II. ACCÉLÉRER LA PROCÉDURE PRUD'HOMALE QUI ACCOMPAGNE LA PRISE D'ACTE

A. LES DISPOSITIONS DE LA PROPOSITION DE LOI

Une fois que le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail, il doit saisir le conseil de prud'hommes pour que celui-ci en qualifie les effets et déclare, selon le cas d'espèce, que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'une démission.

Ce recours est soumis à la procédure prud'homale de droit commun, qui selon l'article L. 1411-1 du code du travail repose sur une phase préalable de conciliation entre le demandeur et le défendeur dont l'éventuel échec laisse la place à un jugement . Juridiction paritaire réunissant des juges élus par leurs pairs issus de deux collèges, l'un représentant les salariés, l'autre les employeurs, et siégeant en nombre pair, le conseil de prud'hommes voit ses jugements soumis au départage d'un juge du tribunal d'instance en cas de désaccord au sein du bureau de jugement de la section saisie de l'affaire.

Les sections du conseil de prud'hommes

En application de l'article R. 1423-1 du code du travail, les conseils de prud'hommes sont organisés en cinq sections thématiques , qui correspondent à l'activité principale de l'employeur ou au statut spécifique de certains salariés, comme les cadres, et traitent le contentieux qui en relève :

- Section de l'encadrement ;

- Section de l'industrie ;

- Section du commerce et des services commerciaux ;

- Section de l'agriculture ;

- Section des activités diverses (employés de maison, concierges, etc.).

Chaque section, qui peut comprendre plusieurs chambres, comporte au moins un bureau de conciliation et un bureau de jugement , avec au moins deux représentants des employeurs et deux représentants des salariés siégeant dans ce dernier. Le conseil comporte enfin une formation commune de référé .

En 2012, les 210 conseils de prud'hommes ont jugé 187 913 affaires, dans un délai moyen de 13,7 mois 25 ( * ) . Le départage, qui concerne 18 % de ce total, porte à 25,7 mois le délai moyen de jugement. Le taux de conciliation est en baisse constante ces dernières années et est inférieur à 10 % . Qui plus est, de très fortes disparités existent selon les conseils de prud'hommes : le délai de jugement peut varier de 2,7 mois à Saint-Omer à 20 mois à Aix-en-Provence, voire même 33,6 mois à Cayenne.

Enfin, le contentieux prud'homal se caractérise par un taux d'appel très élevé : il est de 61 % sur les jugements prononcés par les conseils de prud'hommes en premier ressort en 2011, contre 12,5 % pour les tribunaux de grande instance. Cela entraine une prolongation de la procédure de 15 mois en moyenne, mais jusqu'à 21 mois devant la cour d'appel de Paris.

Dans ce contexte, cette proposition de loi vise à accélérer le traitement du contentieux de la prise d'acte devant le conseil de prud'hommes en transposant une procédure qui existe déjà pour la requalification d'un CDD 26 ( * ) ou d'un contrat d'intérim 27 ( * ) en CDI et qui, très prochainement, sera applicable aux demandes de requalification d'une convention de stage en contrat de travail 28 ( * ) .

Dans sa rédaction d'origine, son article unique insérait, dans la section du livre I du code du travail relative à la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié, une sous-section portant sur la prise d'acte et comportant un article L. 1237-1-1 nouveau prévoyant qu'en cas de saisine du conseil de prud'hommes par un salarié pour qualifier la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail, l'affaire soit directement portée devant le bureau de jugement qui disposerait d'un délai d'un mois pour statuer au fond.

La suppression de la phase de conciliation est aisément compréhensible. La prise d'acte est, en effet, la traduction d'un désaccord irréconciliable entre le salarié et son employeur et d'un comportement en contradiction avec les principes fondamentaux de la relation de travail. Par ailleurs, la faiblesse du taux de conciliation traduit le rôle qu'elle joue désormais dans de nombreuses instances : un outil pour la ralentir, gagner du temps et ainsi décourager de futurs recours sans jamais avoir eu l'intention de parvenir à un compromis avant le jugement.

Il est donc, aux yeux de votre rapporteur, dans l'intérêt du salarié mais aussi de l'employeur, qui est lui aussi soumis à de fortes incertitudes, notamment financières, tant qu'un jugement n'a pas été rendu, de prévoir la résolution de ce différend grave dans les meilleurs délais.


* 25 Source : Les chiffres clés de la justice 2013, ministère de la justice.

* 26 Article L. 1245-2 du code du travail.

* 27 Article L. 1251-41 du code du travail.

* 28 Après l'adoption définitive par le Parlement de la proposition de loi relative au développement, à l'encadrement des stages et à l'amélioration du statut des stagiaires, qui insère à cet effet un article L. 1454-5 nouveau dans le code du travail.

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