N° 413

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 8 mars 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi
relative aux
outils de lutte contre la désertification médicale des collectivités,

Par M. Daniel CHASSEING,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Deroche, présidente ; Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale ; M. Philippe Mouiller, Mme Chantal Deseyne, MM. Alain Milon, Bernard Jomier, Mme Monique Lubin, MM. Olivier Henno, Martin Lévrier, Mmes Laurence Cohen, Véronique Guillotin, M. Daniel Chasseing, Mme Raymonde Poncet Monge, vice-présidents ; Mmes Florence Lassarade, Frédérique Puissat, M. Jean Sol, Mmes Corinne Féret, Jocelyne Guidez, secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mme Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Laurent Burgoa, Jean-Noël Cardoux, Mmes Catherine Conconne, Annie Delmont-Koropoulis, Brigitte Devésa, MM. Alain Duffourg, Jean-Luc Fichet, Mmes Frédérique Gerbaud, Pascale Gruny, MM. Abdallah Hassani, Xavier Iacovelli, Mmes Corinne Imbert, Annick Jacquemet, M. Jean-Marie Janssens, Mmes Victoire Jasmin, Annie Le Houerou, Viviane Malet, Colette Mélot, Michelle Meunier, Brigitte Micouleau, Annick Petrus, Émilienne Poumirol, Catherine Procaccia, Marie-Pierre Richer, Laurence Rossignol, M. René-Paul Savary, Mme Nadia Sollogoub, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Mélanie Vogel.

Voir les numéros :

Sénat :

102 et 414 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

La désertification médicale s'accélère partout en France, mais frappe les territoires de manière différenciée. Afin de promouvoir un égal accès aux soins sur tout le territoire, les solutions nationales doivent être complétées par des initiatives locales.

La proposition de loi, qui vise à autoriser la mise à disposition de fonctionnaires territoriaux auprès de cabinets médicaux ou de maisons de santé, a été adoptée par la commission.

I. EN RÉPONSE À LA DÉSERTIFICATION MÉDICALE, DIVERS DISPOSITIFS EXISTENT, PRINCIPALEMENT À L'ÉCHELLE NATIONALE

A. UNE INADÉQUATION ENTRE OFFRE ET DEMANDE DE SOINS EST À L'ORIGINE DE DIFFICULTÉS D'ACCÈS AUX SOINS

1. Une demande de soins dynamique peine à être satisfaite par une démographie médicale déclinante

Depuis 2010, la France connaît un « effet ciseaux » entre offre et demande de soins. La conjonction d'une hausse de la demande de soins et d'une stagnation, voire d'une baisse, de l'offre de soins pose le défi de l'accès aux soins sur de nombreux territoires.

D'une part, la demande de soins tend à augmenter sous l'effet d'une démographie dynamique mais vieillissante : la population française s'est accrue de 2,5 millions d'habitants depuis 2010, et son âge moyen est en hausse de 2 ans sur la période.

D'autre part, l'offre de soins tend à décroître, notamment du fait du numerus clausus en vigueur de 1971 à 2019, qui a eu pour effet de déformer la pyramide des âges médicale, les cohortes formées avant son instauration étant plus nombreuses que les suivantes. Les départs à la retraite progressifs des générations de médecins formées avant l'instauration du numerus clausus expliquent donc une démographie médicale déclinante. Avec 214 000 médecins de moins de 70 ans en activité, la France a perdu 2 000 médecins depuis 2016, soit une baisse de 1 % des effectifs. Cette diminution est particulièrement marquée chez les généralistes, dont les effectifs ont chuté de 100 000 en 2012 à 94 500 en 2021, soit une baisse de 5,6 %.

2. Des difficultés d'accès aux soins aggravées par une répartition insuffisamment égalitaire des médecins sur le territoire

L'effet ciseaux entre offre et demande de soins provoque des difficultés d'accès aux soins différenciées selon les territoires.

L'accessibilité potentielle localisée (APL), qui chiffre le nombre de consultations disponibles par an et par habitant sur chaque territoire, permet de quantifier la désertification médicale. Dans 86 départements, l'APL a diminué depuis 2015, reflétant une accessibilité médicale en recul. Dans 8 départements, la baisse de l'APL excède 15 % et est donc particulièrement préoccupante.

8,9 millions d'habitants (13 % de la population) vivent dans une commune dont l'APL est inférieure à 2,5 consultations de généralistes par an en 2021 et disposent donc d'une offre médicale insuffisante.

Les difficultés d'accès aux soins sont aggravées par une répartition insuffisamment égalitaire des médecins sur le territoire. Ainsi, la densité de médecins généralistes pour 100 000 habitants atteint 161 en Provence-Alpes-Côte d'Azur contre 110 en Centre - Val de Loire, et celle de spécialistes varie entre 72 en Guyane et 229 en Île-de-France.

APL aux généralistes par commune, en 2021

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données DREES

APL aux généralistes par département, en 2015

APL aux généralistes par département, en 2021

Source : Commission des affaires sociales du Sénat d'après données DREES