Rapport n° 5 (2002-2003) de M. Serge VINÇON , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 2 octobre 2002

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N° 5

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 2 octobre 2002

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur :

- - le projet de loi autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l' article K.3 du traité sur l' Union européenne , relative à l' extradition entre les États membres de l'Union européenne (ensemble une annexe comportant six déclarations) ;

- et le projet de loi autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l' Union européenne , relative à la procédure simplifiée d' extradition entre les États membres de l'Union européenne ,

Par M. Serge VINÇON,

Sénateur,

(1) Cette commission est composée de : M. André Dulait, président ; MM. N..., Guy Penne, Jean-Marie Poirier, Michel Pelchat, Mme Danielle Bidard-Reydet, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, André Rouvière, Jean-Pierre Masseret, secrétaires ; MM. Jean-Yves Autexier, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Daniel Bernardet, Pierre Biarnès, Jacques Blanc, Didier Borotra, Didier Boulaud, Jean-Guy Branger, Mme Paulette Brisepierre, M. Robert Calmejane, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Robert Del Picchia, Paul Dubrule, Hubert Durand-Chastel, Mme Josette Durrieu, MM. Claude Estier, Jean Faure, André Ferrand, Philippe François, Philippe de Gaulle, Mme Jacqueline Gourault, MM. Emmanuel Hamel, Christian de La Malène, René-Georges Laurin, Louis Le Pensec, Mme Hélène Luc, MM. Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Louis Moinard, Xavier Pintat, Jean-Pierre Plancade, Bernard Plasait, Jean-Marie Poirier, Jean Puech, Yves Rispat, Henri Torre, André Vallet, Xavier de Villepin, Serge Vinçon.

Voir les numéros :

Sénat : 84 et 85 rect. (2001-2002)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi de deux projets de loi portant ratification de deux conventions conclues entre les Etats membres de l'Union européenne relatives à la simplification des procédures d'extradition.

Jusqu'à présent les procédures d'extradition en Europe étaient régies par un ensemble de textes internationaux adoptés au sein du Conseil de l'Europe et au sein de l'Union Européenne. Le texte de base reste la convention du 13 décembre 1957 du Conseil de l'Europe, qui a été complétée par deux protocoles additionnels, le premier du 15 octobre 1975 et le second du 17 mars 1978. La France n'a pas ratifié ces protocoles additionnels. En matière de terrorisme un texte spécifique a été adopté dans le cadre du Conseil de l'Europe : la convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977.

En outre, conformément à l'article 28§2 de la convention de 1957 qui en donne la possibilité, les pays de l'Union européenne ont souhaité conclure entre eux des accords de coopération plus poussés. Une première étape a été franchie dans le cadre de l'application de l'accord de Schengen 1 ( * ) . Ont ensuite été conclues les conventions soumises à l'approbation du Sénat, en vu de simplifier les procédures d'extradition lorsque la personne dont l'extradition est demandée est consentante, c'est l'objet de la convention du 10 mars 1995, et pour assouplir les conditions de fond de l'extradition, c'est l'objet de la convention du 27 septembre 1996.

L'approfondissement de la coopération entre les pays de l'Union européenne est apparue nécessaire en raison du développement rapide de leurs liens de coopération. Il paraît en effet logique que dans un espace de libre circulation et de plus en plus unifié où tous les Etats respectent les mêmes principes juridiques fondamentaux, la coopération judiciaire soit renforcée. Notamment, compte tenu du nombre des demandes d'extradition entre Etats membres, il est apparu souhaitable de faciliter ces dernières et d'alléger les procédures. Les opinions publiques comprennent d'ailleurs de plus en plus mal qu'à l'intérieur de l'Union européenne, l'extradition de personnes soupçonnées de crimes de sang ou d'actes de terrorisme puissent encore poser des difficultés.

L'état de droit actuel a en effet posé d'importantes difficultés dans le passé soit qu'un Etat ait refusé une extradition parce que le coupable présumé risquait une condamnation à perpétuité, soit que la multitude des recours possibles empêche ou ralentisse considérablement le déroulement de la procédure d'extradition.

Les conventions de 1995 et 1996 apportent de premières réponses en allégeant les procédures lorsque l'extradition ne pose pas de problèmes et en aplanissant un certain nombre de difficultés apparues dans la pratique entre les Etats membres de l'Union. Parties intégrantes de l'acquis communautaire, elles sont une étape dans l'attente de la mise en oeuvre de la décision cadre du Conseil européen du 13 juin 2002 instituant un mandat d'arrêt européen 2 ( * ) .

I. LA CONVENTION DU 10 MARS 1995 : L'INSTAURATION D'UNE PROCÉDURE SIMPLIFIÉE EN CAS DE CONSENTEMENT DE LA PERSONNE RÉCLAMÉE

La convention signée à Bruxelles le 10 mars 1995 a pour but de créer une procédure simplifiée d'extradition entre les pays membres de l'Union européenne, lorsque la personne demandée consent à son extradition et que l'Etat requis donne son accord (article 2). Elle permettra d'éviter la procédure formelle d'extradition. Lorsque la personne demandée n'est pas consentante, la procédure de droit commun continuera de s'appliquer.

En effet, bien que dans environ 30 % des cas la personne faisant l'objet d'une demande d'extradition ne s'y oppose pas, les délais nécessaires au déroulement d'une procédure d'extradition restent très importants. Ils sont dans ce cas de l'ordre de 6 mois en France. Il est donc apparu particulièrement souhaitable d'adopter les mesures permettant une forte réduction des délais entre Etats membres de l'Union européenne , compte tenu du niveau élevé de leurs liens de coopération et de la protection accordée aux prévenus dans leurs droits respectifs. Elle devrait également apporter un progrès pour les personnes détenues en réduisant la durée des périodes de détention aux fins d'extradition.

La convention a pour objectif de compléter et d'améliorer l'application de la convention européenne de 1957, sans porter préjudice à des dispositions plus favorables qui auraient pu faire l'objet de conventions bilatérales entre les Etats Parties (article 1 er §2). Cette disposition ne s'applique toutefois pas à la France qui n'a pas conclu de telles conventions avec ses partenaires européens.

