES DISPOSITIONS

II.- AUTRES DISPOSITIONS

Décret n° 2002-143 du 7 février 2002
portant ouverture de crédits à titre d'avance

Art. 1er. - Est ouvert à titre d'avance sur 2002 un crédit de 13 800 000 euros applicable au compte spécial du Trésor et au chapitre mentionnés dans le tableau annexé au présent décret.

Article 9

Sont ratifiés les crédits ouverts par le décret n° 2002-143 du 7 février 2002 portant ouverture de crédits à titre d'avance.

Article 9

Sans modification.

Article 9

Sans modification.

Art. 2. - Le crédit ouvert à l'article 1er ci-dessus sera soumis à la ratification du Parlement conformément aux dispositions du 2° de l'article 11 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée.

Art. 3. - Le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et la secrétaire d'Etat au budget sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES

TITRE II

DISPOSITIONS PERMANENTES

Loi de finances rectificative pour 2001

(n° 2001-1276 du 28 décembre 2001)

Article 81

I. - Toute concession de transport de gaz en cours à la date de publication de la présente loi est résiliée dans les conditions mentionnées aux II et III.

Article 10

I. - L'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 2001-1276 du 28 décembre 2001) est complété par un VI ainsi rédigé :

Article 10

Alinéa sans modification.

Article 10

Alinéa sans modification.

Le titulaire de la concession perçoit une indemnité au titre de cette résiliation anticipée qui est égale à la valeur nette comptable des biens en concession, diminuée du montant de la valeur des droits du concédant tels qu'ils figurent à la clôture des comptes au 31 décembre 2001 et augmentée du manque à gagner sur la durée restant à courir de la concession.

II. - Les biens de la concession appartenant à l'Etat peuvent être transférés au titulaire de la concession au moment de la résiliation de celle-ci, moyennant le versement à l'Etat d'une somme égale au prix de cession de ces biens déduction faite de l'indemnité due au titre de la résiliation anticipée.

Le titulaire de la concession doit en faire la demande auprès du ministre chargé de l'énergie dans un délai de trois mois à compter de la date de publication de la présente loi. Il accompagne sa demande du versement d'un acompte égal au montant de la valeur des droits du concédant, tels que figurant dans les comptes arrêtés au 31 décembre 2000.

Le prix de cession des biens susceptibles d'être transférés au concessionnaire et l'indemnité mentionnée au I sont déterminés par une commission spéciale présidée par un magistrat de la Cour des comptes dont le rôle et la composition sont précisés par arrêté conjoint du ministre chargé de l'énergie et du ministre chargé de l'économie et des finances. Pour fixer le prix de cession, la commission spéciale tient compte notamment de la valeur nette comptable des biens à transférer. Les valeurs arrêtées par la commission spéciale sont transmises par le ministre chargé de l'énergie au titulaire de la concession de transport de gaz dans un délai de cinq mois à compter de la publication de la présente loi.

Le solde éventuel du prix de cession déduction faite de l'indemnité due au titre de la résiliation anticipée est versé par le titulaire de la concession dans le mois suivant la notification par le ministre chargé de l'énergie des conclusions de la commission spéciale. Ce solde est versé au plus tard le 30 septembre 2002. Dans ce cas, la concession est résiliée le jour du paiement de ce solde.

A la date de la résiliation de la concession, les biens appartenant à l'Etat qui étaient jusqu'alors concédés sont transférés après avoir été, le cas échéant, déclassés.

Le bénéficiaire du transfert est, à la même date, réputé autorisé au titre du V jusqu'à ce qu'il lui soit délivré de nouvelles autorisations, dans un délai qui ne peut excéder dix-huit mois à compter de la publication du décret mentionné au V. Les dispositions du cahier des charges annexé à la concession de transport en cours, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, demeurent applicables jusqu'à la date de délivrance aux bénéficiaires de ces nouvelles autorisations.

