VI. UNE MESURE INJUSTE, QUI ENTRAÎNERA UNE HAUSSE DES PRIX

Le débat sur l'éventuel impact inflationniste de la « TVA anti-délocalisations » relève souvent de l'acte de foi. Dans la mesure où, comme on l'a vu, un supplément d'inflation pourrait significativement réduire l'efficacité da la mesure, on s'efforcera ci-après d'apporter quelques éléments d'analyse objectifs.

A. L'IMPACT COMPTABLE SUR L'INFLATION D'UNE AUGMENTATION DE 1,6 POINT DU TAUX NORMAL DE TVA : 0,6 POINT

On pourrait penser a priori que si le taux normal de TVA augmente de 1,6 point, toutes choses égales par ailleurs, l'inflation (c'est-à-dire la croissance de l'indice des prix à la consommation des ménages) s'en trouve accrue de 1,6 point.

En réalité, même selon une approche purement statique, il n'en est rien. Tout d'abord, le passage du taux normal de 19,6 % à 21,2 % représente, pour le prix des biens concernés, une augmentation de seulement 1,3 % 152 ( * ) . Ensuite, la TVA repose seulement sur 60 % de la consommation, et le taux normal de TVA seulement sur 45 % de la consommation 153 ( * ) .

Ainsi, si les entreprises ne réduisent pas leurs prix hors taxes et si les salariés n'obtiennent pas des salaires plus élevés en conséquence de la hausse des prix, une augmentation de 1,6 point du taux normal de TVA augmente l'inflation de « seulement » 0,6 point .

B. UN SUPPLÉMENT D'INFLATION DE L'ORDRE DE 0,5 POINT ?

Cet impact inflationniste potentiel de 0,6 point constitue une « limite haute ». En effet, il paraît peu vraisemblable que, dans la conjoncture économique actuelle, une spirale « prix-salaires » s'enclenche.

Cependant il est peu probable que, comme le Gouvernement l'affirme, l'impact inflationniste soit nul. Votre rapporteure générale juge plus réaliste de tabler, avec la majorité des économistes, sur un supplément d'inflation de l'ordre de 0,5 point .

1. Selon le Gouvernement, le dispositif n'aurait pas d'impact inflationniste

Dans l'évaluation préalable de l'article 1 er du présent projet de loi, le Gouvernement écrit :

« D'une manière générale, le Gouvernement estime que l'augmentation de 1,6 point de TVA n'aura pas d'impact significatif sur les prix pour trois raisons :

« - les biens et services soumis aux taux réduits de TVA ou exonérés de TVA représentent 60 % de la consommation des ménages. Ils ne sont pas touchés par la hausse de la TVA et bénéficient, pour ceux qui sont produits et/ou distribués en France, d'une baisse du coût du travail. Dès lors, leur prix devrait baisser.

« - la baisse des cotisations patronales « famille » permet aux entreprises et services de baisser leurs prix hors taxes sans grever leurs marges, ce qui compense pour les produits soumis au taux de 19,6 % le relèvement de la TVA ;

« - les seuls produits qui seraient susceptibles de subir une hausse de prix sont les produits taxés à 19,6 % et importés. Pour autant, dans un contexte de faible croissance (révisée à 0,5 % pour 2012), le risque inflationniste est traditionnellement limité et, dans un marché national fortement concurrentiel, les entreprises n'ont pas intérêt à augmenter leurs prix de vente, sous peine de perdre des parts de marché. »


* 152 Le prix des biens concernés passe de 119,6 à 121,2, ce qui représente une augmentation de 1,3 %.

* 153 Selon les données du ministère de l'économie, des finances et de l'emploi, augmenter tous les taux de TVA d'un point rapporte seulement 9 milliards d'euros, et augmenter son seul taux normal rapporte 6,5 milliards d'euros. Il en résulte que l'assiette de la TVA est de l'ordre de 900 milliards d'euros, et celle du taux normal de l'ordre de 650 milliards d'euros. La consommation effective des ménages est quant à elle de l'ordre de 1 500 milliards d'euros.

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