C. LA FRAGILITÉ STRUCTURELLE DE LA BRANCHE VIEILLESSE

Les déficits records de la branche vieillesse annoncés pour 2009 et 2010 ont, certes, une cause exceptionnelle : le manque de recettes découlant de la récession. Mais ils ne doivent pas masquer la réalité : la composante conjoncturelle du déficit demeure modeste au regard de sa composante structurelle 3 ( * ) .

1. Un régime par répartition qui n'est structurellement plus viable

Les mutations démographiques en cours depuis une vingtaine d'années (la dégradation continue du rapport cotisants-retraités, passé de 4 en 1960 à 1,43 aujourd'hui, et l'augmentation de l'espérance de vie de six ans depuis le début des années quatre-vingt) obligent à dresser le constat que le régime par répartition n'est structurellement plus viable avec ses paramètres actuels .

Le vieillissement de la population accroît en effet mécaniquement les dépenses de retraite qui progressent plus vite que les cotisations. Il en résulte des déficits croissants estimés, par le conseil d'orientation des retraites (Cor), à 25 milliards d'euros tous régimes confondus en 2020 et à près de 70 milliards en 2050 .

Actuellement de 13,1 %, le poids des dépenses de retraite dans le Pib ne cesserait d'augmenter pour atteindre 14,1 points de Pib en 2020 et 14,7 points de Pib en 2050 .

Scénario de base du Cor

2015

2020

2030

2040

2050

Dépenses de retraite
(en points de Pib)

13,7

14,1

14,7

14,9

14,7

Source : cinquième rapport du Cor, 2007

2. Un besoin de financement qui va croissant à moyen et long terme

Le besoin de financement des régimes de retraite a été évalué pour la dernière fois par le Cor en novembre 2007, sur la base des hypothèses suivantes :

- retour au plein emploi en 2015, avec un taux de chômage de 4,5 %, puis une stabilisation à ce niveau ;

- augmentation annuelle de la productivité du travail de 1,8 % ;

- passage de la durée d'assurance à taux plein de 40 à 41 ans en 2012, puis à 41,5 ans en 2020 et maintien à 41,5 ans jusqu'en 2050.

Sous ces conditions, les projections font apparaître un besoin de financement du système de retraite de un point de Pib en 2020 , soit 24,8 milliards d'euros (dont 13 milliards pour le seul régime général) et 1,7 point de Pib en 2050 , soit 68,8 milliards d'euros (dont 46 milliards pour le régime général).

Besoin de financement du système de retraite

2006

2015

2020

2030

2040

2050

En % du Pib

0,2

0,7

1,0

1,6

1,8

1,7

En milliards d'euros

4,2

15,1

24,8

47,1

63,4

68,8

Source : cinquième rapport du Cor, 2007

Le Cor a annoncé qu'il entreprendra, d'ici la fin de l'année, un exercice d'actualisation de ses projections afin :

- d'intégrer les conséquences de la crise sur l'équilibre des régimes ;

- d'ajuster les hypothèses macro-économiques de long terme dans un sens moins optimiste.

Compte tenu de ces éléments, le besoin de financement à l'horizon 2020-2050, à paramètres inchangés, devrait être fortement revu à la hausse .

3. Un retard financier qui n'est pas rattrapable même en cas de conjoncture économique favorable

Pour les années qui viennent, la question majeure n'est plus tant de savoir quelle aurait été la situation financière de la branche vieillesse si la crise n'avait pas eu lieu, mais d' évaluer si une conjoncture favorable permettra son redressement financier .

Plusieurs scenarii de sortie de crise sont envisageables :

- le premier suppose que la crise sera suivie d'un très fort rebond économique qui permettra de rattraper le niveau du Pib tendanciel (estimé à 2,25 %). Dans ce schéma, des taux de croissance très élevés seront observés dans les années à venir et combleront le retard pris au cours de la période de récession ;

- dans le deuxième, l'économie retrouvera son rythme d'évolution tendancielle, mais la perte de production des années de crise ne sera pas rattrapée ;

- le troisième, plus pessimiste, remet en cause la croissance potentielle, qui serait dans ce cas inférieure à 2,25 %.

Or, quel que soit le scénario qui se réalisera, la branche retraite du régime général abordera la reprise avec le handicap considérable que constituera un déficit d'environ 13 milliards d'euros à l'horizon 2012 , soit le niveau que lui prévoyaient les projections 2007 du Cor pour 2020.

Autrement dit, même si la conjoncture économique s'avérait très favorable (une très forte progression de la masse salariale entraînant une augmentation très élevée des recettes), le solde financier de la branche ne se rééquilibrerait pas pour autant .

* 3 L'impact de la crise invite à distinguer, dans le déficit de la branche vieillesse, la part conjoncturelle directement liée à la récession économique de la part structurelle liée aux tendances de fond affectant les recettes et les dépenses.

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