II. UNE CONCEPTION DÉPASSÉE DU DROIT DE L'URBANISME

La proposition de loi n°37 modifie, en outre, trois dispositions de la loi relative à la solidarité et au Renouvellement urbains afin, d'une part, d'éviter la « densification » des constructions, qui était l'un des maîtres-mots de la loi « SRU » et de rétablir, d'autre part, les communes dans le droit de gérer leur territoire.

Les deux premières dispositions concernent des questions techniques puisqu'elles rétablissent, pour les communes, la faculté de fixer une superficie minimale pour les parcelles à urbaniser et qu'elles clarifient le régime des divisions de parcelles dont la complexité, au lieu d'avoir été atténuée par la loi « SRU », s'est trouvée en partie renforcée. L'examen des articles, ci-après, précisera le contour de ces deux dispositions qui figurent aux articles 8 et 9 du texte soumis au Sénat.

La troisième disposition concerne une véritable question de principe puisqu'elle porte atteinte à la liberté des collectivités locales dans l'élaboration de leurs documents d'urbanisme . Elle propose de supprimer la règle dite des « quinze kilomètres » qui interdit aux communes situées dans un rayon de 15 kilomètres autour des agglomérations de plus de 15.000 habitants d'ouvrir de nouvelles zones à l'urbanisation si elles ne font pas partie d'un schéma de cohérence territoriale (SCOT).

Votre rapporteur ne méconnaît nullement la nécessité de gérer l'extension de l'urbanisation à proximité des agglomérations . Il ne souscrit cependant pas à l'application indifférenciée d'une règle fixée précipitamment, sans aucun souci des réalités locales, par les auteurs de la loi « SRU ». Il convient de promouvoir, tout au contraire, au lieu d'une règle uniforme qui porte atteinte aux libertés des communes, des principes adaptés aux situations diverses qui caractérisent notre pays. L'examen de la proposition de loi n° 37 permettra au Sénat de rouvrir, sur ce sujet, avec l'Assemblée nationale un dialogue qui n'a pu se tenir lors de l'examen de la loi SRU.

III. LES PRÉCONISATIONS DE VOTRE COMMISSION

TITRE I : DISPOSITIONS RELATIVES AU LOGEMENT

Article 1er

L'article 55 avait retenu un seuil d'application différent pour les communes d'Ile-de-France (1.500 habitants), et pour celles des autres régions (3.500 habitants). La PPL présentée retient un seuil unique, celui des 3.500 habitants. En outre, elle substitue le mot « adopté » au mot « approuvé » car l'article L. 302-2 du code de la construction et de l'habitation (CCH) dispose que le programme local de l'habitat est adopté et non approuvé. Elle met donc l'article L. 302-2 et l'article L. 302-5 du CCH en cohérence.

Par ailleurs, le deuxième alinéa prévoit que les communes se trouvant dans un EPCI, dont le taux de logements sociaux est supérieur à 20 %, ne seraient plus soumises aux obligations de la loi si cet établissement public adopte un programme local de l'habitat intercommunal sous réserve expresse que cette adoption soit effectuée à l'unanimité . Les établissements publics de coopération intercommunale ayant déjà adopté leur programme local de l'habitat et souhaitant bénéficier de cette disposition devraient le réviser pour tenir compte de cette exigence d'unanimité.

La loi SRU n'était pas descendue jusqu'au niveau des quartiers dans les grandes villes pour fixer les obligations de constructions, alors que le nombre d'habitants dans certains de ces quartiers est souvent très supérieur à celui des communes membres des EPCI. C'est pourquoi il est proposé, au sein de ces établissements, de laisser les élus décider de la répartition spatiale des logements sociaux.

Parallèlement, afin de prendre en compte les situations particulières des communes soumises à des risques naturels, notamment les communes dont une partie du territoire est située en zone inondable, il est proposé dans le troisième alinéa de ne pas soumettre aux obligations de la loi les communes dont plus de la moitié du territoire urbanisé est soumis à un plan de prévention des risques approuvé. En outre, dans un souci de clarification, vous est soumise, à cette occasion, une nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 302-5 du code de la construction et de l'habitation.

Le quatrième alinéa de l'article 1 er vise simplement à tirer les conséquences du changement de référence lié à l'adoption du code de l'action sociale et des familles à la place du code de la famille et de l'aide sociale.

