CHAPITRE II - Représentation des professions de santé libérales

Article 27 - Représentation des professionnels de santé exerçant à titre libéral

La commission mixte paritaire a examiné trois amendements, respectivement déposés par les sénateurs membres du groupe CRC-SPG, par M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'Assemblée nationale, et par les sénateurs membres du groupe socialiste, tendant tous trois à ce que les unions régionales des professions de santé représentant les médecins soient constituées de trois collèges représentant respectivement les généralistes, les chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens et, pour le dernier, les autres spécialistes.

M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'Assemblée nationale , a indiqué que son amendement a pour objet de revenir au texte de l'Assemblée nationale qui présente l'avantage de distinguer les spécialistes exerçant en plateau technique lourd (chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens) afin de permettre une meilleure prise en compte des spécificités de leur exercice. Il a proposé que les deux autres amendements tendant au même objectif soient retirés au profit du sien.

M. Jean-Pierre Door, député, a constaté que l'existence de trois collèges ne fait pas l'unanimité même si les deux assemblées se sont en définitive prononcées en faveur de la création de collèges distincts. Le problème essentiel est de savoir quels sont les médecins qui se trouveront représentés par le collège des spécialistes à plateau technique lourd. On risque par là de saucissonner certaines spécialités.

Le président Nicolas About, sénateur, a rappelé que la position initiale de la commission des affaires sociales était de ne pas limiter le nombre de collèges et de laisser la négociation déterminer le nombre des instances nécessaires, conformément au rapport de l'inspection générale des affaires sociales (Igas). Il a estimé que mettre en place trois collèges ne répondra aux difficultés que d'une partie des médecins.

M. Jean-Pierre Door, député, a réaffirmé que le problème de la détermination des électeurs dans les différents collèges se posera, notamment au regard de la représentativité syndicale.

M. Jacques Domergue, député, a insisté sur l'urgence qu'il y a à répondre à l'attente des professionnels exerçant les spécialités en crise que sont la chirurgie, l'anesthésie et l'obstétrique. C'est pour eux qu'est créé le troisième collège. Le problème soulevé par Jean-Pierre Door de séparation des professionnels appartenant à une même spécialité ne se posera donc pas. Par ailleurs, le rapport de l'Igas qui préconise la création de sept collèges aboutirait à un morcellement de la représentativité syndicale et il est préférable de s'en tenir à trois collèges.

M. Jean-Marie Le Guen, député, a souligné que la création des deux collèges au sein des unions régionales des médecins libéraux (URML) a été vécue par la droite, minoritaire à l'époque, comme un déchirement et qu'il est intéressant de voir la majorité d'aujourd'hui augmenter encore le nombre de collèges.

Les membres de la commission mixte paritaire doivent prendre position à l'aveugle et choisir entre des logiques profondément différentes.

La logique des trois collèges tend à permettre à une catégorie particulière de professionnels de négocier des tarifs optionnels, ce qui signifie la fin des tarifs opposables de la sécurité sociale. Les chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens veulent pouvoir mener des négociations séparées du reste du corps médical. Ceci signifie que demain leurs tarifs seront différents de ceux des autres spécialistes. A cela s'ajoute un affrontement entre le Gouvernement et une organisation syndicale dont il entend briser l'influence. La logique conduisant à créer sept à huit collèges, qui est celle du président About, tend au contraire à prendre en compte les problèmes réels qui se posent aux différentes catégories de médecins et à permettre des négociations en conséquence. Le problème fondamental est que des enjeux de santé publique, comme l'accès aux soins ou leur organisation, sont soumis à la négociation avec les organisations syndicales. Ce système conventionnel est à bout de souffle et il est nécessaire de refonder le pacte qui lie l'Etat aux professionnels de santé. Il faut donc identifier les sept à huit groupes de médecins ayant des intérêts spécifiques et régionaliser les négociations. Toute autre solution est délétère.

M. Gilbert Barbier, sénateur, a salué le plaidoyer de Jean-Marie Le Guen mais a estimé qu'il existe des problèmes spécifiques et urgents pour les spécialistes qui utilisent des plateaux techniques lourds.

M. Yves Bur, député, a insisté sur les problèmes réels que rencontrent les chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens. Si les efforts visant à régler ces problèmes spécifiques n'aboutissent pas, il appartiendra au législateur de prendre ses responsabilités lors du projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais la création d'un collège spécifique constitue une première étape indispensable en ce sens. De plus, le problème n'est pas seulement celui des spécialistes à plateaux techniques lourds mais également celui des médecins généralistes qui attendent la reconnaissance due au titre des missions qui leur sont confiées.

