2. Le problème fondamental : des fonds trop « petits » pour rassurer les marchés sur la solvabilité de l'Italie et de l'Espagne

La crainte d'une augmentation autoréalisatrice des taux auxquels empruntent les Etats espagnol et italien s'explique par le fait que, en raison de la disparition du risque de taux de change, la seule différence entre les obligations souveraines des différents Etats de la zone euro est le risque de défaut, aussi faible soit-il au départ. Ce risque existe du fait du niveau élevé atteint par les dettes publiques, de plus de 80 points de PIB en 2012 dans les principaux Etats - Espagne excepté (70 points de PIB).

La dette publique des Etats de l'Union européenne, selon la Commission européenne

(en points de PIB)

2010

2011

2012

Estonie

6,6

6,1

6,9

Luxembourg

18,4

17,2

19

Slovénie

38

42,8

46

Slovaquie

41

44,8

46,8

Finlande

48,4

50,6

52,2

Pays-Bas

62,7

63,9

64

Chypre

60,8

62,3

64,3

Malte

68

68

67,9

Espagne

60,1

68,1

71

Autriche

72,3

73,8

75,4

Allemagne

83,2

82,4

81,1

France

81,7

84,7

86,8

Belgique

96,8

97

97,5

Portugal

93

101,7

107,4

Irlande

96,2

112

117,9

Italie

119

120,3

119,8

Grèce

142,8

157,7

166,1

Zone euro

85,4

87,7

88,5

Bulgarie

16,2

18

18,6

Suède

39,8

36,5

33,4

Roumanie

30,8

33,7

34,8

République tchèque

38,5

41,3

42,9

Lituanie

38,2

40,7

43,6

Danemark

43,6

45,3

47,1

Lettonie

44,7

48,2

49,4

Pologne

55

55,4

55,1

Hongrie

80,2

75,2

72,7

Royaume-Uni

80

84,2

87,9

Union européenne

80,2

82,3

83,3

Source : Commission européenne, prévisions économiques de mai 2011

Le risque est accru par le fait que, contrairement à la Réserve fédérale des Etats-Unis, qui achète massivement des bons du Trésor, la BCE, contrainte par l'article 123 du TFUE - qui lui interdit de financer les Etats, ce qui l'empêche en particulier d'acquérir des titres sur le marché primaire -, considère être chargée presque exclusivement de la lutte contre l'inflation, et ne s'estime donc pas investie d'une fonction de prêteur en dernier ressort. Son programme d'achat de titres sur le marché secondaire, dont il sera question plus loin, correspond ainsi à des sommes relativement faibles, et est jugé peu crédible par les marchés. Ceux-ci demandent donc aux Etats de la zone euro jugés les plus fragiles une « prime de risque », qui accroît à son tour le risque de défaut, suscitant un cercle vicieux.

Si la Grèce s'est rendue d'elle-même insolvable, l'Irlande et le Portugal le sont devenus du fait d'une telle augmentation autoréalisatrice des taux.

Le problème est que si les dispositifs mis en place, de 750 milliards d'euros au total 9 ( * ) , auraient en théorie permis de financer, pendant les trois prochaines années, les « petits » Etats périphériques et l'Espagne, il faudrait les doubler pour la seule Italie. Comme il est probable qu'une extension de la crise frapperait à la fois l'Italie et l'Espagne, le dispositif actuel - dimensionné pour faire face au besoin de la seule Espagne - ne parvient à rassurer les marchés sur aucun de ces deux pays.

C'est cette absence de « filet de sécurité » pour l'Italie et l'Espagne qui explique que ces Etats connaissent depuis le mois de juillet une tendance à l'augmentation de leurs taux d'intérêt, passés d'environ 5 % à 6 %. La BCE réalise depuis le mois d'août des achats de titres italiens et espagnols sur le marché secondaire, mais les montants sont faibles, et elle fait preuve de telles réticences que cela ne permet pas de rassurer les marchés.


* 9 Fonds européen de stabilité financière (FESF) : 440 milliards d'euros ; mécanisme européen de stabilisation financière (MES) : 60 milliards d'euros ; contribution potentielle du FMI de 250 milliards d'euros.

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