Rapport n° 224 (2018-2019) de M. Rachel MAZUIR , fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, déposé le 19 décembre 2018

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N° 224

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 décembre 2018

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des ministres de la République d' Albanie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et de l' accord de coopération en matière de défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre ,

Par M. Rachel MAZUIR,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Christian Cambon , président ; MM. Pascal Allizard, Bernard Cazeau, Robert del Picchia, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Noël Guérini, Joël Guerriau, Pierre Laurent, Cédric Perrin, Gilbert Roger, Jean-Marc Todeschini , vice-présidents ; M. Olivier Cigolotti, Mme Joëlle Garriaud-Maylam, M. Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont , secrétaires ; MM. Jean-Marie Bockel, Gilbert Bouchet, Michel Boutant, Olivier Cadic, Alain Cazabonne, Pierre Charon, Mme Hélène Conway-Mouret, MM. Édouard Courtial, René Danesi, Gilbert-Luc Devinaz, Jean-Paul Émorine, Bernard Fournier, Jean-Pierre Grand, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, MM. Jean-Louis Lagourgue, Robert Laufoaulu, Ronan Le Gleut, Jacques Le Nay, Rachel Mazuir, François Patriat, Gérard Poadja, Ladislas Poniatowski, Mmes Christine Prunaud, Isabelle Raimond-Pavero, MM. Stéphane Ravier, Hugues Saury, Bruno Sido, Rachid Temal, Raymond Vall, André Vallini, Yannick Vaugrenard, Jean-Pierre Vial, Richard Yung .

Voir les numéros :

Sénat :

130 et 225 (2018-2019)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi du projet de loi n° 130 (2018-2019) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des ministres de la République d'Albanie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et de l'accord de coopération en matière de défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre.

Ces deux accords, qui ont pour objet de renforcer la coopération bilatérale en matière de défense avec chacun de ces deux pays - la coopération prévue par l'accord avec Chypre est plus étendue que celle mentionnée dans l'accord franco-albanais -, sont des accords, au contenu normalisé, qui s'inscrivent dans des contextes différents.

L'accord intergouvernemental, signé avec l'Albanie, le 28 mars 2017, trouve son origine dans l'actualisation et la rénovation du cadre juridique de la coopération dans le domaine de la défense avec les Etats d'Europe centrale et orientale. Des accords de ce type ont déjà été signés avec la Slovaquie, la Serbie et la Croatie, respectivement en 2009, 2011 et 2013. Cet instrument est appelé à se substituer à un précédent arrangement technique du 13 mai 1996, dont la portée juridique est limitée par nature et dont certaines stipulations sont devenues obsolètes depuis l'adhésion de l'Albanie, en 2009, à l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN). En outre, l'Albanie s'est vu reconnaître le statut officiel de pays candidat à l'adhésion à l'Union européenne (UE) en 2014. Dans ce contexte, la France a proposé à l'Albanie de négocier un nouvel accord avec l'objectif d'accroître le niveau de la coopération et d'accorder un statut protecteur réciproque aux personnels en mission sur le territoire de l'autre Etat par un large renvoi à la convention entre les Etats parties au traité de l'Atlantique Nord sur le statut des forces signée à Londres le 19 juin 1951, dit « SOFA » 1 ( * ) OTAN.

L'accord intergouvernemental signé avec Chypre, le 4 avril 2017, est destiné à abroger et remplacer un précédent accord de coopération en matière de défense, signé à Paris, le 28 février 2007, et entré en vigueur le 1 er novembre 2010. Il a été conclu à la demande de Chypre, qui souhaitait, d'une part, étendre les champs de la coopération bilatérale de défense à l'échange d'expériences et de connaissances dans les domaines de la sécurité énergétique, de la sûreté maritime, de l'alerte précoce, de l'évacuation des ressortissants et de la gestion des crises, ainsi que, d'autre part, développer des facilités et du soutien logistiques aux forces armées. Cet instrument, qui tient compte des intérêts communs et des activités dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) - Chypre est membre de l'Union européenne depuis 2004 -, ainsi que de l'évolution des technologies, accorde également un statut réciproque aux personnels d'un Etat déployé sur le territoire de l'autre, en renvoyant largement au SOFA UE 2 ( * ) , signé, le 17 novembre 2013, à Bruxelles.

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a adopté ce projet de loi, dont le Sénat est saisi en premier . Sur le plan géopolitique, la ratification de ces deux accords permettra de développer des coopérations utiles à un moment où la stabilité des Balkans est un sujet de préoccupation et où le point d'appui stratégique que représente Chypre pour conduire des opérations dans la région apparaît de plus en plus utile, notamment en vue d'évacuer des ressortissants. Il n'est pas exclu que ces coopérations en matière de défense favorisent également les exportations françaises d'armement.

PREMIÈRE PARTIE : LE RENFORCEMENT DE LA COOPÉRATION BILATÉRALE DE DÉFENSE AVEC L'ALBANIE ET AVEC CHYPRE

I. L'ACCORD BILATÉRAL DE DÉFENSE AVEC L'ALBANIE

A. L'ALBANIE, UN DES PAYS LES PLUS PAUVRES DES BALKANS OCCIDENTAUX

1. Un pays encore pauvre mais stable, dont l'économie renoue avec la croissance

Bordée par la mer Adriatique, l'Albanie est un petit pays de 28 750 km 2 , qui a des frontières communes avec la Grèce, la Macédoine (ARYM), le Kosovo et le Monténégro. L'Albanie compte 2,9 millions d'habitants dont la majorité vit dans les six grandes villes du pays : Tirana, Durrës, Shkodra, Elbasan, Vlora et Korça. On estime que plus d'un million d'Albanais serait installé à l'étranger, ce qui s'explique par la jeunesse de la population - 40 % ont moins de 25 ans - et par les différentiels de salaire dans les pays voisins.

Parti d'un état de délabrement important à la fin de la dictature communiste, l'Albanie a entamé sa transition politique au début des années 1990. Sa situation politique est désormais stable en raison de la prépondérance sur l'échiquier politique du principal parti au pouvoir, le parti socialiste albanais. Son chef, Edi Rama, est devenu Premier ministre en 2013 et a été reconduit dans ses fonctions en 2017.

L'Albanie compte parmi les pays les plus pauvres d'Europe avec un PIB de 11,6 Mds d'euros en 2017, soit 4 000 euros par habitant. La dette publique dépasse 70 % du PIB depuis 2013, mais suite à l'aide financière accordée par le Fonds monétaire international (FMI) sur la période 2014-2017, le Gouvernement s'est engagé dans un programme de réduction du déficit et de baisse de la dette publique. En outre des réformes structurelles importantes ont été menées dans le secteur de l'électricité, des retraites et des collectivités territoriales.

L'économie albanaise est une des plus dynamiques de la région. Depuis 2015, la croissance est positive - +3,9 % en 2017 - en dépit d'un déficit commercial élevé (24 % du PIB) et d'un fort taux de chômage (14 %). L'économie albanaise est dominée par le secteur des services (tourisme) et par le secteur agricole qui contribuent à la valeur ajoutée brute respectivement à hauteur de 56 % et de 18,20 %. Les transferts d'argent de la diaspora albanaise représentent plus de 7 % du PIB.

L'Albanie, comme les autres pays des Balkans occidentaux, reste confrontée aux problèmes posés par les activités des réseaux criminels - notamment des réseaux de traite et d'exploitation des migrants - même si les dispositifs institutionnels ont été renforcés et les cadres légaux consolidés avec l'adoption des principales lois dans le domaine sécuritaire. La coopération policière internationale s'est intensifiée, des avancées ont été enregistrées, notamment en matière de lutte contre la culture de cannabis - l'Albanie a procédé à plusieurs opérations répressives qui ont conduit à la destruction de vastes cultures de cannabis - et en matière de lutte contre le trafic d'êtres humains.