III. - Dans les cas autres que celui prévu au deuxième alinéa du II, la concession est maintenue jusqu'à ce que l'autorisation mentionnée au V ait été délivrée à un nouvel exploitant par le ministre chargé de l'énergie. La concession est alors résiliée et l'ancien concessionnaire perçoit l'indemnité due au titre de la résiliation anticipée mentionnée au dernier alinéa du I et fixée en application du troisième alinéa du II. Les biens appartenant à l'Etat sont cédés au nouvel exploitant au prix fixé en application du II après avoir été, le cas échéant, déclassés.

IV. - Les décisions prises en application des I, II et III peuvent faire l'objet d'un recours de plein contentieux devant le Conseil d'Etat.

V. - La construction et l'exploitation des canalisations de transport de gaz naturel sont soumises à autorisation délivrée après enquête publique par l'autorité administrative compétente.

Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles l'autorisation précitée peut être délivrée ou refusée et les cas où, en raison de la nature ou de l'importance limitée des travaux projetés, ces derniers peuvent être réalisés sans enquête publique préalable.

Cette autorisation est délivrée en fonction :

- des capacités techniques, économiques et financières du demandeur ;

- de la compatibilité de son projet avec les principes et les missions de service public, notamment la protection de l'environnement ;

- de la sécurité et de la sûreté des canalisations de transport de gaz naturel, ainsi que des réseaux ou installations qui leur sont raccordés.

L'autorisation est incessible et nominative. Elle confère à son titulaire le droit d'occuper le domaine public. Les travaux d'installation des ouvrages de transport de gaz naturel ont le caractère de travaux publics.

Tout bénéficiaire d'une autorisation de transport de gaz naturel exerce ses missions dans les conditions fixées par cette autorisation et le cahier des charges qui y est annexé.
Les servitudes énumérées à l'article 35 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz et la servitude de passage mentionnée à l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie s'appliquent aux travaux déclarés d'utilité publique à la demande du pétitionnaire de l'autorisation de transport. Dans les articles 10 et 12 de la loi du 15 juin 1906 précitée et l'article L 113-5 du code de la voirie routière, après le mot : "concession", sont insérés les mots : "ou autorisation de transport de gaz naturel" et, après le mot : "concessionnaire", sont insérés les mots : "ou titulaire d'une autorisation de transport de gaz naturel".

« VI. - A compter du 30 septembre 2002, tout ouvrage de transport appartenant à l'État destiné à être reclassé pour relever ensuite du régime de la distribution publique de gaz sera remis en pleine propriété à titre gratuit à l'autorité concédante concernée, sur demande de cette dernière. »

« VI. - A compter du 30 septembre 2002, tout ouvrage de transport appartenant à l'État destiné à relever du régime de la distribution publique de gaz sera remis en pleine propriété à titre gratuit à l'autorité concédante concernée , sur demande de cette dernière . »

« VI. - A compter du 30 septembre 2002, ...

à l'autorité concédante concernée. »

II. - Les transferts de biens effectués en application des II, III et VI de l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2001 (n° 2001-1276 du 28 décembre 2001) sont exonérés des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et des salaires des conservateurs des hypothèques prévus à l'article 879 du code général des impôts.

II. - Sans modification.

II. - Sans modification.

Loi de finances pour 1996

(n° 95-1346 du 30 décembre 1995)

Article 112

Le Gouvernement présente chaque année au Parlement, en annexe du projet de loi de finances, la liste de toutes les commissions et instances consultatives ou délibératives placées directement auprès du Premier ministre ou des ministres prévues par les textes législatifs et règlementaires. Cette liste doit mentionner celles des commissions et instances créées ou supprimées dans l'année.

Article 11 (nouveau)

I. - L'article 112 de la loi de finances pour 1996 (n° 95-1346 du 30 décembre 1995) est ainsi modifié :

1° Dans la première phrase, après les mots : « ou des ministres » sont insérés les mots : « ou de la Banque de France » ;

2° La dernière phrase est ainsi rédigée :

« Cette liste évalue le coût de fonctionnement de ces organismes, indique le nombre de leurs membres comme le nombre de leurs réunions tenues lors des trois années précédentes et mentionne les commissions et instances créées ou supprimées dans l'année. »

Article 11 (nouveau)

Sans modification.

