TITRE III -

DISPOSITIONS RELATIVES À
L'ENSEMBLE DES AÉROPORTS

Article additionnel avant l'article 8 -

Commission de conciliation aéroportuaire

Votre rapporteur a pu mesurer, lors des auditions qu'il a menées, l'attente de nombreux acteurs de la vie aéroportuaire d'un espace de concertation et de conciliation entre les aéroports et leurs utilisateurs, principalement les compagnies aériennes. Les capacités aéroportuaires constituant une ressource limitée et fournie par des exploitants en situation d'oligopole, il importe de définir un tel espace de gestion des divergences exprimées.

Après avoir réfléchi à la forme la plus adaptée à cet objectif, votre rapporteur a retenu la solution d'une commission de conciliation aéroportuaire (CCA) composée de sept membres nommés par décret. Ceux-ci seraient issus du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes et de la Cour de Cassation pour trois d'entre eux. Deux autres membres seraient nommés au titre de leurs qualifications dans le domaine du transport aérien. Enfin, cette commission comprendrait deux parlementaires, afin de refléter la prise en compte des orientations de la politique publique du transport aérien.

Il reviendra à la CCA d'émettre des avis motivés à l'intention du ministre chargé de l'aviation civile sur tous les litiges relatifs à la gestion et à l'exploitation des grands aéroports. Il appartiendra au ministre de trancher ces litiges dès lors que la CCA n'aura pu définir un arbitrage accepté par toutes les parties.

Votre rapporteur s'est interrogé sur l'opportunité de pousser plus avant cette logique , en confiant un rôle décisionnaire et juridictionnel à cette structure, ce qui aurait imposé d'en faire une autorité administrative indépendante de régulation. Celle-ci aurait été compétente en particulier pour la fixation des redevances aéroportuaires.

L'existence d'une autorité administrative indépendante de régulation se justifiait en particulier en raison de la multiplicité des rôles assumés par l'Etat. Celui-ci, outre ses fonctions de régulation, est en effet l'actionnaire majoritaire d'ADP, l'actionnaire principal d'Air France et sera actionnaire des sociétés anonymes concessionnaires des grands aéroports régionaux 17 ( * ) .

Toutefois, votre rapporteur a considéré qu'une telle évolution constituerait aujourd'hui une redéfinition trop soudaine du cadre de la régulation économique du transport aérien, qui pouvait à ce titre perturber l'équilibre des compagnies aériennes et des exploitants d'aérodromes. Au vu du contexte particulièrement difficile pour le transport aérien, il en a conclu au caractère pour l'heure prématuré de cette évolution.

En revanche, votre commission souhaite que la discussion du présent projet de loi en séance publique soit l'occasion pour le Gouvernement de présenter avec précision devant votre Haute Assemblée sa politique du transport aérien et partant, sa politique de régulation économique du secteur. En effet, le cadre de la régulation économique reposant largement sur des normes de niveau réglementaire, il est indispensable que le Gouvernement puisse s'engager sur ce point devant le Parlement.

Votre commission vous demande d'adopter l'amendement de création de cet article additionnel qu'elle vous présente.

Article 8 -

Régulation économique des redevances

Cet article introduit un nouvel article L. 224-2 dans le code de l'aviation civile afin d'introduire la possibilité de modulation des redevances aéroportuaires et d'encadrement de leur progression dans un cadre pluriannuel.

Le premier alinéa du paragraphe I proposé pour ce nouvel article autorise la perception de redevances en contrepartie des services aéroportuaires rendus. Ces redevances sont dites réglementées dans la mesure où, aux termes de l'article L. 410-2 du code du commerce, elles sont déterminées par un décret en Conseil d'Etat pris après consultation du Conseil de la concurrence. Cette référence donne une base juridique explicite aux redevances aéroportuaire, ce dont votre rapporteur se félicite vivement, du fait de l'importance de celles-ci pour l'économie aéroportuaire.

