EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 1 er février 2022, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine en nouvelle lecture le rapport et le texte de la commission sur la proposition de loi organique et sur la proposition de loi, relatives aux lois de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur . - La commission mixte paritaire (CMP) chargée d'élaborer un texte commun sur les dispositions restant en discussion des propositions de loi organique et ordinaire relatives aux lois de financement de la sécurité sociale n'a pas abouti à l'issue de sa réunion du 12 janvier dernier.

J'avais, en conclusion de cette CMP, exprimé des regrets.

En premier lieu, j'ai considéré que, au terme de mes discussions avec le rapporteur de l'Assemblée nationale, le nombre de points de divergence était relativement faible et qu'il était dommage de refuser d'en discuter afin de faire les derniers compromis qui auraient permis un accord.

En deuxième lieu, d'un point de vue institutionnel, il n'est pas anodin que l'Assemblée nationale et le Sénat ne parviennent pas à un accord sur un texte organique en matière financière, c'est-à-dire au coeur des pouvoirs du Parlement et de la définition des relations entre le Gouvernement et le Parlement. Toutes les réformes d'ampleur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) et de la loi de financement de la sécurité sociale (LOLFSS) s'étaient jusqu'alors déroulées de manière consensuelle. Il serait tout à fait anormal, pour ne pas dire malsain, que l'Assemblée nationale, naturellement plus proche du Gouvernement que le Sénat, décide seule de l'équilibre entre les pouvoirs publics en cette matière.

En dernier lieu, on ne réforme pas souvent la LOLFSS et il serait dommage de manquer cette occasion d'améliorer réellement le pouvoir de décision et de contrôle du Parlement en matière de finances sociales.

Je relève que plusieurs membres de la CMP, députés et sénateurs, avaient partagé mes regrets et que la présidente de la commission elle-même, membre du groupe LREM, avait souhaité, en clôture de la réunion, de nouveaux rapprochements dans la suite de la navette.

De fait, de manière atypique, les discussions se sont poursuivies après la CMP, entre les deux rapporteurs et avec le Gouvernement. Il en résulte un texte de nouvelle lecture par lequel l'Assemblée nationale reprend un nombre significatif d'apports du Sénat.

La principale disposition du texte de première lecture des députés, c'est-à-dire la création des lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale (Lacss), constituait un point d'accord. Elle figurait d'ailleurs dans la proposition de loi organique déposée au Sénat.

Les députés ont également repris deux de nos « clauses de retour au Parlement » qui imposent une consultation pour avis des commissions des affaires sociales en cas de remise en cause, en cours d'exercice, d'éléments essentiels de la LFSS votée à l'automne. Le Gouvernement devrait ainsi nous saisir dans deux hypothèses : soit en cas de dépassement du plafond d'endettement à court terme des organismes autorisés à recourir à ce type de financement, au premier chef l'Urssaf Caisse nationale, soit, de manière plus générale, en cas de remise en cause de l'équilibre financier de la sécurité sociale déterminé par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS). Les commissions des affaires sociales seraient alors appelées à se prononcer tous les trimestres sur la base d'un rapport complet présenté par le Gouvernement, sauf, bien entendu, en cas de dépôt d'un projet de loi de financement rectificative.

Ce sont de véritables avancées, que nous réclamions depuis longtemps. Souvenons-nous que nous n'avons pas eu notre mot à dire en 2020 et 2021, au prétexte que le Gouvernement n'avait pas d'obligation de déposer un collectif social. À l'avenir, le Gouvernement ne pourra plus considérer qu'il peut agir sans expression formelle des deux assemblées sur la situation des comptes sociaux et sur les mesures qu'il envisage de prendre, ou non, pour y répondre.

De plus, l'Assemblée nationale a repris d'autres avancées contenues dans le texte adopté par le Sénat en première lecture : ainsi de la création d'un article liminaire des futures lois d'approbation des comptes de la sécurité sociale, qui donnera un point de comparaison entre la prévision et l'exécution du budget pour l'ensemble des administrations de sécurité sociale, au-delà du seul périmètre des LFSS. Je songe également à l'obligation pour le Gouvernement de répondre aux commissions des affaires sociales dans un standard facilement exploitable et réutilisable. Cette disposition, qui nous permettra de retraiter à notre guise les données du Gouvernement et des organismes de sécurité sociale, est importante. Le Conseil d'État l'avait d'ailleurs souligné dans son avis sur notre proposition de loi organique.