Dans la région, la montée en puissance d'une menace terroriste issue d'un islam radical inquiète également, tout comme la question complexe des retours des combattants étrangers de la zone irako-syrienne. Pour lutter contre le terrorisme, les échanges de renseignements avec les services de la région se sont accentués et des actions de coopération se sont développées.

2. Un pays dont les relations de bon voisinage s'améliorent

Selon les informations transmises par le ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 3 ( * ) , l'Albanie est engagée dans l'amélioration des relations de bon voisinage avec l'ensemble des pays de la région. Malgré une divergence de fond sur le statut du Kosovo et la prégnance d'irritants récurrents entre les deux pays, l'Albanie et la Serbie ont amélioré leurs relations de manière sensible depuis quelques années : le Premier ministre albanais s'est ainsi rendu à Belgrade en novembre 2014 (première visite bilatérale de ce niveau depuis près de 70 ans) et en octobre 2016 tandis que le Premier ministre serbe a effectué une visite retour, en Albanie, elle aussi historique, en mai 2015. Les relations avec la Grèce connaissent une amélioration notable depuis novembre 2017 avec des pourparlers qualifiés d'« historiques » entre les ministres des affaires étrangères des deux pays pour le règlement des différends bilatéraux.

La présence de populations albanophones importantes dans les régions limitrophes des pays voisins - en Serbie, au Kosovo, au Monténégro et en Ancienne République yougoslave de Macédoine - influe de façon notable sur la politique étrangère de l'Albanie.

L'Albanie entretient des relations de défense avec la plupart des partenaires occidentaux. Selon le MEAE 4 ( * ) , le partenariat avec les États-Unis est fort, sans avoir le caractère quasi exclusif qu'on lui connaît dans d'autres Etats de la région. L'implantation historique de la Russie et de la Chine ne trouve pas en revanche de traduction en matière de coopération de défense.

Dans le souci de contribuer à la stabilisation durable des Balkans occidentaux, l'Albanie prend part à l'ensemble des initiatives de coopération régionale. En matière de défense, elle participe notamment à la Charte Adriatique, au South Eastern Defence Ministerial ou à l'initiative adriatique-ionienne (ADRION).

3. Un pays, membre de l'OTAN depuis 2009

Ce pays est devenu membre de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) en 2009, au terme d'un processus entamé dix ans plus tôt. Pendant cette décennie, l'Albanie n'a cessé de manifester sa volonté d'adhérer à l'OTAN, en dépit d'importantes difficultés internes - crime organisé, corruption, crise économique.

Aujourd'hui, l'Albanie se présente comme un allié aux faibles ressources budgétaires et capacitaires, qui peine à satisfaire les engagements pris dans le cadre de l'OTAN.

Selon les informations transmises par le MEAE5 ( * ), l'Albanie consacre environ 1,1 % de son PIB à son budget de la défense, dont 7 % sont dédiés à la recherche et au développement ainsi qu'aux équipements majeurs.

L'OTAN a fixé, à l'Albanie, deux priorités de développement capacitaire à l'horizon 2023 : celui d'un bataillon d'infanterie légère et celui de systèmes d'information et de communication statiques, déployables et dotés de capacités de cyberdéfense.

Lors de la dernière revue capacitaire de 2018, l'OTAN s'est montrée assez déçue des efforts albanais d'un point de vue budgétaire. L'Alliance a conseillé à l'Albanie de rééquilibrer ses dépenses de défense en faveur des équipements majeurs, représentant 7 % de son budget de défense, au détriment de la masse salariale (70%). En 2020, le budget de défense de l'Albanie ne devrait plus représenter que 0,96 % du PIB. L'Albanie s'est toutefois publiquement engagée à honorer le critère des 2 % adopté par les Alliés en 2014 dans le cadre du Defence Investment Pledge. La question de la crédibilité des efforts budgétaires et de planification de l'Albanie se pose.

Par ailleurs, l'état des équipements albanais, vieillissant et mal entretenu, apparaît préoccupant. La majeure partie des matériels d'origine soviétique et chinoise sont obsolètes et non-interopérables. L'OTAN soupçonne l'Albanie d'annoncer la mise en place prochaine de programmes ambitieux devant répondre aux priorités capacitaires assignées par l'OTAN, sans prévoir de plans de financement.

En revanche, s'agissant des engagements opérationnels de l'Albanie, sa participation aux opérations de l'OTAN est plutôt bien perçue, eu égard à la taille de ses forces armées (voir infra ).

Le MEAE 6 ( * ) a fait savoir à votre rapporteur que l'Albanie engage actuellement des moyens dans plusieurs missions et opérations en mer Méditerranée - déploiement d'un patrouilleur sous financement national en marge de l'opération Sea Guardian -, en Afghanistan - opération Resolute Support sous commandement turc et italien -, en Lettonie, dans le cadre du dispositif de présence avancée renforcée (eFP) ou encore au Kosovo au sein de la Force pour le Kosovo (KFOR).

En outre, aux termes des engagements pris lors du sommet de l'OTAN de juillet 2018, l'Albanie devrait également déployer une vingtaine de personnels au sein de la mission de formation de l'OTAN en Irak ( NATO Training and Capacity Building Activity in Iraq - NTCB-I).

Pour mémoire, l'Albanie a déployé une centaine de soldats dans les opérations de l'Alliance en 2017.

4. Un pays candidat à l'adhésion à l'Union européenne depuis 2014

Comme les autres pays des Balkans occidentaux, l'Albanie s'est vue reconnaître une « perspective européenne » lors des Sommets de Zagreb en 2000 et de Thessalonique en 2003. Elle a conclu un accord de stabilisation et d'association (ASA) avec l'Union européenne (UE) en 2006, qui est entré en vigueur le 1 er avril 2009.

Après avoir déposé une demande d'adhésion en 2009, l'Albanie a obtenu le statut officiel de pays candidat en 2014 et bénéficie, à ce titre, des fonds de l'Instrument d'aide de préadhésion (IPA), à hauteur de 650 M€ pour la période 2014-2020.

Si le Conseil de l'UE a conditionné l'ouverture des négociations d'adhésion à des progrès substantiels dans cinq « priorités-clés » : la réforme de la justice, la lutte contre la corruption, la lutte contre le crime organisé, la réforme de l'administration publique et les droits fondamentaux, la Commission a, depuis, - « Paquet élargissement » du 17 avril 2018 - recommandé l'ouverture non conditionnée des négociations d'adhésion.

En outre, les conclusions adoptées par le Conseil (Affaires générales) du 26 juin dernier envisagent la possibilité d'une décision d'ouverture des négociations d'adhésion en juin 2019, sur la base d'un rapport annuel de la Commission européenne et, sous réserve des progrès attendus, notamment sur la réforme de la justice et la lutte contre la corruption.

En outre, les autorités albanaises manifestent un certain intérêt pour la politique de sécurité et de défense commune (PSDC), comme le montre le déploiement de contingents symboliques dans le cadre des missions EUFOR Althea en Bosnie-Herzégovine et de la mission de formation de l'UE au Mali (EUTM Mali) aux côtés de forces françaises.

