CHAPITRE IV

Refonder le système de construction et
de régulation des diplômes et titres professionnels

Article 14 (art. L. 6113-1 à L. 6113-10 [nouveaux] du code du travail ; article L. 335-6 du code de l'éducation) - Nouvelle organisation de la certification professionnelle

Objet : Cet article confie la régulation des répertoires de la certification professionnelle à France compétences et supprime la Commission nationale de la certification professionnelle. Les certifications, désormais organisées en blocs de compétences et définies par trois référentiels, seront enregistrées aux répertoires pour une durée limitée. Les décisions de création, révision ou suppression des diplômes ou titres à finalité professionnelle seront soumises à l'avis conforme des commissions professionnelles consultatives. France compétences pourra identifier les certifications correspondant à des métiers en évolution afin qu'elles bénéficient d'un enregistrement simplifié et disposera d'un pouvoir de retrait des certifications des répertoires.

I - Le dispositif proposé

Le I du présent article modifie les règles encadrant la gestion et le contenu des répertoires des certifications professionnelles ainsi que les règles de création et d'enregistrement des certifications, en créant un chapitre III au sein du titre I er du livre I er de la sixième partie du code du travail, intitulé « la certification professionnelle » (articles L. 6113-1 à L. 6113-10) .

En conséquence , le II du présent article abroge l'article L. 335-6 du code de l'éducation qui régit actuellement la certification professionnelle.

L'entrée en vigueur de ce nouveau dispositif de certification professionnelle, transféré du code de l'éducation au code du travail, est prévue de manière progressive jusqu'au 1 er mars 2024 ( III à V du présent article ).

A. Gestion et composition des répertoires des certifications professionnelles

L'article L. 335-6 du code de l'éducation dispose actuellement que la commission nationale de la certification professionnelle (CNCP) établit et actualise le répertoire national de la certification professionnelle (RNCP) ainsi que l' inventaire spécifique répertoriant les certifications et habilitations correspondant à des compétences transversales. Rattachée au ministre chargé de la formation professionnelle, la CNCP n'a pas de personnalité juridique.

Le présent article prévoit de confier la tenue des répertoires des certifications professionnelles à France compétences , nouvel établissement public qui sera régi par l'article L. 6123-5 du code du travail 132 ( * ) .

S'il supprime la CNCP, le dispositif proposé maintient toutefois la coexistence de deux répertoires nationaux .

D'une part, le répertoire national de la certification professionnelle rassemble les certifications professionnelles permettant une validation des compétences et des connaissances acquises nécessaires à l'exercice d'activités professionnelles. Ces certifications seront toujours classées par niveau de qualification et domaine d'activité.

Elles seront en outre définies par un référentiel d'activités (situation de travail, activités exercées, métiers ou emplois visés), un référentiel de compétences (compétences et connaissances qui en découlent) et un référentiel d'évaluation (critères et modalités d'évaluation des acquis).

Elles seront également regroupées en blocs de compétences, entendus selon le présent article comme des « ensembles homogènes et cohérents de compétences contribuant à l'exercice autonome d'une activité professionnelle et pouvant être évaluées et validées ».

D'autre part, le répertoire spécifique des certifications et habilitations correspondra à des compétences complémentaires aux certifications professionnelles. Il remplacera l'actuel inventaire spécifique répertoriant les certifications et habilitations correspondant à des compétences transversales.

B. Création des certifications professionnelles

Les commissions professionnelles consultatives ministérielles (CPC) pourront examiner les projets de création, révision ou suppression d'un diplôme ou d'un titre à finalité professionnelle, à l'exception des diplômes de l'enseignement supérieur.

Les décisions de création, révision ou suppression de ces diplômes ou titres seront désormais soumises à l'avis conforme des CPC, à l'exception des modalités de mise en oeuvre de l'évaluation des compétences et connaissance en vue de la délivrance de ces diplômes et titres. Les CPC ne pourront toutefois émettre qu'un avis simple sur un diplôme ou un titre à finalité professionnelle requis pour l'exercice d'une profession régie par la loi ou par une règle internationale.

Le présent article permettra en outre de mentionner dans la loi la composition des CPC , qui devront comprendre au moins pour moitié des représentants des organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel et des représentants des organisations d'employeurs représentatives au niveau national, interprofessionnel et multiprofessionnel. Le fonctionnement et l'organisation de CPC seront précisés par décret en Conseil d'État.

Les certificats de qualification professionnelle (CQP) seront toujours établis par une ou plusieurs branches professionnelles à travers leurs commissions paritaires nationales de l'emploi. Ils seront en outre transmis à la commission chargée de la certification professionnelle de France compétences ainsi qu'à la Caisse des dépôts et consignations, cette dernière devenant gestionnaire du compte personnel de formation (CPF) 133 ( * ) .

