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Rapport n° 26 (2007-2008) de M. Jean-Jacques HYEST , fait au nom de la commission des lois, déposé le 10 octobre 2007

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N° 26

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 10 octobre 2007

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi, MODIFIÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté ,

Par M. Jean-Jacques HYEST,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest, président ; MM. Patrice Gélard, Bernard Saugey, Jean-Claude Peyronnet, François Zocchetto, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, M. Georges Othily, vice-présidents ; MM. Christian Cointat, Pierre Jarlier, Jacques Mahéas, Simon Sutour, secrétaires ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Michèle André, M. Philippe Arnaud, Mme Eliane Assassi, MM. Robert Badinter, José Balarello, Laurent Béteille, Mme Alima Boumediene-Thiery, MM. François-Noël Buffet, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Yves Détraigne, Michel Dreyfus-Schmidt, Pierre Fauchon, Gaston Flosse, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Charles Gautier, Jacques Gautier, Mme Jacqueline Gourault, M. Jean-René Lecerf, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Hugues Portelli, Marcel Rainaud, Henri de Richemont, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, MM. Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir les numéros :

Sénat : Première lecture : 371 , 414 , et T.A. 116 (2006-2007)

Deuxième lecture : 471 (2006-2007)

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) : 114, 162 et T.A. 27

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

La commission des lois, réunie le 10 octobre 2007 sous la présidence de M. Patrice Gélard, vice-président , a adopté le rappor t de M. Jean-Jacques Hyest , président, sur le projet de loi instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté .

M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur, a souligné qu'au cours de la première lecture, l'Assemblée nationale avait confirmé et conforté les modifications adoptées par le Sénat dans quatre directions : mieux garantir les conditions de nomination du Contrôleur général, renforcer l'indépendance de cette nouvelle autorité, étendre ses prérogatives et enfin, favoriser une articulation efficace avec les autres instances chargées de veiller au respect des droits des personnes.

Il a souligné plus particulièrement que les députés s'étaient ralliés au dispositif retenu par le Sénat au terme duquel le Contrôleur général est nommé par décret du président de la République, après avis de la commission des lois de chacune des deux assemblées.

Sur le constat d'un accord complet entre le Sénat et l'Assemblée nationale, la commission a proposé l' adoption du projet de loi sans modification .

Elle a estimé en outre que l'entrée en vigueur rapide du dispositif permettrait la désignation d'un contrôleur indépendant, autorité qui répond aujourd'hui à une forte attente. Elle a enfin attiré l'attention sur la nécessité de donner au Contrôleur général les moyens effectifs -humains et financiers- d'assumer pleinement sa mission.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi en deuxième lecture du projet de loi instituant un Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Au cours de la première lecture, ce texte, successivement voté par le Sénat le 31 juillet dernier et l'Assemblée nationale le 25 septembre, a été profondément enrichi par les deux assemblées.

Le Sénat avait adopté vingt-six amendements, dont plusieurs à l'initiative de l'opposition, qui poursuivaient quatre objectifs : mieux garantir les conditions de nomination du Contrôleur général, renforcer l'indépendance de cette nouvelle autorité, étendre ses prérogatives et, enfin, favoriser une articulation efficace avec les autres instances chargées de veiller au respect des droits des personnes.

Dans l'avis rendu le 20 septembre 2007 sur le projet de loi, la Commission nationale consultative des droits de l'homme constate que « les amendements apportés par le Sénat ont grandement amélioré celui-ci ».

Les députés ont approuvé l'ensemble de ces modifications.

Les vingt-sept amendements -dont treize à caractère rédactionnel- votés par l'Assemblée nationale, principalement à l'initiative de M. Philippe Goujon, le rapporteur de la commission des Lois, complètent et confortent les orientations défendues par le Sénat.

Les conditions de désignation (article 2)

Le Sénat a prévu que le Contrôleur général est nommé par décret du président de la République (le projet de loi initial mentionnait un décret simple) après avis de la commission des lois de chacune des deux assemblées. Les députés se sont ralliés à cette formule et ont complété le dispositif en précisant que le Contrôleur général devait être nommé « en raison de ses compétences et connaissances professionnelles » reprenant ainsi les termes de l'article 18-2 du protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture de 2002.

