II. LES MESURES DE PRÉVENTION

L'article 2 décline le contenu des mesures de prévention du travail forcé que les États membres doivent prendre :

- l'éducation et l'information des personnes considérées comme particulièrement vulnérables, de la population et des employeurs ;

- l'élargissement du champ d'application et du contrôle de la législation applicable en matière de prévention du travail forcé en vue de couvrir tous les travailleurs et tous les secteurs ;

- le renforcement des services de l'inspection du travail et autres services chargés de faire appliquer la législation relative à la prévention du travail forcé ;

- la protection des personnes, en particulier, les travailleurs migrants , contre des pratiques abusives ou frauduleuses au cours du processus de recrutement et de placement ;

- l'appui à la diligence raisonnable dont doivent faire preuve les secteurs publics et privés pour prévenir les risques de travail forcé et y faire face ;

- et l'action contre les causes profondes et les facteurs qui accroissent le risque de travail forcé.

La Recommandation n° 203 précitée invite les États membres notamment à :

- établir et/ou renforcer les politiques et plan d'actions nationaux, les capacités des autorités compétentes (inspection du travail, institutions judiciaires, organismes nationaux) ;

- collecter, analyser et diffuser des informations et des données statistiques en garantissant le respect du droit à la protection de la vie privée s'agissant des données personnelles ;

- prendre des mesures préventives qui comprennent le respect, la promotion et la réalisation des principes et droits fondamentaux au travail ; la promotion de la liberté syndicale et de la négociation collective ; des programmes visant à combattre la discrimination ; des initiatives de lutte contre le travail des enfants ;

- prendre d'autres mesures préventives telles que des campagnes de sensibilisation ciblées (moyens de défense existants, sanctions encourues etc.) ; des programmes de formation professionnelle destinés aux populations à risque ; des services d'orientation et d'information pour les migrants ;

- et à orienter et à appuyer les employeurs et les entreprises afin qu'ils prennent des mesures efficaces pour identifier, prévenir et atténuer les risques du travail forcé.

S'agissant de l'extension de la compétence des services de l'inspection du travail , il conviendra de modifier l'article L.8112-2 du code du travail qui donne la liste des infractions que les inspecteurs du travail sont habilités à constater pour y inclure expressément, notamment l'infraction de travail forcé créée par la loi n° 2013-711 du 5 août 2013 précitée.

L'infraction de travail forcé figure à l'article 225 - 14- 1 du code pénal qui punit, de sept ans d'emprisonnement et de 200 000 euros d'amende, « le fait, par la violence ou la menace, de contraindre une personne à effectuer un travail sans rétribution ou en échange d'une rétribution manifestement sans rapport avec l'importance du travail accompli ». Le fait de faire subir, de manière habituelle, cette infraction de travail forcé à une personne dont la vulnérabilité ou l'état de dépendance sont apparents ou connus de l'auteur est puni, selon les termes de l'article 225-14-2 du code précité, d'une peine de dix ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende.

Répondant par écrit aux questions de votre rapporteur, les services du ministère des affaires étrangères et du développement international 3 ( * ) ont indiqué que l'article 261 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité de chances économiques, dite loi Macron , a habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures visant notamment à renforcer le rôle de surveillance et les prérogatives du système d'inspection du travail et qu'actuellement, des consultations officielles sont diligentées en vue de présenter un texte au Conseil d'État en début d'année 2016.

Les services du ministère des affaires étrangères et du développement international 4 ( * ) lui ont fait aussi savoir que, depuis le décret du 20 mars 2014, l'organisation interne de l'inspection du travail a été réformée aux niveaux local, régional et national, afin de l'adapter aux évolutions économiques et sociales. La nouvelle organisation de l'inspection du travail se compose d'unités de contrôle (UC) aux différents niveaux territoriaux. Dans la région, les unités de contrôle départementales ou infra-départementales composées de sections seront l'échelon généraliste de proximité tandis que des unités de contrôle interdépartementales pourront également être créées ainsi que des unités de contrôle spécialisées dont la compétence territoriale s'étendra à la région. Dans chaque région, une unité d'appui et de contrôle sur le travail illégal (URACTI) est mise en place ainsi que des unités de contrôle sectorielles ou thématiques si nécessaire. En outre, il est créé un groupe national de veille, d'appui et de contrôle dont les missions consistent à apporter un appui à des opérations qui nécessitent une expertise particulière, un accompagnement des services, un contrôle spécifique ou une coordination des contrôles. Cette nouvelle organisation collective de l'inspection du travail devrait permettre une action pro-réactive du réseau des agents spécialisés notamment dans la lutte contre le travail illégal et les formes les plus graves d'atteintes aux droits fondamentaux des travailleurs, tels que le travail forcé, l'exploitation des êtres humains par le travail et les abus de vulnérabilité des salariés. Dans cette perspective, la désignation des « référents TEH » (pour traite des êtres humains) au sein des services territoriaux de l'inspection du travail devrait se faire au cours des prochains mois , conformément aux engagements inscrits dans le Plan d'action national contre la traite des êtres humains pour 2014-2016.


* 3 Source : réponses au questionnaire écrit de la commission.

* 4 Source : réponses au questionnaire écrit de la commission.

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