B. LA RELATION BILATÉRALE DE DÉFENSE

1. L'état de la coopération actuelle

En matière de coopération structurelle, le MEAE 7 ( * ) a indiqué à votre rapporteur que la formation d'officiers albanais a longtemps constitué la principale orientation, avec l'accueil d'officiers albanais à l'École de guerre, entre 1995 et 2015. Durant cette période, plusieurs médecins militaires ont également été formés dans le cadre d'une coopération avec la direction centrale du service de santé des armées.

En 2017, la coopération structurelle de défense et de sécurité financée par la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du MEAE représentait environ 5 000 € et se limitait à l'enseignement du français au profit de personnels du ministère albanais de la défense (financement de cours assurés par l'Alliance française).

Des contacts avec différents services du ministère des armées (ancienne direction aux affaires stratégiques (DAS), direction générale de l'armement (DGA)) se sont aussi traduits par une mission de conseil en vue de la création d'une cellule politico-stratégique au sein de la direction politique du ministère albanais de la défense, ainsi que par la mise en place de procédures d'acquisition inspirées de celles en vigueur à la Direction général de l'armement (DGA).

Une coopération s'est également établie dans le domaine de l'aéromobilité. Elle a permis la formation du personnel technique et naviguant pour opérer de manière autonome la flotte d'hélicoptères. Un officier coopérant a aussi été mis en place auprès de l'armée de l'air albanaise de 2011 à 2014, sur la base d'un financement de la DCSD du MEAE, puis de celui d'AIRBUS Helicopters pour une année supplémentaire, dans le cadre de l'accompagnement du contrat d'acquisition d'hélicoptères COUGAR signé en 2009. Une nouvelle mission a été organisée en 2018 pour maintenir la capacité du ministère de la défense albanais à opérer en sécurité, en maintenant ses hélicoptères sur le long terme.

Dans le domaine maritime, l'Albanie bénéficie, depuis fin 2016, d'au moins une escale annuelle, qui est mise à profit pour développer les compétences des plongeurs-démineurs locaux.

Sur le plan opérationnel, la France a su convaincre l'Albanie de participer à l'opération EUFOR Tchad-RCA, à l'été 2008, et d'embarquer deux officiers de marine sur une frégate française en 2011 dans le cadre de la mission EUNAVFOR Atalanta.

Une coopération mémorielle s'est également établie, depuis la fin de l'année 2016, dans le cadre des commémorations du centenaire du début de l'engagement militaire français dans le sud de l'Albanie durant la Première guerre mondiale. Le 11 novembre dernier, le centenaire de l'armistice a ainsi été célébré dans l'important cimetière militaire français de la ville de Korça.

En matière de rencontres enfin, la dernière réunion d'état-major franco-albanaise a eu lieu à Tirana, le 16 octobre 2012. Une rencontre stratégique de haut niveau, organisée le 12 novembre 2018, à Tirana a confirmé la volonté de la France et de l'Albanie de développer la coopération bilatérale de défense.

Le MEAE 8 ( * ) a indiqué à votre rapporteur, qu'en dépit d'un faible volume d'activités de coopération, la bonne interactivité avec l'Albanie méritait d'être soulignée, ce partenaire répondant à toutes les sollicitations françaises pour développer utilement la coopération bilatérale. L'Albanie est un Etat, francophile et francophone, qui manifeste une forte volonté de coopérer avec la France dans des domaines d'intérêt partagé tels que l'aéromobilité, la lutte contre le terrorisme, les questions relatives aux espaces maritimes ou la valorisation de la mémoire commune.

L'ouverture d'une mission de défense en résidence à Tirana, à l'été 2019, devrait logiquement amener à accroître le niveau et l'intensité de la relation de défense. On rappelle que, dans un contexte de restrictions budgétaires, la mission de défense résidente avait été fermée en 2008.

2. Les forces et le budget de la défense albanais

Armée professionnelle depuis 2010, l'armée albanaise a poursuivi sa réforme jusqu'en 2015 et doit consentir un effort substantiel pour poursuivre sa mise à niveau.

Le personnel affecté aux missions de défense en Albanie s'élève aujourd'hui à 8500 personnes, dont 6850 militaires et 1650 civils, alors qu'il était de 120 000 personnes dans les années 1990.

La part du personnel militaire affecté à des tâches administratives et des missions de soutien reste encore très importante, de l'ordre de 50 % (4 960 personnes). L'état-major est structuré selon le modèle de l'OTAN et a autorité sur les trois composantes majeures (Terre, Air, Mer) ainsi que sur un commandement du soutien et un commandement de la doctrine et de l'entraînement.

Parmi le personnel militaire, les unités de combat représentent 3540 personnes (2400 pour l'armée de terre, 500 pour l'armée de l'air et 640 pour la marine, voir détails infra) .

L'armée de terre, qui compte moins de 2 400 personnels, est articulée autour de trois bataillons d'infanterie. Compte tenu des objectifs capacitaires assignés dans le cadre de l'OTAN (fourniture d'un bataillon d'infanterie légère avec ses appuis et soutiens), les efforts de modernisation devraient logiquement porter sur cette composante terrestre. Compte tenu des contraintes financières, la modernisation reste toutefois tributaire de l'aide des principaux partenaires. Ainsi, les États-Unis ont fourni des véhicules blindés légers (type Hummer ), tandis que l'Italie a fait don de fusils d'assaut.

L'armée de l'air ne compte qu'un peu plus de 500 personnels. La police du ciel est assurée alternativement par la Grèce et l'Italie en l'absence d'avions. L'armée de l'air est équipée exclusivement d'hélicoptères modernes acquis auprès d'Eurocopter en 2009. Son parc comprend également quatre COUGAR et deux EC145, en plus d'une dizaine d'autres appareils divers. Si les appareils sont en bonne condition, le niveau de compétence des équipages reste insuffisant et a tendance à se dégrader depuis le départ de l'officier coopérant français en 2015. Le principal projet de modernisation a trait à la surveillance aérienne, Tirana ayant déjà fait le choix d'équipements américains ( Lockheed-Martin ).

La marine, qui compte 640 personnels, s'est équipée de quatre patrouilleurs côtiers modernes acquis entre 2008 et 2011 dans le cadre d'un contrat passé avec les chantiers néerlandais Damen, auxquels ont été intégrées, cette année, des tourelles navales télé-opérées NARWHAL du Groupe Nexter, afin notamment de permettre la participation à la mission de l'OTAN « Activité en mer Égée ». S'y ajoutent d'autres unités navales plus petites.

L'expérience opérationnelle acquise au cours de la dernière décennie, la participation régulière à des exercices multinationaux, la formation de cadres à l'étranger et l'existence d'un système de formation autonome permettent aux armées albanaises de développer progressivement leurs compétences et, in fine , leur interopérabilité. La forte politisation du système, la concentration des responsabilités au plus haut niveau de la chaîne hiérarchique et la désorganisation de l'appareil administratif, constituent toujours des freins.

En 2018, le budget de la défense s'établit à 150 millions d'euros, réparti entre les dépenses de personnel (51 M€), de fonctionnement (81 M€) et d'investissement (18 M€). Ce budget est en forte hausse par rapport à celui de 2017 qui s'élevait à 97 M€ en raison du transfert vers le ministère de la défense de deux nouvelles lignes budgétaires (38 M€ pour le soutien social, et 3,5 M€ pour les situations d'urgence). Par conséquent, à périmètre constant, la hausse se situe à 10 %, soit 10 M€.

Si les projections font apparaître une hausse continue, pour atteindre 195  millions d'euros en 2020, il est néanmoins difficile d'estimer la part qui sera dédiée, dans cette enveloppe, à l'équipement des forces pour répondre aux objectifs capacitaires fixés par l'OTAN.