C. Enregistrement des certifications professionnelles

Les diplômes et titres à finalité professionnelle délivrés au nom de l'État seront toujours enregistrés au RNCP, après avis des CPC. Désormais, ils seront toutefois enregistrés pour une durée limitée à cinq ans .

Les autres diplômes et titres à finalité professionnelle seront toujours enregistrés au RNCP à la demande des organismes les ayant créés. Ils le sont actuellement après avis de la CNCP. Il est proposé qu'ils le soient dorénavant après avis conforme de la commission chargée de la certification professionnelle de France compétences , qui récupèrera les attributions de l'actuelle CNCP. En outre, ces diplômes et titres seront enregistrés pour une durée maximale de cinq ans .

Concernant les CQP , ils seront également enregistrés au RNCP à la demande des organismes les ayant créés, après avis conforme de France compétences . Le dispositif reprend ainsi le régime actuel d'enregistrement des CQP qui prévoit l'avis conforme de la CNCP. Leur enregistrement vaudra aussi pour une durée maximale de cinq ans et ils seront classés au RNCP par niveau de qualification.

La commission chargée de la certification professionnelle de France compétences pourra identifier des métiers et des compétences comme étant particulièrement en évolution afin que les certifications professionnelles correspondantes fassent l'objet d'une procédure d'enregistrement simplifiée .

Concernant l'enregistrement à l'inventaire spécifique , l'article L. 335-6 du code de l'éducation dispose actuellement que les certifications et habilitations correspondant à des compétences transversales peuvent y être recensées par la CNCP. Le présent article prévoit que les certifications et habilitations correspondant à des compétences complémentaires pourront être enregistrées dans un répertoire spécifique à la demande des organismes ayant créé ces certifications. Ils le seront pour une durée maximale de cinq ans après avis conforme de France compétences . Ces certifications pourront en outre faire l'objet de correspondances avec des blocs de compétences de certifications enregistrées au RNCP.

La commission chargée de la certification professionnelle de France Compétences pourra retirer certaines certifications des répertoires, si les organismes les ayant créés ne répondent pas à la demande de France compétences de mettre en place des correspondances avec des certifications équivalentes et des blocs de compétences.

Les personnes appartenant aux promotions prises en compte par la procédure d'enregistrement 134 ( * ) et à la promotion en cours pendant cette procédure et ayant obtenu la certification pourront toujours se prévaloir de l'inscription de celle-ci au RNCP . En outre, les personnes dont la candidature a été déclarée recevable à une validation des acquis de l'expérience et celles suivant une formation visant à acquérir une certification en cours de validité au moment de leur entrée en formation pourront également se prévaloir après obtention de la certification de son enregistrement au RNCP.

Enfin, les organismes certificateurs devront communiquer à la Caisse des dépôts et consignations, gestionnaire du système d'information du CPF, les informations concernant les titulaires des certifications délivrées. France compétences pourra également contrôler l'honorabilité des organismes certificateurs . Les modalités d'application de ces dispositions devront faire l'objet d'un décret en Conseil d'État.

D. Entrée en vigueur échelonnée dans le temps

Les III à V du présent article prévoient une période transitoire pour l'enregistrement des certifications dans les répertoires.

Dispositions transitoires pour l'enregistrement
dans les répertoires de certifications professionnelles

Échéance

Dispositions transitoires

1 er mars 2019

Les CQP enregistrés jusqu'à cette date au RNCP ne seront pas classés par niveau de qualification et ce jusqu'à l'échéance de leur enregistrement.

28 février 2021

Les certifications et habilitations recensées à l'inventaire spécifique sont automatiquement enregistrées au nouveau répertoire spécifique jusqu'à cette date. Elles seront enregistrées pour une durée de deux ans si aucune durée spécifique n'a été décidée lors de leur enregistrement initial.

1 er mars 2024

Les diplômes et titres à finalité professionnelle délivrés au nom de l'État, enregistrés au RNCP au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, demeureront enregistrés au RNCP jusqu'à cette date au plus tard.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

II - Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre treize amendements rédactionnels de la rapporteure, la commission des affaires sociales a adopté trois autres amendements.

Deux amendements adoptés en commission, présentés Laëtitia Romeiro Dias, députée (groupe La République en marche) visent à préciser les règles encadrant les certificats de qualification professionnelle (CQP) . D'une part, les branches professionnelles créant un CQP pourront confier l'organisation du cursus de la formation à un ou plusieurs organismes de formation habilités au terme d'une procédure de mise en concurrence. D'autre part, les organisations représentatives siégeant au sein de la commission paritaire nationale (CPNE) représentative de la branche qui créé un CQP seront propriétaires de ce certificat et des référentiels y afférant. Ils pourront par conséquent agir en justice pour assurer la protection de ce CQP.