Le dernier alinéa de l'article a pour objet de mettre fin aux conflits qui ont pu s'élever entre les préfectures et les communes au moment du décompte du nombre de résidences principales et d'éviter qu'ils se reproduisent à l'avenir.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qui vous est présentée dans la proposition de loi.

Article 2

Le premier alinéa de cet article ouvre plus largement le bénéfice de l'exemption des obligations de constructions de logements locatifs sociaux, pour les communes percevant la dotation de solidarité urbaine (DSU), qui sont souvent des communes défavorisées.

Le deuxième alinéa harmonise les modalités de calcul du prélèvement s'appliquant aux communes ne disposant pas de 20 % de logements sociaux. Ce prélèvement serait désormais calculé en multipliant le nombre de logements sociaux manquants par 20 % du potentiel fiscal pour toutes les communes, alors qu'auparavant cette somme était fixée à 1.000 francs pour les communes dont le potentiel fiscal était inférieur à 5.000 francs.

Le troisième alinéa relève légèrement le seuil (de 3.811 à 5.000 euros) du prélèvement en deçà duquel il n'est pas effectué.

Le quatrième alinéa, de nature technique, a pour objet de prendre en compte dans les dépenses déductibles du prélèvement la moins-value résultant du loyer perçu par une commune qui met à disposition un terrain par bail emphytéotique, ou un immeuble par bail à construction ou par bail à réhabilitation, à un loyer inférieur au loyer, qui, capitalisé, représenterait la valeur du terrain estimé par les domaines. La commune met en général à disposition le terrain pour la durée de l'emprunt, actuellement de 50 ans, pour la réalisation de logements sociaux. Dans un esprit de simplicité, il vous est proposé que le loyer soit capitalisé sans actualisation sur quinze ans.

Le cinquième alinéa permet à la commune qui aurait réalisé des dépenses au titre du logement social supérieures au montant du prélèvement, de déduire, en cas de prélèvement négatif, la différence sur plusieurs années. Par ailleurs, il est proposé de supprimer dans le code la référence au décret précisant la nature des dépenses déductibles dans la mesure où ce décret a déjà été publié (décret n° 2001-1194 du 13 décembre 2001) et où l'article L. 302-9-2 permet au pouvoir réglementaire de prendre un décret en Conseil d'Etat déterminant, en tant que besoin, les conditions d'application du chapitre.

Le sixième et dernier alinéa précise que le fonds d'aménagement urbain, qui devait être créé par voie réglementaire et qui, sous certaines conditions, devait être destinataire d'une partie du produit du prélèvement, sera remplacé par des fonds régionaux afin d'anticiper la décentralisation de la politique du logement et de permettre le reversement du produit des pénalités à l'échelon pertinent.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qui vous est présentée dans la proposition de loi.

Article 3

Cet alinéa répond à la même justification que celle exposée au premier alinéa de l'article 1 er , à savoir mettre en cohérence l'article L. 30-.2 et l'article L. 302-8 du CCH.

Le deuxième alinéa constitue le coeur du dispositif incitatif et contractuel qui vous est proposé. Il fonde le passage d'une logique de stock à une logique de flux.

Ce texte offre la possibilité aux communes qui le souhaitent de s'engager sur des programmes triennaux de constructions de logements sociaux. Les communes souhaitant sortir du mécanisme coercitif institué par l'article 55 pourraient désormais, sur délibération du conseil municipal, s'engager sur un programme triennal de construction de logements locatifs sociaux, au moins égal au tiers du nombre de logements réalisés sur le territoire de la commune au cours des trois ans à venir. Les élus locaux auront donc, en fonction des informations dont ils disposent (flux de constructions passés, rythme de délivrance des permis de construire etc...), à estimer ce flux futur, afin de fixer un objectif chiffré. Pour éviter tout « malthusianisme » en matière de constructions, le nombre de logements locatifs sociaux construits sur la période de référence ne pourra pas être inférieur à 1 % du total des résidences principales calculé au début de la période, même si l'application de la règle du tiers conduisait à un objectif inférieur. Ce seuil minimum serait toutefois plafonné à 15 % du nombre de logements locatifs sociaux manquants pour atteindre le seuil des 20 %.

