Rapport n° 185 (2008-2009) de M. André DULAIT , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 28 janvier 2009

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N° 185

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 28 janvier 2009

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l' Australie concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces ,

Par M. André DULAIT,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Paul Alduy, Jean-Etienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mme Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Hubert Haenel, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Jean-Luc Mélenchon, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

422 (2007-2008)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi d'un projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces, signé à Paris le 14 décembre 2006.

Cet accord a été rendu nécessaire par une coopération de défense très active entre les deux pays, du fait de la proximité de territoires français avec l'Australie.

La France et l'Australie coopèrent notamment pour la protection des ressources halieutiques dans les zones placées sous leur souveraineté 1 ( * ) .

Les forces françaises présentes en Nouvelle-Calédonie, environ 3 000 hommes, assurent une pleine participation française à la sécurité régionale dans le Pacifique.

Le présent accord offre à la coopération franco-australienne en matière de défense le cadre juridique nécessaire à son développement.

I. LA COOPÉRATION ENTRE LA FRANCE ET L'AUSTRALIE EN MATIÈRE DE DÉFENSE

1. Une coopération essentiellement régionale

Après les turbulences qu'a traversées la relation bilatérale après 1995 et la reprise des essais nucléaires français dans le Pacifique, nos deux pays ont renoué une relation de confiance et de qualité traduite par une coopération active dans de nombreux domaines.

Par les collectivités françaises du Pacifique et de l'Océan indien (Nouvelle-Calédonie et Kerguelen), notre pays assume sa part de la stabilité et du développement de la région. Il a deux frontières maritimes avec l'Australie et coopère avec ce pays à la protection des ressources halieutiques et au respect de sa souveraineté.

C'est principalement via les Forces Armées en Nouvelle-Calédonie, les FANC, qu'est mise en oeuvre notre coopération en matière de Défense sous la forme d'exercice communs, d'échanges d'informations et d'escales.

Notre pays est signataire, avec l'Australie et la Nouvelle-Zélande d'un accord FRANZ qui institue une coopération au profit des États insulaires du Pacifique en cas de catastrophes naturelles.

Il a été présent lors de l'opération au Timor orientale où l'Australie a joué un rôle prépondérant.

2. Le rôle croissant de l'Australie

De son côté l'Australie souhaite élargir son champ d'intervention au-delà de la région et s'affirmer comme un acteur de la sécurité globale.

Elle est ainsi présente en Afghanistan où son contingent, 1 800 hommes, est la première contribution à l'ISAF d'un pays non membre de l'OTAN.

Elle constitue donc un interlocuteur de qualité en matière de défense.

Un dialogue entre états-majors a été institué en 2001 et se poursuit sur une base annuelle.

Nos deux pays coopèrent également en matière d'armement, l'Australie ayant acheté des hélicoptères Tigre et NH 90.

II. L'ACCORD CONCERNANT LA COOPÉRATION EN MATIÈRE DE DÉFENSE ET LE STATUT DES FORCES

L'Accord comporte 11 articles et deux annexes, relatives au statut des forces et au règlement des dommages.

1. L'Accord

L'article 1 er précise la définition des termes de l'accord « État d'accueil », « État d'envoi », « élément civil », « personne à charge », « force  en visite ».

Le terme de « force en visite » désigne « tout corps, contingent ou détachement des forces armées d'une partie qui, avec le consentement de l'autre partie, se trouve sur le territoire de l'autre partie dans le cadre d'une activité de coopération telle que définie à l'article 2 ».

Les activités de coopération sont énumérées à l'article 2.

Elles comprennent :

- l'organisation de visites et d'échanges militaires, d'exercices conjoints ou unilatéraux ;

- l'organisation d'entraînements conjoints ou unilatéraux du personnel militaire ;

- la conduite de soutien logistique ;

- l'échange d'informations dans le domaine de la défense ;

- l'échange de renseignements ;

- des activités conjointes dans les domaines de l'armement, de la technologie et de la recherche dans le domaine de la défense ;

- des activités visant à améliorer et à élargir les interactions entre les cultures militaires respectives ;

- l'échange d'informations et de services dans le domaine spatial, y compris les informations et services géospatiaux ;

- des mesures pour l'assistance humanitaire internationale ;

- toute autre activité de coopération relative à la défense dont les Parties conviennent d'un commun accord.

L'article 3 confie la coordination des activités de coopération aux dispositifs existants. Les armées française et australienne se rencontrent actuellement au cours de réunions d'état-major et dans des cadres de discussions formalisés à un rythme annuel.