Un amendement de la rapporteure adopté en commission modifie les dates de la période transitoire afin de fixer la date du 1 er janvier à chaque étape du régime transitoire. La période transitoire sera donc organisée selon les dates mentionnées dans le tableau ci-après.

Dispositions transitoires pour l'enregistrement
aux répertoires de certifications professionnelles

Échéance

Dispositions transitoires

1 er janvier 2019

Les CQP enregistrés jusqu'à cette date au RNCP ne seront pas classés par niveau de qualification et ce jusqu'à l'échéance de leur enregistrement.

1 er janvier 2021

Les certifications et habilitations recensées à l'Inventaire spécifique sont automatiquement enregistrées au nouveau Répertoire spécifique jusqu'à cette date. Elles seront enregistrées pour une durée de deux ans si aucune durée spécifique n'a été décidée lors de leur enregistrement initial.

1 er janvier 2024

Les diplômes et titres à finalité professionnelle délivrés au nom de l'État, enregistrés au RNCP au jour de l'entrée en vigueur de la présente loi, demeureront enregistrés au RNCP jusqu'à cette date au plus tard.

Source : Commission des affaires sociales du Sénat

En séance publique, quatre amendements ont été adoptés, dont un amendement de précision rédactionnelle de Patrick Hetzel, député, et plusieurs de ses collègues du groupe Les Républicains.

Un amendement de Sylvie Charrière, députée (groupe La République en marche), adopté en séance publique vise à préciser que les projets de création, de révision ou de suppression des diplômes de l'enseignement supérieur à finalité professionnelle font l'objet d'une concertation spécifique avec les organisations des salariés et des employeurs représentatives au niveau national, interprofessionnel et, le cas échéant, multiprofessionnel. Un texte réglementaire précisera les modalités de cette concertation.

Les règles relatives aux CQP ont été modifiées par deux amendements de Sylvain Maillard, député, et plusieurs de ses collèges du groupe La République en Marche. La possibilité offerte aux CPNE de confier l'organisation du cursus de la formation à des organismes de formation est supprimée. S'agissant de la propriété de la certification, les CPNE détermineront au moment de la création de la certification la personne morale détentrice des droits de propriété de la certification. Les CPNE pourront réattribuer ces droits à tout moment.

III - La position de votre commission

Vos rapporteurs considèrent qu'une co-construction du contenu des diplômes et des titres à finalité professionnelle en association avec les branches professionnelles est de nature à adapter le contenu de ces certifications au besoin du marché du travail, tout en maintenant une régulation de la certification professionnelle par une commission ad hoc au sein de France compétences.

A l'initiative de vos rapporteurs, votre commission a souhaité préciser que les référentiels qui définiront le contenu des certifications professionnelles devront tenir compte des besoins spécifiques des personnes en situation de handicap. C'est pourquoi elle a adopté l'amendement COM-409 .

Afin de renforcer l'efficacité du système de certification, votre commission a adopté un amendement COM-198 de notre collègue Catherine Dumas (groupe les Républicains). Ainsi, les commissions professionnelles consultatives ministérielles seront tenues de rendre leurs avis sur les diplômes et les titres à finalité professionnelle dans un délai maximal de six mois.

Enfin, votre commission a adopté un amendement COM-402 de vos rapporteurs précisant que la possibilité d'enregistrement simplifié que France compétences pourra accorder aux métiers en évolution s'appliquera également aux métiers et compétences identifiés comme étant « en émergence ». Selon vos rapporteurs, cette modification contribuera à renforcer la réactivité du système de certification des diplômes et des titres face aux nouvelles compétences attendues sur le marché du travail.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 14 bis (art. L. 112-2 du code de l'éducation) - Attestation de compétences professionnelles pour les personnes en situation de handicap

Objet : Cet article, qui résulte d'un amendement de Gisèle Biémouret, députée (groupe Nouvelle gauche), adopté en commission, ouvre la possibilité aux personnes en situation de handicap poursuivant une formation technologique ou professionnelle de recevoir une attestation de compétences professionnelles si elles n'ont pas la possibilité d'obtenir le diplôme ou le titre délivré par l'État.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 112-2 du code de l'éducation fixe les obligations incombant au service public de l'éducation pour assurer une formation scolaire, professionnelle ou supérieure aux enfants, aux adolescents et aux adultes présentant un handicap ou un trouble de la santé invalidant.

