N° 133

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 13 décembre 1995.

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 décembre 1995.

RAPPORT SUPPLÉMENTAIRE

FAIT

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur la proposition de résolution, présentée en application de l'article 73 bis du Règlement par M. René TRÉGOUËT sur :

- la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l' interconnexion dans le secteur des télécommunications : garantir le service universel et l 'interopérabilité en appliquant les principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP) (n° E-467), et le corrigendum (n° E-507),

- le projet de directive de la Commission modifiant la directive de la Commission n° 90/388/CEE et concernant l 'ouverture complète du marché des télécommunications à la concurrence (n° E-508),

- et le projet de directive de la Commission modifiant la directive de la Commission n° 90/388/CEE en ce qui concerne les communications mobiles et personnelles (n° E-509),

Par M. Pierre HERISSON,

Sénateur.

(1) (1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Gérard Larcher, Henri Revol, Jean Huchon, Fernand Tardy, vice-présidents ; Gérard César, William Chervy, Jean-Paul Émin, Louis Minetti, Louis Moinard, secrétaires ; Louis Althapé, Alphonse Arzel, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Georges Berchet, Jean Besson, Claude Billard. Marcel Bony, Jean Boyer, Jacques Braconnier, Gérard Braun, Dominique Braye, Michel Charzat, Marcel-Pierre Cleach, Roland Courteau, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Fernand Demilly, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Jacques Dominati, Michel Doublet, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Jean-Paul Emorine, Léon Fatous, Philippe François, Aubert Garcia, François Gerbaud, Charles Ginésy, Jean Grandon, Francis Grignon, Georges Gruillot, Claude Haut, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment. Bernard Hugo. Roger Husson, Bernard Joly, Edmond Lauret, Jean-François Le Grand. Félix Leyzour, Kléber Malécot, Jacques de Menou, Louis Mercier, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean-Marc Pastor, Jean Pépin, Daniel Percheron, Jean Peyrafitte, Alain Pluchet. Jean Pourchet, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Roger Rigaudière, Roger Rinchet, Jean-Jacques Robert, Jacques Rocca Serra, Josselin de Rohan, René Rouquet, Raymond Soucaret, Michel Souplet, Jacques Sourdille, André Vallet.

Mesdames, Messieurs,

Sur le fondement du rapport n° 112 présenté par notre collègue M. Pierre Hérisson (Sénat ; 1995-1996) sur la proposition de résolution n° 91 de M. René Trégouët, approuvée par la délégation pour l'Union européenne, votre commission des Affaires économiques a adopté, le 6 décembre dernier, une proposition de résolution relative aux propositions d'actes communautaires E-467, E-508 et E-509.

Onze amendements ont été déposés sur le texte de la commission. Avant d'adopter sa résolution définitive, celle-ci a souhaité entendre M. François Fillon, Ministre chargé de la Poste, des Télécommunications et de l'Espace, sur les différents points abordés par la proposition de résolution.

Pour donner la plus large audience à ses débats, la commission a convié l'ensemble des membres du Sénat à y participer.

Le présent rapport établit un bref compte rendu de cette audition à laquelle a assisté M. René Monory, Président du Sénat, et retrace les discussions auxquelles ont donné lieu ensuite, au sein de votre commission, l'examen des amendements susvisés, ainsi que l'adoption de sa résolution définitive.

I. AUDITION DE M. FRANÇOIS FILLON, MINISTRE DÉLÉGUÉ, CHARGÉ DE LA POSTE, DES TÉLÉCOMMUNICATIONS ET DE L'ESPACE

Au cours d'une séance tenue le mercredi 13 décembre dans l'après-midi, la commission des affaires économiques a procédé, sous la présidence de M. Jean François-Poncet, Président, en présence de M. René Monory, Président du Sénat et des membres des autres commissions ayant répondu à son invitation, à l'audition M. François Fillon, ministre délégué auprès du ministre de l'industrie, de la poste et des télécommunications, chargé de la poste des télécommunications et de l'espace.

Le ministre a, tout d'abord, fait part de sa satisfaction de pouvoir s'exprimer devant la commission pour évoquer la proposition de résolution présentée, au nom de la commission, par M. Pierre Hérisson, à partir de celle déposée par M. René Trégouët. Il a ensuite procédé à un bref rappel du cadre général de son action.

Il a indiqué que, afin de préparer la libéralisation complète du secteur des télécommunications pour le 1er janvier 1998, conformément aux échéances communautaires, son principal objectif était de construire un modèle économique conciliant les principes d'un marché ouvert et les exigences du service public.

