EXAMEN DES ARTICLES

ARTICLE 1er bis (nouveau)

Modification des modalités d'utilisation des surplus non anticipés de recettes fiscales en loi de finances rectificative

Commentaire : le présent article prévoit que les modalités d'utilisation des surplus de recettes fiscales par rapport à ses évaluations, fixées par la loi de finances initiale, pourront être modifiées par une loi de finances rectificative.

Comme cela a déjà été indiqué, l'article premier du présent projet de loi organique -adopté dans les mêmes termes par les deux assemblées et donc en dehors de la navette- prévoit que la première partie de la loi de finances de l'année devra arrêter les modalités d'utilisation des éventuels surplus, par rapport à ses évaluations, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'État.

Le présent article, dû à l'initiative de sa commission spéciale, a été inséré par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, avec l'avis favorable du gouvernement. En la forme, il compléterait la première phrase du premier alinéa de l'article 35 de la LOLF, énumérant les dispositions de la loi de finances de l'année que seule une loi de finances rectificative peut modifier en cours d'année.

Il est présenté comme un amendement de coordination, puisqu'il prévoit que le « collectif » pourra modifier les modalités d'utilisation des éventuels surplus de rentrées fiscales, telles qu'elles auront été arrêtées par la loi de finances de l'année selon l'article premier du présent projet de loi organique.

Ainsi, une loi de finances rectificative pourrait modifier, à la fin du printemps, par exemple, les modalités d'utilisation des surplus, arrêtées dans la loi de finances de l'année votée à l'automne précédent. Cette modification pourrait intervenir alors trois mois seulement avant la présentation du prochain projet de loi de finances de l'année, comprenant la « constatation » de l'éventuel surplus .

Le présent article semble donc accroître la marge de manoeuvre du gouvernement en lui accordant plus de souplesse et limiter parallèlement le caractère « volontariste » de l'article premier, à l'origine du présent projet de loi organique.

D'une certaine manière, le présent article pourrait être considéré comme « relativisant » la portée de l'article premier.

Toutefois, la disposition proposée paraît incontestable dans son principe, les circonstances pouvant en effet conduire le gouvernement à « moduler » les décisions initiales en cours d'exercice .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 7

Engagement des crédits afférents aux opérations de partenariat
public-privé (PPP)

Commentaire : le présent article prévoit que les opérations de PPP devront faire l'objet d'autorisations d'engagement couvrant la totalité de l'engagement juridique.

L'origine du présent article revient au Sénat qui, en première lecture et sur proposition de votre commission des finances, a souhaité que « pour les opérations menées en partenariat pour lesquelles l'État confie à un tiers une mission globale relative au financement d'investissements ainsi qu'à leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, l'autorisation d'engagement couvre la totalité de l'engagement financier ».

En d'autres termes, le texte rend obligatoire une autorisation parlementaire -sous la forme d'autorisation d'engagement- pour le lancement des PPP, l'autorisation devant couvrir aussi bien l'investissement que les dépenses de maintenance, d'exploitation et, éventuellement, de gestion. Il s'agit donc de permettre au Parlement d'exercer pleinement ses prérogatives.

Initiés en 2002 dans les secteurs « régaliens » (police et gendarmerie nationales, justice 5 ( * ) ) les PPP ont été « généralisés » par une ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004.

Les PPP selon l'ordonnance du 17 juin 2004

Article premier

Les contrats de partenariat sont des contrats administratifs par lesquels l'État ou un établissement public de l'État confie à un tiers, pour une période déterminée en fonction de la durée d'amortissement des investissements ou des modalités de financement retenues, une mission globale relative au financement d'investissements immatériels, d'ouvrages ou d'équipements nécessaires au service public, à la construction ou transformation des ouvrages ou équipements, ainsi qu'à leur entretien, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion, et, le cas échéant, à d'autres prestations de services concourant à l'exercice, par la personne publique, de la mission de service public dont elle est chargée.

Le cocontractant de la personne publique assure la maîtrise d'ouvrage des travaux à réaliser.

Il peut se voir confier tout ou partie de la conception des ouvrages.

La rémunération du cocontractant fait l'objet d'un paiement par la personne publique pendant toute la durée du contrat. Elle peut être liée à des objectifs de performance assignés au cocontractant.

