Rapport n° 670 (2011-2012) de M. Jean-Louis CARRÈRE , fait au nom de la commission des affaires étrangères et de la défense, déposé le 17 juillet 2012

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N° 670

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2011-2012

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 juillet 2012

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant la ratification du traité d'amitié et de coopération entre la République française et la République islamique d'Afghanistan (PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE),

Par M. Jean-Louis CARRÈRE,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Louis Carrère , président ; MM. Didier Boulaud, Christian Cambon, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Mme Josette Durrieu, MM. Jacques Gautier, Robert Hue, Xavier Pintat, Yves Pozzo di Borgo, Daniel Reiner , vice-présidents ; Mmes Leila Aïchi, Hélène Conway Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Gilbert Roger, André Trillard , secrétaires ; MM. Pierre André, Bertrand Auban, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Pierre Bernard-Reymond, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Pierre Charon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Jean-Pierre Demerliat, Mme Michelle Demessine, MM. André Dulait, Hubert Falco, Jean-Paul Fournier, Pierre Frogier, Jacques Gillot, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Gournac, Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Gérard Larcher, Robert Laufoaulu, Jeanny Lorgeoux, Rachel Mazuir, Christian Namy, Alain Néri, Jean-Marc Pastor, Philippe Paul, Jean-Claude Peyronnet, Bernard Piras, Christian Poncelet, Roland Povinelli, Jean-Pierre Raffarin, Jean-Claude Requier, Richard Tuheiava, André Vallini.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

663 et 671 (2011-2012)

« La chronique de l'Afghanistan depuis un demi-millénaire est aussi, voire avant tout, celle d'une résistance énigmatique et tenace contre tous les empires, où les montagnards opposent aux envahisseurs la plus déroutante des techniques de lutte : l'éparpillement en tribus et en clans, le refus de collaborer. ».

« Le royaume de l'insolence », Michael Barry

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La France est engagée depuis plus d'une décennie aux côtés du peuple afghan. Elle s'apprête, aujourd'hui, à renouveler cet engagement, pour les 20 années à venir, autour d'une nouvelle vision, orientée vers le développement économique et la stabilité à long terme.

Le présent projet de loi de ratification du traité de coopération et d'amitié, signé entre nos deux pays le 27 janvier dernier, doit permettre à notre engagement de franchir cette nouvelle étape, pour aider l'Afghanistan à retrouver la pleine maîtrise de son destin, pour lui permettre de préserver par lui-même sa stabilité, sa sécurité, et d'assurer sa prospérité économique et sociale. C'est tout le sens de la « décennie de la transformation » qui s'ouvre désormais.

Ce magnifique pays, l'un des plus pauvres du monde, livré aux fléaux de la corruption, du terrorisme et du trafic de drogue, martyrisé par des décennies de guerre, dispose d'indéniables atouts pour son décollage. Le chemin sera long, mais il n'y en a pas d'autre. La France doit désormais concentrer ses efforts sur la construction de la paix et la prise en main de leur destin par les Afghans. C'est l'objet du présent projet de loi.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'AFGHANISTAN, PAYS MARTYR AU CoeUR DE L'ASIE CONTINENTALE, À LA CROISÉE DES CHEMINS

A. UN PAYS MARTYR AU CoeUR DE L'ASIE CONTINENTALE...

1. Un pays martyr...
a) Trois décennies de guerre et de malheur

L'Afghanistan, qui a connu un début de développement à partir des années 1930, était encore un pays rural, à la veille de l'invasion soviétique, avec des élevages extensifs de chèvres et de moutons sur des pâturages naturels qui occupaient la moitié de la superficie du pays et une culture réputée de fruits et de céréales, exportée au-delà de ses frontières.

Les trente ans de guerre qui ont suivi l'invasion soviétique de 1979 ont totalement détruit l'agriculture et l'artisanat de ce pays. La production agricole a diminué de 60 % entre 1979 et 2004 et le cheptel a été divisé par deux. Plus de la moitié des terres cultivées est retournée à l'état de jachère.

Les atrocités de l'invasion soviétique, de la guerre civile et de l'arrivée au pouvoir du terrible régime des talibans auraient fait un à deux millions de morts, trois millions de blessés et un million et demi d'infirmes.

La population porte les stigmates de ces années de malheur. L'invasion soviétique, puis la guerre civile et l'arrivée des talibans ont provoqué un exode massif de population, estimé à 6 ou 8 millions, dont 4 à 5 millions au Pakistan et 2 à 3 millions en Iran.

Bien souvent, les familles sont déstructurées, avec des femmes veuves ou ayant à leur charge des maris invalides.

Évaluée 1 ( * ) à environ 30 millions d'habitants en 2011, la population a quasiment doublé depuis 1979, sous l'effet d'un taux de fertilité élevé (5,4 enfants par femme). Le taux de mortalité infantile est l'un des plus élevés du monde avec 16 % d'enfants qui meurent avant l'âge d'un an. Un enfant sur 4 n'atteindrait pas l'âge de 5 ans et l'espérance de vie à la naissance serait de 44 à 48 ans.

Le taux d'alphabétisation s'établirait à 28 % en moyenne : 43 % pour les hommes mais seulement 12 % pour les femmes.

Tandis que la population continue de croître de 2,8 % par an, le pays reste parmi les 10 plus pauvres du monde , avec 36 % de ses habitants sous le seuil de pauvreté et plus 50 % qualifiés de vulnérables, selon les critères de la Banque Mondiale.

Le territoire afghan est marqué en profondeur par des années d'atrocités : plus de la moitié des districts est infestée de mines et autres engins explosifs, faisant des centaines de victimes chaque mois, dont la moitié sont des enfants. D'après le programme de déminage des Nations unies, il y aurait 10 millions de mines laissées à l'abandon, dont 8 millions de mines anti personnel.

b) L'intervention alliée suite aux attentats de 2001

L'intervention américaine, puis de l'OTAN, en Afghanistan, à partir de 2001, à été déclenchée en réaction aux attentats du 11 septembre pour faire en sorte que ce pays ne soit plus une base pour le terrorisme international et pour Al Qaïda.

Quels ont été à l'origine les objectifs de notre intervention en Afghanistan, décidée par le Président Chirac et le Premier ministre Lionel Jospin ?

Il s'agissait initialement de lutter contre le terrorisme.

Les finalités de notre engagement se sont peu à peu transformées, et il faut le reconnaître, un peu brouillées aux yeux de l'opinion publique, sans doute à compter de l'été 2008, en partie sous l'effet d'une insuffisante communication.

Finalement, notre mission en Afghanistan aura été double, comme l'a rappelé 2 ( * ) le Président de la République, François Hollande, chef des armées, le 14 juin dernier lors de l'Hommage national aux 4 soldats tombés en Afghanistan : elle aura consisté à la fois à : « Lutter contre le fanatisme et la haine aveugle et aider fraternellement un peuple à retrouver le chemin de sa souveraineté ».

Le dispositif militaire international actuellement déployé en Afghanistan représente environ 130 000 soldats, originaires de 49 pays et membres de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) . Cette force est composée pour plus des deux tiers de soldats américains. 24 États de l'Union Européenne y participent . Couvrant l'ensemble du territoire afghan, le déploiement de la FIAS en province s'appuie sur des bases militaires et des « Provincial Reconstruction Teams » (PRT), équipes civilo-militaires de reconstruction, souvent multinationales.

La FIAS a été créée par le Conseil de sécurité des Nations unies en décembre 2001 (résolution 1386). Elle dispose d'un mandat renouvelé annuellement par résolution du conseil de sécurité. La dernière en date, la résolution 2011, a été votée à l'unanimité des membres du CSNU le 12 octobre 2011. L'OTAN assure depuis août 2003 le commandement de la FIAS, qui est dirigée depuis le 18 juillet 2011 par le général américain John Allen, qui a remplacé le général David Petraeus. Parallèlement à la FIAS, les opérations de la coalition antiterroriste « Liberté immuable » (environ 17 000 hommes, essentiellement américains) se poursuivent sur la base de l'article 51 de la Charte des Nations unies (droit de légitime défense).

RETOUR SUR 11 ANS D'OPÉRATIONS EN AFGHANISTAN

- En octobre et novembre 2001 : une Coalition principalement américaine chasse le régime taliban, sans toutefois éradiquer le mouvement Al Qaïda qui se replie au Pakistan. La Conférence de Bonn installe le régime du Président Karzaï en décembre 2001. La FIAS s'engage aux côtés des Américains, sous mandat de l'ONU.

- En 2002 et 2003, les opérations se limitent au strict minimum face à une insurrection encore faible et divisée. A partir de 2003, date de l'offensive américaine en Irak, les insurgés montent régulièrement en puissance face à une double coalition (FIAS et opération Enduring Freedom-OEF) qui se renforce progressivement.

- A partir de 2006, l'insurrection, qui tire les leçons des combats en Irak, se lance dans des opérations sur tout le territoire et la guerre franchit une nouvelle étape, en termes de violence, avec la multiplication des attaques indirectes (engins explosifs improvisés, roquettes) en particulier. C'est aussi la période des offensives talibanes de grande ampleur (siège de Sangin par exemple)

- En 2008, la Coalition compte 70 000 soldats, dont 17 000 au titre d'OEF (opération « enduring freedom » ou « liberté immuable »). La violence franchit une nouvelle étape (embuscade d'Ouzbin et siège de Wanat, mais aussi quasi-abandon du Nouristan après les combats de Kamdesh en octobre).

- En 2009, la FIAS compte 113 000 soldats. En mars 2009, une nouvelle stratégie est rendue publique, centrée autour du contrôle des populations (« gagner les coeurs et les esprits ») et intégrant des volets « gouvernance » et « développement ». Le corollaire de cette évolution doctrinale est un renforcement important des effectifs militaires : le surge.

- En 2010, la coalition atteint un effectif de plus de 140 000 hommes. Toutefois, la décision est prise au sommet de l'OTAN à Lisbonne en novembre que la Coalition aura quitté le territoire en 2014 ;

- Lors du sommet de Chicago en mai 2012, les chefs d'État des pays de la FIAS ont confirmé la stratégie et le calendrier retenus lors du Sommet de Lisbonne, d'un transfert de responsabilités aux forces de sécurité afghanes d'ici la mi-2013, les troupes passant alors à un rôle de soutien jusqu'à leur retrait à la fin 2014.

D'après les chiffres publiés par l'OTAN, la Force internationale d'assistance et de sécurité (FIAS) totalise au 10 janvier 2012 130.386 personnels (soldats et formateurs), auxquels s'ajoutent 23.000 soldats américains sur les 33.000 déployés initialement lors du Surge en 2009.

Parmi les 49 nations contributrices en personnels, les cinq pays les plus représentés numériquement regroupent à eux seuls plus de 86 % des effectifs totaux. La France dispose quant à elle d'environ 3 400 militaires sur le terrain.

A l'heure actuelle, les effectifs déployés par les autres membres de la coalition sont les suivants :

Effectif total des autres États de la coalition en juillet 2012

28 États membres de l'OTAN

Effectifs en juillet 2012

ALBANIA

334

BELGIUM

594

BULGARIA

645

CANADA

897

CROATIA

347

CZECH REPUBLIC

530

DENMARK

692

ESTONIA

163

GERMANY

4,779

GREECE

115

HUNGARY

355

ICELAND

2

ITALY

4,162

LATVIA

184

LITHUANIA

284

LUXEMBURG

10

NETHERLANDS

518

NORWAY

568

POLAND

2,611

PORTUGAL

157

ROMANIA

1,840

SLOVAKIA

343

SLOVENIA

81

SPAIN

1,658

TURKEY

1,344

UNITED KINGDOM

11,447

UNITED STATES

65,679

ÉTATS NON MEMBRES DE L'OTAN

EFFECTIFS EN JUILLET 2012

ARMENIA

126

AUSTRALIA

1,866

AUSTRIA

3

AZERBAIDJAN

93

BAHRAIN

98

BOSNIE

59

EL SALVADOR

12

FINLAND

201

GEORGIA

806

IRELAND

7

JORDAN

0

KOREA

350

FYROM (MACEDONIA)

164

MALAYSIA

46

MONGOLIA

161

MONTENEGRO

39

NEW ZEALAND

154

SINGAPORE

31

SWEDEN

507

TONGA

55

UKRAINE

17

EMIRATS ARABES UNIS

0

2. ...au coeur de l'Asie continentale

État enclavé, l'Afghanistan est entouré au nord par le Turkménistan, l'Ouzbékistan et le Tadjikistan ; à l'ouest par l'Iran ; au sud et à l'est par le Pakistan ; au nord-est, le corridor de Wakhan relie le pays au Xinjiang chinois.

Le centre de l'Afghanistan est occupé par le massif de l'Hindou-Kouch, prolongement occidental de l'Himalaya. Plus de la moitié du territoire est recouvert de hauts plateaux et de montagnes. L'altitude moyenne du pays est de 1.200 mètres, avec un point culminant à 7.500 mètres ; Kaboul est à 1.800 mètres d'altitude. L'autre partie se partage entre des plaines fertiles, des steppes, quelques forêts, des marécages et des déserts. Le climat, continental, est semi-aride et quasi désertique.

Situé au carrefour de l'Asie centrale , du sous-continent indien et du Moyen-Orient, l'Afghanistan a été, au cours de l'histoire, le point de passage de nombreuses invasions et, jusqu'à aujourd'hui encore, le théâtre de rivalités internationales.

« L'aire culturelle afghane... est le carrefour des routes de la soie et des épices et abrite depuis la protohistoire une civilisation cosmopolite. L'Islam, arrivé là depuis dix siècles au moins, y est encore le ferment de l'unité nationale, en Afghanistan comme au Pakistan, créé en 1947, deux pays entre lesquels la question pachtoune suscita des crises répétées. La position de verrou continental de l'Asie qu'occupe l'Afghanistan lui confère une situation essentielle. Cette entité politique fondée en 1747 a précipité la chute de l'URSS... Comment expliquer que ce pays, grand comme la France, tienne un rôle historique aussi considérable ? » 3 ( * )

L'Afghanistan 4 ( * ) est composé d'une mosaïque de peuples qui vivent à la fois en Afghanistan et dans les pays voisins. Les Pachtounes sont ainsi en Afghanistan et au Pakistan. Le sentiment national peut apparaître d'autant plus diffus que certaines ethnies sont traditionnellement ennemies, comme les Pachtounes et les Tadjiks, mais l'État afghan constitue pourtant une réalité, historiquement fondée sur l'autonomie de tribus attachées à leurs traditions , méfiantes à l'égard d'un pouvoir central, et sur l'intérêt des grands empires moghol, persan et chinois, puis plus tard britannique et russe, de disposer d'un Etat tampon en Asie centrale.

Le fait ethnique explique en partie la dimension nécessairement régionale du conflit, même si d'autres facteurs, comme la rivalité indo pakistanaise au Cachemire, la volonté pakistanaise d'un axe de profondeur stratégique en Afghanistan ou le tracé du gazoduc entre le Turkménistan, l'Afghanistan, le Pakistan et l'Inde, vital pour cette dernière, entrent également en jeu.

Le renforcement de la coopération régionale et le maintien d'un fort engagement des partenaires internationaux, notamment occidentaux, sont des priorités de la politique extérieure afghane. Kaboul a ouvert des représentations diplomatiques ou consulaires dans plus de 80 pays.

L'Accord sur les relations de bon voisinage signé à Kaboul le 22  décembre 2002 entre l'Afghanistan et les six pays limitrophes est destiné à favoriser des relations de confiance dans cette région. Tous les voisins de l'Afghanistan ont aujourd'hui un intérêt objectif à sa stabilité. La lutte contre le trafic de drogue et le terrorisme sont des priorités pour la plupart d'entre eux.

Le Pakistan entretient historiquement des relations difficiles avec l'Afghanistan qui l'accuse d'abriter sur son territoire des bases de retrait, de ravitaillement, de recrutement et d'entraînement pour des groupes armés qui combattent le gouvernement afghan. Par ailleurs, un différend frontalier oppose les deux pays au sujet de la ligne Durand, reconnue par le Pakistan, mais pas par l'Afghanistan (la France a reconnu cette frontière en 1954 par un accord signé dans le cadre de l'Organisation du Traité de l'Asie du Sud-Est). Les deux États ont pourtant de solides intérêts croisés : le Pakistan est le principal partenaire commercial de l'Afghanistan et la voie de transit naturelle pour la grande majorité des importations afghanes. Islamabad et Kaboul ont entamé un rapprochement après la crise qui s'était ouverte après l'attentat du Pr. Rabbani, le chef du haut conseil pour la paix, en septembre 2011. Les deux pays se sont rapprochés dans leur vision d'un dialogue inter-afghan inclusif, malgré des crispations telles que l'infiltration récente, en territoire pakistanais, d'un groupe de « militants » provoquant la mort de 17 soldats pakistanais, et des tirs de roquette en représailles. Le Pakistan abrite encore environ 2 millions de réfugiés afghans.

L'Iran et l'Afghanistan entretiennent des relations constructives et cherchent à développer leurs échanges économiques, à partir de l'est de l'Afghanistan au sein duquel l'Iran jouit d'une grande capacité d'influence. La lutte contre le trafic de drogue, un fléau en Iran, et la situation de l'importante minorité chiite afghane sont les deux sujets prioritaires pour Téhéran. Près d'un à deux millions de réfugiés, ainsi que plusieurs centaines de milliers d'immigrés afghans, souvent clandestins, vivent en Iran.

Les pays d'Asie Centrale et la Russie entretiennent des relations plus distantes avec Kaboul. La lutte contre le trafic de drogue, le terrorisme et l'extrémisme religieux font partie de leurs priorités. Le Nord de l'Afghanistan est peuplé de turcophones (Ouzbeks, Turkmènes), qui représentent environ 12 % de la population afghane.

L'Inde cultive traditionnellement des relations étroites avec Kaboul et lui apporte une aide importante et diversifiée. Les échanges bilatéraux se sont beaucoup renforcés depuis 2002. L'Inde a signé avec l'Afghanistan, le 4 octobre 2011, un partenariat stratégique. New-Delhi a par ailleurs obtenu, la même année, le contrat d'exploitation des mines de fer de Hajigak (important gisement à 130 km à l'ouest de Kaboul).

La Chine appuie d'une manière générale les efforts internationaux de stabilisation de l'Afghanistan mais ne souhaite pas s'engager directement, ni politiquement ni militairement. Sa présence économique est importante, comme l'illustre le projet d'exploitation de la mine de cuivre d'Aynak, plus gros investissement jamais réalisé en Afghanistan. Le président Karzaï s'est rendu à Pékin du 5 au 8 juin 212 pour participer au sommet de l'Organisation de coopération de Shangai, dont il a été admis pays observateur. A cette occasion a été annoncée la conclusion d'un « partenariat stratégique et de coopération » afghano-chinois, qui devrait notamment conduire à un renforcement des relations économiques, tout particulièrement dans les domaines de l'énergie, des infrastructures, de l'ingénierie, des infrastructures et de l'agriculture. La Chine a annoncé un renforcement de son aide bilatérale, à 180 millions d'euros en 2012.

Lors de la Conférence d'Istanbul du 2 novembre 2011, l'Afghanistan et les États de la région ont affirmé leur volonté de prendre des mesures de confiance pour assurer la paix et la sécurité régionales. A l'initiative de la Turquie , cette conférence, et la conférence de suivi à Kaboul en juin dernier, permet de faire progresser le dialogue régional sur les sujets sensibles du terrorisme et de la drogue ; c'est la principale dynamique de coopération régionale. Ce canal de dialogue, autour de la Turquie qui a su jouer un rôle de médiation régionale, associe tous les partenaires régionaux influents, y compris la Chine, l'Inde, le Pakistan et la Russie.

Le 14 juin 2012 a eu lieu à Kaboul la première Conférence de suivi du processus d'Istanbul, à laquelle a participé le ministre délégué français chargé du développement, Pascal Canfin. Les discussions ont porté principalement sur la mise en place de mesures de confiance dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue, mais aussi sur le développement du commerce, des coopérations culturelles et scientifiques et la poursuite du développement des infrastructures régionales.

La France a marqué son intérêt pour participer à trois groupes de travail : lutte contre le terrorisme, lutte contre les stupéfiants, gestion des catastrophes naturelles.

B. ... AUJOURD'HUI À LA CROISÉE DES CHEMINS

1. Le retrait programmé des troupes de la coalition
a) Le retrait des forces françaises combattantes dès fin 2012
(1) Un engagement du Président de la République

Conformément à l'engagement pris devant les Français par le Président de la République, les forces françaises combattantes se retireront d'Afghanistan avant la fin de l'année 2012.

Actuellement, 3 400 militaires français sont engagés, pour des missions de sécurisation et d'appui à l'armée afghane, de formation en école et sur le terrain, et de soutien.

Conformément aux annonces lors du Sommet de l'OTAN à Chicago, les 20 et 21 mai 2012, il a été décidé :

- un départ des forces combattantes d'ici la fin de l'année 2012 ;

- le maintien d'une présence militaire en 2013 afin de permettre la manoeuvre logistique de retrait des matériels français, en toute sécurité ;

- la poursuite de la mission de formation des forces afghanes dans le cadre de la FIAS jusqu'en 2014.

Dans le cadre du processus de transition et des engagements de la France au sein de la force de l'OTAN et vis-à-vis des Afghans, les armées vont procéder, d'ici la fin de l'année 2012, au retrait des dispositifs conduisant des missions de combat, soit environ 2 000 militaires :

- dans le cadre de la transition de la Surobi puis de la Kapisa, désengagement de la brigade La Fayette et des conseillers insérés au sein de l'armée afghane ;

- fin du désengagement du détachement d'avions de combat déployé à Kandahar, déjà réduit fin 2011.

A la fin de l'année 2012, 2 000 militaires français auront été désengagés. Le désengagement de leurs matériels et équipements prendra plus de temps et s'étalera sur 2013.

Après le désengagement de la brigade La Fayette et du détachement aérien de Kandahar, il restera au sein de la FIAS en Afghanistan environ 1 400 militaires français, ceux qui oeuvrent directement au profit de la coalition et ceux qui opèrent sur le désengagement logistique français et sa protection. Les éléments logistiques et de protection seront désengagés dès le courant de l'année 2013, au fur et à mesure des avancées de la manoeuvre logistique.

Le dispositif français qui sera directement engagé au profit de la FIAS, aux côtés des Afghans, jusqu'à la fin 2014, comptera environ  400 militaires :

- des militaires français insérés dans les états-majors de la coalition (une centaine) ;

- les militaires qui arment l'hôpital militaire à Kaboul qui fournit un soutien santé au profit de la coalition et des Afghans (une centaine) ;

- le dispositif français de formation des militaires afghans qui poursuit sa mission jusqu'au transfert de la responsabilité des écoles militaires aux Afghans (environ 150 militaires).

Par ailleurs, environ un millier de militaires seront directement engagés dans la mission de désengagement logistique , répartis entre :

- le bataillon logistique qui assure le retrait et le retour des matériels des forces françaises (il reste plus de 900 véhicules dont 500 blindés, des hélicoptères, près de 1 400 conteneurs) ;

- les éléments de protection qui assurent la sécurité du dispositif français restant, avec des éléments terrestres et un détachement hélicoptère qui sera adapté au nouveau format.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur, le dispositif de protection stricto sensu devrait comprendre environ  300 hommes destinés à renforcer la compagnie de garde actuelle de l'emprise de WAREHOUSE pour être en mesure d'assurer exclusivement la protection des troupes françaises (insérés, formateurs, agents civils) et de participer aux escortes du bataillon logistique.

Votre commission attirera l'attention du gouvernement sur la priorité absolue qui doit être la sienne de préserver la sécurité de nos soldats : la sécurité doit primer sur le calendrier.

Actuellement, les forces française en Afghanistan disposent encore de 900 véhicules dont environ 500 blindés, 14 hélicoptères (4 Tigre, 5 Gazelle, 3 Caracal, 2 Cougar) ; 2 avions de transport militaire C160 et près de 1 400 conteneurs . Depuis la fin de l'année 2011 et les premiers désengagements de soldats français, environ 200 véhicules et 100 conteneurs ont déjà été retirés.

Les deux voies principales de sortie actuellement utilisées sont :

- la voie aérienne directe depuis la métropole (la plus coûteuse) ; pour mémoire, le rapport du coût entre un transit strictement aérien et un transit strictement terrestre est de 4 pour 1 ;

- la voie multimodale (maritime et aérienne) via les Émirats Arabes Unis.

Le rapatriement du matériel excédentaire par ces voies a été achevé début juin 2012 et a permis de renvoyer en métropole de l'ordre de  250 véhicules et 200 containers.

Pour les autres matériels, une réflexion a été engagée pour étudier leur rapatriement à un moindre coût. Toutes les capacités (aériennes, terrestres et maritimes) et tous les itinéraires ont été envisagés afin de tisser un réseau de voies le plus dense possible, gage de liberté d'action. Plusieurs pistes sont privilégiées :

- une voie Sud par le Pakistan . Solution multimodale (voie routière et maritime). Longtemps fermée, cette option, économiquement très intéressante, serait de nouveau ouverte ;

- une solution multimodale par le Kazakhstan , par gros porteurs affrétés, puis transit par voie ferrée via le Kazakhstan et la Russie vers l'Europe. Cette option nécessiterait une extension de l'accord bilatéral de transit avec le Kazakhstan ;

- une solution terrestre (voie routière et voie ferrée) par l'Ouzbékistan ou le Kazakhstan et la Russie vers l'Europe. Cette option nécessiterait de négocier des accords de transit avec l'Ouzbékistan.

Le gouvernement a récemment nommé l'Ambassadeur Stanislas de LABOULAYE pour le suivi des accords de transit.

Estimation du coût de rapatriement d'un containeur par les différentes routes

Voies principalement aériennes :

- Voie aérienne directe Afghanistan-France : 33 à 58 000€

- Voie multimodale par les Émirats arabes unis : 21 à 30 000€

- Voie multimodale par le Kazakhstan : 11 à 16 000€

Voies principalement terrestres :

- Par le Nord : la voie Kazakhe : (aérienne puis ferrée) 11 à 16 000 € ; la voie Ouzbèke : 7 À 8 000 €

- Par le Sud : voie routière jusqu'à Karachi (Pakistan) puis voie maritime : 5 000 €.