L'indépendance du Contrôleur général

En première lecture, le Sénat a souhaité mettre en oeuvre plusieurs des préconisations du rapport de l'office parlementaire d'évaluation de la législation présenté en 2006 par notre collègue M. Patrice Gélard sur les autorités administratives indépendantes 1 ( * ) .

Notre assemblée a ainsi prévu que la fonction de Contrôleur général est incompatible avec tout autre emploi public (article 2). Le Sénat a aussi précisé que le Contrôleur général ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions qu'il émet ou qu'il accomplit dans l'exercice de ses fonctions (article 2). Il a enfin rappelé que les contrôleurs chargés d'assister le Contrôleur général sont placés sous sa seule autorité. Les députés ont complété cette dernière disposition afin d'indiquer que les contrôleurs seraient placés sous l'autorité du Contrôleur général dans l' « exercice de leurs fonctions » afin d'élargir le vivier des personnalités appelées à concourir à la mission de contrôle en permettant le recrutement à temps partiel, par exemple, des personnes en activité dans d'autres services publics (article 3).

Le renforcement des prérogatives du Contrôleur général

Le Sénat a renforcé, en première lecture, les pouvoirs du Contrôleur général à quatre titres.

Il a d'abord étendu le champ du contrôle à l'ensemble des établissements psychiatriques y compris sous statut privé dès lors qu'ils accueillent des personnes hospitalisées d'office ou sur demande d'un tiers. Ensuite, il a supprimé le principe d'une information préalable des autorités responsables des lieux de privation de liberté avant toute visite du Contrôleur général. Par ailleurs, la sécurité des locaux ne pourrait plus être invoquée par une administration pour refuser la visite du Contrôleur général (article 6).

Le Sénat a enfin renforcé les suites données au droit de visite sur trois points : les observations adressées par le Contrôleur général au ministre intéressé porteraient non seulement sur l'état du lieu visité mais aussi sur les conditions de détention des personnes privées de liberté ; l'autorité responsable du lieu d'enfermement aurait l'obligation de répondre au Contrôleur général lorsque celui-ci l'a expressément demandé ; le Contrôleur général serait enfin tenu de dénoncer, d'une part, au procureur de la République, les infractions pénales constatées et, d'autre part, à l'autorité administrative, les fautes disciplinaires parvenues à sa connaissance (article 7).

Les députés sont allés dans le même sens. Sur le droit de visite, ils ont, en premier lieu, indiqué que les motifs opposés à la visite du Contrôleur général devaient présenter un caractère non seulement « grave » -comme le projet de loi initial le prévoit- mais aussi « impérieux ». Ils ont rendu obligatoire la motivation de cette opposition. Ils ont en outre précisé que les autorités responsables des lieux de privation de liberté devaient informer le Contrôleur général dès que les circonstances avancées à l'appui d'un refus de visite avaient cessé (article 6).

S'agissant des suites données aux visites, les députés ont proposé une procédure d'urgence permettant au Contrôleur général de fixer un délai dans lequel l'autorité compétente devait répondre au Contrôleur général et de rendre public le contenu de ses observations et des réponses apportées (article 7).

La coordination avec les autres instances chargées de veiller au respect des libertés

L'institution d'une nouvelle autorité publique indépendante doit s'accompagner d'un renforcement de la coordination avec les institutions existantes afin de favoriser une action cohérente au service du respect des droits des personnes. Dans cet esprit, le Sénat a permis la saisine du Contrôleur général par le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, la Commission nationale de déontologie de la sécurité et la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité. De même, il a autorisé le Contrôleur général à saisir directement la Commission nationale de déontologie de la sécurité (articles 5 et 5 bis ).

Dans le prolongement de ces dispositions, les députés ont autorisé la saisine directe du Médiateur par le Contrôleur général (article 5 bis ).

