Rapport n° 743 (2020-2021) de MM. Vincent DELAHAYE et Rémi FÉRAUD , fait au nom de la commission des finances, déposé le 7 juillet 2021

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N° 743

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2020-2021

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 juillet 2021

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2020 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 1

Action extérieure de l'État


Rapporteurs spéciaux : MM. Vincent DELAHAYE et Rémi FÉRAUD

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal , président ; M. Jean-François Husson , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet , vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel , secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Mme Nadine Bellurot, M. Christian Bilhac, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

4090 , 4195 et T.A. 628

Sénat :

699 (2020-2021)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

1. En 2020, le montant des crédits exécutés au titre de la mission « Action extérieure de l'État » s'élève à 2,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, en hausse de près de 5 % par rapport à 2019.

Conséquemment à la survenue de la crise sanitaire, la mission a connu d'importantes ouvertures de crédits en 2020, à hauteur de 150 millions d'euros .

Au moment du collectif de fin de gestion votée en décembre 2020, près de 100 millions d'euros de crédits n'avaient pas été consommés. Au final, plus de 43 millions d'euros de crédits auront été annulés à l'occasion de ce collectif tandis que 71 millions d'euros (en AE) et 91 millions d'euros (en CP) de crédits ont été reportés sur l'exercice 2021.

Les rapporteurs spéciaux constatent ainsi que la gestion budgétaire infra-annuelle de cette mission a donc été particulièrement marquée par la crise.

2. Cette crise a, par ailleurs, conduit à confirmer ou modifier certaines des priorités du ministère , telles qu'elles ressortaient de la prévision en loi de finances. Ainsi, les moyens en faveur de l'enseignement français à l'étranger , d'une part, et de ceux affectés au centre de crise et de soutien (CDCS) , d'autre part, ont été particulièrement renforcés. A l'inverse, les dépenses en matière immobilière ou pour la promotion de l'enseignement supérieur et de la recherche ont été moins importantes que prévu.

Les rapporteurs spéciaux considèrent que ces changements traduisent la nécessité de s'adapter à la situation de crise .

3. Ils constatent, en outre, que l'exécution des dépenses de personnel a été plus respectueuse de la prévision , ce qui s'explique par une prise en compte plus objective du risque change-prix.

4. Enfin, ils observent que les dépenses de personnel ont continué d'augmenter moins rapidement en 2020 que pour le reste du budget de l'État . Néanmoins, ils rappellent que ce résultat encourageant procède pour beaucoup de la crise qui a conduit à décaler l'entrée en fonction de certains agents.

Ils estiment qu'il faudra à l'avenir renforcer la vigilance à l'égard de certains facteurs qui accélèrent la progression des dépenses de personnel , en particulier l'indemnité de résidence à l'étranger .

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2020

La mission « Action extérieure de l'État », qui représente 2,9 milliards d'euros, soit 0,49 % du budget de l'État (hors mission « Remboursements et dégrèvements ») regroupe en 2020 les crédits des trois programmes suivants :

- le programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » , qui porte les dépenses de personnel et de fonctionnement du réseau diplomatique, ainsi que les contributions de la France aux organisations internationales et aux opérations de maintien de la paix ;

- le programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » , qui regroupe les dépenses de personnel et de fonctionnement du réseau consulaire, ainsi que les bourses octroyées aux élèves français scolarisés dans les établissements du réseau de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) ;

- le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » , qui rassemble les crédits de fonctionnement du réseau culturel et les subventions versées aux quatre opérateurs de la mission.

L'architecture de la mission budgétaire a évolué en 2020 avec la suppression du programme 347 « Présidence française du G7 » , créé en loi de finances initiale pour 2018 et qui regroupait les moyens financiers dédiés à la préparation du sommet de Biarritz qui s'est tenu en août 2019. Ce programme présentait une dimension temporaire et limitée aux exercices budgétaires 2018 et 2019.

