Article 25 -
(Articles L. 411-11, L. 411-27, L et 411-53 du code rural) -

Possibilité d'insérer des clauses environnementales dans les baux ruraux

Cet article ouvre la possibilité d'introduire, dans les baux ruraux, des clauses de nature visant à la protection de l'environnement, qu'il s'agisse de l'utilisation des parcelles comme des méthodes de culture.

Le droit en vigueur

Composé de règles dites d'ordre public auxquelles les parties ne peuvent déroger, le statut du fermage vise prioritairement à favoriser la production et à garantir la stabilité de l'exploitant. Le preneur reste donc libre d'organiser son exploitation comme il lui convient, sous certaines réserves de principe prévues à l'article L. 411-27. Le bailleur souhaitant protéger son patrimoine à l'égard de l'usage qu'en fait son preneur ne peut recourir qu'à un nombre limité de mécanismes 78 ( * ) :

- celui de l'article L. 411-28 du même code, qui exige l'accord du propriétaire préalablement à toute suppression par le fermier des talus, haies, rigoles et arbres séparant les parcelles attenantes ;

- celui de l'article L. 411-29 dudit code, qui exige ce même accord pour le retournement de parcelles de terre en herbe, la mise en herbe de parcelles de terre ou la mise en oeuvre de moyens culturaux non prévus dans le bail.

Afin de permettre plus largement aux propriétaires d'imposer à leurs preneurs le respect de prescriptions environnementales sur les parcelles qu'ils cultivent, des textes de diverse nature, intégrés notamment dans les codes de l'environnement et de la santé publique, sont ponctuellement venus apporter des réponses, plus particulièrement pour les personnes publiques. C'est ainsi que le Conservatoire du littoral a été habilité à passer des conventions avec les collectivités territoriales ou les associations agréées. En-dehors de ces régimes dérogatoires, les collectivités, établissements ou associations soucieux de contrôler l'usage de leurs terres n'avaient pas les moyens de mettre en place des cahiers des charges environnementaux. Il a donc paru nécessaire de réviser le statut du fermage pour y intégrer un dispositif de bail environnemental.

Les dispositions du projet de loi initial

C'est dans cette perspective que cet article modifie le chapitre Ier du titre Ier du livre IV du code rural consacré au régime de droit commun du statut du fermage et du métayage.

Afin de ne pas fausser l'équilibre d'un contrat de bail assorti de clauses environnementales, le paragraphe I prévoit la minoration du loyer comme compensation des charges contractuelles supplémentaires pesant sur le preneur.

Constitué d'une part du loyer des bâtiments d'habitation et d'autre part du loyer des bâtiments d'exploitation et des terres nues, le prix du fermage, qui fait l'objet de l'article L. 411-11 du code rural, est fixé en monnaie entre des maxima et des minima arrêtés par le préfet chaque année en fonction d'un indice des fermages dont il fixe la composition après avis de la commission consultative paritaire des baux ruraux, composée de représentants des bailleurs et preneurs.

Cet article précise, dans son premier alinéa, les éléments devant être pris en compte dans la fixation du prix du loyer. Figure parmi ceux-ci la durée du bail, l'état et l'importance des bâtiments d'habitation et d'exploitation, la qualité des sols et la structure parcellaire du bien loué.

Le du paragraphe I propose d'y rajouter l'obligation faite au preneur, le cas échéant, de mettre en oeuvre des méthodes culturales respectueuses de l'environnement. Une telle mention permettrait de faire varier à la baisse le prix du loyer d'un bail, au titre de la compensation des charges reposant sur le preneur d'un tel bail.

Le tire les conséquences de cet élargissement des critères à prendre en compte dans la fixation par le préfet des valeurs planchers et plafonds du prix du fermage. En effet, il propose de compléter l'article L. 411-11 par un alinéa soustrayant à l'application des minima fixés par le préfet les loyers dont le bail comporte des clauses environnementales.

Substituant au troisième alinéa de l'article L. 411-27 du code rural cinq nouveaux alinéas, le paragraphe II de cet article conforte les garanties environnementales dans les baux ruraux, tant pour le preneur que pour le bailleur.

Précédemment cité, le troisième alinéa de l'article L. 411-27 du code rural interdit au propriétaire de justifier la demande de résiliation d'un bail par l'application par le preneur de méthodes culturales destinées à protéger l'environnement, la qualité de l'eau ou des produits, ou de préserver la biodiversité.

Le premier alinéa du texte que propose d'insérer cet article à la place du troisième alinéa de cet article L. 411-27 reprend les éléments de protection actuelle du preneur, tout en les élargissant. Si la référence générale à la protection de l'environnement est supprimée, la notion de pratiques est substituée à celle de méthodes culturales, plus restrictive, tandis qu'est introduite la prise en compte de la préservation des paysages, de la qualité des sols et de l'air, de la prévention des risques naturels et de la lutte contre l'érosion. Cet élargissement devrait assurer au preneur une meilleure protection dans la mesure où il accroît la liste de pratiques environnementales dont ne peut se prévaloir à son encontre son bailleur. Elle devrait, par là même, encourager les fermiers à recourir à des pratiques plus respectueuses de l'environnement.

