ARTICLE 12 - Aménagement du plafonnement des cotisations de taxe d'habitation en fonction du revenu

Commentaire : Cet article a pour objet de réduire, à compter des impositions établies au titre de 1996, le revenu pris en compte pour le calcul du plafonnement de la cotisation de taxe d'habitation institué par l'article 1414 C du code général des impôts.

Cet article, qui modifie l'un des dispositifs de dégrèvement de la taxe d'habitation (I), est également l'un des instruments permettant de stabiliser le coût pour l'État des dégrèvements d'impôts locaux à compter de l'exercice 1996 (II).

I - LES MÉCANISMES D'ALLÉGEMENT DE LA TAXE D'HABITATION

Ils se répartissent entre les exonérations et les dégrèvements.

A. LES EXONÉRATIONS

L'article 1414-1 du code général des impôts prévoit une exonération totale de taxe d'habitation pour les personnes qui, au titre de l'année précédant celle de l'imposition à la taxe d'habitation, n'étaient pas imposables à l'impôt sur le revenu et qui rentrent dans l'une des cinq catégories suivantes :

- les titulaires de l'allocation supplémentaire du fonds national de solidarité (FNS) ;

- les personnes âgées de plus de 60 ans

- les veufs et les veuves ;

- les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) ;

- les infirmes et les invalides qui ne peuvent subvenir à leurs besoins par leur travail.

Le coût total de ces exonérations pour l'État s'est élevé à 4,2 milliards de francs en 1992, à 5,8 milliards de francs en 1993, à 6,2 milliards de francs en 1994 et est estimé à 6,6 milliards de francs en 1995.

On rappellera que ce coût est relativement bien maîtrisé dans la mesure où la compensation versée aux collectivités locales est égale aux bases exonérées multipliées par le taux de taxe d'habitation gelé à son niveau de 1991 (article 21 de la loi de finances initiale pour 1992).

B. LES DÉGRÈVEMENT

• Le dégrèvement d'office total (Article 1414-III et IV du code général des impôts)

Les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion au 1er janvier de l'année d'imposition ou qui en deviennent attributaires avant la date limite de paiement de la taxe d'habitation, sont dégrevés d'office de ladite taxe afférente à leur habitation principale lorsqu'ils l'occupent dans les conditions prévues à l'article 1390 du code général des impôts, c'est-à-dire seuls, avec leur conjoint ou avec des personnes à charge.

A compter des impositions établies au titre de 1994, les contribuables âgés de plus de 60 ans au 1 er janvier de l'année d'imposition, ainsi que les veufs et les veuves sans condition d'âge qui ne sont pas imposables à l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente au sens de l'article 1417 du code général des impôts sont également dégrevés totalement de la taxe d'habitation afférente à leur habitation principale lorsqu'ils l'occupent :

- avec un ou plusieurs enfants majeurs ;

- inscrit(s) comme demandeurs(s) d'emploi ;

- et ne disposant pas de ressources supérieures au revenu minimum d'insertion.

• Les dégrèvements d'office partiels

Il en existe de trois ordres.

• Les contribuables âgés de moins de 60 ans, non passibles de l'impôt sur le revenu (article 1414 A du code général des impôts).

Les contribuables qui occupent leur habitation principale dans les conditions prévues à l'article 1390 du code général des impôts et qui, au titre de l'année précédente, n'étaient pas passibles de l'impôt sur le revenu, sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation y afférente, à concurrence du montant l'imposition excédant une certaine limite qui est fixée chaque année proportionnellement à la variation de la cotisation moyenne de taxe d'habitation constatée l'année précédente au niveau national. Cette limite est de 1.872 francs en 1995 (43 ( * )) .

• Les contribuables faiblement imposés à l'impôt sur le revenu (article 1414 B du code général des impôts).

Les contribuables qui occupent leur habitation principale dans les conditions prévues à l'article 1390 du code général des impôts et dont la cotisation d'impôt sur le revenu, au titre de l'année précédente, n'excède pas 1.750 francs sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation y afférente à concurrence de 50 % du montant de l'imposition qui excède la limite de 1.872 francs.

• Les autres contribuables (article 1414 C du code général des impôts)

Les redevables autres que ceux visés aux articles 1414, 1414 A et 1414 B du code général des impôts dont la cotisation d'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente n'excède pas un seuil fixé en 1995 à 16.937 francs (44 ( * )) sont dégrevés d'office de la taxe d'habitation afférente à leur habitation Principale pour la fraction de leur cotisation qui excède 3,4 % de leur revenu. Toutefois, ce dégrèvement ne peut excéder 50 % du montant de l'imposition qui excède la limite de 1.872 francs.

Le revenu s'entend du montant net des revenus et plus-values retenus pour l'établissement de l'impôt sur le revenu, au titre de l'année précédente, des personnes au nom desquelles la taxe d'habitation est établie ; il est majoré, le cas échéant, des revenus soumis à l'impôt sur le revenu à l'étranger. Lorsque les revenus du redevable de la taxe d'habitation sont imposables à l'impôt sur le revenu au nom d'une autre personne, le revenu est celui de cette personne.

Exemple de dégrèvement placé sous le régime de l'article 1414 C du code général des impôts

Cotisation de taxe d'habitation émise au titre de 1995 : 3.000 francs

Revenu du redevable au titre de 1994 : 60.000 francs

Plafonnement à 3,4% du revenu : 60.000 x 0,034 = 2.040 francs

Le dégrèvement devrait être de 3.000 - 2.040 = 960 francs

Il est toutefois limité à 50 % du montant de cotisation qui excède 1.872 francs soit : 3.000 - 1.872/2 = 564 francs.

La cotisation après dégrèvement s'établit donc finalement à :

3.000 - 564 = 2.436 francs.

