Article 22 (art. 529 du code de procédure pénale) Forfaitisation des contraventions de cinquième catégorie

Le présent article propose de permettre d'appliquer le mécanisme de la forfaitisation aux contraventions de cinquième catégorie.

1 - Un dispositif aujourd'hui réservé aux contraventions des quatre premières classes

a) Les spécificités des contraventions de la cinquième catégorie

En l'état du droit, les contraventions sont réparties en cinq catégories auxquelles correspond un montant d'amende maximal :

- 38 euros pour les contraventions de la première classe ;

- 150 euros pour les contraventions de la seconde classe ;

- 450 euros pour les contraventions de la troisième classe ;

- 750 euros pour les contraventions de la quatrième classe ;

- 1.500 euros pour les contraventions de la cinquième classe.

Le régime des contraventions de la cinquième catégorie se distingue toutefois nettement de celui des quatre premières. Certes, depuis la réforme du code pénal, les contraventions relevant de la cinquième catégorie ne peuvent plus être sanctionnées de peines d'emprisonnement. Néanmoins :

- le mécanisme des peines alternatives leur est applicable, le nombre de peines complémentaires pouvant les sanctionner étant en outre plus important que pour les contraventions des quatre premières classes ;

- la règle du doublement des peines encourues en cas de récidive leur est applicable ;

- les condamnations prononcées pour contravention de la cinquième classe peuvent être assorties du sursis ;

- à l'audience du tribunal de police, le ministère public est représenté par le procureur de la République et non par l'officier du ministère public ;

- l'appel est toujours possible, quelle que soit la peine prononcée ;

- s'agissant des mineurs, le jugement des contraventions de la cinquième classe relève, comme les délits, des juridictions pour enfants ;

- enfin, la procédure simplifiée de l'amende forfaitaire n'est pas applicable.

Le présent article propose de revenir sur ce dernier point.

b) Le mécanisme de l'amende forfaitaire

La procédure simplifiée de l'amende forfaitaire a été instaurée par une loi du 6 juillet 1966 puis sensiblement transformée par la loi du 30 décembre 1985 relative à la simplification des procédures et à l'exécution des décisions pénales.

En l'état du droit, pour un certain nombre de contraventions désignées par décret en Conseil d'Etat (articles R. 48-1 du code de procédure pénale et suivants), le montant de l'amende infligée au contrevenant est déterminé de manière forfaitaire par voie réglementaire, et non par le juge de police au regard des circonstances de l'espèce.

Aux termes des articles 529 et suivants du code de procédure pénale, le montant de l'amende forfaitaire peut être acquitté soit entre les mains de l'agent verbalisateur au moment de la constatation de l'infraction, soit auprès du service indiqué dans l'avis de contravention dans un délai de quarante-cinq jours.

A défaut de paiement ou de requête en exonération présentée dans ce délai, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public.

Le contrevenant dispose d'un recours devant le tribunal de police. Toutefois, l'article 530-1 du code de procédure pénale dispose qu'en cas de condamnation, « l'amende prononcée par le tribunal ne peut être inférieure au montant de l'amende forfaitaire ».

La procédure de l'amende forfaitaire est par ailleurs exclusive de l'application des règles de la récidive .

La Cour de cassation a jugé cette procédure compatible avec le droit d'accès à un tribunal garanti par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme 115 ( * ) .

Il convient enfin de relever que la procédure forfaitaire constitue une simple option et qu'elle n'interdit pas au ministère public d'exercer l'action publique dans les conditions de droit commun.

2 - Les préconisations formulées par la commission présidée par M. Serge Guinchard

Constatant que la procédure de l'amende forfaitaire est une procédure simple et efficace, particulièrement adaptée à des contentieux de masse sans grande complexité, la commission présidée par le recteur Guinchard a préconisé son extension à certaines contraventions de cinquième catégorie.

Ainsi, « la commission a considéré que l'exclusion des contraventions de la cinquième classe de cette procédure ne se justifiait plus. En effet, cette procédure a été limitée historiquement aux contraventions des quatre premières classes car les cinquièmes classes étaient punies de peine d'emprisonnement, ce qui n'est plus le cas depuis la réforme du Code pénal.