II. - Les dispositions du présent article entrent en vigueur le 1 er janvier 2003.

* 1 Rapport général sur le projet de loi de finances pour 2002, tome I, Philippe Marini, n° 87 (2001-2002).

* 2 Comptes nationaux révisés, publiés par l'Insee en avril 2002. Le taux de croissance en l'an 2000 a donc été révisé en hausse de 1 point par rapport à son estimation provisoire.

* 3 Dans un souci de cohérence, le rapport sur l'évolution économique et budgétaire annexé au présent projet de loi de finances rectificative retient la prévision de croissance pour 2002 qui l'a été par l'audit de la situation des finances publiques (1,3 %).

* 4 Selon Consensus Forecasts.

* 5 Observatoire français des conjonctures économiques.

* 6 Q de Tobin : rapport entre la valorisation boursière et la valeur du capital. Si l'investissement a pour objet de créer de la valeur pour l'actionnaire, il est découragé par une faible valorisation boursière. Dans la zone euro, le lien entre Q de Tobin et investissement semble exister depuis le début des années 1990.

* 7 On estime qu'une croissance des Etats-Unis inférieure de 1 point réduit la croissance de la zone euro de 0,5 point environ.

* 8 Selon l'OFCE, « une dépréciation permanente du dollar de 10 %, en tenant compte des réactions des banques centrales, réduirait le PIB européen de 0,5 à 0,8 point » (Lettre de l'OFCE, n° 223, 5 juillet 2002).

* 9 En effet, elle prévoit que les Etats membres « s'engagent à respecter l'objectif budgétaire à moyen terme d'une position proche de l'équilibre ou excédentaire, conformément à leurs programmes de stabilité ou de convergence, et à prendre les mesures budgétaires correctrices qu'ils jugent nécessaires pour atteindre les objectifs énoncés dans leurs programmes de stabilité ou de convergence dès qu'ils disposent d'informations indiquant un dérapage sensible, effectif ou prévisible, par rapport à ces objectifs ».

* 10 Règlement n° 1467/97 du Conseil du 7 juillet 1997 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs.

* 11 Les Etats membres de la zone euro présentent des « programmes de stabilité », les Etats membres de l'Union européenne mais pas de la zone euro des « programmes de convergence ».

* 12 Code de conduite (révisé) sur la forme et le contenu des programmes de stabilité et de convergence.

* 13 Les Echos, 28 juin 2002.

* 14 « Le Conseil européen (...) réaffirme son attachement au Pacte de stabilité et de croissance et à l'assainissement des finances publiques, et appelle les États membres à suivre des politiques budgétaires conformes aux recommandations contenues dans les grandes orientations des politiques économiques. Les États membres sont invités à utiliser toutes les retombées de la croissance liées à la reprise économique pour poursuivre l'assainissement des finances publiques ».

* 15 Selon l'OCDE, l'Italie était en 2001 en léger excédent structurel (+0,1 % du PIB).

* 16 Lettre de l'OFCE, n° 219, 28 mars 2002.

* 17 Pierre-Alain Muet, in « Coordination européenne des politiques économique », rapport n°5, Conseil d'Analyse économique, 1998.

* 18 Patrick Artus, « Faut-il que les pays européens reviennent à l'équilibre budgétaire en 2004 ? », Flash n° 2002-108, CDC IXIS, 16 mai 2002.

* 19 C'est-à-dire l'année suivant le « pic », afin de prendre en compte les effets de la croissance de l'année n sur les recettes de l'année n+1.

* 20 Ce qui, entre le pic de 1991 et le creux de 1993, correspond, selon l'hypothèse de croissance potentielle retenue, à un PIB inférieur de 4 points à son potentiel.

* 21 Lettre de l'OFCE, n° 222, 10 juin 2002.