Cette nouvelle convention repose sur le consentement de la personne demandée, dont le recueil obéit à des conditions strictes. Une fois le consentement acquis, il permet de simplifier et de raccourcir les délais de l'ensemble des étapes de la procédure d'extradition.

A. NÉCESSITÉ ET PROTECTION DU CONSENTEMENT DE LA PERSONNE DEMANDÉE

La convention vise à protéger le consentement à l'extradition et la renonciation au bénéfice de « la règle de spécialité ».

1. Le consentement à l'extradition

Le consentement de la personne arrêtée est donné conformément aux règles édictées par les articles 6 et 7 de la convention (article 5).

La personne arrêtée doit tout d'abord être informée, conformément au droit interne de l'Etat requis, qu'elle fait l'objet d'une demande d'extradition, de ses motifs et de la possibilité dont elle dispose de consentir à son extradition et des conséquences que ce consentement emporte (article 6).

Le consentement est donné devant les autorités judiciaires de l'Etat requis (article 7§1). Les Etats Parties devront faire en sorte que « le consentement soit recueilli dans des conditions faisant apparaître que la personne l'a exprimé volontairement et en étant pleinement consciente des conséquences qui en résultent. A cette fin, la personne arrêtée a le droit de se faire assister d'un conseil » (article 7§2).

La protection du consentement est d'autant plus importante qu'il est normalement irrévocable (article 7§4). Cependant, les Etats ont la possibilité, à travers une déclaration interprétative, de prévoir selon les dispositions de leur droit interne, un délai de rétractation. Ainsi, la France utilisera cette possibilité. Un recours dans les délais légaux contre la décision de la Chambre d'instruction de la Cour d'appel territorialement compétente ayant accordé l'extradition vaudra révocation du consentement.

Le bénéfice de cette disposition a par ailleurs été invoqué par le Danemark, le Royaume-Uni, la Suède et la Finlande.

L'Etat requis est tenu de communiquer le consentement à l'extradition ou son refus à l'Etat requérant dans les 10 jours suivant l'arrestation provisoire (article 8).

La convention prévoit en outre, dans son article 12, les conditions dans lesquelles la procédure simplifiée d'extradition s'applique, malgré un consentement tardif (après expiration du délai de dix jours). L'application de l'article 12§1-2 et 12§2 est soumise à une déclaration de chaque Etat Partie (article 12§3). L'article 12§1 est composé de deux alinéas. Il prévoit que l'Etat requis met en oeuvre la procédure simplifiée si une demande d'extradition au sens de l'article 12 de la convention de 1957 ne lui est pas encore parvenue (12§1-1) ou peut y recourir si une demande lui est parvenue entre temps (12§1-2). Dans son paragraphe 2, l'article 12 prévoit que « lorsque aucune demande d'arrestation provisoire n'a été faite, et dans le cas où un consentement a été donné après réception d'une demande d'extradition, l'Etat requis peut recourir à la procédure simplifiée ».

Conformément au droit d'option conféré par l'article 12§3, la France déclarera qu'elle appliquera le paragraphe 1 second alinéa et le paragraphe 2 dans les conditions fixées par sa législation interne. Celles-ci devraient être prochainement précisées dans un projet de loi portant réforme de la loi du 10 mars 1927. La procédure simplifiée devrait pouvoir s'appliquer à une personne réclamée qui ferait connaître son consentement au plus tard le jour de sa première comparution devant la Chambre de l'instruction saisie de la requête d'extradition.

Comme la France, la majorité des Etats applique ces deux dispositions en fonction de leur droit interne. L'Allemagne a précisé qu'elle examinerait les situations au cas par cas et les Pays-Bas ont fixé comme date limite du consentement le jour précédent la comparution devant le tribunal.

2. La renonciation à la règle de spécialité

La convention prévoit également qu'une personne dont l'extradition est demandée puisse renoncer à la règle de « spécialité », c'est à dire à la règle selon laquelle elle ne pourra être jugée dans l'Etat requérant que pour les faits pour lesquels sont extradition a été demandée. Cette règle limite également les possibilités de réextradition. L'Etat requérant ne peut réextrader la personne extradée, que si l'Etat requis donne son accord.

Cette possibilité est régie par l'article 9. Il s'agit d'une dérogation à l'article 14 de la convention de 1957. Les conditions de recueil de la renonciation obéissent aux mêmes règles générales que le recueil du consentement (cf. supra, articles 6 et 7). Ses modalités sont déterminées en fonction du choix de chaque Etat. Soit elle est considérée comme une conséquence du consentement à l'extradition, soit l'Etat exige un consentement exprès . A contrario « l'absence de déclaration d'un Etat membre à l'article 9 implique la non renonciation à se prévaloir du principe de spécialité », comme le précise l'exposé des motifs du projet de loi.

Par une déclaration relative à l'article 9, la France exigera que la personne demandée renonce expressément au bénéfice de la règle de spécialité. Il en est de même de l'Allemagne, du Danemark, de la Grèce, de la Suède et de la Finlande.

B. SIMPLIFICATION ET ACCÉLÉRATION DE LA PROCÉDURE D'EXTRADITION

L'application de la procédure simplifiée s'appliquera dès le stade de l'arrestation provisoire si celle-ci a été demandée (article 3§1) et permet de ne pas présenter de demande formelle d'extradition aux termes de l'article 12 de la convention de 1957 (article 3§2). Les informations qui doivent cependant être fournies pour permettre le recours à cette procédure simplifiée afin d'informer l'autorité étrangère compétente et la personne demandée sont précisées par l'article 4.

Une fois le consentement acquis, la communication de la décision d'extradition doit être effectuée dans les 20 jours suivant la date du consentement (article 10§2).