La commission a donc cherché à dégager les principes susceptibles de régir la répartition entre les contraventions pouvant être forfaitisées et les autres. Trois idées directrices sont apparues :

Premièrement, la procédure d'amende forfaitaire n'est pas adaptée aux contraventions pouvant comporter des victimes puisque celles-ci sont exclues par principe de cette procédure.

Deuxièmement, les contraventions comportant des éléments constitutifs difficiles à caractériser ne doivent pas non plus être forfaitisées. Ces contraventions nécessitent la rédaction de procès-verbaux précis, et non d'un simple timbre-amende, permettant de mettre en évidence la matérialité de l'infraction en cas de poursuite devant le tribunal. La forfaitisation suppose également des incriminations simples afin d'encadrer les pouvoirs des agents de constatation, qui pourront eux-mêmes sanctionner les contrevenants, et afin de réduire au maximum le nombre de recours.

Troisièmement, la commission a considéré que la procédure forfaitaire n'était pas opportune pour certaines infractions symboliques telles que l'intrusion dans un établissement scolaire ou l'atteinte volontaire à la vie d'un animal. Il n'est pas possible de prévoir un « forfait » pour ces infractions pour lesquelles la tenue d'une audience paraît plus appropriée.

Enfin, il est apparu nécessaire de tenir compte de la particularité des contraventions de cinquième classe devenant délictuelles en cas de récidive. En effet, la forfaitisation ne permet pas de prendre en compte la récidive. Si cette procédure demeure bien évidemment une simple possibilité et peut être écartée par le ministère public en cas de récidive, la commission a préféré exclure la forfaitisation lorsque la récidive entraîne un changement de nature de l'infraction » 116 ( * ) .

Le rapport de la commission Guinchard préconise ainsi par exemple la forfaitisation des contraventions suivantes :

- en droit pénal général : tapage nocturne ou abandon d'épave de véhicule. En revanche, la commission a écarté l'idée de forfaitiser des infractions complexes, telles que l'atteinte à l'état-civil des personnes ou les violences ayant entraîné une ITT inférieure à huit jours par exemple ;

- en matière routière : ensemble des contraventions de cinquième catégorie, à l'exception des excès de vitesse d'au moins 50 km/h, qui constituent un délit en cas de récidive, et des incitations par l'employeur ou le donneur d'ordre à la commission d'infractions au code de la route ou au non-respect des dispositions réglementaires sur les temps de conduite ;

- en matière de coordination des transports : contraventions de la cinquième classe en matière de temps de conduite et de repos des transporteurs routiers, d'activité de transporteur et de transport de matières dangereuses ;

- en droit de l'environnement : infractions relatives à l'eau, à la protection des espaces naturels (parcs nationaux et réserves naturelles), à la protection de la faune et de la flore sauvages et la pêche en eau douce. En matière maritime, contraventions de cinquième classe dans le domaine de la navigation intérieure, de la police en mer et de la pêche. En revanche, la commission a considéré que l'extension de la forfaitisation n'était pas opportune pour les infractions de chasse compte tenu du contexte particulier qui entoure les opérations de police en cette matière.

3 - Une extension du champ de la procédure de l'amende forfaitaire aux contraventions de la cinquième catégorie

Suivant ces préconisations, l'article 22 du projet de loi propose de modifier l'article 529 du code de procédure pénale afin de permettre au pouvoir réglementaire d'avoir recours au mécanisme de la forfaitisation pour certaines contraventions de cinquième classe - la liste de ces dernières devant être définie par décret en Conseil d'Etat.

Votre commission approuve ces dispositions qui permettront de poursuivre de façon plus efficace certaines infractions simples.

Toutefois, dans la mesure où l'utilisation de la procédure de l'amende forfaitaire fait échec à l'application des règles de la récidive, votre commission, dans un souci de cohérence du droit pénal, a adopté un amendement de son rapporteur tendant à exclure expressément de cette procédure les contraventions de cinquième catégorie qui deviennent un délit lorsque les faits sont commis en état de récidive légale.

Votre commission a adopté l'article 22 ainsi modifié .


* 115 Cass., 2 ème chambre civile, 16 mai 2002.

* 116 Rapport précité, pages 133-134.

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