Le second alinéa introduit une dimension nouvelle dans le calcul du montant des redevances, puisque celui-ci pourra désormais intégrer la rémunération des capitaux investis ainsi que le provisionnement des sommes nécessaires aux investissements aéroportuaires à venir.

Il s'agit là d'une modernisation considérable de la conception de ces redevances, plus cohérente avec la réalité du fonctionnement économique de l'entreprise aéroportuaire, mais surtout indispensable au maintien des investissements aéroportuaires.

Le troisième alinéa de ce paragraphe porte sur un des éléments principaux du présent projet de loi : la modulation des redevances réglementées .

Le dispositif proposé encadre ces modulations :

- elles ne peuvent être que « limitées » ;

- elles doivent être motivées par des motifs d'intérêt général.

Le texte qui est soumis à votre Haute Assemblée propose trois exemples de ces motifs d'intérêt général : la protection de l'environnement, l'amélioration de l'utilisation des infrastructures et la diminution de leur encombrement. Votre rapporteur constate le caractère très général du second de ces exemples. Il considère qu'il appartient au législateur de préciser le cadre de la modulation. A ce titre, votre commission vous présente un amendement restreignant ce champ aux cas énumérés dans le texte même.

Le dernier alinéa de ce premier paragraphe détermine une enveloppe globale pour ces redevances, dans la mesure où leur produit ne peut excéder le coût des services rendus sur l'aéroport. La modulation ne constitue donc pas une source d'accroissement des ressources de l'exploitant, mais une incitation à une répartition des redevances plus profitable à la collectivité .

Le paragraphe II définit un cadre quinquennal d'évolution des tarifs des redevances aéroportuaires pour ADP et les grands aéroports régionaux. En effet, l'Etat pourra conclure des conventions quinquennales fixant une évolution maximale des redevances, au vu de l'évolution attendue de l'activité aéroportuaire, des prévisions d'investissement et d'objectifs de qualité des services publics rendus. Cette liste de critères n'est pas exhaustive.

Il est enfin prévu que, dans le cas des grands aéroports régionaux dont l'Etat est propriétaire, ces contrats soient incorporés aux contrats de concession qu'il aura conclus pour leur exploitation.

Le deuxième alinéa de ce paragraphe dispose qu'en l'absence d'une telle convention pluriannuelle, les tarifs des redevances sont déterminés sur une base annuelle. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, le projet de décret du Gouvernement disposerait qu'en cas de rejet par l'Etat des propositions de l'exploitant, les redevances seraient alors maintenues au niveau de l'année précédente, ce qui constituerait naturellement un manque à gagner pour l'exploitant. En cas de rejet par l'Etat pendant deux années consécutives, celui-ci fixerait ensuite directement le tarif des redevances. Ce mécanisme dissuasif constitue donc pour l'exploitant une forte incitation à la contractualisation.

Le paragraphe III prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat précisera les conditions de définition et de modulation des redevances ainsi que les sanctions pesant sur l'exploitant s'il ne respecte pas ses obligations dans ce domaine. Ces sanctions sont « en particulier » de nature pécuniaire. Votre commission vous propose un amendement de précision qui supprime cette nuance sans objet, dans la mesure où seules des sanctions pécuniaires sont envisagées.

Votre commission vous demande d'adopter les deux amendements qu'elle vous présente et l'article 8 ainsi modifié.

Article 9 -

Perception de redevances domaniales par les exploitants d'aérodromes appartenant à des collectivités territoriales

Cet article vise les aérodromes appartenant à des collectivités territoriales. En effet, les conditions de la perception des redevances domaniales assises sur les terrains aéroportuaires des collectivités territoriales, gagneront à être fondées sur une base législative. Il crée un nouvel article L. 224-3 dans le code de l'aviation civile. Il autorise, lorsque l'aérodrome est établi sur le domaine public, la perception par l'exploitant de redevances domaniales auprès des tiers.