En outre la procédure d'extradition ne doit plus passer par la voie diplomatique mais directement entre les autorités nationales compétentes. L'article 15 de la convention demande ainsi à chaque Etat membre de déterminer qu'elles sont les autorités compétentes qui seront habilitées à traiter avec leurs homologues étrangers en fonction des cas. La France a ainsi déclaré que les autorités suivantes étaient compétentes pour :

- la communication des renseignements devant accompagner une demande (article 4) : procureur de la République territorialement compétent,

- l'accord de l'Etat à la mise en oeuvre de la procédure simplifiée et recueil du consentement de la personne réclamée (articles 5 et 7) : Chambre d'instruction de la Cour d'appel territorialement compétente,

- l'information de la personne réclamée et communication du consentement aux autorités étrangères (articles 6 et 8) : Procureur général territorialement compétent,

- la communication de la décision d'extradition et de transit (articles 10 et 14) : Ministre de la Justice.

La remise de la personne extradée s'effectue ensuite dans les vingt jours suivant la date de communication de la décision d'extradition (article 11§1). Si la remise n'a pas été effectuée à l'expiration de ce délai, la personne demandée est remise en liberté sur le territoire de l'Etat requis. L'invocation d'un cas de force majeure permet d'obtenir un nouveau délai de 20 jours.

Toutefois, ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque l'Etat requis souhaite faire application de l'article 19 de la convention du 13 décembre 1957, c'est à dire :

- « ajourner la remise de l'individu réclamé pour qu'il puisse être poursuivi par elle, ou s'il a déjà été condamné, pour qu'il puisse purger, sur son territoire, une peine encourue à raison d'un fait autre que celui pour lequel l'extradition est demandée ;

- « remettre temporairement à la Partie requérante l'individu réclamé dans des conditions à déterminer d'un commun accord entre les parties ».

En outre, l'adoption de la procédure simplifiée devrait faciliter la réextradition vers un autre Etat membre de la personne demandée, lorsque celle-ci a renoncé à la règle de spécialité (cf. article 9) en supprimant l'exigence du consentement de l'Etat requis. Cette disposition prévue par l'article 13 de la convention de 1995 est une dérogation à l'article 15 de la convention de 1957. Il peut toutefois y être dérogé si la déclaration d'un Etat partie relative à l'article 9 le prévoit.

Par ailleurs, l'article 12 de la convention de 1996 modifie l'article 15 de la convention de 1957 et pose comme principe général l'absence de consentement de l'Etat requis pour réextrader entre Etats membres, sauf dérogation à la suite d'une déclaration interprétative. L'articulation des deux textes ouvrent trois options différentes en fonction des déclarations des Etats Parties :

- suppression entre Etats membres de l'exigence de consentement de l'Etat requis à la réextradition pour tous les cas d'extradition,

- suppression de cette exigence uniquement lorsque l'extradition fait l'objet d'une procédure simplifiée relevant de la convention de 1995,

- enfin, maintien de cette exigence, sauf si la personne concernée, ayant consenti à l'extradition, a renoncé expressément au bénéfice du principe de spécialité, ou sauf si cette personne consent à sa réextradition.

La France retiendra cette troisième hypothèse.

La convention de 1995 permet également de simplifier les procédures de transit, au sens de l'article 21 de la convention de 1957. Ainsi, en cas d'urgence (article 14 a), la demande pourra être adressée « par tout moyen laissant une trace écrite » accompagnée des renseignements d'usage.

C. LES MODALITÉS D'ENTRÉE EN VIGUEUR ET D'ADHÉSION

1. Les modalités d'entrée en vigueur (article 16)

La Convention entre en vigueur 90 jours après que tous les Etats membres l'aient ratifiée (article 16§2). Cependant, compte tenu du caractère restrictif d'une telle disposition, les Etats ont la possibilité d'appliquer la convention de manière anticipée avec les autres Etats membres qui le souhaitent et qui l'ont ratifiée (article 16§3). Selon les information fournies à votre rapporteur, neufs Etats membres ont fait une telle déclaration 3 ( * ) .

La France fera également une déclaration en ce sens, mais seulement après l'adaptation de son droit interne par un futur projet de loi.

L'article 16§5 précise, en outre, qu'elle ne s'applique que pour les demandes postérieures à son entrée en vigueur ou à son application anticipée entre Etats.

2. Les modalités d'adhésion (article 17)

La présente convention est ouverte à l'adhésion de tous les Etats qui deviennent membres de l'Union européenne. Elle entre alors en vigueur 90 jours après leur adhésion.

II. LA CONVENTION DU 27 SEPTEMBRE 1996 : UNE RÉFORME SUBSTANTIELLE DE LA PROCÉDURE DE DROIT COMMUN D'EXTRADITION

La convention adoptée le 27 septembre 1996 vient compléter le dispositif juridique existant entre les Etats membres de l'Union européenne en matière d'extradition en modifiant les règles de fond définie notamment par la convention du 13 décembre 1957. Elle a pour but d'améliorer la coopération judiciaire en matière pénale en ce qui concerne tant l'exercice des poursuites que l'exécution des condamnations en facilitant les extraditions .

Cette nouvelle convention intervient alors même que la coopération européenne dans tous les domaines a considérablement progressé. Aujourd'hui, comme le souligne le préambule de la convention de 1996, un degré élevé de coopération en matière d'extradition est possible entre les Etats membres « dans la mesure où leurs systèmes de gouvernement sont fondés sur les principes démocratiques et où les Etats membres respectent les obligations fixées par la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 ».

Venant compléter les conventions existantes, la convention du 27 septembre 1996, n'affecte pas les dispositions plus favorables issues d'accord bilatéraux et multilatéraux (article 1 er §2).

A. L'ÉLARGISSEMENT DU CHAMP D'APPLICATION DE LA CONVENTION DE 1957 ENTRE ETATS MEMBRES DE L'UNION EUROPÉENNE

1. Abaissement du quantum de peine

Compte tenu des formalités que représentent une procédure d'extradition, même si la convention a pour objectif de les simplifier, les Etats membres ont souhaité continuer de la réserver aux infractions d'une certaine gravité définie par un « quantum » de peine privative de liberté. Les peines pouvant donner lieu à une demande d'extradition par l'Etat requérant doivent être passible d'une peine privative de liberté d'un maximum d'au moins douze mois et dans l'Etat requis (à qui la demande est adressée) d'un maximum d'au moins six mois (article 2§1).