Évolution des crédits de la mission « Action extérieure de l'État » en 2020

(en millions d'euros et en pourcentage)

2019

2020

Exécution / prévision 2020

Exécution

2020 / 2019

Prévision

Exécution

Prévision

Exécution

en volume

en %

en volume

en %

105 - Action de la France en Europe et dans le monde

AE

1 784,2

1 749,9

- 1,9 %

1 791,2

1 778,1

- 13,1

- 0,7 %

+ 28,2

+ 1,6 %

CP

1 782,5

1 750,0

- 1,8 %

1 789,6

1 784,9

- 4,7

- 0,3 %

+ 34,9

+ 2,0 %

151 - Français à l'étranger et affaires consulaires

AE

374,7

362,9

- 3,1 %

372,9

398,5

+ 25,6

+ 6,9 %

+ 35,5

+ 9,8 %

CP

374,7

362,9

- 3,2 %

372,9

398,5

+ 25,6

+ 6,9 %

+ 35,6

+ 9,8 %

185 - Diplomatie culturelle et d'influence

AE

701,6

689,7

- 1,7 %

718,9

757,5

+ 38,5

+ 5,4 %

+ 67,8

+ 9,8 %

CP

701,6

689,7

- 1,7 %

718,9

757,6

+ 38,7

+ 5,4 %

+ 67,9

+ 9,8 %

Total mission

AE

2 860,5

2 802,5

- 2,0 %

2 883,0

2 934,0

+ 51,0

+ 1,8 %

+ 131,5

+ 4,7 %

CP

2 858,8

2 802,6

- 2,0 %

2 881,4

2 941,0

+ 59,6

+ 2,1 %

+ 138,3

+ 4,9 %

AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. Prévision : prévision en loi de finances initiale, y compris les prévisions de fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

En 2020, le montant des crédits consommés augmente de 131 millions d'euros en AE et de 138 millions d'euros en CP par rapport à 2019 .

En comparaison de la prévision initiale et hors fonds de concours et attributions de produits, on constate une surconsommation de 51 millions d'euros en AE et 60 millions d'euros en CP.

Toutefois, si l'on tient compte des importantes ouvertures de crédits intervenues à l'occasion des trois lois de finances rectificatives (+ 145 millions d'euros en AE et en CP) et à l'exclusion des reports, l'exercice se caractérise par une sous-consommation très importante, de l'ordre de 91 millions d'euros en AE et de 71 millions d'euros en CP.

Evolutions des autorisations d'engagement
de la mission en 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Ces évolutions et mouvements doivent toutefois être replacés dans le contexte particulier de la crise sanitaire qui a nécessité de faire face à de nouvelles dépenses et entrainé des incertitudes quant au niveau des besoins à satisfaire.

Evolutions des crédits de paiements
de la mission en 2020

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Contrairement à l'exercice 2019 qui se caractérisait par une répartition homogène de la dépense entre les titres 2 1 ( * ) , 3 2 ( * ) et 6 3 ( * ) , l'exercice 2020 présente un niveau de dépenses d'intervention plus important (1 milliard d'euros soit 35,3 % de l'ensemble des crédits de la mission).

Décomposition de la dépense par titre

Titre 2 ; dépenses de personnel

Titre 3 : dépenses de fonctionnement

Titre 5 : dépenses d'investissement

Titre 6 : dépenses d'intervention

Titre 7 : dépenses d'opérations financières

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

Enfin, il convient d'observer que l'évolution des crédits de paiement exécutés de la mission a respecté la trajectoire inscrite en loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 jusqu'à cet exercice.

Écart entre la prévision en loi de programmation et l'exécution

(en crédit de paiement hors contribution
au CAS « Pension »)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

A. LA CRISE A CONDUIT LE MINISTÈRE À REVOIR LES PRIORITÉS BUDGÉTAIRES IDENTIFIÉES EN LOI DE FINANCES INITIALE

1. Les crédits inscrits en loi de finances initiale traduisaient plusieurs priorités

La loi de finances initiale pour 2020 prévoyait une augmentation
des crédits de la mission de 63 millions d'euros hors titre 2 (en AE) par rapport à ceux consommés en 2019, dont la répartition traduisait les priorités du ministère des affaires étrangères .

Celles-ci concernaient notamment un renforcement des moyens dédiés :

- à l'enseignement français à l'étranger avec une hausse de 27,3 millions d'euros des crédits en faveur de l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) et de 3,7 millions d'euros pour l'accès des élèves à l'enseignement français à l'étranger ;

- aux moyens du réseau diplomatique (+ 26,9 millions d'euros)

- au rayonnement de l'enseignement supérieur et de la recherche (+ 12,1 millions d'euros).

À l'inverse , plusieurs postes devaient connaitre une diminution des moyens leur étant consacrés , en particulier ceux concernant :

- la coopération culturelle et la promotion du français (- 8,2 millions d'euros) ;

- la diplomatie économique et le développement du tourisme (- 5,6 millions d'euros) ;

- le versement des contributions internationales (- 3,5 millions d'euros) ;

- l'appui au réseau diplomatique (- 3,4 millions d'euros).