* 22 Jean-Paul Fitoussi, Jérôme Creel, CER « Reforming the ECB » (article à paraître).

* 23 Parmi lesquels MM. Patrick Artus, Jean-Paul Fitoussi et Jean Pisani-Ferry.

* 24 On a vu que si le pacte de stabilité fixait des règles en matière de dette publique, celles-ci n'étaient pas assorties d'éventuelles sanctions, et avaient par conséquent une importance pratique modeste.

* 25 « Dette publique : une législature pour rien. La dette publique 1996-2000, ses contreparties et ses perspectives d'avenir » rapport n° 361 (2001-2002).

* 26 Les Echos, 28 juin 2002.

* 27 Jean-Paul Fitoussi, Jérôme Creel, CER « Reforming the ECB » (article à paraître).

* 28 Le Royaume-Uni a un ratio dette publique/PIB de 40 %.

* 29 Patrick Artus, « Comment définir en 4 étapes une règle intelligente de politique budgétaire pour l'Europe ? », Flash, CDC IXIS Capital Markets, 4 juillet 2002.

* 30 Le solde des administrations publiques fluctue avec la position de l'économie dans le cycle. On observe un déficit de recettes et un surplus de dépenses (notamment celles qui sont liées à l'indemnisation du chômage) lorsque le PIB est inférieur à son niveau potentiel, et à l'inverse un surplus de recettes et une diminution de dépenses quant il lui est supérieur. Le solde des administrations publiques corrigé des effets de la conjoncture est appelé « solde structurel ». La partie du solde effectif qui fluctue avec la conjoncture est qualifiée de conjoncturelle.

Les évolutions qui affectent le solde structurel des administrations publiques reflètent la politique économique menée. L'amélioration du solde structurel traduit soit le ralentissement des dépenses par rapport au PIB, soit l'augmentation des recettes.

* 31 « Dette publique : une législature pour rien. La dette publique 1996-2000, ses contreparties et ses perspectives d'avenir » rapport n° 361 (2001-2002).

* 32 C'est-à-dire sans prise en compte des charges de la dette.

* 33 La dette de l'Etat se décompose en deux principales rubriques : la dette négociable à long terme (OAT, emprunts d'Etat) ou à court terme (BTAN et BTF) et la dette non négociable (bons du Trésor et emprunts anciens). A elle seule, la dette négociable de l'Etat représente près de 90 % du total, et son poids relatif s'accroît régulièrement.

* 34 Or, il faudrait assimiler à la dette de l'Etat celle des entreprises publiques ou établissements publics qui ne disposent pas d'une réelle autonomie économique (tels que SNCF, RFF, CDF, etc.).

* 35 Ce qui correspond en quelque sorte aux flux nets d'actifs.

* 36 La clé de passage du déficit de l'Etat en comptabilité budgétaire à sa valeur en comptabilité nationale selon la définition maastrichienne est la suivante selon les auditeurs : « il convient d'opérer divers retraitements : passage d'une comptabilité de caisse à une comptabilité en droits constatés, éliminations des recettes de privatisation et d'autres opérations de nature financière. Nous évaluons à moins 3,9 milliards d'euros la valeur de la clé de passage entre les deux modes de comptabilisation ».

* 37 Depuis la loi de finances pour 1999, une présentation en loi de finances initiale des modifications de périmètre apportées à structure budgétaire d'une année sur l'autre est opérée. Une charte de budgétisation a été insérée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2001. Deux indicateurs coexistent : la progression à structure courante et la progression à structure constante. Le premier indicateur ne prenant pas en compte les dépenses exceptionnelles à caractère ponctuel et non reconductible, l'analyse à structure constante demeure indispensable.

* 38 Le GVT solde est constitué par la combinaison de l'effet des avancements d'échelons et de promotions de grades ou de corps, et des effets induits par les mouvements d'entrées et de sorties, principalement lié à la différence de niveau de rémunération entre les agents qui quittent la fonction publique en fin de carrière et les agents qui débutent.