Article 2

Les contrats de partenariat ne peuvent être conclus que pour la réalisation de projets pour lesquels une évaluation, à laquelle la personne publique procède avant le lancement de la procédure de passation :

a) Montre ou bien que, compte tenu de la complexité du projet, la personne publique n'est pas objectivement en mesure de définir seule et à l'avance les moyens techniques pouvant répondre à ses besoins ou d'établir le montage financier ou juridique du projet, ou bien que le projet présente un caractère d'urgence.

b) Expose avec précision les motifs de caractère économique, financier, juridique et administratif, qui l'ont conduite, après une analyse comparative, notamment en termes de coût global, de performance et de partage des risques, de différentes options, à retenir le projet envisagé et à décider de lancer une procédure de passation d'un contrat de partenariat. En cas d'urgence, cet exposé peut être succinct.

L'évaluation est réalisée avec le concours d'un organisme expert choisi parmi ceux créés par décret.

Article 3

La passation d'un contrat de partenariat est soumise aux principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats et d'objectivité des procédures.

Elle est précédée d'une publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes dans des conditions prévues par décret.

Source : ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004

Les PPP se caractérisent par une longue durée des contrats, un mode de financement privé de l'investissement, une participation de l'opérateur privé à tous les stades du cycle de vie de l'investissement et une répartition des risques entre secteur public et secteur privé en fonction de leurs capacités respectives à les appréhender et les maîtriser.

L'institution des PPP se situe dans un contexte de besoins importants d'équipements publics, de qualité et bien entretenus, notamment pour l'accomplissement des missions régaliennes de l'État , par exemple pour la réalisation du programme de rénovation des établissements pénitentiaires (la loi précitée d'orientation et de programmation pour la justice prévoit la création de 13.200 places supplémentaires de détention sur la période 2003-2007). Certaines de ces places seront créées grâce à des partenariats public-privé.

L'intérêt de recourir au secteur privé en matière de maîtrise d'ouvrage doit être mesuré à partir d'études effectuées en amont aux fins d'évaluer, notamment, les économies à réaliser sur la construction et la maintenance, le coût du capital et celui des taux d'intérêt, ainsi que les risques liés à l'opération.

Sans être la meilleure formule en toute circonstance, les PPP peuvent, dans certaines hypothèses, constituer un moyen d'améliorer l'efficacité de la dépense publique, ce qui n'empêche pas de veiller à leur transparence budgétaire, la formule ne devant pas se réduire à un moyen d'échapper aux contraintes budgétaires . Bien au contraire, le projet de loi de finances doit clairement faire apparaître les engagements financiers de l'État résultant des PPP.

Il convient de rappeler que l'article 8 (2 ème alinéa) de la LOLF définit les autorisations d'engagement comme « la limite supérieure des dépenses pouvant être engagées ». Cet article prévoit, pour une opération d'investissement, que l'autorisation d'engagement « couvre un ensemble cohérent et de nature à être mis en service ou exécuté sans adjonction ». La disposition adoptée par le Sénat complétait cet article afin de prévoir que les contrats de PPP devront faire l'objet d'une autorisation d'engagement couvrant la totalité de l'engagement financier .

Cet objectif du Sénat a été approuvé par l'Assemblée nationale qui a, toutefois, modifié la rédaction du présent article pour mieux préciser son champ afin d'éviter le risque de soumettre les PPP à un régime trop rigoureux et susceptible de les pénaliser de manière excessive.

Selon la commission spéciale à l'origine de la nouvelle rédaction du présent article, approuvée par le gouvernement, la formulation retenue par le Sénat serait à la fois « vague et potentiellement très large ». Elle conduirait à ouvrir, dès l'année de conclusion du contrat, des autorisations d'engagement correspondant au coût total du contrat, comprenant aussi bien l'investissement, la maintenance et, éventuellement, les dépenses de gestion.

Compte tenu de ce que les PPP ont vocation à courir sur le long terme, le montant des autorisations d'engagement à ouvrir en loi de finances pourrait être considérable, ce qui rendrait difficile la signature de contrats qui n'auraient pas été suffisamment anticipés, alors même que l'article 2 de l'ordonnance du 17 juin 2004 précitée fait figurer l'urgence parmi les cas de recours à ces contrats.

L'importance des autorisations d'engagement à ouvrir pourrait alors rendre le recours aux PPP exceptionnels, privant ainsi l'État d'un outil permettant, dans certaines hypothèses, une meilleure efficacité de la dépense publique.

