AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Déposée le 27 juin 2017 par notre collègue Françoise Gatel et plusieurs de ses collègues des groupes UC, RDSE et Les Républicains, la proposition de loi vise à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture des établissements d'enseignement privés ainsi qu'à renforcer les contrôles dont les établissements hors contrat font l'objet.

Partant du constat que le régime en vigueur applicable à l'ouverture des établissements privés est dépassé et peu cohérent, le texte procède à une rénovation profonde de ce régime, en recherchant une juste conciliation entre les principes constitutionnels que sont la liberté de l'enseignement et le droit des enfants à l'éducation. À cette fin, il fusionne les trois procédures existantes et étend les délais et les motifs pour lesquels les différentes autorités concernées - maire, préfet, recteur et procureur de la République - peuvent s'opposer à l'ouverture d'un établissement privé.

Parce qu'il existe des limites évidentes à ce que l'examen des déclarations d'ouverture permet de connaître de la réalité du fonctionnement des établissements privés hors contrat, la proposition de loi vise à renforcer les obligations des services de l'État en matière de contrôle et à faciliter l'action de ces derniers pour la répression des dérives.

Enfin, les conditions d'exercice des directeurs et des enseignants des établissements privés étant disparates et inégales selon les niveaux d'enseignement, la proposition de loi propose leur harmonisation.

Au cours de sa réunion du 7 février 2018, les membres de votre commission ont, dans leur grande majorité, reconnu le bien-fondé de la proposition de loi et des amendements proposés par votre rapporteur. Le constat d'un désaccord persistant sur les modalités de détermination du contenu de la déclaration ainsi que le souci de plusieurs groupes d'approfondir leur réflexion avant de se prononcer a entraîné le rejet du dispositif proposé par votre rapporteure.

En conséquence, et en application des dispositions du gentlemen's agreement relatives à l'examen des propositions de loi d'origine sénatoriale et inscrites dans un espace réservé 1 ( * ) , votre commission a rejeté la proposition de loi. L'examen en séance publique portera en application de l'article 42 de la Constitution sur le texte initial.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

UN RÉGIME DÉPASSÉ ET INCOHÉRENT

I. L'ENSEIGNEMENT PRIVÉ HORS CONTRAT, QUOIQUE MARGINAL, CONNAÎT UNE FORTE CROISSANCE, CONCENTRÉE DANS LE PRIMAIRE

A. LE HORS-CONTRAT N'ACCUEILLE QUE 0,5 % DES ÉLÈVES DU SYSTÈME SCOLAIRE

1. Un enseignement marginal

L'enseignement privé se divise en deux ordres : les établissements ayant conclu avec l'État, dits « sous contrat », un contrat simple ou d'association, qui les engage à appliquer les programmes de l'enseignement public en contrepartie de leur financement par l'État et les établissements non liés l'État, dits « hors contrat ». Ce dernier cas de figure concerne l'ensemble des établissements privés nouvellement créés, puisque ce n'est qu'après cinq années d'exercice qu'un établissement privé peut demander à être lié à l'État par un contrat 2 ( * ) .

Il convient de noter que le code de l'éducation prévoit que les contrats passés par les établissements scolaires privés avec l'État sont passés par classe et non pas par établissement. Il existe donc des établissements privés qui comprennent à la fois des classes sous contrat et des classes hors contrat. À la rentrée scolaire 2017, 151 étaient dans ce cas.

L'enseignement privé non lié à l'État par un contrat simple ou d'association demeure relativement marginal dans le système éducatif français. À la rentrée 2017, on compte 1 300 établissements scolaires privés hors contrat et 151 établissements privés sous contrat disposant de classes hors contrat. L'ensemble accueille un peu moins de 73 000 élèves, ce qui représente 0,5 % environ des effectifs d'élèves du système éducatif et à peine plus de 3 % des effectifs d'élèves de l'enseignement privé 3 ( * ) .

Le hors-contrat concerne majoritairement l'enseignement primaire (57 % des effectifs d'élèves) ; le reste des élèves se répartit entre le second degré scolaire (34 %) et post-baccalauréat (9 %).

Les données communiquées par le ministère de l'éducation nationale mettent en évidence que, sur les trois dernières années scolaires, quelle que soit l'ancienneté de leur fonctionnement, très peu d'établissements intégralement hors contrat demandent à passer un contrat : entre 1,6 % et 2,2 %. La très grande majorité des établissements souhaitent donc demeurer hors contrat afin de conserver leurs spécificités pédagogiques et, le cas échéant, religieuses.

2. Un secteur regroupant une grande diversité d'établissements

La distribution des élèves selon les différents réseaux d'établissements montre que les établissements confessionnels ou se rattachant à un réseau confessionnel sont minoritaires , puisqu'ils représentent un peu moins de 45 % des effectifs d'élèves scolarisés dans des établissements hors contrat appartenant à un réseau identifié.

Les données présentées ci-dessous relatives à la répartition des élèves dans les différents réseaux ou catégories d'établissements doivent être pris avec prudence, en ce qu'elle résulte d'une enquête annuelle à visée budgétaire menée depuis peu par le ministère. 30 % environ des établissements n'ont pu être rattachés à un réseau identifié.

Source : ministère de l'éducation nationale

3. Un phénomène inégalement réparti sur le territoire

Si les établissements privés hors contrat sont présents sur l'ensemble du territoire, ce phénomène se concentre dans les zones urbaines : les académies d'Île-de-France regroupent 34,6 % des élèves hors contrat, dont 16,5 % dans la seule académie de Versailles. Six autres académies urbaines - Lyon, Aix-Marseille, Toulouse, Nice, Grenoble et Bordeaux - comptent 35 % des effectifs d'élèves scolarisés dans le privé hors contrat.

L'écart entre certains départements est éloquent : si le département de la Vendée compte sept écoles privées hors contrat en activité, le département des Yvelines, dont la population n'est que deux fois supérieure, en compte 41.


* 1 Réunions de la Conférence des Présidents des 24 mars et 29 avril 2009, du 11 décembre 2013 et du 9 mars 2016.

* 2 Article R. 442-33 du code de l'éducation, qui prévoit que le préfet peut ramener ce délai à un an « dans les quartiers nouveaux des zones urbaines ».

* 3 Chiffres communiqués par le ministère de l'éducation nationale.

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