(2) Le maintien de capacités de soutien et de formation

En 2001, l'armée afghane n'existait pas. La coalition a soutenu les ministères afghans de la défense et de l'intérieur pour la mise sur pied des forces de sécurité afghanes. L'objectif est d'atteindre 352 000 hommes fin 2012 avec 195 000 soldats (ANA) et 157 000 policiers (ANP).

La France est engagée depuis 2002 dans la montée en puissance des forces de sécurité afghanes :

- en école , plus de 150 militaires participent à la mission EPIDOTE pour former des militaires afghans dans les écoles de formation des officiers, et les écoles de formations spécialisées (blindés, renseignement, logistique...). Plus de 25 000 militaires afghans ont été formés par les militaires français depuis 2002.

- sur le terrain , environ 170 militaires français arment des équipes de conseillers, (OMLT), qui sont insérées dans les bataillons ( kandaks ) de la 3 e brigade du 201 e corps de l'armée afghane, partenaire de la brigade française La Fayette en Kapisa et Surobi.

Les équipes de conseillers militaires français, au terme de leur engagement fin 2012, auront conduit 2 brigades afghanes à l'autonomie : la 1 re brigade du 201 e corps qui a été conseillée par les militaires français de 2006 à 2009, et celle conseillée aujourd'hui.

D'après les récentes annonces gouvernementales, la France gardera, après le retrait de ses forces combattantes, la responsabilité de l'hôpital militaire de Kaboul, qui fait un travail exceptionnel. Le travail de formation, y compris de cadres militaires (gendarmerie, école...) sera poursuivi jusqu'à fin 2014. Et la France va assurer à partir du 1 er octobre 2012 la responsabilité de l'aéroport international de Kaboul .

b) Retour sur 11 ans d'engagement de nos forces armées
(1) Une double mission : lutter contre le terrorisme, promouvoir le développement

Comme l'a rappelé récemment le Président François Hollande, l'engagement des forces françaises en Afghanistan a répondu à une double finalité : lutter contre le terrorisme et promouvoir le développement.

« Notre armée s'est engagée sur le sol afghan il y a onze ans, en 2001, au lendemain des attentats qui ont cruellement frappé les Etats-Unis d'Amérique. Au nom de ces valeurs et dans le cadre de la légalité internationale, elle a combattu et contenu le terrorisme ; elle a évité que l'Afghanistan n'en devienne le sanctuaire.

« Grâce aux femmes et aux hommes qui la servent, grâce à leur patience, à leur persévérance, grâce à leur performance, notre armée a permis, associée aux forces de la coalition internationale, à l'Afghanistan de se relever et de se remettre en marche. »

(2) Un engagement opérationnel intense aux résultats reconnus, dans le cadre de la coalition

Le dispositif militaire français engagé dans le cadre des opérations en Afghanistan opérait sur le territoire afghan, mais aussi depuis Douchanbé (avions de transport) et la mer d'Oman (ravitaillement).

Opérationnelle depuis le 1 er novembre 2009, la task force La Fayette constituait l'une des cinq brigades ( Brigade Combat Team ) du Commandement régional Est de la FIAS. Elle avait pour zone d'opération le district de Surobi et la province de Kapisa à l'est et au nord-est de Kaboul.

Déployée principalement sur quatre bases ou postes avancés , elle conduisait des missions de sécurisation et de contrôle de zone, des opérations au profit de la population, ainsi que des opérations conjointes avec les forces de sécurité afghanes conseillées par des militaires français.

Comme vient de le déclarer récemment 5 ( * ) le ministre de la défense, M. Jean-Yves le Drian, « Les Français peuvent être fiers du travail réalisé pendant onze ans par notre armée . Les objectifs que s'était fixés la coalition sont atteints. L'Afghanistan n'est plus un État terroriste. Al-Qaïda a vu son pouvoir profondément affaibli, et ses chefs et ses infrastructures, comme Ben Laden, éliminés. C'est un État avec un président et une armée constituée. Qu'il y ait encore des problèmes internes de pacification, c'est évident, mais nous ne sommes plus dans la même logique. ».

Plus précisément, le dispositif français s'articulait autour de 3 composantes (terrestre, aérienne et formation).

- La brigade La Fayette ( Task Force La Fayette )

Créée le 1 er novembre 2009, elle regroupait les moyens français dans une zone de responsabilité composée de la province de Kapisa et du district de Surobi . De niveau brigade, elle était placée sous les ordres du commandement régional Est (1 ère division d'infanterie américaine) et comprenait : 2 bataillons interarmes, 1 bataillon d'hélicoptères, des appuis feux et renseignement.

Sa création s'inscrivait dans la dynamique engagée depuis 2008 avec en particulier la volonté de concentrer nos efforts dans une logique d'approche globale.

La TF LF coordonnait son action, depuis septembre 2010, avec celle du pôle stabilisation, installé à Nihjrab et subordonné à l'ambassade de France, et en charge l'action civile de la France en Kapisa / Surobi. L'approche globale se traduisait également par l'afghanisation : appuyer les forces de sécurité afghanes au travers d'un partenariat étroit à l'aide d'équipes de conseillers auprès des unités militaires et de la police.

- Le dispositif aérien

Il comprenait :

- une composante de transport tactique avec 2 C160 Transall sur l'aéroport de Douchanbé, au Tadjikistan ;

- une composante de ravitaillement en vol avec un C135 sur la base aérienne 104 d'Al Dhafra aux Emirats Arabes Unis.

- et une composante d'avions de chasse, qui a quitté le territoire afghan le 8 juillet dernier.

- La formation des forces de sécurité afghanes (ANSF)

La France participe à la formation des forces armées depuis 2002 par le détachement Epidote , composé de 126 militaires des trois armées. Les efforts français se focalisent sur l'enseignement militaire supérieur des officiers, la formation au renseignement et à la contre-ingérence et celle, plus spécialisée, des bataillons blindés afghans.

La France participe à la formation de la police afghane, sous mandat de la force de gendarmerie européenne, au sein de l'école du Wardak, au sud-ouest de Kaboul.

- Le soutien du dispositif français

L'ensemble du dispositif français bénéficie du soutien administratif et logistique de l'échelon national. Il dispose à cet effet d'un état-major, d'un bataillon de ravitaillement et de logistique et d'un hôpital militaire situé sur l'aéroport de Kaboul.

- Les insérés dans les états-majors de l'OTAN

La France est présente dans l'ensemble des grands états-majors déployés par la coalition en Afghanistan.

(3) Des coûts croissants

L'intervention en Afghanistan a, tout d'abord, des coûts financiers .

Élevés dès l'origine en raison de l'éloignement de ce théâtre d'opérations, ils n'ont cessé de croître du fait de l'attribution de matériels de plus en plus modernes (équipement « Félin »...) et de la nécessité du maintien en condition opérationnelle dans un environnement physique particulièrement éprouvant.

En 2009 puis en 2010, le théâtre afghan a constitué l'effort principal des forces armées françaises , tant sur le plan des effectifs que des moyens engagés. Mobilisant, en 2010, 44 % des effectifs consacrés aux opérations, il a représenté 56 % du surcoût des opérations extérieures.

En 2011, les surcoûts ont connu une nouvelle hausse pour atteindre 518 millions d'euros, sous l'effet de :

- l'augmentation du coût de transport stratégique ;

- la mise en place d'équipements individuels destinés à améliorer la protection du combattant et d'effets vestimentaires mieux adaptés aux spécificités climatiques de cette zone.

En 2012, le montant prévisionnel du surcoût OPEX lié à l'Afghanistan s'élève à 481 millions d'euros.

Notre engagement a aussi eu des coûts en termes d'opinion publique , dans la mesure où les pertes de vies humaines étaient de moins en moins acceptées, au fur et à mesure que croissait la « fatigue » des opérations .

Comme le soulignait, de retour de mission il y a tout juste un an, le précédent président de notre commission : « La question fondamentale qui se pose est de savoir si, comme nous l'avons connu en Algérie, la victoire militaire que revendique le commandement ne s'accompagne pas d'une défaite politique. En d'autres termes, un colonel de l'armée américaine, Dan Williams, résumait la guerre en Afghanistan en disant : « victoires tactiques, impasse stratégique ». La difficulté de la stratégie de contre-insurrection, (...) serait l'incapacité de trouver une autorité afghane crédible pour occuper l'espace créé par les succès tactiques de la FIAS. ».

De ce point de vue, l'action française en Surobi et Kapisa constituerait plutôt un contre-exemple , puisque des autorités locales, police, justice, ont pu être implantées, et les axes sécurisés, tandis que des actions de développement (électrification, eau...) étaient entreprises grâce à l'action combinée de trois acteurs : le pôle de stabilité français, les actions civilo-militaires (CIMIC) et les projets mis en oeuvre par la Provincial reconstruction team (PRT) américaine.

87 militaires français ont été tués en Afghanistan, et 700 ont été blessés depuis le début de l'intervention occidentale en 2001 , dont 9 au premier semestre 2012, parmi les plus de 2.700 morts de la force internationale. Ils ont payé de leur vie la défense, sur le territoire afghan, de nos valeurs. La France se place au 4 e rang par les pertes subies en Afghanistan.

Votre commission s'associe à l'hommage solennel que la Nation tout entière leur a rendu , par la voix du Président François Hollande, à l'Hôtel National des Invalides le 14 juin dernier :

« Le métier des armes n'est pas un métier comme les autres. Il est fait du sens du devoir, de l'amour de la Patrie, de l'esprit de sacrifice. Il appelle de la discipline et du courage. Il comporte l'acceptation du risque.

« La France doit à son armée une part éminente de sa grandeur, de son indépendance, de son rayonnement dans le monde aussi.

« Elle lui doit d'être restée la France, une Nation libre, et de pouvoir défendre l'idée qu'elle se fait de la dignité de l'Homme.

« Elle lui doit de pouvoir veiller sur son idéal.

« Tel était l'engagement de ces hommes.

« Ils sont morts pour des valeurs justes et hautes.

« Celle de la paix.

« Celle de la liberté.

« Celle de la démocratie.

« Celle de la souveraineté des peuples.

« Celles de la France. »

c) Le calendrier du retrait des forces de l'OTAN
(1) Le principe d'un transfert de responsabilité aux Afghans

L'alliance atlantique a adopté au Sommet de Bucarest (2-4 avril 2008) une stratégie qui reflète la commune détermination des alliés à rester engagés dans la durée, en inscrivant l'effort militaire dans le cadre d'une politique globale d'aide à la reconstruction , avec la perspective claire d'un transfert progressif des responsabilités aux Afghans.

Dans le prolongement des conférences de Londres (28 janvier 2010) et de Kaboul (20 juillet 2010), le Sommet de l'OTAN, à Lisbonne les 19 et 20 novembre 2010, a annoncé le lancement, au premier semestre 2011, du processus de transition vers un plein exercice des responsabilités par les autorités afghanes. L'objectif est de transférer progressivement à ces dernières, en cinq tranches, le commandement des opérations de sécurité dans tout le pays d'ici la fin 2014. Deux tranches de transfert ont déjà été engagées ; elles couvrent des villes, districts et provinces représentant la moitié de la population afghane. Avec la mise en oeuvre de la troisième tranche annoncée le 13 mai 2012, les trois-quarts de la population seront couverts par le processus de transition.

Rappel du calendrier de retrait des forces de l'OTAN :

Tranche 1 - lancée en février 2011 - 21 % de la population

Tranche 2 - lancée en novembre 2011 - 27 % de la population (total 48 %)

Tranche 3 - lancée en mai 2012 - 28 % de la population (total 76 %)

Tranche 4 - planifiée en novembre 2012.

Tranche 5 - planifiée en mai 2013 - T4+T5 24 % de la population. (total 100 %)

Le sommet de l'OTAN de Chicago (20 et 21 mai 2012) a arrêté les principales orientations relatives au rôle de l'OTAN en Afghanistan après 2014. La présence de l'OTAN après la transition ne consistera plus dans une mission de combat, mais dans un dispositif de formation des forces afghanes de sécurité.

(2) La question du financement des forces de sécurité afghanes après le retrait

En 2001, l'armée afghane n'existait pas. La coalition a soutenu les ministères afghans de la défense et de l'intérieur pour la mise sur pied des forces de sécurité afghanes. L'objectif est fixé à 352 000 hommes fin 2012 avec 195 000 soldats (objectif réalisé) et 157 000 forces de police.

La communauté internationale s'est engagée lors de la Conférence de Bonn en décembre 2011 à contribuer au financement de l'armée et de la police afghanes. Ce financement sera assuré majoritairement par les États-Unis, qui devraient y contribuer à hauteur de plus de la moitié , et l'État afghan pour 500 millions d'euros , le reste étant à répartir entre les autres pays contributeurs.

À ce jour, une somme totale de 2,3 milliards de dollars serait demandée par les États-Unis, dont environ 1,6 milliards aux pays membres de la FIAS et 750 millions aux contributeurs non membres de la FIAS.

A l'occasion du sommet de Chicago, les engagements financiers suivants ont été pris pour le soutien des forces de sécurité afghanes pour l'après 2014, notamment en matière de formation :

CONTRIBUTIONS ANNONCÉES AU SOMMET DE CHICAGO

Pays

Demandes initiales

Contributions annoncées (par an)
2015-2017

Albanie

0,5 M$

Allemagne

250M$

150 M € (195M$)

Arabie saoudite

200M$

Autriche

10M$

6M€

Australie

100M$ australien

Azerbaïdjan

1M€

Belgique

15M$

12M€ (15M$)

Bosnie

0,65 M$

Bulgarie

Contribution financière sans précision

Canada

125M$

110M$

Chine

10M$

Corée du Sud

50M$

100M$

Croatie

0,5 M$

Danemark

50M$

20 M$

EAU

100M$

Espagne

30M$

contribution non tranchée mais demande jugée raisonnable

Estonie

0,5 M$

Finlande

20M$

6M€ (8M$)

France

200M$

Contribution financière sans précision

Géorgie

Contribution financière sans précision

Hongrie

0,5 M$

Inde

2M$

Irlande

0,39 M$

Italie

200M$

120M€/148 M$

Japon

250M$

130M$

Kazakhstan

Koweït

50M$

Lettonie

0,5M$

Lituanie

0,5M$

Luxembourg

4M$

5M$

Macédoine

Contribution financière sans précision

Monténégro

0,39 M$

Norvège

75M$

25 M$

Nouvelle Zélande

Entre 5 et 2 M$

2M$

Pakistan

10M$

5M$

Pays-Bas

50M$

38 M$

Pologne

20M$

République Tchèque

1M$

Russie

10M$

200M$ (en nature)

Slovaquie

5 M € sur 10 ans

Suisse

20M$

Suède

40M$

Turkménistan

Turquie

100M$

20 M$

UE

200M$

UK

200M$

110M$

La France n'a pas fait connaître le montant de sa contribution.

2. Quel futur pour l'Afghanistan : éviter le scénario du pire

Tous ceux qui, comme votre rapporteur, se sont rendus sur le terrain auprès de nos soldats ou à Kaboul pour des entretiens avec les responsables politiques le savent : la tâche sera ardue pour installer définitivement la paix et enclencher durablement le développement.

Certains analystes redoutent que l'État afghan ne connaisse un affaiblissement de ses institutions suite au départ de la coalition. Dans les visions les plus pessimistes, celles-ci ne fonctionneraient plus que pour servir une élite, au point de ne plus contrôler que certaines villes et axes commerciaux dans le pays, tandis que toutes les zones éloignées, inintéressantes pour le pouvoir central, seraient abandonnées à des baronnies locales, au fur et à mesure que les forces de sécurité s'en retireraient par manque de moyens voire de personnels loyaux.

Il faut dire que l'insurrection est particulièrement réactive et diverse. Après l'éviction d'Al Qaïda de ses sanctuaires afghans en 2002, une image un peu simpliste d'armée de « coureurs de collines » a longtemps prévalu, face une coalition disposant d'une supériorité matérielle et quantitative incontestable. Cette vision réductrice a quasiment perduré jusqu'en 2008, où la communauté internationale et les opinions publiques ont pris la mesure du contrôle de l'insurrection sur certaines populations locales. Parallèlement était élaborée la nouvelle stratégie replaçant ces mêmes populations au coeur de l'action, avec en particulier la prise en compte du rôle de la gouvernance démocratique et du développement économique.

Le principal moteur de cette prise de conscience est la remarquable réactivité des insurgés qui s'avèrent capables d'évolutions tactiques très rapides, leurs permettant de garder le plus souvent l'initiative :


• généralisation de l'emploi des engins explosifs improvisés , dont la sophistication impose des contraintes fortes sur les déplacements des forces de la coalition ;


• recours systématique aux tirs indirects, qui déplace l'insécurité dans les zones de stationnement de la coalition ;


• augmentation considérable des actions-suicides (individuelles ou sur véhicule) qui mettent en lumière la détermination sans faille des combattants ;


• multiplication des agents ou sympathisants infiltrés dans les rangs des forces armées afghanes ;


• et depuis peu, mise en oeuvre d'attaques complexes qui combinent ces tactiques et font l'objet d'une médiatisation massive au travers de sites Internet amis.

Cette grande réactivité reflète aussi la diversité des acteurs de l'insurrection :


• reliquat d'Al Qaïda , réduit à un rôle d'autorité "morale" et moins actif en Afghanistan, y compris avant l'élimination de Ben Laden ;


• le mouvement taleb , fédéré et coordonné par les Shuras de Quetta et Peshawar, disposant sans doute d'appuis pakistanais, mais dont les racines locales restent fortes. Elles engendrent des rivalités entre chefs locaux mais aussi des tactiques locales parfois très différentes ;


• le réseau Haqqani , fortement enraciné dans l'Est et dont les chefs seraient réfugiés au Pakistan, et qui a pris progressivement la place d'Al Qaïda comme principal et irréductible adversaire de la coalition et des forces armées afghanes ;


• enfin le mouvement islamique ouzbek dont le champ d'action quitte le Nord pour s'étendre vers l'Est.

Certains estiment que les insurgés gagnent du terrain et que l'insécurité va croissant sur les voies de communication, dont l'axe Kaboul-Kandahar. Sur l'axe Kaboul-Khost, une légère amélioration n'a pas permis la reprise des travaux de réhabilitation interrompus l'année dernière ; dans le Nord, la circulation, si elle s'est améliorée sur l'axe Kaboul-Kunduz, est par contre devenue difficile sur les routes interprovinciales. Enfin, la route circulaire, stratégique entre toutes, serait devenue dangereuse voire impraticable pour les convois sur certaines portions, dans le Nord-ouest, dans certains districts de l'est (Hérat) et même dans des provinces jusqu'alors peu touchées comme celle de Nimroz.

Faut-il s'attendre à ce qu'au départ des forces internationales, les zones rurales soient à nouveau contrôlées par la rébellion, tandis que le pouvoir ne contrôlerait plus que les villes ?

L'évolution de la situation politique intérieure afghane et du rapport de forces dans les années à venir est également source d'incertitudes. Qu'adviendra-t-il dans le contexte d'une insurrection de plus en plus forte et de tentations autoritaires de la part du pouvoir central, et en l'absence d'émergence d'une opposition articulée ? La transition ne risque-t-elle pas de déboucher sur la dislocation de l'État et le glissement progressif du pays vers une nouvelle guerre civile ? D'autres s'inquiètent de possibles rivalités voire affrontements interethniques à l'issue de la phase de transition.

Depuis l'annonce du retrait programmé des forces militaires, les actes de violence ont redoublé, cherchant à atteindre le chef de l'État (assassinat du frère du Président, le 12 juillet 2011), ou le processus de réconciliation nationale (assassinat du président Rabbani en septembre 2011), à décrédibiliser les forces de sécurité afghanes (attaque contre l'ambassade des États-Unis et le quartier général de l'OTAN). D'autres attentats tentent d'opposer les communautés chiites et sunnites , ce qui n'a jamais eu lieu dans l'histoire de l'Afghanistan (attentats de Kaboul et Mazar-E-Sharif le 6 décembre 2011).

Ainsi par exemple, s'exprimant dans les colonnes du journal Le Monde le 4 juillet dernier, l'ambassadeur russe à Kaboul estimait que « Tout le monde est d'accord pour dire que l'armée et la police afghanes ne sont pas, aujourd'hui, capables de remplacer les forces internationales. » Sur le plan économique, d'après lui, « des milliards de dollars ont été déversés, mais ils ont disparu dans la corruption et la chaîne des sous-traitants » et « pas un seul gros projet industriel, pas un seul gros projet agricole n'a vu le jour pendant cette décennie » .

C'est naturellement la montée en puissance des forces de sécurité afghanes qui constitue la réponse à ces interrogations.

D'ailleurs, lors de la conférence de Tokyo, le 8 juillet dernier, le ministre français des affaires étrangères Laurent Fabius déclarait, en présence du Président Karzaï : « Aujourd'hui, déjà, l'armée afghane est en mesure d'assurer la sécurité de près des trois quarts de la population ».

La seule voie possible pour démentir ce scénario du pire est celle du développement économique. Elle ne pourra émerger sans le maintien de l'aide internationale, à laquelle la France doit prendre toute sa part.

La meilleure lutte contre l'insécurité n'est-elle pas le développement économique ?

La meilleure lutte contre l'obscurantisme n'est-il pas l'alphabétisation ?

Le rempart le plus efficace contre l'embrigadement dans des milices n'est-il pas l'activité économique ?

II. UNE AIDE INTERNATIONALE MASSIVE POUR COUVRIR DES BESOINS IMMENSES

A. LES BESOINS COLOSSAUX D'UN PAYS EXSANGUE ACCABLÉ DE FLÉAUX

Malgré des progrès indéniables, notamment en matière d'infrastructures et de développement économique, l'insécurité entretenue par la rébellion demeure le premier obstacle à la reconstruction durable du pays. Le gouvernement peine à asseoir son autorité sur l'ensemble du territoire en raison de la faiblesse tant de la gouvernance et des structures administratives que celle des forces nationales de sécurité.

Les besoins sont immenses pour un pays encore accablé de fléaux.

1. La construction chaotique des institutions
a) La tentation permanente du coup d'état rampant

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat a dressé, dans son rapport d'information 6 ( * ) de 2009 « Afghanistan, quelle stratégie pour réussir ? », un constat sans complaisance et sans appel sur les déficits en matière de gouvernance et d'État de droit, qui conserve, hélas, toute leur pertinence aujourd'hui.

L'accord inter-afghan de Bonn-Petersberg du 5 décembre 2001 a mis en place une administration intérimaire présidée par un proche de l'ancien roi Zaher Chah, M. Hamid Karzaï, en prévoyant un calendrier pour une transition politique avec des élections libres et démocratiques.

Réunie à Kaboul en juin 2002, une Loya Jirga (assemblée traditionnelle) a reconduit Hamid Karzaï à la Présidence de l'Etat transitoire islamique d'Afghanistan. Une seconde Loya Jirga , dite constitutionnelle, a conclu ses travaux le 4 janvier 2004 par l'adoption d'une nouvelle constitution. Celle-ci confirme que l'Afghanistan est une République islamique et garantit le respect des droits de l'Homme, notamment le principe d'égalité des hommes et des femmes. Le régime est de nature présidentielle, mais avec un contrôle parlementaire renforcé. L'ancien roi, Zaher Chah, revenu à Kaboul en avril 2002, s'est vu reconnaître le titre honorifique de « Père de la Nation » et a continué à exercer une influence politique jusqu'à son décès le 23 juillet 2007.

Hamid Karzaï a remporté l'élection présidentielle du 9 octobre 2004 en obtenant, dès le premier tour, 55,4 % des voix, face à 17 autres candidats. Le Parlement a été inauguré le 17 décembre 2005 à l'issue des élections législatives du 18 septembre 2005. Il est composé de deux chambres, la Mechrano Jirga (Sénat), composée de 102 membres élus par les collectivités locales ou nommés par le Président, et la Wolesi Jirga , chambre basse comprenant 249 députés élus pour 5 ans, comme le Président. Un peu plus du quart des sièges de députés et de sénateurs est occupé par des femmes, en raison de l'existence de quotas.

La composition politique du Parlement afghan reste très fragmentée. Il existe quelques groupes de taille réduite et sans profil politique évident. De nombreux parlementaires se déclarent indépendants. Lorsqu'ils appartiennent à un groupe, ils n'observent pas de discipline particulière.

Le président Karzaï n'a pas souhaité être associé à un parti ou une coalition. C'est un de ses principaux opposants, Younous Qanouni, qui a été Président de la Wolesi Jirga de 2005 à 2010. Il a été remplacé après les dernières élections par Abdul Rauf Ibrahimi, un proche du général Dostom. L'ancien président (en 1992) Sebghatollah Modjadeddi, a été élu à la tête de la Mechrano Jirga.

Selon les termes de la constitution du 4 janvier 2004, la Wolesi Jirga ne peut être dissoute. Une procédure de destitution du président par cette chambre existe, mais avec des conditions très difficiles à remplir. La chambre basse a surtout le pouvoir de mettre en jeu la responsabilité des ministres, sur une base individuelle. Le chef de l'Etat est en même temps le chef du gouvernement.

Au terme d'un scrutin très controversé , marqué par de nombreuses fraudes et des incidents sécuritaires, le président Karzaï a été réélu le 2 novembre 2009 pour un second et dernier mandat de cinq ans, au terme d'une élection présidentielle contestable puisqu'elle n'a pas connu de second tour alors que le président Karzaï était en ballotage. Les élections législatives ont été entachées par des fraudes et de très nombreuses contestations. Son adversaire, Abdoullah Abdoullah, a refusé de participer au second tour au motif que les conditions d'un scrutin équitable n'étaient pas réunies. Le président Karzaï a, dans son discours d'investiture du 19 novembre, pris des engagements fermes en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Processus entièrement mené par les autorités afghanes, les élections législatives du 18 septembre 2010 ont été marquées par de nombreux recours.

La commission des plaintes électorales, dont il faut souligner la fermeté, a ainsi invalidé 10 % des élus dont des proches du président. Ce dernier a institué un tribunal spécial, composé de cinq juges, chargé d'enquêter sur les conclusions de la commission électorale indépendante et de la commission des plaintes. De même, le procureur général, proche du président, a diligenté des enquêtes pour fraude et abus de pouvoir contre les membres de ces deux commissions. Le président Karzaï a longtemps refusé de venir inaugurer la nouvelle assemblée législative, ce qui fut finalement fait en janvier 2011. Cette assemblée, la Wolesi Jirga , a connu une modification importante de sa représentation ethnique, avec une baisse très significative du nombre des parlementaires d'origine pachtoune du fait des invalidations et du faible taux de participation en raison des conditions de sécurité dans le Sud pachtoun. Ceci est naturellement à l'origine des fortes tensions entre le président et l'assemblée.