La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale tend à substituer à l'expression « totalité de l'engagement financier » celle, plus restrictive, de « totalité de l'engagement juridique », afin que l'autorisation d'engagement ne couvre que la partie certaine de l'engagement contracté.

Selon les indications de notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale, les règles d'engagement devraient être différenciées en fonction du type des coûts :

- les coûts d'investissement devraient être couverts dès la première année en totalité (à moins que le contrat ne prévoit des tranches conditionnelles, qui feraient alors l'objet d'ouvertures ultérieures d'autorisations d'engagement) ;

- les coûts de fonctionnement et les coûts de financement, au contraire, feraient l'objet d'autorisations d'engagement année par année ;

- les coûts liés au dédit éventuel seraient couverts par des autorisations d'engagement dès la première année.

Selon notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale, « il serait anormal que les partenariats public-privé soient soumis à un régime excessivement rigoureux et par trop distinct de celui applicable aux délégations de service public ».

Pour autant, la modification proposée n'a pas pour objet ou pour effet de mettre les PPP « à l'abri de l'autorisation parlementaire », celle-ci se bornant à clarifier le champ de l'autorisation afin d'éviter le risque d'effets préjudiciables à l'avenir des PPP.

On relèvera enfin, sur un plan rédactionnel, que le texte retenu par nos collègues députés se réfère à une mission globale « relative au financement d'investissements ainsi qu'à leur réalisation, leur maintenance, leur exploitation ou leur gestion ». Le texte adopté par le Sénat ne prévoyait pas explicitement leur réalisation.

Au total, le présent article, dans sa rédaction adoptée par l'Assemblée nationale, apparaît clarificateur, sans remettre aucunement en cause l'objectif recherché par le Sénat .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 8

Traitement en comptabilité nationale des opérations de
partenariat public-privé (PPP)

Commentaire : le « rapport économique, social et financier » (RESF), joint au projet de loi de finances de l'année, comportera une explication de la « clé de passage » entre le solde budgétaire de l'État et la capacité ou le besoin de financement de l'État au sens des engagements européens de la France, en indiquant notamment l'impact des PPP.

En première lecture, à l'initiative de votre commission des finances, le Sénat a inséré un nouvel article 34-1 à la LOLF afin que les PPP dans lesquels l'État supporte la plupart des risques liés à la propriété des actifs figurent au sein de la dette des administrations publiques, en tant que prêt imputé, dans la limite de la valeur nette comptable des investissements.

Votre rapporteur, convenant de ce que la rédaction proposée était perfectible et que la navette parlementaire devrait permettre une amélioration du dispositif, a indiqué au Sénat, en séance publique, le 16 décembre 2004, qu'il lui paraissait nécessaire, pour avoir une image fidèle de l'endettement de l'État, « d'inscrire dans les dettes de l'État celles qui correspondent à des portages d'opérations par des tiers. En effet, lorsque l'État confie à des opérateurs privés le soin de construire une prison ou une gendarmerie, l'objectif à atteindre est le même que si l'État conduisait ces opérations en tant que maître d'ouvrage. Nous souhaitons donc que la dette de l'État prenne en compte de tels financements, à hauteur des investissements dans leur valeur nette comptable ».

La question posée est celle de l'impact des PPP sur la capacité ou le besoin de financement public et sur la dette publique au sens du traité de Maastricht.

Notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale a, dans son rapport de deuxième lecture, approuvé l'objectif poursuivi par le Sénat, tout en proposant une nouvelle rédaction susceptible de répondre à certaines interrogations .

Il a fait valoir que les règles de traitement comptable des PPP ne pouvaient pas figurer dans la LOLF, s'appuyant sur un avis du Conseil d'État selon lequel le législateur organique n'était compétent que pour fixer les principes généraux de la comptabilité publique 6 ( * ) .

En outre, le rapporteur de la commission spéciale observe que les règles de comptabilité nationale sont harmonisées au niveau communautaire. « Incompétent en droit interne, le législateur organique pourrait donc, de surcroît, voir ses prescriptions tenues en échec par les normes européennes ».