Le coût total des dégrèvements d'office pour l'État atteignent près de 6 milliards de francs en 1995.

Évolution des dégrèvements d'office de taxe d'habitation depuis 1990

Source : Ministère de l'Economie et des finances

II - UN INSTRUMENT DE STABILISATION DU COÛT POUR L'ÉTAT DES DÉGRÈVEMENTS D'IMPÔTS LOCAUX

Le présent article, à compter des impositions établies au titre de 1996 :


• ramène de 16.937 francs à 13.300 francs le plafond de cotisation d'impôt sur le revenu ouvrant droit au dégrèvement partiel institué par l'article 1414 C du code général des impôts ;


• supprime l'indexation annuelle de ce plafond sur la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu. L'abaissement du seuil à 13.300 francs fait sortir, en 1996,226.000 contribuables du dispositif.

Les conséquences de cet abaissement en matière de revenus éligibles au dégrèvement de l'article 1414 C du code général des impôts sont retracées dans les tableaux ci-après :

Dispositif actuel reconduit pour 1996

Plafond actualisé pour 1996 : 17.242 francs au lieu de 16.937 francs pour 1995

(En francs)

Dispositif proposé - plafond 13.300 francs non indexé

(En francs)

Source : Ministère de l'Économie et des finances

Du point de vue de l'État, le gain réalisé en 1996 serait de 338 millions de francs, ce qui permet de fixer le coût prévisionnel des dégrèvements d'impôts locaux en 1996 à 34.462 millions de francs soit à un niveau à peu près identique à celui inscrit dans le projet de loi de finances initiale pour 1995 (34.469 millions de francs).

La mesure ainsi proposée vient, de ce point de vue, en complément de celles prévues par l'article 10 du présent projet de loi de finances :

- la reconduction en 1996 et les années suivantes, du dispositif de l'article 17 de la loi de finances initiale pour 1995 qui a relevé le plafonnement de la cotisation de taxe professionnelle par rapport à la valeur ajoutée à 3,8 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est compris entre 140 millions de francs et 500 millions de francs et à 4 % pour celles dont le chiffre d'affaires excède 500 millions de francs ;

- la neutralisation du coût pour l'État de l'augmentation de la pression fiscale décidée par les collectivités locales, le dégrèvement de taxe professionnelle accordé aux entreprises étant désormais déterminé en multipliant les bases nettes de l'impôt par le taux appliqué par la collectivité en 1995 ou le taux de l'année d'imposition, s'il est inférieur.

A plus long terme, le gain escompté par l'État peut être estimé, en francs constants 1995, au coût du plafonnement lui-même, soit 3,1 milliards de francs. En effet, l'absence de revalorisation annuelle du seuil, figé à 13.300 francs, aura pour effet une substitution progressive du mécanisme de l'article 1414 B du code général des impôts (seuil de cotisation d'impôt sur le revenu fixé à 1.750 francs en 1995 et indexé sur le barème) à celui de l'article 1414 C.

III - LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le dispositif proposé par le présent article procède d'une certaine prudence. Au sein de la commission mixte élus administration sur le pacte de stabilité, tant les élus locaux que le gouvernement sont tombés d'accord pour dire que l'ajustement du coût pour l'État des dégrèvements d'impôts locaux devait prioritairement être opéré sur les dégrèvements de taxe professionnelle.

La crainte exprimée de part et d'autre était de toucher les catégories sociales incontestablement défavorisées et qui se seraient subitement trouvées confrontées à un relèvement considérable de leur cotisation de taxe d'habitation. Le principe même du consentement à l'impôt risquait d'être ainsi mis en cause.

Le secrétaire d'État au budget du précédent gouvernement, M. François d'Aubert, devait ainsi déclarer devant le Comité des finances locales, le 19 septembre dernier :

"S'agissant des dégrèvements en matière de taxe d'habitation, le gouvernement a retenu l'hypothèse d'un léger recentrage du dispositif.

"Ces dégrèvements sont pour une part importante motivés par des considérations sociales : il en va ainsi notamment des dégrèvements accordés aux bénéficiaires du RMI, aux contribuables non imposables à l'impôt sur le revenu, ou aux contribuables dont la cotisation d'impôt sur le revenu n'excède pas 1.750 francs.

"En outre, le nombre des bénéficiaires de ces dégrèvements est élevé. Ainsi par exemple, le dégrèvement prévu en faveur des contribuables dont la cotisation d'impôt sur le revenu n'excède pas 1.750 francs concerne plus de 500.000 personnes.

"Dès lors, il a été décidé de ne pas modifier les dégrèvements accordés aux contribuables dont la cotisation d'impôt sur le revenu est inférieure à 1. 750 francs.

"Le gouvernement a préféré aménager le dispositif de plafonnement de la taxe d'habitation à 3,4 % du revenu en vue de le recentrer sur les contribuables modestes".

Votre commission approuve bien sûr cette prudence mais note toutefois avec inquiétude qu'aucune mesure précise n'a été faite de la progression individuelle des cotisations de taxe d'habitation pour les personnes sortant, en 1996, du dispositif de l'article 1414 C du code général des impôts.

Il ne faudrait pas que l'application du mécanisme de réduction du plafond de cotisation d'impôt sur le revenu aboutisse à accroître trop fortement l'effort du contribuable local et suscite ainsi des tensions insupportables entre les collectivités et leurs mandants.

Votre commission souhaite donc que des informations plus précises soient apportées à ce sujet à la Haute Assemblée par le gouvernement lors de l'examen du présent article.

Décision de la commission : Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 43 Cette limite est révisée, chaque année, proportionnellement à la variation de la cotisation moyenne de taxe d'habitation constatée, l'année précédente, au niveau national.

* 44 Cette limite est indexée, chaque année, comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu.

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