* 39 Le gouvernement a décidé, à bon droit, de supprimer ce mécanisme à compter du 21 juillet 2002, en application du paragraphe V de l'article 12 de la loi de finances pour 2001; dans la mesure où le cours moyen du pétrole « brent daté » est devenu inférieur au cours moyen du mois de janvier 2000, soit 25,44 $ par baril.

* 40 Projet de loi de finances pour 2002 - rapport général n° 87 tome I (2001-2002) ; projet de loi de finances rectificative pour 2001 - rapport général n° 143 (2001-2002).

* 41 Projet de loi de finances pour 2002 - rapport général n° 87 - Tome III - Annexe 29 : Intérieur et décentralisation : Décentralisation - M. Michel Mercier.

* 42 Projet de loi de finances pour 2002 - rapport général n° 87 - Tome II - Fascicule 2 : Affaires européennes et article 28 : évaluation de la participation française au budget des communautés européennes - M. Denis Badré.

* 43 Projet de loi de finances pour 2002 - rapport général n° 87 tome I (2001-2002).

* 44 On rappellera que le versement de l'UNEDIC était prévu par l'article 5 de la loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel : « Les organismes mentionnés à l'article L. 351-21 du code du travail sont autorisés à verser à l'Etat 1.067.143.120 euros en 2001 et 1.219.592.137 euros en 2002 ». Si le versement en 2002 était une simple « faculté », si bien qu'il n'y a pas nécessité de modifier la loi de juillet 2001, un versement en 2003 nécessitera une nouvelle disposition législative.

* 45 Réponse citée dans le rapport général n° 87 sur le projet de loi de finances pour 2002 tome I (2001-2002).

* 46 L'Assemblée nationale a toutefois en première lecture majoré cette ligne pour 800.000 euros au titre du dividende versé par la Banque de France.

* 47 Projet de loi de finances pour 2002 - rapport général n° 87 tome I (2001-2002) pages 173 à 182.

* 48 « Mondialisation : réagir ou subir ? La France face à l'expatriation des compétences, des capitaux et des entreprises », rapport d'information n° 386 (2000-2001).

* 49 Le champs des administrations publiques locales au sens de la comptabilité nationale est plus large que celui des collectivités territoriales puisque, comme le rappelle notre collègue Joël Bourdin dans son rapport au nom de l'observatoire des finances locales sur les finances des collectivités locales en 2002, il rassemble à la fois les collectivités territoriales, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, les syndicats et leurs services annexes et les organismes divers d'administration locale, tels que les chambres consulaires ou les sociétés d'aménagement foncier et d'équipement rural.

* 50 En 2002, les collectivités locales bénéficieront par ailleurs de la « régularisation positive » de la DGF de 2001, constatée par le comité des finances locales au cours de sa séance du 9 juillet 2002 et dont le montant s'établit à 136,4 millions d'euros. Les crédits correspondants seront vraisemblablement inscrits dans le projet de loi de finances rectificative de la fin d'année. Leur inscription dans le présent projet de loi de finances rectificative aurait cependant permis d'accélérer les versements aux collectivités locales sans avoir de conséquence (sinon en trésorerie) sur le solde budgétaire de l'Etat.

* 51 Pour la première fois depuis 1998, l'évolution des taux expliquera de manière significative l'évolution du produit perçu en 2002 par les collectivités locales. Selon les budgets primitifs 2002, 68 départements augmentent les taux de leurs impôts directs locaux. Les départements ne bénéficieront, par ailleurs, vraisemblablement pas de la « manne » de 270 millions d'euros que leur aurait rapportée, par une augmentation du produit des droits de mutation, la cession par l'Etat à Gaz de France du réseau de transport de gaz, prévue par la loi de finances rectificative pour 2001, puisque l'article 10 du présent projet de loi de finances rectificative, comme il est de tradition en cas de réforme de structure de cette nature, exonère cette cession de droits de mutation.

* 52 Soit un montant équivalent à près de 60 % de celui de « l'enveloppe normée », qui regroupe l'ensemble des concours « actifs » de l'Etat aux collectivités locales.