2. La crise sanitaire a entrainé un changement substantiel des priorités qui se traduit par d'importants écarts d'exécution

L'exécution 2020, notamment, sous l'effet de la crise sanitaire a conduit à revoir ou amplifier ces priorités initiales .

a) Plusieurs actions ont été abondées afin de répondre aux contraintes posées, en particulier, par la crise sanitaire

En premier lieu, les rapporteurs spéciaux constatent et saluent l'effort très important déployé en faveur de l'enseignement français à l'étranger.

Ainsi, par rapport à la prévision initiale, 81,5 millions d'euros de crédits supplémentaires (en AE) ont été engagés au travers du renforcement de la subvention versée à l'AEFE (+ 46 millions d'euros, en AE) et de l'accès des élèves français au réseau de l'AEFE (+35,5 millions d'euros, en AE) grâce à des bourses scolaires.

Au total, la crise a conduit le ministère à confirmer et amplifier son effort en faveur de l'enseignement français à l'étranger dont les crédits consommés augmentent de 112,4 millions d'euros (en AE) en 2020 par rapport à 2019.

En deuxième lieu, les rapporteurs spéciaux rappellent que les moyens consacrés à la coordination de l'action diplomatique et essentiellement affectés au centre de crise et de soutien (CDCS) ont été accrus de 27,5 millions d'euros (en AE et en CP) en cours d'exécution.

Ces crédits supplémentaires ont notamment été mobilisés pour le financement des opérations de rapatriement des français et ressortissants européens à l'étranger , d'une part, et du plan « Santé » permettant l'organisation de rapatriements sanitaires, ainsi que la dotation des postes en matériels de soin et de protection, d'autre part.

Les rapporteurs spéciaux saluent la mise en oeuvre de ces opérations qui ont impliqué une forte mobilisation des agents du ministère.

Au bilan, les opérations de rapatriement auront représenté une dépense de l'ordre de 21,6 millions d'euros et le plan « Santé » de 14,2 millions d'euros.

Il doit être relevé que le financement de ces actions sera en partie couvert par les produits de deux fonds de concours ouverts. Le premier permettra de recevoir une contribution de la Commission européenne au titre du mécanisme européen de protection (6,9 millions d'euros), et le second retracera les fonds versés par les passagers rapatriés et les compagnies d'assurance (6,7 millions d'euros), d'autre part.

En troisième lieu, le niveau des contributions versées par la France aux organisations internationales s'est révélé plus important qu'initialement prévu (+ 20,3 millions d'euros en AE).

Cette situation s'explique par l'adoption en juin 2020 par l'Assemblée générale des Nations unies d'un budget en hausse au titre des opérations de maintien de la paix (OMP). Par ailleurs, la France s'est engagée à accélérer le rythme de versement de ses contributions, ce qui a entrainé un décaissement plus important que prévu au titre de 2020.

Les rapporteurs spéciaux prennent acte de cette hausse des contributions qui procèdent de l'application mécanique des règles de répartition entre États des financements des opérations de la paix et dont la survenue ne pouvait être anticipée lors de l'examen de la loi de finances initiale.

Ils rappellent qu'ils conduisent actuellement une mission de contrôle budgétaire qui permettra de présenter plus avant les enjeux de pilotage des contributions internationales.

Enfin, l'exécution des dépenses en faveur des opérateurs - hors AEFE - a dû s'adapter au contexte de crise. À cet égard, les rapporteurs spéciaux observent que 19,2 millions d'euros de crédits supplémentaires (en AE) ont été engagés en faveur des Instituts français, des Alliances françaises ou, encore, de l'opérateur Atout France.

En comparaison de l'exercice 2019, l'effort en faveur de ces opérateurs correspond donc à une hausse de crédits (en AE) de 2,1 millions d'euros alors qu'une baisse de 17,2 millions d'euros était initialement prévue.

Le rapporteur spécial M. Rémi Ferraud, considère que le renforcement des crédits en faveur de ces opérateurs qui participent à la promotion de la culture française et à son attractivité touristique était nécessaire afin de leur permettre de traverser la crise et d'adapter leur fonctionnement.

b) Des actions prioritaires en loi de finances initiale connaissent finalement d'importants niveaux de sous-exécution

Les rapporteurs spéciaux observent que l'exécution budgétaire a, à l'inverse de ce qui été évoqué précédemment, conduit à réduire les moyens accordés à des postes de dépenses qui, pour certains, constituaient des priorités d'intervention en loi de de finances initiale.

En premier lieu, l'exercice 2020 s'agissant de l'immobilier et du fonctionnement courant du réseau diplomatique devait concrétiser un engagement en hausse de 26,9 millions d'euros (en AE) par rapport à 2019.

