N° 186

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2007-2008

Annexe au procès-verbal de la séance du 30 janvier 2008

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l' approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République italienne relative au tunnel routier sous le Mont-Blanc ,

Par M. Jacques BLANC,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan, président ; MM. Jean François-Poncet, Robert del Picchia, Jacques Blanc, Mme Monique Cerisier-ben Guiga, MM. Jean-Pierre Plancade, Philippe Nogrix, André Boyer, Robert Hue, vice - présidents ; MM. Jean-Guy Branger, Jean-Louis Carrère, Jacques Peyrat, André Rouvière, André Trillard, secrétaires ; MM. Bernard Barraux, Jean-Michel Baylet, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Pierre Biarnès, Didier Borotra, Didier Boulaud, Robert Bret, Mmes Paulette Brisepierre, Michelle Demessine, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Hubert Falco, Jean Faure, Jean-Pierre Fourcade, Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Gisèle Gautier, Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Joseph Kergueris, Robert Laufoaulu, Louis Le Pensec, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Charles Pasqua, Daniel Percheron, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Jean Puech, Jean-Pierre Raffarin, Yves Rispat, Roger Romani, Gérard Roujas, Mme Catherine Tasca, M. André Vantomme, Mme Dominique Voynet.

Voir le numéro :

Sénat : 84 (2007-2008)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi a pour objet d'autoriser l'approbation de la convention relative au tunnel routier sous le Mont-Blanc, signée à Lucques le 24 novembre 2006 par les gouvernements français et italien.

A la suite du dramatique incendie survenu le 24 mars 1999, de nombreux travaux de réparation et de renforcement de la sécurité ont été réalisés sur le tunnel du Mont-Blanc, préalablement à sa réouverture en 2002.

Les gouvernements français et italien ont également voulu tirer tous les enseignements de cette catastrophe en ce qui concerne le cadre juridique applicable au tunnel et à son exploitation. Un accord intergouvernemental du 14 avril 2000 a ainsi approuvé la constitution entre les deux sociétés concessionnaires, française et italienne, du groupement européen d'intérêt économique (GEIE) du Tunnel du Mont-Blanc. Celui-ci est devenu, depuis lors, la structure unique en charge de l'entretien, de l'exploitation et de la sécurité de l'ouvrage.

Par ce même accord du 14 avril 2000, les deux gouvernements s'engageaient à mener des négociations en vue de conclure le plus rapidement possible une nouvelle convention appelée à remplacer celle de 1953, afin d'adapter le cadre juridique applicable au tunnel, notamment dans la perspective d'en améliorer la sécurité.

La convention du 24 novembre 2006, aujourd'hui soumise à l'examen du Parlement, constitue l'aboutissement de cette démarche. Se substituant à la convention initiale de 1953 et aux accords qui l'avaient complétée, elle consacre le principe d'une structure unique en charge de l'exploitation du tunnel. Elle précise les attributions de la commission intergouvernementale franco-italienne et du comité de sécurité qui lui est adjoint. Elle définit les conditions d'exercice de la police de la circulation dans le tunnel.

Votre rapporteur effectuera un rappel des différentes mesures prises depuis l'incendie de 1999 en termes de gestion et de sécurité du tunnel du Mont-Blanc avant de détailler le dispositif de la convention du 24 novembre 2006.

I. LE TUNNEL DU MONT-BLANC ET LES SUITES DE L'INCENDIE DE 1999

Le tunnel du Mont-Blanc a été ouvert en juillet 1965 entre la vallée de Chamonix et le val d'Aoste. D'une longueur totale de 11,6 km (dont 7,6 km en territoire français), il est constitué d'un tube unique à double sens de circulation , avec une chaussée de 7 mètres, relativement étroite par rapport aux tunnels bidirectionnels plus récents.

En application de la convention franco-italienne du 14 mars 1953 , les deux gouvernements ont confié la construction du tunnel et son exploitation, pour une durée initialement fixée à 70 ans, à une société française, la société Autoroute et tunnel du Mont-Blanc (ATMB) 1 ( * ) , et à une société italienne, la Societa italiana per il traforo del monte Bianco (SITMB) 2 ( * ) . Chaque société détient la concession de la moitié du tunnel, les limites des concessions ne correspondant donc pas aux limites territoriales entre la France et l'Italie. L'article 7 de la convention prévoyait néanmoins de confier ultérieurement l'exploitation à une société commune unique. Toutefois, un avenant signé en 1965 a maintenu à titre provisoire le mode d'exploitation initial qui a perduré jusqu'en 1999.

L'incendie meurtrier survenu le 24 mars 1999 a entraîné la fermeture du tunnel durant 3 ans . Outre les travaux de remise en état, d'importants investissements ont été réalisés pour renforcer la sécurité de l'ouvrage. Parallèlement, les modalités de son exploitation ont été revues.