Contenant la principale disposition de l'article, les trois alinéas suivants prévoient, dans certains cas précis, la faculté pour le propriétaire d'introduire dans le bail des clauses environnementales.

Le deuxième alinéa en pose le principe même. Il dispose ainsi que des clauses visant au respect par le preneur de pratiques culturales préservant l'environnement, telles que décrites au troisième alinéa de l'article L. 411-27 précité dans sa rédaction issue du projet de loi, peuvent être inclues dans les baux, lors de leur conclusion ou de leur renouvellement.

Les troisième et quatrième alinéas prévoient les cas dans lesquels cette disposition s'applique, à savoir respectivement :

- lorsque le bailleur est une personne morale de droit public ou une association agréée pour l'environnement. Cette possibilité est donc réservée aux personnes disposant d'une légitimité ou d'un intérêt particuliers à agir en faveur de la protection de l'environnement. Sont implicitement exclus de la liste des bénéficiaires les personnes physiques, les personnes morales de droit privé et les associations non reconnues par l'Etat au titre de leur action en faveur de l'environnement ;

- pour les parcelles situées dans un certain nombre d'espaces déterminés, présentant chacun un intérêt environnemental particulier 79 ( * ) .

Le dernier alinéa renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des conditions d'application du bail environnemental, et plus spécifiquement de la nature des clauses insérables dans un tel bail.

Enfin, le paragraphe III de cet article assure la coordination du dispositif avec l'article L. 411-53 du code rural, qui traite des motifs d'opposition au renouvellement du bail.

Parmi lesdits motifs figurent, en l'état actuel du droit :

- le fait de ne pas payer de façon persistante, pour la seconde fois et après mise en demeure, le fermage ou, dans le cas d'un métayage, 1a part de produit revenant au bailleur ;

- le fait pour le preneur d'utiliser le fonds d'une façon compromettant sa bonne exploitation.

Le projet de loi propose de rajouter à ces deux motifs une cause supplémentaire consistant en le non-respect par le preneur des clauses environnementales insérées dans le bail. Il s'agit de donner une réelle portée au dispositif de bail environnemental introduit par le projet de loi, en sanctionnant le non respect par le preneur des clauses qu'il comporte par la possibilité pour le bailleur de s'opposer à son renouvellement.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre quatre améliorations rédactionnelles, l'Assemblée nationale a précisé, à l'article L. 411-27 du code rural, que l'accord exprès du propriétaire et du preneur était nécessaire pour insérer des clauses environnementales dans le bail.

Les propositions de votre commission

Votre rapporteur approuve cet article qui devrait permettre, sans remettre en cause les principes régissant le bail rural, d'y inclure plus aisément des dispositions environnementales.

Il vous propose simplement d'adopter un amendement supprimant un alinéa superfétatoire ajouté par l'Assemblée nationale.

Votre commission vous demande d'adopter l'amendement qu'elle vous présente et l'article ainsi modifié.

* 78 A l'inverse cependant, le preneur peut imposer à son bailleur le recours à des méthodes culturales respectueuses de l'environnement, de la qualité de l'eau ou des produits, ou encore de la biodiversité. En effet, aux termes du troisième alinéa de l'article L. 411-27 dudit code, le fait que preneur applique de telles méthodes ne peut justifier une demande de résiliation de la part du bailleur.

* 79 A savoir : de certaines zones humides visées aux articles L. 211-1 à L. 211-3 du code de l'environnement, notamment les zones humides d'intérêt environnemental particulier ; les terrains riverains d'un cours d'eau ou de la dérivation d'un cours d'eau, ou situés dans leur bassin versant, ou dans une zone estuarienne, sur lesquels des servitudes d'utilité publique peuvent être instituées à la demande de l'Etat, des collectivités locales ou de leurs groupements, sur le fondement de l'article L. 211-12 du code de l'environnement ; les espaces protégés par le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, en vertu de l'article L. 322-1 du code de l'environnement ; les territoires classés parcs nationaux par décret en Conseil d'Etat, sur le fondement de l'article L. 331-1 du code précité ; les réserves naturelles, visées à l'article L. 332-16 ; les monuments naturels et sites inscrits ou classés, en vertu des articles L. 341-4 à L. 341-6 ; les espèces animales et végétales protégées à des fins de préservation du patrimoine biologique ; les sites Natura 2000 ; des zones délimitées par l'Etat comme zones de danger face aux risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones ; les périmètres de protection - immédiate ou éloignée - déterminés par un acte portant déclaration d'utilité publique, en vertu de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique ; les zones d'érosion visées à l'article L. 114-1 du code rural.

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