ARTICLE 38

Aménagement du régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers

Commentaire : le présent article a pour objet d'apporter certains aménagements au nouveau régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers, issu de la loi de finances initiale pour 2004.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE NOUVEAU RÉGIME D'IMPOSITION DES PLUS-VALUES IMMOBILIÈRES DES PARTICULIERS

L'article 10 de la loi n° 2003-1311 de finances pour 2004 a réformé le régime d'imposition des plus-values réalisées par les particuliers lors de la cession d'immeubles, de meubles ou de parts de sociétés prépondérance immobilière . Ce régime se substitue au dispositif issu de la loi du 19 juillet 1976 dans le cadre duquel les plus-values étaient déclarées l'année suivant celle de leur réalisation et comprises dans le revenu global soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu. Le nouveau régime est précisé par l'instruction 8M-1-04 n° 7 du 14 janvier 2004.

Depuis le 1 er janvier 2004, les plus-values réalisées à l'occasion des opérations précitées sont soumises à un taux proportionnel de 16 % auquel il faut ajouter les prélèvements sociaux, soit au total 26 % . La plus-value est déclarée et l'impôt est payé lors de la mutation.

Le champ d'application de l'imposition se trouve réduit par un certain nombre d' exonérations qui sont liées à la nature des biens cédés ou des opérations réalisées, ou encore à la qualité du cédant. Sont ainsi exonérées les opérations concernant la résidence principale ou s'inscrivant dans le cadre d'un remembrement ou d'une expropriation, à certaines conditions. Sont également exonérées les cessions inférieures à 15.000 euros et celles bénéficiant aux titulaires d'une pension de vieillesse ou d'une carte d'invalidité, à condition qu'ils ne soient pas passibles de l'impôt de solidarité sur la fortune et que leur revenu fiscal de référence soit inférieur à une limite qui est fonction du nombre de parts de quotient familial. Par ailleurs, les plus-values réalisées sur des immeubles détenus depuis plus de quinze ans sont exonérées par le jeu de l'abattement de 10 % par année de possession de l'immeuble au-delà de la cinquième.

B. LE RÉGIME DES CONTRIBUABLES DOMICILIÉS HORS DE FRANCE

Sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts (CGI) et les personnes morales ou organismes, quelle qu'en soit la forme, dont le siège est situé hors de France sont soumis à un prélèvement d'un tiers (33 1/3 %) sur les plus-values réalisées à titre occasionnel résultant de la cession d'immeubles, de droits immobiliers ou d'actions et parts de sociétés non cotées en bourse à prépondérance immobilière (CGI, art. 244 bis A ).

L'article 10 de la loi de finances pour 2004 aménage le régime d'imposition des plus-values immobilières réalisées par les non-résidents . Il prévoit notamment que :

- les modalités de détermination de la plus-value, lorsque le cédant est assujetti à l'impôt sur le revenu, sont alignées sur les nouvelles dispositions applicables aux contribuables domiciliés en France ;

- l'exonération applicable aux cessions de l'habitation en France des contribuables non-résidents est aménagée ;

- le taux du prélèvement est fixé à 16 % pour les seules personnes physiques et les associés personnes physiques de sociétés de personnes résidents d'un Etat membre de la Communauté européenne ;

- l'excédent du prélèvement non imputé sur le montant de l'impôt sur les sociétés dû par les contribuables non assujettis à l'impôt sur le revenu est restituable ;

- les modalités d'appréciation de la prépondérance immobilière sont alignées sur celles applicables aux contribuables résidents. Toutefois, à la différence du régime de droit interne, le régime de la prépondérance immobilière continue à s'appliquer aux titres de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés non cotées en bourse dont l'actif est constitué principalement d'immeubles ou de droits relatifs à des immeubles.

Ces nouvelles dispositions s'appliquent pour l'imposition des plus-values réalisées lors des cessions à titre onéreux intervenues à compter du 1 er janvier 2004.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

A. LE RÉGIME APPLICABLE AUX CONTRIBUABLES DOMICILIÉS HORS DE FRANCE

Le présent article propose de prévoir que s'appliquent aux plus-values réalisées par les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France :

- les exonérations susmentionnées, sous réserve, s'agissant des titulaires de pensions de vieillesse ou de cartes d'invalidité, que ceux-ci soient résidents de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale contenant une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre l'évasion fiscale (donc à l'exclusion du Liechtenstein) ;

- le sursis d'imposition applicable en cas d'échange de titres de sociétés à prépondérance immobilière à l'occasion de fusions, scissions ou apports de titres à une société soumise à l'impôt sur les sociétés.

S'agissant de l'exonération particulière de l'habitation en France de certains non-résidents, la condition de libre-disposition du bien au jour de la cession s'est révélée inadaptée , certains contribuables échappant à l'impôt alors que le logement n'a été à leur disposition que quelques jours, à l'issue d'un congé pour vendre par exemple. Le présent article propose donc que l'habitation ait été à la libre disposition du cédant depuis le 1 er janvier de l'année précédant celle de la cession.