Le cadre comptable fixé par Eurostat pour les PPP

L'Office statistique de l'Union européenne recommande que les actifs liés à un partenariat public-privé soient classés comme actifs non publics et ne soient donc pas enregistrés dans le bilan des administrations publiques si les deux conditions suivantes sont réunies :

- le partenaire privé supporte le risque de construction ;

- le partenaire privé supporte au moins l'un des deux risques suivants : celui de disponibilité ou celui lié à la demande .

Si le risque de construction est supporté par l'État, ou si le partenaire privé supporte seulement le risque de construction et aucun autre risque, les actifs sont classés comme actifs publics, ce qui a des conséquences importantes pour les finances publiques, tant du point de vue du déficit que de la dette. Les dépenses initiales en capital, relatives aux actifs, seront enregistrées comme formation de capital fixe des administrations publiques, avec un impact négatif sur le déficit/excédent public. En contrepartie de cette dépense de l'État, la dette publique augmentera sous la forme d'un « prêt imputé » du partenaire, qui fait partie du concept de la « dette de Maastricht ».

La définition des différents risques

Le risque de construction couvre notamment les livraisons tardives, le non respect des normes, les surcoûts ou encore la déficience technique. « L'obligation de l'État de commencer à effectuer des paiements réguliers à un partenaire sans tenir compte de l'état effectif des actifs est la preuve que l'État supporte la majorité des risques de construction » selon Eurostat .

L'État est réputé ne pas supporter le risque de disponibilité s'il lui est permis de réduire de façon significative, (à titre de pénalité) ses paiements périodiques, comme tout « client  normal » pourrait l'exiger dans un contrat commercial lorsque le partenaire privé s'avère ne pas être en mesure de livrer le volume contractuellement convenu ou de répondre, comme spécifié dans le contrat, aux normes de sécurité et de certification publiques liées à la prestation de service aux utilisateurs finals. Ceci s'applique également lorsque le partenaire ne répond pas aux normes de qualité relatives à la prestation de services, requises dans le contrat et découlant d'un manque évident de « performance » du partenaire.

Le risque lié à la demande couvre pour sa part la variabilité de la demande plus élevée ou plus faible qu'escomptée lors de la signature du contrat lorsque celle-ci n'est pas imputable au comportement ou à la gestion du partenaire du secteur privé. Le gouvernement sera réputé assumer le risque lorsque celui-ci est obligé de garantir un niveau donné de paiement au partenaire indépendamment du risque effectif de la demande exprimée par l'utilisateur final, rendant sans effet les fluctuations du niveau de la demande sur la rentabilité au partenaire.

Pour autant, le Parlement doit être informé en toute transparence des conditions du traitement comptable des opérations de PPP.

Dans cet esprit, l'Assemblée nationale a adopté, avec l'accord du gouvernement, un amendement de nouvelle rédaction du présent article, se substituant au texte du Sénat, qui insère une nouvelle phrase dans le premier alinéa de l'article 50 de la LOLF concernant le « RESF » 7 ( * ) .

Le texte soumis au Sénat prévoit que ledit « RESF » comportera une explicitation de la « clé de passage » entre le solde budgétaire de l'État et la capacité ou le besoin de financement de l'État au sens des engagements européens de la France. La complexité de cette « clé de passage » justifie en effet qu'une explication détaillée soit présentée au Parlement.

Selon la rédaction qui nous est soumise, le rapport précité devra expliciter « le passage, pour l'année considérée et celle qui précède, du solde budgétaire à la capacité ou au besoin de financement de l'État tel qu'il est mesuré pour permettre la vérification du respect des engagements européens de la France, en indiquant notamment l'impact des opérations mentionnées au deuxième alinéa de l'article 8 » de la LOLF 8 ( * ) , c'est-à-dire les contrats de partenariat public-privé.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission des finances a approuvé la rédaction proposée par l'Assemblée nationale.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 9 (nouveau)

Information du Parlement en loi de finances de l'année sur les mises en réserve de crédits

Commentaire : le présent article, inséré par l'Assemblée nationale en 2 ème lecture, prévoit que le projet de loi de finances de l'année devra être accompagné d'une présentation des mesures envisagées pour assurer le respect du plafond global des dépenses autorisées par le Parlement, en particulier des taux de mise en réserve prévus, d'une part pour les dépenses de personnel, et, d'autre part, pour les autres dépenses

Le présent article a été inséré en deuxième lecture par l'Assemblée nationale, qui a adopté à cet effet un amendement du gouvernement sous-amendé, par la commission spéciale, pour y apporter une précision rédactionnelle.