Dans la convention de 1957, il n'y avait pas de distinction entre Etat requérant et Etat requis et le quantum de peine était fixé à un an, dans le cas où l'extradition était demandée préalablement à une jugement. Dans le cas où l'extradition était demandée en vu de l'exécution d'une condamnation, celle-ci devait être une peine privative de liberté d'au moins 4 mois (article 2§1).

2. La dépolitisation de l'infraction de terrorisme

Par ailleurs l'article 5 prévoit qu' aucune infraction ne peut être considérée comme politique et donc l'Etat requis ne pourra exciper de ce motif classique pour refuser l'extradition . Il constitue donc une dérogation à l'article 3§1 de la convention du 13 décembre 1957, qui permet à l'Etat requis de ne pas accorder l'extradition s'il considère que l'infraction pour laquelle elle est demandée est une infraction de nature politique.

Chaque Etat pourra toutefois, à la suite d'une déclaration interprétative, n'appliquer le principe de dépolitisation que pour des infractions relevant du terrorisme telles que définies par la convention de 1977 et de l'association de malfaiteurs terroristes précisée par l'article 3§4 de la présente convention. La France fera une déclaration de ce type.

Par son article 5§4, la convention dispose explicitement que les Etats membres de l'Union européenne ne pourront plus, entre eux, refuser d'extrader une personne soupçonnée d'acte de terrorisme au motif qu'il s'agirait d'une infraction politique, comme le permettait les réserves que pouvaient formuler les Etats parties à la convention pour la répression du terrorisme de 1977 (article 13§1). Les infractions se rapportant au terrorisme sont donc bien « dépolitisées » au sein de l'Union européenne.

Toutefois, la convention de 1996 précise que les Etats conserveront la possibilité de refuser l'extradition, conformément aux articles 3§2 de la convention de 1957 et 5 de la convention de 1977, c'est à dire lorsque la demande d'extradition à été présentée pour des motifs liés à la race, la religion, la nationalité ou l'opinion politique ou lorsque la situation de la personne demandée risque d'être aggravée pour l'une de ces raisons.

Une déclaration commune a d'ailleurs été annexée à la convention pour rappeler la présente convention ne porte pas atteinte aux dispositions de leurs constitutions respectives relatives au droit d'asile et des conventions et protocoles des 28 juillet 1951 et 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés et du 28 septembre 1954 sur le statut des apatrides.

3. Les infractions fiscales

La convention de 1957 est très restrictive. Elle prévoit que l'extradition est accordée « dans les conditions prévues par la présente convention, seulement s'il en a été ainsi décidé entre Parties contractantes pour chaque infraction ou catégorie d'infraction ».

La convention de 1996 assouplit considérablement ce régime (article 6). Elle prévoit que ces infractions peuvent donner lieu à extradition si « les faits correspondent selon la législation de l'Etat requis à une infraction de même nature ». Par l'article 6§2, elle exclut également certains motifs habituels de refus liés aux différences de législation et de types d'imposition.

Toutefois, à la demande du Luxembourg, le paragraphe 3 autorise un Etat à limiter la portée de l'article 6 en acceptant d'extrader au titre d'une infraction fiscale que pour les faits susceptibles de constituer une infraction en matière d'accises, de taxe à la valeur ajoutée et de douane. Les obligations de ces Etats (Grèce et Luxembourg) sont donc limitées à celles qu'ils avaient d'ores et déjà acceptées lors de la négociation de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 (articles 50§1 et 63).

4. Autorisation de l'extradition de nationaux

La convention de 1996 constitue un progrès très significatif dans la coopération judiciaire en matière pénale entre les pays de l'Union européenne en instaurant une règle contraire au droit international classique qui voulait qu'un Etat n'extradait jamais ses nationaux (article 6 de la convention de 1957).

L'article 7§1 dispose que : « l'extradition ne peut être refusée au motif que la personne qui fait l'objet de la demande d'extradition est un ressortissant de l'Etat membre requis ».

Cependant, les Etats ont la possibilité d'édicter des conditions particulières à l'application de cette nouvelle règle. Ainsi la France procèdera à l'extradition de ses nationaux sous réserve de réciprocité et à condition que lorsqu'une peine privative de liberté est prononcée, elle puisse être, à la demande de la personne condamnée, exécutée sur le territoire français . L'Autriche, l'Allemagne, le Luxembourg et la Grèce ont déclaré qu'ils ne procèderaient pas à l'extradition de leurs nationaux, notamment en raison des dispositions protectrices de leur loi fondamentale. Les autres Etats l'ont comme la France soumise à conditions. De telles réserves sont valables pour une durée renouvelable de 5 ans.

Une déclaration interprétative annexée à la convention rappelle d'ailleurs que le transfèrement des personnes détenues est régi, entre les membres de l'Union européenne, par la Convention du Conseil de l'Europe du 21 mars 1983.

B. L'APLANISSEMENT DES DIFFICULTÉS LIÉES À DES DIFFÉRENCES DE LÉGISLATION ENTRE ETATS MEMBRES

1. Facilitation de l'extradition en cas de conspiration ou d'association de malfaiteurs

La convention vise, par son article 3§1, à faciliter l'extradition dans les cas de conspiration ou d'association de malfaiteurs. Des difficultés ont en effet surgi en raison de la disparité des législations des Etats membres. Cette disposition vise donc, sous certaines conditions, à lever la règle classique de « double incrimination » qui veut que le fait incriminé soit considéré comme une infraction punissable du même type de peine dans les deux pays.

Pour donner lieu à extradition et ne pas pouvoir être refusée par l'Etat requis, ce type d'infraction est soumis à plusieurs conditions cumulatives :

- entraîner dans l'Etat requérant des peines privatives de liberté d'un maximum d'au moins douze mois,

- avoir pour but de commettre des infractions en rapport avec le terrorisme 4 ( * ) ou toute infraction punie d'une peine privative de liberté d'un maximum d'au moins douze mois, relevant du trafic de stupéfiants, de la criminalité organisée ou d'actes de violence dirigés contre la vie, l'intégrité corporelle ou la liberté d'une personne, ou créant un danger collectif pour des personnes.