Il a précisé qu'à ce jour il existait deux modèles de libéralisation : le modèle anglais -très libéral- et le modèle allemand -où le cadre juridique est très souple mais où les pouvoirs publics structurent fortement le marché- et qu'il s'agissait de mettre en place un modèle français. Selon lui, ce dernier doit être fondé sur la reconnaissance du fait que la concurrence est nécessaire et favorable à l'usager tout en s'attachant à assurer la pérennité de la notion de service public et de la péréquation des tarifs.

M. François Fillon, ministre délégué, chargé de la poste, des télécommunications et de l'espace, a ensuite confirmé les principales étapes du calendrier qu'il avait arrêté pour mettre en oeuvre cette politique : élaboration d'un document d'orientation sur la nouvelle réglementation des télécommunications, consultation publique sur ce document, élaboration d'un projet de loi à partir du résultat de cette consultation, soumission de ce texte au Parlement au printemps 1996.

Il a ensuite estimé qu'il convenait, parallèlement à cette oeuvre normative, d'assurer une dynamisation de la stratégie de France Télécom car même si l'opérateur possédait d'indéniables atouts, il lui fallait encore acquérir une « agilité concurrentielle ». Il a fait valoir que le projet d'entreprise qui sera présenté prochainement par M. Michel Bon, président de France Télécom, et que l'évolution du statut de l'opérateur devaient s'inscrire dans cette perspective, tout comme l'alliance entre France Télécom et Deutsche-Telekom (Atlas) et « l'accord Phoenix » entre ces derniers et Sprint, troisième opérateur américain.

Sur ces derniers points, le ministre a, d'une part, indiqué que la Commission européenne avait actuellement engagé sur l'accord Atlas une procédure de consultation publique qui devrait lui permettre de confirmer son accord provisoire au printemps 1996 mais qu'en tout état de cause France Télécom et Deutsche-Telekom étaient d'ores et déjà autorisés à commercialiser les produits « Atlas » dès le 1er janvier 1996 et, d'autre part, fait savoir qu'à la suite des entretiens qu'il avait eus récemment aux États-unis, on pouvait être raisonnablement « optimiste » quant à la position que prendrait, dans ce pays, la commission fédérale de la communication (FCC) quant à l'acceptation de l'accord Phoenix.

Puis, s'attachant à décrire la position du Gouvernement sur les principaux points de la proposition de résolution présentée par M. Pierre Hérisson, M. François Fillon a, en premier lieu, précisé que :

- la proposition de directive sur l'interconnexion et le service universel n'avait jusqu'à maintenant fait l'objet que d'un bref échange de vues entre les ministres de l'Union et que le conseil du 21 mars prochain serait, sur ces sujets, décisif ;

- les projets de directives de la Commission de Bruxelles sur les communications mobiles et sur la libéralisation du marché avaient fait l'objet d'un « débat nourri » lors du Conseil du 27 novembre, mais que ce débat n'en était pas pour autant clos puisque la France devait faire part de ses observations, par écrit. A cet égard, le ministre a informé la commission que ces observation sauraient dû être communiquées à Bruxelles avant le 10 décembre, mais qu'il avait souhaité entendre le Sénat avant de les formuler.

Puis, il a fait valoir qu'il était, tout comme le Sénat, très attentif aux conditions d'utilisation par la Commission de l'article 90-3 du Traité sur l'Union européenne et de la primauté qu'il convenait de reconnaître aux directives d'harmonisation prises par le Conseil

Il a souhaité que ce dossier puisse se voir apporter une solution satisfaisante lors de la révision institutionnelle prévue l'an prochain.

Abordant ensuite le sujet du service public, dit « service universel » dans la terminologie communautaire, M. François Fillon, ministre délégué, chargé de la poste, des télécommunications et de l'espace, a considéré qu'il constituait le coeur du débat car il mettait enjeu une certaine conception de l'égalité et de la solidarité. Selon lui, tous les Français doivent pouvoir avoir accès au téléphone au même prix sur tout le territoire, ce qui implique, notamment, une péréquation du prix des services d'intérêt public.