Sur un plan plus symbolique, l'Assemblée nationale a également confirmé l'abandon de l'élévation au niveau organique du « Printemps de l'évaluation », qui lui était réservé.

Le texte de l'Assemblée nationale contient même de véritables positions de compromis sur les deux points qui avaient entraîné l'échec de la CMP.

Ainsi, l'extension du périmètre des LFSS aux mesures relatives à la dette des établissements de santé ou médico-sociaux, à laquelle nous étions opposés, ne concernerait que les mesures ayant un effet sur l'équilibre financier de la sécurité sociale. Autant dire que ces mesures sont d'ores et déjà incluses dans le périmètre des LFSS... Nous avons réussi à convaincre le rapporteur de l'Assemblée nationale de très fortement atténuer son propre dispositif afin d'assurer sa conformité à la Constitution.

Concernant les dotations de la sécurité sociale à divers organismes ou agences, nous sommes parvenus au compromis suivant. Pour toutes ces dotations, le montant prévu en n+1 figurera expressément en annexe. Le Parlement saura donc, en votant l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), quelle part est prévue pour ces financements. De plus, en cas de dépassement de plus de 10 % d'une dotation par rapport au montant prévu, les commissions des affaires sociales seront saisies et informées sans délai par le Gouvernement. Cela ne va pas aussi loin que notre proposition d'un avis en bonne et due forme, mais c'est un réel progrès par rapport à l'opacité actuelle.

Bien entendu, certains de nos apports n'ont pas été repris, comme l'inclusion de l'assurance chômage dans le champ des LFSS, mais il me paraissait difficile de la faire aboutir, compte tenu de l'opposition des partenaires sociaux. C'est également le cas de la « règle d'or » sur l'équilibre financier de la sécurité sociale, à laquelle le Gouvernement était très opposé compte tenu des effets de l'épidémie de covid-19 sur les comptes sociaux.

Quelques mesures de moindre portée sont aussi concernées. D'abord, l'extension aux recettes et au solde de la sécurité sociale du « compteur des écarts » entre la LFSS et la loi de programmation des finances publiques : l'Assemblée nationale ne l'a conservé que pour les dépenses. Ensuite, le principe de non-contraction des recettes et des dépenses, supprimé par l'Assemblée nationale, car le Gouvernement y voyait un obstacle majeur à la prise en compte des remises pharmaceutiques au sein de l'Ondam.

Nous n'avons pas non plus obtenu gain de cause sur la création de certaines annexes, comme les programmes d'efficience des politiques de sécurité sociale (Pepss) qui sont l'équivalent des bleus budgétaires pour les différentes branches, et l'annexe « Médicaments » portée par Mmes Lassarade et Guillotin et M. Henno.

Enfin, je regrette l'abandon de précisions que j'estimais utiles sur le droit d'interrogation du président et des rapporteurs des commissions des affaires sociales auprès des organismes de sécurité sociale. Dans les faits, il nous arrive déjà de formuler de telles demandes, mais la réponse dépend de la bonne volonté des caisses.

Au total, j'estime que le bilan des reprises et des non-reprises penche du bon côté. Pour le dire de manière triviale, le compte y est. Le texte est très proche de ce qu'aurait été celui d'une CMP conclusive, même si l'on peut évidemment regretter l'absence de certaines mesures.

Il est donc préférable d'afficher un accord sur un texte organique qui va définir l'équilibre des pouvoirs entre les institutions de la République en matière de finances sociales pendant plusieurs années. Je mesure également que nous sommes allés au bout du dialogue avec l'Assemblée nationale et le Gouvernement. Autrement dit, des amendements de nouvelle lecture adoptés par le Sénat n'auraient que fort peu de chances d'être repris en lecture définitive, ce qui, dans certains cas, pourrait nuire aux principes que nous voudrions afficher.

C'est pourquoi je vous proposerai d'adopter sans modification le texte adopté par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture. Cela permettrait de clore la navette de façon consensuelle, sans aller jusqu'à donner le dernier mot à l'Assemblée nationale.

Je suis bien conscient qu'il s'agit d'une conclusion peu classique à ce stade de la navette. Il eût mieux valu que l'accord fût trouvé en CMP, mais ce texte que nous examinons constitue, à mes yeux, un honnête compromis entre les versions de l'Assemblée nationale et du Sénat en première lecture.