La réforme, envisagée, du système électoral est impérative pour établir un véritable pluralisme politique en Afghanistan et permettre l'organisation de la vie politique à travers des partis structurés.

b) La difficile réconciliation afghane

La transition ne peut connaître le succès si, en parallèle, une réconciliation entre les Afghans n'intervient pas. Il n'y aura pas de victoire militaire sans solution politique, comme il n'y aura pas de réintégration réussie sans réconciliation véritable.

Le processus de réconciliation doit être conduit par les Afghans eux-mêmes. L'enjeu de ce processus est d'inclure l'ensemble des composantes de la société afghane , de convaincre l'opposition armée à renoncer à la violence, d'éliminer définitivement Al Qaïda et de garantir le respect de la constitution que l'Afghanistan s'est donnée. L'Afghanistan ne doit plus jamais être un sanctuaire du terrorisme international.

Comme annoncé à la Conférence de Londres du 28 janvier 2010, le président Karzaï s'est engagé dans la recherche d'une solution politique à la crise afghane. Une Jirga de paix s'est tenue à Kaboul en juin 2010 pour valider un cadre de négociation avec l'opposition armée. Un nouveau programme national pour la paix et la réintégration ( Afghan Peace and Reintegration Program - APRP) a été inauguré à l'été 2010 puis, en octobre de la même année, un Haut Conseil pour la Paix a été institué, avec à sa tête l'ancien président afghan Burhanuddin Rabbani, dans le but de faciliter les contacts avec la rébellion. Ce processus doit respecter les lignes rouges établies par les autorités afghanes elles-mêmes : respect de la Constitution de 2004 et des droits de l'Homme, en particulier des droits de la femme, renoncement à la violence et absence de liens avec le terrorisme international. L'assassinat du président Rabbani, le 20 septembre 2011, a constitué un coup d'arrêt aux efforts menés pour enclencher un processus de réconciliation. Le président Karzaï a convoqué en novembre 2011 une Loya Jirga , assemblée traditionnelle du peuple afghan, qui s'est prononcée en faveur de la poursuite des tentatives de discussion avec la rébellion. Cette réunion a par ailleurs approuvé le principe d'un partenariat stratégique avec les Etats-Unis tout en posant des conditions (par exemple, l'absence de détention d'Afghans par les Américains). Des pourparlers de paix n'ont pas encore pris forme. Après avoir annoncé en janvier 2012 leur accord pour l'ouverture d'un bureau de représentation au Qatar, les talibans ont annoncé, le 15 mars dernier, la suspension de leurs contacts avec les États-Unis.

2. Une société en souffrance, une croissance menacée
a) Un accès précaire à l'éducation

En matière d'éducation , les besoins sont immenses et les récents progrès sont fragiles et menacés. Certes, le discours officiel laisse entendre que, depuis 10 ans, partout des écoles auraient été construites, et que les inscriptions auraient été multipliées par 6 ; 7 millions d'enfants seraient ainsi scolarisés, dont près de 3 millions de filles, chiffres inédits dans l'histoire afghane.

Cet affichage ne donne toutefois pas une image totalement fidèle de la situation.

En effet, si l'État n'assure pas la formation des professeurs en nombre suffisant, ni la fourniture de matériel scolaire, le nombre de classes n'a aucune signification, car la majorité d'entre elles sont des coquilles vides. Certains experts affirment qu'en moyenne un enfant afghan n'a que 2 heures de présence à l'école par jour, c'est-à-dire un seuil qui ne permet pas l'apprentissage des connaissances de base.

La situation est parfois plus inquiétante : certaines ONG ont sonné l'alarme concernant l'hiver précoce sévissant dans plusieurs régions montagneuses du centre et du nord conduisant à la fermeture des écoles jusqu'au printemps.

A cela s'ajoutent les effets des attaques talibanes contre les écoles , qui les conduisent souvent à fermer. Plusieurs centaines d'écoles ont été attaquées ces dernières années (dont une école de filles au gaz, en avril 2010). Mais, selon des médias locaux, un autre phénomène, pire dans ses conséquences, se mettrait désormais en place : dans les provinces où les talibans sont bien implantés, ils exerceraient un véritable droit de regard sur les programmes, sur la séparation absolue des locaux pour garçons et pour filles et sur l'insertion renforcée d'un enseignement religieux lui-même révisé par les rebelles.

Enfin, les disparités régionales existent. Une enquête de 2009 indique qu'au nord, deux tiers des garçons et presque la moitié des filles sauraient lire et écrire, tandis que 40 % des adolescents des deux sexes compteraient au moins 9 années d'école. Au contraire, dans plusieurs provinces de l'est et du sud, le taux d'alphabétisation des adolescents descendrait à 29 % et celui des adolescentes à moins de 5 %, et à 0 % dans de nombreux districts, où 100 % des filles auraient moins de six ans de scolarité.

b) Des conditions sanitaires dramatiques

L'accès aux soins de la population, en progrès très relatif, reste dramatiquement insuffisant.

Les discours officiels en matière de santé soulignent notamment la multiplication des centres de soins, avec réduction de la distance entre les habitations et le premier lieu où un contact médical est possible. De sorte que 85 % de la population, selon le ministère de la Santé, aurait désormais accès à un centre en moins d'une demi-journée (!) de marche. Sur le terrain, les acteurs constatent que ledit contact médical est souvent dérisoire, avec un personnel réduit et peu formé, souvent autour d'un unique médecin qui lutte pour trouver les médicaments ou le matériel médical nécessaire.

Ce réseau a toutefois permis le succès de plusieurs campagnes de vaccination , financées par la communauté internationale, et qui ont atteint 2/3 de la population.

Mais cela n'empêche pas qu'en matière de santé mère-enfant, et d'espérance de vie, la situation reste catastrophique, voire se dégrade encore.

De moins en moins de personnel médical - notamment féminin, seul à pouvoir approcher les patientes - part en milieu rural, du fait de l'insécurité.

Certes, les chiffres affichés reflètent des progrès substantiels par rapport aux années 90 et à celles de la guerre civile où tout réseau de santé avait disparu en Afghanistan. En outre, dans quelques villes, notamment à Kaboul, des hôpitaux de bonne tenue ont été établis. Mais les rapports croisés des institutions spécialisées de l'ONU montrent surtout qu'après cette remontée initiale à partir de zéro, les indices ont stagné à un niveau très bas, voire, depuis 2006, ont eu tendance à repartir à la baisse.

Selon les chiffres de l'UNICEF, on compterait en Afghanistan 1.400 décès de mères pour 100.000 naissances (contre 12 aux Etats-Unis et 1.000 dans la moyenne des pays les moins avancés...) et de 134 décès de nouveau-nés pour 10.000 naissances (163 en 2001, mais 129 en 2006 ; le chiffre est de 7 aux Etats-Unis, de 92 dans la moyenne des pays les moins avancés). Un enfant sur 5 mourrait avant 5 ans (1 sur 333 en Suède ; seule la Somalie a des chiffres aussi bas).

Le fonds des Nations unies pour la population (FNUAP) cite les causes de mortalité comme étant « les maladies contagieuses, très répandues, la malnutrition, la mauvaise éducation hygiénique, l'accès réduit à l'eau potable ». Ce n'est donc pas seulement parce que 86 % des femmes accouchent sans assistance médicale qualifiée que la mortalité est si élevée, mais aussi à cause de l'environnement « ordinaire » et des conditions de vie des mères. Ainsi, conclut l'organisation, « même au regard de la situation des 49 pays les plus pauvres de la planète, celle de l'Afghanistan est l'une des plus alarmantes ».

Au-delà des données chiffrées, des témoignages de terrain des agences onusiennes ou des ONG laissent sans voix . Ainsi le PNUD mentionne le record mondial atteint par un district afghan, qui connaît 65 décès pour 1.000 naissances ; près d'une femme sur 4 y meurt en couches. Ailleurs, un chercheur de l'OMS indique qu'on ne sait pas comment évaluer la part, qui serait significative, des fillettes dont le décès à la naissance n'est pas recensé (toutefois il est précisé que l'infanticide ne paraît pas pratiqué : c'est seulement qu'on ne compte pas les décès de filles). Ailleurs encore, un enquêteur note que là où il opère, nombre de décès en couches surviennent dans les champs ou encore au bord des routes, parce que des femmes se vident de leur sang en allant chercher du secours.

c) Des droits des femmes bafoués

Les atroces images de l'exécution sommaire, filmée par téléphone portable, et postée sur Internet, d'une femme soupçonnée d'adultère, dans un village à une centaine de kilomètres de Kaboul, le 8 juillet dernier, n'ont fait que remettre l'accent sur les insuffisantes avancées de la condition des femmes en Afghanistan. Selon l'ONG Oxfam, 87 % des Afghanes affirment avoir subi des violences physiques, sexuelles ou psychologiques ou un mariage forcé .

Si, sous l'influence de la coalition internationale présente depuis 2001, des progrès ont été observés dans les grandes villes, ils restent toutefois très limités, à tel point que certaines ONG accusent le gouvernement de ne défendre la cause des femmes qu'en façade, pour continuer à percevoir l'aide internationale.

Qu'adviendra-t-il des droits des femmes afghanes en cas d'éventuel retour au pouvoir des talibans ?

Le statut des femmes en Afghanistan est traditionnellement beaucoup moins favorable que celui des hommes, la société afghane, conservatrice et majoritairement rurale, obéissant aux règles patriarcales des clans familiaux.

Pour autant, il y a 40 ans, la Constitution afghane reconnaissait aux femmes le droit d'accès à toutes les formes d'éducation et le droit de participer aux élections à la fois comme électrices et comme candidates. Malgré la pauvreté, les femmes touchaient un salaire comparable à celui des hommes. Elles constituaient alors la majorité du personnel enseignant et de santé. Toutefois, les inégalités se sont à cette époque creusées entre femmes vivant en milieu urbain et celles résidant à la campagne.

A partir des années 1970, la situation des femmes en Afghanistan n'a cessé de se détériorer, celles-ci étant durement touchées par les années de guerre. Les libertés fondamentales des femmes ont été le plus gravement atteintes sous le régime taliban, lorsque les femmes n'ont plus eu le droit de fréquenter l'école et l'université, de travailler à l'extérieur de chez elles et de quitter leur domicile sans être accompagnées d'un homme de leur famille proche et sans porter la burqa. Toute infraction à ces décrets était sévèrement punie.

La chute du régime taliban en 2001 a suscité un vent d'espoir pour toutes les femmes afghanes. Des progrès incontestables ont été accomplis en matière de promotion des droits des femmes depuis la chute des talibans :

- interdiction posée par l'article 22 de la constitution, adoptée en janvier 2004, des discriminations entre citoyens afghans, hommes et femmes, qui sont également dotés des mêmes droits et devoirs devant la loi ;

- création du ministère de la Condition féminine ;

- adoption du plan national d'action en faveur des femmes (NAPWA, 2008-2018) ;

- promulgation de la loi pour l'élimination des violences contre les femmes (EVAW law, 2009) ;

- augmentation de l'accès à l'éducation : 20 % de filles seraient scolarisées en primaire, 5 % dans le secondaire, environ 2,5 millions de filles seraient scolarisées au total ;

- la part des centres de soins primaires dotés d'au moins une femme médecin, infirmière ou sage-femme est passée de 26 % en 2004 à 81 % en 2007 ;

- meilleure représentation des femmes au Parlement (27,3 %) ;

- création (en 2010) d'une unité de lutte contre les violences faites aux femmes au sein du Bureau du procureur général.

Malgré ces indicateurs « optiquement » favorables, les droits et l'accès des femmes afghanes aux besoins primaires sont loin d'être assurés en pratique.

Les conditions de santé pour les femmes afghanes sont parmi les pires au monde. Leur accès aux soins demeure extrêmement limité à l'heure actuelle, en grande partie du fait de manque de personnel féminin de santé. 90 % des femmes en zone rurale accouchent à la maison sans assistance médicale, ce qui explique le fort taux de mortalité maternelle à la naissance (25 000 morts par an). L'espérance de vie des Afghanes est de 44 ans, soit près de 20 ans de moins que la moyenne mondiale.

Les femmes et les fillettes afghanes continuent d'être soumises à une discrimination généralisée dans tous les secteurs de la société, à la violence domestique, aux enlèvements et aux viols imputables à des hommes armés, à la traite, aux mariages forcés et aux échanges (« baad ») permettant de régler des litiges et des dettes. Prêtes à tout pour échapper à ces situations de violence, 165 femmes se sont suicidées en s'immolant par le feu en 2007.

La signature par le président Karzaï, en mars 2009, de la loi sur le statut personnel chiite, aux dispositions gravement attentatoires aux droits des femmes (le texte a été quelque peu amendé sous la pression de la Communauté internationale), souligne que les autorités afghanes sont prêtes à accepter des compromissions dans ce domaine à des fins politiques.

L'insécurité croissante dans le pays aggrave directement la situation des femmes. Les cas signalés de violence domestique contre ces dernières se multiplient. Se rendre à l'école représente un danger quotidien pour de nombreuses fillettes. La terreur engendrée par les attaques des talibans contre les écoles met en péril le droit à l'éducation de dizaines de milliers d'enfants, et tout particulièrement des filles. Plusieurs cas d'attaques au gaz toxique contre des écoles de filles ont été rapportés en 2009 et 2010.

Les femmes sont régulièrement victimes des attaques menées par des groupes armés contre des civils en général ou menées sans discrimination par toutes les parties au conflit. Les talibans et autres groupes rebelles prennent aussi plus spécifiquement pour cible les femmes membres d'organisations humanitaires, les personnels de santé, les candidates aux élections et les élues, qui sont toutes accusées de collaborer avec les ennemis de l'islam. Plusieurs en sont mortes, et aucun de leur meurtrier n'a été jusqu'à présent traduit en justice.

d) Des fondamentaux économiques altérés

L'Afghanistan est classé 172 e pays sur 179 en termes d'indice de développement humain calculé par le PNUD. C'est l'indice le plus bas du continent asiatique.

Malgré des taux de croissance élevés ces dernières années, de nombreux pans de l'économie afghane sont encore à reconstruire.

Après dix ans de présence occidentale, le bilan de la reconstruction économique parait décevant. Toute analyse « objective » est compliquée par l'absence de fiabilité des statistiques, qui ont en outre parfois été manipulées.

L'agriculture , qui occupe 70 % de la population, a été sinistrée par 30 ans de guerre (champs minés, diminution de la qualité des semences et du cheptel, systèmes d'irrigation endommagés).

Un acquis des plus de 10 ans de présence occidentale aura été le retour à la croissance dans l'agriculture , qui avait considérablement souffert des destructions de la guerre soviétique et du départ conséquent d'une large portion des populations rurales vers le Pakistan et l'Iran. Dans certains secteurs comme les céréales, les progrès ont été rapides et le gouvernement a revendiqué comme un succès majeur l'accession, proclamée en 2009, à l'autosuffisance alimentaire. La suite a montré que c'était une déclaration prématurée, car l'année était exceptionnelle, et les importations alimentaires devraient se poursuivre, en raison d'abord de la concurrence du pavot (qui rapporte deux fois plus que les activités légales) ; mais aussi de l'insuffisance des moyens de collecte et de stockage. Ceci explique qu'une grande partie des produits sont expédiés « en brut » de l'autre côté de la frontière pakistanaise, pour en revenir conditionnés et plus chers. Les taux de malnutrition sont, d'après l'OMS, très élevés, touchant près de 40 % des enfants afghans.

L'industrie (agro-alimentaire, textile, énergie) entame à peine son redressement. L'artisanat (13 % du PIB en 1981) a quasiment disparu. Le secteur du bâtiment est en revanche en expansion.

Le secteur minier , considéré comme prometteur, entame un lent redémarrage. Les réserves du sous-sol afghan ont pu être estimées jusqu'à 1.000 milliards d'USD, selon une étude publiée en 2010 par le United States Geological Survey . Même s'il faut relativiser certaines annonces très (trop ?) optimistes sur le potentiel minier afghan, ces ressources minérales constituent un vrai potentiel. Et l'irritant excès de la ''réclame'' qui en a été faite ne doit pas faire oublier qu'un travail effectif a été conduit par le ministère des mines et les experts internationaux pour définir une politique cohérente dans ce secteur et dans ceux qui, embryonnaires, conditionnent son avenir  : énergie, et rail connecté aux réseaux ferrés régionaux. Il s'agit d'une entreprise au long cours. Il n'en reste pas moins que le chantier est amorcé avec les 2 grandes mines de cuivre ( Aynak ) et de fer ( Hajigak ) en cours d'ouverture . La Chine a signé en mai 2008 un contrat record de 3,5 milliards d'USD pour l'exploitation du gisement d'Aynak , à 30 km au Sud de Kaboul.

Les transports et la téléphonie mobile tirent la croissance du secteur des services. Les réseaux de téléphone mobile se sont rapidement développés et compteraient 15 millions d'abonnés. La compagnie privée de téléphonie mobile Roshan (3,5 millions d'abonnés) serait le premier investisseur du pays (430 millions de dollars à ce jour) et l'un des premiers contribuables et employeurs privés d'Afghanistan (1.100 employés). La reprise du tourisme, un secteur clé de l'économie afghane d'avant-guerre, dépendra d'un retour à la stabilité et de la mise en place d'infrastructures, en premier lieu hôtelières, dignes de ce nom.

Quelques chantiers importants ont été menés à bien, dont le plus emblématique est sans doute la ligne à haute tension amenée d'Ouzbékistan sur 1.400 pylônes posés par l'Inde. Elle permet depuis 2009 une électrification satisfaisante de la capitale en dépit de l'accroissement continu de celle-ci (conquête des hauteurs rocheuses par les habitations notamment établies par les réfugiés de retour). En province aussi l'électrification a fait des progrès sensibles. D'autres progrès sont constatés dans le tissu urbain, en voie de modernisation : éclairage, circulation, constructions en dur et télécommunications grand public. Ce développement paraît assez chaotique, notamment dans la capitale, où par exemple des rues (relativement) propres - même quand, et c'est très souvent le cas, elles ne sont pas asphaltées - coexistent avec des canalisations d'une saleté repoussante. En province, dans les villes du nord et de l'est, mais aussi à Djalalabad par exemple, les services publics et la voierie sont mieux ordonnés.

Malgré de nombreuses difficultés, le commerce connaît une reprise depuis la chute des talibans, grâce surtout à la réfection de nombreuses routes. Les principaux partenaires commerciaux de l'Afghanistan sont l'Inde, le Pakistan et l'Iran. La construction d'un gazoduc qui permettrait l'exportation du gaz turkmène vers le Pakistan et l'Inde en passant par l'Ouest afghan est à l'ordre du jour (projet TAPI). Les conférences sur la coopération économique régionale pour l'Afghanistan (« RECCA ») permettent aux États de la région d'examiner les questions d'intérêt commun (gestion des frontières, transports, énergie).

Dans le cadre de sa présidence du G8 en 2011, la France a conduit l'Initiative pour la Prospérité des Régions frontalières (IPRF) afin de contribuer à la dynamique actuelle en matière de coopération économique régionale. Des réunions et séminaires ont ainsi été organisés dans des secteurs-clés pour le désenclavement de l'Afghanistan et son développement : rail, ressources humaines (principalement sous l'angle de la santé), eau et énergie.

Le changement de monnaie nationale, fin 2002, a été l'une des grandes réussites économiques de la dernière décennie. L'afghani est relativement stable face au dollar américain et à l'euro. La monnaie métallique a été réintroduite en avril 2005, avec l'aide de la France, après trente ans d'absence.

La crise de la Kabul Bank a porté un coup sévère au secteur bancaire naissant. L'institution financière privée la plus importante du pays, qui gère les salaires de 220 000 fonctionnaires, un tiers des dépôts et 57 % des emprunts, a subi en septembre 2010 une fuite de ses liquidités à la suite de révélations sur sa gestion frauduleuse (pertes estimées à environ 900 millions d'USD).

Ce scandale a conduit le FMI à geler sa décision pour un nouveau financement de 125 millions d'USD sur trois ans via la « facilité élargie de crédit » qui avait été examinée par le Conseil d'administration du Fonds. L'absence de programme du FMI a conduit plusieurs bailleurs à suspendre temporairement leurs versements au fonds dédié à la reconstruction de l'Afghanistan (ARTF). Un accord entre le FMI et le gouvernement a finalement été trouvé fin 2011.

e) Une croissance fragilisée par le retrait de la coalition

Malgré les difficultés actuelles et l'ampleur des chantiers restant à mener, l'effort combiné des autorités afghanes et de leurs partenaires étrangers commence à porter des fruits. L'Afghanistan enregistre, depuis 2006, des progrès significatifs en matière de reconstruction (infrastructures routières, écoles, hôpitaux) et de développement économique (agriculture, bâtiment, artisanat, services).

Après plus de dix ans de présence occidentale, le bilan de la reconstruction économique paraît à la fois significatif et décevant. L'analyse est singulièrement compliquée par l'absence de fiabilité des statistiques qui sont parfois manipulées.

La croissance du PIB a été supérieure, ces cinq dernières années, à 10 %. Un certain redémarrage économique a commencé à partir de 2005, autour de Kaboul.

Pour autant, on peut s'interroger sur la signification de ces taux de croissance, dans la mesure où il a suffi d'une excellente récolte, en 2009, pour obtenir un taux de croissance de 20 %... Pour sortir de la très grande pauvreté, il faudrait à l'Afghanistan une croissance soutenue pendant au moins une génération.

Le réseau routier a été amélioré par l'aide internationale avec la construction de la « grande rocade » (ring road) qui relie entre elles les quatre grandes villes du pays. Un réseau d'électricité permet désormais d'alimenter Kaboul en énergie à partir de l'Ouzbékistan.

Si la construction routière a été considérable, avec un chiffre-phare de 13.000 kms asphaltés , ou réhabilités - car la grande route circulaire reliant les principales villes a été établie du temps des Russes -, certains Afghans y voient surtout la concrétisation de visées purement militaires : au bout de chacune de ces routes, il y a une base. Ils contestent qu'elles aient, du moins directement, bénéficié à la population : entre les villages et les " highways'' , les communications seraient toujours aussi mauvaises.

Dans le moyen terme, ce réseau routier est un incontestable atout, même s'il faudra assumer le coût de son entretien après le départ des occidentaux.

Il faut rappeler les ordres de grandeur pour pouvoir mesurer le « choc » que va représenter la transition sur l'économie afghane : les dépenses annuelles des forces alliées en Afghanistan (qui ne sont pas toutes réalisées au profit de l'économie afghane) représentent environ sept fois le PNB du pays, tandis que l'aide accordée est équivalente à son PNB 7 ( * ) .

C'est donc essentiellement l'aide internationale qui tire l'activité. Certaines études estiment que 90 % à 100 % du PIB afghan légal serait généré par la présence internationale.

A l'occasion de la récente Conférence de Tokyo, la Banque mondiale a présenté un rapport (« Aghanistan in transition : looking beyond 2014 » dans lequel elle estime que le principal relai de croissance après l'infléchissement de l'aide internationale sera le secteur minier. Le modèle de développement serait celui d'une exploitation des ressources minières permettant de développer l'activité, d'apporter des recettes à l'Etat, et d'entraîner le reste de l'économie grâce aux investissements générés (routes, voies ferrées...) et au capital humain (formation, amélioration des conditions de vie...). Dans la vision de la Banque mondiale, le secteur des mines exercerait un effet de levier sur plusieurs autres pans de l'économie afghane, via ce qu'elle appelle des « corridors de croissance ».

Cette vision optimiste du développement du secteur minier (ce secteur exige de très forts investissements capitalistiques) ne doit pas faire oublier la nécessité de susciter des relais de croissance dans les autres domaines, notamment agricole. La moitié de la population afghane a moins de 18 ans : la création d'emplois est une nécessité vitale.

Dans le rapport de la banque mondiale, les besoins de l'Afghanistan sont évalués à 40 % du PIB en 2014 et 2015, pour se réduire progressivement à 25 % du PIB en 2021, sous l'effet du développement du secteur minier.

3. Drogue et corruption, deux profonds fléaux
a) Le trafic de drogue entrave l'émergence d'activités licites

Problème majeur, la drogue entrave le développement de l'économie afghane, mine les efforts de reconstruction du pays, gangrène l'État et nourrit le terrorisme, avec une imbrication croissante entre la rébellion et les réseaux de trafiquants.

L'opium afghan représente 90 % de la production mondiale totale (production évaluée à 6.900 tonnes en 2009). L'économie de l'opium serait la première activité productrice du pays. L'économie de l'opium représenterait (estimation non officielle) près de 7 milliards de dollars, loin devant le premier revenu d'exportation, qui est celui des tapis, pour 187 millions de dollars.

Selon l'ONUDC, pour le seul opium, 123 000 hectares étaient consacrés en 2010 à la culture et 248 000 familles étaient employées à cette activité, la valeur de la production d'opium pour les producteurs s'élevant selon l'ONUDC à 605 millions de dollars (sa valeur à l'exportation étant naturellement bien supérieure). En outre, le poids économique de l'héroïne en Afghanistan a très considérablement augmenté au cours de la période récente du fait de l'installation sur le territoire afghan de laboratoires de transformation de l'opium (jusqu'ici situés dans les pays voisins).

Votre commission juge qu'il y a quelque chose de très paradoxal à ce que cette situation coexiste avec une présence internationale massive en Afghanistan - mieux, à ce qu'elle se soit développée en parallèle de cette présence et malgré elle !

Les causes du développement de la culture de stupéfiants sont multiples : pauvreté, insécurité, corruption des autorités notamment, et surtout forte rentabilité de cette activité.

Alors que dans un premier temps les talibans avaient interdit la culture du pavot, ils en ont ensuite encouragé le développement, afin d'accroître leurs ressources financières. L'état d'anarchie du pays et le rôle croissant des seigneurs de la guerre contrôlant des zones entières ont favorisé le développement de tous les trafics.

D'après les Nations unies, la culture du pavot est surtout pratiquée dans les provinces du sud et du sud-ouest, et en particulier dans le Helmand, bastion pachtoune de l'insurrection. Certaines estimations chiffrent à 10 % la part de la population qui vivrait de la culture du pavot. Certains agriculteurs, soumis à des pressions locales, n'ont sans doute guère le choix.