Le ministre a souligné que la France était « en pointe » sur ce sujet à Bruxelles et qu'au Conseil européen du 13 juin dernier, elle avait fait adopté un certain nombre de principes aboutissant à faire reconnaître qu'une partie de la définition du service universel relevait des règles de la subsidiarité. En effet, la conception du service universel en France est ambitieuse puisqu'elle enveloppe, outre la fourniture d'un service téléphonique de qualité à un prix abordable, la mise à disposition d'un certain nombre de prestations d'intérêt public (cabines téléphoniques, gratuité des appels d'urgence, annuaires...) et laisse ouverte la Possibilité d'ajouter à ces exigences premières les offres que devraient permettre les nouvelles technologies.

Pour atteindre un tel objectif, il est actuellement prévu que France Télécom soit chargé d'assurer ce service universel sur l'ensemble du territoire, que les nouveaux opérateurs souhaitant assurer le service universel le proposent également sur tout le territoire et que les nouveaux opérateurs, non soumis aux obligations de service universel, versent une compensation financière.

Le ministre a fait valoir que le mécanisme de versement de cette compensation lui paraissait relever de la subsidiarité et que, dans cet esprit, il était en accord avec la proposition de résolution présentée par la commission, en ce qui concerne du calcul du coût du service universel. Il a ajouté, à ce propos, qu'un groupe d'experts cherchaient actuellement, à sa demande, à évaluer ce coût car la Plus grande transparence était nécessaire en la matière.

Concernant le rééquilibrage des tarifs, également évoqué dans la Proposition de résolution du Sénat, le ministre a déclaré qu'une telle opération se devait d'être progressive et qu'il avait fait savoir à la Commission européenne que l'objectif d'un rééquilibrage complet au 1er janvier 1998 serait politiquement et socialement irréaliste. Il s'est, en conséquence, dit en total accord avec les recommandations présentées sur ce point par la proposition de résolution retenue Par la commission.

Sur la question de la réciprocité de l'ouverture des marchés des télécommunications, il a fait remarquer que c'était devant l'insistance de la France que des dispositions avaient été inscrites en ce sens dans la proposition de directive sur l'interconnexion et dans celle relative aux licences. Il a ajouté que la France veillerait à ce qu'elle soit maintenue dans la position commune du Conseil et appliquée en cas d'échec des négociations menées dans le cadre de l'organisation mondiale du commerce.

En guise de conclusion, M. François Fillon a estimé que la libéralisation du secteur des télécommunications était une chance pour les usagers et pour l'emploi. Il a ajouté que France Télécom disposait d'immenses atouts pour se maintenir au premier rang mondial. Il a toutefois insisté sur le fait que cette libéralisation aurait à être, à la fois, maîtrisée et équitable.

A l'issue de cet exposé, M. Pierre Hérisson, rapporteur, a demandé au ministre quelle était sa position à l'égard de la récente proposition de M. Karel Van Miert, commissaire européen, relative à l'élaboration d'une « charte européenne des services publics » et quelles étaient les principales différences qui lui semblaient distinguer le modèle allemand du modèle français de libéralisation des télécommunications. Il a également souhaité savoir si les entretiens que M. François Fillon, ministre délégué, chargé de la poste, des télécommunications et de l'espace, avait tenus récemment aux États-unis lui avaient laissé supposer que l'approbation de l'accord Phénix par la FCC pourrait être soumise à une condition d'évolution du statut de France Télécom.

Sur ce dernier point, le ministre a indiqué qu'il n'y aurait aucune condition statutaire à l'approbation de la FCC mais, qu'à l'inverse, France Télécom n'aurait eu nulle chance d'être autorisée à prendre une part du capital de Sprint si la France ne s'était pas engagée dans la voie de la libéralisation du secteur des télécommunications.

Selon lui, la différence essentielle entre le modèle allemand et le modèle français de libéralisation réside dans le fait que les Allemands ont décidé une privatisation de leur opérateur national, sous la seule réserve de la conservation par l'État d'une minorité de blocage, alors qu'en France il est simplement envisagé de transformer France Télécom en une société anonyme dans laquelle l'État conserverait la majorité.

Il a, par ailleurs, estimé que l'idée d'une réflexion européenne sur la notion de service public était une bonne idée mais qu'il convenait, au regard du haut niveau de service public en France, de prendre garde au risque d'une définition européenne fondée sur la « moyenne » des différentes exigences nationales. Il lui est apparu que sur ce point il était préférable, au-delà de la délimitation d'un minimum européen, de laisser chaque État-membre fixer les caractéristiques précises du service public téléphonique qu'il entend voir assurer sur son territoire, en application du principe de subsidiarité.