Je formulerai bien sûr la même proposition pour ce qui concerne la proposition de loi ordinaire, dont le périmètre est beaucoup plus restreint : il s'agit de la saisine pour avis des caisses de sécurité sociale sur le PLFSS. L'Assemblée nationale l'a simplement complétée en nouvelle lecture par quelques coordinations qui ne soulèvent aucune difficulté.

Mme Catherine Deroche , présidente . - Le rapporteur de l'Assemblée nationale s'est montré particulièrement fermé au compromis en CMP, au grand dam de ses propres collègues de la majorité. Mais l'essentiel était de parvenir à un accord.

Mme Élisabeth Doineau , rapporteure générale . - Je tiens à souligner la ténacité de notre rapporteur, et la façon étrange dont les choses se sont déroulées.

La CMP a été le théâtre d'un véritable dialogue de sourds. Notre rapporteur a exposé toutes nos propositions de compromis de manière claire, précise et fidèle. Or le rapporteur de l'Assemblée nationale, Thomas Mesnier, n'en a alors tenu aucun compte dans sa réponse. Les lois organiques sur les LFSS, dont la dernière date de 2005, avaient été adoptées de manière plus consensuelle.

Heureusement, notre rapporteur a persisté, contactant les ministres concernés pour avancer et montrer au rapporteur de l'Assemblée nationale que l'expertise et l'expérience du Sénat pouvaient enrichir et améliorer son texte.

Enfin, les députés de la majorité doivent être conscients que ces outils de gestion sont conçus pour toutes les circonstances politiques, que l'on soit dans la majorité ou dans l'opposition. C'est l'un des éléments essentiels du bicamérisme. Il faut aussi tenir compte des évolutions techniques et opérationnelles.

Je remercie donc le rapporteur, et me félicite que nous soyons parvenus à ce compromis qui n'était pas acquis, c'est le moins que l'on puisse dire, à la sortie de la CMP.

M. René-Paul Savary . - Je souligne, moi aussi, la ténacité de notre rapporteur. Nous aurions pu conclure ce compromis en CMP. Ceci dit, sur le fond, il est inouï d'en arriver à écrire dans la loi organique que l'on étend le périmètre des LFSS à des mesures qui ont une incidence sur l'équilibre financier de la sécurité sociale... Quel pléonasme ! Je ne suis pas sûr que l'avenir nous jugera avec indulgence sur ce point.

Néanmoins, ce texte permet d'avancer. Les rapporteurs recevront des documents plus lisibles, et les comptes des caisses de retraite complémentaire et de l'Unedic figureront dans les annexes, ce qui nous donnera une vision plus globale des comptes sociaux. Je voterai ce texte.

Mme Laurence Cohen . - Le groupe CRCE a voté contre ce texte en première lecture ; sa philosophie n'ayant pas évolué, notre vote ne changera pas non plus. Malgré les différences affichées, il y a bien un accord entre la majorité de droite sénatoriale et la majorité LREM pour réduire les dépenses de la sécurité sociale et refuser les nouvelles recettes que nous proposons.

Mme Catherine Deroche , présidente . - L'abandon de la règle d'or méritait peut-être une abstention...

M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur . - Comme le dit la présidente, nous avons tenu compte des positions de votre groupe... Ce n'est pas un accord politicien, mais un accord politique qui a été trouvé entre nos assemblées. Le contrôle parlementaire est important. Les majorités passent, mais les assemblées demeurent.

Mme Laurence Cohen . - Je ne pense pas que cet accord soit politicien : j'observe simplement que vous avez un accord politique au fond. C'est bien là que résident nos divergences !

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE

Article 1 er

L'article 1 er est adopté sans modification.

Article 2

L'article 2 est adopté sans modification.

Article 3

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 3 bis

L'article 3 bis est adopté sans modification.

Article 3 ter

L'article 3 ter est adopté sans modification.

Article 3 quater

L'article 3 quater est adopté sans modification.

Article 3 quinquies A (supprimé)

La suppression de l'article 3 quinquies A est maintenue.

Article 3 quinquies

L'article 3 quinquies est adopté sans modification.

Article 4

L'article 4 est adopté sans modification.

La proposition de loi organique est adoptée sans modification.

EXAMEN DES ARTICLES DE LA PROPOSITION DE LOI

Article 1 er

L'article 1 er est adopté sans modification.

Article 1 er bis (nouveau)

L'article 1 er bis est adopté sans modification.

La proposition de loi est adoptée sans modification .

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