Par ailleurs, votre rapporteur avait constaté, lors de la première lecture, qu'une partie de la mission du Contrôleur général recouvrait les attributions de la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administratifs et des zones d'attente (CRAZA). Les députés ont pris acte de cette situation et ont supprimé une mention à la CRAZA dans la partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afin d'inviter le Gouvernement à supprimer cette commission -dont les dispositions constitutives sont de nature réglementaire- une fois que le Contrôleur général serait pleinement en mesure d'exercer sa mission (article 11 bis nouveau).

*

* *

Comme en témoigne ce rappel des travaux parlementaires, les amendements des deux assemblées répondent à des préoccupations largement communes.

Comment s'en étonner dès lors que les deux assemblées depuis les travaux de leurs commissions d'enquête respectives sur la situation des prisons, en 2000, plaident de manière unanime pour l'institution d'un contrôle indépendant des prisons.

Par ailleurs, la navette a permis de renforcer le statut et les pouvoirs du Contrôleur général lui donnant ainsi les moyens d'une action efficace conforme aux fortes attentes soulevées par l'institution d'un contrôle indépendant.

L'équilibre auquel le Sénat et l'Assemblée nationale sont ainsi parvenus au terme de la première lecture et l'absence de désaccord entre les deux assemblées conduit votre commission à proposer d'adopter le projet de loi sans modification .

L'adoption du texte permettrait la nomination rapide du Contrôleur général . Votre rapporteur souhaite rappeler toute l'importance qui s'attache au choix de la personnalité appelée à exercer ces fonctions pour asseoir le magistère moral de la nouvelle autorité. A cet égard, la participation pour la première fois, des commissions des lois de chaque assemblée à la procédure de désignation constitue une forte garantie.

Le vote du texte doit être aussi une incitation pour le Gouvernement à ratifier rapidement le protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture qui prévoit la mise en place d'un mécanisme national de prévention indépendant. La France pourra ainsi se prévaloir d'avoir anticipé la mise en oeuvre de ses obligations internationales.

Enfin, le contrôle s'exercera sur quelques 5.700 lieux d'enfermement. Il apparaît donc indispensable que la nouvelle institution dispose progressivement des moyens humains et financiers à la mesure de la mission qui lui a été assignée par le législateur.

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier - Statut et mission

Cet article définit le Contrôleur général des lieux de privation de liberté comme une autorité indépendante et il en précise la mission.

Dans le prolongement des améliorations rédactionnelles apportées par le Sénat en première lecture, les députés ont modifié cet article sur trois points.

D'une part, le projet de loi précisait que la mission du Contrôleur général s'exerce « sans préjudice des prérogatives » attribuées par la loi aux autorités juridictionnelles. La notion de « juridiction » (organe institué avec le pouvoir de « juger ») ne recouvre pas le ministère public auquel le code de procédure pénale reconnaît néanmoins une mission de contrôle des établissements pénitentiaires. L'Assemblée nationale, à l'initiative de M. Philippe Goujon, rapporteur de la commission, a donc opportunément complété cette disposition par la mention aux « autorités judiciaires » -dont le procureur de la République est l'une des composantes.

D'autre part, le projet de loi initial rappelait que le Contrôleur général exercerait le contrôle principalement par des visites sur place.

Dans la mesure où le droit de visite est précisé à l'article 6 du projet de loi, les députés ont jugé inutile d'alourdir l'article premier d'une mention générale sur les modalités du contrôle.

Enfin, à l'initiative de M. Guy Geoffroy, l'Assemblée nationale a estimé utile d'expliciter que le contrôle des conditions de prise en charge des personnes privées de liberté s'appliquerait aussi aux modalités de leur transfèrement .

Votre commission vous proposer d'adopter l'article premier sans modification .

Article 2 - Nomination et incompatibilité

Cet article définit le mode de nomination du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, la durée de son mandat et le régime des incompatibilités qui lui sont applicables.