L'expansion de la culture du pavot ne trouve pas de frein, vu l'absence de contrôle du territoire par les autorités, les défaillances de l'appareil judiciaire, douanier et policier ainsi que la corruption endémique. La culture du pavot apporte aux exploitants un revenu sans commune mesure avec celui de toute autre culture licite, comme les fruits ou le safran, par exemple.

L'opium est de plus en plus transformé en morphine et en héroïne sur le territoire afghan, ce qui a conduit la France à proposer une résolution au Conseil de sécurité des Nations Unies, adoptée le 11 juin 2008, et destinée à lutter contre le trafic international de précurseurs chimiques. Le Pacte de Paris, dont la France est à l'origine et l'un des principaux bailleurs, constitue le principal cadre de réflexion, de dialogue et de coordination des projets relatifs à la lutte contre le trafic d'héroïne en provenance d'Afghanistan. Une réunion ministérielle du Pacte de Paris s'est tenue à Vienne le 16 février 2012.

La culture du cannabis serait également en fort développement, dans le nord du pays, à tel point que l'Afghanistan serait aussi devenu le premier producteur mondial.

Il existe naturellement un lien entre narco-trafic et terrorisme. On ne peut qu'être frappé par le fait que la carte de la culture du pavot recouvre assez largement celle de l'insurrection. La saison des combats (« fighting season ») est d'ailleurs calée sur les impératifs de la culture et des récoltes, notamment du pavot. Le trafic nourrit la corruption et les réseaux maffieux. Les profits tirés de cette activité ont un effet d'éviction sur le développement des activités licites.

b) La corruption est profondément enracinée

La corruption est un mal endémique quasiment inscrit dans l'histoire et dans les moeurs afghans. Quand on sait que la montée en puissance du réseau Haqqani et des talibans s'est faite en partie en exploitant le ressentiment de la population face à une attitude du précédent gouvernement central considérée à juste titre comme prédatrice, on comprend l'importance de la lutte contre la corruption.

Selon certaines estimations 8 ( * ) , près de 2,5 milliards de dollars de pots-de-vin seraient versés en Afghanistan sur une période d'un an, ce qui représente environ un quart du PIB du pays . La corruption est un phénomène généralisé qui touche toutes les couches de la société, jusqu'au plus haut niveau.

L'ONG Transparency International classait en 2010 l'Afghanistan comme le deuxième pays le plus corrompu du monde , à égalité avec la Birmanie. Des proches du Président Karzaï ont été impliqués dans le scandale de la Kabul Bank , et deux ans après, aucun actionnaire n'a réellement été inquiété. La récente attribution d'un contrat d'extraction du pétrole, d'un montant de 3 milliards de dollars, à deux cousins du Président, qui avaient été condamnés pour trafic de drogue aux Etats-Unis et emprisonnés dans les années 1990 fait peser un doute sur la volonté des plus hautes autorités d'éradiquer le fléau de la corruption.

La corruption profite aux insurgés qui peuvent à juste titre souligner la perte de légitimité d'une administration et d'un gouvernement prédateur pour son propre peuple. Elle favorise le développement des réseaux maffieux.

Comme l'indiquait un rapport de l'assemblée parlementaire de l'OTAN : « Bien qu'il ne soit pas réaliste d'espérer une totale éradication de la corruption dans ce pays, la vraie réussite serait de la ramener à un niveau où elle ne permettrait plus de financer l'insurrection ».

B. UN ENGAGEMENT ANCIEN MAIS MODESTE DE LA FRANCE EN FAVEUR DU DÉVELOPPEMENT

1. La coopération civile : un tournant amorcé il y a près de 10 ans
a) Une relation bilatérale franco-afghane ancienne et soutenue

Les relations diplomatiques entre la France et l'Afghanistan sont établies dès 1922, avec la, création, la même année, de la délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA). Les fondements de la coopération franco-afghane apparaissent, en plus de l'archéologie, dans les domaines de l'éducation : création du lycée francophone pour garçons en 1923 (baptisé Esteqlal en 1929) et du lycée francophone pour filles Malalaï en 1942. L'Université de Lyon 1 et la faculté de droit de l'Université de Paris ont débuté leur coopération avec l'Université de Kaboul dès les années 1960. Des accords de coopération ont été signés dans le domaine de la santé (1963), de la coopération culturelle et technique (1966) et de l'agriculture (1969). Un centre culturel français a été fondé à Kaboul en 1970. Après avoir été entièrement rénové, il est devenu le 1 er janvier 2011 l'Institut français d'Afghanistan.

Après l'invasion soviétique de 1979, l'effort de la France s'est concentré dans le domaine humanitaire . L'action des ONG françaises, présentes en Afghanistan mêmes aux heures les plus sombres, a contribué au capital de sympathie dont continue de jouir aujourd'hui la France dans ce pays. Les « french doctors » n'ont jamais disparu de la scène afghane.

La fin du régime des talibans a permis la réouverture de l'ambassade de France à Kaboul en février 2002. Les visites officielles dans les deux sens ont repris à un rythme soutenu, témoignant du caractère privilégié de la relation franco-afghane.

Tant par solidarité avec le peuple afghan qu'avec ses alliés, la France considère la stabilisation de l'Afghanistan comme un enjeu essentiel. Elle y a ainsi fortement accru son engagement depuis 2008 dans les domaines militaire, civil et politique.

b) Des acquis reconnus dans 4 domaines : archéologie, agriculture, santé, eau.

Quatre domaines structurent, depuis de nombreuses années, la coopération franco afghane : l'archéologie, l'agriculture, la santé et le domaine de l'eau.

En 2002, la France a mis en place un programme d'actions pour la reconstruction de l'Afghanistan. Les premiers objectifs de cette coopération étaient alors de répondre à l'urgence humanitaire et de relancer les coopérations traditionnelles : aide aux lycées francophones Esteqlal et Malalaï de Kaboul, coopération dans les domaines de la santé, de l'agriculture et de la culture. Une coopération en matière de gouvernance et d'État de droit a été également initiée, en raison des forts besoins de l'Afghanistan dans ce domaine. Cet effort a progressivement été augmenté depuis 2002.

La décision, prise en 2004, d'inclure l'Afghanistan dans la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP) permet à ce pays de bénéficier de financements plus importants, grâce aux subventions de l'Agence Française de Développement (AFD) et à l'accès au Fonds de Solidarité Prioritaire (FSP).

Un projet de relance de la culture du coton (subvention de l'AFD de 10 millions d'euros) a été lancé en 2004 dans les provinces de Koundouz et de Balkh, tout comme un projet de réhabilitation du système national de transfusion sanguine (don de l'AFD de 8 millions d'euros).

Lors de la conférence de Paris de juin 2008, il avait été annoncé que l'aide civile française à l'Afghanistan serait, en étant portée à 106 millions d'euros sur trois ans, plus que doublée par rapport à la période précédente (13,57 millions d'euros de décaissements annuels entre 2005 et 2007).

Cette aide est consacrée en priorité à des actions de coopération en matière de santé et d'agriculture , deux domaines essentiels pour améliorer de manière rapide, tangible et durable les conditions de vie de la population afghane.

Cet objectif a été confirmé et amplifié par la décision prise en 2009 d'augmenter encore notre aide civile, portée à 40 millions d'euros par an , et axée plus particulièrement sur la mise en oeuvre de projets de développement rural et agricole dans la province de Kapisa et dans le district de Surobi.

La France a coordonné les efforts internationaux pour appuyer la mise en place du Parlement afghan , en étroite collaboration avec le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et ses partenaires, en particulier européens. Le ministère des Affaires étrangères et européennes y a consacré 2,5 millions d'euros et la Commission européenne 3,5 millions d'euros. Ce projet a consisté à contribuer à la formation de l'administration parlementaire pour accompagner le travail des élus. De manière complémentaire, un projet franco-allemand de formation de juges et de magistrats de la Cour suprême afghane a été lancé.

En matière de santé , il convient de relever, hors projets de l'AFD, l'inauguration, le 7 avril 2006, de l'Institut médical français pour l'enfant (IMFE) de Kaboul . Cet établissement a été créé avec l'aide de fonds privés mobilisés par les ONG françaises Enfants Afghans et La Chaîne de l'espoir, ainsi qu'avec le soutien du ministère des Affaires étrangères et européennes. La première opération à coeur ouvert de l'histoire afghane y a été pratiquée, sur un enfant, en avril 2006. Un prêt concessionnel de l'AFD de 9 millions d'euros doit financer le projet d'extension de l'hôpital.

Cet établissement, encore appelé « Hôpital français de Kaboul », est, comme le souligne le rapport 9 ( * ) de Mme Françoise HOSTALIER, un véritable « phare » pour la politique de coopération de la France : « Magnifique établissement, il apporte aux enfants l'excellence en matière de soins ».

Dans le domaine éducatif , outre l'aide aux lycées francophones, la France soutient la réhabilitation de plusieurs instituts de formation d'enseignants, ainsi que la rénovation des programmes scientifiques scolaires. Dans le secteur de l'enseignement supérieur, des coopérations ont été engagées avec l'université de Kaboul (faculté de droit, département de français).

Enfin, la coopération française est également engagée dans la relance du secteur privé (prêts de 5 millions d'euros pour le développement du microcrédit et de 10 millions d'euros pour le développement de la téléphonie mobile) et la sauvegarde du patrimoine millénaire de l'Afghanistan. La DAFA a redémarré en 2002 ses activités de protection, de restauration et de mise en valeur des richesses archéologiques du pays, et la reconstruction de l'Institut National pour l'Archéologie a fait l'objet d'un financement français en 2010.

c) Une spécificité française : le « pôle de stabilité », en complémentarité de l'action de la Task Force La Fayette

Le « Pôle de stabilité » mis en place en complémentarité de l'action des forces françaises se distingue des autres PRT « Provincial Reconstruction Team », dans la mesure où il est animé par une équipe entièrement civile , et n'est pas intégré au « Plan de campagne » de l'OTAN. Rassemblant une équipe interministérielle de 7 à 9 agents des ministères des Affaires étrangères et européennes, de la Défense et de la Justice aux statuts divers, le Pôle de stabilité, après 18 mois d'activité, s'est affirmé comme un véritable bailleur financier de terrain. Le Pôle est parvenu à se constituer, auprès des administrations locales, en interlocuteur distinct, ce qui contribue à sa visibilité.

Les objectifs du Pôle de stabilité sont de fournir une assistance technique afin de renforcer les capacités du gouvernement afghan et d'améliorer la coordination entre les administrations gouvernementales (ministères de la Santé, du Développement rural, de l'Éducation, de l'Agriculture), provinciales et de district. Fonctionnant sur des crédits transitant par l'AFD (pour 90 %) et l'ambassade (pour 10 %), la reconduction d'un budget à l'identique en 2012 (16,5 millions d'euros) marque la continuité de notre engagement à l'égard des autorités locales de Kapisa .

Le pôle de stabilité mène des actions de coopération suivant des axes d'effort qui sont, outre la santé et l'éducation :

- l'électrification de la Kapisa : il s'agit du projet le plus important prévoyant de créer environ 101 kms de lignes électriques (1 poteau tous les 50 mètres, 35 kms à l'heure actuelle) de Mahmud-e Raqi à Naglu en passant par Nijrab et Tagab, pour un coût total de 19 millions d'euros, ce qui a permis à ce jour d'approvisionner 30.000 personnes en électricité (sur une population totale d'environ 500.000 personnes) ; à cela s'ajoute la création de mini-centrales alimentant chacune 40 à 150 foyers ;

- la coopération en matière de justice (600.000 euros) : elle consiste en un soutien aux acteurs locaux de la justice formelle et informelle, dans une logique de rapprochement des deux systèmes, dans les 3 districts-clés de Surobi, Tagab et Nijrab, via notamment la formation des magistrats, la sensibilisation des populations locales à la résolution pacifique des conflits, à la création de centres de documentation, etc.

- la coopération agricole à travers des programmes d'irrigation touchant 20.000 foyers, la distribution de semences, malgré certaines difficultés à assurer le suivi des projets.

En tant que « bailleur financier de terrain », le Pôle de stabilité est à la fois présent à Kaboul (ambassade) et en Kapisa-Surobi (Nijrab, Mahmud-e Raqi, Tora), faisant office de trait d'union entre les autorités centrales et locales. Cette situation implique de nombreux déplacements sur le terrain soumis aux règles de sécurité de l'OTAN particulièrement lourdes et complexes à mettre en oeuvre (inscription dans une planification à 2 mois ; montage similaire à celui d'une opération militaire, etc.), et rendant difficile le contrôle direct des projets par les agents du pôle . C'est pourquoi plusieurs méthodes de contrôle indirect sont utilisées en fonction des situations rencontrées : rendez-vous délocalisés, utilisation d'intermédiaires, recours à des prestations d'évaluations, implication des interprètes du Pôle sur le terrain, etc.

Le futur retrait de nos forces combattantes et le basculement sur Kaboul (camp de Ware House) de l'état-major nécessitent de trouver une solution en termes de sécurité pour préserver la mobilité des agents indispensable au suivi de projets, tandis que la diminution envisagée du budget du Pôle dans les années à venir devra être conciliée avec le souhait d'assurer la pérennité des actions entreprises.

d) Un positionnement pertinent mais un certain manque de constance

L'étude très fouillée qu'a réalisée l'ambassade de France à Kaboul en novembre 2011 sur « 10 ans d'aide civile française à l'Afghanistan » fait apparaître que, malgré un positionnement assez pertinent, notre aide n'a pas toujours été homogène ni, surtout, continue dans ses montants.

L'aide civile française à l'Afghanistan, reprise en 2002, s'élève à 240 millions d'euros de décaissements effectifs en 10 ans , quel qu'en soit le « cheminement » (AFD, ambassade, ONG...).

Mais l'évolution de cette aide est loin d'avoir été homogène tant en termes globaux, comme l'illustre la courbe ci-dessous, qu'en termes sectoriels.

Source : ambassade de France à Kaboul

Trois temps ont marqué la coopération civile française :

- d'abord, un fort investissement , dans les années 2002-2003, avec des montants dépassant les 25 millions d'euros par an ;

- un reflux dans les années 2004 à 2008, lié au manque de suivi de certaines actions et à une décroissance de l'intervention financière du gouvernement français, aggravée par la quasi disparition des collectivités locales en raison de la dégradation du contexte sécuritaire ;

- la décision prise en juin 2008 de doubler l'aide française à l'Afghanistan marque le coup d'arrêt de ce déclin. Elle permettra notamment une action volontariste dans les 3 districts « français » (Kaboul, Surobi, Kapisa).

En termes sectoriels cependant, le bilan est satisfaisant et révèle des choix plutôt pertinents, comme en témoigne le graphique suivant :

La France a contribué, ces 10 dernières années, pour les 2/3 de son aide, aux besoins fondamentaux que sont la santé, l'agriculture et l'alimentation.

Si l'on écarte l'aide humanitaire et le soutien aux ONG (qui agissent pour la plupart dans ce registre), nos interventions se concentrent sur quatre secteurs que sont :

• l'agriculture : 22 % des décaissements ;

• l'éducation et la culture (enseignement primaire, secondaire, supérieur, bourses d'études en France, IFA et DAFA) : 17 %

• l'état de droit, la gouvernance et la justice : 9 %

• la santé : 5 %

Ces quatre secteurs représentent plus de 50 % de notre aide, proportion qui pourrait être encore plus élevée si certains ministères afghans tels que ceux de l'agriculture et de la santé disposaient d'une meilleure capacité à « absorber » les projets.

2. Une aide bilatérale et une présence économique modeste
a) La France au 14e rang des bailleurs bilatéraux, loin derrière nos principaux partenaires

D'après un rapport de juin 2012 de la Banque mondiale, l'aide civile internationale engagée en faveur de l'Afghanistan s'est élevée à 57 milliards de dollars entre 2002 et 2010 .

Plusieurs conférences internationales se sont succédé pour encourager cet effort : à Tokyo en janvier 2002 (6,3 milliards de dollars d'aide annoncés), à Berlin en mars 2004 (8,2 milliards de dollars promis jusqu'en 2006), à Londres en janvier 2006 (10,5 milliards de dollars mobilisés sur 5 ans).

La France a organisé le 12 juin 2008 à Paris une conférence internationale de soutien à l'Afghanistan, qui a réuni 68 pays et 17 organisations internationales. Elle a permis aux autorités afghanes de présenter la Stratégie nationale de développement de l'Afghanistan (ANDS) qui couvre la période 2008-2013 et qui constitue l'un des principaux vecteurs d'une appropriation progressive des responsabilités par les Afghans. Environ vingt milliards de dollars ont été promis lors de cette conférence, pour la mise en oeuvre de l'ANDS.

Première réunion internationale de cette importance organisée en Afghanistan, la conférence de Kaboul du 20 juillet 2010 a eu pour objet de réaffirmer et d'approfondir les engagements pris par le gouvernement afghan et la communauté internationale lors de la conférence de Londres du 28 janvier 2010. Dans le prolongement direct de cette dernière, elle a été l'occasion de valider des programmes nationaux de réformes en matière de gouvernance, de développement économique et social, de paix et de réconciliation, de sécurité et de coopération régionale. Ces programmes détaillés mettront en oeuvre, de manière concrète, la transition en vue d'une appropriation accrue des responsabilités par les autorités afghanes.

Lors de la conférence de Bonn du 5 décembre 2011, la communauté internationale s'est engagée à soutenir l'Afghanistan jusqu'en 2024. En contrepartie, le gouvernement afghan a réaffirmé ses engagements pris lors des Conférences de Londres et de Kaboul en 2010, notamment en matière de gouvernance, d'État de droit et de lutte contre la corruption.

Pourtant, la France n'a pas la place qui devrait être la sienne dans l'aide à l'Afghanistan . En termes d'aide publique et de coopération technique, le volume global de notre effort, s'il s'est accru depuis la conférence de Paris de juin 2008, reste néanmoins globalement en retrait par rapport à ceux consentis par les principaux pays développés : la France se situe au 14 e rang des bailleurs bilatéraux 10 ( * ) , d'après les chiffres du Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE en aide publique au développement (APD) nette.

En 2009 (dernière année pour laquelle les chiffres internationaux consolidés sont disponibles), l'aide bilatérale française s'est élevée à 51 millions de dollars (soit 35,8 millions d'euros), très loin derrière les États-Unis (2,9 milliards de dollars), le Royaume-Uni (372 millions de dollars) ou l'Allemagne (346 millions de dollars). Le Japon fournit aussi un considérable effort en faveur de l'Afghanistan qui atteint 7 milliards de dollars depuis 10 ans (2,5 milliards de dollars ont déjà été décaissés entre 2002 et 2011).

Ces chiffres reflètent une aide bilatérale britannique ou allemande sept fois plus élevée que l'aide française.

b) Les récents engagements du Gouvernement d'augmenter de 50 % l'aide à l'Afghanistan

Lors de la conférence de Tokyo , le 8 juillet 2012, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a annoncé une augmentation de 50 % de l'aide française à l'Afghanistan, notamment dans les domaines de l'agriculture, de l'éducation, des échanges culturels, de l'archéologie, de la recherche, du développement économique, de la sécurité, en insistant, en particulier, sur la santé.

« Nous mettrons l'accent sur l'Institut médical français pour la mère et l'enfant à Kaboul, qui a déjà accueilli 100 000 afghans, notamment des enfants et des femmes, afin qu'il puisse se développer encore, grâce au soutien de la France, de la Fondation de l'Aga Khan et d'une ONG française. Nous ouvrirons de nouveaux services en santé maternelle et néo-natale, nous développerons la télémédecine et transformerons l'hôpital en Centre hospitalier universitaire qui formera des personnels pour tout l'Afghanistan et sa région », a annoncé le ministre.

Au total, le montant global de notre aide prévue au titre du programme de coopération quinquennal annexé au traité d'amitié, pour la période 2012-2016, s'élève à 308 millions d'euros, soit une moyenne annuelle prévue de 50 millions d'euros.

Pour mémoire, notre aide bilatérale s'élevait à 36,7 millions d'euros en engagement en 2011, et à une moyenne de 38,7 millions d'euros en engagement par an sur la période 2008-2011.

L'aide française représente certes un effort très important au regard de nos contraintes budgétaires, mais également en termes de dynamique puisque nombre de pays annoncent une stabilisation de leur aide sur les 5 prochaines années, tandis que la France annonce une augmentation. Cet effort français doit être enfin mis en perspective avec l'effort collectif des Européens qui est comparable à celui des États-Unis (en ajoutant les engagements de l'Union européenne et ceux des différents États membres), soit environ 1,2 milliard par an.

Au total, à partir d'un chiffrage présenté par les autorités afghanes dans un document « Toward self-reliance - Strategic vision for the transformation decade » à la Conférence de Tokyo, le besoin de financement afghan pour une première étape de développement jusqu'en 2017 a été évalué à 3,9 milliards de dollars par an.

A Tokyo, la communauté internationale s'est engagée à soutenir le développement afghan à hauteur de 16 milliards de dollars jusqu'en 2015 et à maintenir un soutien durable d'ici à 2017, à un niveau comparable à celui des dernières années.

L'Allemagne a annoncé un financement de 420 millions d'euros par an jusqu'en 2015 en insistant explicitement (de même que l'Italie) sur son lien avec les résultats attendus du gouvernement afghan. L'Union européenne s'est engagée à apporter un soutien d'au moins 1 milliard d'euros par an jusqu'en 2015 (plus de 200 millions d'euros pour la Commission, le reste correspondant à l'effort cumulé des États membres).

c) Des relations économiques bilatérales encore balbutiantes

Malgré un potentiel important, le commerce bilatéral franco-afghan est très faible.

(1) Des relations économiques assez limitées.

Le volume de nos échanges commerciaux est marginal. Sur les dix dernières années, le volume global des échanges commerciaux entre la France et l'Afghanistan a été compris entre 16,1 millions d'euros en 2002 (valeur la plus basse sur la période) et 53,4 millions d'euros en 2009 (valeur la plus élevée sur la période). Le volume de nos échanges reste modeste et est impacté par les aléas de la situation locale en Afghanistan.

Il convient néanmoins d'indiquer que le volume réel de nos échanges est probablement plus élevé, car une forte proportion des flux commerciaux afghans avec l'étranger transite par les entrepôts situés à Dubaï, au Pakistan et en Inde et ne sont pas comptabilisés par les douanes françaises au titre des échanges France-Afghanistan.

Plus précisément, sur les deux dernières années, nos échanges commerciaux bilatéraux atteignent un peu plus de 47 millions d'euros, avec 45,7 millions d'euros d'exportations et 1,5 million d'euros d'importations en 2010, 43,7 millions d'euros d'exportations et 3,5 millions d'euros d'importations en 2011.

ÉCHANGES COMMERCIAUX BILATÉRAUX SUR LES DIX DERNIÈRES ANNÉES


(données en k€, source : Douanes, graphe : DG Trésor)

(2) Une faible présence des entreprises françaises en raison d'un contexte dégradé

En termes d'implantation, seules quelques entreprises sont actives en Afghanistan. Thales, qui a notamment remporté en 2006 le contrat pour le système de communication et d'information des communications de la Force internationale d'assistance à la sécurité de l'OTAN (FIAS) est la principale entreprise française présente en Afghanistan. Une PME est également présente dans le secteur de l'adduction d'eau à Kaboul.

L'Afghanistan reste un marché très difficile d'accès pour les entreprises françaises. La situation sécuritaire dégradée, la taille limitée du marché (volume global d'importations de l'ordre de 9 milliards de dollars seulement) et les difficultés de l'environnement des affaires expliquent la faiblesse de notre présence.

Outre la contrainte sécuritaire, plusieurs facteurs font de l'Afghanistan un pays indéniablement difficile : infrastructures déficientes, transit lent et coûteux des marchandises, situation sanitaire médiocre, insécurité du cadre administratif et réglementaire, corruption.

(3) Des opportunités à l'avenir pour les entreprises françaises

En s'appuyant sur son potentiel minier et énergétique, sur la reconstitution de ses capacités agricoles et sur la reprise des activités de transit avec les pays d'Asie centrale, l'Afghanistan dispose d'atouts pour construire une économie viable lui assurant un développement durable.

Les entreprises françaises ont intérêt à cibler en priorité d'une part les marchés financés par l'importante aide internationale et d'autre part les secteurs les plus prometteurs (hydrocarbures, ciment, eau, notamment) qui pourraient offrir des opportunités commerciales.

Le secteur minier , fréquemment cité comme étant un pilier pour le développement de l'Afghanistan, n'apparaît toutefois pas comme le principal secteur porteur pour les entreprises françaises. La valeur théorique totale du potentiel minier afghan est certes importante (fer, cuivre, lithium, or, terres rares et niobium). Des gisements de charbon sont par ailleurs exploitables dans le centre du pays. Cependant, ce sont surtout la Chine et l'Inde, principaux consommateurs de minerais du monde, qui sont au premier rang pour l'assurer l'exploitation des principaux gisements. Des organismes français se positionnent pour approfondir la connaissance des potentialités minières du pays (exploration, cadastre).

Les cinq secteurs qui semblent les plus prometteurs pour les relations économiques franco-afghanes sont plutôt :

a) Le secteur des hydrocarbures, qui présente des opportunités de partenariat ou d'investissement. En effet, les besoins afghans en produits pétroliers (environ 5 000 tonnes par jour) sont aujourd'hui couverts en quasi-totalité par des importations en provenance d'Iran, de Russie, du Pakistan. La rénovation et l'extension de capacités de raffinage dans le nord du pays est un domaine envisagé pour établir des partenariats entre acteurs privés de nos deux pays. Un tel partenariat permettrait de réduire la dépendance de l'Afghanistan à l'égard de ses voisins.

b) Le secteur du ciment , dans un contexte de rapide extension des activités de construction et des travaux publics, offre des possibilités. En effet, la consommation afghane de ciment s'élève aujourd'hui à 4 millions de tonnes par an. Les importations en provenance du Pakistan et dans une moindre mesure de l'Iran approvisionnent actuellement le marché afghan et répondent à la quasi-totalité de la demande. Ce secteur pourrait connaître une forte croissance dans les prochaines années.

c) Le secteur de l'eau apparaît comme étant particulièrement pertinent pour promouvoir le savoir-faire français. En effet, les besoins en eau en zones urbaines sont flagrants, en raison de la croissance démographique et de l'exode rural. Les besoins des grandes villes afghanes sont multiples (accès à l'eau potable, création de systèmes de traitement des eaux usées). La France possède à la fois des compétences et des entreprises aux références mondiales dans ce domaine crucial pour le développement du pays et elle est déjà présente sur ce secteur (adduction d'eau à Kaboul).

d) L'agroalimentaire : l'agriculture, qui a particulièrement souffert depuis 1979 (la production agricole a été réduite de 60 % entre 1978 et 2004), reste la principale activité économique du pays (plus des trois-quarts de la population est rurale). L'agriculture afghane est confrontée à plusieurs défis : reconstruction des systèmes d'irrigation, reconstitution des productions fruitières, constitution de filières de traitement aux normes internationales. La reconstruction des capacités agricoles afghanes est une priorité, des acteurs publics français sont déjà présents dans ce domaine qui peut également intéresser des entreprises.

e) Le secteur des infrastructures (ponts, transport ferroviaire) présente enfin des opportunités pour les entreprises et ingénieries françaises à plus ou moins long terme.