À ce titre, il s'agissait du second poste d'augmentation des crédits de la mission (hors titre 2) après ceux dédiés à l'AEFE.

Toutefois, dans le contexte de la crise sanitaire, les crédits dépensés ont été réduits de 37,2 millions d'euros en autorisation d'engagement , ce qui correspond, finalement, à une baisse de 10,3 millions d'euros par rapport à 2019.

Ainsi, de deuxième poste en termes d'augmentation des crédits en prévision, les dépenses en faveur du réseau diplomatique constituent le deuxième poste en termes de diminution des moyens engagés en 2020 en exécution.

Par rapport à la prévision initiale, les dépenses de fonctionnement des ambassades ont, par exemple, été réduites de 14,3 millions d'euros notamment en raison d'une moindre consommation des crédits de fonctionnement courant (- 8 millions d'euros) et de représentation (- 5,2 millions d'euros).

En second lieu, les crédits dédiés au fonctionnement de l'administration générale qui devaient diminuer de 1,4 million d'euros (en AE) par rapport à 2019, ont connu une contraction finalement égale à 15 millions d'euros.

Cette baisse est répartie de façon presque équivalente entre des économies en fonctionnement (résultant, par exemple, d'une moindre consommation des frais de mission) et en matière d'immobilisations corporelles (9 millions d'euros de sous-consommation en AE), en informatique, par exemple.

Par ailleurs , plusieurs opérations immobilières en France ont dû être repoussées, entrainant une sous-consommation en AE de l'ordre de 6,2 millions d'euros.

En dernier lieu, les rapporteurs constatent la situation spécifique de la promotion de l'enseignement supérieur et de la recherche retracée au titre du programme 185.

En effet, alors qu'elle devait faire l'objet d'un effort se traduisant par une hausse de 12,1 millions d'euros de ses crédits en 2020 par rapport
à 2019, la crise a conduit à une exécution finalement inférieure
de 5,3 millions d'euros en AE.

D'une part, le montant des bourses en faveur des chercheurs et étudiants étrangers a été inférieur de 8 millions d'euros à la prévision initiale, ce qui s'explique par les restrictions de déplacements mises en oeuvre au plan mondial.

D'autre part, et pour des motifs analogues, les crédits finançant les dépenses en faveur des programmes d'échanges d'expertise et scientifique ont été diminués de 4,3 millions d'euros.

B. LES DÉPENSES DE PERSONNEL SONT MIEUX MAITRISÉES MALGRÉ UN ASSOUPLISSEMENT DES EFFORTS EN MATIÈRE DE RÉDUCTION DES EFFECTIFS

1. Les dépenses de personnel ont été mieux évaluées grâce à la prise en compte de l'effet change-prix

Les rapporteurs spéciaux constatent que pour la première fois depuis 2015, il n'y a pas de sur-exécution des dépenses de personnel par rapport à la prévision en loi de finances initiale, ce qui doit être salué.

Cette amélioration résulte principalement d'une meilleure budgétisation, depuis la loi de finances pour 2019, de l'effet change-prix qui affecte particulièrement les dépenses de personnel.

En effet, le pouvoir d'achat des agents résidant à l'étranger est partiellement garanti par un mécanisme d'ajustement du montant de leur indemnité en fonction de l'évolution du différentiel de change ou
d'inflation.

Par ailleurs, la rémunération des agents de droit local est, pour 60 % d'entre eux, versée en devises étrangères, ce qui peut engendrer une perte au change pour le ministère.

La situation préalable à la loi de finances initiale pour 2019 se caractérisait par une sous-budgétisation de l'effet change-prix qui impliquait, notamment, d'importantes ouvertures de crédits en collectif de fin de gestion et réduisait la portée de l'autorisation parlementaire.

La loi de finances initiale pour 2019 avait prévu un « rebasage » de l'effet prix qui s'est traduit par une augmentation des crédits de titre 2 de 27,9 millions d'euros.

L'exécution 2020 a poursuivi cet effort de sincérisation notamment par l'inscription en loi de finances initiale pour 2020 d'une provision :

- des effets de l'inflation mondiale sur la rémunération des agents de droit local ;

- des effets change-prix sur les indemnités de résidence à l'étranger ;

Par ailleurs, le risque d'une perte au change sur la rémunération des agents de droit local et sur les indemnités de résidence à l'étranger peut désormais être couvert par la mobilisation, en loi de finances rectificative, des crédits de la réserve de précaution.

