B. LES ORIENTATIONS AVANCÉES PAR LE PRÉSIDENT DU CONSEIL EUROPÉEN

1. Les « arrangements de nature contractuelle »

Dans son rapport du 5 décembre 2012, le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy 10 ( * ) , s'est également saisi de la question des « arrangements de nature contractuelle » devant porter sur « les réformes destinées à promouvoir la compétitivité, la croissance et l'emploi que [l]es pays s'engagement à mettre en oeuvre ». Aussi est-il proposé de faire de ces arrangements un outil permettant de remédier aux vulnérabilités à un stade précoce , constatant que les « déséquilibres macroéconomiques ont tendance à s'installer lentement et sont souvent masqués par une croissance et des conditions de liquidités favorables » ; c'est la raison pour laquelle de tels arrangements doivent être axés sur « les principales faiblesses » de chaque pays et s'attacher à corriger les déséquilibres qui les sous-tendent.

Toutefois, parce que la situation de chaque Etat membre présente des spécificités, le président du Conseil européen précise qu'« il serait essentiel que chaque Etat membre et les institutions de l'UE mènent, au niveau tant technique que politique, un dialogue approfondi qui prendrait la forme d'une analyse approfondie à laquelle procèderaient les deux parties et qui servirait de base à un accord détaillé et personnalisé portant sur certaines réformes spécifiques ». Dès lors, c'est en quelque sorte le principe de subsidiarité qui justifie une approche de nature contractuelle , les arrangements dont il est proposé la création devant permettre d'apporter une réponse adaptée aux déséquilibres macroéconomiques propres à chaque pays et surtout, accorder une flexibilité suffisante de manière à être en mesure « de faire face aux chocs importants et à l'évolution de la conjoncture et des priorités économiques ».

Enfin, le rapport précité insiste sur la nécessité d'intégrer les arrangements contractuels au semestre européen et, par conséquent, de s'assurer de leur cohérence avec, d'une part, l' examen annuel de croissance - qui ouvre, chaque année, le semestre européen et expose les actions prioritaires que devront mener les Etats membres en matière de politique économique - et, d'autre part, les recommandations par pays adoptées par le Conseil de l'Union européenne en conclusion du semestre européen (cf. graphique ci-après présentant le calendrier du semestre européen).

Graphique n° 1 : Le semestre européen

Source : Conseil de l'Union européenne (2013)

En outre, il est également envisagé que ces arrangements soient fondés sur les conclusions des analyses approfondies réalisées par la Commission européenne dans le cadre de la procédure de déséquilibre macroéconomique (PDM) ; aussi, il est proposé que, dans le cas des Etats membres soumis au volet correctif de la PDM, l'arrangement corresponde au plan d'action correctif, ce qui aurait pour conséquence de les exposer à la procédure de sanction si les engagements figurant dans l'accord n'étaient pas respectés.

2. Une capacité budgétaire pour l'UEM

Comme la Commission européenne, le président du Conseil européen estime que les réformes engagées dans le cadre d'« arrangements de nature contractuelle » devraient, dans des cas spécifiques, être soutenus au « moyen d'incitations financières limitées, temporaires, flexibles et ciblées » ; mais, plus fondamentalement, ces incitations seraient une étape vers la constitution d'une capacité budgétaire pour l'Union économique et monétaire (UEM).

A cet égard, il est précisé que « celle-ci pourrait prendre la forme d'un mécanisme de type assurance entre pays de la zone euro conçu pour absorber les chocs économiques graves affectant certains pays » et que cette « fonction garantirait qu'une forme de solidarité budgétaire soit exercée tout au long des cycles économiques, ce qui renforcerait la résilience de la zone euro dans son ensemble et réduirait les coûts de production découlant des ajustements macroéconomiques ».

En effet, comme cela est souligné ultérieurement dans le présent rapport, la constitution d'une capacité budgétaire propre à la zone euro permettrait à cette dernière de disposer du moyen de faire face aux « chocs asymétriques » qui lui fait aujourd'hui cruellement défaut, ne lui permettant pas d'assister efficacement les Etats membres faisant face à des difficultés économiques et qui sont privés, en raison de leur appartenance à une zone monétaire unique, des mécanismes d'ajustement « classiques » que sont la politique de change et la politique monétaire.

En tout état de cause, la création d'une capacité d'intervention financière doit permettre d' éviter que les pays de la zone euro confrontés à un choc macroéconomique n'aient recours à la politique budgétaire
- celle-ci constituant désormais l'unique instrument de stabilisation conjoncturelle dont ils disposent - ce qui aurait un impact négatif sur les autres Etats membres
; à ce titre, la récente crise des dettes souveraines dans la zone euro est venue souligner le caractère concret de ce risque.

3. La « gouvernance » des arrangements contractuels

Pour finir, le rapport du président du Conseil européen insiste sur le fait que les « arrangements contractuels doivent recueillir une adhésion et impliquer une responsabilité totales au niveau national comme au niveau européen » et appelle, à cet effet, à une pleine mobilisation du Parlement européen et des parlements nationaux devant lesquels seraient respectivement responsables la Commission européenne et les gouvernements concernés, ces derniers devant rendre compte devant eux des progrès réalisés.

Il faut noter qu'une communication de la Commission européenne du 20 mars 2013 11 ( * ) a, s'agissant de l'instrument de convergence et de compétitivité (cf. supra ), également abordé la question de la participation du Parlement européen et des parlementaires nationaux. A cet égard, elle avance une piste particulièrement intéressante, indiquant que « lorsque cela serait nécessaire, des représentants de la Commission pourraient participer au dialogue avec les parlements nationaux sur l'application de l'instrument [de convergence et de compétitivité] ». Pour autant, la Commission n'apporte pas de précision quant aux modalités d'intervention du Parlement européen et des parlements nationaux et ouvre une consultation sur la base des interrogations suivantes : « Quelle forme devrait prendre la participation des parlements nationaux au processus décisionnel concernant les arrangements contractuels ? Comment les autres parties prenantes nationales devraient-elles être consultées ? De quelles autres parties prenantes s'agirait-il ? A quelle étape du processus ? Quelle forme devrait prendre la participation des représentants de la Commission au dialogue avec les parlementaires nationaux sur les arrangements contractuels ? Quelle forme devrait prendre la participation des représentants du Conseil et des Etats membres concernés au dialogue avec le Parlement européen sur les arrangements contractuels ? Si oui, à quelle étape du processus ? »

En avançant des réponses à chacune de ses questions, la présente proposition de résolution européenne permet donc au Sénat de s'inscrire dans cette procédure de consultation sur ce type nouveau d'instrument de coordination économique au sein de la zone euro que sont les « arrangements de nature contractuelle » faisant intervenir un soutien financier - également appelés instrument de convergence et de compétitivité (ICC) par la Commission européenne - dont les contours doivent encore être tracés.


* 10 Rapport du président du Conseil européen, établi en étroite collaboration avec le président de la Commission européenne, le président de l'Eurogroupe et le président de la Banque centrale européenne, du 5 décembre 2012 intitulé « Vers une véritable Union économique et monétaire ».

* 11 Communication de la Commission européenne du 20 mars 2013, intitulée « Vers une Union économique et monétaire véritable et approfondie. Création d'un instrument de convergence et de compétitivité » (COM(2013) 165 final).

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