Les priorités de l'Albanie dans le domaine de la défense sont largement orientées par les objectifs capacitaires agréés avec ses alliés de l'OTAN (Voir Supra ).

Depuis 2017, le ministère de la défense est en charge de la protection civile, en coordination étroite avec les préfectures, si bien que les forces armées sont également très sollicitées pour des missions d'assistance aux populations.

La Revue stratégique de défense (RDS), publiée en 2013, fait l'objet actuellement d'une mise à jour pour prendre en compte l'évolution des menaces (notamment terrorisme, combattants étrangers) et une nouvelle RDS devrait être publiée en fin d'année. Le plan de développement à long terme 2016-2025 sera vraisemblablement adapté en conséquence.

Par ailleurs, la coopération de l'Albanie avec ses voisins est dynamique, en matière d'exercices, de formation, de missions de secours aux populations ou d'engagements opérationnels.

C. LA MISE EN PLACE D'UN CADRE JURIDIQUE DE COOPÉRATION PLUS EFFICACE

1. Un accord qui remplacera l'arrangement technique de 1996

La coopération bilatérale dans le domaine de la défense a longtemps reposé sur un arrangement technique du 13 mai 1996 entre les ministères de la défense français et albanais.

Cet arrangement instaure une coopération entre les ministères en charge de la défense des deux Etats et leurs forces armées, principalement dans les domaines suivants :

- les concepts de défense et de sécurité, en particulier en Europe et dans les Balkans ;

- l'organisation et le fonctionnement des forces armées, y compris en matière de gestion des ressources humaines et de formation des personnels civils et militaires, de législations applicables ;

- l'histoire militaire et le sport militaire.

Il prévoit différentes formes de coopération, telles que les visites croisées, l'accueil de stagiaires en formation, des escales de bâtiments de guerre ou d'aéronefs, l'organisation de conférences et de colloques ou encore l'échange d'informations et de documentations.

Cet arrangement instaure également un groupe de travail mixte franco-albanais qui se réunit annuellement pour coordonner et dresser le bilan de la coopération. Il fixe enfin les modalités financières de la coopération.

L'entrée de l'Albanie dans l'OTAN, en 2009, a rendu obsolète cet arrangement, notamment s'agissant des clauses financières.

En 2012, la France a proposé à l'Albanie d'entamer des négociations en vue d'élever le niveau de leur coopération en matière de défense et de conclure un accord intergouvernemental, dont la portée juridique est plus importante qu'un simple arrangement technique. Cette initiative française s'est inscrite à l'époque dans le programme d'actualisation et de rénovation du cadre juridique de la coopération dans le domaine de la défense avec les Etats d'Europe centrale et orientale. Des accords de coopération en matière de défense ont successivement été signés avec la Slovaquie en mai 2009, avec la Serbie en avril 2011 et avec la Croatie en 2013.

En février 2016, la France a transmis un projet d'accord à la partie albanaise, qui a été approuvé en mars 2017, après une série d'échanges par la voie diplomatique.

Cet accord, rédigé de manière réciproque, reprend les stipulations classiques des accords de coopération conclus dans le domaine de la défense précités.

La France et l'Albanie étant tous deux membres de l'OTAN, l'accord renvoie à la convention entre les Etats parties au traité de l'Atlantique Nord sur le statut des forces, dite « SOFA OTAN », signé à Londres le 19 juin 1951, pour le statut des membres du personnel et des personnes à charge, ainsi que notamment pour la prise en charge financière des prestations de santé et pour le règlement des demandes d'indemnité en cas de dommage.

Contrairement à l'arrangement technique de 1996 qui faisait supporter la majorité des coûts inhérents aux activités à la partie d'accueil, l'accord pose désormais le principe, habituellement retenu dans ce type d'accord, selon lequel chaque partie prend à sa charge les frais induits par sa participation aux activités communes. Pour les stages organisés dans des organismes militaires de formation, la partie d'accueil examine, au cas par cas, la possibilité de prise en charge des frais de scolarité pour les membres du personnel de la partie d'origine.

Le présent accord prévoit également le maintien de la résidence fiscale dans l'Etat d'origine, conformément à l'article X du SOFA OTAN et à la convention franco-albanaise en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscale de 2002.

2. Enjeux et perspectives

De façon très concrète, cet accord permet de fixer le statut des membres du personnel français et albanais déployés sur le territoire de l'autre Etat dans le cadre des activités de coopération.

Ce nouvel encadrement juridique devrait permettre d'étendre la coopération et d'intégrer les capacités albanaises, notamment dans le cadre des opérations de l'OTAN.

Sur le plan géopolitique, cet accord permettra de développer des coopérations sur des sujets d'intérêt majeurs pour les deux pays comme la lutte contre le terrorisme et le radicalisme, la stabilisation des Balkans, la sécurisation des espaces maritimes méditerranéens.

L'entrée en vigueur de cet accord accompagnera la réouverture de la mission de défense française en Albanie à l'été 2019, fermée, on le rappelle en 2008, pour des raisons budgétaires. Cette mission sera dotée d'une compétence régionale visant à couvrir l'espace albanophone dans la région. Ce redécoupage, rendu nécessaire par la contraction du réseau de missions de défense dans le sud-est européen, ouvre la voie à une plus grande mutualisation des actions de coopération de la France avec ces quatre Etats qui entretiennent d'excellentes relations mutuelles ainsi qu'avec la France et travaillent déjà conjointement au sein de différentes structures régionales.

Par ailleurs, l'Albanie étant l'un des rares Etats de la région à se fournir encore de façon substantielle auprès de l'industrie française d'armement, des opportunités de contrat pourraient se présenter. Des besoins en équipement ultérieurs en hélicoptères dans le domaine civil (intérieur, santé) dont la gestion relève de la compétence du ministère de la défense ne sont pas non plus à exclure.

II. L'ACCORD BILATÉRAL DE DÉFENSE AVEC CHYPRE

A. CHYPRE, UNE CLÉ D'ACCÈS À LA MÉDITERRANÉE ORIENTALE

1. Chypre, une île divisée, qui est sortie de la récession depuis 2015

L'île de Chypre compte un peu plus d'un million d'habitants sur une superficie d'environ 9 000 km 2 . C'est une ancienne colonie britannique qui a accédé à l'indépendance en 1960, la Grande-Bretagne, la Grèce et la Turquie ayant été désignées « puissances garantes » de ce nouvel Etat bicommunautaire. La République de Chypre est membre du Commonwealth depuis 1961, de l'Union européenne depuis 2004 et se situe dans la zone euro depuis 2008.

L'île est occupée militairement par la Turquie depuis 1974, en réponse à un coup d'Etat organisé par la Grèce des généraux en vue d'un rattachement de l'île - la Turquie est intervenue militairement pour protéger les Chypriotes turcs. Les transferts de population consécutifs à cette intervention ont abouti à une séparation géographique des deux communautés : au Sud, la communauté chypriote grecque au sein de la République de Chypre ; au Nord, la communauté chypriote turque (environ 260 000 habitants sur 37% du territoire), constituant une « République turque de Chypre Nord » autoproclamée en 1983, qui n'est pas reconnue au niveau international, sauf par la Turquie.

L'économie chypriote est entrée en récession en 2009. Confrontée à une crise majeure, elle a bénéficié, début 2013, d'un plan de sauvetage de 10 milliards d'euros alloués par l'Union européenne et le Fonds monétaire international, afin d'éviter notamment la faillite du système bancaire en contrepartie de la restructuration du secteur financier, de l'assainissement des finances publiques et de réformes structurelles. Chypre a renoué avec la croissance en 2015 (+1,7 %), puis en 2016 (+2,8 %), compte tenu notamment du dynamisme du tourisme, de son industrie maritime (10 ème flotte mondiale et 3 ème flotte de l'Union européenne). Les estimations pour 2017 et 2018 sont respectivement de +2,5 % et +2,3 %. Chypre est sortie du programme d'ajustement en mars 2016, les objectifs ayant été largement atteints, même si des progrès sont encore attendus dans le secteur bancaire.