Il ajoute un alinéa 4° bis à l'article 51 de la LOLF, qui énumère les documents devant être joints au projet de loi de finances de l'année.

Le gouvernement devrait donc présenter, en annexe à ce projet, les mesures envisagées pour assurer en exécution le respect du plafond global des dépenses du budget général voté par le Parlement. Cette présentation mentionnerait en particulier, pour les programmes dotés de crédits limitatifs 9 ( * ) , d'une part, le taux de mise en réserve prévu pour les crédits du titre II (dépenses de personnel) et, d'autre part, celui prévu pour les crédits des autres titres.

Le Parlement sera donc informé sur les réserves envisagées, sans avoir à se prononcer à ce sujet, la régulation budgétaire relevant de la compétence exclusive du gouvernement.

Cette disposition s'inscrirait dans le contexte d'un encadrement législatif des régulations budgétaires, plus accentué avec la LOLF que précédemment.

Ainsi, les autorisations d'engagement disponibles sur un programme en fin d'exercice pourront être reportées à l'exercice suivant sur le même programme ou, à défaut, sur un programme poursuivant les mêmes objectifs. Ces reports ne pourront majorer les crédits de personnels.

Les crédits de paiement peuvent aussi faire l'objet d'un report, dans la limite de 3 % , d'une part pour les crédits de personnel et, d'autre part pour les autres crédits (article 15 de la LOLF). Les plafonds concernant les crédits autres que de personnel ne pourront être majorés que par une disposition de loi de finances, ce qui pourrait contribuer à une réduction du niveau habituel des reports de crédit.

A l'intérieur des programmes, les crédits pourront être redéployés dans le cadre de la fongibilité asymétrique (art 7.-II de la LOLF).

Des virements pourront modifier la répartition des crédits entre programme d'un même ministère, dans la limite de 2 % des crédits ouverts par la loi de finances de l'année pour chacun des programmes concernés. Les commissions parlementaires compétentes seront informées, mais pas consultées (article 12 de la LOLF).

On peut, par ailleurs, imaginer que l'extension du champ des crédits limitatifs et l'obligation de les justifier « au premier euro » contribueront à limiter la sous-évaluation de certains crédits dans le projet de loi de finances de l'année.

L'information apportée en amont sur les mesures de gel sera utile, au Parlement, mais aussi aux gestionnaires de programmes. Ceux-ci auront désormais connaissance, avant même le début de l'exercice du montant de la « tranche conditionnelle » de leurs crédits. De ce fait, il leur sera plus difficile d'invoquer les gels pour expliquer le défaut de réalisation des objectifs inscrits dans le projet annuel de performance.

Il convient de souligner que le dispositif proposé se limite à une information du Parlement sur les mesures envisagées par le gouvernement , qui n'est donc pas tenu de se conformer strictement à ses propres prévisions .

D'une part, sur un plan constitutionnel, l'exécution budgétaire, comme celle de toutes les lois, relève de la compétence du Premier ministre, non de celle du Parlement (article 21 de la Constitution). Ce dernier autorise la dépense en loi de finances initiale, sur la base des informations données, notamment la « justification au premier euro » et les objectifs de performance. Il appartient au gouvernement d'assurer ensuite l'exécution budgétaire, dans la transparence et en informant le Parlement. Enfin, il revient au Parlement de contrôler l'exécution du budget et la réalisation des performances annoncées, dans le cadre du projet de loi de règlement dont l'importance devra être renforcée, ce contrôle venant à l'appui de ses décisions sur le projet de loi de finances suivant.

Comment le Parlement pourrait-il contrôler l'exécution budgétaire après avoir « copiloté » les mesures de régulation ?

D'autre part, il est indispensable, en opportunité, que le gouvernement dispose de toute la souplesse nécessaire en cours d'exercice pour s'adapter aux évolutions de la conjoncture , ce qui ne le dispense pas d'un contrôle parlementaire sur la sincérité de son exécution.

La rédaction proposée présente l'avantage de relier les mesures de gel à ce qui devrait être leur finalité, à savoir « assurer en exécution le respect du plafond global des dépenses du budget général voté par le Parlement ».