Les collectivités territoriales garderont le contrôle sur la perception de ces redevances par l'exploitant.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 10 -

Voies de recouvrement des redevances aéroportuaires

Cet article insère dans le code de l'aviation civile un article L. 123-4 renforçant les voies ouvertes aux bénéficiaires des redevances aériennes en cas de non paiement ou de paiement insuffisant des propriétaires d'aéronefs. Dans l'état actuel du droit, le second alinéa de l'article R. 224-4 du CAC ouvre aux exploitants d'aérodromes la possibilité de « requérir de l'autorité responsable de la circulation aérienne sur l'aérodrome que l'aéronef y soit retenu jusqu'à consignation du montant des sommes en litige » . Le présent article substitue à cette procédure la possibilité pour l'exploitant, après mise en demeure, de demander au juge judiciaire la saisie conservatoire d'un aéronef exploité ou appartenant à un redevable qui ne se serait pas acquitté du montant des redevances.

Ce dispositif doit permettre de diminuer le taux de non recouvrement des redevances . Il appartient aux autorités responsables de la circulation aérienne sur l'aérodrome d'immobiliser, sur ordonnance judiciaire, l'aéronef considéré. Il convient de relever qu'en cas de paiement par le redevable la saisie conservatoire est levée.

Votre rapporteur souligne la pertinence de la modification proposée à votre Haute Assemblée . De fait, certains exploitants d'aéronefs utilisent le non paiement ou le paiement partiel des redevances dues comme moyen de réduction de leurs charges d'exploitation. Cette pratique, outre son illégalité, cause un triple dommage au secteur du transport aérien :

- elle détériore la trésorerie des aérodromes, qui ne recouvrent les sommes dues qu'après un long délai ;

- elle constitue une distorsion de concurrence au détriment des compagnies respectueuses du cadre réglementaire ;

- elle fait supporter, en définitive, l'essentiel du manque à recouvrer par la collectivité des autres compagnies aériennes.

Votre rapporteur se félicite donc de l'amélioration que constitue le dispositif proposé par cet article à votre Haute Assemblée .

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 11 -

Contrôle des exigences de sécurité et de sûreté par les agents de l'Etat

Cet article crée un nouvel article L. 213-2-1 dans le code de l'aviation civile afin d'affirmer la mission de contrôle par les agents civils et militaires de l'Etat, ainsi que par les personnels des entreprises qu'il habilite, du respect des mesures de sécurité et de sûreté du transport aérien. Ces agents et personnels habilités sont autorisés à pénétrer à tout moment dans les locaux et sur les terrains à usage professionnels de l'aéroport.

Cet article est nécessaire dès lors que les terrains et ouvrages ont été déclassés hors du domaine public . Le respect de la propriété privée impose en effet une autorisation législative pour permettre un tel contrôle.

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

Article 12 -

Base législative de l'assistance en escale

Cet article créé un nouveau chapitre VI au Titre I er du livre II du CAC, pour donner un fondement législatif à l'activité d'assistance en escale, qui consiste en particulier dans le traitement des bagages 18 ( * ) . Sont visés les aéroports dont le trafic excède un seuil défini par décret. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, ce seuil devrait correspondre à celui défini, en l'état actuel du droit, par l'article R. 216-14 du CAC, soit un trafic annuel supérieur à 200 000 passagers ou 20.000 tonnes de fret.

Actuellement, l'assistance en escale est régie par les dispositions des articles R. 216-1 à R. 216-16 du CAC, introduits par le décret n° 98-7 du 5 janvier 1998. Comme à l'article 11 du présent projet de loi, le déclassement d'une partie des terrains aéroportuaires impose d'élever le dispositif au niveau législatif .

Votre commission vous demande d'adopter cet article sans modification.

* 17 S'ajoute à ces intérêts la possession par l'Etat de la SNCF, concurrente naturelle du transport aérien en court courrier.

* 18 Outre le traitement des bagages, cette activité recouvre également l'assistance aux opérations en piste, à la fourniture en carburant et huile, et le transport du fret et de la poste sur les aires de trafic.

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