III. LES DISPOSITIONS DU TRAITÉ : OUVRIR UN LARGE CHAMP DE COOPÉRATION CIVILE ET MILITAIRE, SÉCURISER NOTRE PRÉSENCE

Côté français, le projet de loi de ratification qui nous est soumis, examiné en Conseil des ministres mercredi 11 juillet, a été déposé en premier lieu au Sénat. Il sera débattu au Sénat le 18 juillet en séance publique, et le 25 juillet à l'Assemblée nationale, pour y être adopté définitivement.

Marquant sa volonté politique d'adopter rapidement ce texte, votre commission a souscrit au délai d'examen particulièrement serré que lui proposait le Gouvernement.

Côté afghan, le projet de ratification du traité d'amitié et de coopération est actuellement au Taqnin (Commission des lois) de la Chambre basse afghane. Dès la nouvelle session parlementaire, le 21 juillet, le texte sera successivement présenté à chacune des 18 commissions . Le plan de travail de la nouvelle session n'est pas encore établi à ce jour. Une fois que le texte sera passé devant toutes les commissions, il sera examiné en assemblée plénière. Après la navette avec la Meshrano Jirga (Sénat), le traité sera ensuite promulgué par un décret présidentiel. Il n'est pas possible, à cette date, d'avancer une date prévisionnelle de ratification du traité d'amitié par le parlement afghan.

A. UNE AMBITION LARGE, UNE PERSPECTIVE DE LONG TERME, MAIS DES MOYENS CONTRAINTS

1. Premier traité de coopération signé hors de la région, il engage la France dans le long terme aux côtés du peuple afghan

Le traité d'amitié et de coopération avec l'Afghanistan est un événement historique dans les relations franco-afghanes : c'est le premier traité conclu par les deux pays depuis qu'ils ont établi des relations diplomatiques en 1922. Il inscrit nos relations dans la durée , puisqu'il est conclu pour 20 ans et prévoit, entre autres, des emphytéoses de 99 ans pour deux de nos établissements culturels (Institut culturel et délégation archéologique).

Au moment où la France réduit, en coordination avec ses alliés, sa présence militaire et passe la main aux autorités afghanes, le traité et le programme de coopération très précis qui l'accompagne prévoient la montée en puissance de notre coopération bilatérale en matière de sécurité, mais surtout en matière civile.

Le traité marque l'évolution du soutien français à l'Afghanistan, d'une dominante militaire à une dominante civile. Il englobe les différents projets de notre coopération bilatérale actuelle et future, et les réorganise autour d'axes clairs, dans un souci de meilleure lisibilité, et de garanties renforcées, en termes notamment de sécurité.

Le programme à cinq ans, dont le budget devra cependant être confirmé chaque année par le Parlement dans le cadre de la loi de finances, prévoit un certain nombre de projets emblématiques, comme par exemple :

. Dans le domaine de la sécurité :

- l'appui à la création d'une École de Guerre afghane ;

- l'appui à la création d'une gendarmerie afghane ;

Dans les autres domaines :

- la réalisation d'une deuxième, puis d'une troisième phase (CHU) de l'hôpital français pour la mère et l'enfant   ;

- l'appui à la création d'un réseau de lycées techniques agricoles ;

- un partenariat entre le bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM et le Service géologique afghan ainsi que la formation d'ingénieurs des mines et de géologues ;

- la contribution à des projets d'infrastructures (adduction d'eau, rail) ;

- la poursuite de projets de coopération, au-delà de 2014, en Kapisa et Surobi.

Le traité comporte des engagements de la part de la partie afghane :

- un engagement à coopérer en matière de lutte contre la drogue et le terrorisme ;

- l'octroi, attendu depuis longtemps, de facilités nécessaires aux personnels et institutions qui concourent à la relation bilatérale (exemptions fiscales et douanières pour l'Agence française de développement et nos ONG, emphytéoses de 99 ans pour l'Institut français et la Délégation archéologique) ;

- la promotion de la langue française à tous les niveaux d'enseignement. Dans le programme à 5 ans, le Français devient langue vivante officielle ;

- la pérennisation de nos instituts culturels.

L'Afghanistan a conclu d'autres partenariats bilatéraux avec plusieurs États de la coalition ou de la région : États-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Australie, Inde, Chine.

Les autres accords de partenariat signés par l'Afghanistan :

- États-Unis : Intitulé « Enduring strategic partnership agreement », l'accord de partenariat stratégique conclu entre les États-Unis et l'Afghanistan en marge du Sommet de Chicago comprend un volet coopération civile formulé de manière très générale (mention simple de quelques grands secteurs : éducation, agriculture, santé, infrastructures...). Ratifié en mai par le Parlement afghan, cet accord est un « executive agreement » juridiquement contraignant mais qui n'exige pas la ratification du Congrès américain.

- Royaume-Uni : le 28 janvier 2012, le président Karzaï a signé à Londres avec David Cameron, un partenariat stratégique ( UK Afghanistan Enduring Strategic Partnership ) portant sur le dialogue politique et la coopération en matière de sécurité, de gouvernance, de développement et de liens culturels. Ce document qui n'a pas de valeur juridiquement contraignante pose dans leurs grandes lignes les bases de la coopération entre gouvernements britannique et afghan pour dix ans (à l'issue desquelles le partenariat fera l'objet d'une revue stratégique).

Outre l'affirmation d'un soutien britannique aux efforts de réconciliation du gouvernement afghan avec les talibans et aux réformes en cours (système électoral, réforme de l'administration publique, lutte contre la corruption par exemple), ce « document » comprend un volet important en matière de formation des ANSF, avec l'annonce de la création en Afghanistan d'une académie militaire (sur le modèle de l'académie militaire royale de Sandhurst) et l'accueil d'officiers afghans dans les écoles britanniques de formation des cadres . Dans le domaine économique, le partenariat lancé le 28 janvier dernier annonce la volonté des deux gouvernements de conclure des accords de protection des investissements et de non-double imposition en vue de favoriser le développement des relations économiques et commerciales.

- Australie : le 20 mai 2012, en marge du Sommet de l'OTAN à Chicago, un accord de partenariat a été signé avec l'Afghanistan prévoyant de maintenir un niveau substantiel d'aide publique au développement (190,3 millions auD sur deux ans, de mi 2012 à mi 2014). Ce partenariat d'ensemble et à long terme (" Comprehensive Long-term Partnership ") mentionne notamment la lutte contre les menaces transversales comme le terrorisme, les narcotrafics et la traite d'êtres humains. Il encourage également les relations économiques et les investissements. Le Partenariat précise que l'Australie soutiendra la demande d'accession de l'Afghanistan à l'OMC, et qu'elle va appliquer d'ores et déjà le régime douanier qu'elle propose aux pays les moins avancés (accès des biens originaires d'Afghanistan, libres de droits et de quotas, pour autant qu'ils répondent aux normes australiennes).

- Inde : L'Inde cherche à consolider sa présence et assurer la défense de ses intérêts, dans la perspective du retrait de la communauté internationale. A cette fin, le Premier ministre indien a annoncé en mai 2011 la mise en place d'un partenariat stratégique bilatéral, confirmé le 4 octobre 2011 par la signature d'un document cadre à Delhi, incluant : un volet politique et de sécurité : établissement d'un dialogue stratégique ; formation, en Inde, des forces de sécurité afghanes - principalement en Inde- ; possibles livraisons d'équipements et programmes de renforcement des capacités des ANSF ; un volet de coopération, mettant l'accent sur l'éducation, la gouvernance et les micro- projets ( Small Development projects ) ; un volet d'échanges humains ; un volet économique : secteur minier, énergie, transports et infrastructures.

- Allemagne : A l'occasion de la visite à Berlin du président Karzaï, l'Allemagne a signé le 16 mai 2012 un accord de coopération avec l'Afghanistan, texte très général qui définit simplement le cadre de la coopération bilatérale. Dans le domaine de la coopération civile, l'accord ne comprend aucun engagement chiffré mais laisse ouvert un champ d'action très large en incluant: les thématiques premières de la coopération allemande aujourd'hui (soutien au développement économique durable, formation, approvisionnement énergétique, secteur de l'eau et bonne gouvernance) ; plusieurs sujets plus récents tel le développement de l'aviation civile afghane (avec pour objectif l'établissement du cadre institutionnel et réglementaire nécessaire dans ce domaine); la coopération dans le domaine de l'exploitation minière (sur la base de la déclaration d'intention du 20 juin 2011 signée entre le ministre afghan des Mines et le ministre allemand de l'Economie). Pour le suivi et la mise en oeuvre de cet accord, un groupe de travail piloté par les ministères des affaires étrangères est mis en place.

- Italie : L'Italie et l'Afghanistan ont signé, à l'occasion de la visite officielle du Président Karzaï à Rome les 25 et 26 janvier dernier, un « accord de partenariat et de coopération bilatérale de long terme » similaire à celui signé ensuite à Paris et à Londres. Cet accord, juridiquement contraignant, ne comporte pas d'engagements financiers directs mais doit malgré tout être ratifié par le Parlement italien au titre de l'art.80 de la Constitution. Il vise à confirmer la poursuite de l'engagement italien aux côtés de l'Afghanistan après 2014 et comporte des dispositions générales sur la coopération politique, l'aide au développement, la sécurité, la lutte contre la criminalité et le trafic de drogue, les coopérations économique et culturelle. Trois grands domaines prioritaires sont identifiés pour l'aide au développement future : développement économique et rural ; gouvernance et Etat de droit (Rome insiste régulièrement sur la protection des femmes et des enfants) ; infrastructures et ressources naturelles.

- Union européenne : L'Union européenne et l'Afghanistan ont engagé en mars 2012 la négociation d'un « accord de coopération en matière de partenariat et de développement ». Cet accord comprend :

- des clauses politiques contraignantes sous-tendant l'ensemble des relations entre l'UE et les pays tiers : respect des droits de l'Homme, démocratie, État de droit ; non-prolifération des armes de destructions massives ; lutte contre le terrorisme ;

- des dispositions relatives à la coopération en matière de développement (engagement en matière d'éradication de la pauvreté) ;

- des dispositions portant sur le commerce et les investissements dans le but de favoriser un accroissement des échanges entre l'UE et l'Afghanistan ainsi qu'une adaptation de la réglementation afghane aux normes internationales (la libéralisation tarifaire, les subventions agricoles et les questions d'accès préférentiels aux marchés n'entrent pas dans le champ de l'accord proposé) ;

- des dispositions relatives à une coopération dans les secteurs suivants : justice et sécurité, administration publique, énergie, transport, éducation, culture, santé, agriculture, coopération régionale, environnement.

Tout récemment, le 7 juillet dernier, en visite à Kaboul, la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton a déclaré que l'Afghanistan devenait le 15 e « allié majeur non membre de l'OTAN » des Etats-Unis. Cette première mise en oeuvre de l'accord bilatéral de partenariat stratégique entre les deux pays garantit l'engagement américain dans la durée en matière notamment de formation et de financement dans les domaines de la sécurité et de la défense.

2. Un très large champ ouvert pour la coopération institutionnelle, économique et sociale
a) La coopération en matière de sécurité et de défense

L'article 3 du Traité est relatif à la coopération de sécurité et de défense. Le traité ne prévoit aucune clause d'assistance ou d'engagement automatiques en matière de défense.

Il prévoit en revanche une coopération en matière de sécurité et de défense, dont l'étude d'impact précise qu'elle sera « adaptée à l'évolution de la situation sécuritaire en Afghanistan » . Cette coopération prendra notamment la forme d'actions de formation et de conseil conduites par la partie française, qui apportera également son soutien à la création d'une gendarmerie nationale afghane. Cette coopération du ministère de la Défense s'effectuera dans le cadre multilatéral de la coalition à travers la participation de la France à la « NATO Training Mission Afghanistan (NTMA)-Army » (par distinction avec la composante NTMA- Police).

L'opération « Epidote » est composée de plusieurs détachements d'instruction opérationnelle travaillant chacun au profit d'une école militaire afghane dans un domaine précis. Le nombre de personnels actuellement en Afghanistan sous mandat Epidote est de 126. Ce volume est appelé à décroître progressivement jusqu'à 50 à l'horizon 2014, la pérennité de cette structure au-delà de 2014 sera abordée ultérieurement entre alliés de la FIAS. Pour les 3 dernières années, le nombre de stagiaires ayant bénéficié de formations conduites par le dispositif Epidote s'élève à  1459 en 2009, 4.621 en 2010 et 3.657 en 2011.

En complément de la pérennité de ces actions de formation, les unités qui ont été formées par la France pourront bénéficier d'un soutien ponctuel au moyen de détachements d'instruction opérationnelle à la requête de la partie afghane lors des réunions d'états-majors annuelles. A ces deux éléments peuvent s'ajouter :

- les 88 militaires déployés au sein de l'hôpital militaire de KAIA, majoritairement au profit des Afghans (en 2011, 50 % des consultations et 88 % des actes chirurgicaux),

- les 8 experts démineurs insérés dans le laboratoire de contre IED de l'Union européenne,

- les actions complémentaires d'Epidote en matière d'enseignement de la langue française.

Enfin, en matière de coopération pour la sécurité intérieure, l'effort sera renforcé par l'ouverture d'un poste de coopérant gendarme qui deviendra conseiller en chef de la Police nationale afghane. Il s'ajoutera à l'expert technique international en place depuis 2009 qui est en charge de la composante « police » du Fonds de solidarité prioritaire (FSP) « Appui à la Réforme du système de sécurité (RSS) » en Afghanistan et qui offre des missions :

- d'appui à la police judiciaire (lutte contre les stupéfiants ; laboratoire de police scientifique ; brigades des mineurs) ;

- de création d'un service de protection des personnalités ;

- de lutte contre la fraude documentaire ;

-de protection civile.

b) La coopération en matière agricole

L'article 4 du Traité porte sur la coopération dans les domaines de l'agriculture et du développement rural. La France apporte son expertise pour développer la productivité agricole, notamment en matière d'irrigation, d'amélioration des semences et de conservation des produits, d'élevage, de soutien vétérinaire et phytosanitaire, d'extension du système coopératif et d'enseignement technique agricole.

Les volumes financés par la France dans le secteur de l'agriculture restent modestes comparés à ceux d'autres bailleurs de fonds, mais nos interventions sont visibles et appréciées des Afghans.

Premier poste de dépense de l'aide civile française à l'Afghanistan (40 % en moyenne au cours des dernières années), la coopération en matière d'agriculture et de développement rural a débuté dès 2002 par l'envoi de 19 000 tonnes de farine et de semences sélectionnées qui, mises sur le marché local, ont permis d'alimenter un fonds de contrepartie permettant de financer nos premières opérations, notamment l'installation de notre assistant technique dans les locaux mêmes du ministère afghan de l'agriculture, le MAIL.

Sur la période 2004-2007, c'est un total de 15 millions d'euros qui a été consacré à l'agriculture. L'intervention de l'AFD, à partir de 2006, a permis de donner davantage de consistance à cette coopération en consolidant notre « plate-forme agricole » placée auprès du Ministère de l'Agriculture, ( FCO-MAIL ). Depuis lors, nos opérations ont emprunté plusieurs canaux (financement transitant par le budget afghan - « core buget »- ou via l'AFD - « off buget ») et visé différents objectifs, avec des résultats contrastés.

1/. Les opérations transitant par le budget afghan : 36,4 millions d'euros d'engagements :

- contribution au NSP ( National Solidarity Program ) pour le développement communautaire en Kapisa et Surobi (8 millions d'euros). Destinée à financer des petits projets d'infrastructures municipales approuvés par les assemblées villageoises préalablement élues et réalisés par des partenaires techniques ( UN-Habitat en Kapisa, Action Aid en Surobi), sous la supervision du ministère afghan du développement rural, cette contribution, entièrement versée en juillet 2009, n'était consommée qu'à hauteur de 10 % sur le terrain en septembre 2010. Afin d'accélérer les versements, il a donc été décidé, en juillet 2010, d'étendre la zone d'application de cette contribution à des projets situés dans les districts périphériques de la province de Kapisa et du district de Surobi. A l'automne 2011, le taux de décaissement est désormais de 90 %.

- développement agricole des régions nord et nord-est (5,2 millions d'euros) : ce projet est destiné à favoriser le développement de la culture du coton et des céréales par l'accroissement des rendements et l'amélioration de la productivité des coopératives agricoles. Il s'inscrit directement dans le cadre de la lutte contre l'opium pour lequel il représente une substitution. Les décaissements ont commencé début 2012.

- relance de l'apiculture en Afghanistan (3 millions d'euros). Ce programme aura pour objectif l'augmentation de la production de miel grâce à l'amélioration des rendements des vergers suite à une meilleure pollinisation. La convention financière a été signée le 12 octobre 2011.

- appui à la filière élevage en Afghanistan (2,5 millions d'euros). Le premier volet de ce projet concerne le renforcement du centre piscicole de Qarhga (dans la banlieue de Kaboul) pour assurer un approvisionnement en alevins et la formation des pisciculteurs à l'élevage des truites en eaux froides. Le second volet porte sur un appui au centre d'insémination artificielle de Guzarga (également dans la banlieue de Kaboul), afin d'améliorer la génétique du cheptel bovin et développer la filière laitière. La convention financière a été signée le 12 octobre 2011.

2/. Les opérations ne passant pas par le budget afghan (33millions d'euros)

- opérations en Kapisa/Surobi en appui à nos forces, sous la responsabilité du Pôle de Stabilité : projets de développement agricole (13,2 millions d'euros sur les programmations 2009-2010). Ces projets, dont la finalité est de favoriser la stabilisation de ces zones d'engagement des troupes françaises, en améliorant les conditions de vie de la population, comprennent essentiellement trois volets :

- distribution aux agriculteurs de semences , d'engrais et de petit matériel (ruches et poulaillers) et formations correspondantes ;

- aménagement de bassins versants et réalisation des petits travaux d'irrigation (ONG Afrane ) ;

- formation de maçons spécialisés dans la construction de près de  200 celliers agricoles traditionnels (ONG GERES ).

c) La coopération en matière de santé

L'article 5 du traité porte sur la coopération en matière de santé.

Le but est de contribuer à réduire le taux de mortalité maternelle et infantile, d'augmenter la capacité d'accès aux soins médicaux de qualité et d'améliorer le niveau de formation des médecins et personnels médicaux.

A ce titre, la partie française apporte son soutien aux institutions de santé afghanes, en particulier l'Institut médical français pour l'enfant (IMFE) de Kaboul. La coopération est recherchée entre les établissements d'enseignement supérieur de formation médicale, pharmaceutique et d'administration hospitalière français et afghans.

L'IMFE constitue aujourd'hui la structure hospitalière afghane la plus avancée dans les techniques médicales de pointe , avec un plateau technique sans équivalent à Kaboul. Institut privé, il accueille une partie des patients afghans soignés d'ordinaire à l'étranger, sans que les patients pauvres soient écartés puisqu'un important fonds de soutien est prévu à leur attention. Par ailleurs, des enfants nécessiteux de Kapisa et de Surobi bénéficient également de ce dispositif, sur financements français. Il s'est imposé en quelques années comme un fleuron de notre coopération au bénéfice de la population afghane dans le secteur prioritaire de la santé mère-enfant, ainsi qu'un élément important de la visibilité de la France.

Le programme de coopération à cinq ans qui accompagne le traité d'amitié franco-afghan prévoit une extension importante de l'IMFE (« phase 2 »). Elle portera notamment sur la construction et l'équipement d'un bâtiment doté de services de gynéco-obstétrique et de néonatologie , la distribution de soins prénataux, d'accouchement, de soins post-nataux et néonataux de haut niveau, et le renforcement des capacités du personnel de santé. A terme («phase 3 »), l'IMFE deviendra un centre hospitalier universitaire sur le modèle de l'hôpital universitaire de l'Aga Khan à Karachi.

Enfin, dans le cadre de nos engagements du G8 de Muskoka, notamment le renforcement de la coopération transfrontalière autour de l'Afghanistan, l'IMFE constituera un pôle régional apportant son soutien aux échanges humains, à la formation et à l'utilisation des nouvelles technologies (télémédecine), entre le Pakistan, l'Afghanistan, le Kirghizstan et le Tadjikistan.

d) La coopération en matière d'éducation et d'enseignement supérieur

L'article 6 du Traité définit les grands axes de la coopération en matière d'éducation et d'enseignement supérieur.

Il s'agira en particulier de :

- développer l'enseignement de la langue française ;

- soutenir les lycées Esteqlal et Malalaï de Kaboul, établissements éducatifs fondés par la République française ;

- former des ingénieurs et chercheurs afghans à travers un partenariat entre l'Université polytechnique de Kaboul (UPK) et le Groupe des écoles des mines (GEM) et les universités françaises compétentes dans ce domaine ;

- encourager les échanges d'étudiants avec des écoles supérieures ou différentes universités françaises notamment à travers des bourses françaises délivrées par l'État et des fondations.

Depuis les années 20, la France a été présente en Afghanistan à travers les lycées Esteqlal (garçons) et plus tard Malalaï (filles). Ayant atteint son apogée dans les années 70 où un grand nombre d'enseignants français étaient détachés dans les établissements (toutes disciplines confondues) ce qui permettait aux bacheliers afghans de poursuivre leurs études en France, le dispositif français devait quitter les lycées en 1985 mais perdurait « en exil » à Peshawar (Pakistan). Après la chute du régime des talibans, les deux lycées ont été rouverts en mars 2002. S'ils conservent une réputation d'excellence et un caractère privilégié par rapport à d'autres établissements du primaire et du secondaire, force est de constater que la situation est bien différente de celle qui prévalait dans les années 70 : les effectifs ont été multiplié par trois (plus de 7.000 élèves sur les deux établissements).

Le projet ALEM (appui aux lycées Esteqlal et Malalaï ) vise à promouvoir l'enseignement de la langue française, l'enseignement des sciences en dari et en français et à appuyer la direction administrative et pédagogique et la gestion financière et matérielle des deux lycées. Il se concrétise par l'animation d'activités périscolaires et par la gestion des deux bibliothèques/médiathèques.

Face au nombre très important d'élèves et au faible niveau en français, aussi bien des professeurs afghans de français que des élèves, il a été décidé de mettre en place, dès la rentrée 2010, une classe pilote par niveau rassemblant les meilleurs élèves dans toutes les disciplines (particulièrement en français) et les meilleurs professeurs. En 10 e et en 11 e , un enseignement des mathématiques et de la physique, à raison d'une période par semaine plus une séance de travaux pratiques ou de travaux dirigés supplémentaires, a été mis en place.

En réponse à une demande du vice-ministre de l'éducation, la France apportera son appui à la construction d'un corps d'inspection au sein du ministère de l'éducation afghan .

En matière d'enseignement supérieur , notre coopération s'illustre notamment au travers du projet SEFA (Soutien à l'enseignement du français en Afghanistan).Sa première phase avait pour but de construire et d'équiper un département de français et d'en former les professeurs. La seconde phase, engagée en 2010, a pour objectif d'élargir les enseignements de français à de nouvelles institutions partenaires et de poursuivre l'appui à la pédagogie de langues nationales et de sciences au niveau universitaire. Il consiste en un appui direct (humain, logistique, matériel) aux facultés universités concernées, en des formations initiales et continues (diplômantes ou non) à l'attention de professeurs et étudiants et en une réforme administrative des services universitaires.

Au fil des années, le projet a accompagné le développement de la faculté de lettres et langues en termes de formation, de construction et d'équipement. Le département de Français de l'université de Kaboul a été complètement achevé et équipé.

Les départements d'espagnol, d'archéologie, d'architecture, les facultés de droit et sciences politiques, de pharmacie et l'université médicale de Kaboul proposent le français en langue vivante 1 aux étudiants en 1 re et 2 e années (années pendant lesquelles une langue vivante est obligatoirement étudiée). En province, à la demande du chancelier de l'Institut Pédagogique de Parwan, la coopération a été reprise en 2011 avec l'ouverture d'une classe en 1 re année. Les diplômés de l'Université de Kaboul et l'Institut Pédagogique de Parwan ont permis d'identifier une nouvelle génération d'enseignants. Ils bénéficient désormais d'une formation continue afin qu'ils soient prêts à intervenir au sein de toutes les institutions en Afghanistan où le français est enseigné.

Des travaux d'aménagement ont été entrepris, pour la construction de laboratoires, à l'Institut de formation des Maîtres de Kaboul et à celui de Hérat ; des actions de recherche et publication (bilingue) ainsi que le financement de stages pratiques pour les étudiants en 5 e et dernière année avec l'Institut médical français pour l'enfant (IMFE) sont également mis en place et soutenus par le projet.

Toutes les nouvelles actions envisagées s'inscrivent dans la perspective du traité d'amitié et le programme de coopération à 5 ans, dont le principal objectif est d'aider à la titularisation de 25 professeurs par an .

Plusieurs actions sont envisagées :

- orienter la licence de français vers la formation de futurs professeurs compétents (excellence linguistique et compétences didactiques opérationnelles) ;

- participer à l'élaboration d'un processus national de titularisation et permettre la titularisation d'un maximum de professeurs dans les années à venir ;

- identifier un partenaire universitaire français, pour mettre en place un échange d'étudiants (ou en tout cas l'accueil des étudiants afghans ou sein de l'université) ;

- effectuer un transfert de compétences envers l'équipe afghane (en matière de coordination et d'administration) afin qu'à terme, elle puisse auto-gérer le département ;

- revaloriser le statut du professeur de français, notamment titulaire, c'est-à-dire, fonctionnaire de l'administration afghane, et créer un vivier de nouveaux professeurs en faisant évoluer le processus de recrutement .

e) La coopération en matière archéologique

L'article 7 du Traité est relatif aux échanges culturels et à la protection du patrimoine archéologique afghan.