Lors de la ratification de la convention, chaque Etat peut faire une déclaration indiquant qu'il n'appliquera pas l'article 3§1 ou qu'il en soumettra l'application à certaines conditions. La France ne fera pas usage de cette disposition.

Cependant, pour limiter la portée de cette possibilité d'option, l'article 3§4 vise à obliger l'Etat qui en fait usage à reconnaître dans sa législation interne un type d'infraction proche de celles définies par l'article 3§1. Cet type d'infraction défini à l'article 3§4 entrera dans le champ de l'article 2§1 et donnera donc lieu à extradition. Cette incrimination commune, constituant une première définition conventionnelle de l'association de malfaiteurs, est définie comme suit : « donne lieu à extradition le comportement d'une personne qui contribue à la perpétration, par un groupe de personnes agissant dans un but commun, d'une ou de plusieurs infractions relevant de l'activité de terrorisme [...], du trafic de stupéfiants et d'autres formes de criminalité organisée ou d'autres actes de violence dirigés contre la vie, l'intégrité corporelle ou la liberté d'une personne, ou créant un danger collectif pour des personnes, punies d'une peine privative de liberté d'un maximum d'au moins douze mois, même lorsque cette personne ne participe pas à l'exécution proprement dite de l'infraction ou des infractions en cause ; sa contribution doit avoir été intentionnelle et commise en ayant connaissance soit du but et de l'activité criminelle générale du groupe, soit de l'intention du groupe de commettre l'infraction ou les infractions en cause ».

2. Les différences relatives aux mesures de sûreté

Selon l'article 2§2, l'extradition ne pourra plus être refusée « au motif que la législation de l'Etat membre requis ne prévoit pas le même type de mesure de sûreté privative de liberté que la législation de l'Etat membre requérant ». Cette disposition évitera notamment que le problème de la nature juridique de l'internement administratif, qui n'est pas considéré comme une peine par tous les Etats.

3. Les différences relatives à la reconnaissances des actes ayant force de mandat d'arrêt

En outre, l'article 4 doit permettre d'éviter les problèmes posés par la production de certains titres à l'appui d'une demande d'extradition . La production de ces titres est régie par l'article 12-a de la convention de 1957 qui prévoit la production d'une décision de condamnation exécutoire ou d'un mandat d'arrêt ou « de tout autre acte ayant la même force ». Or certains de ces actes n'étaient pas considérés comme un mandat d'arrêt par la partie requise, la personne demandée devant être détenue dans un lieu autre qu'un établissement pénitentiaire. C'est notamment le cas des mandats délivrés par les autorités italiennes, qui se traduisent par une rétention au domicile de la personne recherchée.

4. La prise en compte des règles de prescription

Selon l'article 8, l'extradition ne pourra plus être refusée au motif qu'il y a prescription de l'action ou de la peine selon la législation de l'Etat requis . Cette disposition constitue une nouvelle avancée au sein de l'Union européenne. Par la convention d'application de l'accorde de Schengen (article 62), la législation de l'Etat requérant n'était retenue que pour les seules actes interruptifs de prescription. Les autres éléments juridiques touchant à la prescription, notamment les délais, relevaient toujours de la loi de l'Etat requis.

Cette nouvelle règle pourra cependant ne pas être appliquée lorsque les faits à l'origine de la demande d'extradition relèvent des lois de l'Etat requérant et de l'Etat requis. C'est notamment le cas lorsque les faits ont été commis sur le territoire de l'Etat requis ou par un de ses nationaux ou sur la personne d'un de ses nationaux. Dans ces cas donc, la loi de l'Etat requis en matière de prescription pourra donc continuer à s'appliquer et à être opposable à une demande d'extradition.

5. Le maintien du refus d'extradition en cas d'amnistie

L'article 9 de la convention de 1996 reprend l'article 4 du deuxième protocole additionnel à la convention européenne d'extradition du 17 mars 1978. Il permet à l'Etat requis de rejeter une demande d'extradition lorsque les faits à l'origine de celles-ci sont amnistiés par l'Etat requis et que ces faits aient pu être poursuivis en fonction de sa loi interne.

C. L'ALLÈGEMENT ET LA DISPENSE DE L'ACCORD EXPRÈS DE L'ETAT REQUIS POUR L'APPLICATION DE LA RÈGLE DE SPÉCIALITÉ, LA RÉEXTRADITION ET LE TRANSIT

1. Réduction de la portée et renonciation éventuelle au principe de spécialité

Dans le but de faciliter les extraditions et les jugements connexes aux faits justifiant une demande d'extradition, l'article 10 de la convention vise à limiter les effets et la portée du principe de spécialité et organise la possibilité dont dispose la personne extradée d'y renoncer . Cet article étend les possibilités déjà offertes par l'article 14 de la convention de 1957.

Une personne extradée pourra désormais être poursuivie dans l'Etat requérant pour des faits ayant précédé sa remise, autres que ceux ayant motivé la demande d'extradition, et sans l'accord de l'Etat requis, si ces faits ne sont pas punis d'une peine privative de liberté, ou si les poursuites pénales n'entraîne pas son placement en détention. Le paragraphe 1-c facilite également l'exécution effective des condamnations, dans la mesure où il autorise le recours à la contrainte par corps. Enfin, le paragraphe 1-d permet à la personne extradée de renoncer au principe de spécialité après sa remise pour des faits antérieurs à sa remise. Cette renonciation est entourée de garanties précises. Elle doit être donnée devant une autorité judiciaire, consignée dans un procès-verbal. Elle est recueillie « dans des conditions faisant apparaître que la personne l'a exprimée volontairement et en étant pleinement consciente des conséquences qui en résultent. A cette fin, la personne extradée a le droit de se faire assister d'un conseil ».

La portée de cet article est limitée aux infractions fiscales en matière d'accises, de taxe à la valeur ajoutée ou de douane, pour les pays qui ont limité par déclaration la portée de l'article 6 à ces infractions, c'est à dire la Grèce et le Luxembourg.