M. Pierre Laffitte a alors fait remarquer qu'un niveau de service universel beaucoup plus élevé en France que dans les autres pays de l'Union européenne risquerait de favoriser des détournements de trafics et des délocalisations d'activités téléphoniques à l'étranger. Il s'est, en conséquence, demandé s'il ne serait pas préférable d'envisager l'inscription d'une définition ambitieuse du service universel dans les traités fondateurs de l'Union européenne. Il a aussi évoquer les problèmes que posaient les actuels modes de gestion des fréquences.

En réponse M. François Fillon a fait valoir que la recherche d'une harmonisation, sur le plan européen, du champ du service universel pourrait engendrer d'importantes difficultés pour la France dès lors que tous les pays de la Communauté n'ont pas les mêmes préoccupations, ni le même niveau d'exigences en la matière. Il s'est par ailleurs déclaré favorable à ce que soient ajoutées, dans la loi de réglementation des télécommunications, des dispositions permettant la création d'une « agence de gestion des fréquences », l'actuelle dispersion des responsabilités dans ce domaine étant, à ses yeux, source d'un certain « gaspillage » de cette ressource rare. A son sens, une telle agence pourrait être chargée de veiller à une utilisation plus rationnelle de la ressource en mettant en Place une gestion prospective du spectre. 11 a, à ce propos, précisé qu'il n'avait Pas l'intention de permettre aux chaînes de télévision d'utiliser les fréquences hertziennes pour concurrencer le câble.

Mme Danielle Pourtaud a ensuite déclaré que la logique appliquée par la Commission de Bruxelles conduisait à supprimer les entraves à la concurrence sans se préoccuper du maintien de la « cohésion économique et sociale », alors que cet objectif avait été fixé à l'Union européenne par le traité de Maastricht. Elle a estimé que le document relatif à la réforme du droit des télécommunications, actuellement soumis à consultation publique, tendait à considérer les directives européennes en cours d'examen comme adoptées.

Elle s'est demandée si, pour maintenir la qualité du service public français, il ne serait pas mieux de préciser la notion de service universel dans le traité sur l'Union européenne. Elle a vivement critiqué le trop fréquent usage par la Commission européenne de l'article 90-3 du Traité, considérant que cette dernière ne devait pas « légiférer seule ». Elle s'est dite favorable à l'Europe des télécommunications, mais s'est inquiétée de sa « marche accélérée vers la dérégulation ». Elle a souhaité obtenir des précisions sur le calendrier réel de libéralisation des services téléphoniques, certaines décisions récentes anticipant, selon elle, sur les dates prévues pour l'ouverture à la concurrence des infrastructures alternatives.

Évoquant l'évolution statutaire de France Télécom, elle a jugé indispensable qu'il n'y ait pas de remise en cause de l'actuel statut des Personnels. Elle a également fait part de sa préoccupation de voir instaurer un régime de licence permettant de s'assurer que les nouveaux opérateurs disposeraient d'une assise suffisante pour respecter leurs obligations

Enfin, après avoir souligné l'importance des péréquations tarifaires effectuées par France Télécom, elle s'est inquiétée des perspectives d'augmentation du montant de l'abonnement que recelaient certaines des directives communautaires examinées.

Puis M. Gérard Larcher, pour souligner le niveau élevé d'exigences du service universel envisagé en France au regard de celui prévu par ses principaux partenaires, a lu l'article 17 du projet de loi allemand relatif à la libéralisation des télécommunications, qui définit cette notion en droit germanique.

Il s'est demandé si la solution consistant à assurer la péréquation tarifaire du service universel par la perception de droits d'accès au réseau de l'opérateur historique ne risquait pas d'être pénalisée par les progrès technologiques, ceux-ci paraissant favoriser la réduction du rôle des infrastructures filaires et le développement concomitant des liaisons hertziennes pour tout ce qui concerne la téléphonie de base. Il a, à ce propos, fait allusion à l'importance que la téléphonie mobile joue en Suède, en matière d'aménagement du territoire. Il a également souhaité savoir quelle réflexion inspirait au ministre l'affirmation selon laquelle les lois du marché pouvaient parfaitement, si elles étaient encadrées, permettre d'assurer le service universel.

M. Alain Pluchet a fait part des préoccupations que lui inspiraient les mouvements sociaux dans les télécommunications, estimant que la paralysie de ces dernières ne mettrait en cause la survie même des entreprises de notre pays et a demandé s'il était envisagé d'introduire des garanties à ce sujet.