Il s'agira de renforcer l'enseignement et la recherche universitaires historiques et archéologiques et de mettre en valeur les oeuvres d'art et les éléments patrimoniaux.

Les parties s'engagent à faciliter les activités de l'Institut français d'Afghanistan (IFA) et de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA). Elles assurent la pérennité de ces établissements par la conclusion d'une emphytéose (bail de très longue durée) au profit de l'IFA, sur son site historique, et de la DAFA sur le site de l'Institut national d'archéologie, qui doit être bientôt reconstruit.

La coopération patrimoniale franco-afghane entamée en 1922, à la demande du Roi Amanullah est à l'origine de la création de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA). Elle est aujourd'hui la seule délégation archéologique permanente. A ce titre, elle entretient une relation de travail, marquée par une très grande relation de confiance, avec l'Institut national d'archéologie afghan et appuie l'intervention des autres missions archéologiques françaises ou étrangères lors de leur séjour en Afghanistan. Le champ disciplinaire de la DAFA touche tous les domaines concernés par le patrimoine culturel hérité du passé, patrimoine mobilier, patrimoine archéologique et monumental. Quatre orientations définissent ses activités : recherche, conservation et préservation, formation et information, mise en valeur du patrimoine. Les programmes scientifiques en cours sont :

- l'étude de l'occupation ancienne de l'oasis de Bactres et de son arrière-pays (fouilles archéologiques de Bactres, de Cheshme, prospections archéologiques et cartographie des sites anciens), l'étude du cadre physique et naturel du peuplement ancien (géomorphologie et hydrologie du delta de Balkh Ab)

- le programme d'archéologie urbaine à Hérat (mise en place d'une veille archéologique sur les zones de la ville en cours d'aménagement, étude du parcellaire urbain et du réseau des rues)

- l'étude de l'environnement ancien de Bamiyan

- l'étude de la mosquée de Noh Gonbad « Hâji Piâda » du IX e siècle.

Dans le cadre du traité à 5 ans, sont prévus la construction d'un nouveau bâtiment pour la DAFA, la création d'un service de répression du trafic des oeuvres d'art et l'octroi de bourses en archéologie (accueil en France de 5 étudiants).

f) La coopération pour la consolidation des institutions

L'article 8 traite des questions de gouvernance démocratique. La partie française s'engage à apporter son appui au renforcement de l'État de droit et à l'efficacité des institutions afghanes et à contribuer à la formation des cadres de l'administration centrale et territoriale et de la magistrature ainsi qu'à celle des cadres administratifs des deux assemblées parlementaires.

La France s'engage également à participer à la formation des professeurs de droit des universités afghanes. Une attention particulière est portée à la protection des droits des femmes et leur accès à la justice.

(1) Le Parlement français : un engagement précoce (2004) en faveur du renforcement de l'expertise parlementaire

Les deux chambres du Parlement français ont d'ores et déjà engagé un important volet de coopération technique avec leurs homologues afghanes, qui sera poursuivi dans le cadre du présent traité.

Dès après le vote, par la grande assemblée Loya jirga , de la Constitution du 3 janvier 2004, l'idée d'une contribution de la France au rétablissement d'institutions parlementaires en Afghanistan avait été évoquée par l'ambassade de France à Kaboul auprès du comité des États donateurs.

Du 13 au 17 décembre 2004, deux fonctionnaires du service des Relations internationales du Sénat ont effectué une mission d'évaluation à Kaboul. Cette mission consistait d'une part, à rencontrer la totalité des membres de la communauté internationale impliqués dans le programme de mise en place des assemblées parlementaires afghanes et, d'autre part, à élaborer le programme de formation des futurs fonctionnaires du Parlement afghan.

En décembre 2004, en accord avec la Commission afghane de la fonction publique, une première formation fut délivrée, à Paris, à huit futurs directeurs de service récemment recrutés, par l'Assemblée nationale française en coopération avec l'ENA. Ces stagiaires furent accueillis au Sénat français, au Palais du Luxembourg.

La présence à Kaboul, du 15 janvier au 6 avril 2005, d'un expert parlementaire français permit notamment de mener à bien, en concertation avec les autorités parlementaires afghanes, la rédaction de deux documents :

- le programme de formation pour les fonctionnaires parlementaires afghans, dont le contenu sera présenté plus loin ;

- un avant-projet de Règlement de l'Assemblée nationale d'Afghanistan qui regroupera les deux futures chambres.

Du 29 mars au 1 er avril 2005, M. Azizullah LODIN, secrétaire général de l'Assemblée nationale d'Afghanistan, se rendait à Paris pour prendre part à une réunion d'information des pays donateurs sur la mise en place du Parlement afghan, organisée à l'initiative du ministère français des Affaires étrangères.

En février 2005, le programme « SEAL I » ( Support to the establishment of the Afghan legislature ) qui résultait d'un accord entre l'État transitoire islamique d'Afghanistan et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) était rendu public. La France y était reconnue comme « nation pilote pour le soutien parlementaire ».

Il s'agissait de construire les capacités des équipes administratives et techniques comme celles des membres du parlement pour assurer un fonctionnement efficace et maîtrisé de celui-ci.

La première phase, d'une durée de quatre semaines, a eu pour objet la formation de base et semi-théorique aux différents métiers parlementaires . Elle s'est déroulée avec succès à Kaboul, avec le concours d'administrateurs des deux assemblées parlementaires françaises, du 15 juin au 12 juillet 2005.

Une deuxième phase, destinée à permettre une approche comparée des modes d'organisation parlementaire, s'est déroulée à compter de juillet 2005 au moyen de stages dits « professionnalisants », par groupes, dans divers parlements dans le monde (Italie, Allemagne, Inde, Indonésie, Maroc, Turquie). Elle a donné lieu, en France, du 25 septembre au 5 octobre, à l'accueil d'une quinzaine de fonctionnaires du Parlement afghan dans les deux assemblées françaises. Ce stage s'est déroulé à Paris sous les meilleurs auspices.

Une mission d'ingénierie architecturale parlementaire a été effectuée, en juin 2005, par l'architecte du Sénat français, afin de déterminer les aménagements de locaux restaurés des deux assemblées afghanes et d'évaluer les circulations souhaitables.

Notre collègue Jean FRANCOIS-PONCET, ancien sénateur français (UMP - Lot-et-Garonne) et ancien ministre des Affaires étrangères, s'est rendu à Kaboul du 11 au 18 octobre 2005. Il a prononcé une importante conférence sur le thème « Fonction publique parlementaire : le point de vue d'un élu » devant les quelque deux cents fonctionnaires du futur Parlement afghan , dans le cadre du centre culturel français Esteqlal . Il s'est notamment entretenu avec M. Azizullah LODIN, secrétaire général de l'Assemblée nationale qui réunit les deux chambres du Parlement.

Les élections législatives se sont déroulées en Afghanistan le 18 septembre 2005 dans le calme. Elles ont conduit à la désignation des  249 députés à la Wolesi jirga (Chambre des députés). La formation de la Meshrano jirga (Sénat) - qui devrait compter 102 membres - est restée incomplète, celle-ci étant conditionnée, pour deux tiers, par des élections au sein des conseils de provinces et des conseils de districts. En dépit de difficultés nombreuses et de tous ordres, les assemblées afghanes se sont mises au travail et sont parvenues, à compter de l'été 2006, à commencer à effectuer un réel travail législatif (dépôt et discussion d'amendements).

Une mission effectuée, pour le compte des deux assemblées françaises, à Kaboul, du 4 au 10 septembre 2006 par le service des Relations internationales du Sénat, a permis d'évaluer les effets en 2006 et les perspectives pour 2007 du programme SEAL.

La coopération s'est poursuivie entre 2006 et 2009 sur ces bases :

- Les visites à Paris des président présidents des assemblées parlementaires afghanes (novembre 2006) ;

- La visite à Paris, en « jumelage », du président de la commission des Relations internationales de la Meshrano jirga (M. Ramazan) (15 au 20 janvier 2007) ;

- Un stage à Paris pour dix fonctionnaires (5 au 16 février 2007) ;

- Un stage à Paris pour deux fonctionnaires (17 au 22 décembre 2008) ;

- Une mission d'appui administratif au secrétaire général du Parlement (M GRAN), effectuée en novembre 2010 à Kaboul. Cette mission a comporté notamment :

- un séminaire de deux jours sur trois thèmes partant de la référence française : le rôle des commissions permanentes ; la fonction de contrôle ; et les rapports entre le Parlement et l'Exécutif ;

- une audience par le président de la Chambre des députés et des entretiens techniques avec les Secrétaires généraux des deux Assemblées afghanes.

- La visite à Paris de M. Zalmaï ZABULY, président de la commission des Plaintes de la Meshrano jirga et deux de ses collaborateurs (3 au 10 octobre 2010) ;

- un stage à Paris de quatorze fonctionnaires, issus des deux assemblées afghanes (2 au 10 novembre 2010)

- une visite d'étude pour des parlementaires et fonctionnaires parlementaires sur le thème de la « Procédure budgétaire » (4-10 avril 2011), en partenariat avec l'Assemblée nationale et l'ENA.

Au total, ce sont quelque 60 parlementaires ou fonctionnaires afghans qui ont été reçus au Sénat, outre la centaine de ceux qui avaient reçu la formation initiale à Kaboul à l'été 2005.

Une mission d'experts de l'Assemblée nationale s'est récemment rendue à Kaboul, du 8 au 13 juin 2012, pour assurer une formation de légistique pour leurs collègues fonctionnaires parlementaires des deux chambres du Parlement.

L'objet de la mission était double :

- d'une part, de former les fonctionnaires des deux chambres du Parlement afghan aux techniques de rédaction d'articles de projets ou de propositions de loi, ainsi que d'amendements, et évaluer de manière plus générale les besoins de ce Parlement ;

- d'autre part, d'exposer aux fonctionnaires parlementaires afghans les différents modes de scrutin . L'Afghanistan s'engage en effet dans une réforme électorale alors que le contexte sécuritaire du pays est tendu. Le mode de scrutin retenu aura des conséquences sur son déroulement (marqué par de nombreuses irrégularités en 2010).

En vue des prochains scrutins (élection présidentielle en 2014, élections législatives en 2015), un projet de réforme de la loi électorale devrait être prochainement déposé et discuté au Parlement, en vue d'une adoption dans le courant du premier semestre 2013. L'enjeu est d'autant plus important que la loi électorale aujourd'hui en vigueur n'a pas été examinée par les chambres (elle est issue d'un décret présidentiel pris en février 2010) et que les contestations des résultats des élections législatives de septembre 2010 ont donné lieu à une importante crise institutionnelle, témoignant d'un désaccord tant sur les règles applicables que sur les recours disponibles pour les faire respecter.

Au regard des besoins constatés lors de ces différentes missions, votre commission souhaite que la coopération bilatérale entre le Parlement afghan et le Parlement français soit poursuivie.

(2) La formation des magistrats afghans et l'assistance à la rédaction des lois

L'IIPEC (Institut International Pour les Études Comparatives) assure une partie de la formation obligatoire pour les magistrats afghans dans le cadre du « stage judiciaire » organisé par la Cour Suprême. Cette coopération constitue le point d'ancrage de la coopération franco-afghane dans le milieu judiciaire afghan, qui sera diversifiée, en faisant notamment appel à l'ENM (école nationale de la magistrature), dans le cadre d'une formation de formateurs. Après plus de six ans de formation directe des juges, le moment est venu de créer les conditions permettant aux Afghans d'acquérir progressivement la maîtrise de leur formation.

L'action auprès de la Cour Suprême sera relancée, en matière de droit constitutionnel, en particulier l'interprétation de la Constitution afghane et de mise en place d'un contrôle de constitutionnalité indispensable à la mise en place d'un État de droit crédible. Un appui a également été apporté à la relance des relations entre Barreaux afghans et français. Le Bâtonnier de Kaboul a ainsi participé à la convention nationale du Conseil national des Barreaux français (Nantes, octobre 2011). Un concours de plaidoiries est également prévu

La coopération judicaire française s'inscrit dans une dimension bilatérale, avec une aide apportée au département de rédaction des lois (Taqnin) dans le cadre notamment du projet de loi de procédure pénale, et une dimension multilatérale, avec une participation du chef de projet aux travaux du Groupe de travail en matière de droit pénal, qui réunit des experts des acteurs internationaux les plus importants. En ce sens, choix a été fait de plaider en priorité pour le respect des libertés individuelles, domaine dans lequel la France et son système pénal inquisitoire fait référence. Ceci participe d'une stratégie visant à équilibrer la vision très sécuritaire habituellement défendue par une partie de la communauté internationale et qui, sans tempérament, risque d'accroître le sentiment d'injustice de la population afghane et creuser le fossé de légitimité qui la sépare de ses institutions nationales. Le Bureau du Procureur Général, du fait de moyens limités, est essentiellement associé, lorsque convergence se fait, aux actions menées avec d'autres partenaires tels que le Ministère de la Justice.

Une association poussée a également été menée avec le Pôle de stabilité présent en Kapisa-Surobi dans le domaine de l'assistance à la justice locale .

(3) La formation des 34 vice-gouverneurs de province.

La coopération pour la formation des 34 vice-gouverneurs de province vise à renforcer des capacités en matière de gouvernance locale. Elle a reçu le soutien du Ministère de la Justice et de l'ENA. Elle se fonde sur une demande afghane formalisée par le Secrétaire général de la présidence de la République afghane.

La mission française de présentation de l'opération, fournie par l'ENA et le Ministère de l'Intérieur, a consisté sur une durée d'une semaine à identifier auprès de chacun des sept vice-gouverneurs constituant la première promotion les problèmes concrets auxquels il est confronté (14-19 janvier 2012). L'Ambassade, partie prenante à ces entretiens, a recueilli des informations complètes et de première main sur les sept provinces afghanes. Cette première promotion s'est rendue en France du 12 mai au 9 juin (opération en cours) :

- pour un séjour d'une semaine à Paris afin de recevoir une formation sur le système constitutionnel et administratif français et préparer leur envoi individualisé dans une administration déconcentrée ;

- un stage pratique de deux semaines dans des préfectures de départements correspondant aux profils détectés par la mission française (Ajaccio, Annecy, Chambéry, Grenoble). Chaque binôme de vice-gouverneurs dispose son interprète de façon à ce que l'action de tutorat des préfets et secrétaires généraux puisse de dérouler de façon optimale.

- une retour d'expérience à Paris.

A leur retour à Kaboul, les vice-Gouverneurs seront réunis au sein de l'Afghan Civil Service Institute pour rendre compte de leur formation. Ce faisant, deux objectifs sont attendus de ce retour : la possibilité d'un financement par le PNUD des formations suivantes, ainsi que la mise en place d'un programme similaire pour les gouverneurs de districts, toujours avec le soutien du PNUD.

g) La coopération en matière d'infrastructures

L'article 9 du Traité vise à développer les infrastructures afghanes de télécommunications, de transport, d'irrigation, et celles liées à la production et la transformation des matières premières.

Il stipule que les parties facilitent et soutiennent l'action des établissements et entreprises français intéressés pour intervenir dans ce secteur. La Partie française apporte son appui au développement du Service géologique afghan (AGS) grâce à un partenariat avec le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) français.

(1) L'exemple de l'électrification de la Kapisa

La province de Kapisa se trouve dans une situation précaire en matière d'alimentation électrique (réseau obsolète ou détruit, générateurs diesels ou micro-centrales hydroélectriques inopérants). Actuellement, son alimentation électrique provient du nord du pays, en transitant par la province du Parwan : la ligne de distribution venant de Bagram pour desservir la capitale provinciale de Mahmoud E Raqui a été terminée en mai 2011. Le but est de parvenir à relier la province du Parwan à Mahmoud E Raqui et Naghlou, en passant par Nijrab et Tagab. Mais il est également de s'assurer que des succès tangibles seront atteints pour l'accès à l'électricité des populations rurales bénéficiaires.

La France s'est engagée à soutenir l'établissement du réseau de transmission du barrage de Naghlou jusqu'à la station fixe de transformation électrique à Nijrab (44 km). Par ailleurs, la France souhaite mettre l'accent sur le réseau de distribution électrique pour s'assurer de l'adhésion et de l'appropriation par la population de ce réseau électrique.

(2) L'accès à l'eau potable à Kaboul

En cours de formalisation, le projet d'extension du système d'adduction d'eau de la ville de Kaboul a pour objectif de développer les services d'eau potable dans la ville de Kaboul, par une augmentation des capacités de production et de stockage et une extension du réseau de distribution au centre et au nord-ouest de la capitale. La maîtrise d'ouvrage sera confiée à la compagnie des eaux afghane, la AUWSSC. Les travaux d'infrastructures prévus sont divisés en cinq lots, eux même regroupés en trois marchés, pour un coût total estimé à 75 millions d'euros.

h) Le développement d'un cadre favorable aux échanges commerciaux

L'article 10 du Traité prévoit une concertation sur les enjeux économiques, financiers et commerciaux, dans le but de développer les liens entre secteurs privés français et afghan, ainsi que le recours à l'expertise des entreprises françaises, notamment dans les domaines de l'eau, des transports, des télécommunications et celui de la production et de la transformation de matières premières, dans des conditions équitables et transparentes.

Ces dispositions doivent permettre de mettre en oeuvre des actions visant à l'accroissement des échanges commerciaux entre les deux pays et de promouvoir les investissements français en Afghanistan.

3. Des moyens contraints par un contexte budgétaire tendu

L'étude d'impact précise que la mise en oeuvre du traité se traduira par « une augmentation significative du montant de l'aide bilatérale française en faveur de l'Afghanistan » eu égard à la nature et l'ampleur des actions de coopération envisagées. Cette aide financière a fait l'objet d'un chiffrage précis, par ministère, lors d'arbitrages interministériels.

Lors de la conférence de Tokyo le 8 juillet dernier, le ministre des affaires étrangères a annoncé une augmentation de 50 % de l'aide bilatérale de la France à l'Afghanistan.

Le montant global de notre aide prévue au titre du programme de coopération quinquennal annexé au traité d'amitié, pour la période 2012-2016, s'élève à 308 millions d'euros, avec une moyenne annuelle prévue de 50 millions d'euros par an, contre 30 en moyenne auparavant.

Le contexte budgétaire actuel, très tendu, pèsera sans doute sur les engagements pris dans le cadre du plan de développement, y compris sur les premières années de programmation.

En effet, par la suite, la baisse tendancielle des crédits du pôle de stabilité permettra, le cas échéant, de dégager des crédits.

Le Sénat sera particulièrement vigilant à l'ouverture, par les lois de finances initiales, des crédits correspondant effectivement à cet engagement.

4. Les garanties pour la sécurité des personnes et des biens

L'article 12 du traité prévoit que « les experts civils et militaires français présents en Afghanistan pour la mise en oeuvre du traité, ainsi que les personnes à leur charge, bénéficient d'immunités identiques à celles accordées aux experts par l'article VI de la Convention sur les privilèges et immunités des Nations unies du 13 février 1946 » 11 ( * ) , à savoir :

- Immunité d'arrestation personnelle ou de détention et de saisie de leurs bagages personnels ;

- Immunité de toute juridiction en ce qui concerne les actes accomplis par eux au cours de leurs missions (y compris leurs paroles et écrits). Cette immunité continuera à leur être accordée même après que ces personnes auront cessé de remplir des missions pour la mise en oeuvre du traité ;

- Inviolabilité de tous papiers et documents ;

- Les mêmes immunités en ce qui concerne leurs bagages personnels que celles qui sont accordées aux agents diplomatiques.

En conséquence, les actes commis par les experts civils et militaires français et les personnes à leur charge relèveront de la compétence des juridictions afghanes, à l'exception des actes accomplis par les experts dans le cadre de leurs fonctions, pour lesquels ils relèveront de la compétence exclusive des juridictions françaises.

Toutefois, les experts français et les personnes à leur charge bénéficieront, en tout état de cause, sur le territoire afghan, de l'inviolabilité de leur personne puisqu'ils ne pourront être ni arrêtés ni détenus par les autorités afghanes, même pour un acte accompli en dehors du cadre de leurs fonctions. Cette inviolabilité implique également que, si un expert ou une personne à charge devait être condamné par les juridictions afghanes, pour un acte relevant de leur compétence, à une peine d'emprisonnement, à la peine de mort ou à toute autre peine assimilée à un traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme, une telle peine ne pourrait être exécutée. En cela, l'accord assure aux experts français et aux personnes à leur charge le respect des droits fondamentaux qui leur sont constitutionnellement et conventionnellement garantis.

Il convient de noter que ce statut protecteur s'inspire directement de celui de l'accord de coopération culturelle et technique du 21 août 1966, qui sera abrogé par le présent Traité. L'article 4 de l'annexe 5 à cet accord stipule en effet que « Le gouvernement royal afghan accorde aux experts français définis à l'article 3 ci-dessus, ainsi qu'aux membres de leurs familles, le statut et les privilèges dont bénéficient les fonctionnaires et experts des Nations unies en Afghanistan ». L'article 12 du Traité en reprend les garanties juridictionnelles et en étend le bénéfice aux experts militaires. En revanche, il ne s'applique pas aux « militaires français engagés dans des opérations de combat », exclus du champ d'application du Traité par son article 3, alinéa 4, et dont le statut est défini, selon les cas, soit par l'accord militaire technique entre la Force Internationale d'Assistance à la Sécurité (FIAS) et l'administration intérimaire de l'Afghanistan, signé le 4 janvier 2002, soit par l'accord du 23 mai 2005 relatif aux conditions de déploiement et de stationnement temporaire des forces françaises participant aux opérations de lutte contre le terrorisme international sur le territoire afghan (opération " enduring freedom ").

B. LES ATTENTES DU SÉNAT POUR LA MISE EN oeUVRE DU TRAITÉ

1. Coordonner les dispositifs d'aide multi et bi latéraux
a) La dispersion des circuits et l'éclatement des acteurs nuisent à la lisibilité de l'aide française

Le même rapport officiel de Mme HOSTALIER sur la politique d'aide au développement en Afghanistan a très bien décrit l'éclatement et l'absence de lisibilité du dispositif français :

« La multiplicité des intervenants et des structures de pilotage rend extrêmement difficile la lisibilité de la présence et de l'action de la France dans le domaine de la coopération et du développement. Lors de mes différentes rencontres, les intervenants de terrain reconnaissent par exemple ne pas toujours savoir d'où vient, au départ, l'argent finançant les actions. Surtout lorsqu'il y a plusieurs acteurs sur un même secteur (comme par exemple en Kapisa et Surobi), il est bien difficile de s'y retrouver. »

« La visibilité et la lisibilité de notre aide souffrent sans aucun doute d'une impression de saupoudrage due au grand nombre de projets engagés et à la complexité des circuits de financement, alors que notre enveloppe de crédits reste fortement contrainte . Notre effort doit donc être recadré et correspondre à une véritable politique engagée sur le long terme, visible et répondant à des besoins vitaux pour la population. ».

b) Les mesures proposées pour mieux coordonner le dispositif français

L'étude d'impact du projet de loi précise qu' « un effort de coordination de l'aide bilatérale française avec les bailleurs multilatéraux sera recherché afin d'optimiser l'impact de l'aide française. ».

Le traité prévoit la création de trois commissions mixtes autonomes se réunissant une fois par an alternativement en France et en Afghanistan : une commission mixte de coopération pour le suivi des programmes de coopération, une commission mixte politico-militaire et une commission mixte de sécurité intérieure.

La composition envisagée de ces commissions, qui n'est pas précisée dans le traité, n'a pas été fournie, dans le détail, à votre rapporteur. Il lui a juste été précisé qu'elles rassembleraient, côté français, des représentants des ministères des Affaires étrangères, de la Défense, de l'Intérieur, de l'Économie, et de la Culture et que des représentants d'autres administrations concernées, comme l'Agence française de développement (AFD), pourraient également y participer.

La commission mixte de coopération rassemblera une fois par an et alternativement en France et en Afghanistan, les représentants des ministères concernés de nos deux pays et assurera le suivi des programmes de coopération établis dans le cadre du programme de coopération à 5 ans.

La commission mixte politico-stratégique rassemblera une fois par an, alternativement en France et en Afghanistan, les représentants des ministères concernés afin de faire le point, chaque année, sur les questions politiques de défense et de sécurité régionale intéressant nos deux pays.

La commission mixte de sécurité intérieure rassemblera une fois par an, alternativement en France et en Afghanistan, les représentants des ministères concernés et couvrira les domaines de coopération en matière de police, de lutte contre la criminalité organisée et les trafics illégaux, en particulier les trafics de stupéfiants, et de sécurité civile.

2. Assurer la sécurité de nos experts et entreprises
a) Une dégradation du contexte sécuritaire

Le contexte sécuritaire s'est fortement dégradé depuis 2006. L'Afghanistan a connu depuis lors une série d'attentats spectaculaires et meurtriers. Défaits militairement par les forces alliées, les rebelles ont recours aux engins explosifs improvisés et aux attentats-suicide en privilégiant les cibles à fort impact médiatique. Ils tentent par ce biais de saper l'action de la communauté internationale et des institutions mises en place depuis 2001, en misant sur l'érosion du soutien dont celles-ci peuvent jouir tant au sein de la population afghane que parmi les opinions publiques occidentales.

On estime à 22 000 le nombre de civils tués entre 2001 et 2010, et à 30 000 celui des insurgés.

Quatre générations de menaces se sont succédé pour se cumuler au final : à la guérilla classique (2001-2006) sont venus s'ajouter le recours aux engins explosifs improvisés (2006-2007), puis le recours aux kamikazes ou « human bombers » (2008-2001) et récemment les attaques internes, par infiltration des forces afghanes, ou « green on blue » (2011-2012).

Il va de soi que la sécurité physique et juridique des coopérants et investisseurs français, le respect de leurs droits de propriété intellectuelle et foncière, ainsi que la sécurité juridique des intervenants français ou non mais travaillant pour des entreprises françaises, est une préoccupation majeure.

La poursuite et l'accroissement de la coopération civile avec l'Afghanistan ne saurait être engagée sans une prise de conscience claire des questions de sécurité.