Dans un but de simplicité et pour favoriser un débat général sur le sujet, la solution consistant à prévoir des taux différents selon les programmes a été écartée. Il a donc été retenu deux taux distincts, l'un pour les dépenses de personnel et le second pour les autres titres.

Selon les indications du rapport de la commission spéciale, « sur la base des chiffres de la loi de finances pour 2005, l'« assiette taxable » serait de 247.637 millions d'euros de crédits limitatifs 10 ( * ) , parmi lesquels 95.708 millions d'euros de dépenses de personnel (...). Pour constituer une réserve de précaution de 4 milliards d'euros, il pourrait par exemple être appliqué un taux de 0,5 % aux dépenses de personnel (soit un gel de 479 millions d'euros) et un taux de 2,3 % aux autres crédits (soit un gel de 3.522 millions d'euros) ».

Le dispositif proposé paraît donc de nature à responsabiliser les gestionnaires, en leur permettant de distinguer, au sein des crédits de leur programme, entre une « tranche ferme » et une « tranche conditionnelle », ayant ensuite vocation, soit à être « dégelée », soit être annulée.

Votre commission des finances, qui adhère au dispositif proposé, souhaiterait que les gestionnaires soient, en cours d'exercice, moins tardivement informés sur les évolutions qui seront données à leurs crédits gelés.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 10 (nouveau)

Information sur l'impact des opérations de partenariat public-privé
sur la dette de l'État

Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale, prévoit que le compte général de l'État, joint au projet de loi de règlement, comportera une « présentation du traitement comptable » des PPP.

Le présent article complète les dispositions de l'article 8 du présent projet de loi organique prévoyant que le « rapport économique, social et financier » (RESF), annexé au projet de loi de finances de l'année , comportera une explication de la « clé de passage » entre le solde budgétaire de l'État et la capacité ou le besoin de financement de l'État au sens des engagements européens de la France, en indiquant notamment l'impact des PPP (voir ci-dessus, commentaire de l'article 8).

Issu d'un amendement de la commission spéciale approuvé par le gouvernement, l'article 10 a pour finalité de mesurer, au stade du projet de loi de règlement , l'impact sur la dette de l'État des opérations réalisées en PPP. De ce point de vue, il s'inscrit exactement dans l'objectif que s'était fixé, en première lecture, le Sénat sur proposition de votre commission des finances .

Le présent article tend à compléter le 7° de l'article 54 de la LOLF, énumérant la liste des documents joints au projet de loi de règlement.

Dans sa rédaction en vigueur, le 7° de l'article 54 de la LOLF prévoit la jonction au projet de loi de règlement du compte général de l'État. Celui-ci comprend « la balance générale des comptes, le compte de résultat, le bilan et ses annexes, et une évaluation des engagements hors bilan de l'État. Il est accompagné d'un rapport de présentation, qui indique notamment les changements des méthodes et des règles comptables appliqués au cours de l'exercice ».

Désormais, le compte général de l'État comporterait aussi, parmi les annexes du bilan, une présentation « du traitement comptable des opérations mentionnées au deuxième alinéa de l'article 8 » de la LOLF 11 ( * ) , à savoir des opérations conduites en PPP.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 11 (nouveau)

Possibilité, pour les deux assemblées, d'organiser en séance publique un débat relatif au rapport annuel de la Cour des comptes

Commentaire : le présent article autorise les assemblées parlementaires à organiser un débat sur le rapport annuel de la Cour des comptes.

En la forme, le présent article est issu d'un amendement présenté par la commission spéciale en deuxième lecture, tendant à insérer un article additionnel.

Sur le fond, le présent article n'est pas sans lien avec l'article 6 du présent projet de loi organique, inséré par l'Assemblée nationale puis supprimé par le Sénat en première lecture, même si les dispositions ne sont pas identiques. Toutefois, l'article 6, faute d'avoir été formellement rétabli par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, n'est plus en navette. Néanmoins, il convient de rappeler brièvement son contenu et les raisons ayant conduit le Sénat à le supprimer.

La position de votre commission des finances en première lecture :
des dispositions superfétatoires pour un objectif essentiel

« Ce débat pourrait en effet constituer une occasion de faire le point sur la mise en oeuvre des recommandations formulées par la Cour des comptes au cours des exercices précédents . Si tout le monde convient de la grande qualité des travaux de la Cour des comptes, l'on peut regretter l'insuffisance du suivi de ses recommandations par les gouvernements successifs.