Le Sénat avait modifié le dispositif relatif au mode de nomination sur deux points. D'abord, afin de consacrer l'importance particulière de la mission dévolue au Contrôleur général, il avait précisé que cette personnalité serait désignée par décret du Président de la République (comme le prévoit déjà la loi pour plusieurs autorités administratives indépendantes).

Ensuite, notre assemblée a souhaité associer le Parlement à la procédure de désignation dans l'esprit des propositions défendues par le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy, lors de la campagne électorale. Ainsi sur le modèle déjà retenu pour la nomination du président de la commission de régulation de l'énergie (loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006), elle a prévu l'avis préalable de la commission compétente de l'Assemblée nationale et du Sénat -en l'espèce la commission des lois- pour la nomination du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

Le Gouvernement avait donné un avis défavorable à cet amendement non qu'il y fut hostile sur le fond mais au motif que la révision attendue de la Constitution pourrait y donner satisfaction.

Dans un souci de compromis, la commission des lois de l'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, avait adopté un amendement d'« attente » selon lequel la nomination interviendrait « après consultation du Parlement dans les conditions prévues par la Constitution ».

Cette formulation présentait néanmoins l'inconvénient de reporter la nomination du Contrôleur général à la révision de la Constitution et donc de la différer de plusieurs mois après l'adoption de la loi alors même que chacun s'accorde à souhaiter la mise en place rapide d'un contrôle indépendant déjà trop longtemps attendu. L'Assemblée nationale s'est donc finalement ralliée à la position du Sénat.

Aussi, le Contrôleur général pourra-t-il être désigné rapidement dans des conditions respectueuses des droits du Parlement.

Si, sur la base des propositions du Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la V è République, présidé par M. Edouard Balladur, une nouvelle procédure devait être retenue dans la Constitution pour associer encore plus étroitement le Parlement aux nominations effectuées par le pouvoir exécutif, elle aurait naturellement vocation à s'appliquer au Contrôleur général.

Sans doute faudrait-il alors changer le dispositif prévu par le présent article mais cette modification s'imposerait aussi pour l'ensemble des postes concernés par la nouvelle procédure et pourrait figurer dans un même texte pris en application de la loi constitutionnelle.

Outre le renforcement des modalités de désignation du Contrôleur général, le Sénat avait aussi complété en première lecture les garanties d'indépendance de cette autorité en prévoyant d'une part que cette fonction est incompatible avec tout autre emploi public et d'autre part, que le Contrôleur général ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l'occasion des opinions qu'il émet ou des actes qu'il accomplit dans l'exercice de ses fonctions.

Les députés ont approuvé ces dispositions et ont conforté l'indépendance du Contrôleur général en indiquant qu'il est nommé « en raison de ses compétences et connaissances professionnelles »- cette précision reprend les termes de l'article 18-2 du protocole facultatif à la convention des Nations unies contre la torture.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 2 sans modification .

Article 3 - Équipe de contrôleurs

Cet article prévoit que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est assisté de contrôleurs.

Le Sénat à l'initiative de Mme Alima Boumediene-Thiery et de plusieurs de ses collègues a précisé que les contrôleurs sont placés sous la seule autorité du Contrôleur général des lieux de privation de liberté.

A l'initiative de M. Philippe Goujon, les députés ont précisé que cette autorité concerne l'exercice des missions des contrôleurs. Cette formulation plus souple autorise le recours à des contrôleurs en activité dans des administrations -à la condition qu'elles ne soient pas en relation directe avec les lieux contrôlés- qui pourraient être recrutés à temps partiel.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 3 sans modification .

Article 4 - Statut professionnel

Cet article prévoit que le Contrôleur général des lieux de privation de liberté et ses collaborateurs sont astreints au secret professionnel. Le Sénat, a l'initiative de votre commission des lois, avait précisé par amendement qu'en vue d'assurer le secret professionnel, le Contrôleur général veille à ce qu'aucune mention permettant l'identification des personnes dont le nom lui aurait été révélé ne soit faite dans les documents publiés sous son autorité.