Les sénateurs qui se sont rendus ces dernières années à Kaboul ont pu constater les consignes de sécurité applicables au sein même de la capitale : déplacement en voiture blindée, interdiction de sortir des lieux de travail où les entretiens étaient planifiés et de leur lieu d'hébergement. Chacun sait que la sécurité n'est pas complètement assurée à Kaboul puisque les insurgés s'y sont régulièrement infiltrés depuis plusieurs mois et que par ailleurs, des Afghans ont tué au début de l'année des coopérants américains et allemands à l'intérieur même des ministères où ils travaillaient.

Les sénateurs qui se sont rendus auprès de l'état major de la Task Force La Fayette ont pu constater la complexité qu'il y avait, dans le cadre du déploiement des troupes françaises, à assurer la sécurité du travail du pôle de stabilité dans certaines zones dangereuses.

Qu'en sera-t-il demain du contexte sécuritaire dans les provinces où les forces armées afghanes seront seules en charge de la sécurité ?

La question concerne aussi les entreprises françaises qui seraient susceptibles de s'implanter dans le pays.

Si on veut que, parallèlement à l'effort de coopération civile, les entreprises françaises participent au développement économique, et notamment à la valorisation du sous-sol afghan, il convient que la sécurité de leurs employés soit assurée. Comment sinon attirer Lafarge, Schlumberger ou Total, par exemple ?

Comment sensibiliser des entreprises intervenant dans le secteur minier au potentiel afghan si les conditions d'exercice de leur activité ne sont pas assurées ?

b) La montée en puissance très progressive des forces nationales afghanes

L'armée nationale afghane (ANA), forte aujourd'hui de 186  012 hommes a pour mission d'assurer l'indépendance du pays, la souveraineté nationale, de protéger les intérêts nationaux, et l'intégrité de l'Afghanistan. Toujours en phase de montée en puissance, sa structure, son volume et sa capacité opérationnelle sont en constante évolution.

Subordonnée au ministère de la défense, l'organisation de l'ANA s'articule autour de 6 corps (chacun fort de 10 à 20.000 hommes et de trois grandes unités subordonnées), une division d'opérations spéciales, une division capitale, une brigade de sécurité et de soutien de quartier général. Elle englobe par ailleurs l'armée de l'air forte de 5000 hommes.

En Kapisa Surobi, l'ANA est déployée à hauteur d'une brigade (3° Brigade - 201° Corps) forte de 4.700 hommes.

Globalement, on estime à 45.000 les forces de l'ANA déployées en opérations, le reste se trouvant en service de garnison, en permissions, stages ou absents (maladies - autre).

La vraie question est naturellement celle de la capacité opérationnelle de ces forces armées. On peut relever quelques « signaux » encourageants.

L'ANA a atteint le niveau lui permettant de planifier, conduire et contrôler des opérations du niveau du bataillon. La formation tactique donne satisfaction. En 2011, pour la première fois, les pertes de l'ANA ont été supérieures à celles de la coalition, ce qui démontre leur progressive montée en puissance opérationnelle.

La chaine de recrutement est structurée, les processus de sélection établis. Le recrutement s'effectue au travers d'un processus de sûreté permettant d'écarter autant que possible les candidats liés à l'insurrection. Il implique la famille qui recommande les candidats, les autorités locales ( maleks ou mollahs ) qui garantissent l'identité et les gouverneurs qui donnent leur approbation.

Les infiltrations (« green on blue » ) restent malheureusement un réel problème.

3. Contrôler l'utilisation des fonds : vers la conditionnalité

En partie à l'instigation de la France, l'Union européenne a fixé quatre conditionnalités pour son aide civile à l'Afghanistan : déroulement d'élections, solution du problème de la Kabul Bank , réforme fiscale et douanière, droits de l'homme et en particulier statut de la femme.

Les problèmes de corruption sont patents. Votre commission les avait dénoncés sans complaisance dans son précédent rapport sur l'Afghanistan, en 2009.

Le rapport précité de Mme HOSTALIER décrit ainsi l'emprise de la corruption sur les circuits de financement de l'aide versée à l'Afghanistan.

« Véritable fléau qui affecte tous les échelons de la vie publique, y compris au plus haut niveau, la corruption aurait, selon le témoignage de la plupart des observateurs, gagné en intensité depuis plusieurs années. D'après Transparency International , le classement du pays pour la corruption est passé de 172 en 2007 à 176 en 2010 (sur 178 pays) juste avant la Birmanie et la Somalie.

« L'abondance des fonds venus de l'étranger , la complaisance des autorités et l'étendue des ramifications de l'économie parallèle de l'opium et du trafic des stupéfiants contribuent à miner toute action crédible de lutte anti-corruption. Quelques mesures sont intervenues avec la loi sur la corruption de 2008 et la création d'une agence chargée d'un ambitieux objectif de lutte contre la corruption, mais sans réels moyens matériels et juridiques. Ces efforts restent clairement bloqués par l'absence d'une réelle volonté politique et par la puissance des groupes d'intérêts. ».

Bien que le « processus de Kaboul » préconise de faire transiter une part croissante de notre aide par le mécanisme de l'aide budgétaire annuelle (" core budget ") ou par des mécanismes de financement afghan (" on budget "), le passage par le budget de l'État afghan se traduit par des délais très longs et ; il faut le reconnaître, par l'absence de contrôle réel sur les montants versés . C'est la raison pour laquelle le traité d'amitié et de coopération ne reprend pas stricto sensu l'engagement de faire transiter les fonds par le budget afghan. L'aide civile au bénéfice de l'Afghanistan s'effectue selon une procédure majoritairement « off budget ».

Dans ce contexte, il va de soi que l'intensification de l'aide française doit s'accompagner, autant que faire se peut, d'un contrôle renforcé de son utilisation.

Il parait indispensable d'assurer la traçabilité des fonds qui vont être engagés dans le cadre des programmes futurs.

Prenons un exemple : en matière agricole. Notre dispositif, qui a permis d'obtenir des résultats importants ces dernières années, grâce à l'engagement et à la compétence des responsables sur place, n'est pourtant pas dénué d'une certaine opacité. Pour améliorer la transparence et la connaissance des projets, des actions concrètes ont été menées, comme des demandes de localisations précises, une liste d'inventaire exacte des véhicules et matériels achetés, la description précise du temps d'intervention des entreprises... La question du contrôle est particulièrement aiguë dans les projets engagés dans des zones inaccessibles pour nos experts.

En outre, l'aide internationale doit être un levier pour faire progresser l'Afghanistan dans la voie d'une meilleure gouvernance.

C'est toute la question de la conditionnalité de l'aide qui se pose. Il paraît indispensable d'instituer un mécanisme de suivi liant le soutien financier de la communauté internationale aux progrès des autorités afghanes (tenue d'élections transparentes, gouvernance, lutte contre la corruption, etc.).

La France, avec l'Union Européenne qui est le premier contributeur en faveur de l'Afghanistan, a réaffirmé lors de la Conférence de Tokyo le 8 juillet dernier qu'elle souhaite que les autorités afghanes s'engagent :

- à la tenue d'élections libres et équitables en 2014 et 2015 ;

- à la mise en oeuvre des recommandations du FMI, qui appellent l'Afghanistan à assurer l'assainissement de ses finances publiques , à progresser dans la voie de la bonne gouvernance et à développer son secteur privé. Cet objectif passe notamment par une réforme des systèmes fiscal et douanier ;

- mais aussi à la poursuite des progrès engagés en matière de protection des droits de l'Homme et de situation des femmes .

Votre commission se félicite de cette nouvelle approche, du moins dans le discours. L'aide n'est plus assortie d'une simple invitation, même pressante, adressée aux autorités afghanes, pour qu'elles progressent dans la voie de la gouvernance, mais d'une véritable conditionnalité.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 17 juillet 2012, la commission a tout d'abord entendu l'exposé du rapporteur, M. Jean-Louis Carrère, président de la commission.

Après un large débat, la commission a adopté le projet de loi de ratification du traité d'amitié et de coopération entre la République française et la République islamiste d'Afghanistan, qui lui était soumis, à l'unanimité, deux sénateurs s'abstenant.

ANNEXE 1 : CARTE DE L'AFGHANISTAN

ANNEXE 2 : LES INTERVENTIONS DE L'AGENCE FRANÇAISE DE DÉVELOPPEMENT EN AFGHANISTAN

1 DISPOSITIF D'INTERVENTION

Après avoir été suivies depuis l'agence d'Islamabad, les interventions de l'AFD en Afghanistan sont pilotées depuis août 2009 par une agence à Kaboul. Une convention d'établissement a été signée avec l'État afghan le 15 décembre 2009. Le directeur en place est appuyé par deux cadres locaux pour les aspects opérationnels.

2 STRATÉGIE ET CONTEXTE D'INTERVENTION

L'AFD a démarré ses interventions en Afghanistan suite à l'inclusion de ce pays en 2004 dans la Zone de Solidarité Prioritaire (ZSP). Les premiers projets ont été octroyés en 2005. Depuis près de 70 millions d'euros ont été octroyés pour le compte de l'AFD.

L'AFD intervient sous forme de subvention en Afghanistan. A la demande du MAEE, l'AFD a ciblé ses interventions sur deux secteurs de concentration: i) agriculture et développement rural et ii) santé. Ces orientations ont été confirmées par les autorités afghanes lors de la Conférence des bailleurs de Paris en juin 2008. Lors de cette conférence, la France s'est engagée à augmenter significativement ses engagements en faveur de l'Afghanistan. Les engagements de l'AFD sont en conséquence passés de 6 millions d'euros par an à environ 12 millions d'euros par an entre 2008 et 2011.

En 2009, conformément à la décision du Président de la République, la France a renforcé son aide civile pour l'Afghanistan dans les zones d'engagement des troupes françaises, les 3 districts de la province de Kapisa et le district de Surobi de la province de Kaboul. Dans ce contexte, le MAEE, a délégué en 2009, 2010 et 2011 des crédits supplémentaires à l'AFD pour financer des projets dans cette zone à hauteur de 16 millions d'euros par an environ. L'AFD assure la gestion financière de ces projets au nom et pour le compte de l'Etat français.

3 PROJETS AFD

3.1 Projets pour compte propre

3.1.1 Projets en cours de mise en oeuvre

• Agriculture et développement rural

- CAF 1039 - Assistance technique (AT) auprès du ministère de l'agriculture de l'irrigation et de l'élevage (0,8 millions d'euros, Subvention, Octroyée en février 2010, DLVF : 30/05/2014).

Ce projet a permis de poursuivre le financement du poste d'assistant technique placé auprès du ministère de l'agriculture de l'irrigation et de l'élevage (MAIL) depuis 2007 sur fonds AFD et auparavant sur fonds MAEE. Cette assistance technique apporte un appui important dans l'instruction des nouveaux projets et le suivi de ceux en cours dans le secteur agricole. L'assistant technique, dont le contrat est porté par FEI, joue aussi un rôle important de conseiller du ministre de l'agriculture concernant la stratégie agricole du pays. La convention a été signée en août 2010. Le contrat de l'assistant technique prendra fin le 31 janvier 2013.

- CAF 3016 - Projet de développement des coopératives horticoles autour de Kaboul (6,4 millions d'euros, Subvention, Octroyée en mai 2008, DLVF : 31/12/2012)

Ce projet vise à augmenter la production horticole dans les régions périphériques de Kaboul, à en améliorer la qualité et à en favoriser la commercialisation. Il devrait participer au développement de l'économie locale et nationale, à l'amélioration de l'approvisionnement de la capitale, à l'augmentation éventuelle des exportations, et ainsi contribuer à réduire la pauvreté. La mise en oeuvre de ce projet a été confiée au Ministère de l'Agriculture (MAIL). La convention de financement a été signée le 25 février 2009.

Le projet a connu certaines difficultés qui ont retardé son démarrage : constitution tardive de l'unité de gestion du projet du MAIL puis annulation du contrat de l'opérateur sélectionné (Flag International) qui s'est avéré, après une année d'activité, incapable de mener la mission qui lui avait été confiée. Un réaménagement du projet du projet a été mise en place fin 2011. Celui-ci prévoit, en remplacement de l'opérateur, la mise en place d'une assistance technique ponctuelle fournie par l'ADEPTA à l'unité de gestion du projet. Les activités se déroulent, depuis cette réorganisation, de manière satisfaisante.

- CAF 1011 - Projet d'appui au développement agricole (coton et céréales) des régions nord et nord-est de l'Afghanistan (5,2 millions d'euros, Subvention, Octroyée fin 2008, DLVF : 30/06/2015) -

Ce projet vise à appuyer sur 6 ans le développement de l'agriculture dans les régions du nord et du nord-est de l'Afghanistan par la recherche-développement sur le système céréales-coton, la production de semences de base et le renforcement des coopératives agricoles et à mettre en place un observatoire pour le coton et les céréales ainsi qu'une cellule d'économie rurale régionale. Il s'inscrit dans le prolongement du projet de relance de la filière cotonnière financé par l'AFD entre 2006 et 2009. La mise en oeuvre de ce projet a été confiée au Ministère de l'Agriculture. La convention a été signée par l'AFD et le Ministère des Finances le 15 décembre 2009. Le démarrage de ce projet a été retardé pour des raisons similaires au projet CAF 3016 (Cf. supra) auxquelles se sont ajoutés des problèmes de sécurité dans la zone d'intervention (Baghlân).

Un arrangement similaire à celui du projet CAF 3016 avec l'ADEPTA a été formalisé et une unité de gestion de projet a finalement été mise en place par le MAIL début 2012. La levée des conditions suspensives (LCS) au premier décaissement a été formalisée en avril 2012. Les activités ont démarré dans la foulée.

- CAF 1041 - Projet d'appui à l'apiculture pour relancer la filière au niveau national (3 millions d'euros, Subvention, Octroyée le 30 septembre 2010).

Le projet, ayant pour objectif le développement de la filière apicole, s'appuiera sur le renforcement des capacités du centre technique de Darulaman et s'articulera autour de 4 composantes : i) formation des apiculteurs à la gestion des ruches et à la production d'un miel de qualité, ii) approvisionnement en intrants (cire et produits vétérinaires), iii) valorisation du rôle des abeilles dans la pollinisation des cultures et des vergers et iv) structuration professionnelle de la filière (regroupement en coopératives puis en union nationale). La convention de financement a été signée le 14 octobre 2011.Un arrangement similaire à celui du projet CAF 3016 avec l'ADEPTA a été formalisé et une unité de gestion de projet a finalement été mise en place par le MAIL début 2012.

- CAF 1043 - Projet de développement agricole axé sur l'élevage (2,5 millions d'euros, Subvention, Octroyée le 15 décembre 2010).

Ce projet comportera 2 volets : i) pisciculture (1 million d'euros) et ii) amélioration génétique du cheptel laitier (2,5 millions d'euros). Le premier volet concernera le renforcement du centre piscicole de Qarhga pour assurer un approvisionnement en alevins et la formation des pisciculteurs à l'élevage des truites en eaux froides. Le second portera sur un appui au centre d'insémination artificielle de Guzarga, afin d'améliorer la génétique du cheptel bovin et de développer la filière laitière dont le potentiel est important compte tenu de l'existence d'usines de traitement dans les grands centres urbains.

L'approche retenue pour ce projet (structuration de filières à partir des centres techniques issus de la privatisation de fermes d'état) est identique à celle adoptée pour le projet apicole, avec notamment un appui à la maîtrise d'ouvrage fourni par l'ADEPTA. La convention de financement a été signée le 14 octobre 2011. Un arrangement similaire à celui du projet CAF 3016 avec l'ADEPTA a été formalisé et une unité de gestion de projet a finalement été mise en place par le MAIL début 2012

- CAF 1046 - Financement du fonctionnement pendant deux ans de la cellule d'appui institutionnel logée au Ministère de l'agriculture, de l'Irrigation et de l'Elevage afghan (1 million d'euros, Subvention, Octroyée le 24 mai 2011)

Ce projet a permis de poursuivre l'appui à la cellule French Cooperation MAIL (FCO-MAIL) placée au sein du ministère de l'agriculture, de l'irrigation et de l'élevage (MAIL) et financée depuis 2008 sur fonds AFD et auparavant sur fonds MAEE. Cette cellule mène depuis sa création des projets pilotes et apporte un appui important dans l'instruction des nouveaux projets et le suivi de ceux en cours dans le secteur agricole. La convention a été signée en août 2010. Le contrat de l'assistant technique est porté par FEI. La convention de financement a été signée le 14 octobre 2011.

• Santé

- CAF 3008 - Projet de réhabilitation du système national de transfusion sanguine (8 millions d'euros, Subvention, Octroyée fin 2005, DLVF : 31/12/2013) -

Ce projet est mis en oeuvre par le Ministère de la Santé avec l'appui d'un opérateur international (EPOS). Il porte principalement, d'une part, sur la réhabilitation de la banque du sang de Kaboul et la construction de 4 autres banques du sang à Herat, Kandahar, Jalalabad, Mazar-e-Charif et, d'autre part, sur l'équipement et la formation des personnels de ces établissements. Le projet a rencontré de nombreuses difficultés de mise en oeuvre, notamment liées à la faiblesse de la maîtrise d'ouvrage assurée par le Ministère de la santé publique. Le désengagement des acteurs français (Etablissement Français du Sang et Biologiste Sans Frontières) qui devaient initialement participer au projet a aussi perturbé son lancement.

Le projet a connu quelques avancées, notamment en ce qui concerne sa composante formation, après qu'une nouvelle unité de gestion du projet a été mise en place en 2008 et qu'EPOS a été sélectionné comme appui à la maîtrise d'ouvrage. Toutefois en août 2010, seul 1,5 million d'euros sur 8 millions d'euros avait été décaissé, et la Date Limite de Versement des Fonds (DLVF) a due être repoussée du 31.12.10 au 31.12.13. Malgré cette extension, il n'est pas certain que toutes les réalisations prévues par le projet pourront se faire dans les temps impartis, le processus d'appel d'offres pour la composante infrastructure ayant notamment pris un retard important.

- CAF 1003 - Projet d'appui au renforcement des ressources humaines de l'Institut Médical Français pour l'Enfant (IMFE) de Kaboul (2 millions d'euros, Subvention, Octroyée en 2008, DLVF : 31/12/2011) -

Cet hôpital, initié à l'origine par l'ONG la Chaîne de l'Espoir et construit grâce à de nombreux soutiens français, est géré par l'Aga Khan Development Network (AKDN), la Chaîne de l'Espoir apportant son expertise et son expérience en matière de formation médicale et paramédicale. Le projet contribue également à l'amélioration de la formation des étudiants issus d'écoles de santé publique assurée par l'IMFE. La convention de financement a été signée le 30 octobre 2008. Ce projet a pris fin en décembre 2011. Une évaluation est en cours de réalisation.

- CAF 1004 - Projet en partenariat avec l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) (3 millions d'euros, Subvention, Octroyée début 2009, DLVF : 31/12/2011) -

Ce projet contribue à l'éradication du paludisme, de la leishmaniose et de la poliomyélite en Afghanistan, en particulier dans le sud du pays et inclut une composante transfrontalière avec le Pakistan. La convention a été signée le 1 er juillet 2009 et le premier versement de 1,5 million d'euros a eu lieu le 18 décembre 2009.

Le programme a été affecté par des problèmes de sécurité dans les provinces de Helmand et de Kandahar. Les campagnes de vaccination se sont tout de même déroulées normalement mais les formations prévues ont eu lieu à Kaboul et non dans les provinces comme initialement prévu. Le deuxième décaissement de 1,5 million d'euros a été effectué en septembre 2011. Le projet s'est terminé en décembre 2011. Un rapport final est attendu de l'OMS.

- CAF 1019 - Phase II du projet d'appui à l'Institut Médical Français pour l'Enfant (IMFE) (9 millions d'euros, subvention, Octroyée par résolution en septembre 2009, puis modifiée en avril 2010 et remodifiée en Mars 2011)

Ce projet vise à construire et équiper la phase II de l'IMFE qui étendra ses services hospitaliers notamment en gynécologie/obstétrique, néonatologie, maternité et autres spécialités. La subvention a été octroyée au bénéficiaire primaire, la Chaîne de l'Espoir, le 30 septembre 2009. Le bénéficiaire final du financement est l'IMFE qui est géré et cofinancé par l'Aga Khan Development Network (AKDN).

Après son octroi, le projet a du être soumis deux fois au conseil, suite (i) à l'entrée du groupe Bouygues en tant que cofinancier et opérateur dans le projet, puis (ii) suite à son retrait pour des raisons de sécurité et à l'engagement de l'AKDN à compléter le plan de financement du projet à hauteur de 4,4 millions d'euros. La convention de financement a été signée le 21 décembre 2011. Les conditions suspensives au 1 er décaissement ont été levées le 8 mars 2012. L'appel d'offres pour les travaux d'extension devrait être lancé cet été.

- CAF 1008 - Projet d'appui à la santé maternelle (formation de sages-femmes) dans la province du Badakhshan, en partenariat avec la Fondation Aga-Khan (5,7 millions d'euros, Subvention octroyée le 16 décembre 2010).

Ce projet a pour objectif de renforcer les capacités des personnels de santé et du système de santé en Afghanistan et en particulier dans la province du Badakhshan, par (i) Le renforcement des capacités des personnels de santé en Afghanistan et dans le Badakhshan et (ii). L'appui au système de santé du Badakhshan. La convention a été signée le 4 octobre 2011. Un premier décaissement de 1,6 million d'euros a été effectué le 15 février 2012.

• Facilités d'Innovation Sectorielle des ONG (FISONG)

- CAF 1022 - Projet de développement agricole basé sur l'élevage porté par Solidarités (870 000 €, Subvention Octroyée en mai 2009, DLVF : 30/06/2014) -

Ce projet vise à réduire la vulnérabilité économique de la population rurale du district de Yakawlang. La convention a été signée le 12 août 2009 et le premier versement réalisé en septembre 2009.

Un chef de projet expatrié a été recruté pour diriger la base de Yakawlang. Les plans de formation à la gestion des estives et à la conduite des élevages ont été finalisés en concertation avec les ministères de l'agriculture et du développement rural. Concernant les travaux de drainage dans la plaine de Chaman, l'étude d'impact environnemental a été remise au National Environnement Protection Agency. Le programme progresse de façon satisfaisante.

- CAF 1023 - Projet de soutien au système scolaire porté par AFRANE (461 150 €, Octroyée en mai 2009, DLVF : 31/12/2012) -

Programme de soutien au système scolaire afghan dans les provinces de Nangagar, Parwan et Kaboul. Infrastructure éducative, appui pédagogique et formation professionnelle des enseignants de 7 établissements du primaire et du secondaire publics d'Afghanistan à Kaboul, Djalalabad et Tcharikar.

Ce projet s'est terminé fin 2011. Le rapport d'évaluation externe confirme que le projet a atteint ses objectifs.

- CAF 1025 - Projet d'amélioration de l'efficacité énergétique porté par le GERES (670 000 €, Octroyée en mai 2009, DLVF : 31/12/2012) -

La convention a été signée à l'été 2009, suivie par le premier versement. Ce projet vise à améliorer les conditions de vie des habitants des régions froides de la province de Bamiyan en généralisant la construction de « maisons solaires ». Il s'agit en fait d'une pièce annexe aux maisons, construite avec des bâches en plastique, de façon à capter naturellement la chaleur du soleil.

Le projet prévoit des formations à des maçons et charpentiers, pour assurer que les maisons solaires puissent être construites localement. Le GERES a aussi développé 34 maisons solaires témoins dans plusieurs villages et mène des campagnes de sensibilisation. Le projet rencontre un réel succès auprès des villageois. Le GERES développe par ailleurs un prototype de four traditionnel en terre qui viendra équiper ces maisons par la suite. Une évaluation du projet est en cours.

3.1.2 Projets en cours de formalisation

- CAF 1045 - Extension du système d'adduction d'eau potable de la ville de Kaboul - (9 millions d'euros, octroyé en décembre 2011).

L'objectif du projet est de développer les services d'eau potable dans la ville de Kaboul, par une augmentation des capacités de production et de stockage et une extension du réseau de distribution au centre et au nord-ouest de la capitale. La maîtrise d'ouvrage sera confiée à la compagnie des eaux afghane, la AUWSSC. Les travaux d'infrastructures prévus sont divisés en cinq lots, eux même regroupés en trois marchés, pour un coût total estimé à 75 millions d'euros. Les autres co-financiers sont la KfW et l'USAID. Un accord de cofinancement AFD-KFW, qui inclut la réciprocité des procédures (dans le cadre de la Mutual Reliance Initiative, MRI) a été signé le 13 juin à Frankfort. La convention de financement principal pourrait être signée avec la partie afghane en septembre prochain.

3.2 Projets sur crédits délégués du MAEE à l'AFD ou pour le compte de l'État français

3.2.1 Crédits délégués en 2009 - 16,5 millions d'euros

En 2009, conformément à la décision du Président de la République, la France a renforcé son aide civile pour l'Afghanistan dans les zones d'engagement des troupes françaises, en province de Kapisa et dans le district de Surobi (province de Kaboul). Les points d'application de cet effort additionnel ont été définis à l'occasion d'une réunion interministérielle tenue à Matignon le 7 mai 2009.

Dans ce contexte, une première délégation de crédit à l'AFD a été décidée pour permettre le financement d'actions dans cette zone. Cette délégation a été instruite dans le cadre de la convention-cadre 2000 et concerne la réalisation de trois projets pour un total de 16 460 000 €. Les trois projets suivants, identifiés par le MAEE, ont été bien été mis en place et sont à ce jour entièrement décaissés :

- CAF 1027- SOKAPI Agriculture - Appui à l'agriculture et aux infrastructures rurales de la province de Kapisa et du district de Surobi (7,1 millions d'euros).

La convention de financement a été signée le 9 juin 2009. La mise en oeuvre de ce projet a associé, avec l'accord du Ministère de l'agriculture, l'AFD et 3 ONG identifiées par le MAEE dans des actions d'appui au développement rural. Le projet est entièrement décaissé. Un dernier contrat, signé avec le GERES et portant sur l'évaluation de la sécurité alimentaire en région de Kapisa-Surobi, court toutefois jusqu'au 13/05/2012.

- CAF 1028 - SOKAPI NSP - Contribution au National Solidarity Program (NSP) pour le développement local communautaire de la province de Kapisa et du district de Surobi (8 millions d'euros).

Le NSP est un Programme National de Développement communautaire, supervisé par le Ministre du Développement Rural et mis en oeuvre par la Banque Mondiale avec l'appui des partenaires techniques sur le terrain. Cette contribution, visant à financer des travaux d'infrastructures municipales, a été versée en une seule tranche après la signature de la convention le 9 juin 2009.