* 53 Même si, comme l'a souligné le Conseil constitutionnel dans le communiqué de presse sur sa décision DC 2000-432 du 12 juillet 2000 relatif à la première loi de finances rectificative de 2000, « il n'existe pas de règle de valeur constitutionnelle obligeant l'Etat à compenser « au franc le franc » une mesure d'exonération d'impôt local ».

* 54 La dotation globale de fonctionnement, la dotation élu local, la dotation spéciale instituteurs, les dotations générales de décentralisation, la dotation globale d'équipement, la dotation départementale d'équipement des collèges, la dotation régionale d'équipement scolaire, les dotations de l'Etat au Fonds national de péréquation de la taxe professionnelle et au Fonds national de péréquation.

* 55 Ces abondements étant en partie financés par un prélèvement sur les recettes de l'Etat et en partie par des ponctions sur la DCTP, qui est ainsi devenue non seulement la variable d'ajustement du contrat de croissance et de solidarité, mais aussi la « soupape de sécurité » de la DGF.

* 56 L'abondement de la dotation d'intercommunalité s'élève en 2002 à 309 millions d'euros, mais 126 millions d'euros doivent être retranchés de ce montant car ils correspondent à la ponction sur la DCTP précédemment évoquée.

* 57 Seuls la Suède et le Danemark accordent à leurs collectivités locales une plus grande « marge de manoeuvre » fiscale.

* 58 Voir notamment la décision n° 91-291 DC du 6 mai 1991.

* 59 Votre commission s'est souvent interrogée sur cette manière, qui revient dans une large mesure à de « jouer sur les mots », de distinguer les « transferts de compétence » et les « compétences nouvelles ». Sur ce sujet, voir par exemple le rapport pour avis de notre collègue Michel Mercier au nom de votre commission des finances sur le projet de loi relatif à l'allocation personnalisée d'autonomie, n° 316 (2000-2001).

* 60 Le Conseil constitutionnel a estimé, dans son communiqué de presse précité que, dans le cadre du texte actuel de la Constitution, il « n'existe pas de règle de valeur constitutionnelle obligeant l'Etat à compenser « au franc le franc » (...) un transfert de compétence ».

* 61 Parmi les « points d'alerte » du baromètre 2002 « attractivité du site France », Ernst&Young note également que la France est en 2001 en deçà de son poids économique avec un ratio PIB/Implantations trois fois inférieur à celui de l'Irlande, deux fois inférieur à celui de la Belgique et près de 30 % inférieur à celui du Royaume-Uni et que la position de notre pays est particulièrement fragile pour les quartiers généraux et les fonctions tertiaires, pour lesquelles elle est distancée par le Royaume-Uni et l'Allemagne et talonnée par la Suède.

Les indications prospectives sont plus inquiétantes encore, puisque par exemple, en 2002, 43 % des entreprises américaines, premiers investisseurs en France envisageraient la délocalisation de tout ou partie de leurs activités françaises.

* 62 Le calendrier de traitement des contribuables mensualisés permettra d'ajuster leur échéancier à compter soit de la mensualité de septembre pour les 2/3 d'entre eux (ces contribuables recevront leur avis d'imposition fin septembre/début octobre), soit de la mensualité d'octobre pour le 1/3 restant (ces contribuables recevront leur avis d'imposition vers la mi-octobre).

Concrètement un contribuable aura à ces dates acquitté 8/10eme (ajustement en septembre) ou 9/10eme (ajustement en octobre) de ses mensualités. Ce calendrier permet donc d'absorber une baisse de 20 % ou 10 % de l'impôt courant par rapport à l'impôt 2001 sur la base duquel les mensualités ont été calculées.

En cas de baisse plus importante, le remboursement du trop perçu pourra intervenir en septembre ou en octobre, selon les dates de mise en recouvrement. Concrètement un contribuable dont l'impôt diminuerait de 30 % et dont la situation est ajustée à compter de la mensualité de septembre aura versé à cette date 8 mensualités sur 10, soit un trop perçu égal à une mensualité. Ce trop perçu lui sera remboursé courant septembre.