Le présent article propose également d'aligner les modalités d'imposition des associés non résidents de sociétés de personnes dont le siège est en France sur les modalités d'imposition des non-résidents détenant directement le bien cédé . En effet, le contribuable résident d'un Etat qui n'est pas membre de la Communauté européenne est imposé, en cas de cession d'un immeuble qu'il détient directement au taux d'un tiers. Il est imposé au taux de 16 % lorsqu'il détient un immeuble au travers d'une société civile qui a son siège en France. Cette différence de traitement est susceptible d'occasionner des évasions fiscales. Trois anomalies du dispositif actuel seraient donc corrigées :

- les associés personnes physiques et morales résidents d'un Etat non membre de la Communauté européenne seraient imposés au taux d'un tiers lorsqu'ils détiennent le bien au travers d'une société de personnes qui a son siège en France ;

- le prélèvement d'un tiers serait également dû par les associés personnes morales de sociétés de personnes françaises, résidents d'un Etat membre de la Communauté européenne ou de l'espace économique européen, ayant conclu une convention fiscale avec la France comportant une clause de lutte contre la fraude ou l'évasion fiscale.

- les dispositions de l'article 244 bis A s'appliqueraient aux associés personnes morales de sociétés de personnes françaises, qui ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu en France. Ainsi, le prélèvement serait acquitté lors de la transaction, ce qui élimine le risque d'évasion fiscale.

Par ailleurs, plusieurs dispositions visant les résidents communautaires font l'objet d'un élargissement aux ressortissants d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale.

B. LA DÉFINITION DE LA PRÉPONDÉRANCE IMMOBILIÈRE

Les sociétés à prépondérance immobilière relèvent du régime d'imposition des plus-values immobilières, afin d'assurer la neutralité de l'impôt au regard du mode de détention de l'immeuble.

Il est proposé d'inscrire dans la loi que les sociétés à prépondérance immobilière sont celles dont l'actif est constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par des immeubles ou des droits portant sur des immeubles . Il est également proposé d'inscrire dans la loi que cette proportion s'apprécie en fonction de la valeur réelle des éléments d'actif à la clôture des trois exercices qui précèdent la cession.

Il s'agit de sécuriser une disposition prise par décret en Conseil d'Etat (article 74 SB annexe II du CGI), qui fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir.

C. LE CALCUL DE LA PLUS-VALUE IMPOSABLE

Il est proposé d'harmoniser la définition du prix d'acquisition à titre gratuit avec celle applicable en matière de plus-values sur valeurs mobilières.

Il est également proposé de corriger certains effets du nouveau barème d'évaluation de l'usufruit et de la nue-propriété prévue à l'article 669 du code général des impôts, qui est pénalisant en cas de cessions conjointes de droits démembrés reçus à la suite d'une succession intervenue avant le 1 er janvier 2004.

Dans un objectif d'harmonisation avec les règles de détermination des revenus fonciers imposables, il est proposé de supprimer la référence à la notion de rénovation dans les travaux à prendre en compte pour la détermination de la plus-value immobilière. En pratique, il s'agit d'une correction rédactionnelle.

Enfin, il est proposé une majoration du prix d'acquisition pour frais de voirie, de réseaux et distribution, ce qui constitue une mesure d'équité.

D. LA CORRECTION DE CERTAINES IMPERFECTIONS RÉDACTIONNELLES DES DISPOSITIONS RELATIVES AUX PRÉLÉVEMENTS SOCIAUX

La loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées a créé :

- la contribution additionnelle sur les produits de placement au taux de 0,3 % (à compter du 1 er juillet 2004) ;

- la contribution additionnelle sur les revenus du patrimoine à partir des revenus de l'année 2003, aux taux de 0,15 % pour les revenus 2003 et 0,3 % les années suivantes.

Par ailleurs, la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie prévoit un relèvement de 0,7 point du taux de la contribution sociale généralisée.

L'imposition des plus-values immobilières étant désormais opérée dès la transaction, la loi du 13 août 2004 précitée prévoit que les prélèvements sociaux sur les plus-values immobilières suivent le régime des produits de placement, c'est-à-dire qu'ils sont recouvrés au fur et à mesure de l'appréhension du revenu.

Ce dispositif appelle plusieurs aménagements techniques et de coordination auxquels procède le présent article . Il est notamment proposé que le régime des prélèvements sociaux applicable aux plus-values immobilières soit jumelé avec celui applicable aux produits de placements dès le 1 er janvier 2004 et non à la date d'entrée en vigueur de la loi précitée du 13 août 2004.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements purement rédactionnels présentés par notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Il est apparu, lors de la mise en oeuvre du nouveau régime d'imposition des plus-values immobilières des particuliers, qui a fait l'objet d'une instruction administrative dès le mois de janvier 2004, qu'un certain nombre d'aménagements étaient nécessaires, de façon à éliminer certains facteurs d'évasion fiscale, liés notamment au régime applicable aux contribuables domiciliés hors de France.

Le dispositif proposé prolonge la réforme adoptée l'année dernière, qui constituait une excellente mesure de simplification de notre droit fiscal.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

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