Relatif au soutien logistique , l'article 4 prévoit que les parties « doivent négocier un instrument juridique relatif au soutien logistique mutuel », prévoyant notamment les règles applicables en matière financière. La ratification de cet accord ouvre par conséquent la voie à la conclusion d'un accord de soutien mutuel dans le domaine logistique, qui permettraient aux Australiens de bénéficier des installations de Nouvelle-Calédonie et aux Français de disposer des installations australiennes.

Les articles 5 et 6 renvoient respectivement aux annexes 1 et 2 concernant le statut des forces et le règlement des dommages et dont l'article 9 précise qu'elles font partie intégrante de l'accord.

L'article 7 renvoie, quant à lui, pour la protection des informations classifiées , à l'accord relatif à l'échange et à la communication des informations classifiées conclu entre les deux pays.

L'article 8 prévoit que chaque partie supporte ses propres coûts de participation à des activités de coopération.

Les articles 10 et 11 sont relatifs au règlement des différends, à l'entrée en vigueur de l'accord et à sa résiliation.

2. Le statut des forces

L'annexe 1 de l'Accord pose le principe que les membres d'une force en visite sont soumis à la législation et à la règlementation de l'État d'accueil . Ils « ne doivent pas être associés à la préparation ou à l'exécution d'opérations de guerre ni à des actions de maintien ou de rétablissement de l'ordre public, de la sécurité publique ou de la souveraineté nationale, à moins que les Parties n'en décident autrement d'un commun accord ».

En matière disciplinaire , l'État d'envoi exerce une compétence exclusive sur les membres de la force en visite et sur les membres de l'élément civil.

En matière pénale , l'État d'envoi a compétence en matière de juridiction pénale de même que l'État d'accueil pour les infractions commises sur son territoire et punissables par la législation.

Dans l'hypothèse où une infraction n'est pas punissable par la législation d'un État alors qu'elle l'est dans l'autre État, ce dernier a le droit d'exercer une juridiction exclusive sur les membres de la force en visite.

En cas de juridiction concurrente, les autorités de l'État d'envoi exercent par priorité leur droit de juridiction dans les cas d'infractions portant uniquement atteinte à la sécurité de l'État d'envoi, d'infractions commises uniquement à l'encontre de la personne d'un autre membre de la force en visite, d'infractions commises uniquement à l'encontre la propriété de l'État d'envoi ou d'infractions résultant de tout acte ou négligence accomplis dans l'exécution du service. Dans tous les autres cas, les autorités de l'état d'accueil exercent par priorité leur droit de juridiction.

L'accord prévoit une coopération entre les deux États pour les arrestations et les enquêtes et des échanges d'information. Il prévoit qu'une personne déjà jugée ne peut être jugée une deuxième fois pour une infraction identique et que les membres des forces en visite bénéficient des mêmes garanties procédurales que les nationaux lorsqu'ils sont poursuivis ou jugés par les autorités de l'État d'accueil.

En matière d'entrée et de sortie , l'accord prévoit une exemption des formalités nécessaires à l'obtention d'un visa. Il prévoit que les personnels doivent être en possession d'un passeport et d'un ordre de mission et, le cas échéant, de documents susceptibles d'être délivrés en matière de santé et de quarantaine. Pour tout séjour d'une durée supérieure à trois mois les membres de la force en visite doivent solliciter, lorsque la législation le prévoit, un titre de séjour renouvelable. L'État d'envoi centralise les demandes et les présente aux autorités de l'État d'accueil qui délivre les titres sans frais.

L'Accord précise qu'il ne confère en rien un droit à résidence ou à domicile pour les membres d'une force en visite, les civils ou les personnes à charge.

En matière d'importation et d'exportation , l'accord prévoit la possibilité d'importer en franchise de droits, en quantités raisonnables des effets personnels, des meubles et des biens d'équipement ménager et un véhicule à moteur. Ces marchandises ne peuvent être cédées à une autre personne, vendues, échangées louées, offertes sans l'accord des autorités compétentes.

Les autorités de l'État d'envoi peuvent importer et exporter en franchise de droits tout carburant, huile et lubrifiants destinés à l'usage exclusif des véhicules, aéronefs et navires officiels.

Le port d'arme est autorisé dans les circonstances approuvées par l'État d'accueil .

L'accord renvoie à l'accord bilatéral en matière fiscale pour le régime de l'imposition des revenus . Dans le domaine fiscal, la France et l'Australie ont signé, le 13 avril 1976, une convention modifiée par un avenant du 19 juin 1989. Du fait de la signature d'un avenant modifiant la convention entre l'Australie et les Etats-Unis, le 13 mai 2003, la révision de l'accord franco-australien a été rendue nécessaire, l'article 27A du texte de 1976 prévoyant que chaque partie bénéficie de la clause de la nation la plus favorisée. La France et l'Australie ont donc signé, le 20 juin 2006, une convention visant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et à prévenir l'évasion fiscale. Adopté par l'Assemblée nationale le 10 avril 2008, le projet de loi autorisant l'approbation de cette convention est en instance au Sénat.