M. Bernard Cazeau, sénateur, a estimé qu'indépendamment de querelles syndicales, dans lesquelles il n'entre pas, il existe deux types de médecine : la médecine générale, pour laquelle la relation médecin-malade prime, et la médecine spécialisée, qui fait usage de plateaux techniques plus ou moins importants. Dès lors, trois collèges semblent un nombre adapté pour régler les problèmes pratiques posés aux professionnels. C'est la raison pour laquelle il a déposé, au nom de son groupe, un amendement tendant à cet objectif.

M. François Autain , sénateur, a souligné à son tour que l'amendement déposé au nom de son groupe, presque identique aux deux précédents, a d'abord pour but de respecter l'identité des médecins généralistes qui, en majorité, pratiquent des tarifs opposables. On aurait pu, à la limite, se contenter de deux collèges.

M. Jacques Domergue, député, a considéré que la création des deux collèges distincts au sein des URML, dont l'expérience a montré qu'elle est justifiée, répond à un problème différent. Aujourd'hui, il est nécessaire de prendre en compte les problèmes spécifiques à certaines professions afin qu'elles puissent gagner leur vie correctement. Les spécialistes dont il est question travaillent quatorze à quinze heures par jour et ne parviennent à vivre qu'en pratiquant des dépassements d'honoraires. Si on souhaite les encadrer, il faut pouvoir le faire dans le cadre de négociations spécifiques. Il y a là une urgence car ces spécialités risquent de disparaître faute de médecins.

M. Alain Milon, rapporteur pour le Sénat, a indiqué que la création de trois collèges est soutenue par de nombreuses personnes, notamment par les internes et les jeunes médecins. Cependant, il a déclaré s'en tenir à la parole donnée lors des concertations préalables à la commission mixte paritaire et, pour cette raison, être opposé aux amendements tendant à mettre en place trois collèges.

M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'Assemblée nationale, a déclaré que la mise en place de trois collèges répond à une attente très forte de reconnaissance de plusieurs catégories de médecins, dont les généralistes. Les internes y sont également très attachés. De nombreux problèmes spécifiques en matière de démographie, de nomenclature, d'exercice et de modalités d'exercice existent pour les chirurgiens, anesthésistes et obstétriciens et il convient de faire avancer les négociations sur ces sujets.

MM. François Autain et Bernard Cazeau, sénateurs, ont déclaré retirer leurs amendements au profit de celui de M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'Assemblée nationale.

La commission mixte paritaire a adopté cet amendement.

M. Alain Milon, rapporteur pour le Sénat, a estimé que l'adoption de cet amendement rend sans objet celui qu'il a déposé tendant à ce qu'un décret en Conseil d'Etat pris dans les six mois fixe les modalités d'organisation et de financement des élections des membres des unions régionales des professionnels de santé. Il l'a donc retiré .

Il a également considéré inutile son amendement, tendant à supprimer la disposition qui prévoit que l'audience électorale minimale requise des syndicats pour signer ou dénoncer valablement la convention médicale - soit 30 % du total national des voix - s'apprécie collège par collège, et non tous collèges confondus. Il a en effet jugé cette disposition inutile dès lors que la définition des trois collèges figure désormais dans l'article 27 au titre de l'article L. 4031-2 du code de la santé publique.

M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'Assemblée nationale, auteur d'un amendement identique, a au contraire estimé préférable de supprimer cette mention afin de prendre en compte le pourcentage global des votes et non le résultat obtenu dans chacun des trois collèges.

M. Jean-Pierre Door, député, a jugé qu'obtenir la représentativité des syndicats dans plusieurs collèges nécessitera plusieurs adaptations et prendra beaucoup de temps.

M. Jean-Pierre Godefroy, sénateur, a fait observer que, par analogie avec les organisations professionnelles et dès lors qu'on a créé trois collèges, on ne peut pas prendre en compte un résultat global, sous peine de rendre impossible le fonctionnement du système. De plus, les syndicats de médecins, comme les autres organisations syndicales, devront sans doute avoir obtenu un résultat minimal aux élections pour pouvoir être considérés comme représentatifs.

M. Gilbert Barbier, sénateur, a déclaré partager cet avis.

M. Alain Milon, rapporteur pour le Sénat, a confirmé qu'en raison de l'adoption de l'amendement précédent portant création de trois collèges , la portée de son amendement, qui se voulait initialement de coordination, n'est pas évidente. Il l'a donc retiré .

La commission mixte paritaire a rejeté l'amendement identique de M. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l'Assemblée nationale .

Elle a ensuite adopté l'article 27 ainsi rédigé.

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