CONCLUSION

Après un examen attentif de ses stipulations, la commission a adopté ce projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Autorité européenne des marchés financiers relatif au siège de l'Autorité et à ses privilèges et immunités sur le territoire français .

Cet accord de siège, dont les stipulations sont comparables à celles contenues dans les accords de même nature récemment conclus par la France, permettra d'assurer le bon fonctionnement de l'Autorité sur le sol français ainsi que son indépendance.

Bien que les principales dispositions de l'accord soient déjà entrées en vigueur en application du règlement européen n° 1095/2010 et du protocole n° 7 sur les privilèges et immunités de l'Union européenne, leur adoption par le Parlement français revêt un intérêt majeur pour notre pays, à l'heure où notre capitale s'apprête à accueillir le siège de l'Autorité bancaire européenne : celui d' afficher tant notre volonté que notre capacité d'accueillir des institutions internationales sur notre territoire , en leur offrant les meilleures conditions possibles.

L'Autorité européenne des marchés financiers n'a pas encore notifié l'achèvement de ses procédures internes requises pour l'entrée en vigueur du présent accord. Pour ce qui concerne la partie française, l'adoption du texte par le Sénat constituerait la première étape du processus de ratification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 31 octobre 2018, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Jacques Le Nay sur le projet de loi n° 611 (2017-2018) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Autorité européenne des marchés financiers relatif au siège de l'Autorité et à ses privilèges et immunités sur le territoire français.

Après l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé.

M. Richard Yung . - C'est un grand pas pour la place financière de Paris qui souhaite devenir une alternative crédible à la City. Des milliers d'emploi devraient relocalisés à Paris après le Brexit, ce qui est une bonne nouvelle. En outre, la relocalisation de l'Autorité bancaire européenne est un pied-de-nez fait aux Britanniques qui ont toujours fait montre d'un grand mépris à l'égard de cette Autorité et de l'Autorité européenne des marchés financiers.

M. Robert del Picchia. - Je trouve également qu'accueillir une telle institution est une très bonne chose, notamment pour nos finances publiques. J'espère que d'autres organisations installeront leur siège à Paris. Tous les membres du personnel des organisations internationales sont exonérés d'impôt sur le revenu en France. Toutefois, dans ce cas précis, ce sont des fonctionnaires de l'Union européenne ; versent-ils un impôt à l'Union ?

M. Pierre Laurent. - Je n'ai pas de remarque sur les stipulations de l'accord de siège en tant que telles. Néanmoins, le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste s'abstiendra en raison d'un désaccord de fond sur le rôle et la place des institutions financières au sein de l'Union européenne. Nous considérons en effet que le statut de ces Autorités - qu'il s'agisse de la Banque centrale européenne ou de l'Autorité européenne des marchés financiers - est au coeur de la crise que traverse l'Union. Certains de nos collègues considèrent que l'installation de ces Autorités en France constitue une bonne nouvelle, mais nous ne partageons pas leur enthousiasme. Il y aurait beaucoup à dire sur la situation financière de l'Union européenne, ainsi que sur le rôle des marchés financiers dans la crise qu'elle traverse actuellement. Notre abstention sera donc une marque de défiance à l'égard de l'architecture européenne dans ce domaine.

M. Ladislas Poniatowski. - L'accueil de l'Autorité bancaire européenne à Paris est une très belle opération pour notre pays. Cette Autorité s'installera dans le quartier d'affaires de La Défense, ce qui ne réjouit pas son personnel qui aurait préféré rester à Londres, le siège étant situé au coeur de la City. La France avait proposé deux sites : le premier au centre de Paris, près du palais Brongniart, et le second à La Défense. Le personnel de l'Autorité, même s'il n'a pas été consulté, a fait part de sa nette préférence pour le premier site. Mais la Commission a choisi le second pour des raisons financières...

La France n'est pas assez ambitieuse s'agissant des ouvertures d'écoles internationales destinées à accompagner l'arrivée, après le Brexit, de l'Autorité bancaire européenne et de sociétés du monde de la finance. Si nous voulons que la place financière parisienne reste une place importante et attire une part de l'activité londonienne, nous devons faire plus. L'ouverture d'une école à Courbevoie est une très bonne chose, mais il faut plus de lycées internationaux, notamment en Île-de-France. Il faut garder à l'esprit que le personnel de l'Autorité bancaire européenne ne déménage pas à Paris avec enthousiasme !

Mme Gisèle Jourda. - Bien que je partage, en partie, l'opinion positive de certains de mes collègues, je m'interroge quant au statut du personnel de l'Autorité européenne des marchés financiers, en particulier sur le plan indemnitaire. Ce sont des fonctionnaires et non des diplomates ; par conséquent, je ne m'explique pas ce statut, qui peut paraître très privilégié, alors que nous serions en droit d'attendre plus de résultats de ces Autorités. En effet, à la suite des récents scandales financiers - comme celui des « Panama Papers » -, nous aurions souhaité plus de rigueur de leur part ainsi qu'un véritable retour sur investissement. Il conviendrait donc de revoir ce statut.

M. Jacques Le Nay, rapporteur. - Selon la Banque d'Angleterre, 10 000 emplois dans les services financiers seront délocalisés après le Brexit. Paris Europlace , organisme en charge de la promotion et du développement de la place financière parisienne, estime à près de 3 500 le nombre d'emplois directs qui seront relocalisés dans la capitale.

S'agissant des fonctionnaires de l'Union européenne, il n'est pas du ressort de l'État français de revoir leur statut. Ces fonctionnaires ne paient certes pas d'impôt national, mais ils sont soumis à l'impôt européen, prélevé à la source tout comme leurs cotisations salariales.

Il est toujours déplaisant de devoir quitter son pays pour aller travailler ailleurs. L'État français a donc prévu d'ouvrir des écoles internationales pour accueillir les « enfants du Brexit » : outre l'école de Courbevoie citée par notre collègue Ladislas Poniatowski, deux autres lycées internationaux ouvriront d'ici la rentrée 2022 en Île-de-France, à Saclay et à Vincennes, ce qui portera à neuf le nombre de lycées internationaux situés dans la région. Notre pays a donc pris en considération cet aspect ; il est en effet important pour les fonctionnaires et les salariés qui s'établiront en France de disposer d'écoles prêtes à accueillir leurs enfants.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté le rapport et le projet de loi précité, les sénateurs du groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE) s'abstenant.

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