Les rapporteurs spéciaux saluent l'effort de sincérisation mené et constatent qu'il a contribué à un plus grand respect de l'autorisation parlementaire.

2. Les effectifs continuent de se réduire mais dans des proportions moins importantes que prévu

Les rapporteurs spéciaux observent que le niveau des effectifs diminue en 2020 par rapport à 2019.

Ainsi, les emplois consommés en équivalent temps plein travaillé (ETPT) se situent en deçà du plafond inscrit en loi de finances initiale et des résultats constatés au titre de 2019.

Consommation des emplois de la mission en 2020

Source : commission des finances du Sénat

De même, l'exécution du schéma d'emploi (- 5,1 millions d'euros) se caractérise par la suppression nette de 51 équivalents temps plein (ETP).

Exécution du schéma d'emploi
de la mission en 2020

Catégories d'emplois

Schéma d'emplois 2020 prévu (en EPT, hors effectifs affectés au suivi de la présidence française de l'Union européenne)

Exécution du schéma d'emplois 2020 (en ETP)

G1

+ 2

+ 10

G2

- 34

- 15

G3

- 15

- 17

G4

- 4

- 4

G5

- 30

- 25

Total

- 81

- 51

Source : commission des finances du Sénat

Celle-ci se situe en deçà de la prévision de - 81 ETP inscrite au projet de loi de finances pour 2020 en raison de la décision, prise en cours d'exercice, de créer 30 postes supplémentaires pour le suivi de la présidence française de l'Union européenne.

Pour mémoire, ces suppressions d'emplois en ETP s'inscrivent dans le contexte d'une réforme du réseau de l'État et de ses opérateurs à l'étranger.

Sur le périmètre de la mission, les économies attendues par ses suppressions de postes (- 290 ETP) entre 2018 et 2020 s'élevaient à 23,9 millions d'euros 4 ( * ) .

Toutefois, le ministère a réalisé un effort de suppression en 2020 moins important qu'attendu afin d'assurer le suivi de la présidence française de l'Union européenne.

Ainsi, et d'après la note d'exécution budgétaire de la Cour des comptes, le niveau des économies réalisées ne s'élèverait qu'à 18,6 millions d'euros.

Le rapporteur spécial Vincent Delahaye regrette que les engagements pris en matière de contraction des effectifs n'aient pas été tenus, tout en reconnaissant que le ministère a fourni d'importants efforts sur cette question.

3. La maitrise des dépenses procède aussi de facteurs conjoncturels et doit alerter sur la persistance de faiblesses structurelles

Les rapporteurs spéciaux observent que les dépenses de personnel augmentent en 2020 (+ 0,6 %) dans une ampleur moindre que pour l'ensemble du budget général (+ 1 %).

Un tel constat se vérifie également pour la période 2017-2020 où la croissance des dépenses de personnel de la mission (+ 3,1 %) est d'un point de pourcentage inférieure à celle de l'ensemble du budget général (+ 4,2 %).

Évolution des dépenses de personnel de

la mission Action extérieure de l'État

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

Toutefois, les rapporteurs spéciaux estiment nécessaire de rappeler qu'une part de ce résultat positif s'explique, en 2020, par des facteurs essentiellement conjoncturels.

Ainsi, en raison du décalage de l'entrée en fonction de certains agents dans le contexte de la crise sanitaire, le niveau des indemnités de résidence est resté globalement stable entre 2019 et 2020 (386 millions d'euros).

En outre, l'euro s'est apprécié par rapport au dollar à partir du mois de mai 2020 (+ 12,9 % entre le 1 er mai 2020 et le 29 décembre 2020) ce qui a engendré un gain au change tant pour la rémunération des agents de droit local que pour les agents expatriés.

Ces éléments conjoncturels ne doivent donc pas occulter la nécessité d'une réflexion sur les facteurs qui favorisent une croissance continue des dépenses de personnel de la mission dont, en particulier, l'indemnité de résidence à l'étranger.

À cet égard, les rapporteurs spéciaux ont conduit plusieurs auditions avec la direction du budget et le ministère des affaires étrangères afin d'évaluer les pistes de réforme de cette indemnité qui pèse pour 40 % de la masse salariale.

Ils se montreront particulièrement vigilants quant aux évolutions que proposera le ministère à l'occasion du projet de loi de finances pour 2022.


* 1 Dépenses de personnel.

* 2 Dépenses de fonctionnement.

* 3 Dépenses d'intervention.

* 4 Jaune budgétaire relatif à la mise en oeuvre de la réforme du réseau de l'État et de ses opérateurs à l'étranger annexé au projet de loi de finances pour 2021.

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