Faisant observer que le relèvement de l'abonnement téléphonique pourrait vider la « péréquation de son contenu », M. Alain Delfau a estimé qu'en découplant l'ouverture à la concurrence et le changement de statut de l'opérateur public, le Gouvernement prenait les plus grands risques sociaux. Il s'est également inquiété des conséquences que pourrait avoir la création de l'agence des fréquences, envisagée par le ministre sur les compétences du conseil supérieur audiovisuel.

En réponse aux critiques portées à l'encontre de la « logique libérale » de la Commission européenne, M. François Fillon, ministre délégué, chargé de la poste, des télécommunications et de l'espace, a fait valoir que, contrairement à ce que croient beaucoup, la France ne dispose pas du système téléphonique le meilleur et le moins cher du monde. Selon lui, pour certains aspects, il est même non seulement plus cher, mais aussi moins diversifié que d'autres et il n'est pas sûr qu'une comparaison avec celui offert aux États-unis tournerait à son avantage.

Il a ensuite considéré que la définition du service universel envisagée en France n'était nullement minimaliste et qu'il était quelque peu contradictoire, d'une part, de se féliciter du niveau de prestations offert par France Télécom et, d'autre part, de dénigrer la définition du service universel prévue par le Gouvernement, dès lors que celle-ci correspond à l'actuel niveau des prestations téléphoniques de base proposées par France Télécom.

Le ministre a également considéré qu'il n'y avait pas de marche forcée vers la dérégulation dans notre pays, puisque la libéralisation de la téléphonie vocale n'interviendrait pas avant le 1er janvier 1998, date fixée par les textes communautaires. Il a souligné que l'ouverture à la concurrence le 1er juillet 1996 des infrastructures alternatives ne concernerait que les seuls services déjà libéralisés et que la téléphonie de base resterait entièrement du domaine du monopole, jusqu'à l'échéance de 1998.

Il a, par ailleurs, fait valoir que, si, avant le 1er janvier 1998, la France ne construisait pas elle-même de manière équilibrée son propre cadre juridique de libéralisation, elle risquait, ainsi que cela s'était produit dans le domaine du transport aérien, d'être contrainte d'accepter une ouverture à la concurrence impulsée, au coup par coup et de manière quelque peu intempestive, par des décisions de la cour de justice européenne.

Le ministre a ensuite fait observer qu'il avait volontairement distingué le dossier du changement de statut de celui de la libéralisation, pour ouvrir le plus largement possible le dialogue social. Sur ce point, il a souligné qu'il avait confié à M. Michel Bon, président de France Télécom, le soin d'améliorer le dialogue social au sein de l'entreprise publique car celui-ci n'était pas, jusqu'à maintenant, un « modèle du genre ».

Abordant le problème de la péréquation des tarifs, M. François Fillon, ministre délégué, chargé de la poste, des télécommunications et de l'espace, a indiqué qu'il conviendrait d'envisager de faire varier le montant des abonnements en fonction du volume des communications et de prévoir des tarifs spéciaux pour les plus modestes.

Le ministre a considéré qu'il était difficile de savoir aujourd'hui si le dispositif de financement du service universel envisagé pourrait s'adapter à 1 irruption de nouvelles technologies dans le domaine des infrastructures et que, dans l'immédiat, le problème majeur était celui de l'évaluation du coût du service universel. Sur ce point, il a précisé que le groupe d'experts qu'il avait désigné pour évaluer ce coût devait donner son avis en raisonnant sur le réseau tel qu'il est constitué à l'heure actuelle.

En réponse à M. Alain Delfau, il s'est déclaré convaincu de la nécessité de ne pas prendre de retard pour faire rentrer la France dans la société de l'information et a souligné tous les avantages que les « techniques multimédia » pouvaient présenter, notamment dans le domaine de l'accès des plus défavorisés à la culture. Il a également défendu la thèse selon laquelle ces évolutions technologiques pourraient constituer un puissant moyen de réduction de la fracture sociale, mais que, pour cela, il fallait introduire un peu de concurrence et Permettre l'intervention d'investisseurs privés car, dans les années à venir, l'État ne disposerait pas des moyens nécessaires au financement de la totalité des efforts à réaliser dans ce domaine.

Il a conclu son propos en précisant que l'agence des fréquences qu'il appelait de ses voeux avait, dans son esprit, vocation à définir des principes communs, mais que le conseil supérieur de l'audiovisuel continuerait, tout comme à l'heure actuelle, à exercer ses compétences en matière d'attribution des fréquences aux utilisateurs.

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