En outre, par l'article 11, la convention permet aux pays qui le souhaitent et sous réserve de réciprocité, de faire une déclaration visant à ce que le consentement de l'Etat requis pour déroger à la règle de spécialité (article 14 de la convention de 1957) soit présumé acquis, sauf cas particulier. L'article 11§ précise que cette disposition ne vient pas limiter la porter de l'article 10.

La France n'envisage pas d'effectuer une telle déclaration.

2. Faciliter la réextradition de la personne demandée

L'article 12 de la convention dispose que l'article 15 de la convention de 1957 qui régit la réextradition vers un Etat tiers n'est plus applicable entre les Etats membres de l'Union européenne. Cet article exigeait l'accord de l'Etat requis pour toute réextradition d'une personne extradée vers un Etat tiers pour des infractions antérieures à la remise. Cette formalité ne sera donc plus exigée.

Cependant, par une déclaration, les Etats ont la possibilité de maintenir l'application de l'article 15, sauf lorsque la personne extradée consent à sa réextradition ou lorsque celle-ci s'effectue dans le cadre de la convention de 1995 et que la personne extradée a renoncé à la règle de spécialité. La France fera une déclaration en ce sens.

3. L'allègement des procédures de transit entre Etats membres (article 16)

En cas de transit (article 21 de la convention européenne d'extradition de 1957) à travers un Etat membre vers un autre Etat membre, la convention de 1996 prévoit de nouvelles dispositions plus souples que celles prévues antérieurement. Elles visent à simplifier les renseignements exigés pour la demande de transit, à permettre leur transmission par tout moyen écrit. En cas d'atterrissage fortuit, dans le cadre d'un transit aérien normalement sans escale, la même procédure s'applique.

D. LA SIMPLIFICATION DES PROCÉDURES FORMELLES ENTRE ETATS MEMBRES

1. La suppression de la transmission des pièces par la voie diplomatique

L'article 13§1 et 2 de la convention vise à simplifier la transmission des pièces nécessaires aux demandes d'extradition en permettant aux autorités compétentes, en France le ministère de la justice, de communiquer directement entre elles sans passer par la voie diplomatique traditionnelle.

2. Transmission des documents par télécopie

L'article 13§3 et 4 rend possible la transmission des pièces par télécopie tout en assurant la confidentialité (cryptage) et l'authenticité de la demande.

3. Allègement des procédures de demande de renseignements complémentaires

L'article 14 de la convention prévoit que, si les Etats font une déclaration en ce sens et sous réserve de réciprocité, les autorités compétentes d'un Etat chargées des poursuites pénales pourront directement s'adresser à leurs homologues à l'étranger pour leur demander des compléments d'information.

La France n'envisage pas d'effectuer une telle déclaration. Le Royaume-Uni, l'Irlande, la Grèce et le Portugal ont retenu la même position que la France. Les autres Etats l'autorisent.

4. Dispense des formalités d'authentification

L'article 15 de la convention établit la règle générale de dispense des formalités d'authentification des documents transmis, sauf cas contraires expressément prévus.

E. DISPOSITIONS GÉNÉRALE RELATIVES À L'ENTRÉE EN VIGUEUR, AUX RÉSERVES ET A L'ADHÉSION

L'article 17 de la convention prévoit que les Etats ne peuvent déposer de réserves en dehors des cas expressément prévus.

Selon l'article 18, la convention entre en vigueur 90 jours après la dernière ratification. Toutefois, les Etats peuvent faire une déclaration d'application anticipée, sous réserve de réciprocité 5 ( * ) . La France ne fera une telle déclaration qu'après modification de son droit interne, en l'espèce la loi du 10 mars 1927.

La convention ne s'applique que pour les demandes déposées postérieurement à son entrée en vigueur ou à sa mise en application anticipée (article 18§5). A contrario, une demande d'extradition déposée après l'entrée en vigueur, mais relative à des faits antérieurs à l'entrée en vigueur entre dans le champ d'application de la présente convention.

Comme toutes les conventions entre membres de l'Union européenne, elle est ouverte à l'adhésion de tout nouvel Etat membre (article 19).

CONCLUSION

Ces deux conventions représentent un progrès significatif dans le sens d'une plus grande simplicité et rapidité des procédures d'extradition au sein de l'Union européenne . Elles sont intégrées à l'acquis communautaire.

Grâce à la convention de 1995, lorsque l'extradition ne pose pas de difficulté entre les Etats et que la personne demandée y consent, c'est à dire dans environ 1/3 des cas, les formalités vont être réduites au minimum et les délais ramenés pour la France de plus de 6 mois à 2 mois environ. Cette évolution est très positive.

La convention de 1996 a, quant à elle, une portée plus vaste. Elle touche au fond des procédures. Les avancées qu'elle permet sont juridiquement très importantes même si elle donne l'impression fâcheuse et persistante que « pour deux pas en avant, les Etats membres font presque systématiquement un pas en arrière ». A cet égard, la France n'est pas le pays qui émet le moins de réserve ou qui a été le plus empressé à ratifier ces conventions. Elle est en effet le dernier, avec l'Italie, à ne pas l'avoir fait.

Enfin, ces conventions constituent une étape intermédiaire avant l'entrée en vigueur, normalement au 1 er janvier 2004 du mandat arrêt européen qui rendra automatique et rapide la remise des personnes qui en feront l'objet, notamment en matière de terrorisme. Le mandat d'arrêt européen n'épuisera cependant pas l'intérêt de ces conventions puisque la France, l'Italie et l'Autriche continueront de les appliquer, pour la première pour les faits antérieurs au 1 er novembre 1993 et pour l'Italie et l'Autriche antérieurs au 7 août 2002 .

C'est pourquoi, sous réserve de ses observations, votre rapporteur vous propose d'approuver ces deux projets de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné le présent rapport au cours de sa réunion du 2 octobre 2002.

A la suite de l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé entre les commissaires.

M. Xavier de Villepin a souhaité savoir si ces nouvelles dispositions permettront ou auraient permis de résoudre le cas de M. Rachid Ramda,  impliqué dans les attentats de 1995 sur le territoire français, emprisonné au Royaume-Uni depuis de nombreuses années mais dont l'extradition a jusqu'à présent été empêchée par la multiplication des recours.