Le présent article modifie cet article du code de l'éducation afin que les personnes précitées poursuivant une formation professionnelle ou technologique reçoivent une attestation de compétences professionnelles . Cette attestation leur sera délivrée par le chef de l'établissement si ces personnes, en raison de leur situation de handicap, n'ont pas la possibilité d'obtenir le diplôme ou le titre délivré par l'État auquel leur formation les prépare. Le chef d'établissement devra prendre en compte les avis des équipes pédagogiques et des éventuels employeurs qui auraient contribué à la formation de l'intéressé. Un décret fixera les modalités d'application du dispositif.

La délivrance d'une telle attestation est aujourd'hui prévue par une circulaire du 30 novembre 2016 relative à la formation et l'insertion professionnelle des élèves en situation de handicap. Elle prévoit que le recteur d'académie peut délivrer cette attestation de compétences professionnelles pour  les élèves en situation de handicap des établissements publics ou privés sous contrat. Il est donc proposé d'inscrire cette attestation dans la loi et de confier sa délivrance aux chefs d'établissements .

Des attestations similaires sont prévues par la loi dans d'autres cas, afin de faire état des compétences acquises au cours d'une formation. C'est notamment le cas pour les Écoles de la deuxième chance qui, aux termes de l'article L. 214-14 du code de l'éducation, « délivrent une attestation de fin de formation indiquant le niveau de compétence acquis de manière à faciliter l'accès à l'emploi ou à une certification inscrite au répertoire national des certifications professionnelles ».

Enfin, un amendement rédactionnel de la rapporteure a été adopté en séance publique à l'Assemblée nationale.

II - La position de votre commission

Vos rapporteurs considèrent que le présent article a introduit utilement le principe d'une reconnaissance des compétences et des connaissances acquises en formation par une personne handicapée qui n'aurait pas pu valider le diplôme visé. Toutefois, le dispositif proposé ne présente pas une valeur probante suffisante vis-à-vis des futurs employeurs de nature à améliorer réellement le parcours professionnel de la personne handicapée.

C'est pourquoi votre commission a adopté l'amendement COM-410 de vos rapporteurs qui remplace cette attestation de compétences par la délivrance de blocs de compétences qui pourront être validés par les personnes en situation de handicap, à défaut de pouvoir obtenir le diplôme ou le titre visé.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 14 ter (art. L. 711-1 du code de l'éducation) - Formations de courte durée ou non diplômantes dans les établissements publics d'enseignement supérieur

Objet : Cet article, qui résulte d'un amendement de Sylvain Maillard, député, et de ses collègues du groupe La République en Marche, adopté en commission, ouvre la possibilité aux établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche de créer des filiales pour réaliser des formations de courte durée ou non diplômantes.

I - Le dispositif proposé

L'article L. 711-1 du code de l'éducation fixe les principes de création et d'autonomie des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche. Il prévoit notamment que pour faire connaitre leurs réalisations et pour contribuer à la gestion et à la valorisation de leur patrimoine immobilier, ces établissements peuvent créer des services d'activités industrielles et commerciales, prendre des participations, participer à des groupements et créer des filiales.

Le présent article prévoit que les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche pourront, par ces mêmes moyens, assurer des formations de courte durée ou des formations ne débouchant pas sur la délivrance d'un diplôme conférant un grade. Il modifie à cette fin l'article L. 711-1 du code de l'éducation . En effet selon l'auteur de l'amendement, le droit en vigueur « n'autorise la filialisation dans ces établissements qu'aux seules activités relevant de la valorisation de la recherche » et cette modification « encouragera l'offre de formation continue par les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche ».

II - La position de votre commission

La possibilité offerte aux établissements d'enseignement supérieur, aux termes de l'article 11 bis , de créer des filiales de droit privé pour développer leur offre de formation continue leur permettra de dispenser dans ce cadre des formations de courte durée ou non diplômantes. Par conséquent, les dispositions du présent article sont satisfaites. C'est pourquoi votre commission a adopté les amendements identiques COM-45 présenté par notre collègue Laurent Lafon au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et COM-250 de notre collègue Jacques-Bernard Magner (groupe socialiste et républicain) visant à supprimer cet article.

Votre commission a supprimé cet article.


* 132 Les missions et le statut de France compétences sont détaillés au commentaire de l'article 16.

* 133 Concernant les règles de gestion du CPF, voir le commentaire de l'article 1 er .

* 134 La CNCP exige actuellement une antériorité d'au moins trois promotions de personnes formées pour qu'un titre puisse être enregistré au RNCP ou à l'inventaire spécifique.

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