* 63

* 64 Cf l'article 8 du présent projet de loi de finances rectificative.

* 65 Suite à l'adoption d'un amendement d'origine parlementaire ayant pour objet d'étendre aux conjoints d'exploitants agricoles le bénéfice de l'assurance invalidité et qui n'avait été pris en compte qu'au titre des recettes sans amendement de coordination pour majorer les dépenses.

* 66 Codifiée dans le code monétaire et financier, annexé à l'ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000.

* 67 L'article 13 entrera en vigueur le 1 er janvier 2005 mais ne sera applicable qu'aux lois de finances afférentes à l'année 2006 et aux années ultérieures.

* 68 Ce compte spécial retrace les prêts consentis pour les programmes de productivité, de conversion et de décentralisation.

* 69 Loi de finances rectificative n° 2001-1276 du 28 décembre 2001.

* 70 2 postes de sectionnement et de coupure ou de livraison, stations de compression, nécessaires à la circulation, au comptage à la délivrance et à la vente du gaz.

* 71 GSO est détenu par Total Fina Elf (à hauteur de 70 %) et par GDF (à hauteur de 30 %).

* 72 GDF : 175,8 millions d'euros ;

GSO : 12,2 millions d'euros ;

SEAR : 189 000 euros.

* 73 Par arrêté conjoint des ministres chargés, respectivement, de l'énergie et de l'économie et des finances. Présidée par un magistrat de la Cour des comptes, elle comprend également un conseiller d'Etat, un inspecteur des finances et deux ingénieurs généraux des mines.

* 74 Un acompte de 188 millions d'euros a déjà été versé par les opérateurs mais pas encore intégré dans les recettes du budget.

* 75 Article 4 de la loi du 10 novembre 1997.

* 76 Les ouvrages du réseau de transport de gaz constituent, aux termes des concessions en vigueur, des « biens de retour » ne pouvant être cédés qu'à titre onéreux et non pas des « biens de reprise ».

* 77 Partie terminale du réseau desservant à une pression plus basse (de 4 à 16 Bars au lieu de 35 Bars) l'usager final et appartenant aux collectivités territoriales sur le territoire desquelles elle se situe.

* 78 Impositions départementales : articles 1594 A et 1594 D du CGI + taxe additionnelle (article 1584) au profit des communes de plus de 50 000 habitants ou d'un fonds de péréquation départemental (article 1595 bis) dans les communes de moins de 5 000 habitants.

* 79 Selon l'article 35 du décret 93-1278 du 3 décembre 1993 sur la Banque de France «  le Conseil de la politique monétaire et le Conseil général peuvent créer, auprès de chacun d'eux ou auprès des directeurs des succursales, des commissions ou des comités à caractère consultatif comportant des personnalités extérieures à la Banque de France ».

* 80 Si le rattachement de cet organisme à la Banque de France n'est pas certain, il entre de toute façon dans le cadre du « jaune », éventuellement en tant qu'organisme placé auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

* 81 On doit rappeler qu'un amendement de la commission des finances de l'Assemblée nationale à l'article 3 du présent projet de loi de finances rectificative, adopté en première lecture à l'Assemblée nationale, a été justifié, notamment, par des interrogations quant à l'utilité du conseil de la politique monétaire.

* 82 Selon l'article L. 142-6 du code monétaire et financier,  « le Conseil général administre la Banque de France. Il délibère sur les questions relatives à la gestion des activités de la Banque de France autres que celles qui relèvent des missions du Système européen de banques centrales.Il délibère des statuts du personnel. (...) Le Conseil général délibère également de l'emploi des fonds propres et établit les budgets prévisionnels et rectificatifs de dépenses, arrête le bilan et les comptes de la Banque, ainsi que le projet d'affectation du bénéfice et de fixation du dividende revenant à l'Etat (...) ».

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