N° 373

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 juin 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, autorisant l'approbation de l' accord concernant la coopération en vue de la répression du trafic illicite maritime et aérien de stupéfiants et de substances psychotropes dans la région des Caraïbes ,

Par M. Michel GUERRY,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Serge Vinçon, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert Del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, Mme Hélène Luc, M. André Boyer, vice-présidents ; MM. Simon Loueckhote, Daniel Goulet, Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, André Rouvière, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mme Paulette Brisepierre, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, MM. Francis Giraud, Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Hue, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Jacques Pelletier, Daniel Percheron, Jacques Peyrat, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Yves Rispat, Josselin de Rohan, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 1980 , 2203 et T.A. 428

Sénat : 348 (2004-2005)

Traités et conventions.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le dispositif international de lutte contre les stupéfiants s'est progressivement développé et renforcé pour passer d'un contrôle du commerce des substances autorisées (Convention unique des stupéfiants de 1961) à la répression des trafics illicites (Convention des Nations unies de 1988).

La ratification des instruments internationaux pertinents est désormais quasi-universelle, dotant la communauté internationale du cadre juridique nécessaire.

Sur le fondement de ces textes, la coopération opérationnelle reste à renforcer, notamment dans les zones où les flux de trafic sont concentrés.

C'est le cas de la région des Caraïbes, lieu de trafic de cocaïne, où la coopération s'intensifie entre les pays de production et les pays de consommation d'une part, et les pays de transit, d'autre part.

Signé à San José, capitale du Costa Rica, le 10 avril 2003, par neuf Etats de la région (Etats-Unis, Jamaïque, Pays-Bas, Guatemala, Nicaragua, Costa Rica, République dominicaine, France, Honduras), l'accord concernant la coopération en vue de la répression du trafic illicite maritime et aérien de stupéfiants et de substances psychotropes dans la région des Caraïbes est le premier accord régional signé sur le fondement de la Convention des Nations unies de 1988 qui invite les Parties à adopter des accords de coopération plus contraignants.

Cet accord couvre tous les aspects de la coopération en matière de lutte contre le trafic, de l'échange de renseignements aux opérations d'arraisonnement de navires suspects.

I. UNE RÉGION MARQUÉE PAR LE TRAFIC DE COCAÏNE

A. DES MUTATIONS IMPORTANTES DURANT LA DÉCENNIE 1990

1. L'évolution des zones de production

La production mondiale de cocaïne est concentrée sur trois pays d'Amérique latine : la Colombie, à titre principal, ainsi que le Pérou et la Bolivie.

La filière de la production de cette drogue, produite à partir de la feuille de coca, est marquée par une forte mobilité, tant des zones de production que des flux de trafic.

Jusqu'aux années 1990, l'Europe n'était concernée qu'à titre marginal par la consommation de cocaïne, les Etats-Unis étant la destination presque exclusive des trafics.

Au cours de la décennie 1990, la répartition de la production est marquée par de fortes évolutions : la Colombie devient le premier pays producteur en quintuplant ses volumes de production tandis que la production recule en Bolivie et au Pérou. Globalement, la production passe de 774 tonnes en 1990 à 950 millions en 1996. Le volume des saisies, qui atteint un record en 1999, atteste du développement de la production.

2. La diffusion de la cocaïne en Europe

Ce développement a deux conséquences principales.

D'une part, on observe une baisse des prix qui favorise la consommation : entre 1990 et 1999, le prix de la cocaïne a diminué de moitié, passant de 260 dollars à 130 dollars le gramme et, d'autre part la destination de la drogue évolue, se détournant partiellement des Etats unis pour se diriger vers l'Europe occidentale ; parallèlement, l'usage dans les pays producteurs se développe.

Avec plus de 5 millions de consommateurs, les Etats unis restent le premier marché mondial de la cocaïne mais la répression y est devenue plus efficace, obligeant les trafiquants à trouver de nouveaux débouchés.

Sur les 185 usagers de drogue à l'échelle mondiale, le nombre de consommateurs de cocaïne est estimé à 13 millions de personnes, dont 6,38 millions en Amérique du Nord, 2,32 millions en Amérique du Sud et 3,11 millions en Europe occidentale.

B. LES ÉVOLUTIONS RÉCENTES

1. Une tendance à la diminution de la production

Sous l'effet de campagnes d'éradication, la culture de la coca est en baisse dans l'ensemble des pays producteurs et s'élevait en 2003 à 655 tonnes. La superficie totale cultivée a diminué de 30 % entre 1999 et 2003, la diminution la plus importante étant constatée en Colombie. Ces chiffres sont à manier avec précaution puisqu'il semble qu'à la fois les rendements à l'hectare progressent et que les techniques de dissimulation des cultures évoluent.

2. Un phénomène installé en Europe occidentale

L'évolution des saisies témoigne également d'une diminution de la production. Après des niveaux record, les saisies se sont stabilisées en volume. Leur répartition a cependant évolué : elles sont désormais effectuées en grande partie sur le territoire même des pays producteurs et se sont accrues en proportion en Europe occidentale où l'Espagne et les Pays-bas sont les principaux points d'entrée mais aussi de consommation.

L'utilisation des territoires européens d'outre-mer comme point d'entrée vers l'Europe continentale est un autre phénomène nouveau qui alimente la criminalité mais aussi la consommation dans ces territoires. Alors que la consommation locale de drogue portait pour l'essentiel sur du cannabis, elle s'est étendue à la cocaïne et surtout au crack, dont les effets sont ravageurs en raison d'une accoutumance très rapide.

Cette évolution atteste de l'adaptation des trafics à l'augmentation de la répression et à l'amélioration de son efficacité : le pourcentage de la drogue interceptée est estimé à environ 45 % de la production.

La baisse de la production conjuguée à l'amélioration de l'efficacité des saisies diminue la quantité de cocaïne disponible, ce qui contribue à une augmentation des prix qui pourrait avoir des conséquences sur la consommation. On observe cependant que le phénomène de « démocratisation » de l'usage de cocaïne est désormais installé en Europe occidentale où le nombre des cocaïnomanes est estimé à 1% de la population âgée de 15 à 64 ans. La cocaïne occupe le troisième rang des substances consommées, après le cannabis et les STA (stimulants de type amphétamines). L'usage de cette drogue, dont l'usage était cantonné à des populations relativement aisées, s'est répandu. En France, le nombre de consommateurs dans l'année est estimé à 200 000 personnes.

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