Suite à la découverte d'un important champ gazier off-shore en Egypte, Chypre espère, elle aussi, des découvertes dans sa zone économique exclusive, ce qui lui permettrait de sortir de sa dépendance énergétique quasi-totale.

Chypre conduit, par ailleurs, une politique fiscale pour attirer les capitaux étrangers - faible taux d'imposition sur les sociétés, programme de « passeports dorés » notamment.

2. Chypre et son voisinage : des relations toujours très tendues avec la Turquie

Selon les informations transmises par le MEAE 9 ( * ) et comme indiqué Supra , les relations de Chypre avec la Turquie sont particulièrement tendues. La Turquie ne reconnaît pas la République de Chypre et a mis un veto à son adhésion à plusieurs instances internationales, notamment à l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE), à l'Arrangement de Wassenaar sur le contrôle des exportations d'armes conventionnelles et de biens et technologies à double usage, ainsi qu'au Régime de contrôle de la technologie des missiles ( Missile Technology Export Control Regime - MTCR).

La Turquie conserve le rôle de puissance garante de Chypre, attribué en 1960, et continue son occupation militaire de l'île, depuis 1974, avec l'opération Attila qui compte plus de 30 000 hommes.

De plus, la Turquie interdit l'accès aux ports et aéroports turcs des bateaux et aéronefs chypriotes ou ayant transité par Chypre. Cette situation est contraire au Protocole d'Ankara, signé le 29 juillet 2005, qui visait à étendre l'Union douanière aux dix Etats membres y ayant adhéré en 2005, dont Chypre.

En revanche, Chypre est traditionnellement très proche de la Grèce, à laquelle elle est liée par une « doctrine de défense commune » conclue le 18 mars 1994, qui inclut l'île dans un espace hellénique de défense. La Grèce et Chypre sont également liées par un accord de coopération économique signé le 16 mars 1996.

Chypre entretient également des liens étroits avec la Russie, notamment en raison d'affinités orthodoxes. D'importants capitaux russes sont investis dans l'île, notamment dans l'immobilier, ce qui permet à leurs détenteurs d'obtenir le passeport chypriote et donc européen.

Le MEAE a souligné que Chypre multipliait les partenariats trilatéraux avec la Grèce, dont elle est très proche, et avec les Etats avec lesquels elle a des intérêts communs, à la fois en matière énergétique et face à la Turquie, comme l'Egypte et Israël. Ces partenariats renforcent les accords bilatéraux de Chypre avec ces Etats (accords de coopération économique et scientifique et accord de défense de 2011 avec Israël ; livraisons d'armement aux armées libanaise et jordanienne).

3. « La question chypriote »

Les négociations interchypriotes visant la réunification de l'île prennent la forme de discussions directes entre les dirigeants des deux communautés, chypriote-grecque et chypriote-turque. Leur objectif est la création d'une fédération bizonale et bicommunautaire, avec égalité politique, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies.

L'ONU maintient depuis 1964 une force d'interposition à Chypre, la Force de maintien de la paix des Nations unies à Chypre (FNUCHYP), qui gère la zone tampon appelée « ligne verte » - bande pouvant atteindre jusqu'à 7 kilomètres de large et sur laquelle les activités agricoles sont autorisées - ainsi qu'une mission de bons offices, afin de favoriser des négociations entre les deux communautés. Le mandat de la Force est renouvelé tous les six mois par le Conseil de Sécurité. Des mesures de conciliation ont abouti à l'ouverture de points de passage sur la ligne de démarcation depuis 2003 et à l'accès des Chypriotes turcs aux structures administratives du Sud. Le 24 avril 2004, le Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan a soumis à un double référendum un projet de règlement, dit « Plan Annan », qui a été massivement rejeté par les Chypriotes grecs.

Le Président de la République de centre-droit, Nikos Anastasiades, élu en 2013, puis en 2018, a présenté dès sa première arrivée au pouvoir « un paquet de mesures de confiance ». Après un échange historique de cartes en 2017, les deux conférences multilatérales sur les garanties qui s'en sont suivies ont échoué, conduisant à un gel du processus.

4. Chypre, un pays membre de l'UE depuis 2004

Chypre est pays membre de l'UE depuis 2004. N'étant pas membre de l'OTAN, elle apporte un soutien au sein de différentes instances européennes, et notamment dans le cadre de l'Europe de la défense.

Dans le cadre de la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC), Chypre se montre également très favorable à la coopération structurée permanente et a proposé plusieurs projets en ce sens : coopération pour la protection des infrastructures énergétiques, partage de renseignement maritime, mise en réseau d'infrastructures de défense dans la périphérie de l'UE, création d'un centre d'entraînement UE. En retour de son soutien, elle attend une protection de la part des Etats membres au regard du différend qui l'oppose à la Turquie.

En matière capacitaire, Chypre participe à plusieurs initiatives de l'Agence Européenne de Défense, même si elle ne dispose que d'une industrie de défense très limitée.

Dans le domaine opérationnel, elle ne participe que de manière symbolique aux missions et opérations de la PSDC. Elle participe aux opérations navales de PSDC (1 pax 10 ( * ) dans Atalante et Sophia) ainsi qu'à EULEX Kosovo (1 pax - Chypre ne reconnaît pas le Kosovo) et à la Mission de surveillance de l'Union européenne (MSUE) en Géorgie (3 pax).

Chypre, qui considère la sûreté maritime comme une priorité, a joué un rôle important dans l'élaboration de la stratégie de sûreté maritime de l'UE (diffusion d'un non-papier franco-chypriote, en février 2013) adoptée par le Conseil européen le 24 juin 2014 et révisée au premier semestre 2018.

Par ailleurs, Nicosie participe au premier semestre 2018 au Groupement Tactique de l'Union européenne (GTUE), dont la Grèce est nation-cadre. Une nouvelle contribution a été annoncée pour le premier semestre 2020.

Le MEAE 11 ( * ) a indiqué à votre rapporteur que, consciente de sa proximité avec des zones de crise, mais également du rôle qu'elle peut jouer du fait de sa position géographique et de son histoire, Chypre se voit comme une plateforme de dialogue entre l'UE et la rive sud de la Méditerranée. On rappelle à cet égard que Chypre est en bons termes avec la plupart des pays arabes et que sa relation avec Israël s'est améliorée.

B. LA RELATION BILATÉRALE DE DÉFENSE

1. L'état de la coopération actuelle

La France est le deuxième partenaire militaire de Chypre derrière la Grèce. Chypre compte sur l'appui français pour maintenir une présence militaire dans la région et pour intervenir politiquement, le cas échéant, auprès de la Turquie.

Pour la France, Chypre constitue un point d'appui stratégique important dans la conduite des opérations militaires françaises en Méditerranée orientale, en particulier, dans la perspective d'évacuation de ressortissants 12 ( * ) depuis le Liban en cas de crise majeure. En outre, ses ports peuvent accueillir des porte-aéronefs et des sous-marins nucléaires d'attaque (SNA).

La coopération est principalement axée sur la formation et l'entraînement des personnels, ainsi que sur l'organisation d'exercices maritimes avec les forces armées chypriotes.

