N° 211

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2009-2010

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 janvier 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , autorisant l' approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Géorgie en vue d' éviter les doubles impositions et de prévenir l' évasion fiscale en matière d' impôts sur le revenu et sur la fortune ,

Par M. Adrien GOUTEYRON,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; M. Jean-Paul Alduy, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Voir le(s) numéro(s) :

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

1060 , 1429 et T.A. 252

Sénat :

357 (2008-2009) et 212 (2009-2010)

PREMIÈRE PARTIE : EXPOSÉ GÉNÉRAL

Le Sénat est saisi du projet de loi n° 357 (2008-2009) , adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation de la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la Géorgie, en vue d' éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune .

La convention fiscale franco-géorgienne, qui a été signée à Paris, le 7 mars 2007 , constitue le premier instrument fiscal particulier établi par les deux Etats. En effet, la France et la Géorgie sont actuellement liées par la convention fiscale franco-soviétique du 4 octobre 1985. Par échange de lettres du 3 février 1997, les autorités géorgiennes ont accepté de reconnaître la validité de cet accord dans le cadre des relations fiscales bilatérales.

Cette convention vient compléter les nombreux accords conclus avec les Etats de la zone depuis le milieu des années 1990, tels que la convention avec l'Ouzbekistan , du 28 avril 1996, la convention signée avec la Russie, le 26 novembre 1996, la convention avec l'Ukraine, en date du 31 janvier 1997, la convention avec l'Arménie, conclue le 9 décembre 1997, celle avec le Kazakhstan, signée le 3 février 1998 et celle avec l'Azerbaïdjan, du 20 décembre 2001.

Cet accord conventionnel vise, d'une part, à éliminer les doubles impositions qui freinent les échanges entre les deux Etats et, d'autre part, à établir des règles d'assistance réciproques en matière fiscale.

Il convient de distinguer la double imposition juridique internationale , qui fait l'objet de cette convention, de la double imposition dite économique. La première est définie par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) 1 ( * ) comme étant « l'application d'impôts comparables dans deux ou plusieurs Etats au même contribuable pour le même fait générateur et pour des périodes identiques ». En revanche, la seconde concerne deux personnes différentes imposées au titre d'un même revenu.

La double imposition juridique par l'Etat source des revenus (S) et celui de la résidence (R) du contribuable est réputée intervenir dans les cas suivants :

- chaque Etat contractant applique un impôt comparable sur l'ensemble des revenus d'une même personne ;

- l'Etat source assujettit à l'impôt une personne résidente de l'autre Etat contractant (R) pour le revenu qui y a été généré (S) ;

- chaque Etat contractant applique le même impôt à une personne qui, bien que n'étant pas résidente d'un Etat contractant, a reçu des revenus provenant d'un Etat contractant. Ce scénario renvoie notamment à la situation du non-résident détenant un établissement stable dans un Etat contractant, d'où il tire ses revenus, et possédant sa fortune dans l'autre Etat contractant.

La convention fiscale, que le projet de loi vise à approuver, tend à résoudre ces différentes situations de conflit de compétence d'attribution du droit d'imposer à l'impôt une même personne.

En l'espèce, les contribuables concernés par le texte conventionnel représentent 212 personnes immatriculées en 2008 au titre de la communauté française en Géorgie, et 2.760 personnes majeures pour la communauté géorgienne en France.

Cette convention fiscale constitue un projet conforme au modèle de convention élaboré par l'OCDE. Sans valeur contraignante, il permet de fixer un cadre de référence aux négociations bilatérales. Il a été l'objet de nombreuses adaptations demandées et accordées à la France afin de lui permettre de se conformer à sa pratique fiscale nationale.

I. UNE IMAGE POLITIQUE DE LA FRANCE RENFORCÉE À L'ISSUE DE LA CRISE RUSSO-GEORGIENNE

La signature de la convention fiscale est intervenue dans un contexte où les relations entre la Géorgie et la France, et plus largement l'Occident, sont en plein essor. En effet, depuis son indépendance en avril 1991, la Géorgie a mené une politique d'ouverture. Celle-ci s'est concrétisée par l'adhésion de ce pays au Conseil de l'Europe, le 27 avril 1999, puis à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), en octobre de la même année. L'entrée en vigueur de l'accord de partenariat et de coopération avec l'Union européenne le 1 er juillet 1999 2 ( * ) a témoigné de cette volonté de rapprochement.