M. André Dulait, président, a demandé si le Royaume-Uni avait ratifié les deux conventions.

M. Serge Vinçon a alors indiqué que le Royaume-Uni avait procédé aux ratifications et que la France était le dernier pays de l'Union euroépenne, avec l'Italie, à ne pas l'avoir fait. Il a précisé que ces conventions ne s'appliquent qu'aux nouvelles demandes d'extradition, même si celles-ci peuvent porter sur des faits antérieurs. Il a ajouté que les dispositions de ces deux conventions n'auraient pas permis de résoudre la situation présentée par le cas de M. Rachid Ramda, car elles ne prévoient pas, contrairement au mandat d'arrêt européen, de délai-limite aux procédures, en dehors du cas du consentement de la personne réclamée.

M. Claude Estier s'est inquiété de la nouvelle attitude du gouvernement vis-à-vis d'un ancien membre des Brigades rouges italien qui avait trouvé refuge en France et que celle-ci avait, jusqu'à présent, refusé d'extrader.

M. Serge Vinçon a indiqué que ces conventions visaient à réduire les délais et simplifier les procédures d'extradition et que dans le cadre du mandat européen, l'objectif était de rendre la procédure automatique, même si la France ne l'appliquerait pas pour les actes antérieurs au 1er novembre 1993.

Mme Hélène Luc a marqué sa forte préoccupation sur l'évolution de l'attitude de la France vis-à-vis des réfugiés italiens et a indiqué que si une législation forte était nécessaire pour lutter contre le terrorisme, elle ne devait pas conduire à remettre en cause le droit d'asile.

MM. Xavier de Villepin et Serge Vinçon ont souligné que ces conventions permettaient de préserver le droit d'asile tout en progressant dans la coopération judiciaire en Europe pour lutter contre le terrorisme. Le rapporteur a en outre estimé, en accord avec M. Robert del Picchia, que le maintien en détention de M. Rachid Ramda pendant plus de sept ans, sans jugement, était contraire au respect des droits de l'homme qui servent pourtant de justification à sa non-extradition et à la multiplication des recours au Royaume-Uni, la justice française offrant toutes les garanties en la matière. Vis-à-vis de l'Italie, le rapporteur a expliqué que l'évolution de la position française s'expliquait par la volonté de rendre plus efficace et plus automatique la coopération judiciaire entre les membres de l'Union européenne, conformément au principe du mandat d'arrêt européen.

M. André Dulait, président, ayant rappelé que ces conventions permettraient une réduction significative des délais, M. Serge Vinçon a expliqué que les nouvelles procédures respecteraient les droits de la défense et s'appliqueraient sous le contrôle des autorités judiciaires.

M. Jean-Pierre Plancade a indiqué qu'il voterait les deux projets de loi dans la mesure où ils constituaient un progrès dans la coopération judiciaire au sein de l'Union européenne. Si le droit d'asile devait évidemment être protégé, il ne devait pas, à son avis, faire obstacle à la lutte contre le terrorisme.

La commission a alors approuvé les deux projets de loi.

ANNEXE I - CONVENTION DU 10 MARS 1995

PROJET DE LOI

(Texte présenté par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne, faite à Bruxelles le 10 mars 1995, et dont le texte est annexé à la présente loi 6 ( * ) .

ÉTUDE D'IMPACT7 ( * )

- Etat de droit et situation de faits existants et leurs insuffisances

La convention soumise à ratification complète entre les Etats membres de l'Union européenne, celle du 13 décembre 1957, adoptée dans le cadre du Conseil de l'Europe, ainsi que d'autres conventions (convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977 ; convention du 13 juin 1990 d'application de l'accord de Schengen ; traité d'extradition et d'entraide judiciaire en matière pénale du Benelux). Elle constitue également le complément de la convention relative à la procédure simplifiée d'extradition du 10 mars 1995.

La convention facilite l'extradition entre les Etats membres en élargissant les possibilités d'y recourir (notamment par un abaissement du seuil de peine encourue), en simplifiant les procédures et en réduisant les obstacles résultant des motifs de refus et des disparités de législations.

- Bénéfices escomptés en matière

d'emploi

Néant.

d'intérêt général

Néant.

financière

Néant.

de simplification des formalités administratives

Néant

de complexité de l'ordonnancement juridique

La ratification de la convention dont il s'agit se traduira par une simplification de l'extradition.

L'adoption d'un tel instrument doit toutefois être accompagnée d'une adaptation de notre droit interne, la procédure d'extradition telle que régie actuellement par la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers ne permettant pas d'en assurer l'application en l'état. Il s'agira notamment de définir, conformément aux dispositions du paragraphe 3 de l'article 10 de la convention, les conditions dans lesquelles doit être recueilli le consentement de la personne déjà extradée à renoncer à la règle de la spécialité et donc, à être poursuivie, jugée ou détenue en vue de l'exécution d'une peine privative de liberté pour des faits commis avant sa remise.

DÉCLARATIONS

Article 5 : la France déclare, conformément au paragraphe 2 et dans le respect de la déclaration commune liée au droit d'asile, qu'elle n'appliquera le paragraphe 1 qu'au regard des infractions visées aux articles 1 et 2 de la convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977, et de toute association de malfaiteurs en vue de la commission de ces infractions.

Article 7 : la France déclare qu'elle autorisera l'extradition de ses nationaux aux fins de poursuites pénales dans l'Etat requérant ou en vue d'exécuter une condamnation à une peine privative de liberté prononcée par une juridiction dudit Eta t, sous réserve de réciprocité et à la condition, en cas de condamnation à une peine privative de liberté ou de mise à exécution d'une telle peine, que la peine considérée soit, sur demande de la personne réclamée, exécutée sur le territoire de la République française.

Article 12 : la France déclare, conformément au paragraphe 2, que l'article 15 de la convention européenne d'extradition reste applicable, sauf si la personne concernée, ayant consenti à l'extradition, a renoncé expressément au bénéfice de la règle de la spécialité conformément à l'article 7 de la convention relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne, ou sauf si ladite personne consent à sa réextradition vers un autre Etat membre.