La coopération dans le domaine terrestre concerne principalement l'entraînement entre les forces spéciales. Elle est appelée à se développer davantage à travers la formation de nouveaux officiers chypriotes.

En matière aérienne, la base aérienne de Paphos accueille régulièrement des aéronefs français.

En matière de coopération maritime, les activités communes sont centrées sur les exercices de sauvetage et d'évacuation ainsi que sur des exercices d'entraînement communs avec les batteries côtières et les navires chypriotes. Cette coopération prend également la forme d'échanges d'informations et d'escales. 39 escales ont eu lieu en 2016.

Le programme de coopération bisannuel 2018-2019 prévoit onze activités de coopération, essentiellement des exercices entre marines, entre forces spéciales, ainsi que des exercices de coordination avec la défense anti-aérienne chypriote. À ce titre, la France a notamment participé, au premier semestre de l'année 2018, à l'exercice d'évacuation de ressortissants ARGONAUT, avec l'appui de moyens navals français, ainsi qu'en soutenant la planification de l'exercice.

La coopération structurelle de défense se limite surtout à des actions de formation en France.

En 2017, la coopération structurelle s'est élevée à 21 664 euros et a servi à financer la participation de 2 auditeurs à la session 2017 de l'Institut des hautes études de la défense nationale (IHEDN), un budget dédié à l'enseignement du français sous la tutelle directe de l'attaché de sécurité intérieur auprès de l'ambassade de France à Nicosie, ainsi que deux missions de police (formation à l'analyse et à la fraude documentaire, formation de recherche de personnes avec moyens cynophiles).

En 2018, la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) a financé la participation d'un stagiaire chypriote à la Session Internationale Euro-Méditérranée (SIEM) de l'IHEDN. Par ailleurs, des cours de français sont dispensés en 2018 au profit des forces armées chypriotes par le biais de crédits délégués à hauteur de 6 000 €.

Enfin, en coordination avec la France, Chypre participe également à la livraison d'armement au profit des forces maliennes, dans le cadre de la mission de formation de l'Union européenne au Mali (EUTM Mali), ainsi qu'au profit des forces armées libanaises (FAL) et de la Jordanie.

2. Les forces et le budget de la défense chypriotes

La garde nationale chypriote se compose d'environ 12 000 personnels (dont 10 500 pour l'armée de terre) et de 60 000 réservistes. La mission principale de ces forces vise surtout la défense terrestre du territoire face aux forces turques stationnées en République turque de Chypre du Nord, ainsi que la surveillance de l'espace aérien et maritime national.

Depuis 2017, ont été engagées une modernisation de la garde nationale - professionnalisation partielle avec le recrutement d'environ 3 000 personnes - ainsi qu'une évolution de la doctrine d'emploi des forces, ce qui devrait permettre à Chypre de projeter plusieurs de ces unités professionnalisées lors d'opérations extérieures et de renforcer la composante maritime des forces.

Le budget de la défense chypriote est, à ce jour, stable et s'élève à 320 millions d'euros en 2018, dont un peu plus de 60 millions d'euros consacrés aux investissements. Cette part du budget intervient dans le cadre de la relance de programmes d'acquisition de matériels, gelés depuis près de trois ans.

C. UN CADRE JURIDIQUE RÉNOVÉ QUI ÉTEND LES DOMAINES DE COOPÉRATION

1. Un accord qui se substituera à l'accord bilatéral de 2007

La France et Chypre sont liées par un accord de coopération en matière de défense signé à Paris, le 28 février 2007, et entré en vigueur le 1 er novembre 2010.

Au début de l'année 2014, Chypre a proposé à la partie française d'amender l'accord de coopération de 2007 pour étendre le champ de la coopération à l'échange de connaissances et d'expériences concernant le rôle des forces armées dans le domaine de la sécurité énergétique, de la sûreté maritime, de l'alerte précoce, de l'évacuation de ressortissants et de la gestion des crises pour faire face à des menaces telles que le terrorisme, la piraterie, les actes d'hostilités ou encore les catastrophes naturelles, d'une part, et au développement des facilités et du soutien logistique apportés aux forces armées, d'autre part. Fin 2014, la partie chypriote a proposé un nouvel amendement visant à développer la coopération en matière de soutien des forces. En janvier 2015, les parties sont convenues de conclure un nouvel accord, abrogeant et remplaçant celui de 2007. Le nouvel accord a finalement été signé en avril 2017.

Cet accord a pour objet de développer la coopération militaire et technique.

Les stipulations relatives aux domaines de coopération sont classiques et se retrouvent dans d'autres accords signés par la France dans le domaine de la défense. Elles prévoient notamment une coopération dans le domaine des recherches militaires, dans celui de l'armement, ainsi que la formation dans les écoles militaires des parties - les parties préparent et valident un programme de coopération tous les deux ans. S'y ajoutent, à l'initiative de Chypre, « la formation et l'échange de connaissances et d'expériences concernant le rôle des forces armées dans le domaine de la sécurité énergétique, de la sûreté maritime, de l'alerte précoce, de l'évacuation de ressortissants et de la gestion des crises ».

Cet instrument contient également des stipulations relatives au règlement des dommages, aux infractions, aux coûts de participation, à l'accès aux soins médicaux et à l'échange d'informations classifiées.

En outre, Chypre étant membre de l'Union européenne, cet instrument opère un renvoi aux dispositions de l'accord entre les Etats membres de l'Union européenne relatif au statut du personnel militaire et civil détaché auprès des institutions de l'Union européenne, des quartiers généraux et des forces pouvant être mis à la disposition de l'Union européenne dans le cadre de la préparation et de l'exécution des missions visées à l'article 17, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne, y compris lors d'exercices, et du personnel militaire et civil des Etats membres mis à la disposition de l'Union européenne pour agir dans ce cadre, dit « SOFA UE », signé, à Bruxelles, le 17 novembre 2003.

2. Enjeux et perspectives

Le contexte sécuritaire au Proche-Orient ainsi que la situation politico-militaire avec la Turquie plaident en faveur du maintien de relations étroites avec Chypre. Celles-ci devraient être redynamisées par la réouverture de la mission de défense chypriote à Paris en novembre 2017 mais les moyens limités des forces armées chypriotes ainsi que la crise financière ont constitué un frein jusqu'à présent.

Le développement de notre coopération s'inscrit dans un contexte de hausse préoccupante de l'insécurité au Levant et de besoins accrus en matière d'évacuation des ressortissants. À ce titre, un projet d'accord intergouvernemental relatif à l'évacuation de ressortissants fait également l'objet de discussions avec Chypre. Dans ce contexte, la relation avec Chypre apparaît comme un gage de conservation d'un point de libre accès à la Méditerranée orientale.

Même si la France et Chypre ne sont pas parvenues à la signature d'un accord en vue de l'acquisition de systèmes d'artillerie français CAESAR, des discussions pour d'autres acquisitions de matériels pourraient être engagées, notamment dans la perspective de l'acquisition par Chypre de patrouilleurs de haute mer et de centres de contrôle aérien.

SECONDE PARTIE : DES ACCORDS RÉCIPROQUES AUX STIPULATIONS CLASSIQUES

I. LES STIPULATIONS DE L'ACCORD BILATÉRAL DE DÉFENSE AVEC L'ALBANIE

Cet accord est composé d'un préambule qui renvoie notamment au SOFA OTAN de 1951, ainsi que de seize articles.

A. LE CHAMP DE LA COOPÉRATION

Les articles 3 et 4 du présent accord précisent les domaines et les formes de coopération dans des listes au contenu classique et non exhaustives . De manière générale en effet, cette coopération peut être développée dans tous les domaines de défense (et selon toutes les formes) décidés d'un commun accord.