Les députés à l'initiative de M. Philippe Goujon ont estimé que la notion de « collaborateurs » n'était pas à elle seule explicite et qu'il convenait également de mentionner expressément les contrôleurs chargés d'assister le Contrôleur général, soumis aux mêmes obligations de secret professionnel. En outre, à l'initiative de M. Jean-Frédéric Poisson, l'Assemblée nationale a indiqué que les interventions orales seraient astreintes dans les mêmes conditions que les documents écrits à l'interdiction de divulgation de l'identité des personnes.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 4 sans modification .

Article 5 - Modalité d'information et de saisine

Cet article définit les conditions dans lesquelles le Contrôleur général des lieux de privation de liberté peut être soit informé par des tiers de situations relevant de sa compétence, soit saisi par certaines autorités. Outre le droit d'autosaisine, le Contrôleur général pourrait être saisi par le Premier ministre, les membres du Gouvernement ainsi que les parlementaires.

Le Sénat, à l'initiative de votre rapporteur, avait estimé utile de permettre la saisine du Contrôleur général par d'autres autorités administratives indépendantes chargées de veiller au respect des droits fondamentaux -le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, la Commission nationale de déontologie de la sécurité et la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.

L'Assemblée nationale a approuvé ces dispositions sous réserve d'un amendement rédactionnel.

Elle a en outre adopté un amendement de clarification.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 sans modification .

Article 5 bis - Saisine de la CNDS et du Médiateur de la République par le contrôleur général

Cet article, inséré par le Sénat à l'initiative de votre commission des lois ouvre au Contrôleur général la faculté de saisir directement la commission nationale de déontologie de la sécurité -comme celle-ci peut l'être aussi par le Médiateur de la République, le président de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité et le Défenseur des enfants.

Tout en approuvant cette disposition, les députés, à l'initiative de M. Philippe Goujon, ont souhaité la compléter en conférant au Contrôleur général la possibilité de saisir directement le Médiateur de la République sans passer par le « filtre » parlementaire.

Cette disposition contribue à une meilleure articulation des rôles respectifs des autorités administratives indépendantes et s'inscrit parfaitement dans le sens des préoccupations du Sénat.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 5 bis sans modification .

Article 6 - Pouvoirs d'investigation

Cet article définit les pouvoirs d'investigation du Contrôleur général. Ces prérogatives reposent principalement sur le droit de visite de lieux de privation de liberté ainsi que sur le droit d'obtenir des informations sans que le secret puisse, sous certaines conditions, lui être opposé.

Le Sénat a, en première lecture, renforcé ces pouvoirs à trois titres. A l'initiative de votre commission des Lois, il a d'abord étendu la compétence du Contrôleur général à la situation des personnes hospitalisées sur demande d'un tiers dans des établissements hospitaliers privés en vertu de l'article L. 3222-1 du code de la santé publique. Il a ensuite, en adoptant un amendement présenté par Mme Alima Boumediene-Thiery, supprimé le principe d'une information préalable des autorités responsables du lieu de privation de liberté avant toute visite du Contrôleur général. Enfin, à l'initiative de votre commission, le Sénat a supprimé la référence à la sécurité des locaux parmi les critères susceptibles d'être opposés à l'information du Contrôleur général.

L'Assemblée nationale, à l'initiative de la commission des lois, a renforcé le pouvoir d'information du Contrôleur général sur trois points :

- sur le modèle de l'article 14-2 du protocole des Nations unies, elle a précisé que les motifs opposés à la visite du Contrôleur général devaient présenter non seulement un caractère grave -comme le prévoit le projet de loi-, mais aussi « impérieux » ;

- elle a en outre prévu que cette opposition devait être motivée ;

- enfin, elle a précisé que les autorités responsables du lieux de privation de liberté informent le Contrôleur général dès que les circonstances avancées à l'appui d'un refus de visite ont cessé.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 6 sans modification .

Article 7 - Suites données aux visites

Cet article détermine les suites données aux visites des lieux de privation de liberté.

