II. LE CONTENTIEUX OPCVM, UN ENJEU BUDGÉTAIRE LOURD MAIS INCERTAIN

A. ORIGINE DU CONTENTIEUX

Les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) français échappent à l'impôt sur les sociétés , soit de par leur nature juridique, soit de par application d'une exonération expresse. Les dividendes payés par des sociétés résidentes de France à des OPCVM étrangers sont en revanche assujettis, sous réserve des conventions fiscales internationales, à une retenue à la source de 30 % .

Des OPCVM européens et nord-américains sollicitent la restitution de ces prélèvements, considérant qu'ils sont victimes d'une discrimination contraire au droit communautaire, entrave à la liberté de circulation des capitaux garantie par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

B. UNE PROCÉDURE JURIDICTIONNELLE NON CLOSE ET TOUJOURS INCERTAINE

Considérant le nombre très important de réclamations déposées , plus de 10 000, il a été décidé d'organiser une procédure visant à isoler une dizaine de dossiers « types » représentatifs des différentes situations pour les faire juger , puis à appliquer la solution ainsi retenue à l'ensemble des réclamations et des instances gelées dans l'attente du jugement de ces 10 dossiers « pilotes ».

La Cour de Justice de l'Union européenne a été saisie de deux questions préjudicielles. La Cour a prononcé le 10 mai 2012 un arrêt entièrement défavorable à la France, en invalidant le régime français de retenue à la source sur dividendes payés à des OPCVM étrangers et refusant également de réserver une suite favorable à la demande présentée par le gouvernement français de limiter ses effets dans le temps.

Le régime fiscal applicable aux dividendes payés à des OPCVM étrangers a été amendé par l'article 6 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 15 ( * ) . À compter de l'entrée en vigueur de la loi, les dividendes payés à des OPCVM étrangers comparables aux OPCVM français ont ainsi échappé à la retenue à la source prévue au 2 de l'article 119 bis du code général des impôts . Les établissements payeurs ont, dans un premier temps continué de prélever la retenue à la source, considérant les incertitudes prévalant alors sur les OPCVM éligibles à cette exonération.

Le traitement à réserver aux demandes émanant des OPCVM établis en dehors de l'Union européenne et de l'Espace économique européen , qui représentent un tiers des enjeux de ce contentieux, était par ailleurs suspendu à la position qui serait retenue par la Cour de justice de l'Union européenne dans une affaire polonaise 16 ( * ) .

Dans son arrêt prononcé le 10 avril 2014 17 ( * ) , la Cour a jugé qu'un État membre ne peut, par principe, exclure du bénéfice d'une exonération de retenue à la source les dividendes versés au profit de fonds d'investissement établis dans un pays tiers lié à l'État membre de la source par un dispositif d'assistance administrative mutuelle en matière fiscale . La Cour considère qu'une telle restriction ne pourrait être justifiée que si l'État membre de la source démontrait que le dispositif d'assistance mutuelle ne lui permet pas de s'assurer, auprès de l'administration de l'État tiers, de la véracité des éléments produits par l'organisme qui y a son siège.


* 15 Loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 16 Cour de justice, affaire Emerging Market C-190/12.

* 17 Cour de justice, arrêt du 10 avril 2014 - C-190/12 - Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company.

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