Aux termes de l'article 3, les domaines de coopération sont a) les concepts de défense et de sécurité ; b) l'organisation et le fonctionnement des forces ; c) l'administration et la gestion des membres du personnel ; d) la formation et le perfectionnement individuels et collectifs des officiers, des sous-officiers, des militaires du rang et du personnel civil ; e) la communication et l'information dans les armées ; f) l'histoire militaire; g) le droit militaire ; h) les activités sportives dans le cadre du Conseil international du sport militaire ; i) le domaine de l'armement et de l'équipement des forces armées.

L'article 4 mentionne les formes que peut prendre cette coopération, notamment a) échanges, visites, stages, séjours de courte ou de longue durée, de membres du personnel ; b) envois ou échanges d'officiers experts techniques ; c) consultations, conférences, séminaires et autres rencontres sur des thèmes d'intérêt commun ; d) formations, scolarités, cours, spécialisations et autres formes de perfectionnement, exercices et entraînement des forces ; e) participation d'observateurs à des exercices militaires et à des manoeuvres ; f) coopération entre organisations, institutions et unités militaires scientifiques ou techniques des parties ; g) manifestations sportives dans le cadre du Conseil international du sport militaire ; h) échange d'expériences et de données d'intérêt commun pour les parties.

Cet accord exclut toute clause d'assistance en prévoyant à l'article 6 que les membres du personnel d'une Partie, présents sur le territoire de l'autre, ne peuvent en aucun cas participer à des opérations de maintien ou de rétablissement de l'ordre public ou de la sécurité, à l'exécution d'opérations de guerre ou assimilées, à des actions de maintien ou de rétablissement de la souveraineté nationale sur le territoire de la partie d'accueil.

Ce type de stipulations est de plus en plus courant dans les SOFA conclus avec les partenaires étrangers car elles permettent d'éviter que le personnel d'échange français ne se trouve engagé dans des opérations de l'État d'accueil, sans que la France n'ait officiellement donné son accord.

En outre, l'article 11 prévoit la possibilité de mettre en place, à titre temporaire, des coopérants militaires techniques auprès des autorités de l'autre partie. Leurs fonctions, leurs missions et la durée de leur mise en place est définie d'un commun accord entre les parties.

B. LES MODALITÉS DE MISE EN oeUVRE ET LE FINANCEMENT DE LA COOPÉRATION

Les autorités compétentes pour la mise en oeuvre du présent accord sont désignées à l'article 2. Il s'agit, pour la partie française, du ministère des armées et du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et, pour la partie albanaise, du ministère de la défense.

L'article 5 prévoit par ailleurs la tenue de réunions bilatérales entre les représentants des ministères en charge de la défense et de la sécurité des parties , alternativement sur le territoire de chacune des parties, et précise les modalités d'organisation de ces réunions (composition des délégations, ordre du jour des réunions). Il pose également le principe d'établissement de plans annuels de coopération .

Les modalités de mise en oeuvre de l'accord peuvent être définies par voie d'accords entre les parties ou d'arrangements particuliers entre les autorités ministérielles compétentes.

L'article 7 fixe les règles de financement de la coopération dont l'essentiel repose sur la partie d'origine , celle-ci assurant les frais de transport, d'hébergement et d'alimentation ainsi que les indemnités liées au déplacement. S'agissant des stages, la partie d'accueil étudie, au cas par cas, la possibilité de prendre en charge les frais de scolarité ou de formation des membres du personnel de la partie d'origine.

C. LE STATUT DES PERSONNELS

1. Le principe : le renvoi aux stipulations du SOFA OTAN de 1951

Aux termes de l'article 12, les membres du personnel de la partie d'envoi présents sur le territoire de la partie d'accueil , ainsi que les personnes à leur charge, se verront appliquer les stipulations du SOFA OTAN de 1951 .

2. Les soins médicaux et le décès

S'agissant des soins médicaux - droit aux prestations et prise en charge financière, l'article 8 renvoie à l'article IX du SOFA OTAN qui stipule au paragraphe 5 : « Si les services médicaux et dentaires attachés à une force ou à un élément civil sont insuffisants, leurs membres ainsi que les personnes à leur charge peuvent recevoir les soins médicaux et dentaires, y compris l'hospitalisation, dans les mêmes conditions que le personnel correspondant de l'Etat de séjour ».

L'article 13 énonce que les formalités à suivre en cas de décès d'un membre du personnel de la Partie d'origine sur le territoire de l'État d'accueil obéissent à la législation en vigueur dans l'Etat d'accueil : constat et déclaration du décès, autopsie, remise du corps.

3. Le règlement des dommages

L'article 14 précise les modalités du règlement des dommages résultant de la mise en oeuvre du présent accord en renvoyant à l'article VIII du SOFA OTAN. Cet article pose notamment un principe de renonciation mutuelle à toute indemnisation en cas de dommage causé aux personnels et aux biens d'une autre partie à l'occasion d'activités de coopération et prévoit les conditions de règlement des dommages aux tiers.

4. Le régime fiscal individuel

En vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales, l'article 9 pose le principe de la conservation de la résidence fiscale des membres du personnel et de leurs personnes à charge présents sur le territoire de l'Etat d'accueil dans l'Etat d'origine , s'agissant des soldes, traitements et autres rémunérations similaires.

D. LES AUTRES DISPOSITIONS

1. L'échange et la protection des informations classifiées

Selon l'article 11, l'échange et la protection des informations classifiées s'effectuent conformément à l'accord relatif à l'échange et à la protection réciproques d'informations classifiées, signé à Tirana, le 3 mai 2011.

2. Le règlement des différends

Aux termes de l'article 15, les litiges relatifs à l'application ou à l'interprétation de l'accord sont réglés par voie de consultation ou de négociation entre les parties.

3. Les dispositions finales

L'article 16 prévoit que le présent accord prend effet le premier jour du deuxième mois suivant le jour de réception de la seconde notification écrite.

L'Albanie a notifié l'achèvement de ses procédures internes requises pour l'entrée en vigueur de cet accord par note verbale en date du 17 septembre 2018.

Cet instrument est conclu pour une période de dix ans renouvelable, pour des périodes identiques, par tacite reconduction .

Il peut être amendé, à tout moment, par écrit, d'un commun accord entre les parties. Il peut également faire l'objet d'une dénonciation notifiée par écrit et qui prendra effet six mois après la réception de la notification.

II. LES STIPULATIONS DE L'ACCORD BILATÉRAL DE DÉFENSE AVEC CHYPRE

Cet accord est composé d'un préambule, qui renvoie notamment au SOFA UE de 2003 , bien que celui-ci ne soit pas entré en vigueur, et de huit articles.

A. LE CHAMP DE LA COOPÉRATION

Les articles 1 er et 2 du présent accord définissent les domaines dans lesquels les parties développent une coopération militaire et technique, et les formes que peuvent prendre cette coopération. De manière plus générale, cette coopération peut être développée dans tout domaine défini par entente mutuelle entre les parties.

La coopération en matière de défense prévue par l'accord franco-chypriote est plus étendue que celle figurant dans l'accord franco-albanais. Outre les domaines classiques (échanges d'expérience, formation, exercices, visites...), elle prévoit en effet une coopération dans les domaines suivants:

- recherches militaires, scientifiques et techniques ;

- domaines de l'armement et des technologies de défense ;

- la formation et l'échange de connaissance et d'expérience concernant le rôle des forces armées dans les domaines de la sécurité énergétique, de la sûreté maritime, de l'alerte précoce, de l'évacuation de ressortissants et de la gestion de crise ;

- le développement de la coopération dans le cadre de la PSDC, notamment en matière d'organisation, entrainement, armements et transport des forces en cas d'opérations militaires de l'UE ;

- et, au cas par cas, l'apport de facilités opérationnelles et de soutien logistique aux forces armées.