Aujourd'hui, le tunnel du Mont-Blanc demeure un point de passage essentiel entre la France et l'Italie du nord, même si le trafic de poids lourds y est sensiblement inférieur à celui constaté avant 1999.

A. LE BILAN DE LA CATASTROPHE DU 24 MARS 1999

Si plusieurs incendies avaient déjà eu lieu à l'intérieur du tunnel depuis sa mise en exploitation, celui qui est survenu dans la matinée du 24 mars 1999 s'est révélé d' une ampleur et une gravité exceptionnelles .

Il est à noter que l'accès aux entrées du tunnel, à environ 1 300 mètres d'altitude, s'effectue par de longues et fortes rampes, et que de ce fait, les risques de débuts d'incendie sur des véhicules, notamment les poids lourds, y sont plus élevés que pour des tunnels de plaine.

Ce jour là, un camion frigorifique semi-remorque belge transportant de la farine et de la margarine a pris feu 6 km après l'entrée française du tunnel, c'est-à-dire dans la zone la plus éloignée des deux têtes de l'ouvrage. L'incendie s'est très rapidement propagé. En outre une mauvaise utilisation du système de ventilation côté italien a aggravé le sinistre. L'action des secours provenant de France et d'Italie s'est avérée très difficile. Du fait des fumées, les secours n'ont pu atteindre le camion. L'incendie n'a été circonscrit que dans l'après-midi du 26 mars, après que 24 poids lourds, 9 véhicules légers, une moto et deux véhicules de secours aient été détruits. Le bilan définitif de l'incendie, particulièrement lourd, s'élève à 39 morts .

La catastrophe a donné lieu à des poursuites judiciaires et le 27 juillet 2005, le tribunal correctionnel de Bonneville (Haute-Savoie) prononçait treize condamnations frappant à des degrés divers des responsables ou dirigeants des deux sociétés concessionnaires, française et italienne, ainsi que ces sociétés elles-mêmes. Également condamné par le tribunal de Bonneville au motif d'une défaillance dans l'exercice de ses pouvoirs de police, le maire de Chamonix a été relaxé par la Cour d'appel de Chambéry le 14 juin 2007.

Deux missions administratives d'expertise , l'une française et l'autre italienne, ont été mises en place par chacun des deux gouvernements dans les jours qui ont suivi la catastrophe. Ayant échangé leurs constatations et analyses, les deux missions ont rendu le 6 juillet 1999 un rapport commun détaillant les circonstances de la catastrophe et énonçant 41 recommandations , au vu notamment des insuffisances ou déficiences constatées.

Une première série de recommandations portait sur l' organisation institutionnelle . Le rapport proposait diverses mesures destinées à améliorer le fonctionnement de la commission intergouvernementale de contrôle, ainsi que la création auprès d'elle d'un comité technique de sécurité assurant le suivi permanent des questions de sécurité dans le tunnel. Il rappelait que la convention franco-italienne du 14 mars 1953 avait prévu de confier la gestion du tunnel à une société unique, dont le capital aurait été réparti pour moitié entre les deux concessionnaires. Constatant que cette société commune n'avait jamais vu le jour et, qu'en outre, deux directions d'exploitation distinctes avaient perduré, le rapport demandait la constitution d'une structure de gestion unique.

En ce qui concerne les installations de sécurité et d'exploitation , le rapport préconisait certains travaux de génie civil (notamment le doublement du nombre des refuges), ainsi que la modernisation et le renforcement des équipements (mise en place d'une salle de commande unique, au lieu des deux salles existantes, remise à niveau des dispositifs de mesure de données relatives à la sécurité, amélioration du réseau électrique, amélioration de la signalisation, réfection profonde du système de ventilation pour accroître le débit d'extraction de l'air vicié).

Le rapport commun franco-italien recommandait également de revoir l' organisation des moyens de secours . Il préconisait la mise en place par l'exploitant d'un service de première intervention permanent, à chaque entrée du tunnel, et l'élaboration d'un plan de secours binational unique, se substituant aux plans de secours français et italien qui n'étaient pas identiques jusqu'en 1999.

Enfin, le rapport soulignait la nécessité d'améliorer l'information des usagers et de durcir la réglementation des véhicules autorisés à emprunter le tunnel.

* 1 Le capital de la société ATMB est détenu à 60,05 % par l'Etat. Parmi les autres actionnaires figurent le département de Haute-Savoie (16,5 %), la ville et le canton de Genève (5 %).

* 2 Le capital de la société SITMB est détenu à 51 % par le groupe privé Autostrade. L'Etat italien, via l'agence nationale des infrastructures routières (ANAS), détient 32,1 % du capital et la région autonome de la vallée d'Aoste 10,6 %.

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