« Les dispositions proposées pourraient paraître de nature à valoriser comme il se doit les travaux de la Cour des comptes et à développer encore un mouvement de coopération entre cette dernière et le Parlement , largement amorcé depuis quelques années, en particulier par votre commission des finances.

« Votre rapporteur ne peut que se réjouir de cette étroite coopération qui a permis incontestablement d'enrichir le travail d'investigation de la commission des finances, au travers, en particulier, des auditions contradictoires et des rapports d'information auxquels ont donnés lieu des enquêtes réalisées (...).

« Pour autant, le présent article est, sur un plan normatif, superfétatoire . En effet, il comporte deux dispositions :

« - il prévoit la possibilité d'organiser des débats parlementaires sur le rapport annuel de la Cour des comptes ou sur ses autres rapports publics. Cette disposition est inutile car les assemblées disposent déjà de la possibilité d'organiser de tels débats, en particulier dans le cadre des « séances mensuelles réservées » prévues au troisième alinéa de l'article 48 de la Constitution ;

« - il ajoute à la mission d'assistance de la Cour des comptes la « préparation » des débats, sans en préciser le contenu. La Cour des comptes peut, sans qu'il soit nécessaire de prévoir des dispositions nouvelles, être associée à la préparation de ceux-ci par le biais d'auditions contradictoires en commission des finances (auxquelles participent les personnes et organismes contrôlés), comme cela se fait déjà dans le cadre de l'article 58-2° de la LOLF.

« Votre commission, pour l'ensemble de ces raisons, si elle comprend et partage totalement les objectifs poursuivis, estime que d'autres moyens plus adéquats, et qui existent déjà, permettent de les atteindre. »

Source : rapport de première lecture sur le présent projet de loi organique, établi par votre rapporteur n° 106 (2004-2005).

« Tout en tenant compte des remarques du Sénat en première lecture », pour reprendre l'expression employée en séance publique le 20 juin 2005 par notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur de la commission spéciale, l'Assemblée nationale, sans revenir sur la suppression de l'article 6 du présent projet de loi organique, a adopté, sous la forme d'un nouvel article 11, une « version atténuée » de son texte de première lecture.

Le présent article résulte d'un amendement de la commission spéciale sur lequel le gouvernement s'en est remis à la « sagesse » de nos collègues députés, n'ayant pas souhaité « intervenir en l'occurrence dans une discussion entre les deux assemblées », selon les propos tenus par M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, à l'Assemblée nationale le 20 juin 2005.

Par rapport au précédent, le nouveau texte proposé comporte deux différences :

- il « limite » la possibilité de débat parlementaire au seul rapport annuel de la Cour des comptes, sans plus se référer à ses « autres rapports publics » ;

- il ne reprend pas la charge de « préparation » des débats qui aurait été assignée à la Cour des comptes, dans le cadre de sa mission d'assistance au Parlement.

Le présent article se limite donc à compléter l'article 58 de la LOLF par un nouvel alinéa pour énoncer que « le rapport annuel de la Cour des comptes peut faire l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat », ce débat gardant donc un caractère facultatif.

Selon le rapporteur de la commission spéciale de l'Assemblée nationale 12 ( * ) , « l'intervention de la Cour des comptes dans la préparation de discussions parlementaires sur ces rapports trouverait plus efficacement sa place dans son association aux travaux des commissions permanentes, aujourd'hui largement développée et qui ne nécessite pas d'adaptation législative. Cependant, le confinement actuel des débats induits par le rapport annuel, en particulier aux discussions, moins solennelles et moins médiatisées, des commissions législatives, ne permet pas de nourrir un réel débat contradictoire avec le gouvernement sur les éventuelles recommandations de la Cour des comptes et peut nuire à la portée de ses observations. Le bon exercice par le Parlement de sa mission de contrôle peut en souffrir ».

Il convient de rappeler que les dispositions constitutionnelles sur la séance mensuelle réservée (article 48, 3 ème alinéa, de la Constitution) pourraient permettre l'organisation de ces débats. Cependant, notre collègue député Gilles Carrez se réfère à l'article 48 de la LOLF (dernier alinéa), prévoyant expressément que le rapport du gouvernement « sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques », présenté en vue de l'examen du prochain projet de loi de finances de l'année, « peut donner lieu à un débat à l'Assemblée nationale et au Sénat ». Il s'agit du débat d'orientation budgétaire (DOB) organisé, en principe chaque année, dans les derniers jours de juin ou les premiers jours de juillet.