L'Accord prévoit que les Autorités de l'état d'accueil et celles de l'état d'envoi coopèrent en vu d'assurer la sécurité des installations mises à la disposition de la force en visite. Il prévoit également le régime de validité des permis de conduire et celui des communications de la force en visite.

En matière médicale , il prévoit que les personnels sont aptes médicalement et sur le plan dentaire et que tout traitement, de même que les évacuations sanitaires, est assuré sur la base du recouvrement total des coûts.

3. Le règlement des dommages

L'annexe 2 de l'Accord est relative au règlement des dommages.

En matière de dommages entre les parties , l'Accord exclut toute demande d'indemnités pour les dommages aux biens et aux personnes survenus dans l'exercice de fonctions officielles, hors les cas de faute lourde ou intentionnelle. Il exclut également toute demande d'indemnités pour le sauvetage maritime à condition que le navire ou la cargaison sauvée soit la propriété d'une partie et soit utilisé par ses forces armées à des fins officielles.

Les parties décident d'un commun accord si une demande d'indemnités résulte d'un acte commis dans le cadre des fonctions officielles ; elles décident de la même manière si le dommage résulte d'une faute lourde ou intentionnelle.

Dans le cas de dommages à des tiers, la demande d'indemnités est instruite par l'État d'accueil conformément à sa législation.

Si le gouvernement de l'État d'envoi est seul responsable des dommages, le montant accepté ou déterminé par décision judiciaire est réparti à 75 % pour le Gouvernement d'envoi et à 25 % pour l'État d'accueil. Dans les autres cas, le montant est réparti de manière égale.

Ce mode de règlement des dommages ne s'applique pas aux dommages causés par des véhicules, qui sont couverts par une assurance.

CONCLUSION

Cet accord devrait permettre de préciser le cadre juridique de la coopération de défense entre la France et l'Australie, ce qui est indispensable à son développement.

Il s'appuie sur les accords bilatéraux existants en matière fiscale et de protection des informations classifiées. Un accord de soutien logistique entre les deux pays devrait être signé sur son fondement.

Acteur régional via les collectivités du Pacifique, la France a intérêt au développement et au renforcement de ses liens avec un Etat dont l'implication, non seulement dans la région mais aussi dans la stabilité mondiale, va croissant.

Votre Commission vous demande de bien vouloir adopter le présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du mercredi 28 janvier 2009, la commission a examiné le présent rapport.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le projet de loi et proposé que ce texte fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifiée en séance publique.

PROJET DE LOI

(Texte proposé par le Gouvernement)

Est autorisée l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces (ensemble deux annexes), signé à Paris le 14 décembre 2006, et dont le texte est annexé à la présente loi 2 ( * ) .

ANNEXE - ÉTUDE D'IMPACT3 ( * )

FICHE D'EVALUATION JURIDIQUE

Etat du droit existant

La coopération en matière de défense avec l'Australie se fonde principalement sur deux textes:

- L'accord intergouvernemental relatif à l'échange et à la communication d'informations protégées du 15 juillet 1985 ;

- L'accord franco-australien de coopération en matière de recherche et de technologie de défense en date du 17 décembre 1990.

Cette coopération connaît toutefois de nombreuses illustrations, notamment par le biais de nos troupes stationnées en Nouvelle Calédonie. Ces activités, qui concernent l'ensemble du panel de nos forces, se traduisent par de nombreuses opérations communes, mais aussi de multiples missions de formation et d'entraînement conjoint.

Effet de l'accord sur l'ordonnancement juridique

L'accord concernant la coopération en matière de défense et le statut des forces conclu le 14 décembre 2006 permettra de régler de façon satisfaisante l'essentiel des questions juridiques et techniques susceptibles de se poser lors de la mise en oeuvre et de l'approfondissement de notre coopération avec la partie australienne.

Modifications à apporter au droit existant et délais de réalisation

L'entrée en vigueur de l'accord ne nécessite aucune modification du droit existant.

* 1 Le Sénat s'est ainsi prononcé récemment sur l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de l'Australie relatif à la coopération en matière d'application de la législation relative à la pêche dans les zones maritimes adjacentes aux Terres australes et antarctiques françaises, à l'île Heard et aux îles McDonald, signé à Paris le 8 janvier 2007

* 2 Voir le texte annexé au document Sénat n° 422 (2007-2008)

* 3 Texte transmis par le Gouvernement pour l'information des parlementaires

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