II. APRÈS UNE PRÉPARATION CHAOTIQUE, UNE INITIATIVE QUI SE VEUT AMBITIEUSE

À titre liminaire, votre rapporteur observe que la proposition de loi fait écho aux récents travaux de la plateforme nationale d'actions globales pour la RSE, laquelle a publié en novembre 2014 un rapport d'étape sur « les implications de la responsabilité des entreprises sur leur chaîne de valeur » 29 ( * ) .

A. LA GENÈSE DU TEXTE À L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Après la tragédie du Rana Plaza, un travail mené par plusieurs de nos collègues députés, issus des quatre groupes socialiste, républicain et citoyen (SRC), radical, républicain, démocrate et progressiste (RRDP), écologiste et de la gauche démocrate et républicaine (GDR), avec le concours d'associations, de syndicats et de juristes spécialisés, a conduit au dépôt, entre novembre 2013 et avril 2014, de quatre propositions de loi similaires relatives au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre.

Ces textes visaient à instaurer, dans le code de commerce, à la charge de toute entreprise, une obligation de vigilance, c'est-à-dire une obligation de prévenir tout dommage ou tout risque avéré de dommage sanitaire, environnemental ou d'atteinte aux droits fondamentaux, dans le cadre de ses activités, de celles de ses filiales ou de celles de ses sous-traitants. En cas de dommage, la responsabilité de l'entreprise était engagée, sauf à démontrer qu'elle n'était pas en mesure de le prévenir, en dépit de son devoir de vigilance. Était également instituée, dans le code civil, une présomption de responsabilité en cas de dommage causé non seulement par l'activité d'une entreprise, quelle que soit sa taille, mais aussi l'activité de ses filiales et sous-traitants, sauf à démontrer qu'elle avait pris toutes les mesures nécessaires pour prévenir ce dommage. Était enfin prévu un délit de manquement à l'obligation de vigilance.

Un tel dispositif soulevait, selon votre rapporteur, de très sérieuses difficultés d'ordre juridique et même constitutionnel, au regard du principe de responsabilité, à l'évidence, mais aussi du principe de légalité des délits et des peines.

À l'initiative du groupe écologiste, l'une de ces propositions de loi a été examinée par l'Assemblée nationale, le 29 janvier 2015, sur le rapport de notre collègue députée Danielle Auroi. Alors que le Gouvernement avait formulé la nécessité de reprendre un travail de clarification juridique sur ce sujet, le texte a été renvoyé en commission à l'initiative du groupe SRC, au bénéfice de cette réflexion complémentaire.

Résultant de cette réflexion complémentaire, menée semble-t-il de concert avec le Gouvernement, la proposition de loi aujourd'hui soumise à l'examen de votre commission a été déposée dès le 11 février 2015, par le groupe SRC, avant d'être adoptée par l'Assemblée nationale le 30 mars 2015.


* 29 Ce rapport d'étape est consultable à l'adresse suivante :

http://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/rapport_detape_gt-3_-_le_13-11-2014.pdf .

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page