Votre commission a retenu une rédaction légèrement différente de celle présentée par les auteurs de la proposition de loi pour le premier paragraphe. Dans un souci de clarification, il est précisé que l'engagement des communes s'apprécie en fonction d'un objectif chiffré mais aussi en proportion (le tiers du flux) du total des nouvelles constructions. Les communes devraient ainsi s'engager à adapter un programme de construction de logements sociaux à l'évolution des demandes de nouvelles constructions.

Si les communes sont membres d'un EPCI compétent en matière de programme local de l'habitat, et si le taux de logements sociaux au niveau de l'agglomération est inférieur à 20 %, la responsabilité du programme de construction est transférée à l'échelon intercommunal. En ce cas, le programme local de l'habitat intercommunal fixerait, dans les mêmes conditions que pour les communes prises individuellement, un objectif triennal de réalisation de logements locatifs sociaux, réparti sur le territoire couvert par l'établissement public. Cet objectif ne pourrait être inférieur à la somme des obligations des communes soumises à l'obligation de réalisation de logements locatifs sociaux et les communes non soumises aux obligations de construction ne pourraient se voir imposer la construction de logements sociaux supplémentaires sans leur accord. Les communes soumises aux obligations devraient alors s'engager par délibération sur l'objectif qui leur serait fixé par le programme local de l'habitat.

Certaines communes sont parfois soumises à une pénurie de zones constructibles, liée à des contraintes naturelles, à des servitudes fixées par le droit de l'urbanisme, ou parce que leur territoire est totalement urbanisé et qu'elles ne disposent plus d'offre foncière. En ce cas, la proposition de loi propose de donner la faculté au préfet de réduire les obligations des communes qui, du fait des contraintes énumérées ci-dessus, rencontrent des difficultés particulières pour réaliser des logements. Cette décision ne pourrait toutefois être prise qu'après avis favorable de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de programme de l'habitat, si la commune est membre d'un tel établissement, ou, à défaut, du conseil départemental de l'habitat.

L'engagement des communes dans cette démarche contractuelle constituera une faculté et non une obligation. Les communes s'engageant dans cette démarche contractuelle ne seront plus soumises au prélèvement de l'article 55. Les communes ne souhaitant pas s'engager dans ce mécanisme contractuel et disposant de moins de 20 % de logements locatifs sociaux resteront soumises au régime précédent et continueront à être pénalisées selon les critères actuels.

A l'issue de la période triennale, si le contrat n'est pas respecté par la commune, cette dernière sera soumise, après un examen contradictoire avec le préfet du respect des engagements, à des sanctions proportionnées à l'ampleur du non-respect du contrat. Pour ce faire, le nombre de logements sociaux prévu au contrat, est actualisé pour tenir compte des écarts entre les prévisions effectuées en début de période et le nombre de constructions effectivement réalisées.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qu'elle vous soumet.

Article 4

Cet article répond à la même justification que celle exposée au premier alinéa de l'article 1 er , à savoir mettre en cohérence l'article L. 302-2 et l'article L. 302-9 du CCH.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qui vous est présentée dans la proposition de loi.

Article 5

Dans l'hypothèse où les communes décident de s'engager dans la démarche contractuelle prévue à l'article 3, il est prévu, dans cet article, de préciser que le préfet, dans le cadre de son pouvoir de répartition des crédits affectés à la politique de l'habitat, donne priorité à ces communes et à ces EPCI pour leur permettre de respecter leur engagement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qui vous est présentée dans la proposition de loi.

Article 6

Cet article propose d'accélérer la redistribution du prélèvement opéré en 2002 au titre de l'article 55. En effet, sur les 40,2 millions d'euros prélevés cette année, 34,2 M€ auraient dû être reversés à un fonds d'aménagement urbain (FAU). Or, le décret créant ce FAU n'a toujours pas été publié. Ainsi, il est précisé que les sommes collectées en 2002 seront versées à ces fonds, désormais régionaux, afin qu'elles puissent soutenir le plus rapidement possible les politiques locales en faveur du logement social.

Afin de laisser aux communes et aux EPCI qui le souhaitent le temps de préparer les délibérations nécessaires pour s'engager dans ce mécanisme contractuel et pour tenir compte des délais d'adoption de ces nouvelles dispositions, cet article prévoit que les communes qui s'engageront dans le dispositif avant le 1 er janvier 2004 se verront remboursées du prélèvement qui sera opéré en 2003 au titre de l'article 55.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction qui vous est présentée dans la proposition de loi.

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