Article 13 : la France désigne la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la Justice en qualité d'autorité centrale pour recevoir et transmettre les demandes d'extradition, ainsi que les autres documents et pièces visés à cet article.

ÉTAT DES RATIFICATIONS

Pays

Date de ratification

Autriche

27/06/2000

Allemagne

11/12/1998

Danemark

19/11/1996

Espagne

22/01/1999

Royaume-Uni

20/12/2001

Grèce

20/06/2000

Belgique

16/07/2002

Italie

Irlande

28/06/2002

Luxembourg

08/08/2001

Pays-Bas

29/06/2000

Portugal

13/10/1997

Suède

18/07/1997

Finlande

07/04/1999

ANNEXE II - CONVENTION DU 27 SEPTEMBRE 1996

PROJET DE LOI

(Texte adopté par le Gouvernement)

Article unique

Est autorisée la ratification de la convention établie sur la base de l'article K.3 du traité sur l'Union européenne, relative à l'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne (ensemble une annexe comportant six déclarations), faite à Dublin le 27 septembre 1996, et dont le texte est annexé à la présente loi 8 ( * ) .

ÉTUDE D'IMPACT9 ( * )

- Etat du droit et situation de fait existants et leurs insuffisances

La convention relative à la procédure simplifiée d'extradition entre les Etats membres de l'Union européenne trouve son origine dans le constat selon lequel bien que les personnes faisant l'objet d'une demande d'extradition consentent à leur remise aux autorités requérantes dans une proportion avoisinant les 30 %, les délais de remise de ces personnes restent très importants en raison des procédures internes des Etats membres.

Il a donc été considéré comme particulièrement souhaitable de réduire autant que possible la durée de ces procédures qui n'est généralement pas sans conséquence sur les périodes de détention aux seules fins de l'extradition.

En conséquence, la convention soumise à ratification, qui complète entre les Etats membres de l'Union européenne celle du 13 décembre 1957 adoptée dans le cadre du Conseil de l'Europe, vise à simplifier la procédure extraditionnelle en cas de consentement de la personne réclamée à sa remise. Cette simplification réside, pour l'essentiel, en la dispense de la présentation d'une demande formelle d'extradition et en l'absence de recours à une procédure « lourde ».

Elle part du constat que, lorsque la personne faisant l'objet d'une demande d'extradition ne s'y oppose pas, il est souhaitable de réduire au minimum le temps nécessaire à l'extradition et toute période de détention aux fins d'extradition.

- Bénéfices escomptés en matière

d'emploi

Néant.

d'intérêt général

Néant.

financière

Néant.

de simplification des formalités administratives

Néant.

de complexité de l'ordonnancement juridique

La ratification de la convention dont il s'agit se traduira par une simplification considérable de l'extradition en évitant le recours à une procédure « lourde » lorsque la personne réclamée consent à sa remise.

L'adoption d'un tel instrument doit toutefois être accompagnée d'une adaptation de notre droit interne, la procédure d'extradition telle que régie actuellement par la loi du 10 mars 1927 relative à l'extradition des étrangers ne permettant pas d'en assurer l'application en l'état.

Il s'agira donc de modifier le droit interne afin de simplifier la procédure d'extradition et de réduire les délais d'examen des procédures dans le respect des dispositions pertinentes des conventions et des droits de la défense.

DÉCLARATIONS

Article 7 , paragraphe 4 : la France déclare que l'exercice, dans les délais légaux, par la personne réclamée, d'une voie de recours à l'encontre de la décision de la chambre de l'instruction de la cour d'appel territorialement compétente ayant accordé son extradition, vaut révocation du consentement à l'extradition.

Article 9 : la France déclare que les règles prévues à l'article 14 de la Convention européenne d'extradition ne sont pas applicables lorsque la personne, ayant consenti à l'extradition, renonce expressément au bénéfice de la règle de la spécialité.

Article 12, paragraphe 3 : la France déclare qu'elle appliquera le paragraphe 1 second tiret et le paragraphe 2 dans les conditions fixées par sa législation interne.

Article 15 : la France déclare que les autorités compétentes au sens des articles 4 à 8, 10 et 14 sont les suivantes :

- le procureur de la République territorialement compétent, au sens de l'article 4 ;

- la chambre de l'instruction de la cour d'appel territorialement compétente, au sens des articles 5 et 7 ;

- le procureur général territorialement compétent, au sens des articles 6 et 8 ;

- le ministre de la Justice, au sens des articles 10 et 14.

ÉTAT DES RATIFICATIONS

Pays

Date de ratification

Autriche

12/04/2001

Allemagne

11/12/1998

Danemark

17/09/1997

Espagne

09/12/1997

Royaume-Uni

20/12/2001

Grèce

26/07/1999

Belgique

25/07/2001

Italie

Irlande

28/06/2002

Luxembourg

30/07/2001

Pays-Bas

29/06/2000

Portugal

06/10/1998

Suède

03/08/2001

Finlande

07/04/1999

* 1 Convention signée le 19 juin 1990 relative à l'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes.

* 2 Pour une présentation du mandat européen cf. Proposition de résolution n°64 2001/2002 du 7 novembre 2001de M. Pierre Fauchon au nom de la délégation pour l'Union européenne, son rapport n°82 2001/2002 fait au nom de la Commission des lois et la résolution n°25 devenue définitive le 4 décembre 2001.

* 3 Autriche, Allemagne, Danemark, Espagne, Luxembourg, Royaume-Uni, Pays-Bas, Suède et Finlande.

* 4 Infractions définies par les articles 1 er et 2 de la convention européenne pour la répression du terrorisme du 27 janvier 1977.

* 5 L'Autriche, l'Allemagne, le Danemark, l'Espagne, le Luxembourg, le Royaume-Uni, la Belgique, les Pays-Bas, le Portugal, la Suède et la Finlande ont fait une telle déclaration.

* 6 Voir le texte annexé au document Sénat n° 85 rectifié (2001-2002).

* 7 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires.

* 8 Voir le texte annexé au document Sénat n° 84 (2001-2002).

* 9 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires

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