B. LES MODALITÉS DE MISE EN oeUVRE ET LE FINANCEMENT DE LA COOPÉRATION

L'article 2 précise que les ministères compétents des parties préparent et valident tous les deux ans des programmes de coopération . Ces derniers comportent la dénomination des activités, leur nature, les dates et le lieu de réalisation, les autorités compétentes et les sources de financement.

Il ajoute que la mise en oeuvre de l'accord peut être précisée par voie d'arrangements entre les ministres compétents.

Aux termes de l'article 4, chaque partie prend en charge ses propres coûts de participation, à moins que les parties n'en décident autrement.

C. LE STATUT DES PERSONNELS

a) Le règlement des dommages

L'article 3 renvoie aux dispositions des articles 17 et 18 du SOFA UE de 2003 en cas d'infractions et/ou de dommages causés par les membres du personnel militaire et civil de la partie d'envoi sur le territoire de la partie d'accueil, dans le cadre d'activités menées dans le cadre de cet accord.

b) Les soins médicaux et dentaires

L'article 5 stipule que les membres du personnel de la partie d'envoi ont accès aux soins médicaux et dentaires fournis par le service de santé des armées, dans les mêmes conditions que les personnels de la partie d'accueil. Il est prévu que ces soins soient remboursés par la partie d'origine, sauf pour les actes médicaux délivrés par les services médicaux d'unité ou de garnison, ainsi que s'agissant des évacuations par moyens militaires qui sont fournis gratuitement.

D. LES AUTRES DISPOSITIONS

1. L'échange et la protection des informations classifiées

Selon l'article 6, l'échange d'informations et de matériels classifiés sont protégés conformément à l'accord relatif à l'échange et à la protection réciproque des informations classifiées, signé à Nicosie, le 22 janvier 2010.

2. Le règlement des différends

Aux termes de l'article 7, les litiges relatifs à l'application ou à l'interprétation de l'accord sont réglés par voie de négociation entre les parties.

3. Les dispositions finales

L'article 8 prévoit que le présent accord prend effet le premier jour du deuxième mois suivant le jour de réception de la seconde notification écrite.

À ce jour, Chypre n'a pas notifié son approbation de cet accord.

À son entrée en vigueur, le présent accord abroge et remplace l'accord intergouvernemental relatif à la coopération en matière de défense de 2007 précité.

Cet instrument est conclu pour une période de dix ans renouvelable, pour des périodes identiques, par tacite reconduction.

Il peut être amendé, à tout moment, par écrit, d'un commun accord entre les parties. Il peut également faire l'objet d'une dénonciation notifiée par écrit et qui prendra effet six mois après la réception de la notification.

CONCLUSION

Après un examen attentif des stipulations de ces deux accords, la commission a adopté le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des ministres de la République d'Albanie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et de l'accord de coopération en matière de défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre.

Ces deux accords contribuent à renforcer l'influence française auprès de chacun de ces deux Etats, avec lesquels la France entretient traditionnellement de bonnes relations.

Ils sont pleinement compatibles avec les engagements pris par la France dans le cadre des Nations unies et de l'Union européenne et ne nécessitent aucune modification ou adaptation du droit français. Ils n'emportent pas non plus de conséquences financières notables. En outre, on ne peut exclure que ces coopérations en matière de défense favorisent les exportations d'armement françaises.

L'Albanie a notifié l'achèvement des procédures internes requises pour l'entrée en vigueur de cet accord par note verbale en date du 17 septembre 2018, tandis que ces procédures sont en cours à Chypre.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 19 décembre 2018, sous la présidence de M. Christian Cambon, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Rachel Mazuir sur le projet de loi n° 130 (2018-2019) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Conseil des ministres de la République d'Albanie relatif à la coopération dans le domaine de la défense et de l'accord de coopération en matière de défense entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Chypre.

Après l'exposé du rapporteur, un débat s'est engagé.

Mme Hélène Conway-Mouret. - Les visites en Albanie sont bienvenues, car ce pays, que nous ne connaissons pas bien, souffre des clichés qui lui sont attachés. C'est également un pays de transit pour les migrants.

Cet accord va dans le bon sens, car nous avons intérêt à travailler avec eux. Les Albanais sont francophiles, et très désireux de se rapprocher de l'Union européenne. Cette motivation pousse la population à accepter des réformes impopulaires, mais nécessaires.

M. Olivier Cadic. - Les militaires français avaient libéré la région de Korça durant la Première Guerre mondiale. Les Albanais ont gardé une grande affection pour la France, et souhaitent davantage de visites. Ils veulent être vus comme des Européens. Il faut se rendre dans ce pays qui a vécu une période triste pour se rendre compte du changement d'ère.

M. Richard Yung. - Chypre sert de plateforme à de nombreux transferts financiers venant du nord et de l'est de ce pays effectués dans des conditions douteuses. Les autorités monétaires et bancaires chypriotes ne sont pas connues pour la rigueur de leur contrôle... Une banqueroute a d'ailleurs touché le pays il y a quelques années.

Par ailleurs, je veux faire remarquer que la France était contente de pouvoir compter sur Chypre lorsqu'il a fallu évacuer par ferry 8 000 de nos ressortissants du Liban. Gardons donc de bonnes relations avec ce pays !

Mme Joëlle Garriaud-Maylam. - La francophonie a reculé en Albanie. Nous connaissons les problèmes budgétaires du Quai d'Orsay, mais les Albanais espèrent un renforcement des institutions françaises de la francophonie.

Par ailleurs, il faut noter que nous travaillons en étroite collaboration avec l'Albanie au sein des structures de l'OTAN. La ministre de la défense albanaise est extrêmement active et présente.

Enfin, la diaspora albanaise est très ancienne, bien implantée et en augmentation. Au Kosovo, on compte par exemple 1,5 million d'Albanais, qui constituent une force très importante.

M. Rachel Mazuir, rapporteur. - Un cimetière militaire français se trouve à Korça.

Effectivement, la diaspora albanaise est très importante. Officiellement, le nombre de ressortissants albanais vivant hors de leur pays est de 1 million.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Mardi 4 décembre 2018

Ministère de l'Europe et des Affaires étrangères

Mission des accords et traités :

Mme Lucile CARREZ, rédactrice

Direction de la coopération de sécurité et de défense :

M. Paguiel KOHLER, rédacteur

Ministère des Armées

Bureau du droit international public général Secrétariat général pour l'administration (SGA)

Direction des affaires juridiques/sous-direction du droit international et du droit européen

Mme Johanna RAEDECKER, adjointe au Chef de bureau

Mme Marie-Alice ESTERHAZY, chargée d'études juridiques


* 1 SOFA pour Status Of Forces Agreement.

* 2 Accord entre les Etats membres de l'Union européenne relatif au statut du personnel militaire et civil détaché auprès des institutions de l'Union européenne, des quartiers généraux et des forces pouvant être mis à disposition dans le cadre de la préparation et de l'exécution des missions visées à l'article 17, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne, y compris lors d'exercices, et du personnel militaire et civil des Etats membres mis à la disposition de l'Union européenne pour agir dans ce cadre.

* 3 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 4 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 5 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 6 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 7 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 8 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 9 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 10 Pax = passager.

* 11 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 12 Un accord intergouvernemental relatif à l'évacuation de ressortissants (RESEVAC) est en cours de négociation.

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