Votre commission des finances, tout en enregistrant positivement « l'atténuation » par l'Assemblée nationale de son texte initial et tout en partageant ses objectifs, continue d'estimer que les dispositions proposées sont superfétatoires.

L'organisation, chaque année, d'un débat en séance publique, sur le rapport de la Cour des comptes, est permise par les textes en vigueur, plus précisément dans le cadre de l'article 48, 3 ème alinéa, de la Constitution, concernant les séances mensuelles réservées à l'initiative parlementaire.

Il n'est donc pas besoin, pour poursuivre l'objectif louable de nos collègues députés, de « charger » une loi organique, en l'occurrence la LOLF, de dispositions juridiquement inutiles, avant même sa complète mise en oeuvre.

Au demeurant, comme l'a relevé notre collègue député Didier Migaud, il n'est pas totalement certain que la formule retenue soit la plus efficace pour atteindre le but poursuivi : « L'efficacité du contrôle procède non de textes, mais d'une volonté. Une audition en commission d'un président de chambre peut avoir une audience réelle si elle est ouverte à la presse. Un certain formalisme bride la parole des parlementaires en séance publique, sans permettre d'y dégager toujours des indications ou des orientations précises. L'enceinte de la commission peut être plus appropriée pour organiser un débat efficace » 13 ( * ) .

Les pratiques récemment développées par votre commission des finances témoignent de la pertinence de cette observation. Ainsi, l'audition contradictoire, ouverte à la presse, qu'elle a organisée le 22 mars 2005 à la suite de l'enquête de la Cour des comptes sur Météo France, dans le cadre de l'article 58-2 de la LOLF, a permis une véritable confrontation entre celle-ci et les responsables de l'établissement public ainsi que le ministère de tutelle 14 ( * ) . Ce débat, qui a bénéficié d'un « retour médiatique » incontestable, pourrait, aussi bien qu'une discussion en séance publique, permettre de favoriser le suivi des recommandations de la Cour des comptes, du moins de certaines d'entre elles.

Néanmoins, prenant acte de ce que nos collègues députés partagent les mêmes objectifs que le Sénat, et tenant compte de « l'effort » de rapprochement de l'Assemblée nationale, votre commission des finances a estimé possible, dans un esprit de conciliation, de mettre un terme à la navette du présent projet de loi organique.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 5 Loi n° 2002-1094 du 29 août 2002 d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (article 3), et loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (article 3).

* 6 Avis du 21 décembre 2000 sur les conditions dans lesquelles peut être modifiée l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances (point 5, dernier alinéa) : « il n'appartient pas au législateur organique de définir les règles de la comptabilité générale : celles-ci figurent aujourd'hui, pour l'essentiel, dans le décret 62-1587 du 29 décembre 1962 et dans l'instruction n° 87-128 PR du 29 octobre 1987 fixant le plan général de l'État ».

* 7 Très exactement, le rapport sur la situation et les perspectives économiques, sociales et financières de la Nation, joint au projet de loi de finances de l'année.

* 8 Tel qu'il est complété par l'article 7 du présent projet de loi organique.

* 9 Avec la LOLF, tous les crédits sont, par principe, limitatifs (article 9), à l'exception de ceux énumérés aux articles 10 (charges de la dette, remboursements, restitutions et dégrèvements et mise en jeu des garanties accordées par l'Etat) et 24 (comptes de concours financiers ouverts au profit des États étrangers notamment).

* 10 Crédits bruts du budget général (359.287,5 millions d'euros), diminués des crédits relatifs aux remboursements et dégrèvements (68.325,3 millions d'euros), à la charge de la dette (42.355,8 millions d'euros), aux garanties (125,4 millions d'euros) et aux pouvoirs publics (844,4 millions d'euros).

* 11 Dans sa rédaction complétée par l'article 7 du présent projet de loi organique.

* 12 Analyse présentée dans son rapport de deuxième lecture n° 106 (XII ème législature).

* 13 Propos tenus lors de la réunion d'examen du présent projet de loi organique par la commission spéciale et relaté dans son rapport de deuxième lecture.

* 14 Cf. rapport Assemblée nationale n° 2377 (2004-2005).

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