A la suite d'un amendement de M. Charles Gautier et de plusieurs de ses collègues, le Sénat a, en première lecture, explicitement prévu que les observations adressées par le Contrôleur général au ministre intéressé, à l'issue de chaque visite, peuvent porter non seulement, comme le mentionne le texte initial du projet de loi, sur l'état du lieu visité, mais aussi sur les conditions de détention des personnes privées de liberté. En outre, notre assemblée a adopté un amendement de MM. Jean-René Lecerf et Hugues Portelli afin d'imposer une réponse de l'autorité concernée lorsque le Contrôleur général l'a expressément demandé. Enfin, à l'initiative de votre rapporteur, le Sénat a prévu l'obligation pour le Contrôleur général de dénoncer, d'une part, au procureur de la République, en application de l'article 40 du code de procédure pénale, les infractions pénales constatées, et d'autre part, à l'autorité administrative, les fautes disciplinaires parvenues à sa connaissance dans l'exercice de sa mission.

Outre deux amendements de précision, les députés, à l'initiative de leur commission des lois, ont introduit une procédure d'urgence permettant au Contrôleur général, s'il constate une violation grave des droits fondamentaux, de fixer un délai dans lequel l'autorité compétente doit lui répondre. Au terme de ce délai, le Contrôleur général constaterait s'il a été mis fin à la violation et pourrait rendre public le contenu de ses observations et les réponses apportées.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 8 sans modification .

Article 8 - Avis et recommandations

Cet article tend à conférer au Contrôleur général la faculté de formuler des avis et des recommandations.

Comme le proposait votre commission, le Sénat a prévu la publicité des réponses des administrations aux observations du Contrôleur général.

Par ailleurs, le projet de loi initial interdisait au Contrôleur général d'intervenir dans une procédure engagée devant une juridiction ou de remettre en cause le bien-fondé d'une décision juridictionnelle.

Les députés, suivant la position de leur commission des lois, ont jugé inutile de préciser dans la loi ce qui relève du principe constitutionnel de séparation des pouvoirs et ont supprimé en conséquence cette disposition.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 8 sans modification.

Article 11 bis (nouveau) - (art. L. 111-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile) - Coordination

L'Assemblée nationale, à l'initiative de sa commission des lois, a supprimé la référence à la Commission nationale de contrôle des centres et locaux de rétention administratifs et des zones d'attente (CRAZA) dans la liste des instances qui joignent leurs observations au rapport adressé par le Gouvernement au Parlement sur les orientations pluriannuelles de la politique d'immigration.

Comme l'avait rappelé votre rapporteur lors de l'examen du projet de loi en première lecture, cette commission a été instituée par l'article 54 de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité. Ces dispositions présentant un caractère réglementaire ont été déclassées lors de l'adoption du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en 2006 (article R. 111-251 et suivants). Seule subsiste la mention de la CRAZA à l'article L. 111-10.

Votre rapporteur, tout en saluant le travail remarquable accompli par cette commission à l'initiative de son président, M. Bernard Chemin, avait cependant constaté que son champ d'action s'identifiait à une partie des missions dévolues au Contrôleur général.

Il inclinait pour sa suppression et préconisait l'utilisation de l'expérience acquise grâce à l'intégration de certains membres de la commission dans l'équipe de contrôleurs chargés d'assister le Contrôleur général.

Poursuivant cette réflexion, les députés, en adoptant le présent article, ont autorisé à terme la suppression de la CRAZA par l'abrogation des dispositions réglementaires de 2005. M. Philippe Goujon a souhaité dans son rapport que cette abrogation n'intervienne pas avant que le Contrôleur général ne soit en mesure d'exercer effectivement sa mission de contrôle dans les centres et locaux de rétention administratifs ainsi que dans les zones d'attente.

Votre commission souscrit entièrement à cette position et vous propose d'adopter l'article 11 bis sans modification.

*

* *

La commission propose d'adopter le projet de loi sans modification.

* 1 Les autorités administratives indépendantes : évaluation d'un objet juridique non identifié, Patrice Gélard, office parlementaire d'évaluation de la législation, n° 3166, AN, n° 104, Sénat, juin 2006.

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