Les liens se sont encore renforcés avec la France à la suite de la médiation de la présidence européenne dans le conflit russo-géorgien en 2008.

Les incidents avec la Russie, qui s'étaient multipliés en 2007 et en 2008 en Abkhazie et en Ossétie du Sud, ont conduit au déclenchement d'un conflit armé dans la nuit du 7 au 8 août 2008 avec le lancement d'une offensive militaire géorgienne en Ossétie du sud. L'intervention de l'armée russe a entraîné une escalade militaire et l'extension du conflit au-delà de l'Ossétie du sud, sur le territoire contrôlé par les Géorgiens.

L'Union européenne, sous la présidence française de Nicolas Sarkozy, a alors proposé à la Géorgie et à la Russie un plan de paix, qui a été accepté par les deux parties. A ce jour, une mission civile d'observation (Mission de surveillance de l'Union européenne), créée à l'initiative du Conseil européen du 1 er septembre 2008, est toujours sur le terrain. Elle contribue à la stabilisation de la Géorgie, en particulier dans les zones adjacentes, ainsi qu'à l'instauration d'un climat de confiance entre les parties. La mission compte environ 300 policiers et militaires. Elle constitue désormais la seule présence internationale après le retrait des missions de l'Organisation des Nations Unies (ONU) et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

En vertu des accords de paix, des discussions ont débuté à Genève le 15 octobre 2008, réunissant, sous la présidence des Nations Unies, de l'Union européenne et de l'OSCE, la Géorgie, la Russie, les Etats-Unis et les représentants des deux entités séparatistes d'Ossétie du sud et d'Abkhazie. Après plusieurs sessions, ces discussions ont permis, le 17 février 2009, la mise en place d'un mécanisme conjoint de règlement des incidents. La France appelle de ses voeux la mise en oeuvre de tels mécanismes de sécurité pour une plus grande stabilité dans la région.

Ce rôle de médiation du conflit russo-géorgien a permis à notre pays de renforcer ses relations particulières avec la Géorgie. Le Président géorgien, M. Mikheil Saakachvili avait déjà effectué, dès les premiers mois de sa présidence, une visite de travail à Paris au cours de laquelle il avait rencontré le président Jacques Chirac. Il s'est à nouveau rendu à Paris le 13 juin 2007 et a rencontré le président de la République, M. Nicolas Sarkozy, et le ministre des affaires étrangères et européennes, M. Bernard Kouchner.

Lors du conflit, MM. Nicolas Sarkozy et Bernard Kouchner se sont rendus à Tbilissi, les 12 août et 8 septembre 2008. Puis, la secrétaire d'Etat au Commerce extérieur, Mme Anne-Marie Idrac, a effectué une visite dans ce pays les 23 et 24 novembre 2008. Les 2 et 4 décembre 2008, le ministre d'Etat pour la Réintégration, Temour Iakobachvili, s'est rendu en visite à Paris.

Les relations parlementaires se sont également renforcées. M. Christian Poncelet, alors président du Sénat, s'était rendu en Géorgie en juillet 1999 et en octobre 2001. Il avait reçu son homologue, M. Jvania, en janvier 1999, puis à nouveau en décembre 1999, dans le cadre de la réunion des présidents des Parlements sud-caucasiens. Cette expérience s'est renouvelée le 4 novembre 2004. Les groupes d'amitié du Sénat et de l'Assemblée Nationale sont également très actifs. A la mi-septembre 2008, le sénateur Alain Gournac, président délégué pour la Géorgie du groupe France-Caucase, s'est rendu dans ce pays.

* 1 Cf. Introduction du modèle de convention fiscale concernant le revenu et la fortune de 2008.

* 2 Accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part - Protocole sur l'assistance mutuelle entre autorités administratives en matière douanière - Echange de lettres concernant l'établissement de sociétés publié au Journal officiel des communautés européennes n° L 205 du 04/08/1999 p. 0003 - 0052.

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