- CAF 1032 - Lycées Esteqlal et Malâlaï de Kaboul (1,36 millions d'euros)

Ce projet a concerné la rénovation et rééquipement des lycées franco-afghans de Kabul. La convention de financement a été signée le 17 août 2009 et le projet, mis en place par la Mission Laïque française, s'est terminé début 2011.

3.2.2 Opérations pour le compte de l'État : 2010 et 2011- 16 millions d'euros + 15,9 millions d'euros

En 2010 puis en 2011, la cellule AFPAK du MAEE a souhaité à nouveau déléguer des crédits à l'AFD pour la réalisation de projets de développement dans la zone de déploiement de l'armée française, la province de Kapisa et le district de Surobi de la province de Kaboul. Deux programmes prévoyant de financer des actions dans quatre secteurs - agriculture, électrification rurale, éducation et santé - ont ainsi été instruits en 2010 puis en 2011.

Ces deux programmes sont des opérations pour le compte, sur le budget et au risque de l'État, conformément aux dispositions de l'article 7 de la convention cadre du 4 janvier 2007 conclue entre l'AFD et ses tutelles. L'AFD n'en assure que la gestion financière. Tous les opérateurs (Bureaux d'études, ONG françaises ou internationales) sont identifiés par le MAEE. Ils doivent faire l'objet d'un avis de non objection des ministères afghans techniques concernés avant que l'AFD ne signe leurs contrats au nom et pour le compte du Gouvernement afghan.

- CAF 1042 - SOKAPI II (2010) - 16 millions d'euros - Octroyé en mai 2010

Les conventions Etat-AFD et AFD-MOF ont été signés en Août 2010. A ce jour, les 11 contrats d'opérateurs suivants ont été signés :


• ADEPTA - Développement rural - 4 millions d'euros


• AF-Development - Développement rural - 1,5 million d'euros


• GERES - Développement rural - 0,5 million d'euros


• CoAR - Développement rural - 0,5 million d'euros


• Integration - Electricité - 5,9 millions d'euros


• SEE - Education - 0,4 millions d'euros


• SAB - Education - 0,4 millions d'euros


• BRAC - Santé - 0,1 million d'euros


• Integration - Santé - 0,4 million d'euros


• FEI - assistance technique - 0,15 million d'euros


• Eureka - évaluation du projet - 0,13 million d'euros

Au 28 juin, au total, 10 737 619 d'euros ont été décaissés. L'exécution des contrats progresse de façon relativement satisfaisante, mais certaines actions ne pourront être terminées avant la Date Limite de Fin de Versement (DLVF) du projet, fixée au 30 juin 2012. La contribution de 1 million d'euros au NABDP, programme national de développement rural administré par le PNUD prévue au plan de financement sera notamment réallouée à d'autres actions. Un avenant à la convention de financement signée entre l'AFD et le MoF est donc nécessaire pour repousser la DLVF.

- CAF 1049 - SOKAPI III (2011) - 15,9 millions d'euruos - Octroyé le 7 juillet 2011

Les conventions Etat-AFD et AFD-MOF ont été signées en septembre et décembre 2011. A ce jour, les 2 contrats d'opérateurs suivants ont été signés :


• SAB - Education - 0,4 million d'euros


• Integration - Electricité - 5,9 millions d'euros


• MRCA - Santé - 2,2 millions d'euros

5 autres contrats sont en phase d'être finalisés et pourraient être signés très prochainement. A ce jour, 3 055 000 euros ont été décaissés.

4 PROJETS PROPARCO

Proparco a octroyé deux prêts successifs de 10 millions de dollars en 2005 et en 2006 à la société Telecom Development Company Afghanistan, dont la marque commerciale est Roshan, premier opérateur de téléphonie mobile afghan et propriété de la fondation Agha Khan. En 2008, Proparco a engagé un troisième financement additionnel de 20 millions de dollars, auquel l'AFD participe à hauteur de 10 millions de dollars. Les 3 prêts ont été décaissés en totalité.

Roshan a sollicité Proparco en mars 2012 pour une quatrième ligne de crédit qui lui permettrait de développer la technologie 3G en Afghanistan. Cette demande est à l'étude.

ANNEXE 3 : PROGRAMME DE COOPÉRATION ENTRE LA FRANCE ET L'AFGHANISTAN POUR LA PERIODE 2012-2016

La République française et la République islamique d'Afghanistan, ci-après dénommées les signataires,

Considérant l'accord entre le gouvernement de la République française et l'Etat provisoire islamique d'Afghanistan signé à Kaboul le 3 septembre 2002 portant création et statut du Centre culturel français de Kaboul, devenu depuis Institut français d'Afghanistan ;

Rappelant que l'efficacité de l'aide au développement et la mise en oeuvre de la déclaration de Paris, du programme d'action d'Accra et de la déclaration de Busan sont de la responsabilité mutuelle des deux signataires ;

Considérant la convention relative au fonctionnement du Centre culturel français dans les locaux du lycée Esteqlal de Kaboul signée le 6 avril 2009 ;

Considérant le traité d'amitié et de coopération entre la République française et la République islamique d'Afghanistan signé le 27 janvier 2012 (ci-après « le traité »),

Déclarent leur intention de mettre en oeuvre, sous réserve d'autorisation par le Parlement français lors du vote des lois de finances chaque année et des décisions des organes de gouvernance des établissements concernés, le programme de coopération suivant pour la période 2012-2016 :

1 - Défense

La coopération de défense durant la période 2012-2016 s'inscrira dans le cadre des priorités et programmes sécuritaires nationaux afghans et des actions mises en oeuvre dans les cadres multilatéraux. Elle prendra les formes suivantes :

1.1/. Appui au secteur institutionnel de défense afghan

- Le détachement d'un coopérant militaire français auprès du ministre afghan de la défense pour coordonner les actions de formation et de conseil de la France dans le domaine militaire.

- La mise en place de coopérants français à l'état-major et dans des écoles militaires afghanes, afin de conseiller les cadres et les instructeurs afghans.

- L'appui au renforcement ou à la création d'écoles militaires afghanes de haut niveau (école de guerre et école d'état-major).

1.2/. Appui à la formation des cadres militaires

- Le soutien aux écoles militaires afghanes au travers d'échanges de personnel, notamment d'instructeurs, de conseillers, d'observateurs et de chercheurs.

- La poursuite des jumelages entre écoles.

1.3/. Appui à l'enseignement de la langue française et bourses dans les écoles militaires

- La poursuite des actions d'enseignement de la langue française en milieu militaire afghan, permettant ainsi l'envoi de boursiers dans les écoles militaires françaises.

2 - Sécurité Intérieure

Les programmes de coopération dans le domaine de la sécurité intérieure pour les cinq années à venir seront articulés autour de quatre projets majeurs.

2.1/. Partenariat renforcé entre l'Afghan National Civil Order Police (ANCOP) et la Gendarmerie nationale

- Constitution d'une équipe-projets commune pour dresser un état des lieux, fixer les priorités, établir un programme d'action et en assurer le suivi. Dans ce cadre, la France placera auprès du général commandant l'ANCOP un coopérant gendarmerie. Des gendarmes français pourront être placés auprès de structures essentielles et grandes unités de l'ANCOP aux fins de conseil et d'assistance.

- Envoi en France d'une quinzaine de stagiaires afghans par an, incluant des formations longues en langue française.

2.2/. Partenariat renforcé dans le domaine de la lutte contre les stupéfiants

- Poursuite d'un appui à la formation ainsi que d'un appui opérationnel direct. A cet effet, un officier de liaison « stupéfiants » sera placé par la France auprès du Counter-Narcotics Police of Afghanistan (CNPA). Il pourra, le cas échéant, être renforcé par des spécialistes français qui participeront directement aux enquêtes.

- Elaboration d'un programme pour développer la coopération internationale, en particulier avec les pays de la région, et les échanges de renseignements.

- Appui en matière de soins aux usagers de produits stupéfiants.

2.3/. Renforcement du soutien dans le domaine de la police judiciaire

- Elaboration conjointe d'un programme de professionnalisation des fonctions d'investigation et de police technique et scientifique (dont la biométrie), selon les conclusions d'une mission d'audit menée dans l'année suivant l'entrée en vigueur du présent programme. Il s'appuiera sur des missions non-permanentes de conseil et comprendra également des formations en France et en Afghanistan dans les domaines jugés prioritaires par les signataires. Ce soutien pourra utilement être étendu aux techniques de lutte contre les filières d'immigration illégale.

- Poursuite de l'appui aux brigades afghanes des mineurs et de la famille.

- Démarrage d'une coopération en matière de lutte contre le trafic des antiquités, en liaison avec la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA).

2.4/. Appui au développement de la sécurité civile

- Mise en place d'une mission française d'évaluation des besoins afghans dans l'année suivant l'entrée en vigueur du présent programme. Sur cette base, un programme de coopération pourra être établi entre les signataires, en liaison avec les autres acteurs de la communauté internationale, afin de contribuer à la reconstitution des capacités afghanes de secours aux populations, de lutte contre l'incendie et de réponse aux catastrophes.

3 - Coopération technique et culturelle

Cette coopération couvrira, pour les cinq années à venir, les huit secteurs suivants : agriculture, santé, enseignement primaire, secondaire et supérieur, travaux de recherche et de développement (R&D), gouvernance, appui à la société civile, archéologie et échanges culturels. Les programmes de coopération menés par la France prennent en compte les Programmes nationaux prioritaires.

Elle visera aussi à poursuivre les axes prioritaires d'intervention et de conseil du Pôle de Stabilité en Kapisa et Surobi dans les domaines du développement rural, de l'agriculture, de l'énergie, de la gouvernance/justice, de la santé et de l'éducation au-delà de 2014 si les populations de ces territoires le souhaitent.

3.1/. Agriculture et développement rural

Les actions suivantes seront mises en oeuvre :

- Appui à l'établissement d'échanges en matière de recherche entre l'INRA français et les instituts de recherche agronomique afghans.

- Appui à la création d'un laboratoire de contrôle de la qualité dans la perspective de participer à la réduction de moitié des importations afghanes sur la période concernée et de rendre les populations rurales autonomes vis-à-vis de l'aide alimentaire.

- Appui à la mise en place d'un ou plusieurs projets dans le secteur de l'irrigation.

- Appui à la création d'un réseau d'établissements d'enseignement agricole afin de dispenser des formations initiale et continue au profit des techniciens agricoles et des techniciens de coopératives, à Kaboul, mais aussi et si possible, en fonction des conditions de sécurité, dans les provinces d'Hérat, de Balkh, de Baghlan, de Parwan (avec juridiction sur la Kapisa) et de Bamyan. Il s'agira d'établissements de type lycée dont la tâche sera de former les techniciens agricoles.

- Développement d'une coopération dans le domaine de l'élevage et pour l'amélioration génétique du cheptel, notamment avec la faculté d'agriculture de l'Université de Kaboul.

- Elaboration d'un plan d'aide au développement des filières de transformation des produits agricoles, afin de créer des emplois, fixer la population dans les campagnes et, si possible, permettre des exportations.

- Mise en place d'un plan d'aide à la création de coopératives agricoles avec un objectif de création de cinq établissements par an pendant la période concernée.

- Mise en oeuvre d'un plan de micro finance agricole pour soutenir la modernisation des exploitations agricoles. Ce plan s'accompagnera d'une aide technique à la création d'un réseau local bancaire à vocation agricole (soutien aux coopératives et à l'agro-industrie).

3.2/. Santé

Les actions suivantes seront mises en oeuvre :

- Extension de l'Institut médical français pour l'enfant (IMFE) dans sa phase dite III pour en faire un centre hospitalo-universitaire généraliste. La France déléguera à l'AFD et aux relais choisis par celle-ci la mise en oeuvre du projet. Les ministères afghans de la santé publique et de l'enseignement supérieur contribueront à ce projet, notamment pour la validation des formations et des diplômes délivrés.

Le gouvernement afghan reconnaîtra à l'IMFE un statut d'établissement pilote, permettant à ce dernier de mettre en oeuvre des projets expérimentaux de télémédecine avec un réseau d'établissements médicaux identifiés dans plusieurs provinces afghanes, notamment dans le Badakhshan.

- Reprise d'une coopération d'excellence avec l'Université de médecine de Kaboul, la Faculté de pharmacie de l'Université de Kaboul ainsi que l'institut des sciences de la santé (pour la réforme des curricula) et établissement de partenariats durables avec des facultés de médecine et de pharmacie françaises ayant pour objectif principal l'appui à la refonte des curricula et l'établissement d'un plan de formation. La France examinera également la possibilité de fournir des bourses de spécialité dans des domaines tels que la pharmarcie, la chirurgie, la gynécologie-obstétrique, la pédiatrie, l'endoscopie, la chirurgie laparoscopique, la santé mentale et la psychiatrie.

- Lancement d'une coopération en matière d'administration hospitalière, fondée sur des missions d'expertise française et sur l'accueil de deux boursiers afghans par an à l'Ecole des hautes études en santé publique de Rennes.

- Eventuellement, assistance à l'élaboration par l'Afghanistan d'un projet d'assurance médicale.

3.3/. Enseignements primaire, secondaire et supérieur :

Les signataires mettront en place les actions suivantes :

- Octroi, par l'Afghanistan, d'un statut d'établissements d'application au profit des lycées Esteqlal et Malalaï afin que soient étendues les expérimentations menées et réussies aux autres établissements de Kaboul dans un premier temps, puis à ceux de province. Mise en place, dans ces deux mêmes lycées, d'une filière expérimentale d'enseignement technique.

- Appui à la formation des inspecteurs généraux et des chefs d'établissement afghans à travers un programme conjoint des deux parties réactualisé chaque année.

- Extension de l'expérience pilote d'enseignement des sciences dans les lycées Esteqlal et Malalaï à d'autres établissements (Kaboul et, dans la mesure du possible, Hérat, Bamyan et Mazar-e-Charif) identifiés conjointement par les signataires.

- Octroi, par l'Afghanistan, d'un statut de langue vivante officielle au profit du français ; création, notamment, d'une option langue française au concours d'entrée à l'université et titularisation de vingt-cinq enseignants de français par an, toutes disciplines confondues, sur la période de référence.

- Soutien des deux signataires à la conclusion d'accords entre les facultés et départements universitaires afghans et des facultés homologues en France afin de créer des diplômes de niveau master et des doctorats en cotutelle.

- Mise en place, au sein des facultés de droit et sciences politiques afghanes, de curricula et de méthodes d'enseignement appropriées ; encouragement au rapprochement entre facultés de droit et facultés de charia, notamment par la mise en place de formations communes.

- Soutien à l'Université polytechnique de Kaboul (UPK), en partenariat avec le Groupe des Ecoles des Mines (GEM) et les universités françaises, afin d'adapter le contenu des méthodes pédagogiques et des enseignements, de participer à la rénovation des structures et des équipements et de proposer aux étudiants afghans le bagage scientifique et technique leur permettant d'obtenir des diplômes d'ingénieur ou de troisième cycle d'universités françaises.

3.4/. Recherche-Développement

Les signataires entendent soutenir les activités du Service géologique afghan (AGS), en relation étroite avec le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) français.

3.5/. Gouvernance démocratique et état de droit

Les signataires coopéreront en vue de contribuer aux objectifs suivants :

3.5.1 : Renforcement des capacités des administrations et des institutions démocratiques

La réalisation de cette coopération comprendra les actions suivantes :

- Appui institutionnel au Bureau des affaires administratives/Secrétariat général du Conseil des ministres afghan ;

- Poursuite d'un programme de formation initiale et continue des administrateurs des assemblées parlementaires ;

- Contribution à la formation des cadres des administrations centrales en partenariat avec l'Ecole nationale d'administration de la République française ;

- Mise en place d'un appui à la formation des administrateurs de provinces, dont le corps des vice-gouverneurs.

- Assistance à la définition et à la mise en oeuvre du curriculum de formation initiale des magistrats ainsi que d'un programme de formation continue avec l'appui de l'Ecole Nationale de la Magistrature (ENM) française.

- Expertise française en matière de contrôle de constitutionnalité, de réforme normative et de renforcement des capacités institutionnelles - Parlement et Cour Suprême.

- Mise en place d'un appui à la formation des administrateurs et diplomates du ministère afghan des Affaires étrangères. Octroi, chaque année, d'une bourse de maîtrise et d'une bourse de doctorat au profit de diplomates issus de l'Institut de diplomatie d'Afghanistan et envoi auprès de cette institution de professeurs en mission de courte durée (15 jours à un mois) sur des thématiques à définir d'un commun accord. Envoi régulier, pour la bibliothèque de cette même institution, de publications sur l'Afghanistan et sa région.

3.5.2 : Accompagnement et structuration de la société civile :

Les signataires coopéreront par les actions suivantes :

- Appui à la structuration et au fonctionnement des institutions de la société civile nécessaires au bon fonctionnement de l'état de droit, telles que le Barreau indépendant d'Afghanistan ou le milieu associatif.

- Elaboration d'un plan visant à améliorer l'accès à la justice pour les femmes en Afghanistan et à assurer la protection de leurs droits.

- Mise en oeuvre d'un plan de sensibilisation à la prévention des violences faites aux femmes.

3.6/. Patrimoine - Archéologie

Les signataires coopéreront en vue de contribuer aux objectifs suivants :

- Pérennisation de la mission et de l'action de la Délégation archéologique française en Afghanistan (DAFA) par la mise à disposition, en emphytéose d'une durée de 99 ans, d'une partie des locaux de l'Institut national d'archéologie qui doit être bientôt reconstruit avec le soutien de la France.

- Désignation, chaque année, par la partie afghane, pour un an renouvelable pour une période maximale de trois ans, d'un archéologue en résidence à la DAFA.

- Assistance à la création d'un service afghan de répression du trafic des oeuvres d'art : assistance à l'élaboration de textes réglementaires ; assistance à la formation des personnels archéologiques, des musées et des douanes ; transposition en dari et pachto de modules de formation des personnels.

- Accueil en France, chaque année, de cinq étudiants en archéologie sur bourses du Gouvernement français, la partie afghane s'engageant à les titulariser avec la reconnaissance de leur diplôme à l'issue de leur formation.

- Accueil en France chaque année de professionnels afghans pour des formations complémentaires courtes dans les domaines de la médiation culturelle, de la muséologie et de l'archéologie préventive.

- Renforcement du partenariat entre le Musée Guimet et le Musée de Kaboul ; accueil de professionnels afghans au Musée Guimet, dans le cadre du programme « Profession culture », notamment pour un travail partagé sur le fonds photographique concernant l'Afghanistan.

3.7/. Echanges culturels

Les signataires coopéreront par les actions suivantes :

- Pérennisation des actions de l'Institut français d'Afghanistan (IFA) sur son site historique par la conclusion d'un bail emphytéotique d'une durée de 99 ans et la reconnaissance de la pleine responsabilité à la France pour la gestion de l'établissement que la partie française s'engage à assurer.

- Diffusion en province par les établissements culturels et éducatifs afghans des événements et activités de l'IFA.

- Assistance à la formation des professionnels de la culture, notamment par la prise en charge de l'accueil sur dossier de francophones afghans dans le cadre du programme « Courants du monde ».

- Prise en charge de l'accueil pour une année, sur dossiers, d'étudiants afghans dans les écoles d'art, notamment à l'ENSAD (Ecole nationale supérieure des arts décoratifs).

- Eligibilité d'artistes afghans à des accueils en résidence pour une durée maximale de deux mois dans les Centres culturels de rencontre sur bourses d'accueil du programme Odyssée.

- Extension des coopérations de formation et des coproductions entre le Théâtre du soleil et le Théâtre Aftaab de Kaboul ainsi qu'avec le Théâtre national de Kaboul.

- Dans le domaine du livre et de l'écrit : accueil chaque année à la Bibliothèque nationale de France pour une période de trois mois d'un professionnel afghan sur une bourse « Profession culture » ; mise en place d'un soutien financier à une librairie afghane diffusant des livres français ainsi qu'au département de français de la Bibliothèque publique de Kaboul ; soutien à la traduction d'ouvrages en français ou vers le français ; attribution sur projet d'une bourse de séjour à un traducteur afghan ; attribution sur projet d'une bourse d'écriture à un écrivain afghan francophone.

- dans le domaine du cinéma : soutien des deux parties à la mise en place d'une coopération d'expertise et de formation entre les services français et afghans ; accueil à la Fémis pour deux mois d'un étudiant afghan dans le cadre de l'Université d'été ; soutien des deux parties au développement des coopérations de formation à la réalisation d'oeuvres documentaires cinématographiques engagées par les Ateliers Varan

- Dans le domaine de l'audiovisuel : mise à disposition de programmes audiovisuels auprès de la NRTA ; soutien des deux parties à la mise en place de programmes de formation continue et d'assistance technique, notamment par la conclusion d'accords pour l'accueil à l'INA de stagiaires afghans en formation longue de documentalistes audiovisuels ou dans le domaine du son ; soutien des deux parties à la conclusion d'accords pour la poursuite par l'INA (Institut national de l'audiovisuel) de la numérisation des archives de la radio et de la télévision afghane, du fonds de films d'actualités d'Afghan Films et des archives nationales d'Afghanistan.

3.8/. Coopération spéciale en Surobi et Kapisa

Si les populations de la province de Kapisa et du district de Surobi le souhaitent, la France :

- complétera les travaux d'infrastructure menés en 2011 pour amener l'électricité aux populations de la zone à travers la construction de lignes de distribution de moyenne tension (20 Kv) et, en fonction des besoins identifiés par les autorités compétentes, de  lignes de transmission haute tension (110 Kv) , le long - et à partir - de la vallée de Tagab ;

- consolidera les actions de soutien aux secteurs de l'agriculture et du développement rural menées depuis 2009 ;

- proposera une expertise et des formations aux producteurs de la zone pour favoriser le développement de filières intégrées permettant d'améliorer et de valoriser la culture et la commercialisation des productions agricoles et fruitières de la zone, notamment la grenade ;

- valorisera les infrastructures qu'elle a réalisées en 2011-2012 en matière d'éducation et poursuivra ses actions de formation au profit des enseignants, dans la continuité des formations scientifiques et supérieures déjà dispensées et en liaison étroite avec les autorités nationales et locales ;

- valorisera les infrastructures qu'elle a réalisées en matière de santé en 2011-2012 (hôpitaux de district de Nijrab et de Tagab).

4 - Economie, Finances et Commerce

4.1/. Coopération en matière économique

Les signataires identifieront les enjeux majeurs communs de coopération économique, financière et commerciale, et accompagneront les stratégies les plus propices au désenclavement et au redémarrage économiques de l'Afghanistan. Ils s'attacheront à favoriser, en Afghanistan, le développement d'un secteur privé afghan structuré, notamment par le biais de l'appui à la Chambre de commerce européenne en Afghanistan.

4.2/. Echanges commerciaux et investissements

Durant la période de référence, les signataires :

- Assureront le développement et la consolidation d'un cadre légal et réglementaire favorable aux investissements étrangers, et notamment français, en Afghanistan, à l'harmonisation et à la simplification des démarches administratives et procédures fiscales ;

- consolideront les liens déjà établis entre secteurs privés français et afghan et s'attacheront à poursuivre leur développement.

4.3/. Infrastructures de développement et désenclavement

Les signataires apporteront leur soutien aux acteurs français souhaitant intervenir dans le domaine des infrastructures, en particulier :

- la reconstruction et le développement des réseaux d'adduction et d'assainissement en eau, notamment à Kaboul ;

- le développement des infrastructures notamment aéroportuaires et ferroviaires ;

- la restructuration, la modernisation et l'adaptation du secteur afghan des télécommunications et de la poste ;

- l'identification et la mise en valeur des ressources naturelles ainsi que de leur transport dans le pays (hydrocarbures et mines).

5 - Financement des coopérations et vérification

Les contributions financières de la France aux administrations et entités publiques afghanes pour la mise en oeuvre des coopérations prévues dans le présent programme s'effectueront en conformité avec et dans la limite des objectifs édictés par celui-ci.

L'ordonnancement des dépenses sera décidé conjointement par les parties signataires suivant des programmes d'opérations agréés conjointement entre elles, au niveau technique, pour chaque programme, sur la base des devis présentés par l'une ou l'autre partie signataire.

L'autorisation de décaissement sera donnée par la France au vu des justificatifs comptables correspondants. Chaque partie signataire conservera un exemplaire de ces justificatifs pour permettre les vérifications prévues par sa législation nationale.

6 - Mise en oeuvre du programme

Le présent programme pourra faire l'objet d'adaptations pendant la période considérée, compte tenu notamment de la situation sécuritaire en Afghanistan. En cas de difficulté de mise en oeuvre d'actions envisagées, un transfert de moyens pourra être envisagé au profit d'autres actions. Les décisions en la matière seront prises par la commission mixte de coopération prévue à l'article 2, alinéa 2 du traité d'amitié et de coopération.

Fait à Paris, le 27 janvier 2012, en double exemplaire, en langues française, dari et pachtou, les trois textes faisant également foi.


* 1 Les données statistiques peu fiables amènent à prendre ces chiffrages avec précaution

* 2 Hommage national aux Invalides le 14 juin 2012 aux quatre soldats morts en Afghanistan

* 3 Laurent Dessart, l'Afghanistan à l'orée des temps, L'Harmattan 1985.

* 4 Cette analyse est notamment développée dans le remarquable rapport d'information de nos collègues députés « Afghanistan : Un chemin pour la paix » présenté par M. Jean GLAVANY et M. Henri PLAGNOL en 2009

* 5 Entretien avec le quotidien Le Parisien le 8 juillet 2012

* 6 MM. Josselin de ROHAN, Didier BOULAUD et Jean-Pierre CHEVÈNEMENT, rapporteurs

* 7 D'après le rapport de l'assemblée parlementaire de l'OTAN : « Afghanistan 2014 et au-delà », avril 2012

* 8 Cf. notamment les rapports de l'assemblée parlementaire de l'OTAN

* 9 Rapport au Président de la République sur la politique d'aide au développement en Afghanistan, janvier 2012, Mme Françoise HOSTALIER

* 10 Source : rapport précité de Mme HOSTALIER

* 11 http://basedoc.diplomatie.gouv.fr/Traites/Accords_Traites.php

Pour obtenir le texte de l'accord, cliquer sur « recherche dans la base/accords et traités » puis porter le numéro "19460040" (numéro de l'accord) dans le champ de recherche "recherche tout texte".

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